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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 13 mars 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-1849)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 977) M. Dubus procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.

- La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dont la rédaction est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Dubus fait connaître l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre :

« Le sieur Lamon, ancien soldat, prie la chambre de lui accorder la pension de retraite pour laquelle il aurait été proposé en 1814, ainsi que les arriérés de cette pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Jouret, juge de paix du canton d'Alost, présente des observations sur le projet de loi relatif à la réduction du personnel des cours et tribunaux. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


M. le ministre de la justice adresse à la chambre deux exemplaires du premier cahier du deuxième volume des procès-verbaux de la commission chargée de la publication des anciennes lois de la Belgique.

- Dépôt à la bibliothèque.

Composition des bureaux de section

Les sections de mars se sont constituées comme suit :

Première section

Président : M. Thiéfry

Vice-président : M. Desoer

Secrétaire : M. E. Vandenpeereboom

Rapporteur de pétitions : M. Thibaut


Deuxième section

Président : M. Destriveaux

Vice-président : M. Rousselle

Secrétaire : M. Jacques

Rapporteur de pétitions : M. Van Cleemputte


Troisième section

Président : M. de Luesemans

Vice-président : M. Osy

Secrétaire : M. Van Iseghem

Rapporteur de pétitions : M. Pierre


Quatrième section

Président : M. de Renesse

Vice-président : M. Van Grootven

Secrétaire : M. de Perceval

Rapporteur de pétitions : M. Jullien


Cinquième section

Président : M. Le Hon

Vice-président : M. Delehaye

Secrétaire : M. Tesch

Rapporteur de pétitions : M. Cans


Sixième section

Président : M. Lange

Vice-président : M. de Royer

Secrétaire : M. Lelièvre

Rapporteur de pétitions : M. Coomans

Prise en considération d'une demande en naturalisation

Discussion générale

M. le président. - Nous avons à nous occuper de la demande en grande naturalisation du sieur François Humbert. Il s'élève à ce sujet une question préalable. La commission, à l'unanimité, a proposé d'écarter la demande, parce que celui dont il s'agit est Belge.

M. Delehaye, président de la commission des naturalisations. - Messieurs, le sieur Humbert est né sous l'empire de la loi fondamentale et de parents qui avaient obtenu du gouvernement l'autorisation de fixer leur domicile en Belgique. Aux termes de la loi fondamentale, le sieur Humbert est donc Belge. Des doutes s'étaient élevés à cet égard, on avait demandé s'il suffisait que des parents eussent été autorisés à fixer leur domicile en Belgique, pour donner l'indigénat à leurs enfants; la cour de cassation a été plusieurs fois saisie de cette question et elle a constamment décidé que les personnes qui se trouvent dans ce cas sont Belges. Le doute reposait sur le sens du mot « ingezetene » ; on ne savait si ce mot voulait dire domicilié dans le pays ou bien régnicole. La cour de cassation adoptant le premier sens a déclaré que l'individu né en Belgique de parents étrangers jouissait de l'indigénat. La commission des naturalisations a partagé cet avis, et elle propose à la chambre de passer à l'ordre du jour parce que le sieur Humbert jouit de la qualité de Belge.

M. de Luesemans. - Messieurs, j'ai eu l'occasion d'entretenir l'honorable président de la commission au sujet de cette demande en naturalisation. Je n'avais pas trouvé dans le rapport que les parents du pétitionnaire eussent obtenu, l'autorisation de se fixer en Belgique et d’y établir leur domicile, conformément au code civil ; M. le président de la commission m'a affirmé que dans les pièces du dossier se trouve la preuve qu'en 1813 les parents de Humbert ont obtenu l'autorisation de fixer leur domicile en Belgique.

Dès lors, je crois qu'il ne peut plus y avoir de doute; ils doivent être considérés comme domiciliés, dans le sens de la loi fondamentale des Pays-Bas, et comme ayant conféré à leurs fils, nés en Belgique, la qualité de Belge.

Je pense donc qu'on pourrait passer simplement à l'ordre du jour, en adoptant les motifs et les conclusions de la commission des naturalisations. La jurisprudence de la cour de cassation est fixée, et je la crois conforme à la loi et aux principes sur la matière.

M. le président. - Il y a une observation à faire dans l'intérêt même de la question : c'est qu'un simple ordre du jour ne liera pas les tribunaux ; la question n'est pas résolue.

M. Tesch. - L'observation de M. le président est juste. Si la cour de cassation changeait d'avis, il est évident qu'il faudrait une nouvelle demande portée devant la chambre , pour que le pétitionnaire fût naturalisé.

M. Dumortier. - Messieurs, comme l'a fait observer avec raison M. le président, l'ordre du jour seul ne tranche pas la question, il faut un vote de la chambre. La cour de cassation a déjà bien des fois décidé la question qui nous occupe; la cour a déclaré que tous les individus, nés sur le territoire de la Belgique de parents étrangers y domiciliés avant et sous l'empire de la loi fondamentale de 1815, étaient Belges de plein droit. J'ai ici sous la main un arrêt longuement motivé au sujet du sieur Clément Muller, avocat à Liège. Cet arrêt, qui ne fait que développer les motifs qui ont dirigé la cour de cassation dans une foule d'arrêts semblables; cet arrêt, dis-je, est excessivement clair sur la question.

Je pense qu'il serait sage de suspendre la discussion à cet égard, et de l'ajourner à l'époque où l'on aura à examiner les demandes en grande naturalisation qui ont été prises hier en considération; alors un débat devra s'ouvrir sur les titres de ces candidats ; car, comme l'a fort bien fait remarquer M. le président, la prise en considération d'une demande en naturalisation se fait sans discussion. C'est à cause de cette disposition réglementaire que je ne nie suis pas opposé hier à la prise en considération de la demande en grande naturalisation faite par un homme qui est un déserteur ; mais je compte bien m'y opposer, quand la discussion publique aura lieu.

Alors aussi nous serons, par la force des choses, appelés à examiner la question générale, et je suis convaincu que la chambre, après avoir vu les arrêts de la cour de cassation, prendra enfin une disposition telle qu'à l'avenir nous n'ayons plus à donner la naturalisation à des personnes qui sont Belges de plein droit.

Cela aura le double avantage de ne pas nous accabler d'une besogne inutile, et de ne pas accorder légèrement des naturalisations dont nous n'avons été que trop prodigues depuis un grand nombre d'années ; car le nombre des personnes que nous avons naturalisées s'élève déjà à plus de mille.

M. Delehaye. - Messieurs, avant d'entamer la question au fond, qu'il me soit permis de répondre un mot à ce que vient de dire l'honorable M. Dumortier. Le reproche articulé par l'honorable membre ne s'adresse pas seulement à la chambre, mais il tombe directement sur la commission de naturalisations qui ne peut pas l'accepter.

L'honorable membre a dit que vous aviez voté en faveur d'un déserteur dont il se proposait de combattre la naturalisation quand le projet de loi viendrait en discussion. Il est peu généreux, je dirai même qu’il n'est pas loyal de venir jeter dans l'esprit des membres de la chambre des doutes, et surtout des doutes sans fondement, sur le caractère d'un homme qui est en instance devant vous. Veuillez remarquer que l'individu, Belge de naissance, que l'honorable M. Dumortier qualifie de déserteur, a quitté la Belgique à l'âge de 14 à 15 ans, pour aller combattre eu Algérie. Depuis, ce jeune homme est rentré en Belgique; il n'y a qu'une seule voix parmi ses supérieurs pour le présenter comme un des meilleurs soldats de l'armée; il a été décoré; quand un homme jouit d'une pareille distinction, on est mal venu à l'accuser de désertion parce qu'à un âge où les services militaires ne donnent aucun droit (à l'âge de 15 ans), fils de militaire, il est passé en Algérie aiguillonné par le désir de faire la guerre.

Je pense que, dans la question qui nous occupe, le seul vote qui puisse avoir quelque portée est l'ordre du jour proposé par la commission. Je suppose que la chambre déclare qu'elle prend la demande en considération et que la naturalisation soit accordée; si le demandeur ne paye pas le droit d'enregistrement vous n'aurez rien fait. Mais si vous passez à l'ordre du jour, il est probable que le sieur Humbert se pénétrant de l'opinion de la cour de cassation et de M. le procureur général de la cour de Liège, se convaincra qu'il est Belge et renoncera à sa demande.

Ce qu'il y a de mieux à faire est donc d'adopter la proposition de la commission des naturalisations.

M. Dumortier. - J'ai lieu d'être étonnamment surpris de voir l'honorable M. Delehaye mettre ma loyauté en accusation. Je n'entends pas qu'on attaque ma loyauté. Je dois relever une pareille parole. Je me borne là.

Je prie la chambre d'observer que, quand j'ai dit que l'individu dont (page 978) il s'agit avait déserté, je l'avais lu dans les développements imprimés dans le rapport. Voici ce qu'il porte ;

« Le pétitionnaire, fils de François-Louis Claes et de Marie-Elisabeth Verbert, tous deux Belges de naissance, est né à Malines, le 18 juillet 1816.

« Le 21 décembre 1831, alors qu'il était encore âgé de moins de quinze ans et demi, il s'engagea volontairement comme tambour dans le 11ème régiment de ligne pour le terme de huit ans; mais le 10 avril 1835, il s'enrôla, à Givet, dans la légion étrangère qui était alors en Afrique. »

C'est-à-dire qu’il a déserté du pays.

M. Delehaye. - A quel âge ?

M. Dumortier. - Qu'importe l'âge? Il a déserté; on ne doit pas accorder la grande naturalisation à un déserteur; la grande naturalisation ne s'accorde que pour les services éminents rendus à la patrie. Je demanderai si déserter est rendre des services éminents à la patrie.

On est beaucoup trop large en matière de naturalisation ; le pays entier se récrie contre la facilité avec laquelle la chambre accorde la naturalisation; il demande qu'on mette un terme à l'abus scandaleux des naturalisations. Quand mes paroles répondent à un sentiment qui se manifeste avec vivacité dans le pays, elles ne devraient pas être taxées de déloyauté. Nous avons accordé près de 3 mille naturalisations en y comprenant les Limbourgeois et les Luxembourgeois; et toutes ces naturalisations ont été accordées pour occuper des emplois que des Belges rempliraient sans eux. Il est temps d'en finir avec ces naturalisations, je l'ai répété souvent, je le répéterai toujours.

Je pense qu'il est nécessaire qu'à l'avenir la commission des naturalisations ne soit investie que du soin d'examiner les projets de loi qui lui seraient envoyés par le ministère; car cette commission est beaucoup trop large, beaucoup trop facile; c'est à elle que nous devons cette masse immense de naturalisations qu'on a accordées en Belgique et qui soulèvent tant de réclamations dans le pays.

M. le président. - Aux termes de la loi, il n'y a pas de discussion sur la prise en considération. Nous devons en finir sur ce point.

Quant au sieur Humbert, la commission propose un ordre du jour motivé.

M. Rousselle. - Je crois que l'ordre du jour doit être pur et simple; car si le pétitionnaire n'était pas Belge, il ne pourrait le devenir par la déclaration de la chambre. L'ordre du jour doit être pur et simple pour laisser le pétitionnaire dans tous ses droits.

- L'ordre du jour est mis aux voix et prononcé.

Rapports sur des pétitions

M. Desoer, rapporteur. - « « Par pétition datée de Liège, le 2 février 1849, le sieur Pasque prie la chambre d'accorder un subside à la commission du monument de Sainte-Walburge, à Liège. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Liège, le 18 février 1849, le sieur Delsemme, ancien officier, demande une pension et la décoration de la croix de fer. »

Ordre du jour.

- Adopté.

M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Tamines, le 28 avril 1848, le sieur Foucart réclame l'intervention de la chambre pour être réintégré dans ses fonctions d'employé à l'administration des chemins de fer de l'Etat, dont il est suspendu depuis le 1er mai 1847, et demande ses appointements arriérés. »

Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - a Par pétition datée de Trois-Fontaines, le 5 février 1849, le sieur de Mat réclame l'intervention de la chambre pour obtenir le payement de fournitures faites en 1830. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Châtelet, le 12 février 1849, le sieur Sapart demande le rétablissement du système binaire des poids et mesures. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée d'Enghien, le 27 novembre 1848, le sieur Castaigne demande la suppression du traitement d'attente accordé à l'ancien juge de paix du canton d'Hérinnes. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Hargimont, le 10 février 1849, le sieur Burton, échevin à Hargimont, prie la chambre de décider si les séances du conseil communal doivent être tenues à la maison communale ou si elles peuvent l'être dans une maison particulière. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 17 octobre 1844, plusieurs légionnaires demandent qu'il soit donné suite à leurs réclamations. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de St-Vaast, le 16 novembre 1848, le sieur Piette, ancien soldat de l'Empire, demande une pension. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Lens, le 26 novembre 1848, le sieur Blau le prie la chambre de statuer sur sa demande tendant à obtenir un emploi de garde-convoi dans l'administration des chemins de fer. »

Renvoi à M. le ministre des travaux publics.


M. Rousselle. - Je viens appuyer la demande de renvoi au ministre proposée par la commission des pétitions et je prie la chambre d'y ajouter « avec demande d'explications. » Si les renseignements qui m'ont été fournis août exacts, il existerait, à l'administration des chemins de fer, un règlement d'après lequel on ne pourrait entrer dans cette administration qu’à la suite d'un surnumérariat, auquel on ne serait pas admis après l'âge de 25 uns.

Je n'ai pas examiné jusqu'à quel point ce règlement, s'il existe, se concilierait avec le droit des Belges d'être admis aux emplois publics. Mais je soutiens que cette disposition nuirait particulièrement au droit des militaires d'être admis aux emplois de l'administration du chemin de fer. Le pétitionnaire, m'a-t-on dit, a quitté le service, après avoir atteint l'âge de 25 ans ; il a adressé à l'administration des chemins de fer une demande d'emploi dont le rejet a été fondé sur ce qu'il avait atteint l'âge de 25 ans.

M. Le Hon. - Messieurs, je ne sais si la pétition entre dans quelques détails sur les titres que son auteur croit avoir à l'emploi qu'il sollicite : mais il me semble que c'est nous immiscer dans l'administration que de renvoyer au ministre des travaux publies une demande qui tend à vous faire statuer sur une collation d'emploi. Je pense qu'au point, de vue du système d'économie que nous recommandions incessamment! aux ministres, en présence des réductions de traitements et des suppressions de places que l'on est chaque fois forcé d'ordonner, la chambre ne doit pas prendre sous sa protection et renvoyer au ministre des travails publics, une requête qui aurait dû être adressée à ce département ministériel.

Assurément, si les observations de l'honorable M. Rousselle sont fondées, il pourra se présenter des occasions de demander des explications au ministère sur un règlement qui porterait atteinte à des titres réels : mais ici, d'après la formule expresse du rapport, je vois que le sieur Blaude prie la chambre de statuer sur sa demande tendant à obtenir un emploi de garde-convoi dans l'administration des chemins de fer.

Eh bien, je crois que, sans préjuger en rien et d'une manière défavorable les titres du pétitionnaire, la chambre doit passer à l’ordre du jour, la demande dont il s'agit ayant un caractère purement administratif.

M. Rousselle. - Je ne m'opposerai pas à l'ordre du jour. Je me réserve d'examiner la question tout particulièrement pour en faire, s'il y a lieu, l'objet d'une interpellation, lors de la discussion du budget des travaux publics.

- L'ordre du jour est prononcé.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Bouillon, le 1er février 1849, le sieur d'Agnely, ancien officier de la gendarmerie, demande la révision de sa pension. »

Renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Charleroy, le 20 février 1848,, quelques habitants de Charleroy demandent que la garnison de cette ville soit augmentée. »

Renvoi à M. le ministre de la guerre.

M. Julliot. - Je crois, messieurs, que la chambre ne doit pas se mêler de la question de savoir si la ville de Charleroy a une garnison assez forte ou non. Je demanderai qu'ici encore la chambre n'intervienne pas. C'est au gouvernement à décider de semblables questions.

Tout le monde s'adresse à nous pour obtenir des fonctions, des pensions, des augmentations de garnison. C'est là l'affaire du gouvernement.

Messieurs, j'ai rapproché quelques feuilletons de pétitions sur lesquels la chambre s'est prononcée, et j'ai été frappé d'une chose: c'est que souvent nous votons blanc et noir dans la même séance ou dans des séances successives. Cela provient de ce que la commission des pétitions est renouvelée chaque mois et qu'ainsi la chambre est exposée à avoir à chaque instant une nouvelle appréciation des demandes qui lui arrivent.

Je sais bien que ni la chambre, ni la commission des pétitions ne peuvent procéder par règle générale; mais il est certains principes qu'on pourrait respecter; ainsi lorsque des pétitionnaires demandent des faveurs qui dépendent absolument du gouvernement, elle pourrait passer à l'ordre du jour. Mais lorsqu'un pétitionnaire réclame son droit à la révision d'une pension ou fait quelque autre réclamation à charge de l'Etat, comme la chambre a le droit d'examiner ce que fait le gouvernement, je consentirais au renvoi de cette demande au ministre qu'elle concerne. Mais dans le cas actuel, il me paraît qu'il faut passer à l'ordre du jour.

- L'ordre du jour est mis aux voix et adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Le sieur Raingo, peintre en bâtiments à Wasmes, demande un emploi d'éclusier ou toute autre place. »

La commission propose l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Le sieur Meynders, ancien curé-aumônier, demande la révision de sa pension. »

La commission propose le renvoi à M. le ministre des finances.

M. Dolez. - Messieurs, cette demande aurait dû être faite à M. le ministre des finances. La chambre ne doit pas être un bureau de recommandation des pétitions qui concernent les différents départements ministériels.

M. Delfosse. - Je ferai remarquer à l'honorable M. Dolez que nous venons de renvoyer au ministre de la guerre la pétition du sieur d'Agnely, ancien officier, qui demande aussi la révision de sa pension. Nous ne devons pas avoir deux poids et deux mesures.

M. Dolez. - L'observation de l'honorable M. Delfosse ne prouve qu'une chose, c'est que tout à l'heure nous avons eu tort. Nous anéantissons réellement le droit de pétition en encourageant l'abus qu'on en (page 979) fait. Il résulte du grand nombre de pétitions qui nous sont adressées mal à propos que lorsqu'il s'agit de rapports de pétitions la chambre est inattentive, parce qu'elle est convaincue que sur 100 pétitions il en est 99 qui ne la concernent pas. Si la commission se montrait plus sévère, le droit de pétition conserverait le caractère sérieux qu'il doit avoir.

M. Delfosse. - Nous avons raison de passer à l'ordre du jour lorsqu'on s'adresse à nous pour obtenir un emploi; mais il n'en est pas de même quand il s'agit d'une révision de pension. Les pensions sont accordées en vertu de la loi, et nous devons veiller à ce que les lois soient respectées. Je demanderai à M. le rapporteur si le pétitionnaire s'est d'abord adressé au gouvernement; s'il ne l'avait pas fait nous devrions passer à l'ordre du jour; mais s'il y avait déni de justice, il aurait le droit de s'adresser à nous; c'est à nous qu'il appartient de faire respecter les lois.

M. Desoer, rapporteur. - La commission n'a pas été à même de reconnaître si le pétitionnaire avait réclamé auprès du gouvernement, parce qu'il n'y avait qu'une seule pièce au dossier, et que cette pièce ne renfermait aucun renseignement à cet égard.

M. Delfosse. - Nous avons renvoyé au ministre la pétition du sieur d'Agnely; nous pourrions en agir de même pour la pétition du sieur Meynders. Il est probable que ce pétitionnaire ne s'adresse à nous qu'après s'être adressé au gouvernement. Il s'agit de savoir si la loi a été observée ou si elle ne l'a pas été. Renvoyons la pétition au ministre.

M. Dolez. - Je crois que. la chambre ne peut pas, en pareille occurrence, prononcer le renvoi à un département ministériel d'une manière pure et simple. De deux choses l'une: ou l'on vient prétendre que la loi a été violée, ou on ne le prétend pas. Dans le dernier cas la chambre n'a rien à faire, elle ne doit pas prononcer le renvoi ; si l'on prétend, au contraire., que la loi a été violée, la chambre doit examiner ce qui en est, et si elle reconnaît qu'il y a violation de la loi, elle doit ordonner, non pas le renvoi pur et simple, mais le renvoi avec demande d'explications.

Je, propose à la chambre de passer à l'ordre du jour ou de décider qu'il sera fait un nouveau rapport afin d'éclaircir le point de savoir s'il y a eu violation de la loi.

M. Delfosse. - C'est à M. le rapporteur à nous dire, si le pétitionnaire prétend que la loi a été violée et si la commission a examiné cette question. Si la commission n'a pas examiné cette question, qu'elle fasse un rapport ultérieur, je le veux bien, mais il ne faut pas prononcer l'ordre du jour,.

M. Desoer, rapporteur. - Je demanderai que la chambre m'autorise à faire un rapport supplémentaire dans une prochaine séance. La pétition a 40 pages; la commission les a lues, mais je ne pourrais dire si elle renferme des renseignements suffisants sur le point de savoir si la loi a été violée.

- La chambre décide que la commission fera un rapport supplémentaire.

M. Desoer, rapporteur. - « Le sieur Brohé, ancien militaire, prie la chambre de lui accorder une pension. »

- La commission propose le renvoi à M. le ministre de la guerre.

M. Cools. - Je crois qu'ici, messieurs, nous devons voter l'ordre du jour: il ne s'agit pas de plaintes relatives au chiffre d'une pension, il s'agit d'une pension qui n'est pas encore accordée. Il faudrait examiner si le pétitionnaire s'est adressé au gouvernement et si le gouvernement lui a refusé toute pension. Si ces faits ne résultent pas des pièces, il y a lieu de passer à l'ordre du jour.

M. Desoer, rapporteur. - Je demanderai également à faire un rapport supplémentaire sur cette pétition,

- Cette proposition est adoptée.


M. Desoer, rapporteur. - « Le sieur Arnauts, ancien militaire, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir un emploi ou une pension. »

La commission propose le renvoi à M. le ministre de la guerre.

M. Cools. - Il est évident que le pétitionnaire reconnaît en quelque sorte lui-même qu'il n'a pas un droit positif, puisqu'il demande un emploi ou une pension. Il n'y a donc qu'une seule résolution à prendre, c'est l'ordre du jour.

- L'ordre du jour est mis aux voix et adopte.


M. Desoer, rapporteur. - « Le sieur de Goër prie la chambre de lui accorder une pension. »

La commission propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. Le Hon. - Le texte du rapport indique que le pétitionnaire n'allègue pas qu'il s'est adressé à d'autres autorités. Il prie la chambre de lui accorder une pension.

M. Julliot. - La chambre a déjà passé plusieurs fois à l'ordre du jour sur des demandes du même pétitionnaire. Il était membre de la première chambre sous le royaume des Pays-Bas, et c'est à ce titre qu'il demande une pension. Il n'y a pas droit.

- La chambre passe à l'ordre du jour.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Gand, le 4 décembre 1848, la dame Van de Weyer, veuve du sieur Bastin, ancien vérificateur des douanes, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir la révision de sa pension. »

- La commission des pétitions se livrera à un supplément d'instruction.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Tournay, le 1er mars 1849, le sieur Dely, greffier du tribunal de commerce de Tournay, présente des observations contre la proposition de la section centrale de supprimer le traitement fixe des greffiers des tribunaux de commerce de Bruxelles, Anvers, Gand et Tournay. »

Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur la réduction du personnel des cours et des tribunaux.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Doel, le 18 janvier 1849, les membres du conseil communal de Doel, plusieurs commerçants et bateliers de la même commune demandent la suppression du bureau de déclaration établi à Lillo et son remplacement par une patache de la douane, qui serait stationnée à l'extrême frontière, entre le fort Frédéric-Henri et la commune de Doel. »

Renvoi à M. le ministre des finances.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Gand, le 9 février 1849, un grand nombre d'habitants de la ville de Gand demandent le démantèlement de la citadelle de cette ville.

« Même demande des habitants de la commune de Ledeberg.

Renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 24 février 1849, le sieur Stevens, fabricant chapelier à Bruxelles, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir le payement intégral des fournitures qu'il a faites aux blessés de septembre. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.

Projet de loi sur les droits de sortie des sabots d’animaux

Discussion des articles

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe aux articles.

Article premier

« Art. 1er. Les droits à l'entrée sur les cornes et bouts de cognes de bœufs, vaches, buffles, moutons, chèvres, etc., fixés par la loi du 21 juillet 1844, respectivement à 1/2 p. c, 2 1/2 p. c. et 3 p. c., sont réduits à 1/2 p. c, 1 p. c. et 1 1/2 p. c. »

M. Vilain XIIII. - Messieurs, je suis partisan du projet de loi ; mais je voudrais appeler l'attention du gouvernement sur les lignes qui terminent le rapport de la commission d'industrie. La commission termine en ces termes :

« L'examen de la présente pétition, qui a quelque analogie avec celle dont il a été fait rapport à la séance du 8 février courant, n°130, a amené l'attention de la commission sur d'autres droits à la sortie qui frappent des produits de l'industrie agricole, et spécialement les déchets d'animaux morts ou abattus, tels que :

«1° Les droits sur les cuirs et peaux dont il est question au rapport ci-dessus (n° 130), et qui montent de 8 à 10 p. c.

« 2° Les droits sur les cornes de bœufs, vaches, etc. ; sur les sabots de bœufs, chevaux, etc., qui montent de 3 à 5 p. c.

« 3° Les droits sur les os, qui montent à environ 60 p. c.

« 4° Les droits sur les poils de bœufs, vaches, etc., à environ 6 p. c.

« 5° Les droits sur les crins bruts, à environ 17 p. c.

« Ensuite les droits sur le beurre frais et salé, qui montent à environ 2 p. c.

« Sur les volailles, 1 p. c.

« Sur les graines de colza, navette et lin, à environ 2 p. c.

« Sur la chaux éteinte, 10 p. c.

« Si la commission ne croit pas devoir soumettre dès à présent à la chambre des propositions formelles pour la modification de ces droits, elle émet cependant le vœu de voir bientôt le gouvernement procéder à une révision de ces dispositions qu'elle croit nuisibles à notre agriculture, sans aucun avantage pour l’industrie ni pour le trésor. «

Je vois dans cette nomenclature que les droits sur les os montent à 60 p. c. à la sortie ; c'est un impôt énorme dont cette partie des produits de l'agriculture est frappée, et cela au profil de l'industrie des sucres. Je prie vivement M. le ministre des affaires étrangères de porter une sérieuse attention sur cette recommandation de la commission d'industrie. Dans cette nomenclature, on indique ensuite les droits établis sur le beurre frais (2 p. c.) et sur les volailles (1 p. c.). C'est peu de chose; mais M. le ministre de l'intérieur, au commencement de la session, a déclaré que dans son opinion il pouvait être avantageux à l'agriculture d'exporter une grande quantité de beurre et un nombre considérable de têtes de volaille. Je crois que M. le ministre des affaires étrangères pourrait proposer un simple droit de balance sur ces différents objets qui sont une partie importante de l’agriculture.

Messieurs, puisqu'il est question de beurre frais et de volailles, je recommanderai aussi à M. le ministre des affaires étrangères d'examiner s'il ne conviendrait pas d'imposer un droit un peu plus élevé sur les aliments de luxe qui nous viennent de l'étranger. Il me semble qu'il est peu décent, peu moral même de voir des quantités d'aliments de luxe, tels que truffes, pâtés de foie gras et autres bonnes choses, venant de l'étranger, ne payer presque aucun droit à l'Etat.

Nous parlons beaucoup du moyen de nourrir le peuple à bon marché; nous avons établi cette année, sur les grains étrangers, un droit qui est réduit à sa plus simple expression ; or, il me semble qu'un droit d'un p. c. sur ces denrées de luxe est vraiment scandaleux. Il serait, je pense, d'un bon effet moral d'établir un droit de 15, 20, et même de 25 p. c. sur ces objets dont, au reste, on ne déclare jamais que la moitié de la valeur à la douane.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, le (page 980) droit qui frappe la sortie des os a été établi il y a quelques années ; c'est principalement dans l'intérêt des raffineurs de sucre, qui font une grande consommation de ce produit, que ce droit a été établi. Je ne suis pas convaincu qu'il faille le modifier.

Messieurs, le gouvernement fait instruire plusieurs demandes tendant à modifier le tarif des douanes; il s'entoure à cet égard de tous les renseignements nécessaires ; il consulte tous les intérêts qui se sont engagés dans la question.

Lorsqu'une série d'articles de notre tarif de douanes sera suffisamment instruite, le gouvernement pourra présenter un projet de loi ; mais il ne croit pas devoir saisir la chambre d'un projet, à propos de chaque pétition, car on porterait ainsi une confusion véritable dans notre législation douanière. Je n'ai aucune objection à faire contre le projet de loi actuellement en discussion ; il tend à diminuer les droits, tant à la sortie qu'à l'entrée, sur certains produits agricoles. Mais je dois dire que ce projet est d'une très faible importance, et qu'il est tout au plus digne de fixer l'attention de la chambre. Les droits qui frappent les produits dont il s'agit sont déjà très minimes (ils ne sont que 1/2 p. c., 2 1/2 p. c. et 3 p. c. La commission propose 1 1/2 p. c, I p. c. et 1 1/2 p. c). Or, lorsqu'il s'agit de droits à la valeur, on ne perçoit en réalité que la moitié des droits; il en résulte qu'ils sont fort minimes sur les articles dont il s'agit. Donc le projet qui vous est soumis à une très faible importance; le gouvernement ne voit pas d'inconvénient à s'y rallier, puisqu'en réalité il change très peu l'état actuel des choses.

M. Bruneau, rapporteur. - M. le ministre des affaires étrangères s'est rallié au projet de la commission; toutefois il lui semble qu'il vaudrait mieux que la commission, à l'occasion d'une pétition dont l'examen lui et renvoyé, ne soumît pas à la chambre un projet de loi. Cependant la commission croit que chaque fois qu'une pétition est renvoyée à son examen, avec demande d'un rapport, elle doit aboutir à quelque chose. Or, lorsqu'elle juge, à l'occasion d'une pétition, qu'il y a une lacune dans la législation, il lui semble qu'elle doit saisir cette opportunité pour proposer de combler la lacune, sauf plus tard au gouvernement de comprendre cette révision partielle dans un projet de révision générale. Mais nous ne voyons pas qu'il y ait inconvénient à statuer sur des projets spéciaux; le plus souvent la chambre recule devant des remèdes plus généraux et plus énergiques, tandis qu'elle fait un accueil favorable à des propositions spéciales, qu'elle peut apprécier avec plus de convenance et plus de maturité.

M. Delehaye. - Messieurs, je prie la chambre de vouloir bien remarquer que la commission d'industrie n'a été saisie de la proposition en question que sur la demande faite par un intéressé.

Le sieur de Chercq demandait un droit protecteur pour conserver dans le pays, des sabots, cornes de pieds d'animaux et autres objets servant à faire du noir animal. Cet industriel a fait connaître combien il importe, dans l'intérêt de la fabrication du noir animal dont l'agriculture fait un si utile usage, que ces objets soient conservés à la Belgique, et il demande une augmentation du droit de sortie ; vous renvoyez sa pétition à la commission d'industrie ; et cette commission, loin de faire droit à la demande du pétitionnaire, propose une réduction de droit; si le pétitionnaire avait pu penser qu'elle proposerait des conclusions entièrement apposées à sa réclamation, il se serait donné la peine de répondre et au rapport et aux propositions de la commission. Nous sommes saisis à l'improviste de ce projet de loi ; je ne savais pas que telles étaient les conclusions de la commission... (Le rapport a été lu !) Je sais que le rapport a été lu ; mais je ne pouvais pas m'attendre qu'il serait venu à l'ordre du jour aussitôt.

Toujours est-il que la proposition qui vous est faite est insolite. Un pétitionnaire vous demande des mesures pour conserver des matières premières nécessaires à l'industrie et à l'agriculture, et vous lui répondez non seulement en repoussant sa demande, mais en enlevant à l'industrie, en faveur de laquelle il réclamait, la faible protection dont elle jouit.

Il y a là quelque chose que je ne puis admettre. J'aurais préféré la dernière conclusion de la commission permanente et l'observation de M. le ministre des affaires étrangères qu'il conviendrait d'attendre sur la question une série de pétitions afin de l'éclaircir complètement.

Voici cette dernière conclusion :

« Si la commission ne croit pas devoir soumettre dès à présent à la chambre des propositions formelles pour la modification de ces droits, elle émet cependant le vœu de voir bientôt le gouvernement procéder à une révision de ces dispositions qu'elle croit nuisibles à notre agriculture sans aucun avantage pour l'industrie ni pour le trésor. »

Voilà une conclusion que je trouve admissible; mais la commission ne se borne pas à cela; tournez le feuillet et vous verrez qu'elle propose un projet de loi. (Interruption.)

Il n'en est pas moins vrai qu'un pétitionnaire qui demande protection doit être étonné en voyant qu'on lui répond en supprimant la protection dont il jouit.

C'est ainsi qu'on veut petit à petit diminuer la protection dont jouissent toutes les industries du pays. Vous ne devez pas agir à la légère quand il s'agit d'une question aussi importante que la protection de notre industrie ; il faut que l'attention de la chambre soit sérieusement éveillée quand il s'agit de questions de cette nature.

Déjà dans une précédente séance, une opinion semblable s'est fait jour. Je demande que la chambre examine avec soin les propositions qui lui sont faites quand, à propos d'une demande de protection, on l'invite à diminuer celle dont jouit l'industrie qui réclame, car on parviendrait ainsi la supprimer insensiblement le système de protection que nous avions fini par établir; pendant plusieurs années, nous avons demandé protection pour notre industrie; il ne faut pas qu'on y porte atteinte. (Interruption.)

Puisque je suis interrompu à ma droite et à ma gauche, je répondrai à mes interrupteurs qu'ils ont bonne grâce à repousser mes observations quand les produits de leur province jouissent d'un droit protecteur supérieur à la valeur des objets Avant de refuser la légère protection que réclament les produits de nos provinces, je demanderai qu'ils renoncent aux droits protecteurs établis en faveur des houilles et de l'industrie métallurgique.

M. Bruneau, rapporteur. - Je suis étonné que l'honorable M. Delehaye, lui que nous avons l'habitude d'entendre défendre les intérêts de l'agriculture, les ait abandonnés dans cette circonstance. Je ne puis me l'expliquer que par cette considération qu'il a fait valoir lui-même, qu'il n'a pas lu le rapport; car s'il l'avait lu, il n'aurait pas dit ce qu'il vient de dire ; il aurait vu que les conclusions de la commission sont en faveur de l'agriculture. En effet, que demande le pétitionnaire? Il dit que les déchets de sabots d'animaux sont un engrais très utile, peuvent être employés d'une manière très avantageuse pour l'agriculture. Il pense que le moyen de les conserver c'est d'augmenter le droit à la sortie de ces déchets. La commission, partant de ce point de vue, veut faire droit à sa demande, mais par le seul moyen que la raison indique; elle vous propose un moyen qu'elle croit plus simple, plus rationnel ; il consiste à faciliter l'entrée de ces objets qui peuvent être utilisés comme engrais. Voilà la proposition qui vous est soumise.

La question n'est pas de savoir s'il faut favoriser l'emploi de cet engrais, mais quel est le moyen de le favoriser. Or, selon nous, c'est de diminuer le droit d'entrée. Le pétitionnaire prétend que c'est d'augmenter le droit de sortie. La commission est d'un avis contraire. Elle croit qu'il ne faut pas empêcher la sortie des déchets d'animaux, parce que c'est un produit de l'agriculture ; ce serait nuire à l'agriculture que d'empêcher la sortie d'un de ses produits.

L'agriculture a intérêt à la sortie de ces déchets, comme produits; d'un autre côté, elle a intérêt à leur entrée, parce qu'ils peuvent servir comme engrais.

Voilà le point de vue où la commission s'est placée et pourquoi elle a proposé une diminution de droit à l'entrée et à la sortie, pour faciliter d'une part l'introduction, et de l'autre l'exportation.

Voilà les considérations qui ont porté la commission à vous proposer un projet de loi dans les termes de celui qui vous est soumis.

M. Osy. - Je ne m'oppose pas au projet de loi, mais je désirerais que la commission d'industrie, avant de présenter un projet de loi, consultât le gouvernement.

Déjà l'honorable M. de La Coste vous avait présenté, sur le même objet, un projet de loi assez risible; plusieurs fois on a dû interrompre la séance.

Eh bien, vous devez vous rappeler que l'honorable M. de La Coste vous proposait un droit de 6 fr. Nous avons combattu cette exigence d'une fabrique voisine de Louvain. Nous avons admis un droit de 50 c. que nous avons trouvé suffisant. C'était en février 1847. Deux ans après, on change la loi; on propose 15 c. au lieu de 50, montant du droit actuel, au lieu de 6 fr. qu'on demandait. Si nous continuons cette marche, nous aurons tant de lois de douane que l'administration n'en sortira plus. Je ne m'oppose pas à l'adoption du projet de loi. Mais je crois que cette marche n'est pas régulière. Il serait préférable que la commission d'industrie se bornât à donner des indications et que le gouvernement élaborât une loi générale.

M. Delehaye. - Que je n'aie pas bien compris la loi, c'est bien possible, puisque je ne faisais pas partie de la commission. Mais M. le rapporteur a probablement oublie le contenu de son projet. Il n'a répondu qu'à une partie de mes objections. Il a perdu de vue l'article 2 sur lequel j'appelle l'attention de la chambre. Il dit : C'est dans l'intérêt de l'agriculture que le pétitionnaire demande une augmentation des droits de sortie. Nous croyons agir dans l'intérêt de l'agriculture en diminuant les droits d'entrée. Mais l'article 2 dit précisément le contraire. Il porte : « Art. 2. Les droits à la sortie sur les cornes et bouts de cornes de bœufs, vaches, buffles, moutons, chèvres, etc., fixés par le tarif de 1844 à 3 p.c, est réduit à 1 p. c. »

Vous le voyez, messieurs, si la commission réduit les droits à l'importation, elle les réduit également à la sortie. Ainsi, elle réduit le droit pour attirer des produits utiles à l'agriculture, et en même temps elle réduit les droits qui les empêchent de sortir. Vous voyez que je ne me suis pas trompé. Pour l'article premier, l'honorable membre a raison. Mais remarquez que l'article 2 réduit de 5 à 1 fr. le droit à la sortie sur des produits de l'agriculture.

M. Bruneau, rapporteur. - Les produits qui entrent doivent être considérés comme des produits non de l'agriculture, mais pour l'agriculture.

M. Delehaye. — Nous n'examinerons pas la question de savoir si un produit est un produit de l'agriculture ou pour l'agriculture.

Il s'agit de savoir si vous voulez quitter la voie que vous avez suivie jusqu'à présent, porter une main téméraire sur les principes qui forment la base de votre législation en matière de commerce et d'industrie.

(page 981) Il est vrai qu'un honorable député de Liège, donnant l'exemple d'un grand désintéressement, a demandé que les lois qui favorisent l'industrie des fers fussent retirées ; mais il est resté seul. Je ne puis qu'approuver le sentiment qui a guidé cet honorable collègue ; mais si je consulte la situation de l'industrie métallurgique et de l'industrie houillère, je ne vois pas que ces industries eussent beaucoup à s'applaudir du retrait de la protection.

Vous ne pouvez entrer dans cette voie, parce que les autres pays n'y entrent pas. Certainement la Belgique est assez avancée en industrie pour ne pas redouter l'adoption du système du « free trade ». Mais il y aurait duperie pour nous à le proclamer, alors qu'il n'est pas proclamé par des nations voisines, qui ont des colonies et d'autres ressources que nous n'avons pas.

J'adjure la chambre de ne pas émettre un vote qui pourrait avoir les conséquences les plus fâcheuses. Car cette loi a une grande portée au point de vue des principes.

Ce n'est pas quand une industrie demande une protection, qu'on peut lui répondre en enlevant à cette industrie le peu de protection qu'elle avait déjà.

M. Cools. - Si le gouvernement était en mesure de présenter un projet de révision générale du tarif des douanes, je comprendrais l'opposition que forment quelques honorables membres à l'adoption du projet de loi. Mais cette révision générale présente de grandes difficultés. Puisque nous ne nous jetons pas dans cette voie, ne serait-il pas mieux de chercher toutes les occasions de réparer les vices du tarif actuel? C'est ce que propose la commission d'industrie.

On nous engage à nous placer sur le terrain choisi par le pétitionnaire et qui a donné lieu au rapport. Je conçois que l'on puisse alléguer toute espèce de motifs pour faire agréer une pétition par la chambre. Mais ce que je ne conçois pas, c'est que dans la discussion on invoque les intérêts de l'agriculture, pour engager la chambre à se placer sur le terrain choisi par le pétitionnaire.

Ce n'est pas à propos d'une pétition relative aux droits de sortie sur les cornes d'animaux qu'il s'agit de discuter les principes généraux en matière de libre échange et de système protecteur; mais, nous renfermant dans la question spéciale soulevée par le pétitionnaire, il est certain qu'elle est avant tout agricole, et qu'à ce point de vue il n'y a rien de mieux à faire que d'adopter les conclusions de la commission.

Evidemment l'intérêt de l'agriculture est qu'il y ait dans le pays une grande abondance de résidus d'animaux de nature à faire du fumier. Sous ce rapport, nous avons plutôt intérêt à attirer ces produits en Belgique qu'à les laisser sortir; ce n'est pas en Belgique que ces résidus se trouvent en grande abondance, parce qu'on ne s'y occupe pas spécialement de l'élève du bétail.

Il y a donc un grand intérêt abaisser les droits d'entrée. Mais il n'en est pas de même cependant sur toutes les frontières. Il y a des provinces où les sabots ont plus de valeur à l'intérieur qu'au dehors. Si donc nous voulons accorder une protection à l'éleveur, il faut abaisser les droits de sortie ; car des droits élevés empêcheraient l'éleveur de tirer tout le parti possible de ces produits ; il devrait vendre à l'intérieur à meilleur marché qu'il ne vendrait au dehors.

Sous ce rapport, il y a évidemment intérêt à adopter l'abaissement des droits d'entrée et de sortie proposé par la commission d'industrie. Les deux propositions de la commission se concilient donc parfaitement. Je voterai leur adoption.

M. Le Hon. - Il s'élève dans mon esprit un doute grave sur la régularité du mode de conclusion que vous présente la commission d'industrie. Je n'examine pas, dans ce moment, quel peut être le degré d'importance de l'objet qu'elle a traité : je me borne à remarquer que le projet de la commission a pour but de changer une loi existante et une loi de tarif douanier. Quel est, en général, le mode usité pour procéder a quelque changement dans la législation? C'est ou une proposition directe du gouvernement ou une proposition émanée de l'initiative des membres de la chambre. Dans ces deux cas, les projets subissent l'examen des sections ; ce n'est qu'après discussion en section centrale et sur le rapport de cette dernière, que le chambre délibère et décide.

Quelle est la mission de la commission d'industrie ?

Chargée de vous faire rapport sur les pétitions, en matière d'industrie, que la chambre lui renvoie, elle les analyse, les apprécie, leur accorde son appui ou en propose le rejet, et soumet soit des conclusions motivées, soit même des projets de résolution, s'il y a lieu.

Si elle reconnaît qu'il y a réellement des motifs d'apporter des changements à une loi existante, peut-elle vous saisir d'un projet de loi qui, par dérogation à vos règles établies, ait le privilège d'être mis immédiatement en délibération, sans avoir passé par les épreuves successives de l'examen prescrit par les règlements? Je vous avoue que c'est pour moi un doute très grave.

Voyez, messieurs, où un tel mode de procéder peut vous entraîner. Il s'agit aujourd'hui, je suppose, d'une question de mince intérêt. Mais si vos règles peuvent être méconnues dans ce cas, elles peuvent être violées également dans les questions les plus graves; car, assurément, la commission d'industrie aura les mêmes droits, quelle que soit l'importance de l'objet sur lequel elle aura délibéré. Or, c'est un principe dont les conséquences seraient bien dangereuses.

Que voyons-nous, en effet ? On invoque l'intérêt de l'agriculture et de l'industrie pour combattre le projet de la commission comme pour le soutenir ; et lorsque la commission, animée d'excellentes intentions et composée d'hommes éclairés, vous propose des mesures repoussées par d'autres membres également versés dans ces matières, je me demande si l'affaire est suffisamment étudiée et mûrie, pour que vous puissiez apporter un changement immédiat au tarif existant.

Remarquez, messieurs, qu'en fait de protection et de tarifs, tout s'enchaîne. Si vous admettez le système proposé par l'honorable rapporteur, de procéder successivement en cette matière par voie de modifications partielles, vous entrerez dans un dédale dont peut-être vous aurez vous-mêmes de la peine à sortir, tant il vous sera difficile de conserver la concordance et l'harmonie entre les décisions et les principes, entre l'ensemble et les détails.

L'honorable M. Osy vous l'a dit tout à l'heure : dans une session précédente, on est venu vous proposer, en vertu de la même initiative, un droit protecteur de 6 fr. sur les objets dont il s'agit. La discussion est venue aboutira un droit de 50 centimes. Aujourd'hui on vous demande d'abaisser ce droit à 15 centimes. Où est la vérité dans ces phases diverses de la question ? Que disent les faits? Que veulent les principes ? Je crois que l'on s'écarte de la voie qu'ils nous ont tracée, lorsqu'on abandonne les seules véritables garanties des décisions de la chambre, surtout en de graves conflits d'intérêts, c'est-à-dire les épreuves de l'examen successif en sections et en section centrale, voire même de l'avis préalable des conseils spéciaux.

Quant à moi, je crois que les propositions ou conclusions de la commission d'industrie ne sont pas absolument affranchies des formes et des garanties prescrites par le règlement. Lorsqu'elle pense qu'une pétition est fondée, elle doit, selon moi, en déduire tous les moyens, toutes les raisons et demander le renvoi au gouvernement. Si le gouvernement ne défère pas au vœu des pétitionnaires appuyé par la chambre, alors un membre ou cette commission elle-même peut user de son initiative, et la proposition qu'il soumet à la chambre est renvoyée aux sections ; elle subit toutes les épreuves prescrites par le règlement.

Je voterai, par ces motifs, contre le projet de loi que je crois en dehors des attributions de la commission d'industrie.

M. Lesoinne. - J'ai demandé la parole pour répondre quelques mots à l'honorable M. Delehaye.

Lorsqu'il sera question de la révision des tarifs que M. le ministre des affaires étrangères nous a annoncée, nous examinerons toutes les questions qui se rattachent au système commercial qui nous régit aujourd'hui. Nous verrons alors quels ont été pour notre industrie les résultats du système protecteur.

Mais l'honorable M. Delehaye m'a fait un mérite de mon abnégation pour les intérêts de ma province. J'ai demandé la liberté dans les transactions commerciales, parce que j'ai la conviction intime, la conviction profonde qu'elle sera favorable au bien-être de mon pays. Je demande la liberté pour le bien de ma province comme pour celui du pays tout entier. Je ne puis donc accepter le mérite que l'honorable M. Delehaye a voulu me faire de mon abnégation.

Il vous a dit aussi qu'il ne fallait pas toucher légèrement au système qui est aujourd'hui en vigueur, qu'il défendrait ce système, et que la chambre paraît vouloir l'attaquer en détail. L'honorable membre ne s'est pas toujours montré aussi scrupuleux à cet égard. Car, lors de la discussion du projet de loi sur les céréales, il s'est relâché de ses principes. Il a voté contre l'amendement de l'honorable M. Coomans qui proposait de porter le droit protecteur à 2 fr., mais il s'est rallié au droit de 50 c, et il a voté pour cette protection qui paraissait insuffisante à l'honorable M. Coomans.

M. Manilius. - Comme faisant partie de la commission d'industrie, je ne puis laisser passer sous silence les observations de l'honorable M. Le Hon, qui conteste à cette commission le droit de proposer des projets de loi.

Il invoque les antécédents; mais je dois le dire, sa mémoire n'est pas heureuse. Il devrait savoir que déjà une quantité de lois ont été votées sur la proposition de la commission permanente d'industrie. (Interruption.) Je suis persuadé que l'honorable membre a toujours suivi les débats de la chambre et dès lors je suis en droit de dire que dans cette circonstance sa mémoire lui a fait défaut. Heureusement M. Le Hon n'invoque que les précédents. S'il avait invoqué le règlement, je lui aurais signalé l'article 39 qui est positivement en faveur de la résolution prise par la commission d'industrie. Rien n'est d'ailleurs plus naturel que cette résolution. Pourquoi renvoie-t-on une pétition à la commission d'industrie? Parce que c'est une commission spéciale, parce qu'elle est nommée par la chambre pour examiner spécialement des objets qui sont de la compétence d'hommes spéciaux. Il en résulte qu'elle a la même mission que les sections centrales qui sont chargées de formuler des propositions ou des modifications de lois.

Puisque j'ai la parole, je tiens à déclarer que j'ai fait partie de la minorité dans cette question. J'ajouterai que, le plus souvent, quand la commission propose une loi, elle est, en quelque sorte, d'accord avec le gouvernement parce que toujours elle lui demande tous les renseignements nécessaires. C'est ce qu'elle a fait également dans cette occurrence. Il est vrai que le gouvernement n'a pas été d'accord avec la majorité de la commission, mais la majorité de la commission a persisté et maintenant il paraît que le gouvernement est revenu à d'autres sentiments. (Interruption.) C'est d'après M. le rapporteur que je croyais pouvoir avancer ce fait ; il paraît que M. le rapporteur est dans l'erreur.

Quoi qu'il en soit, je tiens à déclarer qu'à mon avis la commission a (page 982) posé un acte qui rentre dans ses attributions et qu'elle n'use de ses pouvoirs qu'avec la plus grande réserve.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je crois, messieurs, que l'article 59 du règlement a toujours été interprété comme vient de l'indiquer M. Manilius. Très souvent la commission d'industrie a présenté des projets de loi qui ont été votés par les chambres. Je crois donc que nous ne pouvons pas contester ce droit à la commission d'industrie, mais je pense avec les honorables préopinants et avec l'honorable M. Le Hon, qui a fait valoir d'excellentes raisons à cet égard, que la commission doit user de beaucoup de réserve. En effet, elle n'est pas aussi à même que le gouvernement de consulter tous les intérêts engagés dans de semblables questions. Ainsi, lorsque des pétitionnaires viennent demander des modifications au tarif des douanes, à moins que ces demandes n'aient un caractère d'urgence, il conviendrait que la commission d'industrie en proposât le renvoi à l'examen du gouvernement, en les lui recommandant par tous les motifs qu'elle voudrait développer. Mais qu'à chaque instant, à propos d'une pétition, la commission d'industrie vienne saisir la chambre d'un projet de loi, il y aurait à cela de grands inconvénients et même certains dangers.

La commission peut bien demander un avis au gouvernement, mais le gouvernement n'est pas toujours à même d'émettre immédiatement une opinion tout à fait éclairée sur telle ou telle question de douanes. Quand une question se rattache aux plus grands intérêts de l'agriculture, de l'industrie et du commerce, il faut souvent une longue instruction pour qu'une loi puisse être convenablement préparée.

J'ai dit tout à l'heure que le gouvernement est saisi de différentes réclamations du même genre; eh bien, ces réclamations, le gouvernement s'empresse de les faire instruire, et lorsqu'il n'y a pas urgence, il attend qu'il ait une série de propositions à soumettre à la chambre. C'est ainsi qu'il a quelquefois présenté des projets de modifications au tarif des douanes qui comprenaient un grand nombre d'articles.

Je dois donc regretter que la commission ait cru devoir prendre l'initiative, qu'elle ne se soit pas bornée, comme elle l'avait fait pour d'autres objets, à proposer le renvoi au gouvernement. Cependant je me suis rallié au projet, parce que je n'y vois pas d'inconvénient. Il ne s'agit pas ici d’un droit très protecteur; le droit n'équivaut, en moyenne, qu'à 1 p. c; la commission propose de le réduire à 1/2, tant à l'entrée qu'à la sortie. Evidemment cette mesure a trop peu d'importance pour pouvoir entraîner des inconvénients. Le mouvement d'entrée et de sortie est très faible, les droits perçus ne s'élèvent qu'à quelques centaines de francs. Je n'ai donc pas cru devoir m'opposer à la proposition ; mais je me permettrai de recommander à la commission d'industrie de n'user de ses prérogatives qu'après s'être entourée de tous les renseignements désirables, et lorsqu'il s'agit d'un objet qui a un véritable caractère d'urgence.

M. Julliot. - Je tiens à ce que la chambre s'explique sur le point de savoir si elle reconnaît à la commission d'industrie ce droit exorbitant, (Interruption.)

M. Bruneau, rapporteur. - Messieurs, je dois défendre le droit de la commission permanente d'industrie. Il me paraît que ce droit est écrit d'une manière bien positive dans l’article 39 du règlement, cet article dit :

Les deux commissions permanentes sont chargées, chacune dans les matières qu'indique sa dénomination :

« 1° De fournir à la chambre tous les renseignements qu'elle les charge de recueillir sur une proposition ;

« 2° D'examiner les propositions que la chambre leur renvoie ; de faire rapport et présenter des conclusions motivées sur ces propositions;

« 3° De préparer des projets de résolutions, s'il y a lieu, sur des pétitions assez importantes pour que la chambre juge à propos de les leur renvoyer ;

« 1° de proposer à la chambre des projets de résolutions. »

Eh bien, messieurs, qu'est-ce qu'un projet de loi? C'est évidemment un projet de résolution.

Maintenait que fait la commission d'industrie? Ce n'est pas elle qui a pris l'initiative de ce projet de loi, c'est la chambre, en lui renvoyant une pétition qu'elle avait déjà examinée elle-même. Si la chambre n'avait pas eu l'intention de charger la commission de présenter un projet de loi, si elle avait seulement eu en vue un renvoi au ministre de l'intérieur ou au ministre des affaires étrangères, elle n'avait pas besoin d'adresser la pétition à la commission d'industrie. Cela était parfaitement inutile. A quoi aurait-il servi que nous fussions venus dire à la chambre : « Nous proposons le renvoi de la pétition au gouvernement pour qu'il l'examine avec attention. Lorsqu'on renvoie une pétition au gouvernement, c'est toujours pour qu'il l'examine avec attention.

La commission n'agit pas non plus à la légère. Lorsque l'objet est très important, lorsque des renseignements sont nécessaires, elle propose le renvoi au gouvernement; mais dans les deux cas dont nous avons à nous occuper aujourd’hui, la commission a cru que l'objet était assez peu imposant pour qu'elle pût soumettre directement à la chambre un projet de loi, et elle a accompagné ce projet d'un rapport comprenant tous les détails que la matière comporte. Si maintenant la chambre ne se croit pas suffisamment instruite, qu'elle renvoie le projet aux sections; mais je crois que cela est parfaitement inutile, d'autant plus que le gouvernement se rallie à la proposition de la commission.

M. Le Hon. - Messieurs, je ne ferai qu'une observation en réponse à ce que vient de dire l'honorable membre ; il vous a déclaré que l'objet de la pétition est assez peu important, pour que la commission d'industrie ait cru pouvoir présenter son projet de résolution. Or, si je lis le paragraphe 3 de l'article 89, j'y vois un tout autre esprit et un tout autre sens ; car il porte : « La commission est chargée de préparer les projets de résolution, s'il y a lieu, sur des pétitions assez importantes pour que la chambre juge à propos de les leur renvoyer. »

De sorte que c'est à raison de l'importance de la pétition que la commission d'industrie serait, dans l'esprit du règlement, chargée de préparer une résolution ; et d'après l'observation de l'honorable rapporteur, ce serait à raison de son peu d'intérêt que la commission aurait cru devoir procéder par voie de proposition de loi.

Du reste, je ne prétends pas condamner les précédents de l'assemblée, s'ils existent; mais il y a toujours la question de prudence, de convenance et d'opportunité. Eh bien, je dis qu'en matière de tarif de douanes, vous entrez dans des voies inextricables si vous prenez des résolutions isolées et partielles sur les spécialités diverses d'intérêt qui peuvent vous être soumises par voie de pétition.

Et d'ailleurs, il ne s'agit pas pour le moment de la forme de projets de loi dans l'article 59; les précédents de la chambre semblent avoir admis que la commission d'industrie pouvait procéder ainsi; mais il sera sans doute permis à ma raison d'examiner jusqu'à quel point le terme général de « proposition » dont se sert l'article 59 embrasse nécessairement les propositions de loi, ayant droit à une discussion immédiate, alors même qu'il s'agit de changer des lois existantes. Je dis qu'il y a ici une question très grave : rien ne prête plus à la contradiction et à l'arbitraire que les décisions partielles en matière de douanes, car vous vous trouviez toujours placés entre deux prétentions opposées.

En résumé, je pense que l'article 59 n'est pas aussi absolu que l'honorable M. Manilius et l'honorable rapporteur le soutiennent.

M. Delehaye. - Messieurs, j'ai à vous soumettre une autre considération sur laquelle j'appelle votre attention. Lorsque le gouvernement vous soumet un projet de loi modifiant une loi de douane, vous lui demandez tout d'abord s'il a consulté les chambres de commerce ; eh bien, vous vous conformeriez à vos antécédents, en exigeant la même chose pour le projet de loi qui vous est soumis par la commission d'industrie.

Maintenant, je n'attacherais pas une grande importance à la question qui vient d'être traitée par l'honorable M. Le Hon, je crois que, comme chaque membre de la chambre, la commission d'industrie doit avoir le droit d'initiative. Mais au moins, il conviendrait que la commission nous donnât les renseignements qu'en pareil cas nous avons le droit de demander au gouvernement.

La commission d'industrie a présenté un autre projet de loi, qui est la conséquence d'une pétition adressée à la chambre par des bouchers et des tanneurs de Gand. La commission se prétend mieux instruite des intérêts de la tannerie que des pétitionnaires eux-mêmes. Les pétitionnaires demandent une augmentation des droits à l'entrée sur les cuirs étrangers, et la commission propose, au contraire, une diminution de ces droits.

J'ai une grande confiance dans les lumières de la commission, mais je dois dire que parmi les pétitionnaires il y a des hommes très intelligents. Faudra-t-il que j'aie plus de confiance dans la commission qui propose une mesure tout opposée à celle que provoquaient les pétitionnaires ? Et c'est au nom de l'intérêt de tous les consommateurs belges qu'ils ont présenté leur pétition, et j'ai fait valoir le même intérêt, quand j'ai demandé le renvoi de la pétition à la commission d'industrie. Maintenant que la commission vient déclarer que les pétitionnaires n'entendent pas leurs intérêts, que faut-il faire ? Renvoyer le projet de loi au gouvernement, pour qu'il nous donne des renseignements. Je propose formellement le renvoi des deux projets de loi au gouvernement.

Un mot encore à un honorable député de Liège. Oui, je suis partisan des droits protecteurs ; mais je n'étais pas en contradiction avec moi-même, quand j'ai combattu la proposition de l'honorable M. Coomans, Que prouve la position que j'ai prise dans cette circonstance? C'est que je ne veux d'exagération d'aucun côté; j'ai combattu et je combattrai les exagérations dans les deux sens ; mais il y a peut-être plus d'exagération dans le système de liberté commerciale que dans le système qui nous régit aujourd'hui et dont l'industrie houilleresse n'a pas tant à se plaindre.

Je persiste à demander le renvoi des deux projets de loi au gouvernement.

M. Bruneau, rapporteur. - Alors il faut discuter à la fois les deux projets.

M. Delfosse. - L'honorable M. Delehaye aura peut-être raison de demander le renvoi au gouvernement du projet de loi qui sera discuté tantôt ; il pourra être utile que le gouvernement donne des explications sur ce projet. Mais quant au projet actuellement en discussion, le renvoi serait inutile, M. le ministre des affaires étrangères vient de s'expliquer.

M. Coomans. - Messieurs, je voulais engager la chambre à ne pas voter le projet de loi. Divers orateurs ont fait observer que ce projet était favorable à l’agriculture ; mais la vérité est que l'agriculture n'a absolument rien à y gagner. Ces cadeaux de bouts de chandelles, faits ostensiblement à l'agriculture, se réduisent à zéro; ils ont l'air de la protéger, et l'abandonnent à ses propres forces; quand les partisans du libre échangé lui auront fait une demi-douzaine de cadeaux du même genre, (page 983) ils lui diront : « Vous voilà puissamment protégée, tirez-vous d'affaire pour le reste ». Je voterai contre le projet.

- La discussion sur l'article premier est close.

M. le président. - Il y a à statuer sur la proposition de M. Delehaye, qui propose le renvoi des deux projets de loi au gouvernement.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, quant au premier projet de loi, il n'y a pas d'inconvénient à le voter.

Si l'honorable membre veut persister dans sa proposition, c'est comme il l'entendra, mais je ne pourrais donner d'autres explications que celles qui se trouvent dans le rapport et celles que j'ai données moi-même.

M. Delehaye. - D'après les explications que vient de donner M. le ministre, je ne persiste pas dans ma proposition quant au projet dont il s'agit, mais je la renouvellerai pour l'autre projet.

- L'article premier est mis aux voix. Il n'est pas adopté.

M. Bruneau. - Les autres articles tombent.

M. Osy. - Je propose le renvoi à M. le ministre des affaires étrangères.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je crois que la chambre, en rejetant le projet de loi, vient de prendre une résolution définitive sur les propositions de la commission d'industrie. Le renvoi proposé par l'honorable M. Osy me paraît complètement inutile après la résolution de la chambre, du moins en ce qui concerne la demande d'explications, car il n'y a plus d'explications à donner à la chambre après la discussion qu'elle vient d'entendre.

M. Rousselle. — Je crois qu'il n'a pas été dans l'intention de la majorité de repousser la pétition du sieur Chercq; beaucoup de membres ont repoussé l'article premier du projet de loi, et je suis de ce nombre, parce qu'ils ont trouvé irrégulière la forme dans laquelle le projet avait été présenté à la chambre. J'appuie donc la proposition de M. Osy de renvoyer la pétition à M. le ministre des affaires étrangères.

M. David. - Nous n'avons voté que sur l'article premier, nous pouvons voter les autres articles; l'article 2 est favorable à l'agriculture, il permettra à l'agriculture d'exporter et de vendre à des prix supérieurs certains objets à l'étranger.

M. Osy. - Je n'ai pas voté pour l'article premier parce que je désire que ces différents projets de loi soient réunis dans une loi générale afin que nous n'ayons pas une espèce de carte d'échantillons où la douane se perd. Je demande que le rapport et les pétitions soient renvoyés au ministre des affaires étrangères pour qu'il nous propose ce qu'il jugera à propos quant à l'objet particulier dont il s'agit, et aux autres dont il est question dans le rapport.

M. David. - Je retire ma proposition.

- Le renvoi de la pétition à M. le ministre des affaires étrangères est mis aux voix et adopté.

M. Cans (pour une motion d’ordre). - Je demande la parole, afin de prier la chambre de s'expliquer sur la mission qu'elle entend donner à la commission d'industrie dont j'ai l'honneur de faire partie. Pour repousser la proposition qu'elle vous avait faite, beaucoup de membres ont donné pour raison qu'elle n'avait pas le droit de présenter des projets de lois. La chambre va comprendre qu'elle doit s'expliquer sur l'interprétation à donner à l'art. 59 avant que la commission d'industrie puisse s'occuper des nombreuses questions qui lui ont été renvoyées, car il faut qu'elle soit fixée sur la mission que la chambre entend lui donner.

M. Cools. - Je crois que nous n'avons aucune résolution à prendre sur la motion qui vient d'être faite. Le droit de la commission reste entier ; d'après le règlement, elle a le droit de faire des propositions de loi; mais la chambre croit qu'il y a lieu de faire le moins possible usage de ce droit; la chambre, en rejetant l'article premier, s'est trouvée d'accord sur ce point avec ceux qui ont contesté le droit à la commission ; mais sa décision n'implique rien au-delà. Le droit existe, mais il faut en faire usage le moins possible. Le vote que la chambre vient d'émettre signifie seulement que, dans le cas où il n'y avait pas lieu pour la commission de faire usage de son droit, elle aurait dû se borner à renvoyer la pétition au gouvernement.

Je pense qu'il n’y a pas de changement à apporter incidemment à un règlement qui existe depuis longtemps. Le vote que la chambre vient d'émettre ne le modifie en rien. Elle s'est simplement prononcée sur l'opportunité de faire usage, dans le cas actuel, du droit inscrit dans le règlement.

M. Delehaye. - Je crois qu'il n'est entré dans l'intention de personne de contester le droit de la commission d'industrie; aujourd'hui la question était de savoir si elle présentait des garanties suffisantes pour l'objet dont il s'agissait, s'il ne convenait pas de le renvoyer à l'examen d'autres hommes. Toutes les fois que nous avons été saisis de projets semblables, nous avons voulu qu'on consultât les chambres de commerce; c'est parce qu'elles n'avaient pas été consultées que nous avons demandé le renvoi au gouvernement des pétitions et du rapport, c'est dans ce sens que nous avons combattu la proposition de la commission d'industrie.

M. Rousselle. - Je crois que la chambre ne saurait pas délibérer sur la motion d'ordre de l'honorable M. Cans. Evidemment, elle soulève un doute très grave sur le sens de l'article 59 de notre règlement.

Aux termes de l'article 59 du règlement, les commissions sont chargées :

«1° De fournir à la chambre tous les renseignements qu'elle les charge de recueillir sur une proposition ;

« 2° D'examiner les propositions que la chambre leur renvoie; de faire rapport et présenter des conclusions motivées sur ces propositions;

« 3° De préparer des projets de résolutions, s'il y a lieu, sur des pétitions assez importantes pour que la chambre juge à propos de lés leur renvoyer;

« 4° De proposer à la chambre des projets de résolutions.»

Lorsque le règlement parle d'une loi, il se sert toujours du mot « proposition ». Or le mot « résolution » employé ici ne peut entraîner le droit de présenter des propositions de lois sur lesquelles la chambre serait tenue de délibérer sans l'examen préalable prescrit pour faire les lois. Par projets de résolution, j'entends que la commission viendra dire : « Voici une pétition se rattachant à l'industrie, à l'agriculture. Il convient de l'envoyer à l'examen des chambres de commerce, des commissions d'agriculture, etc. Je conçois que la commission propose une résolution de cette nature. Mais quand il s'agit d'une proposition de loi, les formes sacramentelles doivent être respectées.

Tel est pour moi le résultat d'un premier examen.

Mais je ne crois pas que nous devions nous prononcer sur cette question aujourd'hui. Laissons-la entière.

M. Loos. - Il est très essentiel que la chambre se prononce sur la mission qu'elle entend donner à la commission d'industrie. Des pétitionnaires ont vainement demandé au gouvernement des réductions de droits. Si la commission d'industrie ne peut, quand elle trouve ces demandes fondées, présenter un projet de loi, je ne trouve plus aucun intérêt à en faire partie. La commission d'industrie, composée des membres considérés comme les plus compétents en ces matières, ne peut avoir moins de pouvoir qu'une section centrale. Si elle n'a plus que le pouvoir de proposer des renvois aux ministres, elle fait double emploi avec la commission des pétitions.

M. Delfosse. - Si la commission permanente d'industrie n'avait pas le droit de présenter des projets de loi, elle n'aurait pas d'autres attributions que la commission des pétitions, et pourquoi alors la chambre se serait-elle réservé le droit de nommer elle-même, au scrutin secret la commission permanente d'industrie?

L'article 59 du règlement me paraît clair, et il a paru tel à tous ceux qui ont été chargés de l'exécution du règlement depuis qu'il existe, depuis 18 ans.

Ce n'est pas sans motifs sérieux que l'on irait dépouiller la commission permanente d'industrie d'un droit dont elle use depuis 18 ans et qui ne lui a jamais été contesté.

Les inconvénients que l'on redoute sont imaginaires. Si la commission permanente d'industrie abusait de son droit; la chambre ne serait-elle pas là pour y mettre ordre ? La chambre ne réélirait pas les membres qui n'auraient pas répondu à sa confiance; elle pourrait aussi ordonner un nouvel examen ou le renvoi aux ministres, des projets de loi que cette commission aurait présentés trop légèrement.

D'honorables collègues paraissent croire que la chambre vient de mettre en question le droit que la commission a toujours eu de présenter des projets de loi. C'est une erreur, la chambre a au contraire reconnu ce droit en votant sur le fond même du projet de loi émané de la commission. Si la chambre n'avait pas admis la compétence de la commission , elle aurait repoussé le projet de loi par une fin de non-recevoir, elle n'aurait pas volé sur l'article premier.

M. Lesoinne. - Il n'en est pas moins vrai que beaucoup de membres ont voté contre l'article premier, précisément parce qu'ils ne reconnaissaient pas à la commission d'industrie le droit de présenter un projet de loi.

M. le président. - M. Cans fait-il une proposition formelle ?

M. Cans. - S'il y a doute, je demande qu'on vote.

M. Cools. - Nous ne pouvons prendre une résolution sur la proposition de l'honorable M. Cans, car nous ne pouvons dépouiller la commission d'industrie du droit qui résulte pour elle, comme pour chaque membre de la chambre, de faire usage de l'initiative qui, aux termes de l'article 27 de la Constitution, appartient à chacune des trois branches du pouvoir législatif. Une proposition émanant de la commission d'industrie n'est qu'un mode spécial de faire usage de ce droit; elle doit avoir les mêmes effets qu'une proposition émanant d'une section centrale. Lorsque la chambre, comme corps, charge la commission d'industrie d'examiner une question, elle lui délègue un droit que dans d'autres circonstances elle confie à une section centrale. De même qu'une section centrale fait une proposition de loi, de même la commission d'industrie peut eu faire une.

M. Loos. - Je crois en effet que c'est parce que la chambre était préoccupée de la question de savoir si la commission d'industrie avait le droit de présenter un projet de loi, qu'elle a rejeté l'article premier du projet de loi. Quelques membres ont pensé que la commission ne s'était pas entourée de tous les renseignements nécessaires, que la question n'était pas suffisamment instruite. Cela semble résulter les observations qui ont été présentées. Si la chambre ne trouve pas la question instruite, mieux vaudrait renvoyer aux sections que maintenir le rejet de l'article premier par le motif qui semble avoir guidé beaucoup de membres de cette chambre.

M. le président. - Il faudrait pour cela que la chambre revînt sur les deux votes qu'elle vient d'émettre.

(page 984) M. Loos. - Je ne fais pas de proposition. Ce que j'en dis, c'est parce que nous allons nous occuper d'un projet de loi très important qu'il serait très fâcheux de voir rejeter sous l'empire de la préoccupation qui semble avoir dominé la chambre tout à l'heure.

M. le président. - Le renvoi à M. le ministre des affaires étrangères est un fait accompli. Il n'y a plus lieu à revenir sur ce peint.

Proposition de loi visant à accorder une protection à la tannerie

Discussion générale

M. le président. - La commission d'industrie, à la suite de l'examen d'une pétition de plusieurs bouchers et tanneurs de Gand, analysée dans la séance du 16 janvier 1849, vous présente un projet de loi en un seul article.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, le gouvernement a été saisi par la chambre de commerce d'Anvers d'une proposition tendant au même but que le projet qui vous est soumis.

La chambre de commerce d'Anvers, dans une lettre adressée au gouvernement, a demandé une réduction de droits à la sortie sur les cuirs. Cette demande, messieurs, fait l'objet d'une instruction. Le gouvernement a même institué une commission mixte à Liège, composée des principaux tanneurs de la province d'une part et des membres de la commission d'agriculture d'autre part, pour examiner cette question. Le gouvernement poursuivra cette instruction.

Je demande dès lors s'il ne serait pas préférable de renvoyer également la proposition qui vous est faite en ce moment et la pétition au gouvernement.

Cette question, messieurs, est assez importante pour subir un examen complet. Si je me suis très facilement rallié à la proposition de la commission d'industrie, c'est parce que, comme l'honorable rapporteur en est lui-même convenu, elle n'avait qu'une faible importance ; mais ici il n'en est plus de même.

Ce ne sont pas quelques retards qui peuvent entraîner des inconvénients. Je crois que le gouvernement sera à même de vous faire une proposition plus complète, plus mûrie que celle que la commission d'industrie a pu vous soumettre.

Je pense donc qu'il serait utile de renvoyer le projet et la pétition au gouvernement.

M. le président. - La parole est à M. Delehaye.

M. Delehaye. - Je voulais présenter la proposition que vient de faire M. le ministre des affaires étrangères.

M. Bruneau, rapporteur. - Messieurs, je ne m'opposerai pas, comme rapporteur, au renvoi de la question au gouvernement, puisque M. le ministre des affaires étrangères nous annonce qu'il s'occupe d'un projet analogue. Je me bornerai à faire une seule observation en réponse à ce que vous a dit tantôt l'honorable M. Delehaye.

Cette pétition nous a été adressée par des individus de Gand qui n'indiquent pas leur qualité, mais qui déclarent réclamer en faveur de la tannerie belge; il n'est pas du tout parlé de bouchers.

Les pétitionnaires réclament en faveur de la tannerie ; ils demandent une augmentation de droits à l'entrée des cuirs verts et secs. La pétition est libellée de la manière suivante : « Les pétitionnaires réclament une augmentation de droits à l'entrée sur les cuirs étrangers qu'ils demandent de porter au moins à 25 p. c. sur les cuirs secs étrangers et à 15 p. c. sur les cuirs salés verts.»

L'honorable M. Delehaye a appuyé cette pétition, à ce qu'il nous a dit; mais il combat la proposition de la commission d'industrie qui arrive à une autre conclusion.

Je le répète, je ne m'oppose pas à un plus ample informé. Mais je veux qu'il soit constaté qu'il ne s'agit pas ici d'une pétition de bouchers en faveur de la boucherie, mais d'une pétition de personnes, qui n'indiquent pas leur qualité, en faveur de la tannerie qu'ils veulent protéger par des droits énormes à l'entrée sur les cuirs verts et secs.

M. Delehaye. - Messieurs, on dit qu'on ne connaissait pas la qualité des pétitionnaires. Je m'étonne de cette observation. Je jette les yeux sur le rapport et j'y lis : Pétition de plusieurs bouchers et tanneurs de Gand.

Je dois vous faire remarquer qu'un des motifs principaux pour lesquels cette pétition vous a été adressée, c'est qu'à plusieurs reprises on s'était plaint du prix excessif de la viande de boucherie. Les pétitionnaires indiquent les causes de cette cherté ; ils disent qu'elle provient du bas prix de certains produits qui ne peuvent être mis en consommation et entre autres les peaux; ils déclarent que si le prix de ces produits augmente, celui de la viande baissera.

M. Bruneau. - C'est absurde.

M. Delehaye. - On dit que c'est absurde. Mais parmi les pétitionnaires, il en est plusieurs que je connais et qui ne mettraient certainement pas leur nom au bas d'une pétition absurde. En fait de denrées de cette nature, je dois avoir une très grande confiance en ceux qui ont signé la pétition. (Interruption.)

On dit que la pétition est absurde. Mais lorsque les signataires de cette requête connaîtront la proposition de la commission d'industrie, ils pourront bien s'ils étaient moins bien élevés, dire aussi qu'elle est absurde. Une pétition n'est jamais absurde, lorsqu'elle émane d'un corps entier ne s'adressant à la chambre que dans un intérêt général.

Ne nous laissons donc pas influencer par ce reproche d'absurdité adressé à la pétition. Non, la pétition n'est pas absurde, et ce qui le prouve, c'est que la commission a cru qu'elle était assez importante pour donner lieu à une proposition de sa part. Lorsqu'une pétition est absurde, on n'y répond pas; mais lorsqu'à la suite de l'examen d'une pétition on croit devoir faire des propositions et surtout formuler un projet de loi, c'est que cette pétition présente un caractère d'importance, de gravité et d'opportunité.

Messieurs, je bornerai là mes observations, je n'ai demandé la parole que pour répondre quelques mots à l'honorable M. Bruneau. Je me joins à M. le ministre des affaires étrangères pour demander que la pétition et le rapport soient renvoyés au gouvernement.

M. Delfosse. - Il faut renvoyer la pétition non seulement à M. le ministre des affaires étrangères, mais aussi à M. le ministre de l'intérieur, qui a dans ses attributions le commerce et l'industrie.

M. de Renesse. - Il faut aussi qu'elle soit renvoyée à M. le ministre des finances.

- Le renvoi de la pétition et du projet à MM. les ministres des affaires étrangères, de l'intérieur et des finances, est ordonné.

Rapports sur des pétitions

M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Boitsfort, le 28 janvier 1849, plusieurs ouvriers occupés aux travaux de terrassement du chemin de fer de Bruxelles à Wavre, demandent que le gouvernement prenne des mesures pour faire continuer les travaux de la section de Wavre à Namur. »

Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Gand, le 27 février 1849, le sieur Cassiers, ancien militaire, congédié pour infirmités contractées au service, prie la chambre de lui accorder une pension. »

Renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée de Borgerhout, le 1er mars 1849, le sieur Dierickx, ancien employé aux ponts et chaussées, prie la chambre de lui faire obtenir un nouvel emploi. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - a Par pétition sans date, plusieurs jurés, électeurs et habitants du canton de Beeringen demandent que les assises du Limbourg se tiennent désormais à Hasselt.

« Même demande de plusieurs habitants de Hasselt. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Desoer, rapporteur. - « Par pétition datée d'Anvers, le 27 février 1849, le sieur Rabodé, ancien préposé des douanes, demande la révision de sa pension. »

Renvoi à M. le ministre des finances.

M. Delfosse. - Je demanderai pour cette pétition, comme pour les précédentes, un supplément d'instruction.

- Cette proposition est adoptée.


M. Thibaut, deuxième rapporteur. - « Par pétition datée de Landelies, le 1er septembre 1848, des membres de l'administration communale et des habitants de Landelies prient la chambre de reprendre l'examen du projet de loi sur le notarial, et de décréter le principe du libre exercice par arrondissement judiciaire. »

« Même demande de plusieurs habitants de Leernes.’

Messieurs, lorsque la chambre s'est occupée de la loi sur l'augmentation du nombre des notaires dans la ville de Bruxelles, M. le ministre de la justice nous a déclaré que le projet de loi sur le notariat, destiné à remplacer la loi du 17 nivôse, serait, aussi prochainement que possible, soumis à nos délibérations. Cette déclaration doit satisfaire les pétitionnaires.

Quant au libre exercice par arrondissement judiciaire, ou il se trouvera proposé dans le projet de loi, ou il pourra surgir de l'initiative des membres de la chambre.

Comme les pétitionnaires n'allèguent aucun motif nouveau à l'appui du vœu qu'ils énoncent, leur pétition ne peut éclairer ni le gouvernement ni les membres de la chambre. La commission des pétitions propose donc l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 22 mai 1848, le sieur Simon, se plaignent des lenteurs que l'on apporte, dit-il, à l'instruction de l'affaire intentée à l'avocat Spilthoorn, demande que l'on décide immédiatement s'il y a lieu de le renvoyer devant la cour d'assises. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 15 février 1849, le sieur Eugène Verhaegen demande une loi qui admette la prescription en matière pénale militaire. »

Messieurs, l'auteur de la pétition pense que la prescription en matière pénale militaire peut être invoquée sous la législation actuelle.

Il fait valoir, à l'appui de son opinion, un argument habilement puisé dans le rapprochement des articles 89 de la loi du 22 septembre 1790, 11 du Code pénal militaire de 1815, et 643 du Code d'instruction criminelle; il en conclut que l'action publique est prescrite au bout de dix années.

Quant à la prescription des peines, l'auteur de la pétition pense q’ elle est réglée par le chapitre V du titre VII du Code d'instruction criminelle; il en voit la preuve dans les termes des articles 635, 636 et 643.

Enfin, il réfute, pour le crime spécial de la désertion, l'objection puisée dans le caractère même de ce crime, et dans l'impossibilité où se trouve le ministère public d'en atteindre les auteurs.

En effet, la désertion n'est pas plus un crime successif que l'évasion de (page 985) détenus. Elle ne consiste que dans un seul fait, l'abandon du drapeau, et ce fait n'est pas de nature à se perpétuer. La désertion ne donne pas lieu, il est vrai, à la procédure par contumace; mais le but de l'article 191 du Code de procédure militaire, qui en décide ainsi, n'est autre que d'éviter la multiplicité inutile et même dangereuse des procédures.

Le ministère public pourra empêcher la prescription, en posant un acte d'instruction.

Cette doctrine, messieurs, est contraire à la jurisprudence de la haute cour militaire.

L'auteur de la pétition pense que si le recours en cassation avait été possible, cette jurisprudence ne se serait pas maintenue, ou aurait rendu nécessaire une loi interprétative.

Maintenant que la cour régulatrice connaîtra aussi, sous le rapport du droit, des décisions des tribunaux militaires, on peut croire que la question sera mieux approfondie. Mais convient-il d'attendre la solution de la cour de cassation même? Ne vaut-il pas mieux lever, par une mesure législative, un doute qui peut donner lieu à des procès inutiles, et empêcher surtout, par la crainte des poursuites et des frais qu'elles entraîneraient, le retour en Belgique de quelques-uns de ses enfants qui ont expié, par un long exil volontaire, les fautes de leur jeunesse? Ce dernier parti, basé surtout sur des considérations d'humanité, nous paraît, ainsi qu'à l’auteur de la pétition, être le plus raisonnable. C'est dans ce que la commission des pétitions propose le renvoi à M. le ministre de la justice.

- Adopté


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Lambusart, le 12 janvier 4849, l'administration communale de Lambusart demande une loi qui fixe la délimitation entre cette commune et celle de Moignelée. »

Les pétitionnaires nous font connaître qu'une contestation est pensante entre les communes de Moignelée et de Lambusart touchant la délimitation de leur territoire respectif, depuis plus de quarante ans.

L'instruction administrative de cette affaire est complète. Les conseils des deux communes et les députations permanentes auxquelles ils assortissent ont été entendus. il importe donc qu'une décision intervienne au plus tôt. C'est dans cette pensée que la commission de pétitions propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Hasselt, le 12 février 1849, les sieurs Nys, Neren et autres membres de la société de pharmacie du Limbourg demandent l'organisation de l'enseignement pharmaceutique. »

Messieurs, les pétitionnaires exposent l'importance de la pharmacie comme science ; les services qu'elle est appelée à rendre à l'agriculture, à l'industrie et aux arts. Ils pensent donc qu'il est urgent d'organiser son enseignement, et d'imposer aux pharmaciens des examens sérieux qui soient la garantie de leur capacité. Ils proposent d'imiter ce que la loi a sagement ordonné quant à la médecine et à la jurisprudence, c'est-à-dire l'enseignement dans les universités de l'Etat, le jury d'examen et les diplômes de candidat et de docteur.

On peut dire encore que la santé de l'homme, plus précieuse que la richesse, est intéressée au progrès de la pharmacie.

La commission des pétitions, sans se prononcer sur les moyens recommandés par la pétition, propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Liège, le 15 février 1849, le sieur Situons présente des observations sur les dépenses que l'on doit faire pour suivre l'enseignement universitaire. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Belleghem, le 13 février 1849, plusieurs instituteurs, dans l'arrondissement de Courtray, demandent la révision de la loi sur l'enseignement primaire. »

La révision de la loi sur l'enseignement primaire entre dans les projets du gouvernement. Les pétitionnaires ne signalant aucun des points sur lesquels ils appellent la réforme, la commission des pétillons propose l'ordre du jour.

M. de Perceval. - Messieurs, je ne puis me rallier à l'ordre du jour, et je demande le renvoi à M. le ministre de l'intérieur. Il me semble qu'une pétition qui demande la révision de la loi sur l'enseignement primaire peut bien être renvoyée à M. le ministre de l'intérieur, qui s'occupe déjà de cet objet.

M. Thibaut, rapporteur. - Messieurs, la commission des pétitions n'a pas proposé le renvoi au ministre de l'intérieur pour deux motifs : d'abord la révision de la loi sur l'enseignement primaire est dans les vues du gouvernement; récemment il s'en est expliqué, et il a déclaré qu'il s'occuperait de cette révision au moment opportun ; ensuite les pétitionnaires ne font porter leurs critiques sur aucun article de la loi ; ils ne spécifient aucun fait. La commission a pensé qu'il était inutile de renvoyer cette pétition au gouvernement, parce qu'elle ne servirait aucunement à l'éclairer.

M. de Perceval. - C'est précisément pour le premier motif allégué par M. le rapporteur, que je demande le renvoi à M. le ministre de l'intérieur. Ce renvoi confirmera davantage M. le ministre dans son intention de proposer la révision; il lui imprimera une marche plus franche et plus hardie.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je ne m'oppose en aucune manière au renvoi à M. le ministre de l'intérieur, mais je ne puis admettre que ce renvoi soit nécessaire pour imprimer au gouvernement une marche plus franche et plus hardie. Le gouvernement a fait connaître ses intentions et il s'y conformera. Je crois que le renvoi doit avoir lieu, parce qu'il s'occupe de la révision dont il s'agit.

- Le renvoi au ministre de l'intérieur est mis aux voix et adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Fosse, le 12 février 1849, le sieur Le Roy, instituteur à Fosse, demande que les pensions des instituteurs qui ne peuvent continuer à participer à la caisse de prévoyance des instituteurs primaires, soient liquidées, pour les années antérieures à l'établissement de la caisse, d'après le mode établi par l'arrêté royal du 31 décembre 1842. »

Messieurs, le pétitionnaire expose que les instituteurs urbains, associés, avant l'arrêté du 22 juin dernier, à une caisse provinciale de prévoyance, auraient intérêt à ce que leurs pensions fussent liquidées pour les années antérieures à l'établissement de la caisse centrale, d'après le mode établi par l'article 40 de l'arrêté du 31 décembre 1842. Il demande que la chambre prenne une décision en ce sens.

Le principe sur lequel le pétitionnaire doit nécessairement se fonder, c'est que tous participent à une caisse, à un droit absolu aux bénéfices qu'elle promet et que le gouvernement ne peut transférer ce droit d'une caisse à une autre caisse, du moins quand il en résulte un désavantage pour les intéressés.

Envisagée dans ces proportions la question est importante, et la commission des pétitions n'a pas cru devoir la juger. Elle propose en conséquence le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée d'Anvers, le 22 février 1849, un grand nombre d'habitants de la ville d'Anvers demandent que la garde civique soit divisée en deux bans, et que le premier ban soit composé déjeunes gens et de veufs sans enfants, de 21 à 35 ans.

« Même demande de plusieurs habitants de Courtray, Grivegnée, Tirlemont, Louvain, Liège et Saint-Trond. »

Messieurs, les pétitionnaires ne se sont peut-être pas bien pénétrés de l'économie de la loi du 8 mai 1848, qui réorganise la garde civique.

La principale mission de la garde civique est de veiller au maintien de l'ordre et des lois ; c'est pourquoi tous les Belges et même les étrangers admis à établir leur domicile en Belgique, sont appelés à en faire partie, et tous doivent être exercés au maniement des armes.

Mais dans la plupart des circonstances, le concours de tous les gardes est inutile : et si un service peut être imposé à quelques-uns d'entre eux, c'est à ceux qui peuvent, d'une part, en supporter plus facilement les frais, d'autre part, en retirer les plus grands avantages, qu'il doit incomber. Tel est le but du double contrôle dont l'un comprend les hommes appelés au service ordinaire et l'autre les hommes de réserve. La loi satisfait donc sous ce rapport à toutes les légitimes exigences.

En second lieu, la garde civique est appelée à veiller à la conservation de l'indépendance nationale et de l'intégrité du territoire.

Cette mission peut lui être confiée en temps de guerre. Alors la garde civique, ou plutôt une partie de la garde civique doit être mobilisée et placée dans les attributions du ministre de la guerre. L'organisation de la garde civique mobilisée sera réglée par une loi. C'est pour ce cas seulement que le vœu émis par les pétitionnaires peut être pris en considération, et c'est le sens que la commission des pétitions attache aux conclusions qu'elle a l'honneur de proposer.

Ces conclusions sont le renvoi à M. le ministre de l'intérieur pour les pétitions d'Anvers, de Courtray, de Grivegnée, de Tirlemont, de Liège et de Saint-Trond. Quant à celle de Louvain, elle est conçue en termes inconvenants, et la commission propose l'ordre du jour.

M. Coomans. - Messieurs, je voterai le renvoi à M. le ministre de l’intérieur, à la condition cependant que la chambre ne préjuge rien. Le rapport de M. Thibaut est assez sévère, et je ne voudrais pas que l’adoption des conclusions put être considérée comme une adhésion donnée au rapport lui-même. Je pense qu'il n'entre pas dans les intentions de la chambre de préjuger si la demande doit être accueillie ou non.

M. le président. - Il s'agit d'un renvoi pur et simple.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Tournay, le 8 mars 1847, le sieur Allard, avocat des héritiers Bacro, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir le payement d'une créance à charge de la commune de Wez-Velvain, et prie l'assemblée d'examiner le projet de loi relatif à la création d'office d'impositions communales pour assurer le payement des dépenses obligatoires. »

Messieurs, le pétitionnaire réclame, au nom d'un intérêt privé, contre une lacune qui existe dans la loi communale.

Il est certain que les communes peuvent, lorsqu'elles se trouvent dans le cas particulier de la commune de Wez-Velvain, c'est-à-dire dans l'impossibilité de faire face à leurs obligations autrement que par une taxe personnelle, opposer à leurs créanciers et aux autorités supérieures une force d'inertie insurmontable.

Un projet de loi a été proposé, il y a quelques années, pour obvier à cet inconvénient qui est très grave. La commission des pétitions s'associe au pétitionnaire pour que ce projet soit soumis aux délibérations des (page 986) chambres. C'est pourquoi elle propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. Julliot. - Messieurs, si j'ai bien compris le rapport, il s'agit d'un procès entre particuliers, et en ce cas je proposerai l'ordre du jour.

M. Thibaut. - Il paraît, messieurs, que les pétitionnaires ont été trompés par un avocat nommé Deneck ; ils se sont pourvus devant le tribunal, moyennant un pro Deo et un avocat leur a été donné d'office pour plaider contre le sieur Deneck; la procédure a traîné en longueur. La commission ne pouvant pas bien se rendre compte de ces faits a proposé le renvoi à M. le ministre de la justice, pour qu'il voulût bien, dans la limite de ses attributions, activer cette procédure. Depuis lors nous avons appris que l'avocat Deneck a quitté la Belgique, et que par conséquent les poursuites ne peuvent plus avoir de résultat; c'est ce qui explique probablement l'inaction de l'avocat qui avait été donné d'office aux pétitionnaires.

D'après ces circonstances, je ne vois pas d'inconvénient à ce que la chambre passe à l'ordre du jour.

M. de Perceval. - J'appuie l'ordre du jour, qui me semble très rationnel; c'est une affaire privée.

- L'ordre du jour est mis aux voix et adopté.

M. Thibaut, rapporteur. - «i Par pétition de Tournay, octobre 1844, les héritiers Bacro demandent que les communes puissent être contraintes à payer leurs dettes reconnues en justice. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Vielsalm, le 22 décembre 1847, le conseil de fabrique de l'église de Vielsalm réclame l'intervention de la chambre pour que le gouvernement fasse reconstruire, aux frais de l'Etat, la partie du mur de soutènement du cimetière de la commune qui a été démolie pour établir l'assiette de la route de Salm-Château à Trois-Ponts, et qu'il lui paye une indemnité pour l'emprise qu'il a faite sur le cimetière. »

Messieurs, le principe invoqué par le pétitionnaire repose dans l'article 545 du Code civil. Une emprise a été faite dans le cimetière de Vielsalm pour l'établissement d'une grande route. Le gouvernement qui a décrété la route est responsable des indemnités dues aux propriétaires obligés à céder les terrains nécessaires pour cette route, soit qu'elles doivent être payées par l'Etat, soit qu'elles soient mises à charge des entrepreneurs; et les cimetières entrent, sous ce rapport, dans le droit commun.

La commission propose donc le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Namur, le 25 mars 1848, le sieur Hector demande que le gouvernement supprime la place de conservateur des archives à Namur. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée d'Alost, le 10 juillet 1848, les sieurs Josse et Pierre Michiels prient la chambre de statuer sur leur demande tendant à leur faire obtenir un jugement contre l'avocat qui a été chargé de défendre leurs droits dans une affaire de succession. »


Renvoi à M. le ministre de la justice.

- Adopté.

M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Couvin, le 6 mai 1848, les administrateurs du bureau de bienfaisance de Couvin demandent la remise du droit de succession sur un legs qui a été fait aux pauvres de cette commune. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles, le 30 novembre 1848, le sieur Froidmont, ancien professeur à l'école vétérinaire et d'agriculture de l'Etat, qui a été admis à faire valoir ses droits à la retraite, demande à être placé ans la position de disponibilité ou de non activité, avec jouissance de deux tiers, ou au moins de moitié de son traitement. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. Osy. - Il paraît, messieurs, que d'après nos résolutions antérieures nous devons passer à l'ordre du jour. C'est un ancien fonctionnaire admis à la pension qui demande maintenant à être placé dans une position plus favorable.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Est-ce qu'il s'est adressé au gouvernement?

M. Thibaut. - Il dit qu'il s'est adressé au gouvernement qui aurait pris une résolution. Il invoque une convention qui serait intervenue pour la reprise par l'Etat d'une école particulière qu'il avait établie à Bruxelles.

M. Osy. - Il y a une masse de fonctionnaires qui viennent d'être mis ou qu'on va mettre en retraite. Si nous renvoyons de semblables pétitions au gouvernement, tout le monde nous adressera des réclamations de cette nature; on aimera mieux naturellement recevoir les deux tiers de son traitement que d'être pensionné. J'insiste pour l'ordre du jour.

- L'ordre du jour est adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée du 21 janvier 1849, les instituteurs communaux des cantons de Maeseyck et Machelen demandent que le traitement des instituteurs sont à a charge de l’État ; qu'il soit au moins de 900 fr., et que les commune sperçoiven à leur profit les rétributions des élèves solvables.

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Thibaut, rapporteur. - « Par pétition datée de Spa, le 28 janvier 1849, le sieur Dérive, institution communal à Spa, soumet à la chambre des considérations sur la nécessité de réformer le système d'inspection pour l’enseignement primaire. »

Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.

La séance est levée à 4 heures et un quart.