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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 10 février 1871

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1870-1871)

(Présidence de M. Vilain XIIII.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 571)

M. Wouters procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Borchgrave donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. Wouters présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre

« Des propriétaires ou locataires de prairies riveraines du Molendender, à Ninove, réclament l'intervention de la Chambre : 1° pour obtenir l'indemnité qui leur est due par suite du dommage que leur a fait subir le changement de régime des eaux de la Dendre et du Molendender ; 2° pour que le département des travaux publics fasse cesser la cause de ces dommages ; 3° pour qu'il leur soit accordé une indemnité à raison de la privation de la propriété du lit du Molendender, si l'Etat persiste à les en priver. »

. - Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Huysmans réclame l'intervention de la Chambre pour que le bureau de bienfaisance d'Hemixem ou celui de Schelle accorde un secours à son beau-frère Pierre-Jean Huysmans qui est incapable de travailler. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Verviers, Hodimont et Dison demandent la mise en liberté des soldats français fugitifs de Prusse et arrêtés en Belgique, ou blessés, amenés dans notre pays ou bien poussés sur le territoire belge par les événements de la guerre. »

- Même renvoi.


M. de Vrints demande un congé pour cause d'indisposition.

- Accordé.

Motion d’ordre relative à la rectification du procès-verbal de la séance précédente

M. Wasseige, ministre des travaux publics (pour une motion d’ordre). - Messieurs, en lisant ce malin les Annales parlementaires, je me suis aperçu que l'honorable M. Descamps, à propos de la lecture du procès-verbal de la séance d'avant-hier, m'a attribué une inexactitude et une erreur. Si j'avais été présent lorsque cette allégation a été produite, j'aurais répondu sur-le-champ ; puisque je n'étais pas alors à la séance, je demande à la Chambre la permission de lui soumettre à cet égard quelques observations qui, je l'espère, établiront que je n'ai commis ni inexactitude ni erreur. D'après l'honorable M. Descamps, l'inexactitude est celle-ci : J'aurais prétendu qu'en calculant ses prévisions budgétaires sur l'acquisition de 7,000 rails martelés seulement, l'honorable M. Jamar aurait considéré les expériences faites au département des travaux publics comme n'étant pas assez satisfaisantes pour justifier un plus large emploi de ces rails.

M. Descamps prétend qu'au contraire c'est parce que l'honorable ministre des travaux publics d'alors, ainsi que cela résulterait d'une lettre adressée par celui-ci a la section centrale, ne se trouvait pas suffisamment édifié sur la question de savoir s'il devait porter la dépense au compte de premier établissement ou au compte d'entretien.

J'ai simplement émis un doute et ce doute est bien naturel puisque si c'était le second motif qui avait déterminé M. le ministre, il n'existe aucune raison pour expliquer son changement d'avis ; et ce changement serait encore aujourd'hui inexplicable. J'étais d'autant plus porté à croire que mon explication était la bonne que, dans le rapport de M. Descamps sur le budget des travaux publics pour 1871, immédiatement après la lettre de M. Jamar qu'il a citée se trouve cette réponse faite par le ministre lui-même, avant le 12 mai, à une demande de la section centrale :

« Quant au mérite comparatif des rails simplement laminés et des rails martelés, l'administration ne peut fournir encore des renseignements précis. Ce n'est que depuis deux ans environ que des rails martelés ont été placés dans les voies, et cette période n'est pas assez longue pour que l'on puisse porter un jugement définitif. Toutefois, il semble résulter des observations faites que ces rails ne présenteraient pas d'avantages marqués. Des rapports détaillés ont été demandés récemment aux ingénieurs chefs de service de la voie. »

Vous voyez que je devais me croire parfaitement dans le vrai en supposant que le motif qui avait dirigé l'honorable M. Jamar était bien celui que j'indiquais ; je pouvais d'autant plus le supposer, que M. le ministre pouvait avoir changé d'opinion d'une manière raisonnable et j'en avais indiqué une : l'influence que pouvait exercer sur M. le ministre des travaux publics l'appréciation d'un homme aussi compétent que M. Descamps.

Je ne crois donc pas avoir commis d'inexactitude ; s'il en était ainsi, je devrais retirer mon observation et le compliment que j'avais adressé à M. Descamps ; j'en serais réellement fâché.

Quant a l'erreur, elle n'existe pas non plus.

Lorsque j'ai dit qu'au lieu de commander 7,000 rails, l'honorable ministre en avait commandé 23,500, je n'ai nullement songé à dire qu'il avait commandé 10,500 rails de plus sur l'ensemble des fers de la voie ; il y avait bien évidemment a déduire, des sommes indiquées par moi, la valeur des 16,500 rails laminés, qui avaient été remplacés par des rails martelés. Quelque inexpérimenté que je puisse être, je ne le suis pas assez pour croire que c'est avec 83,000 francs que j'aurais suppléé à un déficit de 700,000 francs.

M. Descamps l'a compris ; car lui-même a fait les calculs que tout le monde a pu faire en lisant ce que j'ai dit, si toutefois on l'a lu ; je devais d'autant plus le croire, que tous les chiffres sur lesquels étaient basés les calculs sont puisés dans l'exposé des motifs.

Quant au premier fait, je n'ai pas commis d'inexactitude ; je pouvais croire, et je crois encore que M. Jamar avait été plutôt influencé par les avis de M. Descamps que déterminé par un changement d'opinion sur une question de comptabilité, changement d'opinion qu'il ne nous a jamais fait connaître ; quant à l'erreur, elle me paraît entièrement dissipée..

Puisque j'ai la parole, je pourrai fournir quelques renseignements complémentaires, que je n'ai pu donner hier à l'honorable M. Bergé, sur les deux questions qu'il m'a posées, l'une relativement au service du télégraphe, et l'autre concernant les lettres express dont il a réclamé la création.

Dans la question du télégraphe, je ne pense pas que l'administration puisse être accusée d'imprévoyance. Il y a depuis longtemps déjà, et surtout depuis 6 ou 7 mois, un accroissement du nombre de dépêches, un encombrement dont rien ne peut donner l'idée.

Par suite de cet accroissement, l'administration n'a pas cessé de chercher à recruter de nouveaux employés pour le télégraphe.

Depuis sept mois, soixante à soixante et dix nominations ont été faites ; elles ont même été faites en dehors des prévisions budgétaires et en escomptant l'avenir. Je n'ai pas cessé de m'en préoccuper également et aujourd'hui encore, j'ai signé les nominations de vingt nouveaux agents. Si l'administration qui nous a précédés avait eu la même préoccupation, la même prévoyance, nous ne nous trouverions pas dans l'embarras où nous sommes aujourd'hui, car cet embarras résulte surtout de ce que les agents nouvellement nommés doivent d'abord faire un certain stage et arriver à posséder certaines connaissances pratiques pour pouvoir rendre d'utiles (page 572) services au public. Il n'est pas du télégraphe comme de beaucoup d'autres services ; il faut une expérience sérieuse pour pouvoir s'y rendre utile.

Cette expérience, les nouveaux agents ne peuvent pas encore l'avoir acquise ; aussi l'encombrement était tel, dans certains bureaux télégraphiques, les employés y étaient tellement surmenés que, dans l'agglomération bruxelloise seulement, seize agents sont malades en ce moment.

Que fallait-il faire ? Il fallait, ou bien continuer à faire d'une façon incomplète et lente la transmission des bureaux auxiliaires au bureau central ; ou bien concentrer toutes les forces au bureau central pour la transmission des dépêches vers la province et vers l'étranger. Pour la transmission par télégraphe des dépêches des bureaux auxiliaires au bureau central, il faut trois employés : celui qui, du bureau succursale, transmet la dépêche au bureau central, celui qui la reçoit au bureau central et celui qui la transmet en province ou à l'étranger.

J'ai pensé que, dans un moment de pénurie de personnel et d'accroissement du nombre des télégrammes, il était plus utile pour le public et plus favorable à la transmission rapide des dépêches de concentrer toutes les forces dans un même lieu ; c'était aussi le meilleur moyen de tirer du personnel le parti le plus utile. Mais, messieurs, l'avis inséré au Moniteur n'a pas été bien compris par tout le monde, pas même par plusieurs de nos honorables collègues de cette Chambre ; car, dans une conversation particulière, l'on me disait hier encore : Vous auriez dû au moins continuer à autoriser la transmission par porteurs.

Eh bien, cette transmission par porteurs est restée autorisée : l'avis inséré au Moniteur le déclare formellement. Seulement, j'ai eu la loyauté de prévenir le public que ce n'était plus que de cette façon que la transmission se faisait, pour que, s'il trouvait un moyen plus rapide que l'emploi de porteurs du télégraphe, il pût y avoir recours.

Je pense donc avoir bien mérité du public en agissant ainsi ; je crois avoir parfaitement sauvegardé ses intérêts et n'avoir nullement mérité le reproche d'imprévoyance.

L'honorable M. Bergé a fait remarquer hier encore que, dans l'agglomération bruxelloise, les lettres restaient parfois six heures en route pour arriver à destination.

Je crois qu'il y a un peu d'exagération dans cette affirmation. Habituellement les lettres ne restent en route que deux heures ; mais s'il arrive qu'une lettre soit déposée au moment où la levée de la boîte vient d'avoir jeu, elle né peut plus être expédiée qu'à la levée suivante et alors elle met quatre heures au lieu de deux pour arriver à destination.

L'honorable membre a conseillé, à cette occasion, l'emploi d'une sorte de lettre télégraphique qui, au moyen d'une surtaxe, serait expédiée plus rapidement,

J'avais d'abord ajourné ma réponse à la discussion prochaine de mon budget.

Mais ayant une communication agréable à faire à l'honorable M. Bergé, je crois ne pas devoir la différer jusque-là ; je puis, en effet, lui donner la satisfaction qu'il réclame et le public, l'honorable membre en particulier, pourront, dès qu'ils le voudront, profiler de ma communication

Ce que l'honorable M. Berge réclame existe.

La lettre télégramme peut être employée, car voici ce que dit l'article 3 de la loi du 29 avril 1868 :

« Sont qualifiés exprès les lettres et autres objets de correspondance, comportant un caractère d'urgence, dont les expéditeurs voudront faire opérer la remise immédiate à domicile.

« Lesdits objets et lettres supporteront, indépendamment du port ordinaire dont ils seront passibles en raison de leur nature, une taxe spéciale de distribution, dont le taux et les conditions de payement seront réglés par le gouvernement. »

Et dans l'arrêté royal du 25 octobre 1868, qui a pourvu à l'application de la loi, on lit ceci (article 18) :

« Outre la taxe ordinaire, il est perçu une taxe spéciale de distribution des objets à remettre par exprès, conformément à l'article 5 de la loi. Cette dernière taxe est payable d'avance par l'expéditeur et fixée comme suit par objet :

« A. A 30 centimes pour ceux à destination de toute commune du royaume qui est le siège d'un bureau de poste ;

« B. A 1 fr. 50 c., pour ceux à destination des autres communes.

« Les objets dont il s'agit doivent porter sur la suscription, écrits ou imprimés, les mots : à remettre par exprès ou buitengewone bestelling, ou leur équivalent en français ou en flamand.

« Ils peuvent être déposés dans les boîtes, munis des timbres-poste nécessaires pour en opérer l’affranchissement, «

Je dis donc qu'une personne qui désire qu'une lettre soit remise au destinataire immédiatement après l'arrivée, doit se borner à ajouter 30 centimes à la taxe ordinaire ; cette lettre sera portée à domicile par exprès et sans le moindre retard dans toute l’étendue de la commune, si celle-ci est le siège d'un bureau de poste ; moyennant un supplément de 1 fr. 50 c, la lettre sera portée également à domicile par exprès et sans désemparer, si le destinataire habite une commune où la poste n'a pas de bureau.

J'espère que ces explications sont de nature à satisfaire l'honorable M. Bergé et le public.

M. Descamps. - Je demande la parole.

M. le président. - M. Descamps, hier vous avez relevé les chiffres que M. le ministre des travaux publics avait cités ; aujourd'hui. M. le ministre justifie ses chiffres ; ne croyez-vous pas que l'incident doive en rester là ?

M. Descamps. - L'inexactitude que j'ai signalée hier...

M. le président. - La discussion va se rouvrir.

M. Descamps. - Un mot, M. le président. Je dis que cette inexactitude repose sur une confusion de dates dans l'esprit de l'honorable ministre...

- Des membres. - L'ordre du jour !

M. Descamps. - M. le ministre des travaux publics a dit que ses chiffres sont exacts ; je désire prouver d'où vient son erreur... (Interruption.)

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Je ne m'y oppose pas.

M. le président. - Parlez, M. Descamps.

M. Descamps. - M. le ministre des travaux publics a dit que les doutes qui existaient sur la valeur réelle du martelage étaient tels en 1870, que son honorable prédécesseur a cru qu'il devait se borner à employer 7,000 rails à l'entretien de la voie. Or, messieurs, ce n'est pas en 1870, mais en 1869 (et c'est là l'origine de l'erreur commise par l'honorable M. Wasseige), que M. Jamar est venu nous demander des crédits pour permettre au gouvernement de faire appliquer le système de martelage à la fabrication des 7,000 rails à adjuger.

M. le ministre des travaux publics avait reconnu alors l'excellente qualité des rails martelés, car il nous disait, dans l'exposé des motifs des amendements aux budgets de 1869 et 1870, amendements déposés en avril 1869 : « Les bons résultats qu'une visite récente de la voie permet d'espérer de l'usage des rails martelés rend désirable l'emploi de ce mode de fabrication pour les 7,000 derniers rails restant à adjuger. » (Interruption.)

On m'interrompt, et on me demande pourquoi le gouvernement n'en commandait pas davantage, s'il avait reconnu que ces rails étaient de bonne qualité. Mais pour une excellente raison, messieurs, c'est, je viens de vous le dire, que ces 7,000 rails étaient les derniers à adjuger pour 1869, sur une fourniture totale de 47,000 pièces. Mais le gouvernement proposait, en même temps, à la Chambre, de voter les mêmes crédits pour l'exercice 1870, et c'est, comme j'ai déjà eu l'occasion de le faire remarquer, cette seconde demande qui provoqua des observations de la part de la section centrale, parce qu'elle impliquait l'idée de n'adjuger, pour 1870, que 7,000 rails martelés sur un nombre de 47,000 pièces, égal à celui qui avait été commandé pour 1869.

La section centrale demanda donc qu'on étendît le système de martelage à une plus grande quantité de rails à adjuger dans le prochain exercice de 1870. Le gouvernement répondit que la nécessité d'avoir des rails d'une qualité supérieure était incontestable, mais qu'il ne pouvait admettre la proposition de la section centrale, parce qu'il n'avait point approfondi la question de savoir à quel compte, premier établissement ou exploitation, devaient être imputées les dépenses supplémentaires à résulter de l'achat d'un matériel plus perfectionné.

Tout ceci, messieurs, notez-le bien, se passait en avril 1869, et ce n'est qu'en 1870 que l'on constata certains résultats moins favorables obtenus de l'emploi des rails martelés.

M. le ministre, croyant me mettre en contradiction avec moi-même, vient de vous lire une remarque consignée dans le rapport que j'ai rédigé sur le dernier budget ; mais ce rapport date du mois de mai 1870 ; il n'est donc pas exact de dire que les rails martelés dont le nombre à adjuger était discuté en 1869 avaient été fixés à 7,000, à cause du doute qui existait sur leur valeur réelle.

Et c'est cette inexactitude que je voulais prouver.

Les rails martelés, qui avaient donné jusqu'alors d'excellents résultats, (page 573) en fournissaient de moins satisfaisants l'année suivante ; si l'honorable ministre des travaux publics a entendu le discours que j'ai prononcé il y a deux jours, ou s'il veut bien relire les observations que j'ai faites à son prédécesseur dans mon rapport sur le budget de 1871 (déposé au mois de mai 1870), il saura quelles sont les causes accidentelles qui ont amené certaines déceptions postérieures aux résultats qui avaient été annoncés lors du dépôt des amendements aux budgets de 1869 et de 1870. Il verra aussi que ces causes ont été victorieusement combattues, et que les résultats obtenus de l'emploi de ces rails perfectionnés, dans la dernière année d'expérience, ne laissent rien à désirer.

Quant à l'erreur que j'avais constatée, l'honorable ministre me dit qu'il ne l'a point commise et qu'il savait très bien que les 16,500 rails auxquels on avait étendu le système du martelage étaient inscrits dans les prévisions du budget ; je suis charmé d'apprendre que nous sommes d'accord sur ce point avec l'honorable M. Wasseige, mais ce qui m'a autorisé à croire que M. le ministre s'était trompé, c'est que la seconde phrase de son discours, que j'ai citée, est un commentaire confirmatif de la première, dans laquelle il semble faire ressortir un excédant de dépenses considérable effectué sur l'article 57 du budget, par son honorable prédécesseur.

Voici, en effet, ce que dit l'honorable ministre :

« Vous le voyez, l’écart est considérable, tellement considérable, que je me suis demandé ce qui a pu pousser l'honorable M. Jamar à s'éloigner, dans de si fortes proportions, des prévisions sur lesquelles reposait l'économie du budget en ce qui touche les fers de la voie. »

Or, si l'honorable M. Wasseige est d'accord avec nous, il doit reconnaître que l'écart est de 52,800 francs ; il ne s'élève donc pas à 2 1/2 p. c. de la somme qui eût été dépensée, même si les 16,500 rails dont nous avons parlé avaient été simplement laminés.

Il est donc évident, messieurs, que j'ai eu toutes raisons de me méprendre sur la pensée de M. Wasseige, quand j'ai constaté à quelle minime proportion se réduisait l'écart considérable entre les sommes dépensées et les prévisions réelles du budget.

Prompts rapports de pétitions

(page 595) M. Vander Donckt, rapporteur. - Des habitants de Lichtervelde, Ardoye, Coolscamp, Pilthem, Thielt réclament l'intervention de la Chambre pour que la compagnie concessionnaire exécute le chemin de fer de Lichtervelde à Thielt.

Votre commission, messieurs, a conclu purement et simplement au renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Des conseillers communaux, un échevin et d'autres habitants de Dolhain-Baelen prient la Chambre de ne pas donner suite à la pétition tendante à la séparation de Dolhain de la commune de Baelen.

Messieurs, ici je dois donner un. mot d'explication à la Chambre, parce qu'elle n'a pas encore été saisie de la première pétition qui demande la séparation. Il n'y a pas une, ni deux, mais quatre pétitions sur le même objet. Une première pétition se trouve insérée dans le feuilleton n°2 parmi les rapports ordinaires. Ces rapports n'ont pas encore été présentés à la Chambre parce que, depuis le commencement de la session, un seul feuilleton a été épuisé. Nous en sommes au second et les rapports ordinaires du second feuilleton, parmi lesquels se trouve la pétition de Dolhain-Baelen, n'ont pas encore été présentés.

Depuis que cette pétition a été adressée à la Chambre, d'autres pétitions relatives au même objet, et pour lesquelles des prompts rapports ont été demandés, nous sont encore parvenues.

Je propose à la Chambre de comprendre toutes ces pétitions dans un même rapport pour abréger.

Vous comprenez l'inconvénient qu'il y a de scinder les feuilletons de pétitions ; en faisant les prompts rapports, les rapports ordinaires restent en souffrance. Arrive alors une pétition sur le même objet et sur laquelle on demande un prompt rapport et qui n'explique nullement les motifs du premier pétitionnaire qui a demandé le contraire de ce que demande la seconde pétition, elle devient inexplicable ; Voilà le grand inconvénient qui en résulte.

Messieurs, à ce sujet, je dois rappeler à la Chambre l'article 65 du règlement qui dit :

« La commission des pétitions sera tenue de faire chaque semaine un rapport sur les pétitions parvenues à la Chambre et ce par ordre de date d'inscription au procès-verbal ; en cas d'urgence, la Chambre peut intervertir cet ordre.

« II sera imprimé et distribué, trois jours au moins avant la séance où le rapporteur de la commission doit être entendu, un feuilleton indiquant le jour où le rapport sera fait, le nom et le domicile du pétitionnaire, l'objet de la pétition, le numéro sous lequel elle est inscrite au registre de la commission. »

En cas d'urgence, la Chambre peut intervertir l'ordre ; elle peut ne pas ordonner l'impression du feuilleton ni fixer jour, mais cette faculté n'est applicable qu'au paragraphe premier de l'article 65, et quand elle a ordonné l'impression du feuilleton et fixé le jour, elle ne peut plus se dispenser, sans introduire le désordre, d'examiner le feuilleton au jour fixé.

Vous comprenez que si l'on suivait exactement le règlement, l'anomalie que je signale ne se présenterait pas ; il ne viendrait pas de demandes de prompts rapports après des pétitions sans demandes de prompt rapport, ce qui embrouille les questions et augmente tellement l'encombrement des pétitions arriérées qu'il n'y a presque plus moyen d'en sortir, si la Chambre ne prend pas des mesures pour régulariser cette situation. Il y a là une anomalie qui est réellement déplorable.

j'ai demandé à pouvoir comprendre dans un même rapport les diverses pétitions relatives à la question ; si la Chambre y consent, je vais analyser ces diverses pétitions.

Par pétition datée de Dolhain-Baelen, le 16 janvier 1871, des propriétaires, industriels et autres habitants de la section de Baelen demandent que leur section soit réunie à la commune de Limbourg.

Par pétition datée de Dolhain-Baelen, le 7 décembre 1870, des conseillers communaux, un échevin et d'autres habitants de Dolhain-Baelen prient la Chambre de ne pas donner suite à la pétition tendante à la séparation de Dolhain de la commune de Baelen.

Par pétition datée de novembre 1870, des habitants de Dolhain-Baelen prient la Chambre de statuer sur leur demande tendante à obtenir leur réunion à la commune de Limbourg.

Par pétition en date du 11 décembre 1870, des conseillers communaux de Baelen présentent des observations sur le rapport du commissaire d'arrondissement dans l'affaire de la demande en séparation d'habitants de Dolhain pour être réunis à la commune de Limbourg.

Messieurs, vous comprenez que ces différentes pétitions ont été soumises au conseil provincial de Liège.

Mais les dispositions de la commission du conseil qui a examiné la question et celles du conseil lui-même ont été très divergentes.

La commission a été unanimement d'avis, sauf une voix, d'accorder à la commune de Baelen un temps moral pour remédier aux griefs que faisait valoir le hameau de Dolhain à l'appui de la demande de réunion à la commune de Limbourg. Maïs le conseil provincial, après avoir discuté pendant assez longtemps les conclusions du rapport, a décidé le contraire. Les pétitionnaires, qui demandent que la séparation n'ait pas lieu, ont énoncé différents motifs et, entre autres, l'empressement que le conseil provincial y a mis le dernier jour de la session et les circonstances au milieu desquelles le rapport a été discuté, des menaces de guerre, etc., qui avaient lieu.

Maintenant, messieurs, dans cette occurrence, votre commission a conclu au renvoi pur et simple de ces quatre pétitions à M. le ministre de l'intérieur.

(page 573) M. David. - Messieurs, jamais demande de séparation n'a été mieux justifiée que celle dont il s'agit en ce moment.

Je prierai M. le ministre de l'intérieur de vouloir nous dire, si, pour la section de Dolhain-Baelen, il va nous présenter, un de ces jours, un projet de loi d'annexion de cette section à la commune de Limbourg.

On nous a soumis récemment des projets de séparation des communes de Bressoux dans les environs de Liège et d'Aisemont dans la province de Namur.

Eh bien, j'ai examiné les motifs allégués en faveur de ces séparations et je puis assurer qu'ils sont beaucoup moins péremptoires que ceux dont j'aurai l'honneur de vous donner connaissance en faveur de la séparation de Dolhain-Baelen d'avec Baelen.

Pour le moment, je prierai M. le ministre de l'intérieur de bien vouloir nous dire si, oui ou non, il nous présentera prochainement un projet d'annexion.

M. Simonis. - Messieurs, je ne puis me rallier à l'opinion que vient d'émettre mon honorable collègue, M. David et je viens appuyer la pétition d'une partie des habitants de Dolhain qui s'opposent à l'annexion de leur section à la commune de Limbourg.

Cette question à été soumise pour la première fois au conseil provincial de Liège lors de sa dernière session.

La commission chargée d'examiner cette affaire, et dont j'avais l'honneur de faire partie, s'inspirant des traditions du conseil provincial de Liège, qui s'est toujours montré très sévère lorsqu'il s'agit de modifications à apporter dans des circonscriptions communales, cette commission n'a pas voulu prendre immédiatement une mesure catégorique, et afin de donner à la commune de Baelen le temps nécessaire pour prouver si, oui ou non, il y a mauvais vouloir de sa part, elle proposa, à l'unanimité moins une voix, les conclusions suivantes :

« En présence de tous ces fails et dires contradictoires, votre commission, d'accord avec votre jurisprudence constante, est d'avis, à l'unanimité des membres présents moins une voix, qu'il n'y a pas lieu de donner, dès maintenant, un avis favorable à la séparation et l'annexion demandées, engageant les auteurs de cette demande à la renouveler à la session prochaine, si l'administration communale de Baelen n'a pas, dans l'intervalle, donné satisfaction il la section de Dolhain-Baelen en adoptant immédiatement les mesures suivantes ;

« 1° L'érection d'une école primaire ;

« 2° Le placement de réverbères en nombre suffisant ;

« 3° Le séjour d'un garde champêtre dans cette section ;

« 4° L'achat d'une pompe à incendie ;

« 5° Le bon entretien des rues et places. »

Vous avez reçu dernièrement, messieurs, une petite brochure contenant le procès-verbal des séances du conseil provincial pendant lesquelles on s'est occupé de cette question. Il a dû paraître étrange à ceux d'entre vous qui ont pris connaissance de cette brochure qu'un seul membre de la majorité de la commission ait pris la parole pour défendre les conclusions de celle-ci. Or, la raison en est simple. La voici ;

L'affaire de Dolhain-Baelen n'était pas à l'ordre du jour. Il n'y avait que ce seul membre de la majorité de la commission qui fût présent à la séance du 13 juillet dernier. On venait d'apprendre que la France avait déclaré la guerre à l'Allemagne. En présence d'un événement aussi grave, la clôture de la session est décidée. On fixe une séance du soir pour voter le budget et examiner l'affaire de Dolhain-Baelen ; il est naturel que les membres de la majorité de la commission qui étaient absents à la séance du matin n'aient pas été présents à la séance de 4 heures.

Les faits, messieurs, sont venus confirmer les prévisions de la commission, car, depuis lors, la commune de Baelen a déjà commencé à faire droit à certains griefs et elle est prête à donner satisfaction à la section qui réclame.

Trois des principaux griefs que l'on fait à l'administration communale de Baelen ont trait à l'instruction, aux inhumations et à l'éclairage des rues. Dans le dossier se trouve une pièce qui a été adressée à la Chambre le 11 décembre dernier ; c'est une protestation de l'administration communale de Baelen contre le rapport de M. le commissaire d'arrondissement.

Voici le passage de cette pièce relatif aux trois griefs que je viens de citer :

« Nous avons déjà voté les fonds nécessaires pour l'acquisition d'un corbillard et la dépense est déjà approuvée ; nous venons d'établir l'éclairage pendant la nuit et nous avons décidé l'établissement d'une école primaire à Dolhain-Baelen. »

Remarquez bien, messieurs, que ce n'est pas une simple promesse, c'est un engagement pris ; car cette pièce est signée par tous les membres de l'administration communale.

J'ai, du reste, devant moi un extrait du procès-verbal de la séance publique du conseil communal de Baelen, en date du 9 novembre 1870 ; voici ce qui y est dit :

« Considérant que, dans sa délibération du 12 avril 1870, le conseil avait déjà, en déclarant adhérer en tous points à la protestation des habitants de Dolhain-Baelen, pris la résolution d'établir une école communale à Dolhain-Baelen ;

« Considérant que, malgré cette délibération, le conseil communal de Limbourg et l'administration supérieure ont feint de ne pas connaître la résolution prise par l'administration communale de cette commune ;

« Le conseil communal de Baelen, revenant de nouveau sur cet objet, décide, à l'unanimité de ses membres, d'établir une école communale à Dolhain-Baelen, aussitôt que le gouvernement aura statué sur la requête de certains habitants de cette localité. »

Quant à l'éclairage, j'ai appris aussi dernièrement que l'on est en pourparlers afin d'établir un éclairage au gaz commun pour Dolhain-Limbourg, Dolhain-Baelen, et quelques manufactures à proximité de ces deux localités ; la commune de Baelen est, paraît-il, toute disposée à intervenir pour sa quote-part dans cette combinaison.

On se plaint encore du mauvais entretien des routes et des places ; permettez-moi de citer de nouveau textuellement la protestation de l'administration communale de Baelen.

« Ce n'est certainement pas la plus grande partie des habitations qui sont en contre-bas de la route, ce ne sont, tout au plus, à proprement parler, que trois ou quatre maisons et cela date de la construction de la route de la Vesdre, qui s'est élevée pour atténuer la rampe du pont ; pour remédier à cet état de choses, il faudrait ou abaisser la route de la Vesdre ou exhausser les maisons, mais il n'appartient pas à l'administration de Baelen de recourir à ce moyen. L'absence d'alignement des bâtisses est évident ; mais, messieurs, nous déclarons positivement que, depuis que l'administration actuelle est à la tête des affaires, pas une seule construction ne s'est faite à Dolhain-Baelen sans que le corps des ponts et (page 574) chaussées ou M. le commissaire voyer aient tracé l'alignement à suivre. En affirmant que nous avons laissé dans l'abandon cette partie de la commune, que nous avons été indifférents pour les améliorations nécessaires, que ce n'est que dans ces derniers temps que nous avons exécuté un travail de voirie vers Bilslain, mais dans des conditions insuffisantes, quant à l'hygiène et à l'embellissement, le rapport exprime l'exposé de la vérité. »

J'admets, messieurs, que l'administration communale de Baelen n'est pour rien dans le manque d'alignement qui existe dans les bâtisses de Dolhain-Baelen ; mais je dois avouer que la voirie laisse à désirer dans cette localité et qu'il y a quelques travaux urgents d'amélioration à faire.

Un autre grief, et celui-là me paraît fondé, est que la police est insuffisante à Dolhain-Baelen ; il y a bien, dans cette localité, un échevin chargé de ce service, mais je crois, pour ma part, que c'est insuffisant et qu'un garde champêtre, séjournant à Dolhain-Baelen et spécialement chargé de la police de cette section, est de toute nécessité dans un centre aussi important de population ouvrière. Aussi je prie M. le ministre de l'intérieur d'engager l'administration communale de Baelen à prendre des mesures en conséquence si elle tient à conserver la section qui réclame.

Quels sont maintenant, messieurs, les autres arguments que l'on fait valoir en faveur de l'annexion ?

Je crains d'abuser de la patience de la Chambre ; mais, si elle me le permet, je passerai rapidement en revue ces arguments. (Interruption.)

On invoque d'abord des circonstances topographiques ; or, Dolhain-Baelen est relié par une grand-route, à peu près plane, au chef-lieu de la commune et la distance qui l'en sépare n'est pas de trois kilomètres.

On. invoque encore la différence de langue ; en effet, à Baelen on parle un patois allemand, et à Dolhain-Baelen, on parle surtout wallon et français ; on prétend que c'est un inconvénient sérieux pour les séances du conseil communal ; quant à moi, je ne le pense pas et la meilleure preuve, c'est que l'échevin et le conseiller communal de Dolhain-Baelen s'opposent tous deux à l'annexion à Dolhain-Limbourg.

On dit encore que la population de Baelen, essentiellement agricole, n'a pas les mêmes intérêts que celle de Dolhain-Baelen, qui est, en grande partie, industrielle ; mais, messieurs, si l'on part de ce principe, on devrait modifier un grand nombre de circonscriptions communales de notre vallée de la Vesdre et l'on s'engagerait ainsi dans une voie très dangereuse.

J'admets cependant, messieurs, que ces arguments pourraient être pris en considération s'il y avait à peu près unanimité dans la section de Dolhain-Baelen pour demander l'annexion.

Mais tel n'est pas le cas ; il n'y a qu'une soixantaine d'habitants qui la demandent, tandis que la contre-pétition est recouverte de quatre-vingts signatures ; on a prétendu que ces quatre-vingts signatures n'avaient pas d'autorité parce que, disait-on, elles émanaient en grande partie d'ouvriers désintéressés dans la question. Pour réfuter cette assertion complètement fausse, les signataires de la contre-pétition en ont adressé une seconde, il y a quelque temps, à la Chambre et à côté de leurs noms ils ont inscrit leurs professions et qualités ; j'y vois figurer quatre industriels et trente-cinq propriétaires. De tout ceci il résulte pour moi que les avis sont très partagés et que la majorité des habitants de Dolhain-Baelen en faveur de l'annexion, si majorité il y a, est excessivement faible.

Je ne puis m'expliquer, messieurs, le vote du conseil provincial de Liège en faveur de l'annexion à Limbourg ; ce corps constitué a rompu avec tous ses précédents ; il a, en effet, procédé d'une manière toute différente dans plusieurs circonstances et, entre autres, dans une affaire analogue où il y avait bien plus de raisons de se prononcer en faveur d'un changement de circonscription communale, je veux parler de la section de la Mallieue-Hermalle, qui demandait à être distraite de la commune-mère dont elle est séparée par une barrière souvent infranchissable, la Meuse ; eh bien, messieurs, cette affaire, après avoir été renvoyée plusieurs fois à la session suivante, a été définitivement enterrée, si je puis m'exprimer ainsi, en 1868, parce que la commune-mère y a enfin construit l'école demandée et y a établi un garde champêtre.

Vous voyez donc que, si le conseil provincial de Liège avait été conséquent avec lui-même, il aurait dû admettre les conclusions de la commission sur l'affaire de Dolhain-Baelen.

Messieurs, en présence de la divergence d'opinions que j'ai constatée, dans la section de Dolhain-Baelen et des bonnes dispositions que montre la commune-mère, il me semble, et je suis certain que M. le ministre de l'intérieur, après avoir examiné le dossier, sera de mon avis, il me semble, dis-je, qu'il n'y a pas lieu d'admettre la modification demandée, pour autant toutefois que l'administration communale de Baelen tienne ses engagements relativement à l'école et au corbillard et qu'elle prenne, dans le plus bref délai, les mesures nécessaires pour donner pleine satisfaction à la section qui réclame, quant à la police et au bon entretien des rues et des places.

J'insiste fortement auprès de M. le ministre pour qu'il fasse comprendre à l'administration communale de Baelen que ce n'est qu'à cette condition et à cette condition seule qu'il maintiendra le statu quo.

M. David. - Je vois avec plaisir l'honorable M. Delcour demander la parole dans cette question. Il a posé des actes dans notre localité d'après lesquels je dois croire qu'il défendra l'annexion de la section de Dolhain-Baelen à Limbourg.

Il y a une raison de principe à faire valoir. C'est que Baelen et son administration sont allemandes-flamandes et que le hameau de Dolhain-Baelen est wallon. De là cette antipathie depuis toujours. De tout temps, ce hameau a été traité par sa marâtre comme les Polonais par les Russes. (Interruption.)

Tantôt, lorsque j'entrerai dans des détails, vous verrez ce que peut être une administration hostile à une partie de ses administrés, et vous réclamerez vous-mêmes avec moi la séparation dont il s'agit.

J'attendrai maintenant les observations de M. le ministre pour y répondre.

M. Delcour. - Messieurs, si j'interviens dans cette discussion, c'est parce que je suis un ancien habitant de Dolhain, que je connais parfaitement les localités et que rien ne m'est étranger dans cette affaire.

Messieurs, ce n'est pas d'aujourd'hui que l'on parle de la réunion de Dolhain-Baelen à la commune de Limbourg ; il y a quarante ans que j'ai entendu signaler les inconvénients de la situation qui existe. Un de mes parents, qui a administré la commune de Limbourg pendant plus de quarante ans, m'a dit bien des fois que l'annexion de Dolhain-Baelen à Limbourg était une condition essentielle de l'avenir et de la prospérité de Dolhain-Limbourg.

Si, messieurs, je présente cette observation, c'est pour établir que les pétitions que nous examinons ne soulèvent aucune espèce de question politique, aucune question de parti ; il s'agit d'une affaire ancienne et qu'il ne faut discuter qu'au seul point de vue administratif..

Messieurs, laissez-moi vous dire quels sont les véritables motifs de la demande d'annexion. Ils sont très sérieux.

Je ne ferai pas le procès à l'administration de Baelen ; je dirai même que l'honorable M. David a été trop sévère à son égard. Cette administration est composée d'hommes très honorables, que je connais personnellement et qui ont donné des preuves de dévouement à la commune importante dont ils gèrent les intérêts.

Laissons de côté les questions de personnes pour n'examiner que le fond.

Dolhain-Limbourg n'est séparé de Dolhain-Baelen que par le cours de la Vesdre, et les deux hameaux sont réunis par un pont. En fait, la réunion de ces deux sections est si naturelle que les enfants des deux hameaux jouent ensemble comme s'ils appartenaient à la même localité ; moi-même, quand j'étais enfant, j'ai partagé cette illusion.

Un des motifs les plus graves qui militent en faveur de la réunion, c'est incontestablement celui de la police locale. Il est certain que la police a laissé à désirer à Dolhain-Baelen ; le bourgmestre, quelque zélé qu'il soit, n'a pu y pourvoir. A Limbourg, au contraire, la police est bien faite ; je puis dire que je connais peu de localités à la campagne où la police soit mieux exercée.

Voici, messieurs, un fait dont j'ai été souvent témoin. J'ai vu, dans maintes circonstances, tous les efforts de la police de Limbourg paralysés dans leurs effets. Les perturbateurs expulsés des cabarets de Dolhain, se réfugiaient à Dolhain-Baelen, et là, sur le territoire d'une commune étrangère, méprisaient les injonctions du bourgmestre ou du garde champêtre de Limbourg.

Ne perdons pas de vue qu'il est essentiel d'avoir, dans nos communes industrielles, une police sérieuse, qui ne transige pas, une police assez active pour contenir les ouvriers.

C'est là le sentiment général de tous les habitants de Dolhain-Limbourg ; c'est le sentiment du juge de paix qui, pendant 31 ans, a exercé ses fonctions dans le canton à la satisfaction de tous ses justiciables et avec une impartialité dont je suis heureux d'être l'écho dans cette enceinte.

La langue parlée dans les deux localités est la même ; la population de Dolhain-Baelen est une population wallonne comme celle de Limbourg.

Quant à l'instruction primaire, Dolhain-Baelen n’est jamais entré pour rien de ce qui s'est fait à Baelen. Les pauvres de ce hameau ne fréquentent pas l’école communale ; ils vont aux écoles de Limbourg et de (page 575) Dolhain et sont obligés d'y payer leur écolage. Je puis vous affirmer que ces frais ont été souvent supportés par des sociétés charitables, qui s'imposaient ces sacrifices dans l'intérêt d'une population qui, sans cela, serait restée sans instruction.

Dolhain-Baelen compte de nombreux ouvriers. Sur une population de 1,000 habitants, il y a au moins 600 a 700 travailleurs.

Une autre considération milite encore en faveur de la réunion. Lorsque le gouvernement français, après avoir conclu le concordat de 1801, réorganisa le cuite en Belgique, Dolhain-Baelen, quoique appartenant administrativement à la commune de Baelen, fut compris dans la paroisse de Limbourg ; il continue encore à faire partie de la paroisse de Dolhain.

Cette réunion des deux hameaux, au point de vue religieux, a amené de nombreuses alliances de familles ; on peut dire que, sous ce rapport, les deux hameaux ne font, en fait, qu'une même localité.

Si je consulte les besoins de l'industrie, je vois, messieurs, que de nombreux établissements industriels ont été créés dans la vallée de la Vesdre et sur les ruisseaux qui traversent et arrosent Dolhain-Baelen. Or, la commune de Limbourg ne peut, dans l'intérêt de l'industrie, obtenir aucun accroissement de territoire que par l'annexion de Dolhain-Baelen.

C'est par là seulement que Dolhain peut s'agrandir et fournir aux classes ouvrières des habitations saines et convenables.

Toutes ces considérations sont graves ; elles demandent d'être examinées sérieusement par le gouvernement.

L'annexion de Dolhain-Baelen à Limbourg est dans le vœu des populations ; c'est un besoin auquel vous ne pourrez échapper. Vous serez amenés, messieurs, à la prononcer dans l'intérêt bien entendu de ces contrées et des nombreux établissements industriels qui en font la prospérité et la richesse.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Il résulte, messieurs, des observations qui ont été présentées par les honorables préopinants que la question de séparation de Dolhain-Baelen soulève tout au moins de sérieuses difficultés. Si la question remonte, comme le disait tout à l'heure l'honorable M. Delcour, à un demi-siècle, l'honorable M. David comprendra que je n'ai pas la prétention de la résoudre immédiatement, mais je prends bien volontiers l'engagement, en présence du renvoi qui sera ordonné par la Chambre, de la soumettre à l'examen le plus attentif.

M. David. - Je ne comprends pas pourquoi l'honorable ministre de l'intérieur ajournerait encore la présentation d'un projet de loi de séparation.

Cette affaire, comme vient de le dire l'honorable M. Delcour, traîne depuis longtemps déjà. En 1851, déjà le commissaire d'arrondissement de Verviers a fait un rapport concluant dans lequel il signalait tous les griefs dont on se plaint encore aujourd'hui, l'état d'abandon et de délabrement dans lequel on laissait cette partie de la commune.

Toutes les formalités administratives préalables ont eu lieu ; les divers conseils communaux ont délibéré, il y a eu des enquêtes, des contre-enquêtes, un nouveau rapport du commissaire d'arrondissement actuel de Verviers ; il y a eu vote du conseil provincial et, comme l'a dit M. Simonis, la commission du conseil provincial avait conclu à ce qu'on donnât le temps à l'administration communale de Baelen de faire droit aux griefs articulés contre son administration. Mais le conseil provincial n'a pas partagé cette manière de voir et a conclu, par une majorité de voix écrasante, à l'annexion immédiate de Dolhain-Baelen à la commune de Limbourg ; la question est donc en état.

M. le ministre de l'intérieur nous présente à chaque instant des projets de séparation de communes, d'annexion de communes ; pourquoi n'en ferait-il pas de même pour le hameau de Dolhain-Baelen ?

Véritablement, messieurs, nous ne pouvons maintenir 1,070 habitants dans l'état d'abandon et de dédain où ils se trouvent sous tous les rapports.

Je vais vous démontrer l'hostilité constante de l'administration communale de Baelen ; elle existait déjà dans les administrations précédentes ; je parlerai d'abord des routes. Il est inutile de vous faire observer que ce qui apporte surtout la prospérité dans les communes, ce sont les bons chemins et routes.

Toujours lorsqu'il s'est agi de routes ou chemins aboutissant à Dolhain-Baelen, les mandataires de Baelen en ont empêché l'exécution.

Il y a quinze ou vingt ans, il fut question de construire une route de Neaux et du Hertogenwald par Membach et Goï vers Dolhain. Cette route devait être tracée sur la rive droite de la Vesdre à partir de Goï, empruntant ainsi le territoire de Haelen et aboutir dans le hameau de Dolhain-Baelen ; si elle y avait abouti, on aurait comblé et nivelé le cloaque appelé le Trou du Veau qui existait au centre de Dolhain-Baelen, on aurait pu améliorer cette partie de la commune. Mais que fait le conseil communal de Baelen ? Il refuse toute espèce de subside et empêche la route de passer par Dolhain-Baelen uniquement par hostilité contre cette fraction de commune ; la commune de Limbourg, elle, abandonne gratuitement les terrains nécessaires et donne un subside et obtient la route par chez elle.

Lorsqu'il a été question de commencer les travaux des réservoirs de la Gileppe, les entrepreneurs avaient l'intention d'établir un chemin de fer pour chercher à la station de Dolhain les produits dont ils avaient besoin tels que chaux, etc. ; ils ont fait à l'administration communale de Baelen les plus belles propositions pour qu'elle autorise le passage de ce chemin de fer industriel sur un petit bout de la localité de Dolhain-Baelen ; ils auraient nivelé ce même Trou du Veau pour y établir un chantier afin de pouvoir charger et décharger leurs marchandises. Une grande activité se serait développée autour de ce chantier.

Que fait l'administration communale de Baelen, toujours par hostilité contre les habitants de Dolhain-Baelen, qui sont wallons ? Elle a imposé aux entrepreneurs des conditions telles, que ceux-ci ont trouvé plus avantageux de percer un tunnel sous la montagne de Limbourg pour arriver à la station de Dolhain.

Autre hostilité.

Depuis très longtemps il avait été question d'un chemin empierré de Dolhain-Baelen à Houthem, hameau dépendant aussi de Baelen, mais malheureusement wallon aussi ; eh bien, ce petit bout de route n'a pas été fait et cependant c'eût été un acte administratif de la plus haute importance pour cette commune qui y possède un terrain rempli de minerais de fer dont l'exploitation serait devenue bien plus fructueuse encore pour la caisse communale ; eh bien, parce que ce bout de chemin devait être favorable à Dolhain-Baelen et à Houthem, wallons tous deux, on ne l'a pas construit.

Une. autre route devait être construite : celle qui part de Dison et passe par Andrimont et Bilstain pour aboutir à la section de Dolhain-Baelen ; son parcours est d'à peu près 150 mètres sur le territoire de cette commune ; eh bien, encore une fois parce qu'il s'agissait de Dolhain-Baelen, l'administration de Baelen s'est refusée à intervenir dans cette construction ; il a fallu lui forcer la main et aujourd'hui elle entretient aussi mal que possible ces quelques mètres de chemin de grande communication ; c'est un cloaque, il est aujourd'hui dans le plus pitoyable état.

L'année dernière, messieurs, l'administration communale de Baelen obtint l'autorisation d'établir huit foires. Eh bien, qu'a fait l'administration communale de Baelen ? Elle a ordonné que ces huit foires auraient lieu à Baelen même sans en ordonner une seule à Dolhain-Baelen ; tandis que ce hameau est à côté de la station du chemin de fer et, par conséquent, beaucoup mieux placé pour y tenir des foires.

Pendant très longtemps, et jusque dans ces dernières années les habitants de Dolhain-Baelen n'ont pas eu d'eau potable, et ont dû venir à Dolhain-Limbourg pour s'en pourvoir.

Malgré toutes leurs réclamations, cet état de choses subsisterait probablement encore si à Limbourg nous n'avions dû finir, pendant la dernière année de sécheresse, par refuser aux habitants de Dolhain-Baelen de venir puiser à nos pompes l'eau dont ils avaient besoin. Alors seulement ils ont pu obtenir le foncement d'un puits et l'érection d'une pompe à eau potable.

Voilà, messieurs, une série d'actes de véritable hostilité contre la fraction de Dolhain-Baelen. L'honorable M. Simonis vous a dit qu'on fait des travaux de nivellement et d'amélioration à Dolhain-Baelen. Je ferai remarquer d'abord que. ces quelques travaux se sont singulièrement fait attendre, et qu'ils sont tout à fait insignifiants eu égard surtout à cet espace de trois quarts d'hectare formant la place si accidentée entourée des maisons de Dolhain-Baelen. Au surplus j'ai ici, pour vous donner une idée de l'état de cette place publique, une liste de personnes qui s'y sont cassé des bras ou des jambes. (Interruption.)

La commune de Dolhain-Baelen se trouve sur le bord de la Vesdre et précisément à cet endroit descend le ruisseau de Baelen, formant, dans une partie de Dolhain-Baelen, un canal, dont le trop-plein se déverse dans une espèce de rigole qui serpente à travers la localité.

D'un autre côté, quand la Vesdre déborde, elle se déverse par un ravin à travers Dolhain-Baelen, de manière qu'on y voit partout de l'eau et des précipices.

M. Jacobs, ministre des finances. - Une Suisse en miniature.

M. David. - On s'explique ainsi le» nombreux accidents dont cette localité a été déjà le théâtre pendant des nuits obscures depuis un certain (page 576) nombre d'années ; voici ceux qu'un estimable habitant de Dolhain-Baelen a pu se rappeler.

M. Bourdon, maître-foulon à Bilstain, est tombé à l'eau qui longe la route près du moulin de Rhuyff.

Mlle Canalette, de Dolhain, est tombée du viaduc de la route de la Vesdre et s'est cassé une jambe.

M. P. Keizer, tailleur à Dolhain, a été trouvé mort au pied du même viaduc, sur le côté opposé à celui où était tombée Mlle Canalette.

M. Dedrye, ardoisier à Dolhain, est tombé de ce viaduc dans l'eau.

M. Hanlet, fermier à Dolhain-Baelen, est entré un soir, sans s'en apercevoir, dans le ruisseau de Baelen, hors rive en ce moment, et aurait été entraîné dans la Vesdre sans le secours d'un courageux passant.

M. V. Vieuxtemps, mécanicien à Dolhain, est tombé en bas du viaduc ; il est resté trois semaines au lit par suite de ses contusions.

M. Nissen, inspecteur des écoles primaires à Dison, est tombé dans le ruisseau.

M. Lejeune-Cremer, de Limbourg, est tombé dans le même ruisseau ; sa mort, peu de temps après cet accident, a été attribuée à cette chute.

Mme Bailly, de Dolhain, en tombant du viaduc, s'est fait une fracture grave au poing.

M. Henrard, de Dolhain-Baelen, s'est cassé un bras en tombant du remblai de la route de la Vesdre au milieu de la localité.

M. P. Dragon, mécanicien à Thimister, est tombé dans le canal en se faisant des blessures graves ; il était tout en sang quand on l'a retiré.

M. Hendrik, de Dolhain, est tombé dans ce même canal.

M. Toupy, négociant à Dolhain-Baelen, est tombé dans ce même canal.

II ne s'agit ici que d'adultes des deux sexes. Si l'on avait pu prendre note de tous les enfants qui se sont fait mal en tombant de ces divers précipices, je ne pourrais pas en finir aujourd'hui.

Voilà l'état dans lequel la commune-mère entretient son enfant chéri de Dolhain-Baelen.

Quant à l'hygiène, vous aurez compris déjà combien elle doit laisser à désirer dans une localité d'une configuration aussi tourmentée. II y a des flaques d'eau partout ; on ne nettoie pas ; on y laisse croupir les tas de fumier ; enfin c'est un foyer de miasmes.

Je vais vous en donner une preuve : dans cette agglomération il est une maison où, en 1866, 22 personnes sont mortes du choléra sous le même toit ; c'est cette localité qui a apporté le choléra dans la commune de Limbourg et qui vient, il y a deux mois et demi, de l'infester de la terrible petite vérole.

Tout le monde est d'accord sur ce point, que la police ne se fait pas dans la localité de Dolhain-Baelen. La commune entière de Baelen a une superficie de près de 1,900 hectares ; eh bien, pour toute police, il y a un garde champêtre auquel on a le courage de donner 300 francs de traitement par an pour administrer 2,700 habitants et près de 1,900 hectares. Ce garde champêtre ne saurait vivre de ce traitement ; aussi est-il tailleur, et sort le moins possible de chez lui ; comment peut-il faire ainsi la police ? (Interruption.)

Tout ce que j'avance est excessivement exact.

Lorsque la police de Limbourg. composée d'un commissaire et d'un garde champêtre, poursuit des soulards, des perturbateurs du repos public, que font-ils ? Ils passent le pont et ils sont sur Baelen et alors certains de pouvoir s'adonner sans danger à tous leurs débordements ; arrivés au milieu du pont, le plus souvent ils se permettent de faire des pieds de nez à nos agents. C'est fort désagréable pour les habitants de Dolhain-Limbourg, exposés ainsi à de fréquents tapages nocturnes.

Si la commune de Limbourg est favorable à l'annexion, c'est uniquement au point de vue de la possibilité de maintenir la police ; c'est afin de pouvoir assainir le hameau de Dolhain-Baelen qui nous a fait mourir du choléra en 1866 et qui infecte aujourd'hui presque toutes nos familles de la petite vérole.

Les principaux griefs dont le conseil provincial de Liège s'est occupé et qu'il voulait faire disparaître, c'était donc d'abord l'affaire de l'école, puis celle du corbillard et enfin celle de l'éclairage.

M. Simonis. - Le conseil provincial de Liège a posé pour condition le redressement de tous les griefs..

M. David.- Quant à l'école, l'honorable membre s'est fondé sur une délibération du conseil communal de Baelen ; en effet, le conseil communal a décidé qu'une école serait établie à Dolhain-Baelen ; mais croyez-vous qu'il ait eu soin de désigner le terrain sur lequel serait construite l'école ? croyez-vous qu'il ait fixé un chiffre pour la construction de l'école ? croyez-vous qu'il y ait un plan dz l'école a bâtir ? Rien, absolument rien de tout cela.

M. Simonis. - Il a pris l'engagement de la construire.

M. David. - II a décidé en principe que pour échapper à la séparation des deux fractions de communes, il ferait un semblant de bon vouloir vis à-vis de Dolhain-Baelen et voilà tout. Dès que les membres du conseil communal auront la certitude que cette séparation n'aura pas lieu, ils se moqueront de nouveau de leurs administrés de Dolhain-Baelen, qui, encore une fois, n'auront pas leur école. Vous aurez vu cependant, messieurs, par le rapport qui vous a été présenté que Dolhain-Baelen est à trois kilomètres du centre de la commune où se trouve l'école. Comment voulez-vous que les enfants pauvres se rendent de Dolhain-Baelen à Dolhain en hiver ? C'est une chose véritablement impossible.

M. Simonis. - Si la commune de Dolhain-Baelen ne construit pas l'école, je serai le premier à vous appuyer et à demander la séparation des deux communes.

M. David.- Lorsqu'il y a des abus, il faut les faire disparaître le plus tôt possible ; il faut donner une leçon à une administration aussi revêche que celle dont nous nous occupons afin que les autres ne tombent plus dans les mêmes abus.

M. Simonis. - Il faut leur donner le temps de redresser les abus.

M. David. - Ils l'ont eu depuis 1869 ; on réclame la séparation depuis d'une manière sérieuse, et ils n'ont encore rien fait.

Quant au corbillard, c'est encore la même chose ; le conseil s'est contenté de prendre une délibération décidant l'achat d'un corbillard, cependant personne ne contestera qu'il est extrêmement difficile de transporter les morts à bras sur une distance de trois kilomètres dans une rampe continue jusqu'à Baelen.

En temps de choléra, on trouve surtout fort difficilement des gens disposés à transporter au cimetière les personnes mortes de cette maladie.

C'était encore là un des griefs de l'agglomération de Dolhain-Baelen. Le conseil communal a feint de se rendre aux considérations qu'on faisait valoir et a décidé l'acquisition d'un corbillard ; mais jusqu'à présent, encore une fois, elle n'a pas fixé la somme qu'elle entendait affecter à cet objet.

On promet de faire un corbillard, mais lorsque le danger de la suppression aura disparu, on n'en fera absolument rien. Ce qui s'est passé à propos de l'établissement d'un cimetière commun pour Dolhain-Baelen et Dolhain-Limbourg le prouve.

Lors du choléra de 1866, nous avons, nous commune de Limbourg, offert à la commune de Baelen d'intervenir pour moitié ou deux tiers de la dépense à faire pour l'acquisition du terrain et les constructions nécessaires à l'établissement d'un cimetière convenable pour les centres de Dolhain-Limbourg et de Dolhain-Baelen.

Eh bien, qu'a fait l'administration communale de Baelen ? Pendant toute la durée du choléra, elle a négocié avec nous ; de commun accord nous avons visité des terrains, nous en avons débattu les prix et conditions demandés. Aussitôt que le choléra a cessé, elle nous a envoyés promener.

Quant à l'éclairage, il y a eu, je dois le reconnaître, une légère amélioration cet hiver ; on a placé, sur l'immense place de Dolhain-Baelen, cinq réverbères à pétrole.

M. Simonis. - Il n'y en a pas beaucoup plus à Dolhain-Limbourg, sous le rapport des lumières, Dolhain-Limbourg n'est pas en avance sur Dolhain-Baelen.

M. David. - A Dolhain-Limbourg nous avons dix-sept ou dix-huit réverbères. (Interruption.) On vous a ensuite, messieurs, parlé des différents pétitionnaires ; on a fait sonner bien haut la valeur de ceux qui demandent le maintien de l'état de choses actuel ; je pourrais, messieurs, vous donner des renseignements personnels exacts sur chacun d'eux. Je ne le ferai pas et je me bornerai seulement à vous dire que les 38 propriétaires de Dolhain-Baelen qui ont demandé l'annexion à la commune de Limbourg et les 17 personnes étrangères à la localité, tels que MM. Demonty, Chapelier, Charpentier, Talmos, etc., et divers industriels qui y ont fondé des usines, possèdent au delà des trois quarts de la surface du territoire à annexer, et au delà des trois quarts des propriétés bâties de la localité. Voilà un renseignement qui doit avoir du poids auprès de vous. Ce sont toutes les personnes les plus fortement intéressées dans les charges de la commune qui demandent à être annexées à Limbourg.

Il faut que les nécessités soient bien grandes ; car ils savent parfaitement que, réunis à nous, ils seront plus fortement imposés qu'ils ne l'ont été jusqu'ici. Il faut que le besoin d'annexion soit, je le répète, bien grand pour que, malgré la menace de subir une forte augmentation des charges locales, ils demandent tous que vous donniez une solution favorable à leur requête.

(page 577) Parmi les pétitionnaires qui demandent le maintien de l'état de choses actuel, il y a, il est vrai, un échevin et un conseiller communal. Mais pourquoi ces messieurs désirent-ils que l'annexion n'ait pas lieu ? C'est une question d'amour-propre pour ceux de Baelen, c'est le bourgmestre qui désigne les candidats pour les élections communales. Il est dès lors naturel que les élus votent comme le désire le bourgmestre. C'est ce qui explique que cet échevin et ce conseiller sont favorables aux idées du bourgmestre. Celui-ci craint la réalisation de la séparation, parce que ce ne serait pas approuver sa conduite passée que de lui retirer une partie du territoire de sa commune pour mauvaise et partiale administration envers Dolhain-Baelen.

Baelen a de grandes ressources financières, mais on les a toujours appliquées au profit du chef-lieu de la commune.

Messieurs, je crois vous avoir donné des raisons excessivement fortes en faveur de l'annexion. Je ne pense pas qu'il se soit jusqu'à présent présenté un cas où il soit aussi urgent de faire droit aux besoins d'une forte fraction de population. Dolhain-Baelen compte pour le moment 1,070 habitants. Il est au bord de la rivière, dans une situation où l'on trouve de l'eau claire ; c'est une situation recherchée par l'industrie de Verviers et de Dison pour la fabrication de ses produits. Car, vous le savez, pour obtenir des fabricats parfaits avec la laine, il faut de l'eau propre. Donc cette fraction de commune qui a 1,070 habitants, en aura bientôt 2,000. Si elle est bien administrée, avec une police, des écoles, le nivellement et la disparition de ses précipices, on verra bientôt s'y établir une nombreuse population.

L'honorable M. Delcour, et je terminerai par là, vous a dit que l'autorité ecclésiastique avait été plus soigneuse que nous ne le serions pour les habitants de Dolhain-Baelen, si nous leur refusions l'annexion à Limbourg; c'est très vrai. Depuis très longtemps l'autorité religieuse a réuni les fidèles de Dolhain-Baelen à la paroisse de Dolhain-Limbourg pour qu'ils pussent remplir plus facilement leurs devoirs pieux.

Cette mesure de la part de l'autorité religieuse doit nous servir d'exemple, car pour les habitants de Dolhain-Baelen, il y a tout autant de difficultés d'aller remplir à Baelen, qui est à trois kilomètres de distance, les actes de la vie civile que ceux de piété.

En présence de toutes ces considérations, j'espère que M. le ministre de l'intérieur n'attendra pas plus longtemps pour nous présenter un projet de loi.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - J'avoue, messieurs, que je ne connaissais pas tous les faits que l'honorable M. David vient, de signaler à la Chambre ; mais à côté de ces faits il y a d'autres éléments d'appréciation, je veux parler des nombreux documents que renferme le dossier relatif à la séparation de Dolhain-Baelen. Je ne puis, en cet état de choses, que réclamer de la Chambre le temps nécessaire pour faire de ces documents l'objet d'un examen consciencieux.

M. le président. - Les conclusions de la commission sont le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. David. - Je propose d'ajouter : « Avec demande d'explications. »

M. d'Andrimont. - J'appuie la proposition de M. David.

- Cette proposition est adoptée.


(page 595) M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Nivelles, le 1er décembre 1870, le sieur Pailler, facteur des postes, à Nivelles, demande une augmentation de traitement et se plaint des retenues mensuelles qu'on lui fait subir.

Il résulte, messieurs, des termes de cette pétition que le sieur Paillet a obtenu une augmentation de traitement comme tous les autres facteurs ruraux. Il se plaint des retenues qui lui ont été faites, mais les mêmes retenues ont été faites aussi à tous les facteurs. La commission est donc d'avis qu'il n'y a pas lieu d'accorder au pétitionnaire l'objet de sa demande.

Toutefois, sans rien préjuger, elle propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée d'Appelterre-Eychem, le 6 décembre 1870, les membres de l'administration communale et des habitants d'Appelterre-Eychem demandent l'établissement d'un pont ou, du moins, d'une passerelle sur la Dendre canalisée, à la hauteur du village de Pollaere.

Même demande des membres de l'administration communale et d'habitants de Pollaere.

Pour donner à la Chambre une idée exacte de la demande des pétitionnaires, je vous dirai, messieurs, qu'il résulte des termes de leur pétition même qu'il n'y a jamais eu de pont là où ils en demandent un. Evidemment les ponts ou les passages d'eau sont des charges locales. Si, pour l'usage et la facilité des communications entre les deux rives de la Dendre, on trouve bon d'établir soit une passerelle, soit un pont, c'est là une charge communale. Il est bien entendu que des subsides peuvent être accordés dans le cas d'une nécessité absolue ou d'une utilité générale.

La commission, sans rien préjuger, a l'honneur de proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

(page 577) M. Van Wambeke. - Messieurs, je ne puis assez vivement recommander à la bienveillance de M. le ministre des travaux publics la pétition dont l'honorable M. Vander Donckt vient de présenter le résumé.

Il résulte, des termes de la pétition que les habitants des communes d'Appelterre-Eychem et de Pollaere, qui font partie de l'arrondissement d'Alost, se trouvent séparés les uns des autres par la canalisation de la Dendre et qu'il leur est impossible de communiquer entre eux sans faire un détour de 3 à 5 kilomètres.

Avant la canalisation de la Dendre, l'ancien lit de cette rivière longeait l'aggloméré de la commune de Pollaere, et un cabaretier avait établi une petite nacelle sur la Dendre, de sorte que les habitants de la commune de Pollaere qui devaient se rendre soit à Appelterre soit au hameau d'Eyehem, pouvaient traverser la rivière moyennant une légère rétribution et faire leurs récoltes.

L'ancien lit de la Dendre a été comblé et la nouvelle canalisation a été faite à une distance assez éloignée du centre de la commune de Pollaere, de sorte que la petite nacelle ne pouvant plus être surveillée a été abandonnée.

Il en résulte que les habitants de Pollaere qui exploitent leurs prairies sont obligés, pour la récolte de leurs foins, de faire un détour par Ninove, ce qui fait huit kilomètres, aller et retour, ou bien par le pont de Zantbergen qui est éloigné de trois kilomètres du centre de la commune de Pollaere.

La demande que font les pétitionnaires me paraît donc juste et raisonnable.

Ils demandent que le gouvernement fasse établir sur la Dendre, vis-à-vis de leur commune, une passerelle ou un pont.

En obtenant ce qu'ils demandent, ils se trouveront dans la même position que les habitants d'Idegem et Schendelbeke qui ont un pont sur la Dendre à leur disposition.

En effet, il est à remarquer qu'entre Ninove et Grammont, qui sont distants de 15 à 16 kilomètres l'un de l'autre, il y a quatre ponts, celui de Ninove compté.

Trois de ces ponts sont situés entre Zantbergen et la ville de Grammont, mais entre Zantbergen et Ninove, il n'y en a aucun, de sorte que les habitants de cette contrée ont le droit de se plaindre, et s'adressent avec confiance à la justice du gouvernement.

Je recommande donc cet objet à l'honorable ministre des travaux publics et j'espère qu'il voudra faire examiner cette demande dans le plus bref délai possible.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Messieurs, j'examinerai certainement avec la plus grande bienveillance la pétition que l'honorable M. Van Wambeke. recommande à mon attention.

Je verrai si l'intérêt public est assez considérable pour que l'Etat se charge de la construction d'un pont ou d'une passerelle à Pollaere. S'il n'en était pas ainsi, je puis, dès maintenant, donner l'assurance que je serais disposé à accorder des subsides aux communes qui voudraient entreprendre le travail et l'exécuter a leurs frais.

M. de Naeyer. - Messieurs, j'ajouterai une observation à ce que vient de dire l'honorable M. Van Wambeke, c'est qu'il s'agit réellement de faire, cesser une situation qu'on peut appeler anomale.

En effet, dans cette partie de la vallée de la Dendre qui appartient à l'arrondissement d'Alost, la densité de la population, pour les communes rurales, atteint des proportions qu'on ne rencontre, je pense, nulle part ailleurs. Cette densité se traduit par plus d'un habitant par 40 ares de territoire, et cela sans compter la population des villes, en ne portant en compte que les habitants des communes rurales.

La conséquence naturelle de ce fait, c'est que le besoin de moyens de communication se fait ici très vivement sentir.

Aussi, en général, ce besoin a été compris. En effet, depuis Alost jusqu'à Grammont, toutes les communes situées sur la rive gauche de la Dendre sont reliées directement aux communes situées sur la rive droite par des ponts ou par des passerelles.

Il n'existe plus qu'une exception, qui s'applique malheureusement aux communes de Pollaere et d'Appelterre-Eychem, qui, situées en face l'une de l'autre, ne peuvent cependant communiquer entre elles qu'en faisant un grand détour, soit par le pont de Ninove soit par celui de Zantbergen.

Cependant, sous le rapport de la densité de la population et sous le rapport des intérêts agricoles et autres, ces communes se trouvent dans les mêmes conditions que leurs voisines; il importe donc de leur accorder les bienfaits de la règle commune, en faisant cesser par la construction du pont qu'elles réclament à juste titre l'anomalie que je viens de signaler.

J'appuie donc les observations de mon honorable collègue en recommandant cette pétition à la plus vive sollicitude de M. le ministre des travaux publics.

M. Liénart. - Je ne puis que me rallier aux observations si justes de mes honorables collègues de l'arrondissement et engager M. le ministre des travaux publics à remplir le plus tôt possible la promesse qu'il a bien voulu nous faire.

- Les conclusions sont adoptées.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Becquevoort, le 10 décembre 1870, le conseil communal de Becquevoort demande la construction d'un chemin de fer de Tirlemont à Diest par Vissenaeken, Altenrode, Meensel, Wersbeek, Becquevoort et Assent.

M. Beeckman. — La pétition des habitants de Becquevoort et autres sur laquelle l'honorable M. Vander Donckt vient de vous présenter un rapport, mérite a plusieurs points de vue votre attention.

(page 578) Voici, messieurs, quelle était la position des différentes communes qu'on désigne généralement sous le nom du Hageland par rapport aux communications existantes avant l’établissement du chemin de fer de Louvain à Diest.

Avant l'établissement de ce chemin de fer, les communes du Hageland étaient traversées par des services de diligences de Diest vers Louvain et Tirlemont.

La ligne du chemin de fer de Louvain à Diest se trouve à peu près à deux lieues vers le nord du centre de ces communes et cependant, malgré cette distance, la construction du chemin de fer a arrêté immédiatement l'exploitation du service de diligences entre Diest via Louvain et Tirlemont.

Aujourd'hui ces communes sont dans un isolement complet et je suis en droit de dire qu'il n'existe plus, en Belgique, un centre de population aussi important qui se trouve, sous le rapport des communications, dans une position plus désagréable.

Messieurs, j'espère être parvenu à vous démontrer que la construction du chemin de fer de Louvain à Diest a anéanti les facilités de communications qui existaient pour ces communes avant l'établissement du chemin de fer.

Qu'il me soit permis d'ajouter quelques mots concernant la construction et le tracé du chemin de fer dont il est question dans la pétition.

Vous savez tous, messieurs, qu'il y a quelques années, le gouvernement a concédé la construction d'un chemin de fer de Tirlemont à Diest, ainsi qu'un droit de préférence pour la continuation de cette ligne jusqu'au camp de Beverloo.

Des circonstances défavorables n'ont pas permis à la société concessionnaire de remplir ses engagements et, si je suis bien renseigné, aujourd'hui cette société est déchue, de tous ses droits.

Messieurs, vous savez aussi que depuis plusieurs années, M. Thonissen demande la construction du chemin de fer de Diest au camp de Bzverloo ; à plusieurs reprises le gouvernement s'est expliqué sur cette question ; il est même à ma connaissance qu'un officier distingué de l'armée a été chargé par M. le ministre de la guerre d'étudier le tracé.

Vous voyez par là, messieurs, que le gouvernement est décidé à construire cette ligne.

Mais, à l'occasion des études de la ligne dont le principe était décidé, il s'est présenté cette difficulté, que ce tronçon de chemin de fer se réunissait, à ses extrémités, à des chemins de fer concédés.

Cette difficulté fait surgir la question de la construction ou plutôt la continuation de la ligne jusqu'à Tirlemont, afin de s'embrancher à une ligne de l'Etat.

Tout ce qui précède prouve, messieurs, que si les pétitionnaires ne s'occupent que du tracé dont je parlerai tantôt, c'est qu'ils ont la certitude que le principe de la construction est définitivement arrêté.

Un mot encore et je termine. Messieurs, le tracé que demandent les pétitionnaires est le plus favorable et cela à plusieurs points de vue ; d'abord il serait le plus direct, le moins coûteux, et il traverserait le plus grand centre de populations ; toutes ces considérations militent donc en faveur de la demande des pétitionnaires, je me joins donc à l'honorable rapporteur pour demander le renvoi de la pétition à. M. le ministre des travaux publics.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - J'ai déjà déclaré que je ne m'occuperais de nouvelles concessions de chemins de fer qu'après le vote de mon budget et de manière à pouvoir présenter un projet d'ensemble.

M. Beeckman peut être certain que celui dont il vient de parler est un de ceux qui fixeront le plus mon attention lorsque je me livrerai à cet examen.

- Les conclusions sont adoptées.


M. Vleminckx (pour une motion d’ordre). - Si j'avais assisté au commencement de la séance de samedi dernier, j'eusse fait à la Chambre la demande que je vais lui communiquer.

Une pétition du sieur Vankegen a été présentée à la Chambre dans cette séance ; elle demandait « qu'il fût pris des mesures pour empêcher que des maladies ne viennent s'abattre sur les pays voisins des champs de bataille qui n'ont pas été désinfectés. »

Je sollicite de la Chambre qu'elle veuille bien ordonner qu'un prompt rapport soit fait sur cette pétition. Et en attendant je prierai l'honorable ministre des affaires étrangères de vouloir bien prendre des informations sur le point de savoir si en effet les faits produits par le pétitionnaire sont exacts, si les champs de bataille qui avoisinent notre pays n'ont pas été désinfectés, si les inhumations n'ont pas été faites convenablement.

Ce ne serait pas la première fois, en effet, que, par suite d'événements semblables et de pareilles négligences, des pays voisins auraient eu à subir le fléau de graves épidémies.

Je demande donc que cette pétition fasse l'objet d'un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


(page 595) M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Wierde, le 2 mai 1870, le secrétaire communal de Wierde prie la Chambre de fixer un minimum de traitement à payer par la commune à son secrétaire dans l'accroissement du fonds communal qu'elle obtiendra en vertu de la loi portant augmentation des droits sur les eaux-de-vie.

Il y a certaines catégories de pétitionnaires qui encombrent le bureau des pétitions et parmi eux se trouvent les secrétaires communaux et les instituteurs primaires ; à eux seuls ils prennent la moitié du temps de la commission des pétitions. Ces fonctionnaires ne doivent pas ignorer qu'on s'occupe en temps et lieu d'améliorer leur position et ils devraient, me semble-t-il, montrer un peu de patience.

Il est une autre catégorie de pétitionnaires qui commence aussi à se produire beaucoup ; ce sont les huissiers. Il y a quelque temps, des huissiers de Bastogne présentent une requête pour voir améliorer leur position ; je présente le rapport sur leur pétition et M. le ministre de la justice prononce quelques paroles bienveillantes en leur faveur. Eh bien, depuis ce moment la Chambre est assaillie de pétitions d'huissiers demandant une augmentation de 50 p. c. sur leurs salaires.

(page 596) Ces pétitionnaires se font une fausse idée des attributions de la Chambre ; c'est au gouvernement qu'il appartient de décider en ces matières, et la Chambre ne se prononce que sur des propositions émanées du gouvernement, ou de l'initiative de ses membres.

Cependant pour cette fois encore la commission des pétitions conclut au renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Ces conclusions sont mises aux voix et adoptées.


M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Gand, le 13 janvier 1871, les bourgmestres de communes dans la Flandre orientale proposent des modifications à la loi sur le domicile de secours.

C'est la, messieurs, sans contredit, une des pétitions les plus importantes dont la Chambre se trouve saisie ; elle mériterait un examen approfondi et exigerait un rapport très longuement développé. Mais comme le gouvernement s'occupe de la question ; comme nous pouvons espérer que, d'ici à peu de temps, il sera en mesure de nous soumettre ses propositions sur les modifications à la loi sur le domicile de secours, votre commission se borne à vous proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de la justice.

(page 578) M. Van Cromphaut. - Depuis un très grand nombre d'années, de nombreuses pétitions ont été adressées à la Chambre ayant pour objet de demander des modifications à la loi sur le domicile de secours.

L'année dernière, deux projets ont été soumis à la Chambre, émanant, l'un de M. le ministre de la justice, l'honorable M. Bara, l’autre de l'honorable M. Kervyn de Lettenhove. Ces deux propositions ont été discutées en sections, mais, par suite de la dissolution des Chambres, elles sont tombées en désuétude. Aujourd'hui, de nouvelles demandes arrivent à la Chambre, ayant le même objet.

Je propose le renvoi de la pétition sur laquelle il vient d'être fait rapport à M. le ministre de la justice, à qui je demanderai si déjà il n'a pas élaboré un projet de loi qui serait soumis en ce moment aux députations permanentes.

M. Cornesse, ministre de la justice. - Le département de la justice a, en effet, élaboré un projet de loi sur la matière ; ce projet est, en ce moment, soumis à l'examen des députations permanentes, ainsi que l'a rappelé l'honorable rapporteur.

Une seule des députations permanentes a, jusqu'à présent, fait connaître son avis et je me propose d'écrire incessamment aux autres une lettre de rappel, afin d'être en mesure, si la chose est possible, de présenter un projet de loi sur cet objet dans le cours de la présente session.

- Les conclusions sont adoptées.

- M. de Naeyer remplace M. Vilain XIIII au fauteuil de la présidence.

(page 596) M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Virton, le 12 novembre 1870, le conseil communal de Virton demande que M. le ministre des travaux publics prononce la déchéance de la société concessionnaire du chemin de fer de Virton, si elle ne met immédiatement la main à l'œuvre sur la seconde section de Sainte-Marie-Ethe-Virton.

Vous me permettrez, messieurs, de comprendre dans un même rapport cette pétition et une série d'autres ayant le même objet, quoi qu'on n'ait pas demandé de prompt rapport sur ces dernières. Car enfin, messieurs, il faut absolument qu'une solution quelconque intervienne. Tout en recommandant à l'attention spéciale de M. le ministre des travaux publics la pétition du conseil communal de Virton et celles auxquelles je viens de faire allusion, votre commission a conclu à leur renvoi à son département.

(page 578) M. Bouvier. - Les pétitions sur lesquelles on vient de vous faire rapport méritent de fixer l'attention de l'assemblée et tout spécialement celle de M. le ministre, des affaires étrangères, en ce qui touche la partie financière de l'entreprise du chemin de fer de Virton. Il aura à examiner s'il n'y a pas lieu de rapporter l'arrêté qui lui confère le droit à l'anonymat.

Nous discuterons ce point ultérieurement dans une autre séance.

Pour le moment, c'est sa déchéance immédiate que je réclame ; votre dignité, votre honneur comme ministres, l'intérêt des populations que je représente dans cette enceinte, vous imposent le devoir impérieux de la prononcer.

Je vais l'établir devant vous.

Du point de départ, Marbehan, jusqu'au point d'arrivée, Velosne, la ligne a une étendue de 35 kilomètres au plus. Si la déchéance de la compagnie n'était pas prononcée, je n'hésite pas à dire qu'il faudra plus de temps pour établir ce misérable tronçon qu'il n'en a fallu pour relier, par un chemin de fer établi sur de colossales proportions, New-York à San-Francisco et franchir l'immense artère qui sépare l'Atlantique du Pacifique.

En voici le véritable motif : la concession du chemin de fer a été demandée non pour servir les besoins des populations, mais pour satisfaire des intérêts malsains. L'honorable M. Tesch vous a expliqué, lors de la discussion relative aux Bassins houillers, comment on atteint ce dernier résultat. Permettez-moi de lire un passage de son discours :

« Autrefois on n'admettait les obligations, en quelque sorte, que pour subvenir à une insuffisance très limitée du capital actions.

« Ici on fait diamétralement le contraire : c'est avec des obligations - obligations que l'on entoure de tout l'appât possible : primes, gros lots, etc., - que l'on fait des chemins de fer. Une fois la concession obtenue (c'est le cas pour Virton), on cherche à obtenir des obligations, à les placer, à réaliser des bénéfices sur la construction, et quand cela est fait on cède le (page 579) produit des lignes et ou force l'obligataire de passer par toutes les conditions.

« Voilà le système.

« Eh bien, c'est contre ce système que nous devons protester et réagir et nous ne devons admettre aucune proposition, qui n'aurait point pour effet de sauvegarder complètement les intérêts des obligataires.

« Pour le chemin de fer de Virton, c'est encore la même chose.

« M. Bouvier. - C'est cela ; nous en parlerons bientôt à notre tour. (Nous tenons notre promesse en ce moment.)

« M. Tesch. - Je ne vous parle pas du capital de cette ligne ; je ne me rappelle pas bien quel chiffre d'obligations on a admis par kilomètre, mais je constate, encore une fois, que la première chose que l'on a faite a été de jeter tes obligations sur le marché.

« Voilà deux ans que ces obligations sont dans le public et jusqu'à présent il n'est pas encore sérieusement question de construire le chemin de fer. On en est toujours au plan. »

Ces paroles, si justes et si vraies, s'appliquent également à la ligne de Virton.

Le fonds social affecté à sa construction et à son exploitation est fixé à 6,300 actions de 500 francs, dont 3,000 actions privilégiées et 3,300 actions ordinaires ou 3,150,000 francs.

Or, d'après l'article 7 des statuts, de ces 6,150 actions 4,650 appartiennent à M. Thevenet, comme entrepreneur de la voie. Je demande au gouvernement si M. Thevenet a justifié du versement de 40 p. c. sur ces actions ou, tout au moins, s'il les a retirées jusqu'à due concurrence, en payement de travaux faits par lui d'après le bordereau de prix ?

Je dis jusqu'à due concurrence. En effet, d'après l'article 8, la compagnie a émis des obligations. Le sieur Thevenet sera donc payé en retirant de la souche une moitié en actions par lui souscrites du chef de son entreprise, et une autre moitié en obligations ou en fonds provenant de celles-ci.

Si la société n'avait pas émis d'obligations, l'article 8 accorde à celle-ci la faculté de porter son capital actions au chiffre d'onze mille, soit à 180,000 francs par kilomètre de chemin.

Mais la société s'est empressée, comme toujours, de créer pour 3,951,700 francs d'obligations, ce qui forme, avec les 6,150 actions du fonds social, un chiffre de 7,101.700 francs, soit 202,905 francs par kilomètre de chemin, tandis que l'article 8 établit que le coût kilométrique ne sera que de 180,000 francs.

Les concessionnaires ont donc pu, conformément aux statuts, majorer le capital de 801,700 francs, ou de 35,205 francs par kilomètre.

Avouez avec moi, messieurs, que ce sont de singuliers statuts qui permettent de pareilles combinaisons.

J'appelle toute l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur ce point, afin qu'à l'avenir les statuts restent vierges de si étranges anomalies.

Je vous ai fait remarquer, comme l'honorable M. Tesch l'a établi pour d'autres sociétés de chemins de fer, que le fonds social se compose en majeure partie d'obligations.

La presque totalité en est encaissée, mais en fait de travaux, on en est toujours aux plans.

Aussi les obligataires se plaignent-ils amèrement. En voici la preuve. Elle confirme la lettre de M. l'avocat Gilquin, que vous connaissez.

« M. Bouvier-Evenepoel, membre de la Chambre des représentants, Bruxelles.

« Liège, le 16 décembre 1870.

« Monsieur le représentant,

« Nous croyons, d'abord devoir vous remercier de la façon courageuse et éloquente dont vous avez récemment, à la Chambre des représentants, demandé au gouvernement de forcer la compagnie, de Virton d'exécuter les engagements de son cahier des, charges, et de construire sans délai son chemin de fer, que des projets da spéculation, étrangers à l'affaire, peuvent seuls avoir intérêt à retarder. En réclamant au nom de votre arrondissement, vous avez aussi un peu réclamé en notre nom, et ce sont vos explications, jointes aux déclarations conformes de M. le ministre des travaux publics, qui nous ont décidé à veiller d'une façon plus active à nos intérêts compromis. Nous avons attendu de connaître les, résultats de l'assemblée extraordinaire de la compagnie du 13 courant et dès que nous avons vu que la décision prise n'avait encore pour but que de prolonger des délais qui n'auraient pas même dû se produire, nous avons immédiatement adressé au gouvernement la pétition dont ci-joint copie, qui est signée de quinze noms et qui l'aurait été de beaucoup plus si nous n'avions pas voulu agir immédiatement.

« Nous vous prions, M. le représentant, d'en prendre connaissance et de l'appuyer à l'occasion auprès du gouvernement. Si le conseil d'administration de la compagnie de Virton laisse déchoir ses droits à la concession de la ligne et à la subvention de l'Etat, votre arrondissement n'aura à subir qu'un retard de quelques temps apporté à la construction de son chemin de fer, car nul doute qu'une autre société sera enchantée de reprendre une affaire se présentant dans d'aussi bonnes conditions ; mais nous qui nous sommes intéressés dans cette affaire, confiants dans l'exécution de promesses que l'on n'a pas tenues, nous aurons peut-être à faire un procès pour rentrer dans l'intégralité de nos fonds.

« Nous vous remercions à l'avance, M. le représentant, si vous voulez bien défendre notre cause avec celle de vos constituants et vous présentons entre-temps l'assurance de notre haute considération.

« Pour les pétitionnaires. A. Massart, Armand Dresse, Gaspard Pirard.

« (Copie.)

« Liège, le 10 décembre 1870. »

« Monsieur le ministre des travaux publics, à Bruxelles.

« Les soussignés, porteurs d'obligations du chemin de fer de Virton, obligations 4 et demi p. c, devant jouir de la garantie de l'Etat aussitôt après la mise en exploitation de ce chemin de fer, prennent la liberté de venir vous exposer la fâcheuse situation qui leur est faite par la lenteur et la mauvaise volonté que met l'administration de la compagnie à exécuter les obligations qui lui ont été imposées par Je gouvernement lors de la concession de cette ligne, ainsi que les promesses qu'elle a faites elle-même lors de la mise en souscription des titres auxquels elle a affecté la subvention lui accordée par l'Etat.

« Ainsi que l'a fait ressortir une discussion récente à la. Chambre des représentants et comme vous l'avez parfaitement établi vous-même, monsieur le ministre, les termes donnés à la compagnie de Virton pour la construction de son chemin de fer sont depuis longtemps expirés, et non seulement, celui-ci n'est pas en exploitation, mais les plans de la deuxième et plus importante section ne sont pas même déposés. La compagnie de Virton, lors de l’émission des obligations dont nous sommes porteurs, a cependant fait sonner bien haut la faveur dont ses titres devaient être l'objet à cause de la subvention de l'Etat qui, d'après l'article 2 du cahier des charges, ne devait pas tarder à être effective, puisque l'exploitation, des diverses sections devait avoir lieu dans un délai très rapproché et que la seule partie, pour laquelle un retard était à prévoir, c'est-à-dire la partie sur le territoire français, n'empêchait pas la garantie de l'Etat de porter ses effets. (Article 14j de la convention du 22 octobre 1868.)

« Cette garantie de l'Etat, dans les termes indiqués par les conventions, etc., a été la raison qui nous a déterminés à souscrire, et aujourd'hui le conseil d'administration, dont font partie les entrepreneurs des travaux, dans le but d'obtenir un tracé moins coûteux ou de parvenir à s'assurer certains avantages par une combinaison avec un chemin de fer en projet d'Athus à la Meuse, s'obstine à ne pas remplir ses obligations respectives envers le gouvernement et envers nous, tout en demandant l'exécution ponctuelle de nos engagements envers lui en ce qui regarde les versements à faire et qui, à l'exception du dernier, sont tous échus et, pour notre part, effectués aujourd'hui. Notre position de créanciers de l'Etat, qui devait être de tout repos et de toute sécurité après les quelques mois d'attente fixés par l'article 2 du cahier des charges pour l'exécution de la ligne, se trouve complètement changée malgré nous et contre nous, car il est inutile, M. le ministre, d'attirer votre attention sur ce point qu'en souscrivant des titres 4 1/2 p. c, nous avons cru être garantis par l'Etat, quel que fût le tracé et le produit éventuel du chemin de fer de Virton, et non pas être simples créanciers de la compagnie de Virton, puisque l'inexécution du chemin de fer ne nous permet pas d'avoir un gage réel.

« Or, à l'heure qu'il est, nous ne connaissons pas l'emploi qui a été fait des sommes que nous avons versées, et dont on ne se sert pas pour construire le chemin de fer en s'obstinant à opposer une force d'inertie et des tergiversations continuelles aux justes demandes du gouvernement. S'il faut en juger par les cours que nos titres atteignent à la Bourse où ils sont la plupart du temps absolument irréalisables, nous avons tout lieu de nous inquiéter et de demander à connaître si les sommes que nous avons versées sont en lieu sûr et si on n'en a pas fait usage pour un but étranger aux stipulations du contrat.

« Dans une assemblée d'actionnaires tenue le 13 courant, nous voyons que le conseil d'administration a décidé de présenter un nouveau tracé au gouvernement plutôt que d'adopter celui résultant du premier cahier des charges. Sans Vouloir entrer dans aucune discussion à cet égard, ce qui (page 580) ne nous est pas permis, puisque nous ne demandons que l'exécution immédiate du chemin de fer comme on s'y est engagé, nous croyons que cette résolution n'a encore pour but que de gagner du temps, pour voir aboutir des projets étrangers à notre affaire et de retarder d'autant le jour où le chemin de fer sera en possession réelle de la rente lui allouée par l'Etat.

« Nous avons vu avec plaisir, le 16 octobre dernier, M. W. Warnotte nommé commissaire du gouvernement auprès de la compagnie de Virton. Nous venons vous demander, M. le ministre, de faire vérifier par ce fonctionnaire les sommes qui ont été versées jusqu'à ce jour et l'emploi qui leur a été donné pour prendre, le cas échéant, telles mesures conservatoires qui seraient nécessaires pour la sauvegarde de nos intérêts. Nous espérons que la compagnie de Virton ne vous forcera pas à prendre, le 19 janvier 1871, les mesures de rigueur que vous avez annoncées. S'il en était autrement, nous voulons être prêts à revendiquer immédiatement les sommes que nous avons versées et à réclamer la réparation du dommage qui nous aura été causé.

« Confiants dans l'appui que vous voudrez bien nous donner, M. le ministre, puisque ici vous représentez l'Etat dont la subvention seule nous a engagés à entrer dans cette affaire, nous vous présentons l'expression, etc.

« (Suivent quinze signatures.) »

Si les signataires de ces lettres ont souscrit, c'est par suite de la promesse faite par ceux qui ont monté cette affaire que leurs titres obtenaient la subvention de l'Etat ; en effet, la souscription publique ouverte les 7, 8, 9 juin 1869 pour le montant d'une somme de 3,951,700 francs portant 4 1/2 d'intérêt pour cent, indique en lettres majuscules ces mots qui les ont fascinés, éblouis, entraînés : La garantie de l'Etat belge assure à la société concessionnaire pour le terme de cinquante années (en lettres un peu moins éclatantes ces autres mots) : Un minimum d'intérêt annuel de 275,000 francs.

Tout le capital obligations est souscrit avec un entraînement tel, que le chiffre des souscriptions dépasse huit millions ; toutes les sommes dont le total s'élève, je le répète, à 3,951,700 francs, sont versées, comme je l'ai déjà dit, sauf une dernière et minime part échéant le 1er mars 1871.

Le Moniteur des intérêts matériels, dans son numéro du 30 mars 1869, avait préparé cet appel par les considérations suivantes :

« Il faut remonter à 1866 pour trouver l'origine du chemin de fer de Virton. A cette époque, le gouvernement belge, soucieux de servir les intérêts de quelques localités dépourvues de voies de communication, proposa une loi portant une garantie de minimum d'intérêt pour deux chemins de fer : 1° de Hasselt à Maeseyck (150,000 francs), et 2° de la ligne de Namur à Arlon vers la frontière française en passant par ou près la ville de Virton.

« Pour cette seconde ligne, le gouvernement a consenti un minimum d'intérêt de 275,000 francs pendant une période de cinquante ans.

« Ce seront probablement les deux dernières subventions que le gouvernement belge donnera à des compagnies de chemin de fer. Le système du minimum d'intérêt appliqué à l'origine des chemins de fer, notamment en Belgique pour Lichtervelde-Furnes, avait été abandonné comme présentant de trop grands sacrifices pour le trésor public. Le gouvernement a cru devoir le faire revivre pour satisfaire les aspirations de quelque région mal dotée ; mais il faut croire, il faut espérer, dirons-nous, que de nouvelles exceptions ne seront pas faites. Donner un minimum d'un côté, tandis que de l'autre on se montre inexorable, ce serait accroître le désarroi qui existe dans l'industrie des chemins de fer.

« Quoi qu'il en soit, c'est chose jugée et la compagnie de Virton peut jouir en toute sécurité, en toute confiance même, des avantages que la législature du pays lui a octroyés.

« Le chemin de fer de Virton comprend 34 à 35 kilomètres. Il est situé presque entier sur le territoire belge ; la jonction de la frontière française à la ligne de l'Est ne sera que de 5 kilomètres au maximum. Son but principal, celui qui a fait concéder une garantie de l'Etat, est de relier au réseau national la ville de Virton.

« En outre, elle forme une liaison entre les lignes du Luxembourg belge et de l'Est français, qui, se séparant à Luxembourg, courent parallèlement de chaque côté de la frontière jusqu'à la hauteur de Givet... Le gouvernement a voulu faire sortir Virton de son isolement et c'a été son seul mobile, suffisant, paraît-il, pour accorder une subvention annuelle de 275,000 francs, soit 7,850 francs de produit net par kilomètre.

« On trouvera, à l'annonce que nous publions plus loin, l'extrait de la convention intervenue avec le gouvernement, de même que nos lecteurs connaissent les statuts de la société anonyme du chemin de fer de Virton.

« Lorsque cette garantie de minimum d'intérêt est accordée par l'Etat, il y a en quelque sorte substitution du crédit vierge de l'Etat au crédit des chemins de fer légèrement vicié et la compagnie de Virton peut, avec tout autant de chance de réussite, placer son capital à un taux élevé. »

Voilà la réclame qui précède le prospectus. Ce dernier a été rédigé avec une si grande habileté qu'il a dû infailliblement produire beaucoup d'effet.

Les obligataires croient de bonne foi, grâce au prospectus, qu'ils ont la garantie de l'Etat belge ; ils se trompent. cette garantie n'existe point : c'est un rêve, une chimère. Ils sont purement et simplement créanciers chirographaires de la compagnie de Virton, laquelle seule a droit à cette garantie, si elle remplit toutes les conditions du cahier des charges.

Cette compagnie a donc spéculé sur la crédulité du public, qui seul paye les frais des longs retards apportés par elle à l'accomplissement des engagements les plus sacrés.

Je vais établir maintenant que la compagnie n'a pas l'intention de construire la ligne, ce ne me sera pas difficile à faire..

Elle avait, comme je viens d'avoir l'honneur de l'établir dans cette assemblée, le sieur Thevenet pour entrepreneur avec son capital actions s'élevant au chiffre de 4,650. Il disparaît pour faire place à une autre décoration et nous voyons apparaître sur la scène le sieur Parent-Pécher, cumulant le rôle d'administrateur délégué avec celui d'entrepreneur. Celui-ci s'éclipse à son tour après avoir lutté inutilement contre M. le ministre des travaux publics, le corps des ponts et chaussées, la commission mixte, qui n'entendaient pas se prêter, ni à ses calculs, ni à ses vastes combinaisons ; ces pouvoirs devaient songer aux populations de l'arrondissement de Virton, aux habitants de cette ville et aux intérêts du trésor public engagé pour une annuité de 275,000 francs.

Plus nous avançons dans cette affaire, plus la curiosité s'éveille. Les actionnaires, c'est-à-dire le capital actions est convoqué à Bruxelles pour le 13 décembre dernier. Une quinzaine d'individus se le distribuent, Thevenet est déclaré avoir cédé tous ses droits, c'est-à-dire son paquet d'actions, je vous laisse deviner à qui ? A la société des Bassins houillers, oui à la société des Bassins houillers, dont la renommée est faite, et ce qui est plus curieux encore, car c'est toujours de plus fort en plus fort, cette même compagnie des Bassins houillers est tout à la fois administrateur et entrepreneur des travaux de construction d'une ligne qui doit faire un jour retour à l'Etat ; de sorte que, chose extraordinaire, on peut même dire très exorbitante, voilà les contrôlés devenus contrôleurs, ceux qui doivent surveiller deviennent leurs propres surveillants.

Voilà, messieurs, l'étrange situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. N'allez pas croire que ce fait étrange de l'apparition des Bassins houillers dans l'affaire qui nous occupe en ce moment soit imaginé par moi. Pas le moins du monde. Je me suis donné la peine d'aller au ministère des affaires étrangères, j'ai demandé à l'honorable baron d'Anethan de me permettre d'examiner le dossier concernant le chemin de fer de Virton, et je dois le dire à son honneur, il n'a pas hésité un instant à satisfaire à ma demande.

- Un membre. - Vous avez eu de la chance !

M. Bouvier. - En effet, messieurs, j'ai eu bonne chance puisqu'elle m'a permis, accordez-moi cette expression triviale, elle m'a permis de découvrir le pot aux roses. Elle m'a autorisé à vous dire que nous nous trouvons en présence de la compagnie des Bassins houillers, qui a actuellement sur les bras :

600 kilomètres de voies ferrées à construire en vertu de la convention du 25 avril dernier ;

250 kilomètres du chef du réseau Forcade ;

150 à 180 kilomètres pour l'établissement du réseau Prince-Henri dans le grand-duché de Luxembourg ;

1,000 kilomètres en France.

Quelque chose en chiffres ronds comme 2,000 kilomètres à raison de 100,000 francs par kilomètre de chemin. Vous voyez que je ne force pas : le coût kilométrique équivaut à une dépense de 200 millions de francs.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Vous en oubliez encore.

M. Bouvier. - C'est possible, il pourrait bien m'en échapper. Il me serait bien agréable de vous voir combler la lacune.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Le chemin de Jemeppe à la Meuse.

M. Bouvier. - En effet, j'avais omis cette ligne dans ma nomenclature. Ce sont en conséquence des kilomètres à ajouter à la longue kyrielle que je viens d'énumérer. Il a fallu cependant que les 35 kilomètres du (page 581) chemin de fer de Virton allassent s'engloutir dans cet énorme chiffre, sans compter Jemeppe, comme on vient de me le faire remarquer.

Je vous demande, messieurs, de bonne foi, si nous pouvons jamais voir la fin de cette lamentable histoire qui s'appelle le chemin de fer de Virton, si nous n'en arrivons pas à des mesures décisives.

En effet, vous croyez peut-être que la compagnie des Bassins houillers va, dans cette mémorable séance, du 13 décembre, décréter l'exécution immédiate de la voie ? Détrompez-vous, messieurs. Il faut d'abord faire chanter les obligataires et il est indispensable qu'ils chantent longtemps.

La société des Bassins houillers, dans sa haute sagesse ou plutôt le fonds social actions Thevenet partagé entre quinze..., comment appellerai-je cela ?

M. Demeur. - Des hommes de paille.

M. Bouvier. - Des hommes de paille, puisque l'honorable M. Demeur me suggère le mot. Ces quinze hommes de paille prennent la résolution, toujours avec l'argent des obligataires, les quatre millions souscrits par eux, versés par eux, sauf la dernière quotité de leur souscription exigible au 1er mars prochain, ces quinze individus décident, contrairement à la résolution du corps des ponts et chaussées, de la commission mixte des ingénieurs, de M. le ministre des travaux publics lui-même, qu'ils se déroberont au tracé par Ethe qui leur a été imposé par ces diverses autorités et notabilités.

Dans cette fameuse assemblée du 13, les quinze individus décrits décident que de nouveaux plans seront adressés à M. le ministre des travaux publics et, grâce à ce bois d'allonge, excusez-moi encore une fois pour ce mot, les populations chanteront et les obligataires les accompagneront. Voilà donc ce qui est décrété. Mais ce n'est pas tout : elle décide bien d'autres choses.

M. Allard. - C'est comme chez Nicolet.

M. Bouvier.- Absolument comme chez Nicolet, M. Allard : Toujours de plus fort en plus fort. Elle décide, toujours avec l'argent des obligataires, - veuillez ne jamais perdre de vue cette circonstance si touchante- que si le gouvernement se permet de ne pas approuver les nouveaux plans, elle lui fera un procès. Elle réclamera de la justice du pays 750,000 francs de dommages-intérêts, et pendant les évolutions de ce procès, les populations et les obligataires continueront à chanter.

Voilà la situation que ces résolutions nous préparent.

Eh bien, je le dis et je le répète bien haut, il importe à la dignité du gouvernement et aux intérêts de mon arrondissement qu'il soit mis un terme à de pareils scandales. Voilà deux ans que le chemin, de fer est entamé, à peine a-t-on construit quelques travaux d'art, à peine quelques mètres cubes de terre sont-ils remués sur la première section d'une étendue de quelques kilomètres, alors qu'il n'est rien commencé sur les deux autres sections.

Ce dont on se préoccupe le moins dans cette affaire, ce n'est pas de l'exécution du chemin de fer ; ce qu'on a en vue, ce sont les gains illicites, chose que nous devons flétrir du haut de notre probité et, comme je l'ai dit dans une autre circonstance, tous, dans cette enceinte, nous devons nous donner la main.

Il faut que de pareils scandales aient une fin. Vous n'y arriverez qu'en prononçant la déchéance, et tant que je ne l'aurai pas obtenue, j'élèverai la voix dans cette assemblée pour protester de toute la force de ma conviction indignée.

Avant de terminer et par curiosité, je demanderai à l'honorable ministre des travaux publics si la commission des ingénieurs a examiné ces fameux plans auxquels j'ai fait allusion dans ce discours. Dans cette hypothèse, je vais faire une déclaration bien nette : si le corps des ponts et chaussées les admet et les adopte, je passe condamnation et je m'incline devant cette décision ; mais si, comme je le pense, et les obligataires partagent mon avis, ces plans m'ont été inventés et produits que pour gagner du temps, il faut immédiatement balayer tout cela et provoquer un arrêté royal de déchéance.

Quant à vous, M. le ministre des affaires étrangères, je vous prie d'examiner de très près toute la partie financière de cette affaire, et particulièrement la lettre que les obligataires ont adressée à votre collègue des travaux publics, afin que vous décidiez, après mûr examen, s'il n'y a pas lieu de retirer l'octroi royal qui confère l'anonymat à la compagnie de Virton, comme ayant contrevenu aux dispositions de ses statuts.

M. Dumortier. - Nous avons plusieurs fois déjà entendu l'honorable M. Bouvier sur la question qui nous occupe ; et je vous avoue que je suis extrêmement étonné du langage que je viens d'entendre ; car, s'il y a une commune du district de Virton qui demande la déchéance de la

société concessionnaire, il y en a vingt-neuf autres, vous l'entendrez tout à l'heure, qui viennent protester contre cette demande.

M. Bouvier. - Je demande la parole.

M. Dumortier. - Comment donc l'honorable membre peut-il se présenter ici comme le défenseur de son district lorsque vous voyez vingt-neuf communes qui protestent contre son opinion ?

Je comprends maintenant pourquoi l'honorable membre se livre à des foudres d'éloquence comme ceux que nous venons d'entendre. C'est uniquement pour nous étourdir et distraire l'attention des vingt-neuf pétitions sur lesquelles il va être fait rapport tout à l'heure et qui protestent contre sa demande de déchéance.

De quoi donc s'agit-il ? Il s'agit d'une contestation sur la question du tracé : certaines communes préconisent un tracé ; d'autres préconisent un autre tracé. Et pour cela vous voudriez, M. Bouvier, que l'on prononçât la déchéance !

Eh bien je me permettrai de vous interpeller, vous qui aimez tant les interpellations.

Je vous demande quelle sera votre attitude quand tout à l'heure on fera rapport sur les pétitions des vingt-neuf communes qui protestent contre vos paroles. Serez-vous encore le représentant de votre district quand vous vous prononcerez contre l'opinion de vingt-neuf communes sur quarante ?

La déchéance ! Mais peut-il être question de déchéance dans de pareilles conditions ?

Voyez le feuilleton dont nous nous occupons en ce moment, vous y verrez une ou deux pétitions du district de Roulers, dont je suis le représentant parmi vous, et qui demandent l'exécution de travaux décrétés depuis sept à huit ans. Est-ce que personne vient demander la déchéance des concessionnaires ?

D'où vient donc cette violence de langage et d'action ? D'une seule chose : c'est que vous voulez punir certaines communes de ne vous avoir pas été favorables dans les élections.

Nous demandons, nous sollicitons le gouvernement, de vouloir bien activer les chemins de fer concédés ; mais personne de nous ne songe à venir ici demander la déchéance des concessionnaires, quand il n'y a pas, de leur part, parti pris de ne pas exécuter leurs travaux.

Ici pourquoi ces travaux ne s'exécutent-ils pas ? Parce qu'il y a deux tracés en présence et qu'on vient d'en proposer un troisième qui rentre tout à fait dans le cahier des charges.

Voilà ce qui irrite l'honorable M. Bouvier ; c'est qu'un nouveau tracé est proposé qui rentre complètement dans les prévisions du cahier des charges et d'après lequel le chemin de fer ne passerait plus par la commune dont il se fait ici l'avocat.

Je suis fâché, messieurs, de devoir parler ainsi ; mais je ne saurais laisser accuser de mauvais procédés, d'intentions mauvaises un homme avec qui je suis lié d'affection, M. le baron Parent-Pécher.

Je dis que je ne puis permettre à M. Bouvier de venir nous présenter cet honorable citoyen comme un maltôtier, comme un homme qui fait de mauvaises actions. Je proteste énergiquement contre de semblables paroles qui ne sont que des injures gratuites adressées sous le couvert de l'inviolabilité parlementaire à un citoyen des plus honorables et des plus distingués, que j'estime et que j'aime beaucoup.

Messieurs, quand nous arriverons tout à l'heure aux pétitions qui vont suivre, nous verrons l'attitude de l'honorable membre ; ces pétitions émanent de vingt-neuf communes de son arrondissement qui n'en compte que quarante.

Je dis que dans cette affaire une grande prudence doit être la règle du gouvernent.

Je sais combien mon honorable ami, M. Wasseige, apporte de prudence dans les décisions qu'il prend ; je l'engage donc à né pas se laisser influencer par les emportements de M. Bouvier. Il examinera cette affaire avec sa sagesse et sa maturité ordinaires, et je m'en rapporte avec confiance à ce qu'il fera ; il ne prononcera pas une confiscation de travaux qui seraient terminés si M. Bouvier n'était pas venu y mettre obstacle par son attitude nouvelle. (Interruption.)

Vous avez plaidé vous-même la cause de l'homme honorable que vous attaquez aujourd'hui, et vous êtes devenu son adversaire le jour où il s'est refusé à faire une dépense à laquelle il n'était pas tenu et qui ne présentait aucun avantage pour la plus grande partie de l'arrondissement.

Messieurs, je répète en terminant que je ne puis protester assez énergiquement contre un langage injurieux qui vient nous présenter un parfait honnête homme comme un maltôtier.

(page 596) M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, les diverses communes auxquelles l'honorable M. Dumortier a fait allusion, et que je viens d'indiquer sommairement, sont comprises dans les n°112, 13, 149, 153, 158, 109 et 81. Tous les pétitionnaires demandent l'exécution prompte du chemin de fer de Virton ; ils ne demandent pas la déchéance ; mais ils expriment le vœu que la société exécute et achève immédiatement le chemin de fer de Virton.

Votre commission propose également le renvoi de ces diverses pétitions à M. le ministre des travaux publics.

(page 582) M. Bouvier. - Messieurs, je commence par déclarer que je ne me suis jamais préoccupé du tracé du chemin de fer de Virton ; je m'en suis complètement abstenu. (Interruption.)

Mon seul et unique rôle consistait à obtenir des pouvoirs publics les voies et moyens pour que mon arrondissement fût doté d'une voie ferrée.

Pour le tracé, mon intervention devait s'effacer devant celle des ponts et chaussées.

Je vous ai déjà dit et je vous répète encore que tant que je serai représentant, je ne me rendrai jamais coupable d'une bassesse, pour le rester ; je n'en ai jamais fait pour être revêtu d'un pareil mandat ; je n'ai jamais courbé la tête devant aucun électeur. Du moment que ceux-ci jugeront que leur député ne leur convient plus, je rentrerai dans la vie privée, avec le même calme que celui qui m'a accompagné dans la vie publique, avec cette douce consolation de penser, faisant un retour sur moi-même, que ma conscience est toujours restée pure, honnête et tranquille.

Je vais maintenant répondre quelques mots à l'argumentation de l'honorable M. Dumortier qui se constitue pour la seconde fois l'avocat de M. Parent-Pécher uniquement parce que ce monsieur est son ami ; cela n'est pas une raison, il ne s'agit pas d'amitié dans cette enceinte. Moi-même, comme il vous l'a dit, à, l'origine, j'ai aidé son ami de mes démarches pour arriver proprement à l'exécution du chemin de fer et ce n'est que quand je me suis aperçu que son ami s'obstinait à ne pas exécuter le tracé indiqué par le corps, des ponts et chaussées,, adopté par la commission mixte et approuvé par M. le ministre des travaux publics que je l'ai lâché, m'apercevant enfin, que cet ami, au, lieu d/exécuter la ligne, voulait spéculer sur elle.

Voilà, messieurs, l'attitude que j'ai prise. Vous en apprécierez la parfaite convenance. L'honorable M. Dumortier, toujours entraîné par ses sentiments d'amitié, l'honorable M. Dumortier oublie une chose en parlant de ces vingt-neuf communes ; c'est qu'il n'y a rien de plus facile que d'obtenir des signatures sur une pétition.

M. Dumortier. - Elles sont toutes au cachet de la commune, je les ai vues.

M. Bouvier. - Qu'importe ! alors surtout qu'il s'agit de satisfaire des appétits matériels. Mais, messieurs, quel est l'homme qui ne signe des deux mains une pétition dans laquelle on fait miroiter devant lui la construction d'un chemin de fer passant devant sa porte, doublant la valeur de son domaine, anéantissant les distances, et bien d'autres choses plus séduisantes encore, si possible. Si l'on ajoute encore à ces mirages je devrais dire à ces lointains mirages, l'établissement d'une station ou tout au moins la création d'une halte, il n'y aurait pas de cœur humain qui résistât à de pareilles tentations.

Y en a-t-il parmi nous, qui, habitant une contrée déshéritée de cette force productrice, ne soit prêt à apposer sa signature sur une pétition promettant tant de bienfaits ?

Vous n'en rencontrerez pas un seul.

Eh bien, toutes les communes et sections de communes, tous les villages et hameaux par lesquels ne passe point de voie ferrée, pétitionnent pour l'obtenir ; cela arrive tous les jours. Vous en avez l'exemple sous les yeux, notre bureau abonde de pétitions dans lesquelles des habitants de communes réclament pour attirer à elles les chemins de fer qui s'éloignent d'elles ; d'autres pétitionnent pour maintenir la direction disputée. Vous ne pouvez donc attacher aucune importance à la valeur de semblables pétitions.

L'honorable M. Dumortier prétend que les vingt-neuf communes me sont hostiles dans les élections. Si cela était, je ne ferais pas partie de cette Chambre, j'en fournis immédiatement la preuve, l'arrondissement ne renfermant que trente-sept communes, plus de la moitié de ces communes m'étant hostiles, je n'atteindrais pas la majorité.

Il y a parmi les communes qui pétitionnent dans le sens qu'indique l'honorable membre, il y en a qui n'appartiennent pas même à mon arrondissement, qui appartiennent aux arrondissements voisins ; Arlon, par exemple. M. Dumortier voudra bien me dire si cette commune appartient à mon arrondissement. M. Tesch - je ne le vois pas à son banc en ce moment - la revendiquerait à coup sûr immédiatement pour lui.

M. Dumortier. - La pétition, d'Arlon n'est pas comprise dans les vingt-neuf pétitions dont j'ai parlé.

M. Bouvier.- Comment ! elle n'y est pas ! Mais elle s'y trouve si bien, M. Dumortier, elle est au n°5 du feuilleton n° 4.

M. Dumortier. - J'ai parlé du n°3.

M. Bouvier. - Vous êtes toujours à côté de la question. Je ne m'en étonne d'ailleurs pas, puisque vous allez jusqu'à prendre un feuilleton pour un autre.

Ainsi, messieurs, ce chiffre de vingt-neuf communes dont on veut faire étalage dans cette enceinte, et dont un grand nombre n'appartiennent pas à mon arrondissement, ne signifie rien, absolument rien, je le répète.

Ce que nous demandons à cor et à cri à votre ami M. Parent, c'est d'exécuter le chemin de fer avec l'argent des obligataires. Rien de plus, rien de moins. Si pas de chemin de fer, la déchéance : cela est clair, net et limpide.

Vous ne m'avez pas compris, il y a un instant, emporté que vous étiez par vos sentiments d'amitié qui obscurcissaient votre intelligence. Je vous disais que si ce nouveau plan, ce fameux plan dont vous venez de parler, que vous définissez de plan intermédiaire entre Ethe et Meix, était admis par le corps des ponts et chaussées, le seul compétent, je passerais condamnation ; je lui donnerais mon adhésion. Est-ce que je puis être de meilleure composition ? Est-ce que votre cher ami Parent ne doit pas être satisfait ? Je ne le contrarie que quand il s'obstine à donner, à la dernière heure, des plans pour gagner du temps et ne pas exécuter le chemin de fer. Dites cela à votre ami et dites-lui que si son plan est adopté, je le défendrai.

Est-ce que je puis mieux parler ? Mais si le plan n'est qu'un leurre, inventé pour intenter un procès au gouvernement et lui réclamer 750 mille francs de dommages-intérêts, qu'est-ce que je suis conduit à penser ? Et vous-même, M. Dumortier, car vous êtes un homme très intelligent, que devez-vous penser quand votre cher ami cherche à gagner du temps et faire des procès avec l'argent des pauvres obligataires que vous avez défendus lors de la convention du 25 avril, que seul vous avez défendus, à ce qu'on prétend.

Aujourd'hui vous les abandonnez à leur malheureux sort pour défendre les intérêts de votre ami M. Parent-Pécher.

Eh bien, les obligataires doivent primer votre ami. L'intérêt public doit marcher avant l'intérêt privé ; je vous dirai, M. Dumortier, que dans cette affaire, je ne vois qu'un but : leurrer nos populations, les faire chanter, et jouer le gouvernement. J'ose espérer, et je l'ai déjà dit avant les déclarations antérieures de M. le ministre des travaux publics, j'ose espérer qu'il ne faillira pas, qu'il montrera de la fermeté, qu'il déjouera tous ces calculs, qu'il aura le courage de déclarer la déchéance en portant son examen sur le point de savoir s'il n'y a pas lieu de retirer l'octroi royal qui accorde l'anonymat à la compagnie de Virton.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - La Chambre ne s'attend pas à ce que je discute toute la question de la construction du chemin de fer de Virton. Je veux seulement faire une déclaration nette et catégorique qui satisfera, j'espère, l'honorable M. Bouvier Il ne peut pas m'attribuer de ne pas avoir fait, depuis que j'ai l'honneur d'être à la tête du département des travaux publics, tous les efforts possibles pour que cette affaire aboutisse. En effet, ainsi qu'il l'a dit, j'ai décrété le tracé par Ethe. Je l'ai signifié à M. Parent-Pécher et j'ai fait courir les délais du cahier des charges, avant que ce délai m'eût permis de prendre une résolution, M. Parent-Pécher m'a fait connaître qu'il était décidé à travailler dans les conditions qui lui étaient imposées, mais qu'il présenterait un nouveau tracé descendant directement par Virton.

Au moment où je venais de recevoir ce plan intermédiaire, j'ai eu l'avantage de rencontrer l'honorable M. Bouvier, je lui a -communiqué la nouvelle et lui ai dit que mon intention était de faire examiner le plan ;, l'honorable M. Bouvier m'a dit que j'avais raison.

M. Bouvier. - De faire examiner le plan.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - J'ai fait examiner ce plan, j'en ai remis l'étude à un inspecteur général des ponts et chaussées, contre lequel M. Bouvier n'aura absolument rien à dire ; il connaît ses. capacités, il est à même de l'apprécier. Je crois pouvoir annoncer que le rapport de ce fonctionnaire est préparé et sera soumis incessamment au conseil des ponts et chaussées.

Cependant il n'a été fait qu'au point de vue des populations, et il reste à savoir s'il est exécutable au point de vue des nivellements. Jusqu'à présent les neiges ont rendu impossibles les études à faire sur les lieux, mais aujourd'hui même j'ai donné l'ordre à l'ingénieur en chef de la province de se livrer sans retard à ces études, en ajoutant que je voulais avoir son travail dans le plus bref délai possible. Aussitôt que je l'aurai, je prendrai une décision et, que le concessionnaire se nomme Parent-Pécher ou Bassins houillers, je suis bien décidé à faire exécuter la résolution du gouvernement.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.

Ordre des travaux de la Chambre

M. le président. - Il serait bon de régler maintenant l'ordre du jour de demain. Je ne pense pas qu'il soit dans les intentions de la Chambre de (page 583) continuer les prompts rapports ; nous pourrions alors mettre en tête de l'ordre du jour le crédit pour construction de maisons d'école.

- Cette proposition est adoptée.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Je demanderai également à la Chambre de vouloir dès ce moment fixer à mardi prochain la discussion du budget de l'intérieur.

M. Delcour. - Ne pourrait-on pas voter aujourd'hui le crédit pour construction de maisons d'école ? S'il y avait quelques observations de détail à présenter, elles trouveraient leur place dans la discussion du budget de l'intérieur.

- Plusieurs membres. - A demain ! à demain !.

Projet de loi relatif à la pêche fluviale

Dépôt

M. Cornesse, ministre de la justice. - présente un projet de loi sur la pêche fluviale.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce projet et le renvoie à l'examen d'une commission, qui sera nommée par le bureau.

- La séance est levée à 5 heures.