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Chambre des représentants de Belgique
Séance du samedi 14 avril 1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi portant le budget de l’Etat
pour l’exercice 1832 (département des finances). Second vote des articles. Administration
des postes et secret des lettres (Pirson, Coghen, de Muelenaere),
personnel de l’administration centrale (Coghen, d’Elhoungne, Dumortier, Nothomb, H. de Brouckere, Dubus, Ch. Vilain XIIII), des
contributions directes, des douanes et des accises (Fallon,
Pirson, de Theux, Fallon, de Woelmont, Desmanet de Biesme, Leclercq, H. de Brouckere, Duvivier, Destouvelles, Jullien, Coghen, Duvivier, Leclercq, Destouvelles, d’Elhoungne, Dumortier, Barthélemy), administration de l’enregistrement (d’Elhoungne, Verdussen, d’Elhoungne, Ch. de Brouckere,
Dumortier), services dans les territoires cédés en
raison du traité des 24 articles (Leclercq)
3) Projet de loi portant le budget de l’Etat
pour l’exercice 1832 (département de l’intérieur). Frais d’administration des
provinces (de Theux, Dubus, Lebeau, Destouvelles),
commissaires de district de la Flandre occidentale (Jullien,
Dubus, de Theux, Angillis, Jamme, d’Elhoungne, Barthélemy, de Theux), personnel de l’administration provinciale (de Theux, Corbisier, Gendebien, Dubus, Lebeau, de Theux, Rogier)
(Moniteur belge n°107, du 16 avril 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est
ouverte à midi et demi.
Après l’appel
nominal, M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal, qui est adopté.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DE L’ETAT POUR L’EXERCICE 1832
(DEPARTEMENT DES FINANCES)
L’ordre du jour
est le vote sur l’ensemble du budget des finances.
M. Pirson réclame la parole pour demander une explication à M. le
ministre des finances. Il désire savoir s’il y a des bureaux de poste où l’on
ouvre les lettres. Il se plaint de ce qu’ayant écrit en Hollande, on lui ait
renvoyé copie de sa lettre du ministère de l’intérieur. Il demande si cette
lettre a été arrêtée à la frontière, et il annonce qu’il s’adressera à M. le
ministre de l'intérieur, qui ne se trouve pas en ce moment à la séance, pour
avoir des explications à cet égard.
M. le ministre des finances (M. Coghen). - Une réponse à M. Pirson est nécessaire, car il
s’agit d’un objet très important. Je dois déclarer que je n’ai pas entendu dire
jusqu’ici qu’on décachetât les lettres, et que je n’y prêterai jamais les
mains. J’atteste qu’il n’existe pas ici de cabinet noir, et l’employé qui se
permettrait de briser des cachets de lettres serait à l’instant renvoyé.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere).
- Il est inutile que M. Pirson s’adresse à M. de Theux, car il n’était pas encore
ministre de l’intérieur à l’époque dont il s’agit. Du reste, je puis le
rassurer moi-même sur la violation du secret de sa lettre. Il est vrai que
copie lui en a été envoyée du ministère de l’intérieur ; mais la lettre avait
été renvoyée, par la personne même à qui il avait écrit, à un fonctionnaire de
sa province, qui l’a communiquée au ministère. (On rit.) Vous voyez donc qu’il n’y a eu aucune violation du secret
des lettres.
- On passe à la deuxième
discussion des réductions en majorations introduites au budget des finances.
Chapitre Ier. - Administration centrale
« Art. 2.
Traitements des employés de l’administration centrale. »
Le ministre avait
demandé une somme de 236,899 fl., sur laquelle la chambre a adopté une
réduction de 36,829.
M. le ministre des finances (M.
Coghen) présente un
amendement tendant à porter la réduction à 27,129 fl. seulement, parce que les
nouveaux renseignements qui ont été donnés l’ont convaincu que l’administration
des contributions ne pourra marcher avec la somme qui a été allouée.
M. d’Elhoungne combat la proposition, et dit que M. le ministre des finances pourra
transférer aux contributions une partie du chiffre de l’administration centrale
de la trésorerie qui se trouve en trop, et qui n’a été adoptée que par suite
d’une erreur de bureau.
M. le ministre des finances (M. Coghen) déclare que, le budget ayant été voté article par
article, il considère comme un devoir de n’opérer aucun transfert.
M. Dumortier
fait la proposition, pour délier M. le ministre de son obligation, de réduire l’allocation
de la trésorerie générale au chiffre de l’année dernière, et de porter les
7,000 fl. excédant sur les contributions.
Plusieurs membres font observer que M. le ministre des finances ne se
trouve pas lié comme il le croit.
M. Dumortier
insiste pour l’adoption de son amendement qui est justifié, dit-il, par la
déclaration de M. le ministre.
M. Nothomb répond qu’on ne peut se prévaloir d’une déclaration
faite par M. le ministre des finances, à laquelle il peut renoncer en entrant
dans ses bureaux, et il combat l’amendement comme entièrement inutile.
M. Dumortier demande
de nouveau la parole.
De toutes parts. - La clôture ! la clôture !
M. Dumortier.
- Eh bien ! je demande la parole contre la clôture. (Rires et murmures d’impatience.) L’orateur persiste dans son
amendement, qu’il regarde comme très utile.
M. le président. - Tenez-vous à votre amendement, M. Dumortier !
M. Dumortier
(avec vivacité) - Oui, certainement !
(On rit.)
M. H. de Brouckere. - Il est pourtant impossible de mettre aux voix un
amendement qui serait complètement inutile : ce serait une absurdité.
M. Dubus. - C’est une simple mention au procès-verbal que
demande M. Dumortier. (Non, non !)
M. Ch. Vilain XIIII propose la question préalable, c’est-à-dire qu’il n’y
a pas lieu à délibérer sur l’amendement.
- Elle est
adoptée.
M. le président se dispose à mettre aux voix la réduction de 36,829 fl. précédemment
adoptée.
Sur la demande de plusieurs
membres, il est procédé à l’appel nominal.
38 membres se
prononcent contre la réduction, et 29 pour. Elle est rejetée.
La réduction de
27,129 fl. proposée par M. le ministre des finances est ensuite mise aux voix
et adoptée.
Chapitre III. - Administration des contributions
directes, douanes et accises, poids et mesures
Article
premier
« Art. 1er.
Traitements et remises des employés de l’administration des contributions
directes, douanes et accises, poids et mesures. »
Il y a sur cet
article une majoration de 26,300 fl., et le chiffre s’en trouve porté à
3,108,635.
M.
Fallon. - Sous le § 1er de cet article, le ministre vous a
demandé la somme de 32,800 fl. pour subvenir aux traitements des directeurs, et
vous avez réduit cet article de 1,000 fl., en fixant ainsi uniformément les
traitements des directeurs à 3,500 fl., sauf 300 fl. en plus pour celui du
Brabant.
Cependant ces
1,000 fl. de réduction avaient une destination qui me paraît tellement
équitable, en bonne règle d’administration, que j’espère encore que, mieux
informés, vous ne persisterez pas à sanctionner ce retranchement, si, comme il
le paraît, ce retranchement ne doit atteindre que les deux directeurs qui ont
précisément le plus de droit à la bienveillance de la chambre, ceux de la
Flandre orientale et de Namur.
Lorsqu’en 1831 il
fut question de fixer définitivement les traitements des directeurs, on les
réduisit à 3,500 fl., et vous venez de nouveau d’admettre ce chiffre ; mais on
considéra alors avec raison que, s’il n’y avait aucun inconvénient de faire
cette réduction, en ce qui regardait ceux des directeurs qui avaient reçu une
augmentation de grade et de salaire depuis la révolution, il n’en était pas de
même des autres directeurs conservés, et personne ne contesta qu’il était juste
de leur conserver le traitement de 4,000 fl.
On considéra qu’il
ne fallait pas les décourager, ni donner l’exemple qu’après 31 ans de service
un fonctionnaire capable, qui avait toujours parfaitement rempli ses fonctions,
pût reculer au lieu d’avancer.
On considéra aussi
que, si ces directeurs venaient à obtenir leur retraite, bien loin de faire une
économie de 1,000 fl., on se hâterait fort inutilement de grever le trésor de
4,000 fl., puisqu’ayant versé à la caisse de retraite une retenue
proportionnelle au traitement de 4,000 fl., ils avaient droit à une pension de
2,000 fl. au moins.
Je conviens avec
mon honorable collègue M. d’Elhoungne que, tant qu’un fonctionnaire est en état
d’exercer ses fonctions, il ne peut forcer le gouvernement à lui donner sa
retraite ; mais il conviendra sans doute avec moi que chacun doit être
récompensé suivant ses œuvres, et qu’il faut par conséquent éviter, dans la
fixation des traitements, que l’ancien fonctionnaire supporte non seulement une
réduction de traitement, mais qu’il soit encore placé dans une condition moins
favorable que ses nouveaux collègues.
Or, voyez,
messieurs, quelle serait la conséquence de cette parcimonieuse réduction de
1,000 fl.
Tandis que les
nouveaux directeurs jouiront d’un traitement de 3,500 fl., ce fonctionnaire,
directeur depuis l’organisation des droits réunis sous le gouvernement
français, et qui a plus de 30 ans de service, ne toucherait qu’un traitement
inférieur à celui de ses nouveaux collègues.
En effet, ces
nouveaux directeurs ne supporteront pas la retenue pour la caisse de retraite
qu’à raison de 3,500 florins, et le directeur de Namur, pour conserver ses
droits à la pension, tels qu’ils existent actuellement, devra supporter cette
retenue, non pas sur 3,500 florins, mais sur 4,000 florins de manière que son
traitement sera réellement moindre que celui de ses égaux en rang.
De
deux choses l’une, cependant : il faut qu’il subisse cette décourageante
condition de supporter une retenue pour un traitement dont il ne jouira pas, ou
bien si, pour la cas de retraite, on ne doit avoir égard qu’au nouveau
traitement de 3,500 florins, il faut que le trésor lui restitue actuellement
tout ce qu’il a payé de trop pendant tout le temps qu’il a joui du traitement
de 4,000 florins.
Il est donc
évident, messieurs, qu’en sanctionnant la réduction de 1,000 florins, nous
posons un antécédent décourageant pour des fonctionnaires qui, pour leurs
anciens services, ont acquis le plus de droit aux égard de la chambre, et cela
sans faire même une économie réelle pour le trésor.
Sous ces nouvelles
considérations, je vous propose, messieurs, de laisser l’association telle
qu’elle a existé pour 1831.
M. Pirson.
- Je suis bien fâché de parler dans un sens contraire à un de mes honorables
collègues que j’aime et que j’estime. Si je ne l’ai pas fait la première fois
qu’il nous a entretenu de sa réclamation, c’était par considération, quoiqu’on
ait pu déjà remarquer que je n’avais pas beaucoup d’égard aux considérations. (On rit.) Mais, aujourd’hui, je me trouve
obligé de dire que l’un des deux directeurs dont M. Fallon vient de plaider la
cause ne mérite pas la préférence qu’il veut lui accorder, car c’est un fraudeur.
(Murmures d’improbation.) Je sais,
messieurs, qu’il protégeait la fraude, et qu’il s’entendait avec un inspecteur
pour faire entrer des bateaux de vin.
- L’orateur ajoute des détails que nous n’avons pu
saisir.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Il me semble que la parole devrait être interdite à
un orateur qui se permet de dire d’aussi graves personnalités contre des
absents. (Oui ! oui !)
M.
Fallon, M. de Woelmont et M.
Desmanet de Biesme demandent la parole.
M. le président. - Ce que nous avons de mieux à faire, c’est de passer outre.
M. Desmanet de Biesme, insistant pour avoir la parole, elle lui est
accordée. Il s’exprime ainsi. - J’ai entendu avec surprise un membre de cette
assemblée se permettre des assertions singulières contre le directeur de Namur.
Quant à moi, messieurs, je dois dire que ce fonctionnaire est un très honnête
homme, et qu’il jouit dans la province d’une haute considération. Je n’ai pas
cru devoir laisser passer sans réponse une pareille accusation.
M. de Woelmont. - Très bien ! très bien !
M. Leclercq
s’oppose à l’amendement de M. Fallon, comme étant contraire au règlement, qui
veut qu’on ne discute une seconde fois que sur un amendement déjà voté.
M. H. de Brouckere demande la question préalable, qui est adoptée.
« Art. 2.
Matériel et dépenses diverses. »
Sur la somme de
306,136 fl., primitivement demandée, la chambre a voté une réduction de 59,480
fl.
M. Duvivier
fait observer que la chambre, en votant la réduction sur les frais de bureau
des directeurs, a perdu de vue qu’outre les commis payés par l’Etat, ils sont
obligés d’avoir des commis particuliers qu’ils paient de leurs frais. Il espère
que la chambre reviendra sur sa décision, et rétablira le chiffre qu’on avait
d’abord porté au budget de ce chef.
M. Destouvelles propose de restreindre la réduction à 52,826 fl., ce qui portera le
chiffre total à 253,310 fl.
Après une
discussion à laquelle prennent part M. Jullien, M. le ministre des finances (M. Coghen), M. Duvivier, M. Leclercq,
M. Destouvelles, M. d’Elhoungne, M. Dumortier et M. Barthélemy, la réduction précédemment adoptée par la chambre est rejetée, et celle
proposée par M. Destouvelles est mise aux voix et adoptée.
- Toutes les
autres réductions sont maintenues.
Vote sur les dispositions légales
Le
chiffre total du budget des finances, augmenté des deux majorations ci-dessus, est
également mis aux voix et adopté.
On passe ensuite à
la discussion de l’amendement de M. dElhoungne., appliqué à l’article premier et ainsi conçu :
« L’administration
de l’enregistrement renseignera le produit de la retenue des 5 p. c. à prélever
à titre d’indemnité sur les recouvrement à opérer pour compte des tiers.
« La
situation de la caisse des dépôts et consignations sera fournie avec le budget
et le compte arrêté par la cour des comptes.
« L’administration
générale ne touchera aucun remise sur les recettes en los-renten ou rentes
remboursables. »
M. Verdussen. - Messieurs, depuis que vous avez eu sous les yeux le
budget des finances, tel que vous l’avez provisoirement arrêté dans votre
séance du 12 de ce mois, je trouve ma tâche plus facile à remplir lorsque je me
propose de parler contre l’amendement présenté par l’honorable M. d’Elhoungne,
qui termine l’article premier de ce budget. En effet, messieurs, il n’est
personne de vous qui, à la simple lecture des trois paragraphes dont se compose
cet amendement, ne doive se demander comment, après la désignation de crédits
ouverts au gouvernement pour couvrir les dépenses du ministère des finances, on
passe subitement à la prescription de quelques mesures règlementaires qui n’ont
rapport qu’à des rentrées en faveur du fic ou à des dépôts et consignations qui
ont été confiés à sa garde. Toutefois, si la seule lecture de cet amendement ne
vous a pas entièrement déterminés à le rejeter, je suis persuadé qu’un examen
plus réfléchi fixera à cet égard votre irrésolution.
D’abord, l’auteur
de l’amendement semble avoir eu en vue de faire rendre compte par le
gouvernement à la représentation nationale du produit de ces 5 p. c. ; et, si
c’est là son idée, je crois qu’il n’a aucunement atteint son but, puisqu’il met
dans sa rédaction l’administration de l’enregistrement à la place du
gouvernement, sans même indiquer à qui le renseignement sera fourni.
J’observer, en
second lieu, que les 5 p. c. dont le renseignement est prescrit forment un
objet de recettes, qui aurait dû être compris dans le budget des voies et
moyens : il s’agit donc de réparer cette omission, et, pour y parvenir,
l’auteur de la proposition impose l’obligation de renseignement le montant de
cette indemnité, sans préciser où ce renseignement trouvera sa place. Certes,
ce ne peut être dans un budget de dépenses ; il faut donc que ce soit, ou dans
un supplément au budget des voies et moyens, ou dans le compte à rendre de
l’exercice courant. Dans le premier cas, l’auteur de l’amendement n’atteint pas
ce qu’il se propose, puisque, à l’occasion d’un budget de dépenses, il ne peut
faire la demande de l’introduction d’un chiffre de recettes ; et dans le second
cas, la disposition devient inutile, puisque le compte des recettes doit
nécessairement comprendre toutes et chacune des sommes que le gouvernement a
encaissées dans le courant d’une année, qu’elles soient ou ne soient pas
prévues au budget des voies et moyens.
Si enfin
l’honorable membre a entendu prescrire au gouvernement l’obligation de
renseigner ce produit au budget futur de l’année 1833, pourquoi en faire une
partie d’article sur le budget de 1832 ? D’ailleurs, sa sollicitude est encore
inutile, puisque l’article 115 de la constitution lui en a déjà imposé le
devoir.
Le scrupule que
l’auteur de l’amendement s’est créé de l’article 115 déjà cité, qui veut que
toute les recettes de l’Etat soient portées au budget, est d’ailleurs sans
fondement ; car l’application de cet article ne doit être nécessairement
rigoureuse que pour les budget des dépenses. Peu de mots suffiront pour
légitimer cette assertion. Car, messieurs, si les ministres devaient se tenir
strictement aux chiffres portés dans les budgets des voies et moyens sans
pouvoir les outrepasser en aucun cas, toute perception d’un impôt au-delà du
montant présumé deviendrait illégale, et le gouvernement devrait provisoirement
refuser un paiement dû à l’Etat dès qu’il n’aurait pas été mentionné au budget.
Une semblable supposition mènerait à l’absurde et n’a pas besoin d’être
réfutée.
Je passe au
deuxième paragraphe de l’amendement proposé, qui ordonne de fournir avec le
budget prochain la situation de la caisse des dépôts et consignations, ainsi
que le compte réglé par la cour des comptes.
Vous conviendrez
avec moi, messieurs, que la loi des budgets, toute spéciale, est naturellement
temporaire ; qu’en conséquence, son empire ne peut s’étendre au-delà de
l’exercice auquel elle se rapporte. Il peut donc paraître étrange de trouver
dans cette loi, toute spéciale, une disposition sur un budget auquel elle ne
s’applique pas. D’ailleurs, l’antécédent du ministère au sujet de la situation
de la caisse des dépôts, dont déjà au budget des voies et moyens mention a été
faite, est un garant suffisant de sa conduite pour l’avenir. Il est vrai de
dire que les renseignements fournis sont très incomplets, peut-être même
insignifiants ; mais il appartenait à la chambre de remplir cette lacune, en
demandant au gouvernement telles explications qu’elle désirait obtenir à ce
sujet : et, le cas échéant, il lui sera également loisible d’user de ce droit à
l’égard du budget de 1833, dont, à cette occasion, je manifeste le désir que la
présentation se fasse avant l’époque fixée par l’article 70 de la constitution,
qui pour l’année courante ne serait que le 13 du mois de novembre, époque trop
rapprochée de l’année suivante pour laisser à la représentation nationale le
temps de mûrir les budgets, au moyen desquels seulement le gouvernement peut en
ouvrir légalement l’exercice.
La disposition
finale de l’amendement proposé porte sur la défense de toucher aucune remise
sur les recettes en los-renten ou rentes remboursables. Personne, sans doute,
ne désire que cette remise se perçoive ; mais, après l’engagement public que le
ministère a pris dans cette enceinte de ne pas tolérer qu’elle ait lieu, je me
persuade qu’il devient oiseux de le lui défendre de nouveau. Au reste, je suis
d’avis que l’interdiction de toucher aucune remise de ce chef n’aurait pas dû
se borner à l’administration générale, et ici je répète encore que cet
objet de recette ne doit pas trouver sa place dans un budget de dépenses.
Déjà
l’honorable M. d’Elhoungne, avec une franchise qui caractérise et honore l’ami
de la vérité, a reconnu que son amendement se trouve déplacé là où il veut
l’introduire. Cependant, il tient à sa conservation, et, à cet effet, il
établit une analogie intellectuelle entre le budget des recettes et celui des
dépenses, analogie qui, de son aveu même, n’existe pas matériellement : je me
permettrai de demander à l’honorable membre où il placera le chiffre matériel
qui doit nécessairement résulter de sa proposition ? Car, sans chiffre, le vœu
de l’article 115 de la constitution ne serait pas rempli. J’aime à me persuader
qu’en y réfléchissant bien, mon digne collègue préférera retirer son amendement
pour joindre le montant des recettes, qui en fait l’objet principal, à la
recette non encore renseignée, qui reviendra à l’Etat des parties du Limbourg
et du Luxembourg dont la cession, non consommée
encore, nous a été imposée par les 24 articles, et qu’ainsi il se ralliera avec
moi à l’idée, énoncée par l’honorable M. Barthélemy, d’admettre un supplément
au budget des voies et moyens qui comprenne toutes les omissions que la
discussion des dépenses aura signalées.
Par suite de ces considérations, je voterai contre les
amendements proposés par M. d’Elhoungne, s’il persiste à les soutenir.
M. dElhoungne réfute les observations présentées par M. Verdussen, et
persiste à maintenir son amendement.
M. Ch. de Brouckere demande la suppression des deux premiers paragraphes.
Après une longue
discussion, cette proposition est rejetée.
M. Dumortier propose
de rédiger ainsi le troisième paragraphe :
« Les
receveurs seuls toucheront une remise sur les recettes en los-renten ou rentes
remboursables. »
Cette rédaction
est adoptée.
Article
2
A l’article 2, relatif
aux dépenses du Luxembourg et du Limbourg, M. Leclercq, pour éviter d’énoncer la cession mentionnée dans le
traité du 15 novembre, propose une autre rédaction ainsi conçue :
« Art. 2. Il
est alloué une somme de 228,567 fl. au ministère des finances pour compléter
les crédits nécessaires au service dans les provinces du Luxembourg et du
Limbourg.
« Il sera
pourvu, par une disposition nouvelle, au règlement des dépenses dans ces deux
provinces, le plus tôt possible, après la paix, si elle est conclue dans le
cours de l’année 1832.
« Cette somme
est répartie de la manière suivante, etc. »
Cette rédaction
est mise aux voix et adoptée.
On passe à l’appel
nominal sur l’ensemble du projet ainsi modifié.
Vote sur l’ensemble du projet de loi
Il est adopté par
59 membres contre 10. Deux membres se sont abstenus de voter, parce qu’ils
n’avaient pas pris part à la discussion du budget des finances : ce sont MM.
Jullien et Charles Rogier.
Voici le noms des
opposants : MM. Coppens, d’Elhoungne, E. Desmet, Dumortier, Fleussu, Gendebien,
Leclercq, Liedts, Vergauwen et Veraghen.
La suite de
l’ordre du jour est la discussion du budget de l’intérieur.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DE L’ETAT POUR L’EXERCICE 1832 (DEPARTEMENT
DE L’INTERIEUR)
La suite de
l’ordre du jour est la discussion du budget de l’intérieur.
Discussion des articles
Chapitre II. - Frais d’administration des
provinces
Article
4
« Budget de
la Flandre orientale.
« Lettre A. Traitements
du gouverneur, des états députés et du greffier : fl. 18,950. »
-
Adopté.
« B.
Traitements des employés et gens de service : fl. 20,650. »
- La section
centrale propose une réduction de 500 fl., qui est consentie par M. le ministre
de l'intérieur et adoptée.
« C. Frais de
route et de séjour du gouverneur, des états députés et du greffier : fl.
995. »
- La section
centrale propose une diminution de 220 fl. Cette réduction, également consentie
par M. le ministre de l'intérieur, est mise aux voix et adoptée.
« E. Frais de
bureau, d’impression, de reliure, entretien de meubles, éclairage, chauffage et
menues dépenses : fl. 11,010. »
La section
centrale propose une réduction de 3,010 fl.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je crois pouvoir consentir à une réduction de 1,510
fl. ; mais il est impossible, pour la régularité du service, de diminuer
davantage. Il ne reste que 9,500 fl. ; et si l’on compare cette somme à
l’allocation votée pour la Flandre occidentale, dont la population est moindre
d’un cinquième, on verra que la comparaison est favorable, sous tous les
rapports, à la Flandre orientale. Je ferai observer que l’on est aussi obligé
d’y faire les impressions dans les deux langues.
M. Dubus,
M. Lebeau
et M. Destouvelles font remarquer que les frais d’impression pour la Flandre occidentale
ne s’élèvent qu’à 1,500 fl., tandis qu’on demande 5,000 fl. pour ceux de la
Flandre orientale ; en conséquence, ils appuient la réduction proposée par la
section centrale.
-
Cette réduction est adoptée, et le chiffre reste fixé à 8,000 fl.
« F.
Traitement et abonnements des commissaires de districts : fl. 20,765. »
La section
centrale propose une réduction de 2,765 fl.
M. Jullien fait observer qu’il y a 8 commissaires de districts
dans la Flandre occidentale, tandis qu’il n’y en a que 6 dans la Flandre orientale,
et que cependant il est demandé de ce chef une somme moins forte.
M. Dubus,
comparant la province du Hainaut à celle de la Flandre orientale, trouve le
même nombre de commissaires de districts, et cependant les deux allocations
sont différentes, et celle de la Flandre orientale est plus forte de 2,665 fl.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). Fait observer que cette différence est basée sur la population,
abstraction faite du plus ou moins grand nombre de commissaires de districts,
parce qu’on ne peut administrer avec les mêmes allocations dans deux provinces
dont la population est d’une grande différence.
M. Angillis,
M.
Jamme et M. d’Elhoungne appuient la réduction.
M. Barthélemy. - Savez-vous, messieurs, d’où vient la différence des
allocations demandées pour les commissaires de district ? De la capacité plus
ou moins grande des gouverneurs. (On rit.)
Là où les gouverneurs sont plus capables, on demande moins, et là où ils sont
moins capables, on demande plus. Quant à moi, j’engage M. le ministre de
l'intérieur à leur écrire, après que la réduction aura été adoptée :
« Monsieur, (Rire général.)
« La chambre
a trouvé l’allocation que vous demandiez pour les commissaires de districts
exagérée, et je vous ferai observer que le gouverneur de telle province a le
talent d’administrer avec une somme bien inférieure. » (Hilarité prolongée.)
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je remercie l’honorable membre de son avis ; mais je
répète que si la réduction est admise, il y aura une grande inégalité entre la
Flandre orientale et la Flandre occidentale.
- La réduction est
mise aux voix et rejetée.
« G.
Vacations des médecins : fl. 1,300. »
La section
centrale propose une réduction de 300 fl., qui est consentie par M. le ministre
de l'intérieur et adoptée.
Le chiffre total
du budget de la Flandre orientale, s’élevant à 70,640 fl. est également adopté.
On passe au budget
de la province du Hainaut.
« A.
Traitements du gouverneur, des états députés et du greffier : fl.
14,900. »
-
Adopté.
« B.
Traitements des employés et gens de service : fl. 22,495. »
La
section centrale propose une réduction de 2,495 fl.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux) combat la réduction, et lit une note du gouverneur où
il est dit que ces employés sont plutôt susceptibles d’augmentation que de
diminution.
M. Corbisier fait observer que les employés du Hainaut ont des traitements
inférieurs à ceux des autres provinces.
M. Gendebien combat, avec force, la réduction, et dit que
l’administration du Hainaut est plus compliquée que celle des autres provinces
par le surcroît de besogneux que lui donnent ses mines innombrables. Il ajoute
que si l’on voyait les dossiers contentieux, on serait effrayé de leur nombre.
M. Dubus
répond que cette administration était aussi compliquée en 1830, et que
cependant le crédit qu’on lui accorde était inférieur à celui des autres
provinces. En conséquence, il insiste pour la réduction, qui est appuyée, en
outre, par M. Lebeau.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux), M. Rogier
et M. Gendebien
la combattent de nouveau.
- Elle est mise
aux voix et rejetée.
« C. Frais de route et de séjour : fl.
1,330. »
« E. Frais de bureau, d’impression, de reliure,
etc. : fl. 9,195 50 c. »
- La section
centrale propose une réduction de 1,195 fl. 50 c.
Après un léger
débat, cette réduction est adoptée.
« F.
Commissaires de districts : fl. 18,308. »
La section
centrale propose une réduction de 308 fl., qui est consentie par M. le ministre
de l'intérieur et adoptée.
Les chiffres des
deux autres lettres sont maintenues.
Le chiffre total
du budget de la province du Hainaut, s’élevant à 66,853 fl. 50 c., est adopté.
La séance est
levée à quatre heures et demie.