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Congrès national de Belgique
Séance du vendredi 4 mars 1831

(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 2)

(page 656) (Présidence de M. Destouvelles, premier vice-président)

La séance est ouverte à une heure. (P. V.)

Lecture du procès-verbal

M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il est adopté. (P. V.)

Pièces adressées au Congrès

M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, présente l'analyse des pétitions suivantes :

M. de Moor demande l'abolition des privilèges du notariat.


M. de Page présente des observations sur les distilleries.


Des habitants de Gand demandent la république.


Des habitants d'Anvers demandent le rapport du décret du 24 novembre.


La régence de Liége transmet au congrès un mémoire sur les distilleries.


Plusieurs négociants d'Anvers réclament contre l'arrêté sur les sucres.


M. Franquet réclame contre la distribution des grades dans l'armée.


Plusieurs propriétaires des polders demandent qu'on interprète l'article 113 de la constitution sur les wateringen.


(page 657) Mme Marie Chorus demande la grâce de son mari.


M. Windelincx présente des observations sur les distilleries. (J. F., 6 mars. et P. V.)


- Ces pièces sont renvoyées à la commission des pétitions. (P. V.)


M. de Robaulx demande que l'on fasse incessamment rapport sur la pétition de plusieurs officiers de l'armée. (J. B., 6 mars.)

Projet de décret relatif à la procédure à observer devant la cour de Liége supérieure de Liége siégeant en cassation

Dépôt du projet

M. Alexandre Gendebien, ministre de la justice, présente, au nom de M. le régent, un projet de décret relatif à la procédure à observer devant la cour supérieure de Liége, jugeant en cassation, et à la publicité des débats. Ce décret ne sera que transitoire, et cessera de faire loi aussitôt que la cour de cassation sera organisée pour toute la Belgique, conformément à la constitution. (I., 6 mars.)

M. Raikem – Je crois que ce projet de décret ne peut donner lieu à aucune difficulté, et je demande qu'il soit passé de suite à la discussion. (I., 6 mars.)

M. Destriveaux parle dans le même sens. (J. F., 6 mars.)

M. de Robaulx – Le projet de décret n'a d'autre but que de faire jouir les justiciables de la cour de Liége des garanties dont jouissent déjà les justiciables de la cour de Bruxelles ; ce n'est pas une innovation, et un pareil décret n'exige aucun examen. J'appuie la demande de M. Raikem et je crois que nous pouvons voter immédiatement. (I., 6 mars.)

- Plusieurs voix – Appuyé ! nous sommes tous d'accord. (I., 6 mars.)

- L'assemblée décide, par assis et levé, qu'on passera immédiatement à la discussion du projet de décret. (J. F., 6 mars.)

Discussion des articles

Articles 1 à 3

M. le président donne lecture de l'article premier, qui est ainsi conçu :

« Art. 1. Jusqu'à l'organisation prochaine de la cour de cassation décrétée par l'article 95 de la constitution, on observera devant la cour supérieure de Liége, pour les pourvois en cassation en toute matière, l'instruction des causes, la formation de la cour, le jugement, le renvoi ou la décision du fond en cas de cassation, les formes prescrites et les délais fixés par les arrêtés du 9 avril 1814 et 15 mars 1815.» (A.)

- Cet article est adopté. (P. V.)


« Art. 2. Néanmoins l'article 7 de l'arrêté du 9 avril 1814 est modifié de la manière suivante :

« Les pourvois contre un arrêté porté par l'une des deux chambres civiles seront portés devant l'autre chambre. Elle ne pourra juger qu'au nombre de onze membres ; en cas d'insuffisance, on appellera des membres qui n'ont pas connu de l'affaire ; en cas de cassation, la chambre ainsi composée, jugera le fond par un nouvel arrêt, et sans recours ultérieur en cassation. »

- Adopté. (A., et P. V.)


« Art. 3. L'arrêté du 19 juillet 1815 est abrogé dans toutes ses dispositions relatives à la procédure en cassation devant la cour supérieure de justice de Liége.

« Cependant, les dispositions de cet arrêté seront suivies quant aux pourvois introduits avant la publication du présent décret, sous les modifications suivantes :

« En matière civile le premier président désignera un rapporteur, et il indiquera le jour auquel le rapport sera fait en audience publique.

« La désignation de ce jour sera affichée au moins huit jours d'avance, tant au greffe que dans la salle des séances.

« Au jour indiqué le rapport aura lieu conformément à la disposition de l'article 25 de l'arrêté du 10 mars 1815.

« Après le rapport, les avocats des parties seront entendus, s'ils le demandent.

« Ensuite le procureur général sera entendu, ou, à son défaut, l'avocat général qu'il aura désigné pour porter la parole dans l'affaire.

« Dans les affaires où le mémoire de défense n'aurait pas encore été déposé au greffe, il sera signifié au demandeur, par acte d'avoué à avoué.

« Dans celles où le dépôt au greffe du mémoire de défense a été effectué, le greffier sera tenu d'en donner communication à l'avoué du demandeur, s'il le demande. » (A.)

M. le baron Beyts demande que non seulement les avocats, mais les parties elles-mêmes soient entendues, si elles le requièrent. (J. F., 6 mal's.)

M. Defacqz s'y oppose ; on demande les mêmes prérogatives pour la cour de Liége que pour la cour de Bruxelles ; et, dans cette dernière, il n'y a que les avocats qui soient admis. (J.F., 6 mars.)

M. Alexandre Gendebien, ministre de la justice(page 658) Si les parties étaient admises à plaider, il en résulterait une grande perte de temps pour des magistrats réunis en grand nombre. (J. B., 6. mars.)

M. le baron Beyts insiste. (J. F., 6. mars.)

- Son amendement est mis aux voix et rejeté. (P. V.)

L'article 3 est adopté. (P. V.)

Vote sur l’ensemble du projet

On procède au vote par appel nominal sur l'ensemble du décret.

116 membres répondent à l'appel.

115 se prononcent pour.

1, M. Trentesaux, refuse de voter.

En conséquence le décret est adopté. (I., 6 mars., et P. V.)

Projet de décret autorisant la levée d'un emprunt de 12 millions de florins

Rapport de la section centrale

M. Raikem fait, au nom de la section centrale, un rapport sur le projet de décret, relatif à l'emprunt de 12,000,000 de florins, et conclut à l'adoption du décret. (I., 6 mars.)

- Le congrès décide, sur la demande de M. Lebeau, que la discussion du rapport s'ouvrira immédiatement après celle du projet de décret sur les distilleries. (P. V.)

M. le baron Osy propose d'inviter M. le ministre de la guerre à se rendre dans le sein de l'assemblée, pour répondre aux questions qui pourraient lui être adressées à propos de la discussion du projet de décret sur l'emprunt. (I., 6. mars.)

- Cette proposition est adoptée. (P. V.)

Proposition visant à assurer la liquidation des bons du syndicat d'amortissement, appelés "los-renten"

Lecture, développements et prise en considération

Il est donné lecture de la proposition suivante :

« Le député soussigné a l'honneur de proposer au congrès national de nommer une commission spéciale de cinq membres, chargée de soumettre à l'assemblée les mesures qu'elle jugera propres pour empêcher, sans porter atteinte à la force publique et à la loi du contrat, qu’un gouvernement étranger et avec lequel la Belgique est en guerre, ne touche, au détriment de celle-ci, le produit pour plusieurs millions de valeur des domaines aliénés sous le gouvernement précédent.

« Il demande en conséquence que la commission prenne pour base de son travail :

« 1° D'ordonner la vérification et le visa de tous les bons du syndicat, dits los-renten, actuellement en circulation dans le pays, dans un très bref délai, comme aussi de constater leur import et le terme, de leurs échéances respectives.

« 2° De déclarer les bons ainsi vérifiés et visés seuls admissibles en payement de domaines aliénés par le syndicat. .

« 3° D'autoriser toutefois les acquéreurs à se libérer, en numéraire, au taux moyen de ces bons ainsi vérifiés et visés, pendant la quinzaine antérieure à leur demande de liquidation, d'après la cote de la bourse d'Anvers.

« 4° De réserver aux possesseurs des bons vérifiés et visés, la faculté de les escompter directement au trésor, au cours commun de la bourse d'Anvers pendant la quinzaine précédant la déclaration qu'ils en auront faite, que leur intention est de profiter du bénéfice de la précédente disposition.

» 5° De déterminer ultérieurement par une loi, d'après le résultat de la vérification à faire des bons en circulation, le terme dans lequel le trésor devra payer les bons qui lui auront été escomptés, en décrétant en principe que, dans aucun cas, ce délai ne pourra dépasser l'époque fixée par le titre pour le remboursement.

« Au palais National, à Bruxelles, le 4 mars 1831.

« D'ELHOUNGNE. » (I., 6 mars.)

M. d’Elhoungne développe cette proposition. (I., 6 mars.)

M. Van Snick la considère comme urgente et pense que le congrès doit s'en occuper immédiatement. (I, 6 mars.)

M. Charles de Brouckere, ministre des finances – Je suis bien aise que l'honorable membre ait fait sa proposition. J'appuie le renvoi à une commission. La discussion prouvera que depuis trois mois ce point important de nos finances n'avait pas échappé à. mon attention ; au reste, en réfutant un à un les arguments de l'honorable membre, je prouverai que sa proposition est inadmissible. (I., 6 mars.)

M. de Robaulx – Je demanderai à M. le ministre des finances s'il sait qu’une nouvelle émission de los-renten peut être faite à Amsterdam. (I., 6 mars.)

M. Charles de Brouckere, ministre des finances – M. de Robaulx me permettra de ne pas répondre en ce moment-ci ; j'ai besoin d'être discret sur un sujet de cette importance. (I., 6 mars.).

M. Pirmez parle au milieu du bruit. (I., 6 mars.)

M. Charles Le Hon(page 659) Je crois que les craintes qu'on a manifestées sont exagérées. Tout le monde comprendra d'ailleurs qu'une question qui peut exercer une grande influence sur le crédit public ne doit pas être discutée légèrement. J'appuie le renvoi à une commission. (I., 6 mars.)

M. Lebeau – Je crois qu'on se méprend sur l'objet de la proposition. L'honorable membre ne nous présente pas un projet de décret, il propose seulement de nommer une commission pour examiner les questions relatives aux los-renten et nous soumettre ensuite un projet de décret. Je ne vois donc pour le moment aucun inconvénient à adopter sa proposition. (I., 6 mars.)

- L'assemblée décide qu'une commission sera nommée en exécution de la proposition de M. d'Elhoungne ; elle s'en remet à M. le président du soin d'en désigner les membres. (l., 6 mars.)

M. le président désigne MM. Meeûs, Jottrand, Seron, d'Elhoungne et le baron Osy. (P. V.)

Projet de décret provisoire sur les distilleries

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de décret relatif aux distilleries, proposé par M. Teuwens. (P. V.)

Discussion des articles

Article premier

« Art. 1er. Le premier paragraphe de l'article 4 de l'arrêté du gouvernement provisoire, en date du 17 octobre 1830, est et demeure rapporté et remplacé par le suivant :

» Le crédit permanent, accordé par l'article 43 de la loi du 26 août 1822, est abrogé et remplacé par un crédit à termes proportionnels, ainsi qu'il est statué par les paragraphes 2, 3, 4, 5, 6, 7 de l'article 4 de l'arrêté susdit. » (A. C.)

M. Charles de Brouckere, ministre des finances, ne parle ni pour ni contre le projet. Il propose deux articles nouveaux à placer après les articles 2 et 3 du projet.

- Ces amendements sont ainsi conçus :

« Art. 2 nouveau. Le taux de la décharge des comptes pour les eaux-de-vie transportées à l'étranger, est établi à raison de huit florins en principal par baril, à la force de dix degrés sous la température de 55 degrés du thermomètre de Fahrenheit.

« La décharge ne peut avoir lieu qu'à concurrence des termes de crédit non encore échus ; elle sera imputée sur les termes les plus éloignés. »

« Art. 3 nouveau. Il sera accordé des passavants aux distillateurs qui se trouvent dans la ligne, à raison de trente pour cent au-dessus de leur prise en charge. » (C., 6 mars. et P. V.)

M. Jottrand, sans vouloir s'opposer au projet de loi de M. Teuwens, fait remarquer que l'abolition totale des passavants pour la circulation intérieure de l'eau-de-vie indigène, ôtera à l'administration un de ses moyens actuels de suivre les opérations des distillateurs, et de découvrir s'ils ne débitent pas des eaux-de-vie fabriquées clandestinement. (C., 6 mars.)

M. Teuwens lit, en réponse à ce que vient de dire M. Jottrand, une circulaire du gouvernement. (C., 6 mars.)

M. Alexandre Rodenbach – Messieurs, je partage entièrement l'opinion de M. le ministre des finances, que les distillateurs des grandes villes sont plus à même de vendre l'excédant de leur genièvre que les distillateurs agricoles ; j'applaudis au principe adopté de la libre circulation du genièvre indigène dans l'intérieur du pays, parce qu'il est à ma connaissance que les documents appelés passavants servent puissamment les contrebandiers. Voici, en peu de mots, la manœuvre frauduleuse employée par eux : il y a dans les grandes villes telles qu'Anvers, Liége, Bruxelles, etc., des marchands de spiritueux qui vendent en détail d'immenses parties ; ils n'ont plus besoin de leurs passavants, et ils s'empressent de les vendre aux fraudeurs de la ligne qui, à l'aide de ces documents, fraudent en gros d'une manière scandaleuse ; au point que, depuis le 1er janvier, il est entré dans les Flandres des milliers d'hectolitres de genièvre de France et de Hollande, et à Bruxelles des quantités considérables d'esprit d'eau-de-vie.

Mais si vous sanctionnez la proposition qui vous est soumise, le service des douanes doit subir encore de grandes améliorations.

J'ai appris avec satisfaction que la part du commis-chef dans la répartition sera de plus de 3 pour cent, et que les employés subalternes, qui sont presque toujours l'âme du service, seront mieux récompensés. On a bien fait de ne plus accorder des 6 et des 9 pour cent à des chefs dont la présence n'est souvent signalée à la frontière que par un visa qu'ils apposent sur un registre d'ordre. Je (page 660) l'ai déjà dit, on devrait accorder de fortes primes aux employés, si l'on veut anéantir la contrebande.

L'administration de la douane nous coûte 670,000 florins ; je m'en consolerais aisément, si l'on empêchait la fraude ; mais il est incontestable qu'elle augmente à vue d'œil, et cela au point que les eaux-de-vie de Prusse, de France et de Hollande entrent en ce moment pour plus de moitié dans notre consommation. Je le répète, le droit exorbitant de 12 florins par baril de genièvre doit nécessairement ruiner tous nos distillateurs. Si le fisc diminuait considérablement le droit, le trésor en serait dédommagé, parce que le contrebandier n'importerait plus tant de genièvre étranger, qui maintenant lui procure un bénéfice de 80 pour cent.

Je dirai, en terminant, à M. le ministre qu'il est dans l'erreur, s'il croit que dans toutes les distilleries de la Belgique on est parvenu à tirer sept litrons ; je sais pertinemment qu'à Deynze on ne tire pas plus que 5 1/2 à 6 litrons.

Le produit dépend du procédé chimique employé dans diverses usines. (J. F., supp., 9 mars.)

M. Charles de Brouckere, ministre des finances – Je ne crois pas que l'on se serve de faux passavants, mais on fait souvent deux transports avec le même passavant. Ce n'est pas au moyen de passavants que l'on découvrira des distilleries clandestines. Quand la circulation sera libre il sera plus facile de savoir si le transport est plus ou moins considérable. (J. B., 6 mars.)

M. Jottrand, sur les assurances données par M. le ministre, de pouvoir arrêter la fraude, se rallie à l'avis de la majorité. (J. F., 6 mal's.)

- L'article premier est mis aux voix et adopté. (P. V.)

Article 2

« Art. 2. Les crédits permanents et à termes, dont jouissent actuellement les distillateurs et négociants en gros, seront, à dater de la promulgation du présent décret, convertis en crédits à termes, et le débet de leur compte sera arrêté à la même époque ; ils y seront pris en charge, à raison de 12 florins par chaque baril d'eau-de-vie à dix degrés, existants dans leur compte de crédit permanent ou à termes, et le débet en devra être apuré par quart de trois en trois mois.»

- Adopté. (A. C., et P. V.)

Article 2 (nouveau, devenu article 3)

« Art. 2 nouveau. Le taux de la décharge des comptes pour les eaux-de-vie transportées à l'étranger est établi à raison de 8 florins en principal par baril à la force de dix degrés sous la température de cinquante-cinq degrés du thermomètre de Fahrenheit.

« La décharge ne peut avoir lieu qu'à concurrence des termes de crédit non encore échus ; elle sera imputée sur les termes les plus éloignés. »

- Adopté. (P. V.)

Article 3 (devenu article 4)

« Art. 3. Les passavants ou tous autres documents ne sont plus requis que pour le territoire de surveillance ; l'article 77 de la loi du 26 août 1822, est et demeure par conséquent abrogé. » (A. C.)

- Cet article est adopté avec la citation des articles 43 à 77, au lieu de 77 seulement. (P. V.)

Article 3 nouveau (devenua article 5)

« Art. 3 nouveau. Il sera accordé des passavants aux distillateurs qui se trouvent dans la ligne, à raison de trente pour cent au-dessus de leur prise en charge. »

- Adopté. (P. V.)

Article 4 (article 6)

« Art. 4. Toutes les autres dispositions de l'arrêté prémentionné du 17 octobre dernier, demeurent provisoirement en vigueur. »

- Adopté. (A. C., et P. V.)

Vote sur l’ensemble du décret

On procède à l'appel nominal sur l'ensemble du décret, qui est adopté à l'unanimité de 114 voix. (P. V.)

Projet de décret autorisant la levée d'un emprunt de 12 millions de florins

Discussion générale

On passe à la discussion du projet de décret relatif à l'emprunt de douze millions. (J. F., 6 mars.)

M. Van Snick prononce, au milieu des conversations particulières, un discours dans lequel il s'efforce de prouver que la paix de l'Europe ne sera pas troublée. Il n'en tire pas cependant d'ores et déjà la conséquence qu'il ne faille pas adopter le projet, car l'honorable membre réserve son vote jusqu'à la fin de la discussion. (I., 6 mars.)

M. le baron Osy commence par se plaindre que les derniers protocoles aient été renvoyés par le comité diplomatique, sans avoir été communiqués au congrès ; il pense que le congrès avait seul le droit de juger ce qu'il était convenable de faire en cette circonstance, qu'il aurait adopté une marche contraire à celle du comité diplomatique, et qu'il eût fallu envoyer à Londres d'autres hommes. Il se plaint ensuite de la partialité du gouvernement, qu'il dit avoir toujours penché en faveur de la France : à l'appui de cette assertion, il prétend que c'est sur l'invitation de la France que les places fortes de la Belgique avaient été approvisionnées. L'orateur se plaint encore de la manière dont les troupes sont distribuées, et (page 661) adresse des interpellations au ministre de la guerre pour savoir si notre état militaire a été augmenté, parce que, dans le cas de la négative, les subsides déjà votés lors de la discussion des voies et moyens seraient suffisants. (l., 6 mars.)

M. Lebeau, interrompant l'orateur – Il était convenu que M. le ministre des affaires étrangères serait présent à la discussion. Je suis surpris de ne pas l'y voir, et je demande qu'il soit invité à s'y rendre. (I., 6 mars.)

M. le président – M. le ministre des affaires étrangères était ici il y a peu d'instants ; il a été obligé de sortir pour une mission spéciale, il m'a prié d'annoncer à l'assemblée qu'il serait bientôt de retour. (I., 6 mars.)

M. le baron Osy continuant – Je demanderai au ministre des finances s'il est nécessaire de faire rentrer la contribution foncière du dernier semestre ; en ce cas, d'après les décisions que nous avons prises ; il faudrait un nouveau décret ; nous sommes au mois de mars. Je demanderai quelles sont les rentrées faites sur 1830 et celles que l'on attend encore. Quant au décret, vous avez eu l'exemple de celui de 5 millions qui n'a pas réussi. La méfiance à l'égard des fonds publics n'a fait qu'augmenter depuis. Je désirerais savoir au reste à quel taux on entend faire l'emprunt. Pour ce qui est de l'aliénation des domaines, je m'y opposerai. Ils ont tous été cédés à la caisse d'amortissement, qui a fait plusieurs emprunts pour lesquels ils ont servi d'hypothèque, entre autres un qui aurait dû être remboursé au 1er octobre dernier, si la révolution n'avait pas eu lieu. On nous objectera que cette hypothèque n'a pas été enregistrée, mais elle n'en est pas moins légale. Ce ne sont pas les Hollandais seuls qui se verraient frustrés de leurs droits, les Belges aussi ont une grande part aux los-renten. (J. B., 6 mars.)

M. le comte d’Arschot – L'assemblée me permettra de répondre en deux mots à ce qu'a dit le préopinant contre le comité diplomatique. Il nous a reproché d'avoir renvoyé le dernier protocole : je suis étonné, messieurs, qu'un membre du congrès se permette un pareil reproche, mais surtout que ce soit précisément un des auteurs de la réponse au protocole du 20 janvier ; car l'honorable préopinant a concouru à la rédaction de cette réponse, où nous déclarions que nous ne reconnaissions pas à la conférence le droit de traiter ni de la dette, ni de la question des limites ; l'honorable membre y avait fait même insérer une phrase que je trouvais si inconvenante que j'en demandai le retranchement, ce que j'obtins. L'honorable préopinant a dit aussi qu'il eût été convenable d'envoyer des députés à la conférence de Londres. Il sait bien qu'à cette époque nous y avions des envoyés, et qu'ils n'ont pas été reçus ; il sait bien qu'on leur a dit qu'ils étaient à cet égard sur le même pied que les envoyés de la Hollande. Le comité diplomatique n'a donc aucun reproche à se faire. En renvoyant le dernier protocole il n'a fait que se conformer aux désirs du congrès, qui a hautement exprimé ses volontés de ne reconnaître à personne d'entre les puissances le droit d'intervenir dans ses affaires avec la Hollande. Voilà des faits que le préopinant n'ignorait pas, car tout le congrès les connaît. (Marques générales d'assentiment.) (I., 6 mars.)

M. le baron Osy – J'ai approuvé la réponse au protocole du 20 janvier ; mais je pense que le congrès seul avait le droit de renvoyer le dernier protocole. (I., 6 mars.)

M. Seron – Messieurs, le rapport de M. le ministre des finances peut donner lieu à une foule d'observations ; je me bornerai à quelques-unes pour motiver mon vote.

On nous dit que « l'horizon se rembrunit chaque jour, » et l'on ajoute que « la cause de la liberté gagne, par continuité, de nouveaux partisans en Europe. » Mais s'il est vrai que la cause de la liberté gagne de nouveaux partisans, c'est le cas de dire que l'horizon s'éclaircit pour nous, et non qu'il se rembrunit ; car la guerre des rois contre les peuples deviendra moins probable à mesure que les peuples s'insurgeront et seront plus disposés à nous imiter qu'à nous combattre.

Quoi qu'il en soit, je conviens avec M. le ministre des finances qu'il est bon de nous mettre en mesure. C'est un vieil adage que si l'on veut la paix on doit se préparer à la guerre. Mais est-ce à dire qu'il nous faille emprunter 12 millions de florins, ou vendre des rentes et des domaines pour une valeur de 7 millions ? Oui, répond le ministre, il le faut même dans la supposition du maintien de la paix générale. Je ferai observer que ce langage n'est pas celui qu'il tenait lors de la discussion de la loi sur la levée, par anticipation, de la contribution foncière ; répondant alors à une question que j'avais l'honneur de lui adresser, il disait : « Si nous demeurons dans un état de paix, les contributions votées suffiront ; il sera inutile de les augmenter. » Il croyait donc que dans la même hypothèse il serait inutile aussi d'emprunter.

Il fait valoir maintenant la nécessité d'accorder des délais pour le payement des avances faites par l'ancien gouvernement, et des crédits accordés pour le payement des accises. Mais cette difficulté (page 662) existait déjà quand on proposa les lois des voies et moyens.

Enfin, il dit que les recouvrements se font avec lenteur : je suis pourtant informé que, dans ma province, les contributions se payent assez exactement. On a beau me parler de la misère publique, je dirai toujours que la contribution foncière est, en général, une charge légère pour les classes les moins aisées, qu'elle pèse principalement sur les riches qui, dans les circonstances où nous nous trouvons, devraient donner l'exemple. Mais il est parmi les contribuables des hommes qui croient prudent d'attendre ; le moyen de leur faire comprendre qu'ils doivent payer sans délai, c'est d'user envers ces mauvais citoyens des voies de contrainte que la loi autorise. Ce moyen sera plus efficace que les conseils qu'on nous engage à leur donner.

Maintenant, je demanderai à M. le ministre comment, ayant besoin d'un emprunt de 12 millions, il lui suffira, si l'emprunt ne peut avoir lieu, d'une somme de 7 millions de florins qu'on se procurera par la vente de propriétés foncières et de rentes domaniales.

Au reste, avant de nous proposer d'emprunter ou d'aliéner, il me semble qu'on devrait nous faire connaître, au juste, la situation financière du royaume, non par des assertions vagues et dénuées de preuves, mais au moyen de chiffres, d'états suffisamment détaillés et circonstanciés, particulièrement en ce qui regarde la dépense.

Avec de pareils renseignements, peut-être saurions-nous à peu près pourquoi nous payons, peut-être serions-nous à portée de juger s'il n'est pas possible de faire de notables économies, par exemple sur les traitements et sur les appointements, qu'on dit être en général beaucoup trop élevés, et, en diminuant la dépense, de diminuer les impôts.

On objecte l'urgence : c'est à la faveur de ce mot qu'on a laissé subsister deux impôts odieux, tels qu'ils étaient sous l'ancien gouvernement. Je veux parler de la personnelle et des patentes que, probablement, on ne songe guère à remplacer par des contributions plus en harmonie avec le bon sens, la justice et l'égalité proportionnelle ; c'est encore à cause de l'urgence, sans doute, qu'on laisse en vigueur jusqu'aux décisions du fameux ministre Appelius. Enfin, c'est avec ce mot d'urgence qu'on a obtenu les lois sur les dépenses et sur les voies et moyens, déjà décrétées... On a conclu de l'urgence qu'il fallait que nous votassions de confiance et, pour ainsi dire, sans rien examiner. Mais je répéterai ce que j'ai dit dans une autre occasion : Mes commettants m'ont envoyé ici non pour voter de confiance, mais pour voter de conviction. Je rejetterai donc, jusqu'à ce que je sois mieux informé, la loi qu'on nous propose. Je désirerais particulièrement qu'on mît sons nos yeux, entre autres choses, l'état des officiers sans troupe et du traitement dont ils jouissent. Tout le monde dit qu'il y a eu de graves abus dans les nominations ; je veux croire qu'ils sont dus, en grande partie, à la nature et à la difficulté des circonstances, mais ce n'est pas une raison pour les laisser subsister éternellement. (I., 6 mars.)

M. Jottrand – Je ne vois pas l'urgence de la mesure. Beaucoup de contribuables ont déjà payé le premier semestre, d'autres sont disposés à payer le second pour profiter de la remise de 4 pour cent ; il faut que l'on sache si les receveurs, qui sont payés au prorata de la somme encaissée, ne ralentissent pas l'encaissement.

Les plénipotentiaires anglais, voyant que nous n'entendions pas nous conformer aux protocoles, ont dit au roi de Hollande : Faites comme vous pouvez. Si on nous disait que le roi de Hollande veut reconquérir son royaume, alors je donnerais de l'argent ; car, selon moi, la guerre n'est imminente que de ce côté ; les nouvelles du Nord nous rassurent sur ce point. Ce ne serait qu'en cas de guerre que j'examinerais de quelle manière on peut faire face aux frais qu'elle doit entraîner. Le préopinant craint qu'un emprunt ne trouve pas de spéculateurs. Je suis de son avis, mais je pense que la vente des domaines serait plus conseillable. La plupart des banquiers de l'Europe sont peu disposés à croire que nous resterons indépendants. Nous pouvons disposer de la moitié de nos domaines ; ils ne peuvent être grevés pour toute la dette. La crainte de perdre la chose et le prix ne peut donc retenir les acheteurs, si nous déterminons qu'ils payeront à des époques éloignées, par exemple en douze ans, par douzième annuellement. Ils risqueront bien un douzième pour faire une bonne affaire par la suite. (J. B., 6 mars.)

M. le comte d’Ansembourg s'élève contre le système des emprunts ; il déclare qu'il ne votera pour celui qui est proposé que lorsqu'on lui en aura démontré l'invincible nécessité. (I., 6 mars.)

M. le comte d’Arschot – Je pourrais me dispenser de parler en faveur du projet ; M. le ministre des finances en démontrera la nécessité beaucoup mieux que je ne pourrais le faire. Je dirai seulement que quand on juge un projet de loi nécessaire, il est du devoir d'un bon député de le voter. Or, vous vous souvenez que lors de la (page 663) discussion des voies et moyens, plusieurs membres refusèrent de voter les six derniers douzièmes, parce qu'on leur dit qu'avec la rentrée des six premiers on pourrait suffire aux besoins les plus pressants, et que, d'un autre côté, on se proposait, avant la dissolution du congrès, de présenter un projet d'emprunt pour faire face aux dépenses et venir au secours du trésor. Je crois même que l'honorable préopinant vota contre le projet par ce motif. Je n'examinerai pas maintenant si la paix ou la guerre sont plus ou moins probables ; mais les armements de la Hollande sont trop évidents pour que nous devions nous endormir dans une fausse sécurité. Je voterai pour le projet de décret. (I., 6 mars.)

M. Lebeau – Messieurs, il me semble que dans la question qui nous occupe, on se laisse trop préoccuper par la crainte de léguer quelques dettes à la postérité, et qu'on ne remarque pas assez qu'elle nous aura encore assez d'obligation, si, en même temps que nous lui léguons quelques dettes, nous lui léguons aussi la liberté et l'indépendance nationale. On ne remarque pas assez que nous sommes placés dans une circonstance toute spéciale, et qu'après avoir fait notre révolution, il faut à tout prix en assurer le succès. Je ne suis pas, plus qu'un autre, partisan d'un emprunt ; mais j'examine la position où nous nous trouvons, et je sais faire la part de la nécessité. Je conçois parfaitement la gêne du trésor ; mais je me plaindrai que l'administration ne prenne pas les mesures nécessaires pour faire rentrer les impôts sur tous les points du territoire : je l'engagerai surtout à surveiller ses agents ; car il est probable qu'elle n'est pas assez éclairée sur leur compte, et il est essentiel qu'elle sache s'il n'est pas des employés qui cherchent à mettre des entraves à la marche du gouvernement. Nos relations extérieures doivent aussi exercer toute sa sollicitude, et, à ce propos, je me permettrai d'adresser quelques interpellations à M. le ministre des affaires étrangères. (M. Van de Weyer est rentré depuis quelques instants.) Je lui demanderai d'abord, s'il est vrai que de tous les gouvernements avec lesquels notre intérêt exige que nous ayons des relations, la France n'est pas jusqu'à présent la seule puissance à laquelle on ait notifié la nomination du régent. (Sensation ; vif mouvement de curiosité.) Je lui demanderai s'il est vrai qu'aucune communication officielle n'a été faite à Londres à ce sujet ; et s'il ne serait pas possible de faire taire les plaintes consignées dans les journaux anglais, qui reprochent à notre gouvernement de manquer d'égards, non pas envers la conférence, mais envers le cabinet anglais lui-même. Je n'ai pas à examiner ici la conduite du gouvernement à l'égard de lord Ponsonby. Je veux croire que lord Ponsonby n'a pas toujours exécuté les ordres de son cabinet, et qu'il s'est fait parfois le propagateur d'opinions qu'il n'avait pas mission de faire prévaloir en Belgique ; mais alors le gouvernement provisoire devait demander son rappel, et non manquer d'égards envers le cabinet de Londres. Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères si le cabinet anglais ne devrait pas être instruit du sens que doit avoir la nomination du régent. Je m'explique. Si l'on en croit les journaux du pays, la nomination du régent a été considérée par le cabinet anglais comme toute française. Je m'empresse de dire que cette opinion n'a aucun fondement, l'indépendance du pays, le soin de la maintenir, ne pouvaient pas être mieux placés que dans les mains de notre vénérable régent ; mais il importe que le cabinet anglais sache que la nomination de M. Surlet de Chokier à la régence du royaume n'a pas été faite dans des vues françaises, ni pour favoriser une combinaison que nous avons repoussée. Il faut que l'on sache que nous sommes décidés à rester Belges ; il faut que l'on sache encore que nous ne voulons pas prendre exclusivement les inspirations du cabinet de Paris, mais que nous recevons à la fois les conseils émanés de Paris et de Londres, sur les meilleurs moyens d'assurer une combinaison définitive qui donne le repos et le bonheur à notre pays sans troubler la paix de l'Europe. Dans le moment où je parle, lorsque par suite des révolutions d'Italie, la France se verra peut-être obligée de faire une irruption dans cette contrée, il importe que l'Angleterre sache que ce n'est que dans la vue de faire triompher le principe de la non-intervention, pour qu'elle reste neutre et paisible spectatrice des événements, si elle n'aide pas elle-même au triomphe de la France et des vrais principes. (L, 6 mars.)

M. Van de Weyer, ministre des affaires étrangères, quitte son banc, et se dirige vers la tribune. (J. F., 6 mars.)

M. le comte d’Arschot – Il me semble que l'ordre du jour veut qu'on s'occupe du décret d'emprunt et que ces questions y sont complètement étrangères. (Non ! non ! Réclamations générales.) (I., 7 mars.)

M. Lebeau – Lorsqu'il s'agit de voter des subsides ou impôts quelconques, il est permis de savoir si la marche du gouvernement autorise ou justifie la confiance de la nation. (M. Van de Weyer monte à la tribune.) Du reste M. le ministre (page 664) des affaires étrangères me prouve en ce moment qu'il apprécie mieux que l'honorable préopinant la convenance de mes demandes. (I., 7 mars.)

M. Van de Weyer, ministre des affaires étrangères (Profond silence) – Messieurs, l'honorable préopinant m'a adressé plusieurs questions auxquelles je vais avoir l'honneur de répondre. Il a demandé d'abord s'il était vrai que la nomination du régent n'avait été notifiée qu'au cabinet français, et, à cette occasion, il se croit en droit de nous adresser des reproches pour le retard que nous aurions mis à faire cette notification au cabinet anglais. S'il en était ainsi, messieurs, nous aurions compromis gravement notre responsabilité : nos rapports avec les puissances étrangères ne se bornent pas seulement à la France et à l'Angleterre. Eh bien ! la notification de la nomination du régent n'a été faite ni à l'une ni à l'autre de ces puissances ; et si le retard que nous avons mis à le faire peut surprendre le préopinant, c'est qu'il n'a pas entrevu quelles premières difficultés s'élèvent toujours avant de pouvoir nouer des relations diplomatiques sur un point de cette importance. Il n'est pas étonnant de voir s'écouler quinze jours entre l'avènement d'un roi et la notification à faire aux puissances étrangères. Il faut en effet avant tout qu'un ministère soit nommé ; que ce ministère exprime une pensée, un système.

Il faut ensuite que ce ministère fasse le choix des hommes à envoyer à l'étranger ; tout cela exige du temps. Que le préopinant se rassure donc, deux fois vingt-quatre heures ne s'écouleront pas sans que la nation apprenne le nom des personnes chargées de faire aux cours étrangères la notification de la nomination du régent. Cette notification sera faite à l'Angleterre comme à la France ; il ne faut d'exclusion pour personne, et si le gouvernement peut lier des relations avec les autres puissances, le ministère ne se bornera pas à la France et à l'Angleterre ; mais, messieurs, il ne convient pas de nous exposer à des désagréments diplomatiques, et d'exposer la Belgique à un affront dans la personne du régent. Avant d'envoyer des agents aux puissances, il faut savoir s'ils seront reçus. Telles sont, messieurs, les causes de nos retards : on n'a donc manqué d'égards pour personne, et l'Angleterre moins qu'une autre est en droit de nous adresser ce reproche ; car le gouvernement provisoire lui a envoyé un commissaire délégué, avant d'en envoyer ailleurs.

Le préopinant a soulevé une question fort épineuse en parlant d'un délégué de la conférence de Londres. On sent très bien que ce n'est pas à la tribune que je pourrais trouver convenable de donner des explications à cet égard. Je dirai cependant que la conduite du gouvernement provisoire envers lord Ponsonby a été ce qu'elle devait être, c'est-à-dire que toutes les pièces ou documents qui ont dû être communiqués réciproquement, l'ont été avec toutes les formes et en observant toutes les convenances diplomatiques, et que là se sont bornées nos relations. Je ne sais si lord Ponsonby s'est plaint au préopinant d'un manque d'égards de la part du gouvernement ; mais dans ce cas, je serais en droit de m'étonner que sa plainte nous fût arrivée par l'intermédiaire du préopinant, et du reste, si elle était fondée, le gouvernement s'empresserait de faire tout ce qu'il croirait conforme aux égards que l'on doit à l'envoyé d'une grande puissance et à la dignité du peuple belge. Je crois avoir répondu aux demandes de l'honorable préopinant. Si j'avais omis quelque chose, je lui serais obligé de me le rappeler. (I., 7 mars.)

M. Lebeau – L'honorable préopinant m'a mal compris s'il pense que, quand j'ai parlé d'un manque d'égards, j'ai voulu parler de lord Ponsonby. J'ai dit que les journaux anglais reprochaient au gouvernement de la Belgique de manquer d'égards envers le cabinet anglais, et j'ai été d'autant plus touché de ce reproche qu'il était contenu dans un article à côté duquel j'ai lu un chaleureux plaidoyer en faveur de l'indépendance de la Belgique. Si j'ai adressé les questions auxquelles on vient de répondre, j'ai été amené à les faire par cette considération, que le cabinet français a déjà accrédité un chargé d'affaires près notre gouvernement (le général Belliard), lequel chargé d'affaires a été présenté aujourd'hui même par le ministre des affaires étrangères. Le fait de l'envoi d'un chargé d'affaires et sa présentation peuvent, si l'on tarde trop de notifier la nomination du régent à l'Angleterre, l'autoriser à se plaindre de ce qu'elle pourrait considérer comme une préférence marquée pour la France. Je demanderai, si nous n'avons pas fait de notification à la France, pourquoi la France pousse la politesse jusqu'à accréditer un envoyé en Belgique. J'adresserai une autre question déjà faite au ministre de la guerre, et à laquelle il n'a pas encore répondu : un des préopinants a avancé que, sur l'invitation de la France, on approvisionnait les places fortes du Midi. Je demanderai jusqu'à quel point ce fait est vrai. (I., 7 mars.)

M. Van de Weyer, ministre des affaires étrangères – L'arrivée du général Belliard n'est que (page 665) la conséquence des démarches faites par la députation belge à Paris. Déjà avant l'avènement du régent, il avait été décidé que le général Belliard serait l'agent accrédité de la France auprès du gouvernement belge.

L'honorable préopinant a parlé d'instructions du cabinet français relatives à l'approvisionnement des forteresses du Midi. Je déclare que ni moi, ni le comité diplomatique, nous n'avons jamais reçu des instructions semblables.

Je ne dirai plus qu'un mot.

Je me propose de résumer toutes les négociations auxquelles j'ai participé. Le rapport en sera adressé au régent. J'y annexerai toutes les pièces officielles, et ces pièces seront déposées sur le bureau du congrès.

Le congrès se convaincra que si le comité diplomatique a renvoyé des protocoles, il n'a fait que remplir les devoirs qui lui ont été imposés par le congrès lui-même. Et pour démontrer encore mieux la justice du rejet du protocole qui réglait le partage de la dette, nous avons demandé au ministre des finances un travail sur la dette. (C., 6 mars.)

M. Meeûs – Comme gouverneur de la banque, je connais la situation financière de l'État, et je puis dire qu'à l'expiration de la première quinzaine de février, les dispositions du trésor sur la la banque dépassaient son avoir de plus 600,000 florins ; le moyen que je crois convenable pour parer à cet état de choses est un emprunt. Quant à la vente des biens, je la combattrai. On ne pourrait d'ailleurs les vendre ; ils sont grevés d'une hypothèque, personne ne voudrait les acheter.

Quant au taux de l'emprunt, je m'abstiendrai d'en parler, et je dirai que pour inspirer de la confiance aux étrangers, il faut d'abord que nous en montrions en nous-mêmes. (E.. 6 mars.)

M. Charles de Brouckere, ministre des finances – Comme il me serait impossible d'improviser des chiffres, je demande à répondre demain aux interpellations qui m'ont été adressées. (J. B., 6 mars.)

- L'assemblée accède à cette demande. (C., 6 mars.)

M. Le Grelle demande que M. le ministre des finances présente la loi sur le transit. (J. B., 6 mars.)

M. Charles de Brouckere, ministre des finances – J'amenderai le projet primitif, puisque le transit libre a déjà été admis. (J. B., 6 mars.)

Proposition tendant à proroger la session du Congrès national

Lecture et prise en considération

M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit une proposition signée par trente membres du congrès, qui demandent qu'à dater du 5 mars au soir le congrès se proroge jusqu'au 6 avril ; qu'alors le régent lui fera présenter les projets de décret dont l'adoption aura été jugée nécessaire. M. le régent pourra aussi, s'il le faut, convoquer le congrès avant le 6 avril. (I., 7 mars.)

M. Henri de Brouckere – Il faudrait être sûr que la discussion des objets qui sont actuellement à l'ordre du jour sera terminée avant le 5 mars. La proposition doit donc être ajournée. (J. B., 6 mars.)

Le congrès décide que la proposition sera reproduite demain si les travaux qui lui restent à terminer sont assez avancés. (l., 7 mars.)

- La séance est levée à cinq heures. (P. V.)