(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1870-1871)
(Président de M. Thibaut, vice-président.)
(page 1253) M. de Vrints procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Borchgrave donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.
M. de Vrints présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre/
« Des habitants de Bruxelles demandent que les mandats de la poste soient rédigés dans la langue parlée par l'expéditeur. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les sieurs Bouten, Vanden Dungen et autres membres de la société de Veldbloem, à Bruxelles, demandent le remplacement des employés du bureau des postes à Molenbeek-Saint-Jean et à Saint-Gilles qui ne savent pas le flamand et qu'à l'avenir on n'appelle point à des fonctions dans les contrées flamandes des individus ne connaissant pas la langue flamande. »
- Même renvoi.
« Les membres du conseil communal et des habitants de Hollange demandent que le canton de Fauvillers soit relié aux chefs-lieux d'arrondissement administratif et judiciaire par une voie publique. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics.
« Le conseil communal de Harre demande que le gouvernement lève la prohibition du bétail à la sortie sur la frontière d'Athus à la mer ou du moins qu'il rende libre la frontière française qui touche à la province de Luxembourg.
« Même demande des conseils communaux de Dion-le-Mont, Mormont, Les Bulles, Muno, Chavière, Dohan, Hompré, Hamipré, Latour, Freux, Longlier, Oisy, Mont-le-Ban, Mouzaive, Bertogne, Straimont, Remagne, Willerzée et Hotton. »
- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.
« Le sieur Rasquart, combattant de 1830, demande une augmentation de pension ou un secours »
M. de Vrints. - Je demande le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions avec prière d'en faire l'objet d'un prompt rapport. »
- Adopté.
« Le sieur Gaussoin, ancien chef de bureau, demande la révision de sa pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« L'administration communale de Tongres demande la reprise par l'Etat de la prolongation de la route dite de Zavelberg, jusqu'à la route de Tongres à Maestricht. »
M. de Borchgrave. - Il sera question de cette pétition pendant la discussion de l'article qui traite des routes.
Je demande le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics.
- Adopté.
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M. le président. - Par suite de la nomination qui a été faite hier de M. Tack en qualité de vice-président, il y a lieu de le remplacer dans diverses sections.
Je demande si la Chambre est d'avis que les sections particulières qui ont désigné M. Tack comme rapporteur soient convoquées pour faire choix d'un nouveau rapporteur.
- Plusieurs membres. - Que le bureau se charge de ce soin.
M. Braconier. - Il peut être rapporteur, quoique vice-président.
M. le président. - Je ne le crois pas, M. Braconier.
M. Allard. - Que le bureau nomme les rapporteurs.
M. De Lehaye. - Si M. Tack est rapporteur de la section centrale, sa mission est terminée.
Il serait naturel que les sections qui ont nommé l'honorable M. Tack rapporteur désignent son remplaçant.
Il ne s'agit, notez-le bien, que de convoquer les sections qui l'ont nommé.
Je ne comprendrais pas que le bureau fût chargé de désigner un rapporteur de section. Ce soin appartient à la section, qui choisira un membre partageant l'opinion de la majorité.
M. Kervyn de Volkaersbeke.- Il suffirait de convoquer les sections qui ont nommé M. Tack rapporteur.
M. Allard. - D'ordinaire, messieurs, lorsque par suite d'élections il y a lieu de remplacer des rapporteurs qui n'ont pas été réélus, c'est le bureau qui est chargé de désigner leurs successeurs.
Pourquoi agir autrement en cette circonstance ?
Je propose en conséquence que le bureau soit chargé de remplacer M. Tack dans toutes les sections centrales ou commissions dont il fait partie.
M. De Lehaye. - Comment le bureau peut-il connaître l'opinion émise par les sections ?
Les sections nomment des rapporteurs qui partagent l'opinion de la majorité.
Or, je le demande, le bureau a-t-il connaissance de ce qui s'est passé dans les sections ?
Le rapporteur doit être l'homme de la section et je ne comprends vraiment pas l'insistance que l'on met à vouloir faire nommer le rapporteur par le bureau.
M. Allard. -Il est d'usage d'agir comme je le propose.
M. De Lehaye. - Je n'ai qu'un mot à répondre à M. Allard, c'est que, depuis que la Chambre existe, le cas dont nous nous occupons ne s'est pas présenté.
M. Lefebvre. - Il n'y a qu'une seule section qui devrait être convoquée, c'est celle du mois de mars.
M. De Lehaye. - A laquelle M. Tack appartient.
M. Guillery. - On a toujours procédé comme propose de le faire encore M. Allard ; lorsqu'une section centrale s'est trouvée incomplète par l'une ou l'autre circonstance, c'est toujours le bureau qui a été chargé de la compléter. Mais du moment qu'un seul membre de la Chambre demande que l'on convoque les sections, c'est-à-dire qu'on suive la règle, c'est la règle qu'il faut suivre.
M. le président. - La section sera donc convoquée pour nommer un rapporteur en remplacement de M. Tack dans les sections centrales dont cet honorable membre fait partie.
Je propose à la Chambre de fixer dès maintenant son ordre du jour pour demain. Entend-elle discuter des pétitions ou continuer la discussion du budget des travaux publics ?
De toutes parts : Continuons la discussion du budget.
M. le président. - La Chambre paraît vouloir continuer demain la discussion du budget ; il en sera donc ainsi.
(page 1254) M. Dumortier.- J'ai à interpeller M. le ministre des affaires étrangères ; l'objet de cette interpellation ayant un grand caractère d'urgence, je désirerais que M. le ministre des affaires étrangères, qui est en ce moment au Sénat, fût prié de se rendre un instant dans le sein de la Chambre.
M. le président. - La Chambre est-elle d'avis de suspendre un instant la séance ?
M. Brasseur. - Je pourrais continuer mon discours, saura m'arrêter quand M. le ministre des affaires étrangères arrivera.
- M. le ministre des affaires étrangères entre dans la salle.
M. Dumortier. - Je me lève en proie à une émotion que vous partagez tous à la vue des désastres qui viennent de se produire à Paris.
je dois d'abord féliciter la presse belge d'avoir protesté avec la dernière énergie contre les abominations qui se commettent dans la capitale de la France ; en agissant ainsi, elle a été le véritable organe du pays : ce n'est plus la guerre civile, c'est la dévastation de tous les monuments de Paris, de toutes les gloires des siècles, de l'histoire de l'humanité qui était réunie au Louvre.
Jamais depuis la destruction de Babylone, jamais depuis l'invasion de Rome par les Visigoths un pareil spectacle n'a épouvanté le monde ; et on devait espérer que le progrès de la civilisation empêcherait à jamais le retour de tels scandales.
Mais malheureusement il n'en est pas ainsi. Qu'a-t-on détruit à Paris ? Ce sont tous les palais, c'est le Louvre qui est l'histoire des premiers siècles de l'humanité ; le Louvre, le musée des arts et de l'histoire de toutes les races anciennes, de la race assyrienne, de la race ninivite, de la race égyptienne, de toutes ces anciennes dynasties dont l'histoire repose au Louvre ; tous monuments qui nous éclairaient de leurs flambeaux pour nous faire voir quelles ont été les premières destinées de l'humanité.
Et tout cela a disparu sous la main dévastatrice, je ne dirai pas d'hommes, mais de monstres ; tout ce qui faisait le mérite et la gloire de la civilisation est anéanti !
La Belgique ne peut rester indifférente à de pareilles abominations. Je ne veux pas que le sol de la patrie soit foulé par les hommes monstrueux qui ont commis de pareilles infamies. Nous sommes dans un pays de liberté ; mais ce pays libre ne doit pas être le refuge de. tous les brigands, de tous les criminels, de tous les misérables qui se sont rendus coupables de pareilles abominations.
Et qu'on ne vienne pas dire qu'il s'agit ici de faits politiques : la dévastation, l'incendie des édifices publics, des monuments sacrés de l'histoire n'ont rien de commun avec la politique. Ce sont des crimes du droit commun et des crimes contre la société tout entière.
Je demande dès lors au gouvernement s'il est suffisamment armé pour empêcher que les misérables auteurs de ces forfaits ne viennent se fixer en Belgique ; s'il est armé d'une loi d'extradition qui permette que justice soit faite de leurs abominables iniquités. Et s'il n'est pas armé des pouvoirs nécessaires, je l'invite à présenter d'urgence à la Chambre une loi qui lui fournisse le moyen de préserver l'honneur belge de la présence de ces misérables, en les rendant aux juges qui doivent les condamner pour leurs forfaits. (Très bien ! Très bien !)
M. d'Anethan, ministre des affaires étrangères. - Messieurs, je m'associe pleinement aux sentiments qu'inspirent à l'honorable préopinant les scènes de dévastations et d'horreur qui se sont passées et qui se passent malheureusement encore à Paris. Je puis donner à la Chambre l'assurance que le gouvernement saura remplir son devoir avec la plus grande fermeté et avec la plus grande vigilance. (Approbation.) Il usera des pouvoirs dont il est armé pour empêcher une invasion sur le sol belge de ces gens qui méritent à peine le nom d'hommes et qui doivent être mis au ban de toutes tes nations civilisées. (Bravo ! bravo !)
Ce ne sont pas, d'après nous, des réfugies politiques, nous ne devons pas les considérer comme tels.
- De toutes parts. - Non ! non.
M. d'Anethan, ministre des affaires étrangères. - Ce sont des hommes que le crime a souillés et que le châtiment doit atteindre. (Très bien ! très bien !)
Des mesures sont prises. La législation nous paraît suffisante, et je demande à la Chambre de s'en rapporter, dans cette circonstance, à la sollicitude et au zèle du gouvernement pour assurer la sécurité et le repos du pays. (Approbation sur tous les bancs.)
M. Dumortier. - Je remercie M. le ministre des affaires étrangères des bonnes paroles qu'il vient de prononcer. J'ai confiance dans l'énergie du gouvernement ; il ne permettra pas que la Belgique soit déshonorée par la présence de pareils criminels, qui sont la honte de l'humanité. M. le président. - L'incident est clos.
(page 1279) M. Brasseur. - Messieurs, dans la séance d'avant-hier, j'ai établi que le compte rendu qui nous a été distribué pour l'année 1869 présente certaines lacunes, tant pour le passif que pour l'actif.
J'ai terminé en disant qu'en admettant même le bilan tel qu'il est dressé, ce serait une erreur de croire qu'il y a là un boni, un bénéfice net.
Je tiens à la détruire, d'autant plus qu'elle est généralement répandue dans le public et dans la presse.
L'on dit souvent que les chemins de fer de l'Etat produisent, outre l'intérêt et l'amortissement, encore de grands bénéfices.
Ah ! messieurs, s'il en était ainsi, nous aurions peut-être à nous occuper immédiatement de la révision des tarifs ; nous aurions peut-être à nous demander si le commerce et l'industrie, payant un tarif suffisant pour couvrir les intérêts et l'amortissement, doivent payer une somme plus ou moins considérable destinée à alimenter le trésor public, et qui aurait certaine apparence d'un impôt caché.
Il n'en est rien, messieurs, ces 63,000,000 dont j'ai parlé et qui se trouvaient dans le compte rendu de 1869, ne sont autre chose que de l'amortissement.
Or, la loi de 1834 impose l'amortissement comme une nécessité, c'est une dépense obligatoire, aussi impérieusement ordonnée que le payement des intérêts.
Eh bien, messieurs, le bilan de 1869 ne fait que se conformer à cette exigence légale. Vous en trouverez la preuve à la page 23 du compte rendu. On y voit, pour l'exploitation des chemins de fer, depuis l'origine jusqu'en 1869, accuser une recette de 745,000,000 et une dépense de 682,000,000 et par conséquent 63,000,000 de bénéfices. Mais, messieurs, on comprend dans les recettes la valeur des capitaux amortis, notez-le bien, la valeur des capitaux amortis, et il est, dès lors, évident que les 63,000,000 dont il s'agit ne sont rien autre chose que l'amortissement. Otez-les des recettes, et votre bénéfice disparaît.
Cela est clair, cela ne fait pas l'ombre d'un doute.
La loi de 1834 a du reste été très prévoyante en stipulant un amortissement pour les chemins de fer, car il n'est pas d'industriel au monde qui ne soit obligé d'amortir son capital en tout ou en partie.
Cette observation me conduit à une autre question qui a une connexité intime avec celle dont je viens de parler ; je fais allusion à l'augmentation de nos dépenses de premier établissement.
On amortit tous les ans un certain nombre de millions et cependant la dette qui reste à amortir est tous les ans de plus en plus considérable.
Vous videz le tonneau d'un côté, et vous le remplissez de l'autre côté dans une proportion plus grande.
C'est ainsi qu'en 1856 il restait à amortir 153 millions, chiffre officiel. En 1862, il vous restait à payer 166 raillions ; en 1867, 167 millions ; en 1868, 197 millions, et en 1869, 203 millions, c'est-à-dire que votre dette a augmenté de 50 millions en treize années, malgré votre amortissement.
- Des membres. - A cause de l'augmentation des chemins de fer.
M. Brasseur. - Je vais y venir.
Je répondrai immédiatement à l'observation qui vient d'être présentée par quelques honorables membres, en leur disant que je me bornerai à parler des dernières années. Pendant les dernières années, la longueur des chemins de fer est restée la même, absolument la même ; elle n'a pas augmenté, et cependant je constate encore une augmentation assez notable des frais de premier établissement.
L'augmentation de dépense qui correspond à une augmentation du réseau national est naturelle, évidente. Dès que vous augmentez le nombre des kilomètres, il est certain que la dépense de premier établissement doit augmenter. Mais, depuis un certain nombre d'années, votre réseau est resté absolument le même. Et cependant, votre dette continue toujours à augmenter et, je le répète, l'augmentation de la dette a lieu dans une proportion assez forte. Eh bien, messieurs, à quoi faut-il attribuer cette augmentation de la dette, puisque la longueur de la ligne est restée la même ?
Il y a, messieurs, dans toute industrie, deux espèces de dépenses : les dépenses utiles et les dépenses improductives.
Qu'un fabricant crée des produits avec le concours d'ouvriers et à l'aide de machines et de matières premières, le salaire des ouvriers, l'achat de matières premières et de machines constituent autant de dépenses utiles ; car ce sont des éléments qui contribuent à la production des richesses ; mais ces mécaniques, ces matières premières, ces ouvriers doivent être abritées contre l'intempérie de l'air ; il lui faut des bâtiments, et de ce chef, il y a nécessité pour le fabricant de faire des dépenses improductives qui viendront forcément s'ajouter à la dépense utile, car les bâtiments par eux-mêmes ne produisent rien directement ; leur rôle consiste à servir d'abris.
Eh bien, le bon sens indique que la dépense improductive doit être la plus faible possible, doit être réduite au minimum, tandis que la dépense utile peut être aussi grande que possible, dans l'intérêt même du producteur. Appliquons ce principe à nos chemins de fer de l'Etat. Je pense qu'on n'observe pas suffisamment ce principe que je viens d'énoncer. Dans les chemins de fer, la dépense utile, productive, c'est la ligne elle-même. Les dépenses improductives sont les bâtiments, tels que les gares et les stations. Je trouve qu'on met chez nous beaucoup trop de luxe dans nos stations ; je trouve que nous avons des palais là où des bâtiments simples et modestes, qui n'excluent nullement le bon goût, suffiraient. Ah ! si encore vous agrandissiez vos voies d'évitement dans les gares, vous feriez au moins chose utile, en ce sens que votre matériel roulant y serait moins bloqué et partant employé plus fructueusement.
De plus, les manœuvres des gares seraient moins difficiles et partant moins coûteuses : tout cela réduirait vos dépenses d'exploitation. Mais non, vous employez une grande partie de vos fonds à construire des monuments d'autant plus inutiles qu'on ne s'en sert pas : le public, en effet, ne séjourne pas dans les stations ; il se borne à traverser les salles pour se rendre aux convois.
Nulle part, dans les pays voisins, vous ne rencontrez sous ce rapport le luxe que je regrette de devoir constater chez nous.
- Un membre. - Et en Angleterre ?
M. Brasseur. - Pas plus en Angleterre qu'en Allemagne. Savez-vous, messieurs, où cela vous conduit ? A un coût kilométrique énorme qui est certes en disproportion avec la valeur marchande de votre ligne.
C'est ainsi que, il y a vingt et un ans, vous aviez un coût kilométrique de 292,382 fr. 45 c. En 1859, vous aviez un coût kilométrique de 336,325 fr. 25 c. et en 1869, un coût kilométrique de 435,610 francs. Je dis 435,610 francs, quoique le compte rendu ne renseigne que 413,000 francs, erronément, selon moi. Je sais bien qu'il faut tenir compte (page 1280) de la partie déjà amortie, ainsi que de la circonstance que le matériel roulant doit être réparti, non pas seulement sur les lignes de l'Etat, mais sur toutes les lignes exploitées par le gouvernement ; mais comme les mêmes éléments se retrouvent dans tous les chiffres que je viens de citer, la signification de l'écart des chiffres conserve toute son importance. Et notez-le bien, vos frais de premier établissement augmenteront encore, et comme il y a encore vingt et un millions de disponibles, vous aurez un coût kilométrique de plus de 500,000 francs quand ils seront dépensés.
M. Braconier. - Ce sont des frais d'installation.
M. Brasseur. - Qu'appelez-vous frais d'installation ?
M. Braconier. - Si vous employiez auparavant des rails de 21 et si vous en employez maintenant de 40, il est certain que les frais d'installation sont plus élevés.
M. Brasseur. - Pardon, cette dépense-là est comprise dans le budget ordinaire. D'ailleurs, est-ce que les compagnies n'emploient pas les mêmes rails que le gouvernement ? Y en a-t-il une seule qui ne soit pas forcée, à l'heure qu'il est, d'employer des rails de 35 et de 37 kilogrammes comme l'Etat ? Et trouvez-vous chez elles un coût kilométrique de 400,000 à 500,000 francs ? Il est évident qu'il y a là un fait qui ne s'explique pas. Votre coût kilométrique est beaucoup trop élevé. Une ligne doit se trouver dans de bien mauvaises conditions pour que le coût kilométrique atteigne le chiffre de 200,000 francs payés en écus.
Je passe à une autre question : je veux parler du prix de revient.
Il existe chez tous les industriels un principe : c'est qu'il est impossible de déterminer le prix de vente d'une marchandise, sans connaître au préalable le prix de revient. Il est évident que l'un de ces éléments est conditionné par l'autre.
Eh bien, le croiriez-vous, messieurs ? Chez nous, nous ne savons pas ce que coûte la tonne kilométrique des marchandises que l'Etat transporte, et cependant tous nos transports sont calculés d'après la tonne kilométrique.
La question, messieurs, n'est pas neuve. Elle a été agitée par l'administration elle-même, en 1858. Je lis, dans le compte rendu officiel de 1858, le passage suivant : « L'administration a compris qu'il serait éminemment utile de remettre ce travail sur le métier, et des mesures sont prises pour qu'un nouveau prix de revient soit calculé le plus tôt possible. On espère que la publication spéciale qui sera faite sur cet objet pourra comprendre le tableau des relations, etc.... »
Vous voyez donc que la question a été soulevée p3r l'administration. On promettait alors le calcul d'un prix de revient. Depuis lors, on n'a rien fait, et chaque fois que les sections centrales ont réclamé le prix de revient de notre tonne kilométrique, chaque fois les ministres ont promis de faire procéder à ce travail ; mais ce travail est encore à faire aujourd'hui.
Eh bien, messieurs, je vous le demande, comment a-t-on pu fixer des tarifs, si l'on ne connaît pas le prix de revient ? Voulez-vous me dire quel principe vous avez suivi en établissant votre tarif, puisque vous n'aviez pas la moindre notion du coût de transport ? Il est évident que vous avez fait là un saut dans l'inconnu.
L'expérience a parlé ; voyons quelles données se sont dégagées des faits.
Pour le transport des marchandises vous avez des tarifs extrêmes ; pour les petites distances votre tarif est très élevé et pour les grandes distances, il est tellement faible qu'à mon avis vous transportez à perte. Je citerai comme preuve le tarif pour les marchandises pondéreuses, le tarif n°3, c'est-à-dire quatrième classe.
Voici le tarif : Droit fixe, 1 franc. Pour les quinze premières lieues, on paye 20 centimes par lieue. Pour chacune des cinq lieues suivantes 10 centimes, et enfin pour chaque lieue dépassant la vingtième, 5 centimes.
M. Braconier. - Pour les dix premières lieues.
M. Brasseur. - Pardon, vous parlez de l'ancien tarif ; je maintiens mon chiffre.
M. Braconier. - Les dix premières lieues payent 20 centimes, les cinq lieues suivantes payent 15 centimes et de 15 à 20 lieues 10 centimes, enfin au delà de 20 lieues 5 centimes par lieue.
M. Brasseur. - Vous vous trompez. Du reste, je vérifierai tantôt.
Eh bien, messieurs, en prenant la moyenne, le tarif s'établit de la manière suivante :
Pour les marchandises qui parcourent la première distance, soit 7 lieues et demie, la tonne kilométrique paye environ 7 centimes. Pour la deuxième distance, les marchandises doivent d'abord parcourir les quinze premières lieues, la moyenne des vingt premières lieues est donc de dix-sept lieues et demie, ce qui constitue un coût d'environ 5 centimes par tonne kilométrique. Enfin, la moyenne de la dernière distance est de quinze lieues et demie. Ajoutées aux vingt premières lieues, vous obtenez trente-cinq lieues et demie. Calculs faits, le coût kilométrique de cette distance est de 2 4/10 centimes.
Messieurs, examinez le tarif pour les grandes distances. Ainsi, le tarif est de 2 4/10 centimes pour la moyenne des marchandises transportées au delà de vingt lieues. Etes-vous en bénéfice ? Etes-vous sûr de n'être pas en perte ? Je n'en sais rien et vous n'en savez rien vous-même, parce que vous ne connaissez pas votre prix de revient.
M. Braconier. - Me permettrez-vous de dire un mot ?
M. Brasseur.-Volontiers.
M. Braconier. - Messieurs, il est excessivement difficile d'établir le prix moyen de transport par tonne-kilomètre. En effet, ce prix change à chaque lieue ; car les tarifs ne sont pas proportionnels, et ce qui est vrai pour la 30ème lieue ne l'est pas pour la 21ème.
Si vous calculez le transport à 35 ou 40 lieues, vous avez un prix de transport entre 2 et 2 1/2 centimes, mais la quantité transportée à cette distance est insuffisante et n'influe pas sur les résultats généraux.
M. Brasseur. - L'honorable membre verse dans une erreur complète.
Vous allez voir.
L'honorable membre a parfaitement raison s'il établit ses calculs pour une lieue au delà de la vingtième. Maïs, quand on parle de tarifs en général et de coût, on doit procéder par moyenne, sauf à s'enquérir après coup de la question de fait, de la quantité des transports.
J'ai donc une moyenne de 2 4/10 centimes.
M. Braconier. - Il faut voir les quantités de transport.
M. Brasseur.- Lorsqu'on calcule des distances, quelles que soient les quantités de transport, il faut d'abord prendre la moyenne, et examiner après coup les quantités de transport.
Du reste, les quantités transportées au delà de 35 1/2 lieues seraient même très faibles que mon argumentation resterait debout. Il ne reste pas moins vrai qu'arrivé à cette distance, le tarif est de 2 4/10.
Eh bien, encore une fois, êtes-vous en perte ou en bénéfice ? (Interruption.)
Je vais établir que vous êtes en perte ; du moins, il y a de fortes présomptions pour le croire.
Voyons, en effet, les transports qui ont été effectués.
En 1868, d'après les documents qui nous sont fournis, sur 3,825,753 tonnes, il y en a 3,026,375 compris dans la première distance, 360,787 dans la deuxième et le reste, à peu près 400,000, dans la troisième.
En 1869, sur 4,065,193 tonnes, il y en a 3,298,286 dans la première distance, 395,679 dans la deuxième et 371,227 dans la troisième.
Vous voyez donc que les neuf dixièmes des transports ont lieu dans les limites de la première distance, c'est-à-dire sur les 15 premières lieues.
Or, le tarif de votre première distance est de 7 centimes en moyenne, et comme vous exploitez à raison de 60 p. c. par kilomètre, je demande quel est votre prix de revient ?
Oseriez-vous soutenir, en regard de ces chiffres, que vous ne transportez pas à perte à 2 4/10 centimes ?
Je sais bien qu'il y a d'autres éléments qui viennent modifier la proportion qui résulterait de ces données. Diminuez, si vous le voulez, le chiffre qui en résulte, abaissez-le de 50 p. c, il en résultera encore la présomption que vous êtes en perte pour certains transports dans la troisième distance. Du moins, je suis en droit de le croire aussi longtemps que vous ne m'aurez pas démontré le contraire.
Vous avez pris des chiffres au hasard ; vous avez sauté dans l'inconnu. Heureusement que la quantité de transport n'est pas considérable pour la troisième distance. Mais peu importe, considérable ou non, elle vous constitue en perte. Il n'y aurait que 10,000 tonnes, que vous subiriez une perte sur 10,000 tonnes.
Eh bien, messieurs, je vous le demande : de quel droit transportez-vous à perte des marchandises pour un certain nombre de commerçants, lorsque d'un autre côté vous avez un tarif très élevé pour les petites distances ?
En effet, pour les petites distances, je vous ai dit que le tarif est, en moyenne, de 7 centimes pour un transport de 4,063,192 tonnes. Décomposez ce chiffre, vous verrez que, pour la première lieue, il y a un transport de 578,512 tonnes, et savez-vous ce que coûte cette première lieue ? En moyenne 50 centimes la tonne kilométrique. Pour la seconde lieue, il y a un transport de 323,076 tonnes et un coût de 20 centimes la tonne kilométrique. Pour la troisième lieue, il y a un transport de 148,156 tonnes, et un coût de 13 6/10 centimes ; enfin pour la quatrième lieue, il y a un transport de 530,525 tonnes et un coût de 10 6/10 centimes. De sorte que (page 1281)
pour les 4 premières lieues, vous avez un transport d ? 1,582,209 tonnes sur un total de 4 millions qui coûtent des frais de transports considérables, variant entre 52 et 10 G7I0 centimes la tonne kilométrique. (Interruption.)
Je sais bien que le tarif ne peut pas être le même pour 4 lieues que pour 20 lieues ; je sais bien que les frais sont proportionnellement plus élevés pour les faibles transports. Mais entre un tarif de 52 centimes et un tarif de 10 centimes, il y a une immense différence, et certainement la différence des frais ne comblera jamais le grand écart du prix. Sans doute, j'admets le principe des tarifs différentiels ; mais entre un tarif différentiel intelligent et un système onéreux pour les uns et conférant des primes aux autres, il y a une grande différence.
Ainsi, messieurs, sur 4 millions de tonnes, vous avez 1,500,0 0 tonnes transportées à des prix très élevés. Il est évident, et c'est une conclusion à tirer de ces chiffres, que vos tarifs doivent subir des modifications ; vos tarifs sont trop élevés pour les petites distances ; ils sont trop peu élevés pour les grandes distances.
Pour le moment, on ne peut pas aller plus loin dans les conclusions, parce que vous n'avez pas de prix de revient, parce que nous procédons par tâtonnements, n'ayant pas de guide pour nous conduire. Nous sommes forcés de raisonner d'après des faits ; or, je le répète, les faits prouvent que les grandes distances vous mettent en perte, et que les tarifs sont trop élevés pour les petites distances.
En passant, je citerai cette circonstance curieuse que, pour certaines petites distances, l'Etat impose aux compagnies un tarif moins élevé que son propre tarif ! Ne devrait-il pas commencer par prêcher d'exemple ?
Il faut donc avant tout, messieurs, si vous voulez faire un travail sérieux et utile dans la question des tarifs, vous occuper immédiatement de l'établissement de votre prix de revient.
Ce prix de revient est-il impossible ?. Tantôt un honorable membre, en passant près de moi, a prononcé les mots : Impossible, vous ne l'aurez jamais !
Eh bien, je n'aime pas ce mot « impossible ».
J'avoue que la question présente des difficultés. Mais des personnes très compétentes, très versées dans la question des chemins de fer m'ont affirmé que c'est une question de dépense et rien autre chose.
D'abord, j'ai consulté l'administration des chemins de fer elle-même ; elle m'a dit que le prix de revient pourrait être établi ; mais qu'il faudrait faire pour cela une dépense de 60,000 à 90,000 francs. Mais qu'est-ce qu'une pareille dépense pour un immeuble qui nous coûte 290,000,000 ?
J'ai parlé aux directeurs des compagnies les plus puissantes. Ils ont reculé devant la dépense, tout en avouant qu'on pourrait arriver à établir un prix de revient et en ajoutant : Ce qui se fait pour toutes les industries peut se faire également pour l'industrie qu'on appelle l'industrie des chemins de fer.
Je recommande donc vivement à M. le ministre des travaux publics de faire procéder à ce travail qui est de la dernière utilité et qui, en définitive, ne doit coûter qu'une somme insignifiante.
Ce travail nous permettra plus tard de discuter à fond la question des tarifs et d'aborder des questions d'un ordre plus élevé, dont l'examen serait oiseux pour le moment.
Je passe au tarif des voyageurs. Ce tarif repose sur le même principe que le tarif des marchandises.
On paye, de 1 à 10 lieues inclusivement, 30, 20 et 15 centimes suivant la classe ;
De 11 à 20 lieues, on ajoute 15, 10 et 7 1/2 centimes pour chaque lieue ;
Au delà de 20 lieues, on ajoute 10, 7 1/2 et 5 centimes pour chaque lieue.
Il y a 20 p. c. de surtaxe pour les trains express.
Eh bien, je n'admets pas ce principe, appliqué aux voyageurs, du moins pas dans cette proportion.
Je comprends un tarif différentiel dans une assez large mesure pour les marchandises ; mais pour les personnes je ne l'admets que dans une mesure très faible ; voici pourquoi : L'intérêt de l'industrie nationale exige que les marchandises puissent être transportées aux plus grandes distances possibles. En effet, plus les produits vont loin, plus le marché national s'étend. Or, à l'extension du marché national correspond une fabrication de plus en plus grande, au profit de la richesse publique et de la classe ouvrière.
Pour le transport des marchandises, je comprends donc que, pour les grandes distances, on abaisse les tarifs, même à un prix qui donne un très léger bénéfice, frisant pour ainsi dire le prix de revient si vous voulez, car alors, au moins, on ne sera pas en perte..
Mais, pour le transport des personnes, il en est autrement. Certes, il est un élément dont il faudra toujours tenir compte, c'est que le transport des personnes à 4 lieues, par exemple, coûtera toujours, proportion gardée, plus que celui effectué à une distance de 20 lieues ; mais l'autre élément que j'ai cite tantôt pour les marchandises, celui de l'industrie nationale cherchant des marchés de plus en plus éloignés, celui-là n'existe pas.
Les personnes voyagent par plaisir ou par nécessité ; celles qui voyagent par plaisir peuvent payer quelques francs de plus ou de moins ne les arrêteront pas. Quant aux autres, elles payeront en tout état de cause. Soyez du reste convaincus que les frais de voyage n'exercent aucune influence sur le commerce, et l'industrie, car ces frais se répartissant sur la masse des produits fabriqués, les rendent imperceptibles. D'ailleurs, il en est de ces frais comme des dépenses ordinaires de la vie : celles qui coûtent le moins sont les dépenses prévues. Les dépenses de chemin de fer constituent en général la très faible part des frais de voyage.
Ma conclusion est, messieurs, que vous avez encore fait de l'arbitraire en fixant vos tarifs de voyageurs comme vous l'avez fait. L'écart entre 30 et 10 centimes est beaucoup trop grand au détriment du trésor public. Vous devez relever vos tarifs pour les grandes distances.
Voilà les observations que j'avais à présenter sur le prix de revient et sur les tarifs.
Avant d'aborder un autre ordre d'idées, je recommande à M., le ministre des travaux publics un travail excessivement utile, je dirai même nécessaire aux membres de la Chambre : je veux parler du transport des personnes et des marchandises d'après les distances.
Aujourd’hui nous n'avons que le transport par distance parcourue pour certaines catégories de marchandises, telles que la chaux, le plâtre, le ciment, le coke, la fonte brute, la mitraille de fer et de fonte, la houille, les briquettes et tourbes, les pavés, les pierres brutes, castines, etc.. Pourquoi n'aurait-on pas ce même travail pour les autres produits indistinctement ? Je pense que rien ne s'oppose à ce que M. le ministre fasse droit à cette demande dans le prochain compte rendu.
Je passe à un autre ordre d'idées ; je veux vous parler des frais d'exploitation comparés aux recettes.
Une des causes qui militent contre l'exploitation du chemin de fer de l'Etat, ce sont évidemment les frais élevés d'exploitation. On a dit souvent que l'Etat exploite à un prix beaucoup plus élevé que les compagnies privées. Cela est vrai.
C'est ainsi que j'ai fait le relevé du coût d'exploitation par années. L'Etat a commencé, par dépenser 64 p. c. de la recette, en 1849 ; il est successivement descendu jusqu'à 50 à 57, suivant les années. En se bornant aux trois dernières années, le compte rendu donne les chiffres suivants, en 1867, 60.73 p. c. ; en 1868, 59.13 p. c. et en 1869, 55.53 p.c.
Il est évident qu'il doit y avoir là un abus, car ces chiffres sont beaucoup plus élevés que ceux des compagnies privées. Vous comprenez qu'il ne nous est pas possible de rechercher les causes de cette situation défavorable. Nous ne pouvons que constater le mal en comparant la dépense d'exploitation de l'Etat avec celle des compagnies dont le coût d'exploitation n'est que de 50 et 54 p. c.
Je signale avec d'autant plus d'insistance à l'attention de M. le ministre que les frais d'exploitation de l'année 1869 sont, non pas de 53-55 p. c, comme le dit le compte rendu, mais de 60 5/10 p. c, de sorte que pendant les trois dernières années, vos frais d'exploitation se sont élevés au chiffre énorme de 60 p. c. au moins.
L'erreur du compte rendu est évidente.
Voyez à la page 30 : comment l'Etat calcule-t-il les frais d'exploitation ? Il prend les recettes, soit 43 millions ; puis les dépenses, soit 24 millions, et il établit une proportion entre ces deux chiffres.
Si l'on avait à établir le coût de l'exploitation de l'Etat, y compris les compagnies dont il exploite les lignes, nous serions d'accord. Mais il s'agit de connaître les frais d'exploitation de son réseau à lui, en dehors des compagnies dont il exploite les voies ferrées.
En effet, l’Etat a garanti à ces compagnies une part des recettes, les frais restant à sa charge. Il supporte donc toutes les dépenses, et il n'a pas toute la recette, ce qui modifie sa situation. Sans doute, il fait une recette de 45 millions, mais il doit en donner envi3on quatre aux compagnies. Dès lors, il ne lui reste plus que 59 millions pour sa-part, pour son réseau.
Par conséquent, la proportion doit être établie entre 39 et 24 millions et non pas entre 45 et 24.
En d'autres termes, vous exploitez environ 530 kilomètres appartenant à l'Etat ; vous en exploitez, en outre, environ 350 appartenant à des (page 1282) compagnies. La recette brute s'élève à 43,000,000, maïs de ces 43,000,000 vous devez en donner quatre (chiffre rond), à ces mêmes compagnies qui laissent a votre charge tous les frais d'exploitation. Vous ne recevez donc en réalité que 59,000,000. Par conséquent, je le répète, la proportion doit s'établir entre 39 et 24 et le coût d'exploitation vous revient à 60 3/10 p. c. et non pas à 55 p. c.
Cela prouve, pour le dire en passant, que vous exploitez a perte pour les compagnies. Les compagnies ont 50 p. c. de la recette et, d'après votre aveu même, vous exploitez à 55 p. c. ; il y a donc pour vous, de ce chef, une perte réelle qui retombe sur votre propre réseau.
Il y a encore, messieurs, une autre erreur dans vos calculs. Le compte rendu défalque des dépenses d'exploitation les sommes employées à l'amélioration de la voie : il considère ces dépenses comme étant des frais de premier établissement. Soit, mais alors qu'on les fasse figurer au compte capital, dès qu'ils n'y figurent pas, vous devez les maintenir parmi les frais ordinaires : il faut bien qu'ils se trouvent quelque part.
Nous exploitons donc aujourd'hui, messieurs, à 60 3/10 p. c. et ce chiffre, je le répète, est beaucoup trop élevé.
Un mot encore, messieurs, et je termine. Je veux parler un instant de la poste aux lettres et du télégraphe.
Dans le compte rendu du budget, je n'ai rencontré aucun renseignement qui pût me guider sur la question de savoir si nous faisons des pertes ou des bénéfices pour le transport des lettres.
II y a un certain nombre d'années, on a procédé à une réforme un peu radicale ; on a réduit le port des lettres pour l'intérieur au taux uniforme de 10 centimes.
J'aurais voulu, messieurs, connaître l'effet de cette réforme et les conséquences financières qu'elle a eues pour le trésor. Mais je n'ai rien trouvé dans les documents qui nous ont été remis. Je prierai donc le gouvernement de combler cette lacune dans le travail de l'année prochaine, afin que nous puissions examiner s'il n'y aurait pas lieu de revenir à l'ancien tarif ou a un tarif intermédiaire.
Qu'on ne fasse pas de bénéfices, je le conçois ; qu'on considère les chemins de fer, les postes et le service des télégraphes comme un service public, c'est là une question à débattre plus tard, quand les capitaux auront été amortis, mais au moins qu'on ne demande pas à l'Etat qu'il se constitue en perte.
M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Vous demandez cependant des télégraphes.
M. Brasseur. - Je demande, pour mon arrondissement, égalité de traitement et, au besoin, égalité dans la perte.
M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Le transport des télégrammes se fait à perte.
M. Brasseur. - Je passe précisément aux télégraphes.
Pour le transport des télégrammes, l'Etat est en perte. La perte est évidente. Nous savons que le transport du télégramme intérieur coûte environ 88 centimes à l'Etat et le produit n'est que de 50 centimes. Il y a donc pour le trésor public une perte de 40 p. c. sur chaque télégramme expédié. Ce qui rétablit l'équilibre, ce sont les télégrammes étrangers ; à l'intérieur il y a perte.
Je crois qu'il y aurait lieu de relever le prix de transport du télégramme, parce que je n'admettrai jamais le principe des transports à perte.
Je pense qu'on ferait bien de relever le prix des télégrammes, de les fixer à 60 ou 65 centimes, par exemple, ce qui permettrait au gouvernement d'augmenter le nombre de stations télégraphiques. Je sais que M. le ministre des travaux publics a déjà fait beaucoup dans cet ordre d'idées avec les 300,000 francs que la Chambre lui a alloués, il n'y a pas longtemps, et personnellement je dois le remercier de ce qu'il a fait sous ce rapport pour mon arrondissement.
Il me reste à dire un mot de la question du chemin de fer d'Athus à Givet.
Il y a quelque temps, les représentants de quatre provinces se sont rendus chez M. le ministre des travaux publics pour le prier de concéder le chemin de fer d'Atlhus-Givet à Charleroi, avec embranchement vers Beaumont. M. le ministre a accueilli cette députation avec une bienveillance toute particulière et lui a promis d'examiner la question pendant les vacances de Pâques. Les vacances de Pâques sont passées. M. le ministre a examiné la question et j'attends quelques explications de sa part au sujet de cette importante question.
C'est un point que je recommande à l'attention de la Chambre ; je le livre même aux méditations des membres de l'ancien cabinet qui, si mes souvenirs sont exacts, n'ont guère été favorables à cette ligne. La question du chemin de fer d'Athus n'est plus aujourd'hui ce qu'elle était, il y a deux mois. J'en dirai autant d'une ligne à construire de Trois-Ponts à Seraing. Dans le temps, on pouvait discuter à perte de vue sur l'opportunité du chemin de fer d'Athus : la controverse était possible, parce qu'il y avait à tenir compte de divers intérêts, d'un ordre très élevé, mais de nature différente et qui semblaient être inconciliables au premier abord.
Aujourd'hui les circonstances ont singulièrement changé. La Prusse construit un chemin de fer direct du bassin de la Ruhr dans le Luxembourg.
Ce chemin de fer aura pour conséquence indubitable de vous enlever, à vous, bassins de Liège et de Charleroi, le transport des cokes et des charbons nécessaires à l'industrie métallurgique de l'est de la France et du Luxembourg, industrie qui va être triplée.
Ce n'est pas tout.
L'industrie métallurgique de la Belgique va être atteinte, en ce sens que les Allemands produiront à meilleur marché que vous, à moins que vous ne rachetiez la position désavantageuse qui va vous être faite par un raccourcissement des distances actuelles.
En effet, messieurs, nos deux bassins métallurgiques font venir les minerais du grand-duché de Luxembourg.
Eh bien, les Allemands vont avoir cette matière première dans des conditions extrêmement favorables, et vous, qui. devez vendre à l'étranger le surplus de votre production qui n'est pas consommée à l'intérieur, vous lutterez à armes inégales, vous serez battus par les Allemands, a moins que vous ne rétablissiez l'équilibre par la construction de lignes directes, dans le but de procurer à prix réduit le minerai nécessaire à vos hauts fourneaux.
M. d'Andrimont. - On ne pourrait pas mieux justifier l'abaissement des tarifs pour les transports à grandes distances.
M. Brasseur. - Mais personne n'a jamais soutenu qu'il ne faut pas avoir de bas tarifs pour les grandes distances ! Tout ce que je crains, c'est qu'avec le tarif de 24 centimes vous ne soyez en perte.
Le tarif prussien, qui est connu comme étant le plus bas, est de 2 7/10 centimes par tonne kilométrique. Prouvez-moi que vous n'êtes pas en perte et je me déclare satisfait. Or, vous ne me fournirez cette preuve qu'en établissant votre prix de revient.
Du reste, il ne s'agit pas ici des tarifs de l'Etat, car je parle des relations des bassins de Liège et de Charleroi avec le Grand-Duché de Luxembourg, où vous subissez les tarifs d'une compagnie privée. Eh bien, savez-vous ce que vous payez aujourd'hui ?
Vous payez près de 4 centimes par tonne-kilomètre : or, je ne veux pas de ce prix de 4 centimes, qui est beaucoup trop élevé.
Quant aux lignes de l'Etat, je le répète, vous avez des tarifs très bas pour les faibles distances, mais la question est de savoir s'ils ne sont pas trop bas et si vous n'êtes pas en perte. (Interruption.)
Vous m'interrompez ; mais vous n'en savez rien, puisque vous ne connaissez pas le prix de revient. Consultez les hommes du métier, et vous vous convaincrez qu'ils sont de mon avis.
Vous parlez de bénéfices. Je vous dis que les neuf dixièmes des marchandises sont transportées aux faibles distances et à raison de 7 centimes, je crois bien que là il y a bénéfice.
M. d'Andrimont. - On peut parfaitement établir le prix de revient d'un transport complet régulier de charbon ou de coke de Liège à Luxembourg, par exemple. Ce sont là des transports qui s'effectuent fréquemment et dont on peut aisément calculer le coût.
M. Brasseur. - Je ne comprends pas la connexité qu'il y a entre l'observation de l'honorable membre et l'ordre d'idées que j'expose.
L'objection qui m'a été faite, c'est que mon raisonnement prouvait pour les faibles tarifs à grande distance.
J'ai répondu que je ne suis pas contre les bas tarifs, mais que je n'admets pas votre tarif pris au hasard de 2 4/10 centimes, car vous ne m'avez pas prouvé que vous n'êtes pas en perte. (Interruption.)
J'ai pour moi ce qu'on appelle, en termes de palais, la présomption grave, précise et concordante que vous êtes en perte.
Je défie qui que ce soit de renverser cette présomption.
Voilà, messieurs, les observations que j'avais à vous présenter sur la question des chemins de fer.
(page 1285) J'en ai passé et d'importantes pour ne pas abuser de votre bienveillance. J'appelle tout particulièrement l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la question d'Athus à Givet et sur la question correspondante d'un chemin de fer raccourcissant la distance pour le bassin de Liège.
Qu'on y prenne garde, les événements nouveaux qui se sont passés il y a environ quinze jours, le traité de paix qui vient d'être signé entre l'Allemagne et la France changera considérablement la situation de notre industrie métallurgique, et peut exercer une influence désastreuse sur son
développement ultérieur.
(page 1254) M. Braconier. - Messieurs, il me semble que la question soulevée par l'honorable M. Brasseur a une certaine importance.
Cette question des tarifs, qui a préoccupé le pays et qui a fait l'objet des travaux de la Chambre pendant un temps assez long, doit être discutée, me paraît-il, d'une manière complète. Je ne comprendrais pas un débat dans lequel il y aurait un intervalle de huit à dix jours entre un discours et la réponse qui y est faite.
Quant à moi, je pourrais mieux étudier la question et préparer ma réponse, mais pour la Chambre, qui aurait perdu de vue les arguments de l'honorable M. Brasseur, mon discours serait un hors-d'œuvre.
Je demande donc à la Chambre si elle n'entend pas ouvrir une discussion sur les chemins de fer et me permettre de prendre la parole.
M. le président. - Il serait impossible de procéder ainsi. Il serait préférable d'ouvrir une discussion spéciale au chapitre des chemins de fer.
M. Le Hardy de Beaulieu. - C'est ce que j'ai demandé au commencement de la discussion. Je propose de nouveau que la discussion relative aux chemins de fer soit renvoyée au chapitre relatif à cet objet.
M. le président. - Si tous les orateurs qui se proposent de parler sur cette question voulaient se mettre d'accord, on pourrait réserver cette discussion jusqu'au chapitre concernant les chemins de fer.
On donnerait ainsi satisfaction à l'observation de ces messieurs.
M. Braconier. - Quant à moi, je suis tout prêt à reporter la discussion au chapitre des chemins de fer, à moins que la Chambre ne préfère la continuer maintenant.
M. Vermeire. - La question ayant été soulevée, il serait de l'intérêt des travaux de la Chambre d'en continuer immédiatement la discussion. Que va-t-il arriver ? Nous sommes dans la discussion générale, les orateurs inscrits peuvent traiter toutes les questions que comporte le budget des travaux publics, les questions les plus diverses. Il me semble que la question spéciale soulevée par M. Brasseur ayant une grande importance, il serait préférable de la vider immédiatement.
M. le président. - M. Vermeire propose, en réalité, d'établir une discussion spéciale au milieu de la discussion générale. Cela n'est pas possible.
M. Braconier. - Cela arrive souvent.
M. Simonis. - Je ne m'oppose pas à ce que l'on continue la discussion de la question spéciale soulevée par M. Brasseur ; mais je ne puis consentir à céder mon tour de parole, parce que je dois partir ce soir pour Verviers et que je désirerais terminer aujourd'hui tout ce que j'ai à dire. Si la Chambre veut fixer la continuation de la discussion soulevée par M. Brasseur à la suite des quelques mots que j'ai à dire, je n'y fais, pour ma part aucune objection.
M. le président. - Je crois qu'il serait préférable de se mettre d'accord pour reporter cette discussion au chapitre des chemins de fer.
M. Brasseur. -Je vais faire une proposition qui mettra, je pense, tout le monde d'accord.
Que M. Simonis parle d'abord, et puis nous ouvrirons un débat spécial sur la question des chemins de fer.
- Une voix. - Cela ne se peut pas ; il y a décision.
M. le président. - En effet, cela ne se peut pas ; nous reprenons donc l'ordre des inscriptions.
La parole est à M. Simonis.
M. Simonis. - Messieurs, je désire simplement, et sans entrer dans le fond des débats, appeler l'attention bienveillante de l'honorable ministre des travaux publics sur quelques points qui intéressent à un haut degré l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter dans cette Chambre, et je demande d'avance l'indulgence de l'assemblée ; car toutes ces questions d'intérêt local sont ordinairement très ennuyeuses pour les auditeurs.
La station de Nessonvaux dessert non seulement la commune de même nom, qui est du ressort des députés de Liège ; mais elle dessert aussi plusieurs (page 1255) localités de l'arrondissement de Verviers, entre autres l'importante commune d'Olne, et c'est à ce titre que je crois devoir en dire un mot.
Cette station ne suffit plus aux besoins de l’industrie qui, depuis quelques années, a pris un grand développement dans cette partie de la vallée de la Vesdre. I| arrive fréquemment que des voituriers, qui viennent pour charger ou décharger des marchandises, ne peuvent avoir accès dans la station par suite d'encombrement.
Il existe en outre, à la tête de la station, un passage à niveau qui constitue un danger permanent pour la sécurité publique. Quant au bâtiment de la station, il est peu commode et insuffisant ; il a été incendié en partie l'an dernier, et il est regrettable qu'on fait reconstruit tel qu'il était et qu'on n'ait pas profité de cette circonstance pour améliorer la situation ; enfin, il n'existe aucun magasin pour remiser les marchandises, ce qui est cependant indispensable pour une station industrielle.
Les inconvénients de la station de Nessonvaux que je signale sont déjà reconnus par le département des travaux publics ; le plan qui doit les faire disparaître tous est terminé, je l'ai eu récemment sous les yeux ; il ne reste donc plus qu'à le mettre à exécution et j'espère que M. le ministre ne tardera pas à prendre les dernières mesures.
Une autre question, qui regarde aussi les diverses localités groupées autour de la station de Nessonvaux, est celle-ci : Pendant la saison d'été, un train de banlieue quitte Liège pour Chaudfontaine à 6 heures et demie du soir, et il séjourne dans ce dernier endroit jusqu'à 7 heures et demie. On se demande pourquoi il ne continue pas jusqu'à Nessonvaux ; il en repartirait immédiatement et serait à 7 heures et demie à Chaudfontaine, pour continuer de là sa route vers Liège, et cela sans qu'il en coûtât guère plus à l'Etat.
Chaque année cette combinaison est réclamée, mais en vain. On répond que la station de Nessonvaux n'est pas appropriée à la chose ; mais, quand même cela serait exact, il suffirait, d'après les renseignements qui m'ont jeté fournis, d'une dépense de 200 francs environ, pour remédier à cet inconvénient, ce qui démontrerait une fois de plus l'urgence des travaux à exécuter à cette station.
Le Moniteur a annoncé, il y a quelques jours, à ma grande satisfaction, que l'agrandissement de la station de Pepinster était chose décidée ; j'aime à croire que cet agrandissement concerne non seulement les voies, mais aussi les bâtiments ; ceux-ci, en effet, ne répondent plus à l'importance que la station de Pepinster a acquise, surtout depuis la construction de la ligne de Spa à la frontière du Luxembourg ; il est aussi de toute nécessité qu'on établisse à Pepinster une gare de dimension suffisante pour abriter les nombreux voyageurs qui, pendant la saison de Spa et surtout les dimanches et fêtes, doivent y attendre les trains se dirigeant en sens divers.
Personne n'ignore le triste sort qui, dans ces circonstances, est réservé actuellement à Pepinster aux fraîches toilettes des dames, lorsqu'un orage vient à éclater, et j'ai assez de confiance dans l'amabilité de M. le ministre des travaux publics, pour être persuadé que les travaux d'amélioration qu'il fera entreprendre incessamment, j'espère, à cette station, donneront toute satisfaction non seulement à l'industrie et au commerce, mais aussi à la plus belle moitié du genre humain.
La commune d'Henri-Chapelle a réclamé, il y a quelque temps, une station sur la ligne de jonction belge-prussienne. Si mes renseignements sont exacts, M. Jamar, alors ministre des travaux publics, avait promis de faire droit à cette demande. Voici, en effet, ce qu'il écrivait à mon honorable collègue, M. David :
« J'ai l'honneur de vous informer qu'en suite d'une invitation que je lui ai adressée, la société du chemin de fer de Welkenraedt à la frontière prussienne a modifié le tracé dudit chemin de fer, de manière à permettre l'établissement d'une halte ou station pour desservir la commune d'Henri-Chapelle. Cette halte sera établie contre la route de Liège à Aix-la-Chapelle. »
Cette station serait d'une utilité incontestable pour les riches communes agricoles d'Jenri-Chapelle, Clermont, Hombourg et Montzen ; elle figurait sur le plan qui a été déposé à la maison communale d'Henri-Chapelle, et il paraîtrait maintenant, d'après le dire des ingénieurs de la société du railway, que l'établissement de cette halte serait encore douteux.
Je ne puis croire qu'il en soit ainsi, et je ne doute pas un instant que l'honorable M. Wasseige ne tienne la promesse que son prédécesseur a faite à la commune d'Henri-Chapelle.
Il est un autre objet qui intéresse vivement une localité de mon arrondissement et que je recommande instamment à la sollicitude de M. le ministre.
L'importante commune de Lierneux se trouve, au point de vue postal, dans les conditions les plus défavorables. Les lettres pour cette commune restent souvent plus de deux jours pour arriver à destination. Plusieurs fois déjà, l'attention de M. le ministre a été attirée sur l'amélioration du service postal dans cette commune. Je le prie donc de vouloir prendre, le plus tôt possible, des mesures efficaces pour remédier à une situation réellement déplorable.
Qu'il me soit permis maintenant, messieurs, de dire quelques mois au sujet de deux demandes en concession qui ont été adressées à M. le ministre des travaux publics ; la première est faite par le concessionnaire du railway des plateaux de Herve, et a trait à un embranchement qui relierait ledit chemin de fer avec la ligne de Welkenraedt-Bleyberg ; la seconde vient d'être déposée tout récemment par M. Capitaine, et relierait le chemin de fer des plateaux de Herve à la Meuse.
Ces concessions répondraient toutes deux aux légitimes aspirations des populations agricoles du canton d'Aubel et à celles d'importants établissements industriels, disséminés entre Herve et Aubel. Toutes deux aussi seraient d'une utilité incontestable pour l'industrie de la vallée de la Vesdre et pour les charbonnages du bassin de Herve.
Je ne veux pas me prononcer sur le point de savoir laquelle de ces deux demandes en concession est la plus acceptable par le gouvernement et la plus avantageuse pour tous les intérêts en jeu. Je me bornerai à constater qu'il est plus que temps que l'on accorde à une population nombreuse et prospère un chemin de fer qui la mette en communication directe avec Verviers et Liège. Ce railway, elle le réclame depuis nombre d'années, et je prétends qu'elle y a une espèce de droit acquis.
En effet, messieurs, vous savez qu'en 1862 il fut accordé une concession se composant de deux lignes qui se croisaient dans les environs de Herve et dont l'une reliait Liège et Aix-la-Chapelle, et l'autre Verviers à la Meuse. Cette double concession était accordée dans des conditions très défavorables pour le gouvernement, puisque la société concessionnaire devait l'exploiter elle-même.
Ce réseau donnait toute satisfaction aux deux cantons de Herve et d'Aubel, dont je défends spécialement les intérêts dans ce moment, et s'il n'a pas été construit alors, c'est par suite d'une série de circonstances défavorables qui ne permirent pas aux concessionnaires de se procurer les fonds nécessaires.
Les deux concessions demandées actuellement étaient comprises dans ce réseau ; elles ont donc déjà été accordées alors en fait, et nous nous bornons maintenant à réclamer l'une d'entre elles.
L'utilité de ces deux concessions a été constatée en 1869, dans le rapport de la section centrale sur le projet de loi relatif au railway dit des plateaux de Herve et à la ligne de Welkenraedt à la frontière prussienne.
Voici ce que disait ce rapport :
« La section centrale a aussi pensé qu'un chemin de fer descendant des plateaux de Herve et se dirigeant vers la Meuse serait très utile et, en outre, qu'un autre reliant les deux voies nouvelles est le complément désirable du projet de loi.
« Elle exprime, en conséquence, le vœu que le gouvernement se montre favorable à toutes demandes qui auraient pour objet la concession de ces lignes. »
Cette opinion fut confirmée par plusieurs orateurs qui prirent part à la discussion du projet de loi.
Et, messieurs, si mes renseignements sont exacts, les deux concessions dont il s'agit et celle de Tirlemont à Diest sont seules en Belgique dans des conditions analogues, c'est-à-dire que ce sont les seules qui ont déjà été accordées, mais qui n'ont pu être mises à exécution. Or, l'on assure que cette demande en concession de Tirlemont à Diest fera incessamment l'objet d'un projet de loi.
Si cela doit être en effet, je prie instamment, M. le ministre, au nom de la justice distributive, de donner en même temps satisfaction aux populations depuis si longtemps déshéritées et si dignes d'intérêt dont je plaide la cause en ce moment.
Je profite de l'occasion, messieurs, pour entretenir aussi M. le ministre d'une question capitale pour notre industrie lainière.
Le 6 mars dernier, l'administration communale de Verviers a adressé, à l'honorable M. Wasseige, une lettre le priant de proposer dans la session actuelle le second crédit nécessaire pour pouvoir mettre à exécution le projet de barrage de la Gileppe tel qu'il a été conçu par feu M. Bidaut.
J'ai fortement appuyé cette demande ; mais, d'après certains renseignements qui m'ont été fournis, le caractère d'urgence de cette mesure n'est pas reconnu, attendu que la première partie de ce travail, si éminemment utile, ne sera pas achevée avant deux ans d'ici. Je me suis rendu à cette observation qui me paraît fondée ; mais, ce que je ne puis comprendre, c'est que, d'après ce qui m'a été dit, l'on étudie encore la (page 1256) question de s avoir si le barrage sera élevé directement à la hauteur voulue, c'est-à-dire à 47 m 80. Je croyais ce point décidé depuis longtemps.
Les craintes que l'on paraît avoir sur la solidité de la digue sont, je pense, chimériques ; d'après l'avis d'hommes très compétents, les dimensions en sont plus que suffisantes et l'on peut avoir, il me semble, entière confiance dans le talent et l'expérience du regretté M. Bidaut, auxquels tout le monde rend un légitime hommage.
Du reste, lorsque la digue aura atteint une vingtaine de mètres de hauteur, elle pourra déjà fonctionner et elle subira ainsi une épreuve toute naturelle, au fur et à mesure qu'elle s'élèvera.
La première partie du barrage que l'on construit actuellement est de 36 mètres environ de hauteur, et la dépense s'élèvera au delà de trois millions de francs. L'entrepreneur a dû faire des travaux préparatoires pour 400,000 francs environ. La seconde partie du travail ne coûtera pas un million ; mais il est évident que si elle n'est pas exécutée par le même entrepreneur que la première partie et immédiatement après celle-ci, elle exigerait les mêmes frais considérables de premier établissement et coûterait donc environ 400,000 francs de plus.
La quantité d'eau, qui sera emmagasinée après l'achèvement de la partie du travail en train d'exécution, ne sera que de 6 millions de mètres cubes ; mais ce serait bien insuffisant pour les besoins de notre industrie, autant vaudrait ne rien faire ; tandis que moyennant une hauteur supplémentaire de 11 mètres environ donnée au barrage, c'est-à-dire après l'achèvement complet du travail, nous pourrons disposer de 12 millions de mètres cubes d'eau ; cela s'explique facilement, car plus la hauteur d'eau s'élèvera, plus la surface du réservoir sera considérable.
Comme le fait observer l'administration communale de Verviers dans sa lettre à M. le ministre, que je viens de mentionner, l'honorable M. Jamar, alors ministre des travaux publics, en procédant à la pose de la première pierre de ce remarquable travail, avait promis solennellement qu'il serait exécuté dans les conditions où l'avait conçu son auteur, M. Bidaut.
Voici textuellement la phrase du discours de M. Jamar à laquelle il est fait allusion : « Cette œuvre grandiose s'achèvera, je vous en donne l'assurance, dans les conditions où son auteur l'a conçue, c'est-à-dire de façon à produire pour l'industrie verviétoise toute l'utilité dont elle est susceptible. »
Eh bien, messieurs, j'espère que l'honorable M. Wasseige tiendra l'engagement qu'a pris son prédécesseur ; s'il agissait autrement, il compromettrait sérieusement notre industrie, et il aurait toute la responsabilité de la situation.
Enfin, messieurs, en terminant, je tiens à exprimer à l'honorable ministre des travaux publics mes remerciements pour l'empressement avec lequel il a accédé à la demande que je lui avais faite ; il a délégué un ingénieur de son département, pour étudier un projet qui préoccupe vivement les esprits à Verviers ; il s'agit d'un projet qui aurait pour effet de détourner le chemin de fer de l'Etat dans la traverse de Verviers.
Ne voulant pas préjuger la question, je n'énumérerai pas les avantages considérables qui, dans ma conviction, résulteraient de cette combinaison pour la ville de Verviers et pour le gouvernement lui-même. Je me bornerai pour le moment à émettre le vœu que le gouvernement, dans le cas où il viendrait à se mettre d'accord avec l'administration communale de Verviers, prenne toutes les mesures nécessaires pour amener la réalisation de ce projet dans le plus bref délai possible.
M. Van Iseghem. - A l'occasion de la discussion du budget des travaux publics de 1870, j'ai appelé l'attention du gouvernement sur la nécessité d'avoir à Ostende un bateau dragueur. Tout le monde sait que l'eau de mer contient une certaine quantité de sable qui se dépose et envase les bassins, criques et rivières ; depuis la construction de la nouvelle crique des pêcheurs, cette crique est envasée déjà d'un mètre, et il faut absolument que le gouvernement ait à Ostende un bateau dragueur, qui non seulement devra maintenir, à une certaine profondeur, la crique, mais aussi enlever la vase devant le nouveau débarcadère des bateaux à vapeur et enlever une partie de la barre devant le port ; ce dernier travail pourrait se faire pendant la bonne saison. L'administration des ponts et chaussées a donc besoin d'un de ces bateaux, eu au moins elle doit faire une adjudication annuelle pour le dévasement de ces diverses parties du port d'Ostende. Ce bateau pourrait encore rendre des services dans les canaux.
J'espère que le gouvernement ne tardera pas à faire cette acquisition. La nouvelle crique n'est pas seulement nécessaire et indispensable à la pêche maritime ; elle a servi encore, pendant l'hiver dernier, à divers bateaux à vapeur en destination d'Anvers, qui ne pouvaient, à cause des glaces, arriver dans ce dernier port. Ostende est, pendant l'hiver, le seul port abordable ; tous les autres ports de, la mer du Nord ont été pris, l'hiver dernier, par les glaces. Le gouvernement a donc le plus grand intérêt à entretenir convenablement le port d'Ostende.
En parlant de la nouvelle crique des pêcheurs, j'ai aussi à dire quelques mots du pavage du quai de cette crique. Ce travail est urgent et doit coûter environ 200,000 francs. Il faut absolument qu'on le pave, sans retard. En hiver, on ne peut pas s'en approcher tellement le chemin est mauvais, ce qui empêche souvent des navires d'y entrer ; alors il y a encombrement autre part et surtout au débarcadère.
Un autre travail très urgent est le prolongement des écluses du bassin,, pour permettre aux grands steamers d'entrer dans le bassin, et on doit placer sur cette écluse un pont pour relier la ville au nouveau débarcadère. Sans ce pont, les voyageurs venant de l'Angleterre doivent faire un grand détour pour entrer en ville. Le mouvement des voyageurs entre Ostende et Douvres augmente et l'Etat a le plus grand intérêt à contenter autant que possible les voyageurs.
Il y a aussi des travaux à faire à la station du chemin de fer. II y a un an, une somme de 550,000 francs a été votée, mais elle est de beaucoup insuffisante. Nous avons eu, dans ces derniers temps, un encombrement considérable de marchandises, et il en est résulté des difficultés considérables ; en été affluence considérable de voyageurs, l'agrandissement de cette station est urgente.
Je recommande ces différents points à la bienveillante attention de M. le ministre des travaux publics et j'ose espérer que dans le prochain projet de loi de travaux publics il voudra bien en tenir compte.
Il y a encore un travail presque indispensable, c'est un pavé direct entre Ostende et Blankenberghe qui a été réclamé par les diverses administrations communales que cette route doit traverser. Aujourd'hui pour aller d'Ostende à Blankenberghe on doit faire un immense détour. Ce pavé aura une étendue d'environ 18 à 20 kilomètres et il serait d'une grande utilité pour la facilité des transports. D'après la règle suivie dans la Flandre occidentale pour la création des pavés, la commune intervient pour un tiers de même que la province et l'Etat,
Dans le cas présent il y aurait impossibilité pour les communes intéressés telles que Breedene, Clemskerke, Vlisseghem, Uitkerke, Nieuwmunster et Wenduyne d'intervenir pour la moindre part ; les ressources de ces communes ne le permettent pas.
A peine pourrait-on engager les propriétaires à intervenir en cédant gratuitement les terrains, ce qui pourrait faire un sixième de la dépense. L'Etat est beaucoup plus intéressé que les communes à faire cette route d'abord pour l'entretien des dunes. Quand on doit les réparer, le transport des matériaux est, pour ainsi dire, impossible ; puis, quand des navires échouent sur la côte, le transport des marchandises à bord se fait très difficilement ; puis l'Etat, comme propriétaire des dunes, a le plus grand intérêt à les conserver.
On pourrait en planter les pannes et dans quelques années l'administration y trouverait une grande ressource, donc le pavé sera un avantage pour le trésor et une sécurité pour les propriétaires.
Je recommande cet objet à la vive sollicitude de l'honorable M. Wasseige.
Quant aux dunes d'Ostende à Middelkerke, j'ai reçu une lettre de l'administration communale de Mariakerke qui manifeste toutes ses inquiétudes sur le point de savoir si les travaux nécessaires seront effectués avant l'hiver, car s'il n'en n'était pas ainsi, il pourrait y avoir des inondations qui s'étendraient sur une grande partie de la Flandre occidentale. Les fonds sont déjà votés et j'espère que ces travaux pourront être entièrement terminés avant la fin de l'année.
Je désirerais aussi dire quelques mots des conducteurs des ponts et chaussées. Ces agents ont une grande responsabilité ; ils sont chargés d'une besogne très importante et le gouvernement ferait bien d'augmenter les traitements des conducteurs de première classe et des conducteurs principaux. Ces fonctionnaires ont les uns pour bâton de maréchal, le grade de conducteur principal, les autres, celui de conducteur de première classé ; il faut après trente années de service, ayant été chargés de travaux importants, qu'ils aient un traitement convenable.
M. le ministre est juge de cette question ; c'est à lui d'apprécier, et j'ai confiance dans la décision qu'il prendra.
Je désirerais ajouter encore quelques mots relativement au tarif du transport des marchandises par les chemins de fer.
D'abord les tarifs internationaux favorisent singulièrement les ports de mer étrangers au détriment des ports de mer belges ; pour les tarifs intérieurs les marchandises étrangères obtiennent un avantage sur les produits belges.
Pour vous en donner un exemple, je citerai le sulfate de soude, qui nous (page 1257)
est envoyé de l'Angleterre à Anvers et expédié, par exemple, à Braine-le-Comte au tarif de la quatrième classe, et qui sur une distance de 16 lieues paye fr. 4.10 ; tandis que la même matière, fabriquée dans le pays et expédiée, par exemple, de Vedrin aussi à Braine-le-Comtle, parcourant la même distance de 16 lieues, est taxée à la deuxième classe et paye fr. 7.20. Il y a donc, pour cette marchandise venant de l'étranger, un avantage de fr. 3.10.
D'Anvers à Jemmapes, 25 lieues, sulfate anglais, fr. 1.65 ; de Vedrin à Jemmapes, sulfate belge, 18 lieues, fr. 7.60.
Ce tarif accorde en conséquence un droit différentiel à l'industrie étrangère, une véritable prime. Ce tarif ne peut être maintenu. Il faut au moins que les produits belges soient mis sur le même pied que les produits étrangers.
Je recommande également cet objet à l'attention de M. le ministre des travaux publics.
M. Houtart. - Messieurs, je me bornerai à appeler l'attention de M. le ministre des travaux publics sur l'emploi exagéré des pierres étrangères dans les constructions faites pour le compte de l'Etat.
Dans une circonstance récente, à propos du ralentissement apporté aux travaux du palais de justice, il m'a été donné d'acquérir la conviction que nos matériaux pouvaient être très avantageusement employés, préférablement aux matériaux étrangers ; qu'il y avait même une très grande économie à substituer aux pierres étrangères les pierres du pays.
Je prierai donc M. le ministre des travaux publics de recommander aux architectes qui seront chargés de confectionner les plans des constructions projetées d'hôtels publics (hôtel des postes, de la Monnaie, palais des beaux-arts) ; de leur recommander, dis-je, de réserver la part la plus large aux matériaux du pays dans ces constructions.
Je crois inutile de faire ressortir les qualités de la pierre de taille qu'on exploite dans nos contrées. La ville de Bruxelles possède sous ce rapport des spécimens nombreux que nous voyons tous les jours. Je citerai les hôtels du Quartier-Léopold, l'église Saint-Joseph, la station du Nord, etc. ; tous ces monuments attestent la bonne, parfaite et solide qualité de nos matériaux.
Je ne puis pas tenir le même langage à l'égard des monuments faits à l'aide de la pierre étrangère. Je désignerai notamment la colonne du Congrès. Je crois que son état laisse beaucoup à désirer, et pour éviter que la colonne ne devienne un danger, elle nécessite des réparations nombreuses, coûteuses et souvent renouvelées.
Je n'ai pas qualité pour apprécier d'autres constructions ordonnées par l'édilité bruxelloise. Je ne puis cependant m'empêcher de dire un mot de la Bourse. Je passe très souvent à côté de ce monument, et je suis toujours amené à faire la réflexion que la façade en serait magnifique, si elle était faite de pierres de taille de notre pays. Son aspect, à l'heure qu'il est, n'est pas excessivement agréable ; il est plutôt triste que réjouissant.
Je pense que ces considérations suffiront pour engager M. le ministre des travaux publics à donner la part la plus large, dans la construction des bâtiments de l'Etat, à la pierre que nous extrayons de nos carrières.
Il est un autre obstacle qui s'oppose au développement de l'industrie des pierres de taille. La pierre brute, qui vient toujours de l'étranger, est transportée sur nos chemins de fer à la quatrième classe. La pierre de notre pays, que nous ne pouvons expédier qu'après lui avoir fait subir l'opération de la taille, est transportée au tarif de la troisième classe. De là un désavantage signalé pour cette dernière.
Je demande l'application d'un tarif uniforme pour le transport de toutes les pierres, les pierres brutes, les pierres taillées et même les marbres bruts. Je pense, ou plutôt j'ai la conviction que ces pierres payent à raison de leur poids, sans la moindre responsabilité pour l'administration. Je ne vois donc pas la nécessité de leur appliquer un tarif différent.
Je crois que ces observations seront appréciées par M. le ministre des travaux publics ; elles ont, du reste, fait l'objet des délibérations de divers corps consulaires. La chambre de commerce de Charleroi et celle de Mons ont adressé différentes observations au département des travaux publics pour réclamer l'uniformité des tarifs que je sollicite aujourd'hui.
Je me joins, messieurs, au vœu exprimé par ces deux corps consulaires, pour voir arriver prochainement un changement que je sollicite en ce moment.
Un point important et qui mérite toute la sollicitude de M. le ministre se rencontre dans les plaintes nombreuses formulées par les intéressés sur les difficultés qui s'opposent à la navigation régulière de la Dendre. Je ne puis mieux faire que de donner lecture d'un passage que je trouve dans un journal de mon arrondissement et qui fournit les explications suivantes :
« L'Etat a dépensé, il y a quelques années à peine, plus de huit millions de francs pour la canalisation de la Dendre, et cependant les travaux ont été exécutés avec si peu de soin et de prévoyance qu'aujourd'hui encore la navigation n'a lieu qu'au prix des plus grandes difficultés.
« Ainsi le minimum de mouillage sur cette rivière, qui avait été fixé, même dans le cahier des charges, à 2 mètres 10 centimètres, ne dépasse pas un mètre 95 centimètres, de sorte, qu'on peut à peine y naviguer avec un enfoncement de 1 mètre 80 centimètres.
« A l'intérieur de notre ville notamment, les travaux sont exécutés en dépit du sens commun. La rivière y est tellement étroite, tellement sinueuse que deux bateaux ne peuvent passer de front ; s'ils marchent en sens inverse, l'un des deux doit nécessairement rétrograder. C'est bien pis encore lorsqu'un bateau est en chargement à l'intérieur, la navigation se trouve alors entièrement interrompue.
« Dans une localité qui, comme Lessines, compte de nombreuses carrières de pierres de pavés appelées à un rapide développement, et où chaque année déjà on charge plusieurs centaines de bateaux, l'administration des ponts et chaussées n'a pas même établi un quai de chargement, tandis qu'elle en a fait construire de magnifiques dans d'autres localités telles que Ninove et Grammont, où l'on ne charge guère que quelques bateaux par an.
« A Lessines, où, à cause des expéditions de pavés, soit pour l'intérieur, soit pour l'étranger, stationnent en tout temps de nombreux bateaux, on a aussi négligé de construire un bassin de garage où les bateaux pourraient stationner, virer selon les besoins. »
Cette situation, très préjudiciable aux intérêts de la ville de Lessines et autres localités, peut être modifiée sans grandes dépenses et je prie M. le ministre, d'apporter promptement un remède à un état de choses aussi nuisible au commerce en général et à la ville de Lessines en particulier.
Obligé de répondre aux vœux exprimés par les nombreuses populations de l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter, je prierai M. le ministre des travaux publics d'examiner promptement et d'approuver, s'il y a lieu, les plans qui lui sont soumis pour la construction du chemin de fer de Houdeng-Goegnies à Soignies, passant par la ville de Rœulx, en me permettant de lui observer que le développement de cette ligne ne sera complet qu'après l'obtention de la concession de la petite ligne de Soignies a Bassilly demandée par la compagnie des Bassins houillers. Dans l'intérêt de nos populations, dans l'intérêt général du pays et particulièrement des deux Flandres qui partageront avec nous les bienfaits de cette voie de communication, je me permets de solliciter une prompte solution de cette importante question.
Je croirais manquer à mon devoir si je ne remerciais pas MM. les ministres des finances et des travaux publics de la détermination qu'ils ont prise de réduire les péages sur les embranchements du canal de Charleroi à partir du 1er juin prochain. Je formulerai une simple observation cependant ; la taxe de 30 centimes par tonne établie sur deux chemins de fer industriels de quelques kilomètres aboutissant à un embranchement de la Croyère et de Bettincourt me paraît beaucoup trop élevé ; en effet une taxe de dix centimes par kilomètre et par tonne alors que la traction se fait par les soins de ceux qui se servent du chemin de for ne peut être que le résultat d'une erreur. Signaler le fait, c'est en réclamer la révision, et une réduction notable me paraît nécessaire. Pour être juste, cette taxe ne devrait pas dépasser un centime par kilomètre et par tonne ; ainsi elle est établie sur la voie navigable dont le chemin de fer n'est que la continuation.
Les sociétés charbonnières du Centre se trouvant toutes ainsi sur la même ligne, la justice distributive y trouvera son compte et l'égalité pour tous préviendra les plaintes et les récriminations.
Je terminerai ici' mes observations, me réservant, dans la discussion des articles du budget, d'appeler l'attention du gouvernement sur la position des chefs de bureau et des conducteurs des ponts et chaussées, dont la rémunération me. paraît insuffisante et inférieure à la position faite aux employés de la même catégorie appartenant à d'autres branches de l'administration. Je joins mes instances à celles de l'honorable M. Van Iseghem, qui vient de soulever la même question.
M. Puissant. - Messieurs, par arrêté royal du 30 novembre dernier, une partie importante de la ligne de Frameries à Chimay, la section de Bonne-Espérance à Beaumont, a été supprimée.
Cette section devait rendre de si grands services aux cantons de Beaumont, de Merbes-le-Château et de Chimay, que sa suppression a produit dans notre arrondissement la plus fâcheuse impression.
Nos populations manifestent leur mécontentement et s'étonnent que le (page 1258) gouvernement ait supprimé, sans aucun motif, une ligne de cette importance.
Les exploitants du Couchant de Mons ont aussi adressé à la Chambre, le 21 mars, une pétition dans laquelle ils exposent que cette décision est une violation flagrante de la loi du 12 août 1862, et en même temps une application fausse de la convention du 25 avril 1870. Ils démontrent que la résolution du gouvernement porte une atteinte sérieuse à leurs intérêts et détruit complètement le but et l'utilité principale du chemin de fer de Frameries à Chimay.
Mes honorables collègues de Mons feront,, mieux que moi, ressortir le préjudice causé aux sociétés charbonnières de leur arrondissement.
Je me bornerai seulement à présenter quelques observations qui concernent plus particulièrement l'arrondissement de Thuin.
Sans répéter les nombreuses promesses, qui nous ont été faites de toutes parts, et que nous étions en droit de considérer comme sérieuses, je rappellerai qu'aux termes de la loi du 12 août 1862, le gouvernement était autorisé à concéder un chemin de fer de Frameries à Chimay, avec embranchement de Beaumont à Thuin, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges du 5 mai 1862 ; que la concession de ce chemin de fer a été accordée au sieur Simon Philippart, par arrêté royal du 29 avril 1865, et qu'aux termes de l'article 14 du cahier des charges, les travaux de construction de la ligne devaient être terminés et le chemin livré à l'exploitation le 29 avril 1868.
Conséquemment, messieurs, si la compagnie concessionnaire avait rempli ses engagements en temps utile, la ligne serait exploitée depuis plus de trois ans, et nous n'aurions pas aujourd'hui le vif regret de voir déçues toutes nos espérances.
Je me demande maintenant, avec tous ceux qui connaissent l'arrondissement de Thuin, pour quels motifs la section dont je parle a été supprimée ?
J'espère que M. le ministre des travaux publics voudra bien nous les faire connaître, car il importe au plus haut point que notre arrondissement soit renseigné sur les considérations qui ont déterminé le gouvernement à prendre une semblable décision.
M. le ministre dira peut-être qu'il y avait double emploi, qu'une seule ligne pour arriver à Beaumont suffit. C'est là une erreur complète. Déjà MM. les exploitants du Couchant de Mons ont répondu péremptoirement à cette objection.
Il n'y avait pas double emploi, et une seule ligne pour arriver à Beaumont est insuffisante.
En effet, messieurs, depuis que le chemin de fer de Frameries à Chimay a été concédé, aucune autre ligne n'a été construite dans notre arrondissement. La situation est tout à fait la même qu'en 1862. Or, à cette époque, les Chambres ont décidé de concéder simultanément une ligne principale et un embranchement. Elles ont donc parfaitement reconnu alors que ces lignes n'occasionnaient point de double emploi.
Du reste, quand elles prenaient cette décision, les Chambres n'ignoraient pas que le canton de Beaumont est très riche et très étendu, qu'il ne possédait pas, comme il ne possède point encore aujourd'hui, un seul mètre de voie ferrée, qu'il n'a ni canaux, ni rivières navigables, et que, pour aider à son développement et à sa prospérité, il était indispensable qu'il fût mis en communication directe avec les bassins de Mons, du Centre et de Charleroi.
Chacune de ces lignes avait donc son utilité bien distincte, et les Chambres, en choisissant Beaumont pour leur point de jonction, ont voulu donner à cette ville une juste compensation de l'isolement exceptionnel dans lequel elle se trouve.
La section supprimée devait encore traverser le canton de Merbes-le-Château et desservir les localités importantes, privées de voie ferrée, qui attendaient avec la plus vive impatience la construction d'un chemin de fer garanti par une loi et par des engagements formels.
Le département des travaux publics n'avait aucun motif de supprimer cette ligne. Il devait au contraire être renseigné sur son importance et ne pouvait ignorer que la petite section de Bonne-Espérance à Beaumont offre l'immense avantage de mettre nos charbonnages en communication, par la voie la plus courte, avec les établissements métallurgiques de l'Est de la France.
Jamais construction de chemin de fer n'a été sollicitée avec plus d'instances. Les nombreuses et justes réclamations des communes intéressées et de toutes nos industries attestent que l'urgence était grande et l'utilité incontestable.
Mais, messieurs, il existe une considération plus importante, et cette considération doit prouver d'une manière péremptoire que l'arrêté royal du 12 août 1862 a été parfaitement étudié et sagement conçu.
Je pose en fait qu'aucune réclamation n'a été adressée contre cet arrêté. Le tracé qui est indiqué dans le cahier des charges donnait satisfaction à tous les intérêts de notre arrondissement, et la pétition des exploitants du Couchant de Mons prouve, ce qui est parfois bien difficile, qu'il répondait à l'intérêt général.
Le gouvernement aurait dû tenir compte de ces importantes considérations. Il ne l'a pas fait. Il a préféré ne point écouter les justes observations qui lui ont été présentées et modifier la ligne principale dans un sens que rien ne justifie, car le nombre de kilomètres à construire reste le même et la distance à parcourir est augmentée de trois lieues environ. J'ose enfin presque affirmer que, pas une commune, pas un industriel, pas même un particulier, n'a réclamé la modification qui a été adoptée.
Quel a été le but du ministère. ? Je l'ignore. En tous cas, le seul bénéfice qu'il puisse retirer de cette résolution, c'est d'avoir occasionné un mécontentement profond dans l'arrondissement de Thuin et dans une partie de l'arrondissement de Mons.
A quelque point de vue que nous nous placions, le gouvernement a méconnu en cette circonstance les droits et les véritables intérêts de l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter, et c'est au nom de ces droits et de ces intérêts que je proteste contre la décision qu'il a prise.
Cependant, si le gouvernement, renseigné peut-être d'une manière inexacte, n'a réellement pas eu l'intention de poser un acte nuisible à notre arrondissement, une occasion favorable se présente de prouver que sa sollicitude ne nous fait pas défaut, et qu'il est tout disposé à doter cette partie du pays d'une voie de communication indispensable à sa prospérité.
M. Closon, ingénieur à Liège, sollicite la concession d'un chemin de fer de Beaumont à Givet, et demande que la petite ligne de Bonne-Espérance à Beaumont, sur laquelle il avait d'abord compté, fasse partie de sa concession. Il réclame seulement le droit d'exécuter cette voie ferrée, à ses frais, et sans l'intervention pécuniaire du gouvernement.
Je n'insisterai pas pour démontrer l'utilité de cette nouvelle ligne ; il suffit de jeter les yeux sur la carte, pour rester convaincu qu'elle aurait la plus grande importance, et que, par un parcours peu étendu, elle mettrait notre arrondissement en rapport direct avec les grandes voies de communication actuellement existantes.
Elle serait donc non seulement appelée à desservir les plus grands intérêts, mais elle permettrait à toutes nos industries de prendre un nouvel essor, et aux cantons de Beaumont et de Merbes-le-Château, si riches en minerais, en pierres, en. marbres, en bois, etc., de trouver l'écoulement de toutes les richesses qu'ils renferment.
J'appellerai enfin toute l'attention de la Chambre sur la pétition que le conseil communal de Beaumont a adressée aux membres de cette assemblée, le 15 décembre dernier. Cette pétition indique d'une manière claire, précise et parfaitement détaillée, les sources nombreuses de production qui serviraient à l'alimentation d'un chemin de fer ; elle prouve aussi, à toute évidence, que le canton de Beaumont fut jadis industriel et prospère et que le défaut de moyens de communication a seul fait disparaître momentanément toutes nos industries.
Le gouvernement, guidé par un sentiment de justice, ne peut pas ne point tenir compte de semblables réclamations. Il ne compromettra pas l'avenir d'une grande partie de l'arrondissement de Thuin, en refusant de procurer à nos populations si honnêtes et si laborieuses les avantages de cette voie ferrée.
J'ai donc lieu de croire que M. le ministre des travaux publics voudra bien nous faire connaître qu'il est disposé à accueillir favorablement la demande en concession sollicitée par M. Closon ou au moins que le chemin de fer de Frameries à Chimay sera exécuté, tel qu'il a été concédé en vertu de la loi du 12 août 1862.
Si, contre mon attente, sa réponse devait encore nous être défavorable, je devrais, à regret, conserver l'opinion que j'ai émise sur les intentions du gouvernement à notre égard, et dans ces conditions, je ne pourrais voter le budget des travaux publics.
Puisque j'ai la parole, je ne finirai pas, messieurs, sans faire remarquer que le gouvernement aurait dû, pour les motifs que j'ai eu l'honneur de développer, accorder un délai moins long pour l'achèvement des sections restant à construire du chemin de fer de Frameries à Chimay et de ses extensions, ou au moins pour la section de Thuin à Beaumont.
La compagnie concessionnaire se trouve en possession d'une partie des terrains nécessaires à la construction de cette section.
Les travaux étaient commencés. Beaumont et des communes importâmes, où se trouvent de grandes industries, espéraient que la ligne pourrait être terminée au plus lard l'année prochaine.
Le gouvernement n'aurait donc pas dû autoriser que les travaux ne (page 1259) fussent entamés que le 1er juillet 1872, pour être terminés seulement deux ans après.
Un délai aussi long était d'autant moins nécessaire, que la compagnie concessionnaire, à la suite d'instances qui avaient été faites, paraissait enfin disposée à terminer promptement cette ligne tant désirée. Il fallait profiter des bonnes intentions de la compagnie concessionnaire.
Les travaux sont maintenant arrêtés et tout semble indiquer qu'ils ne seront pas repris de sitôt ; aussi n'entendons-nous que plaintes et réclamations, qui ne sont malheureusement que trop fondées.
Le gouvernement a de nouveau témoigné, en cette circonstance, une grande indifférence pour les intérêts de notre arrondissement, et je regrette de devoir encore protester contre la décision qu'il a prise par l'arrêté ministériel du il janvier dernier.
M. Pery de Thozée. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un rapport sur une demande en naturalisation ordinaire.
M. Simonis.-J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un rapport sur un projet de loi portant création d'un nouveau canton de justice lie paix avec Dison pour chef-lieu.
- Ces rapports seront imprimés, distribués et les objets qu'ils concernent mis à la suite de l'ordre du jour.
M. Descamps.-Messieurs, l'honorable M. Brasseur a abordé tout à l'heure l'importante question du prix de revient des transports par le chemin de fer de l'Etat ; il vous a démontré l'utilité, l'urgence de l'établissement de ce prix de revient. Parmi les idées développées à ce sujet par l'honorable membre, il y en a que je ne partage pas complètement ; toutefois, j'insisterai avec lui pour qu'une solution soit enfin donnée à la question. L'attention du gouvernement a, du reste, été souvent appelée sur la nécessité de la formation d'un prix de revient des transports, et je me joins encore à l'honorable M. Delcour, rapporteur de la section centrale, pour engager de nouveau le gouvernement à réaliser l'intention qu'il a manifestée de créer un service spécial qui aurait pour mission d'élaborer le travail long et compliqué que nécessitent les difficultés du problème à résoudre.
Si, comme on l'a prétendu, la solution complète de ce problème est regardée aujourd'hui encore comme impossible, le service spécial dont l'installation nous a été promise, s'appliquerait au moins à coordonner tous les éléments du travail demandé, à décomposer minutieusement par catégories de dépenses, les moyennes, aujourd'hui très peu instructives dans l'état où elles nous sont livrées, que contient chaque année le compte rendu des opérations du chemin de fer.
Si la Chambre me le permet, je lui rappellerai à quelle occasion cette question prit naissance ici et ce qui a provoqué, de la part de la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics de 1868, l'invitation qu'elle fit au gouvernement de rechercher à l'avenir, au moyen des éléments qu'il possède et des données fournies par l'expérience, le prix de revient du transport des marchandises et des voyageurs, prix de revient qui pouvait lui servir de limite extrême pour fixer le taux le moins élevé des transports.
Dans la séance du 14 février 1867, l'honorable M. Vanderstichelen, alors ministre des travaux publics, traitant devant la Chambre avec une lucidité et un talent remarquables la question des tarifs, disait :
« L'Etat ne peut ni surtaxer les transports ni chercher à amener un accroissement anomal dans le mouvement par une réduction indéfinie des taxes.
« Il y a quelque chose de mieux à faire ; c'est de rechercher le système qui concilie tous les intérêts, l'intérêt du trésor, l'intérêt du public et l'intérêt des compagnies, et ce système, je le définis, je le formule en deux mots : c'est celui qui, tout compte fait de la dépense, car la dépense est un des éléments les plus essentiels en cette matière, procure la recette la plus élevée au moyen des prix les plus réduits.
« Quel est le tarif qui réalise cet idéal ? Quelles sont les taxes qui, toujours compte fait de la dépense, amèneront les recettes les plus élevées ?
« Il n'y a, à cet égard, aucune donnée scientifique. Ainsi que je l'indique, la dépense est un élément considérable de la solution d’une pareille question. Mais quelle est à priori la dépense, quelle est l'unité du prix de revient du trafic direct et du trafic additionnel, quelle est la quantité de matière transportable, soit voyageurs, soit marchandises ? Nul n'en sait rien, c'est là affaire de tâtonnements et d'expérience. »
Et plus loin, il ajoutait :
« Les réformes n'ont-elles pas entraîné une augmentation exorbitante, anomale de dépenses ?
« On peut chercher à élucider cette question de deux manières : l'une, à peu près impraticable, consiste à rechercher quelle est l'augmentation de dépenses correspondant directement à l'accroissement du mouvement.
« Je dis que la solution du problème, entreprise de cette façon, constitue une tâche à peu près impraticable, et voici pourquoi : il faudrait d'abord savoir d'une manière très exacte, à des fractions de centime près, quelle est l'unité du prix de revient des transports anciens, c'est-à-dire des transports qui étaient acquis au chemin de fer avant la réforme. Il faudrait ensuite rechercher quelle est l'unité du prix de revient du trafic nouveau qui est venu s'ajouter au trafic ancien.
« Ce travail n'est pas absolument impossible, mais je dois confesser en toute humilité, disait l'honorable ministre, que l'administration n'en possède pas aujourd'hui tous les éléments. »
Messieurs, c'est parce qu'elles étaient convaincues que ce travail très difficile, il est vrai, n'était cependant point impraticable, c'est parce qu'elles savaient que des essais avaient été tentés déjà avec plus ou moins de succès, à une époque où la période des tâtonnements était loin d'être close, que les sections centrales qui, depuis l'expérimentation des tarifs, ont successivement examiné le budget des travaux publics, ont tout particulièrement insisté sur la nécessité, pour le gouvernement, d'entreprendre l'étude de ce travail, le seul pour ainsi dire susceptible de jeter une lumière complète sur les essais tentés depuis 1866.
Mais, nous a-t-on objecté souvent, ouvrez le compté rendu des opérations du chemin de fer, publié chaque année par le gouvernement, en vertu de l'article 6 de la loi du 1er mai 1834, vous y trouverez des données positives qui remplaceront avantageusement les résultats plus ou moins problématiques des calculs que vous proposez comme bases des appréciations de l'exploitant.
Examinons, messieurs, quelles ont été, pour 1869, les données fournies par ce compte rendu.
La locomotive kilomètre remorquant une charge, étant considérée comme représentant l'unité de travail effectué, a produit :
Recette brute : fr. 4 35 ; dépense : fr. 2 42 ; excédant de recette : fr. 1 93.
Là recette et la dépense totales de l'exploitation étant réparties sur les voitures kilomètres chargées, accusent les moyennes suivantes :
Recette brute : fr. 0 3465 ; dépense : fr. 0 192 ; excédant de recette : fr. 0 154
Excédant de recelte.. fr. 0 151
Enfin, le train kilomètre, considéré comme unité du travail effectué, donne pour résultat :
Recette brute : fr. 4 50 ; dépense : fr. 2 50 ; excédant de recette : fr. 2 00.
Poussant plus loin les investigations, on trouve que chaque voyageur à produit une recette brute de fr. 1 61 par locomotive-kilomètre, fr. 0.13 par voiture-kilomètre, fr. 1.66 par convoi-kilomètre.
Chaque tonne de grosse marchandise a rapporté fr. 2.07 par locomotive-kilomètre ; 0.16 par voiture-kilomètre ; 2.14 par convoi-kilomètre.
Mais tous ces chiffres, considérés d'une manière absolue, que signifient-ils ? Laissent-ils dans l'esprit une trace quelconque qui puisse servir de guide vers la solution du problème posé ? Peuvent-ils aider en quoi que ce soit dans la recherche de la relation qui existe entre le travail et la dépense ? Aucunement.
Ces moyennes sont des données qui n'offrent rien d'absolu ; la multiplicité, la longueur des parcours, tous les diviseurs. en un mot, qui ont concouru à leur formation, sont des quantités essentiellement variables. Or, le. dividende, au contraire, étant fixe, les résultats accusés sont susceptibles de variations indéfinies et proportionnelles à celles qu'auraient pu subir les diviseurs.
Voici, du reste, comment s'exprimait, sur le peu d'utilité des moyennes en question, un homme doit on ne récusera point la haute autorité, un de (page 1260) nos ingénieurs les plus distingués, enlevé trop tôt à la science des chemins de fer, M. Alphonse Delpaire, auteur d'un traité remarquable des dépenses d'exploitation du railway.
« Les rares auteurs qui ont traité cette question (celle des dépenses) se sont contentés de donner des chiffres de dépense globale, et si quelques-uns ont été plus loin, ils n'ont pu fournir que des moyennes.
« Or, qu'est-ce qu'une moyenne, sinon une donnée qui, pour vouloir être d'accord avec tous les exemples dont on la déduit, est par cela même en désaccord avec chacun d'eux ?
« Ce qui serait réellement utile, ce serait de connaître, pour chaque cause, les effets que l'on en peut attendre dans l'avenir, d'après ceux que l'on observe dans le passé.
« Quels renseignements des moyennes peuvent-elles donner à cet égard ? Quelles traces gardent-elles des différents éléments qui sont entrés dans la composition du chiffre total dont on les a tirées ?
« Telles sont, cependant, les seules données que nous possédons sur l'objet qui nous occupe. On fait, au bout de l'an, l'addition des sommes dépensées : ce total une fois obtenu va servir à résoudre toutes les question. Veut-on savoir ce que coûte l'exploitation d'un kilomètre courant, on divisera le total par l'étendue du chemin en kilomètres. Veut-on savoir ce que coûte un kilomètre de convoi, on divisera le total par le parcours des convois. Veut-on savoir ce que coûte le transport d'un tonneau à un kilomètre, on divisera le total pour le parcours des tonneaux transportés. »
« Mais le kilomètre de chemin exploité a pu être parcouru journellement par 10 convois ; il a pu l'être par 30 ou 40 trains ; il a pu donner passage annuellement à quelques milliers de voyageurs seulement, ou bien être parcouru par plusieurs centaines de mille tonnes de marchandises, etc., etc.
« Le kilomètre de parcours occasionnera donc toujours la même dépense dans tous les cas ?
« Voilà les conclusions absurdes auxquelles on parvient si l'on prend à la lettre les indications fournies par les moyennes. Et que l'on ne réponde pas que nous avons fait dire aux moyennes autre chose que ce qu'elles sont destinées à signifier ; que les résultats obtenus ne doivent être considérés que comme l'expression de ce qui s'est produit dans le passé, dans des circonstances connues et déterminées, et que ces résultats ne doivent pas être appliqués à des circonstances différentes.
« Car nous demanderons, dans ce cas, à quoi servent ces résultats, quelle est l'utilité des moyennes, si elles ne font que constater des faits accomplis, qu'on ne peut plus changer, et sur lesquels il n'est pas possible de revenir. Nous demanderons s'il n'y a pas une sorte de mauvaise foi à présenter des renseignements que l'on sait être nuls, faux et sans valeur, alors que l'expérience journalière apprend que tout le monde s'en sert cependant comme de prévisions exactes qui peuvent être appliquées à l'avenir. »
Telles étaient, messieurs, il y a plus de vingt-quatre ans déjà, les idées pleines de justesse d'un ingénieur des plus distingués de l'administration sur la valeur des moyennes, qu'on s'est cependant borné à produire purement et simplement chaque année depuis cette époque.
Les données fournies par le compte rendu n'offrent tout au plus d'intérêt que par la comparaison qu'elles permettent d'établir d'une année à l'autre ; mais elles n'ont aucunement pour résultat de démontrer si tel tarif est rémunérateur, si tel autre constitue l'administration en perte, ou même si l'exploitation a été plus ou moins bien faite.
Toutefois je le reconnais, la solution du problème du prix de revient des transports exige des études longues, ardues, compliquées ; elle offre des difficultés sérieuses, inconnues dans presque tous les autres genres d'industrie. C'est que, contrairement à ce qui a lieu pour ces industries, il n'existe, dans l'exploitation des chemins de fer, aucune proportionnalité entre la dépense et le travail effectué ; la dépense, en un mot, concourt ici à la production d'une quantité de travail toujours indéterminée. Mais si, en dépit des moyennes qui nous sont soumises, cette proportionnalité est impossible, il existe, cependant, une relation quelconque qui lie ces deux éléments de l'exploitation : la dépense et le travail effectué.
C'est là recherche de cette loi qui constitue le problème difficile imposé à l'administration, et dont celle-ci doit s'efforcer de trouver la solution. L'étude attentive des lois qui régissent le travail et la dépense pourra seule, comme je l'ai dit, amener à la connaissance des principes rationnels qui doivent servir de guide dans la fixation des tarifs, et apporter la lumière dans les détails compliqués des divers services de l'administration.
Un exemple qui, dans la discussion du budget de 1867, vous a été soumis par mon honorable collègue et ami, M. Braconier, a fait ressortir d'une manière frappante l'urgente nécessité de l'étude que nous préconisons. II s'agissait du tarif de transit adopté par l'Etat, pour les transports allant d'une frontière de ferre vers une autre frontière de terre, et l'honorable député de Liège prouvait que, dans certains cas, ce tarif, appliqué à la quatrième classe de marchandises, celle de matières pondéreuses, faisait descendre les prix de transport à 3 2/10 c. et même à 2 2/10 c. par tonne kilométrique ; ce dernier prix était-il rémunérateur pour l'Etat ?
Il est permis, pensons-nous, de répondre négativement ; lorsqu'il s'agit de tarifs intérieurs, si, ce que l'on doit soigneusement éviter, cependant, certaines anomalies sont plus ou moins préjudiciables à l'exploitation, elles profitent tout au moins, en dernière analyse, au commerce ou à l'industrie ; il y a là un intérêt belge en jeu qui recueille les bénéfices de l'erreur commise ; mais favoriser, comme le disait notre honorable collègue, les transports de l'Allemagne vers la France, non seulement au profit exclusif des producteurs prussiens et des consommateurs français et au détriment de nos industries concurrentes, mais encore au préjudice des recettes de notre railway national, c'était, il faut l'avouer, un excès de naïveté, et cette naïveté n'aurait pas été commise si l'on avait pu, à priori, se rendre compte du résultat désavantageux pour l'exploitation même, que consacrait l'application malheureuse de ce tarif de transit.
Toutefois si, comme le prétendait l'honorable M. Vanderstichelen, l'administration ne possède point encore tous les éléments du travail qui doit amener une solution entièrement satisfaisante de la question, il est pourtant indispensable que, provisoirement, l'administration du réseau de l'Etat, à l'exemple de ce qui se pratique dans d'autres administrations de chemins de fer, calcule et publie, non pas seulement une moyenne insignifiante du coût de la locomotive-kilomètre, de la locomotive-train, des voitures-kilomètres et du train-kilomètre, mais le prix de revient obtenu, décomposé en ses éléments multiples et divers, tels que les traitements et salaires du personnel, le combustible consommé, le graissage des locomotives et des tenders, l'entretien, la réparation du mobilier, du matériel roulant, le service hydraulique, l'éclairage des trains, etc., etc.
Pour me résumer, je demande donc que les études de l'administration soient dirigées vers la recherche du prix de revient à établir à priori, des diverses catégories de transports par chemin de fer ; il est urgent que des investigations actives et sérieuses soient accomplies dans ce sens ; il faut que la question soit travaillée consciencieusement et dans tous ses détails ; mais si les résultats d'analyse auxquels mèneront ces études donnent la preuve que l'état de l'exploitation à ce jour rend impossible encore la solution complète et pratique du problème posé, je demande subsidiairement que les investigations de l'administration ainsi que les comptes rendus de ses recherches soient cependant beaucoup plus complets qu'ils ne l'ont été jusqu'aujourd'hui.
Je voudrais, en un mot, que les documents qui nous sont soumis nous missent à même de contrôler les résultats obtenus, et de les comparer aux résultats publiés par d'autres administrations de chemins de fer, qui font de la question de la dépense, rapportée au travail effectué, une étude sérieuse, intelligente et la plus complète possible.
J'aurais maintenant, messieurs, à traiter une question tout particulièrement relative aux intérêts de l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter ; mais la Chambre est peut-être fatiguée, et si elle trouvait que l'heure est trop avancée, je pourrais remettre à demain le développement de cette seconde question.
- Voix nombreuses. - Parlez, parlez !
M. Descamps. - Il y a quinze ans, une loi autorisait le gouvernement à concéder la construction et l'exploitation d'un réseau de chemins de fer comprenant la ligne de Saint-Ghislain à Ath, et un acte de concession, intervenu le 15 août 1856, réalisait le vœu de cette loi.
Il serait superflu de vous rappeler les vicissitudes sans nombre qui ont entravé l'exécution d'un projet si éminemment utile aux exploitations charbonnières du Couchant de Mons et au développement industriel de la vallée de la Dendre. En 1866, vous le savez, messieurs, la Société générale d'exploitation se substitua à la compagnie de Hainaut-Flandres, et l'on put sérieusement croire, alors, que les vœux des populations intéressées allaient enfin être satisfaits.
Cependant, des projets et contre-projets s'échangèrent entre le gouvernement et la compagnie nouvelle ; des négociations longues et difficiles furent entamées pour la fixation du tracé, en même temps que se débattaient, entre les deux parties, les stipulations qui devaient servir de bases à l'octroi d'une concession nouvelle de Dour à Quiévrain.
Le département des travaux publics, à bout de patience, prescrivit enfin à la société, par sa dépêche du 14 avril 1869, sous forme d'un quasi-ultimatum, les dernières conditions auxquelles, d'accord avec les exploitants du Couchant de Mons, il entendait subordonner l'octroi de la (page 1261) concession demandée ; l'une de ces conditions était que la ligne de Saint-Ghislain à Ath fût construite d'après un tracé adopté par le département et qui donnait satisfaction aux intérêts da canton de Quevaucamps.
Quelques jours après, le 22 avril, M. le ministre vint déclarer à la Chambre que, la Société générale d'exploitation ayant refusé de souscrire à ces conditions, le chemin de fer de Saint-Ghislain à Ath serait construit en ligne droite, et qu'un autre chemin de fer, établi aux frais de l'Etat, rattacherait au réseau de ses lignes les communes situées dans la direction de la vallée de la Hunelle et restées isolées jusqu'à ce jour.
En effet, le gouvernement, fidèle à sa déclaration et à sa promesse, déposa, le 11 juin suivant, un projet de loi qui ouvrait au département des travaux publics un crédit de 1,500,000 francs pour la construction d'un chemin de fer d'Ath à Blaton. Ce projet ayant été successivement adopté par les deux Chambres, la loi fut promulguée le 30 juin 1869.
Quelques mois ensuite, les études préliminaires des deux tracés se poursuivaient régulièrement, lorsque survinrent, entre le gouvernement et la société des Bassins houillers, les négociations qui aboutirent à la convention du 25 avril 1870.
L'exposé des motifs du projet relatif à cette convention portait : « Le gouvernement propose d'accorder, en même temps, à la Société des Bassins houillers, la concession de quelques chemins de fer et embranchements destinés à faire partie également du réseau exploité par l'Etat.
« Cette concession comprend :
« Un chemin de fer parlant de Basècles et se raccordant vers Stambruges au chemin de fer de Saint-Ghislain à Ath.
« Elle comprend également un certain nombre d'embranchements : ce sont ceux des carrières de- Basècles, de Blaton vers Bernissart, etc. »
Je faisais partie, messieurs, de la section centrale qui a examiné le projet de loi relatif à la convention du 25 avril ; M. le ministre s'étant rendu au sein de la section, j'eus l'honneur de lui faire observer que la rédaction du paragraphe premier de l'article 18 semblait impliquer, pour le chemin de fer de Saint-Ghislain à Ath, la direction par Stambruges, ce qui était contraire à sa déclaration du 22 avril 1869, à la Chambre des représentants.
M. le ministre expliqua alors que tel n'était pas absolument son sentiment, que les mots « vers Stambruges » n'étaient point obstatifs à la réalisation de quelque jonction que ce fût entre Saint-Ghislain et Ath ; qu'à la vérité, il se pourrait que cette ligne passât par Stambruges, mais qu'il suffisait que cette localité fût desservie par la ligne qui partira de Basècles, et « que rien ne s'opposait à ce que le chemin de fer de Saint-Ghislain à Ath fût tracé de la manière la plus conforme à l'intérêt public. »
Tel était l'état de la question, lorsqu'une administration nouvelle prit la direction du département des travaux publics.
L'honorable M. Wasseige, après avoir fait une étude toute particulière de l'affaire, partagea l'avis que les deux lignes décrétées par les lois du 28 mai 1856 et du 30 juin 1869 devaient recevoir chacune son exécution ; il activa, en conséquence, les études définitives du chemin de fer de Blaton à Ath et décréta, par son arrêté du 14 janvier dernier, que les travaux de la ligne de Saint-Ghislain à Ath seraient commencés au plus tard le 1er juillet 1871.
La société des Bassins houillers invitée par dépêche de M. le ministre des travaux publics, en date du 9 février dernier, à poursuivre activement les études de la ligne directe de Saint-Ghislain à Ath, s'empressa de déclarer qu'elle était prête à suivre ce tracé, mais sous la condition que le chemin concédé par le paragraphe premier de l'article 18 de la convention du 25 avril 1870 fût établi par Stambruges, Beloeil et Chièvres, où il viendrait se relier à la première ligne.
Cette proposition fut agréée par le département des travaux publics, et les études poursuivies par celui-ci et fort avancées déjà, cessèrent immédiatement, au grand désappointement des populations situées sur le parcours de Blaton à Ath. Ces populations avaient, en effet, le pressentiment, malheureusement trop justifié aujourd'hui, que la combinaison nouvelle n'était qu'une espèce de leurre destiné à remettre tout en question, ou du moins que c'était une manœuvre propre à amener des délais nouveaux pour l'exécution d'engagements bientôt exigibles.
Du reste, j'ai une observation très grave à faire relativement à la convention verbale échangée en février dernier et à laquelle je viens de faire allusion.
En vertu de l'arrêté ministériel du 14 janvier 1871, les travaux du chemin de fer de Basècles (carrières) vers Stambruges devraient commencer au plus tard le 1er juillet 1872. et finir le 1er juillet 1874.
Or, le chemin de fer de Blaton à Ath devait être entrepris immédiatement, et cette décision de la part de l'Etat était nettement exprimée dans sa dépêche du 9 février.
Cette dépêche portait en effet ;
« Je dois en même temps vous informer, messieurs, que j'ai donné des instructions aux agents du gouvernement pour qu'ils poursuivent activement les études du chemin de fer de Blaton à Ath, et que les travaux d'établissement de ce chemin de fer, pour compte de l'Etat, seront incessamment mis en adjudication publique. »
Je ne sais point s'il entre aujourd'hui dans les intentions de M. le ministre des travaux publics de supprimer le tronçon de Stambruges à Blaton, et je n'examine pas, pour le moment, la question de savoir jusqu'à quel point M. le ministre avait le droit de modifier le vœu du législateur de 1869 ; je fais toutes mes réserves à ce sujet.
Mais ce que je prétends, c'est qu'il serait de toute injustice que la modification que M. le ministre aurait cru devoir introduire dans les projets pût avoir pour effet de retarder pour deux ou trois ans encore l'ouverture de la ligne reliant Stambruges à Beloeil, ligne dont il était sur le point, il y a trois mois, ainsi que je viens de le dire, de mettre les travaux en adjudication.
En conséquence, si, ce que je ne puis croire, la substitution de la ligne de Basècles (carrières) à la section de Stambruges à Blaton devait avoir pour résultat d'apporter de nouveaux retards à la construction de la ligne de Stambruges à Beloeil, je protesterais de toutes mes forces contre la décision prise par l'honorable ministre des travaux publics, et je réclamerais avec énergie l'exécution pure et simple de la loi du 30 juin 1869.
Quoi qu'il en soit, messieurs, quelques semaines seulement nous séparent du terme fatal où doivent commencer les travaux de la ligne de Saint-Ghislain à Ath. Est-il permis de croire que, d'ici là, les deux parties se mettent d'accord ? Cela est plus que douteux ; d'un autre côté, un embranchement situé également sur le territoire du même arrondissement, celui de Blaton à Bernissart, devait être entrepris au plus tard le 1er avril 1871 ; à l'heure qu'il est, non seulement il n'est pas commencé, mais il n'en est pas plus question que si le projet n'en avait jamais existé.
Je demande donc formellement à M. le ministre des travaux publics s'il est enfin résolu à user de moyens de rigueur, et tout d'abord à résilier l'engagement verbal dont je viens de parler, dans le cas très probable où la société concessionnaire n'aurait pas entrepris les travaux de la ligne principale à l'époque fixée par son arrêté du 14 janvier 1871, c'est-à-dire au 1er juillet prochain.
Le gouvernement n'a aucune raison de se soustraire à ce devoir : un crédit de 1,500,000 francs a été mis par les Chambres à sa disposition pour l'exécution de la ligne de Blaton à Ath et, d'ailleurs, les demandeurs en concession ne manquent point pour réclamer l'exécution, à leurs risques et périls, de la ligne la plus directe possible entre St-Ghislain et Ath, de même que de l'embranchement de Basècles (carrières) à Stambruges.
Le gouvernement ne peut échapper, dis-je, à l'obligation que lui a imposée la loi du 30 juin 1869 ; et au surplus, s'il avait quelque répugnance à s'exécuter et à user du crédit mis à sa disposition, il serait de son devoir d'accepter les propositions très sérieuses qui lui sont faites par des demandeurs en concession offrant toutes les garanties nécessaires, et désireux de se substituer à l'Etat pour l'exécution de cette entreprise.
Les documents relatifs à ces demandes en concession sont déposes sur le bureau de la Chambre ; ils comportent l'exécution :
1° D'un chemin de fer d'Ath à Blaton suivant un tracé intéressant le plus grand nombre possible de communes et pour la réalisation duquel le crédit voté de 1,500,000 francs eût été insuffisant ;
2° D'une ligne de Jurbise à Blaton par Herchies, Neufmaison, Stambruges et Grandglise ;
3° Enfin, du prolongement de ces chemins de fer, de Blaton à la frontière française dans la direction de Macou, Vieux-Condé et Saint-Amand-les-Eaux.
L'exécution de ce réseau donnerait satisfaction à tous les intérêts et, en première ligne, à ceux de l'Etat, le chemin de fer à Blaton à Ath devenant alors une section importante d'une ligne internationale la plus directe possible entre Anvers et Valenciennes et entre Bruxelles et Douai.
Messieurs, je connais les bonnes dispositions de l'honorable ministre des travaux publics pour l'exécution des engagements pris depuis si longtemps envers le Couchant de Mons et envers les populations que doit relier au réseau de l'Etat le chemin de fer de Blaton à Ath ; j'ai confiance dans son énergie et dans sa sollicitude pour les graves intérêts engagés dans la (page 1262) question ; Je suis persuadé qu'il saura faire respecter les droits de l'Etat et amener la solution que nous réclamons depuis si longtemps.
J'attends donc, de sa part, une déclaration nette et catégorique qui nous confirme que si les travaux du chemin de fer de Saint-Ghislain à Ath et de celui d'Ath vers Beloeil et Stambruges ne sont pas commencés le 1er juillet prochain, le gouvernement se trouvera en mesure, à cette date, soit de mettre lui-même la main à l'œuvre, soit d'avoir assuré l'exécution de ces chemins de fer par des tiers qui en sollicitent aujourd'hui la concession, en offrant toutes les garanties désirables.
Si, malheureusement, je m'étais trompé, si M. le ministre ne pouvait me donner une réponse entièrement satisfaisante sur ce point, je le déclare à regret, je nie verrais forcé de voter désormais contre le budget et contre toute demande de crédits pour travaux publics, jusqu'à ce que les vœux solennellement exprimés par les deux Chambres pour la construction des lignes en question soient enfin réalisés.
M. Brasseur. - J'ai demandé la parole pour une déclaration qu'il importe, de faire à la Chambre.
J'ai cité tantôt le tarif des grosses marchandises et l'honorable M. Braconier m'a interrompu en disant que j'étais dans l'erreur. Cette erreur, messieurs, si elle avait eu lieu, aurait cette conséquence que tous mes chiffres devraient subir des modifications.
Mais il n'en est rien.
Voici, messieurs, le tarif en question et si quelqu'un a versé dans l'erreur, c'est l'honorable M. Braconier ;
Droit fixe 1 fr.
15 lieues 20 centimes, 3 fr.
5 lieues à 10 centimes, 50 c.
31 lieues, à 5 centimes, 1 55 fr.
Soit 6 05 fr.
Je maintiens donc les chiffres que j'ai avancés, ainsi que les conséquences que j'en ai tirées.
D'un autre côté, les frais d'exploitation, pour l'année 1869, sont, non de 63 p. c, mais de 60 5/10. Je tiens à faire cette rectification.
M. le président. - Une proposition de loi a été déposée sur le bureau.
Conformément au règlement, les sections seront convoquées pour en autoriser la lecture, s'il y a lieu.