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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 15 décembre 1870

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1870-1871)

(Présidence de M. de Naeyer, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 315) M. de Vrints procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Wouters donne lecture du procès-verbal de la précédente séance ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Vrints présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Godeau demande la révision de la loi qui fixe le port des journaux à 5 p. c. de leur valeur. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le conseil communal de Thourout demande l'exécution du chemin de fer de Thourout à Ypres par Cortemarcq et Staden, conformément à la loi du 21 avril 1864. »

« Même demande des conseils communaux de Staden et de Cortemarcq. »

- Même renvoi.


« Le sieur Paillet, facteur des postes à Nivelles, demande une augmentation de traitement et se plaint des retenues mensuelles qu'on lui fait subir. »

M. Snoy. - Je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport.

M. Lelièvre. - J'appuie la demande d'un prompt rapport faite par l'honorable préopinant et ce avec d'autant plus de raison que j'estime qu'il y a lieu d'améliorer la position des facteurs ruraux.

- Adopté.


« Le secrétaire communal de Pepinster demande que l'avenir des secrétaires communaux soit assuré, que leur traitement soit mis en rapport avec l'importance de leur travail et des services qu'ils rendent aux administrations communales, provinciales et générale. »


M. Van Renynghe. - Je demande à la Chambre d'ordonner que cette pétition sera renvoyée à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport.

M. Simonis. - J'appuie la proposition de l'honorable M. Van Renynghe.

- Adopté.


« Le conseil communal d'Attenrode-Wever demande que le chemin de fer à construire de Tirlemont à Diest passe par Attenrode-Wever, Meensel, Molenbeek-Wersbeek, Becquevoort et Assent. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La dame Borst demande un congé pour son mari, Léopold Borst, soldat au 2ème lanciers, à Tirlemont. »

- Même renvoi.


« Le sieur Louvet demande la construction d'un embranchement de route reliant la route qui passe à Aile avec celle de Bouillon à Dinant. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les membres du conseil communal et des habitants d'Offagne prient la Chambre d'accorder au sieur Brassine la concession d'un chemin de fer d'Athus a Givet. »

- Même renvoi.


« L'administration communale de Rupelmonde prie la Chambre d'accorder à la compagnie de Rechter la concession d'un chemin de fer de Gand a Anvers par la vallée de la Durme. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent le vote à la commune pour toutes les élections. »

-Renvoi à la section centrale pour le projet de loi sur la réforme électorale.


« Des électeurs à Humbeek demandent que le vote pour les élections aux Chambres ait lieu à la commune ou du moins au chef-lieu du canton.»

- Même renvoi.


« Le sieur Feuilleté prie la Chambre de statuer sur sa pétition concernant son expulsion de la Belgique et demande une indemnité pour le préjudice que lui cause cette mesure. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur la pétition rappelée.

Interpellation relative à certaines travaux publics urgents à Gand

M. de Baets. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour adresser au gouvernement une interpellation concernant plusieurs travaux publics qui, à mon sens, doivent être exécutés d'urgence à Gand et dans une partie du district de la même ville.

Je rencontre immédiatement une objection, qui se produira peut-être, qui pourrait se produire dans tous les cas ; c'est celle-ci : Pourquoi n'attendez-vous pas la discussion du budget des travaux publics ? ce sera alors le moment de parler. Cette objection, messieurs, pourrait être fondée dans des circonstances normales ; mais, en ce moment, il importe au gouvernement, il importe à la Chambre de savoir ce qu'il y a à faire chez nous, parce que les travaux à faire doivent être faits immédiatement.

Dans tous les cas, la question de principe doit être résolue tout de suite. L'administration communale de Gand, l'administration provinciale et le département des travaux publics doivent savoir à quoi s'en tenir. Si des retards étaient apportés il se produirait des complications telles, que les travaux dont je propose au gouvernement l'exécution par urgence deviendraient, dans un délai très rapproché, impossibles et si pas impossibles, ces travaux entraîneraient pour le budget des sacrifices considérables, lesquels sacrifices peuvent en ce moment être évités.

Les travaux dont j'aurai l'honneur d'entretenir la Chambre pourront se faire sans presque bourse délier ; ils n'intéressent pas seulement notre ville et l'arrondissement et la province, mais, comme j'avais l'honneur de l'annoncer à la Chambre, la semaine passée, ils intéressent plusieurs autres provinces : je cite le Hainaut, la Flandre occidentale, la province d'Anvers et le Brabant.

Vous le voyez, messieurs, nous ne parlons pas seulement pour notre chapelle ; nous parlons pour l'Eglise tout entière.

Il y a quelques mois, un adversaire politique des plus résolus, des plus convaincus et des plus francs... (Interruption.)

M. Bouvier. - C'est à droite que l'on vous interrompt. Nous vous écoutons.

M. Snoy. - C'est par extraordinaire. Il est jaloux, M. Bouvier.

M. de Baets. - L'honorable M. Bouvier dit que c'est à droite qu'on m'interrompt : cela rétablira tant soit peu l'équilibre, puisque c'est ordinairement M. Bouvier qui interrompt et il interrompt à gauche.

Je demande à la Chambre de m'écouter avec indulgence. Je suis obligé de l'entretenir et de ne pas l'amuser, peut-être pendant un certain temps ; je tâcherai d'être aussi bref que possible. La Chambre jugera elle-même de l'importance de ce dont je vais l'occuper.

Il y a quelques mois donc, un de mes adversaires les plus accentués, les plus convaincus et les plus honnêtes, disait en plein conseil communal de Gand (alors un autre cabinet siégeait sur le banc ministériel) : « Vous n'obtiendrez du gouvernement pour notre ville rien, absolument rien, à moins que vous ne montriez les dents. »

Je ne veux pas montrer les dents au cabinet actuel. Je veux simplement lui donner de bonnes raisons, avec la réserve, s'il n'accepte pas mes (page 316) bonnes raisons, de lui montrer les dents dans l'avenir et de le combattre aussi énergiquement que j'aurais combattu le cabinet qui l'a précédé.

J'espère, au reste, que le ministère actuel sera assez raisonnable pour ne pas me pousser dans mes derniers retranchements.

M. Bouvier. - Soyez-en convaincu.

M. de Baets. - J'en suis très convaincu. Messieurs, il est parti un jour du banc du ministère un excellent conseil. L'honorable M. Frère nous disait qu'administrer c'est prévoir. Je suis parfaitement de cet avis, et c'est précisément parce qu'administrer c'est prévoir, que je fais mon interpellation aujourd'hui ; c'est qu'on a quelquefois administré sans prévoir !

Or, nous avons un ensemble de travaux qui s'exécutent, qui s'exécuteront à Gand et autour de Gand, qui sont d'une importance considérable ; et si jamais le gouvernement avait jeté un coup d'œil d'ensemble sur ces travaux, on n'aurait pas fait ce qu'on fait aujourd'hui, on n'aurait pas commis les bévues impardonnables qui se constatent actuellement.

Je m'empresse de déclarer que je n'en veux ni à l'honorable M. Vanderstichelen ni à l'honorable M. Jamar ; M. Jamar et M. Vanderstichelen ont fait preuve de talent, de vigilance et d'activité, mais un général ne conduit pas seul son armée, il y a l'état-major, qui souvent entrave la marche et fait commettre des fautes que l’on reprocherait même à l'instituteur de Cherscamp.

Ainsi, nous avons à construire a Gand un chemin de fer de ceinture et à faire en même temps des rectifications au canal de Terneuzen : « Administrer c'est prévoir ; » eh bien, si l'on avait prévu, on se serait dit : Pour faire un chemin de fer de ceinture à travers des prairies il faut de la terre, il faut des remblais, et pour faire des rectifications au canal il faut des déblais. Si j'avais à construire une maison et à en démolir une autre, je stipulerais avec mon entrepreneur qu'il doit d'abord utiliser les matériaux de la maison à démolir pour les fondations nouvelles, et autres choses ; le gouvernement a agi différemment.

Vous aviez à faire des rectifications au canal, ce qui vous met sur les bras un cube de terre très lourd ; vous aviez, d'un autre côté, à établir le chemin de fer de ceinture, qui demande un cube de terre énorme. Eh bien, le gouvernement met en adjudication, au mois de juin 1870, l'approfondissement et l'élargissement du canal de Terneuzen et il porte de ce chef dans ses prévisions un chiffre que je ne pourrais pas préciser très exactement, mais un chiffre important pour le transport des terres qui doivent sortir du canal de Terneuzen ; et au mois d'avril 1870, quelques mois avant, il avait mis en adjudication le chemin de ceinture et, pour ce travail, il porte dans son devis un chiffre considérable pour le dégagement des terrains.

Il s'est fait que, si mes renseignements sont exacts, l'entreprise du canal et celle du chemin de fer ont été acceptées par le même constructeur, que tous les calculs ont été faits, d'un côté, sur le chiffre des déblais et, de l'autre côté, sur le chiffre des remblais, et c'est le même constructeur qui est ainsi payé deux fois, une fois pour prendre les terres ici et les mettre là et une fois pour mettre les terres là et pour les prendre ici. Je n'ai rien à dire à l'entrepreneur, il use loyalement de son droit ; mais j'ai le devoir d'interpeller le gouvernement. Je serais heureux, au reste, de recevoir des explications qui rectifient mes réclamations.

Je n'entends en rien faire une insinuation contre M. Jamar ni contre M. Vanderstichelen, mais j'ai le droit d'appeler l'attention du ministre actuel sur les us et coutumes de son administration.

Je suis prêt, je le répète, à faire amende honorable si je me trompe dans mes appréciations, car je ne sais pas même à quel employé je dois adresser mes observations et il n'y a rien de plus triste que de devoir critiquer ; mais enfin, des pièces officielles que je tiens à la main, je ne puis tirer d'autre conclusion que celle-là.

Administrer c'est prévoir : c'était la thèse de M. Frère-Orban et elle est parfaitement vraie.

Quand j'avais l'honneur de siéger sur les bancs de la Chambre il y a cinq ou six ans, je disais au gouvernement : Vous avez à faire un chemin de fer de ceinture ; les bassins de Gand sont insuffisants, complètement insuffisants ; je n'avais pas besoin de m'adresser aux représentants de la Flandre, je n'avais qu'à interpeller les représentants des districts industriels et commerciaux du Hainaut ; les bassins de Gand sont insuffisants ; vous le savez tous. Je disais alors au ministère : Vous devez construire un chemin de fer de ceinture ; vous devez faire un bassin entre votre chemin de fer de ceinture et le dock ; entre les deux, il s'étend des prairies de très peu de valeur ; prenez donc là du terrain, prenez là de quoi faire votre remblai ; en même temps que vous faites votre chemin de fer, faites votre bassin ; les terrains coûteront 8,000 francs, 10,000 francs peut-être sa maximum l'hectare.

Eh bien, on a pris mes observations pour notification, comme tout ce qui émanait de la droite, de la haute droite ou de la basse droite. Actuellement je défie le ministre de construire le bassin à l'endroit que j'indiquais alors, parce que depuis ces terrains ont acquis une plus-value énorme et que l'on ne pourrait aujourd'hui, sans sacrifices considérables, faire le même travail. C'était vox clamans in deserto et, il suffisait qu'une idée partît de nos bancs pour qu'elle fût impitoyablement envoyée dans les cartons. Heureusement que tant va la cruche à l'eau qu'à la fin elle se casse.

Ces observations, simplement préliminaires, vous auront déjà démontré que j'avais le droit de demander la parole pour interpeller le gouvernement.

J'aborde maintenant aussi brièvement que possible les objets que j'ai indiqués la semaine passée.

Et d'abord nous avons une citadelle. Dans une discussion antérieure j'ai démontré à la Chambre que cette citadelle ne servait à rien. Des hommes spéciaux que j'ai consultés, des hommes exercés à la profession des armes m'ont dit que la citadelle de Gand résisterait peut-être bien pendant deux heures ; ils n'étaient pas bien sûrs de la chose.

Or, la citadelle de Gand occupe une colline qui est incontestablement l'endroit le plus salubre de toute notre ville.

Elle est un obstacle permanent à ce que l'industrie se développe de ce côté : c'est incontestable pour quiconque connaît les localités. La citadelle se trouve entre la Lys à droite et l'Escaut à gauche.

Sans conteste, c'est la situation la plus magnifique pour l'industrie, pour le commerce, ajoutons pour le plaisir et le repos : villas et maisons de campagne y pousseraient en masse.

Mais maintenant, il nous est défendu non seulement d'y bâtir des fabriques, des usines, mais même des chenils.

J'ai fait cette démonstration à la Chambre depuis longtemps.

La défense persiste et, sur ce magnifique plateau, nous sommes protégés administrativement, militairement, judiciairement contre qui ? contre les Français ou les Prussiens ? Non, mais contre nos pacifiques colombes et contre nos fidèles caniches.

Le gouvernement a fini par reconnaître que la citadelle de Gand était une superfétation.

Je crois que les exemples de Metz et de Strasbourg ont dû confirmer le gouvernement dans ses appréciations.

M. Bouvier. - Paris résiste énergiquement.

M. Jacobs, ministre des finances. - Il n’y a pas de citadelle à Paris.

M. de Baets. - Je ne demande pas mieux que de voir démolir la citadelle de Gand et de voir construire une ligne de circonvolution autour de Virton...

M. Bouvier. - Je ne demande qu'un chemin de fer.

M. de Baets. - … aussi énorme que celle de Paris. Cela comprendrait à peu près tout votre arrondissement. Vous garantiriez alors complètement vos pataches de Virton et les intéressants petits animaux dont vous avez souvent entretenu la Chambre.

Le gouvernement a fini, après de longues méditations, par comprendre que notre citadelle était parfaitement inutile et il en a décrété la démolition.

Pourquoi ne la démolit-il pas ?

Ce n'est pas seulement l'amour platonique de la démolition qui nous domine. La citadelle nous gêne à plusieurs litres, mais elle présente aussi des dangers.

Je me rappelle qu'étant un jour à 5 kilomètres de la citadelle de Gand, j'ai senti le sol trembler sous mes pas. Une explosion avait eu lieu : toute la ville était en émoi.

D'après ce qui a été dit, un officier avait mis le feu à une poudrière et si, par un bonheur providentiel, le feu n'avait pas été arrêté, s'il s'était communiqué à d'autres poudrières, toute la citadelle eût sauté et une partie de la ville était détruite. (Interruption.)

Cela peut, aux yeux de quelques-uns, n'être pas grave ; mais cela me paraît plus grave que la question de la patache de Virton qui ne marche pas régulièrement.

M. Braconier. - Il ne faut pas se répéter pour être bon.

M. de Baets. - Sed bis repetita placent, et aux interrupteurs : Bis repetita displicent.

Je demande donc, et cela d'une façon péremptoire, à M. le ministre des travaux publics, peut-être devrai-je adresser ma demande également à MM. les ministres des affaires étrangères et de la guerre, quand on va nous (page 317) débarrasser enfin de ce véritable cor au pied que nous traînons sans la moindre utilité ni pour la défense du pays ni pour la ville de Gand ; car notre citadelle, pas plus que celle de Charles-Quint, n'a aujourd'hui autre chose qu'un intérêt purement historique, et on l'utilisera bientôt, j'espère, pour une destination pacifique comme on utilisera toutes celles qui existent encore.

M. Thonissen. - Je demande la parole.

M. de Baets. - J'ai eu l'honneur d'annoncer à la Chambre que j'interpellerais aussi le gouvernement au sujet du chemin de fer de ceinture. Lorsqu'on a fait partie d'administrations publiques, lorsqu'on a passé par des conseils communaux et quand on a siégé pendant quelques années à la Chambre des représentants, on finit par ne plus s'étonner de rien ; mais cela ne m'empêche pas de protester contre ce qui est critiquable.

Le chemin de fer de ceinture est pour nous une affaire capitale, une affaire des plus importantes. Le gouvernement le reconnaissait en 1865 ; il avait besoin alors de plusieurs millions pour l'embastillement ultérieur d'Anvers, je pense. Je n'ai pas eu le temps de revoir la loi ; mais je crois que c'est à propos des travaux projetés à Anvers et ailleurs que le gouvernement est venu demander 60 millions au pays et, cette fois comme toujours, en vertu d'une pratique que je trouve très peu parlementaire, on nous a servi le gâteau tout d'une pièce. On avait besoin de millions qui devaient être accordés sur-le-champ, sans discussion.

Eh bien, on a mis, sous forme de garniture, autour de ces millions, quelques millions pour Anvers, quelques millions pour Liège, un million pour Virton, si je ne me trompe, si bien que le projet de loi nous a été servi sous l'aspect d'une tête de veau en tortue. (Interruption.)

Eh bien, il y a ceci de remarquable que tous les millions ont été dépensés et que le Chemin de fer de ceinture de Gand n'est pas fait, et que, depuis qu'il a été décrété, un grand nombre d'autres millions ont été votés pour d'autres travaux, sans qu'on se soit inquiété de la ville de Gand. Je me trompe : on s'en est inquiété pendant un certain temps ; je vais vous dire a propos de quoi.

Les fonds, si je ne me trompe, ont été votés en 1865, et il y avait des élections en 1866. En 1866, un ou deux mois avant les élections, on a donné l'ordre de travailler énergiquement ; il fallait aller vite ; on a créé la première station du chemin de fer de ceinture ; cette station demandait plusieurs hectares ; le chemin de fer allait se faire vite, vite, des élections allaient avoir lieu.

Les blés en herbe devaient être coupés, des maisons démolies ; on entourait de palissades la station de marchandises. En 1869, il y avait là un désert ; mais en 1870, il y avait de nouveau des élections. Et immédiatement, on reprend les travaux.

Si les élections avaient réussi dans un certains sens, on aurait probablement arrêté les travaux ; mais les élections ont tourné dans un autre sens, les travaux s'achèvent et j'en remercie M. le ministre des travaux publics actuel. Je lui annonce que, si les travaux étaient de nouveau interrompus, je le combattrais aussi énergiquement que j'ai combattu les agissements de ses prédécesseurs.

Pour en revenir au chemin de fer de ceinture, ce n'est pas véritablement un chemin de fer de ceinture ; car je ne comprends pas qu'un cercle ne soit pas un cercle, que ce ne soit qu'un segment de cercle.

Sous l'ancienne administration, on ne savait pas encore où il fallait établir les stations du chemin de fer de ceinture. Il y avait eu des discussions très grandes sur la question de savoir où l'on mettrait la station terminus ; mais je me suis dit : Je ne comprends rien à tout cela ; un chemin de fer de ceinture n'a pas de station terminus ; une ceinture, c'est un cercle.

On s'est arrêté devant le faubourg de la porte de Bruges, et là on a négligé des établissements industriels d'une importance énorme ; on a négligé les intérêts de Gand ; on a négligé la commune de Mariakerke ; on a surtout négligé de prolonger le chemin de ceinture de Mariakerke jusqu'à Tronchiennes.

Voici une conséquence de cet état de choses : c'est qu'un convoi de marchandises expédiées d'une localité quelconque de la Flandre occidentale devrait faire la promenade autour de la ville de Gand, aller jusqu'à Melle, faire un circuit d'une vingtaine au moins de kilomètres et revenir ensuite à la porte de Bruges.

Cela est de la dernière absurdité.

Je n'incrimine pas le ministre des travaux publics ; mais malheureusement, les généraux ont souvent un état-major qui laisse beaucoup à désirer et cet état-major, au lieu d'étudier les questions, au lieu de faire soulever à la Chambre ce que des avocats doivent venir soulever ici, se contentent purement et simplement d'exécuter ce que le ministre leur ordonne et d'émarger leurs appointements.

C'est là le second point. Je demande donc au gouvernement que le chemin de fer de ceinture soit prolongé jusqu'à Tronchiennes et je défie un ingénieur quelconque se trouvant en présence d'une personne qui n'est pas ingénieur de soutenir la thèse contraire ; il faut agir très souvent avec les ingénieurs comme on doit agir avec les médecins et les pharmaciens : écouter leurs conseils et faire le contraire. (Interruption.)

Je sais bien que mes honorables collègues de la Chambre qui sont docteurs en médecine partagent complètement ma manière de voir. (Interruption.)

M. Bouvier. - C'est fort cela !

M. de Baets. - Pour autant que j'ai eu l'honneur de causer avec l'honorable M. Vleminckx, qui est la sommité du corps médical, et avec les honorables docteurs Thienpont et Vander Donckt, j'ignore si, parmi mes honorables collègues, il se trouve d'autres membres de cette faculté ; je sais parfaitement qu'ils n'ont toujours conseillé le régime de l'hygiène, en me défendant la pharmacopée.

M. Vleminckx. - C'est que cela vous convenait. (Interruption.)

M. de Baets. - Messieurs, je préfère ne pas ennuyer la Chambre à diverses reprises, je préfère lui servir l'ennui à une dose assez forte mais non réitérée.

C'est pour cela que je l'entretiendrai de quelques travaux qui intéressent la province de Hainaut, la Flandre occidentale, le Brabant et la province d'Anvers.

Il y a un premier travail que je recommande à toute la sollicitude de M. le ministre des travaux publics : c'est le prolongement du dock actuel dans la direction du bas Escaut. Je trouve ici un motif nouveau pour ne pas remettre à d'autres temps la discussion de cet objet qui est très important.

Depuis l'extrémité sud du bassin jusqu'au bas Escaut, il y a un lorrain vierge, servant actuellement de plaine d'exercice, mais qui va perdre sa destination : une nouvelle plaine d'exercice sera établie hors ville, parce que le chemin de fer de ceinture doit passer sur une partie de la plaine actuelle.

Je demande donc que le gouvernement profite de cette occasion pour continuer le dock, jusqu'au bas Escaut. En ce moment cela ne coûterait rien du tout au gouvernement parce que l'Etat, étant propriétaire de toute la plaine d'exercice, pourrait, en vendant les excédants de terrain qui resteront à droite, faire amplement les fonds nécessaires pour le creusement du bassin. Il y a, après la plaine d'exercice, quelques parcelles de prairie qui coûteraient peu de chose ou rien.

De cette manière, nous aurions tout de suite une communication directe avec Gand et Anvers par le bas Escaut. La communication entre Gand et Anvers présente en ce moment bien des difficultés. Du moment qu'il y a un travail quelconque à faire sur le canal de Terneuzen, qu'il y a un pont à reconstruire, une baisse d'eau, un obstacle quelconque, un navire coulé à fond par un bateau à vapeur, les navires de Gand ont bien de difficulté à descendre dans le bas Escaut, parce qu'ils doivent rentrer en ville, tourner l'ancienne citadelle par le pont De Pauw, par le pont à l'extrémité de la Pêcherie ; nous ne pouvons expédier par là que des navires de 300 à 400 tonneaux : encore doivent-ils être à vide.

Il y aurait immédiatement une jonction directe entre le canal de Terneuzen, le canal de Bruges et de bas Escaut.

J'appelle sur ce point toute l'attention de mes honorables collègues de la province de Hainaut.

Il n'y a certes pas en Belgique un passage plus dangereux, plus frayeux que la traverse de Gand. Les navires qui viennent de Tournai, du bassin de Mons et des autres bassins houillers descendent le haut Escaut et arrivent devant la ville de Gand sous la protection de la citadelle dont nous désirons être bientôt débarrassés. Ils arrivent jusqu'à l'établissement le Stops, au sud de la ville, et là ils sont à un kilomètre et demi ou peut-être deux kilomètres du bas Escaut. Le haut Escaut communique directement par deux branches très considérables avec le bas Escaut ; c'est-à-dire que les navires qui viennent de Tournai, les navires qui nous viennent du Hainaut, pourraient descendre du haut Escaut dans le bas Escaut.

Mais ils.ne le peuvent pas parce qu'il y a là un pont en pierre qui empêche les navires de passer. Ils sont obligés d'entrer en ville et de faire une pérégrination interminable. Ils passent à côté de l'église Saint-Pierre, derrière la grande station de l'Etat ; ils arrivent en ville, ils doivent passer sous le pont des Moines, le pont Madou, le pont des Chaudronniers, le pont des Récollets, le pont des Dominicains, le pont Saint-Michel, le pont aux Herbes, le pont du Laitage, le pont du Pré-d'Amour, le pont Saint-Georges, le pont du Sas, etc., etc. Ils doivent appeler à bord toute une catégorie de gens, parce que si le patron d'un navire osait, à lui (page 318) seul, avec son personnel, faire la traversée, il serait infailliblement coulé. Tous ceux qui ont vu le palais de justice à Gand doivent savoir que là, sous une poussée énorme, avec un courant impétueux, les baquets wallons doivent faire un angle droit, et si un câble se rompt, le navire va impitoyablement s'écraser contre les quais de soutènement qui sont de l'autre côté de la Lys.

Une corporation tout entière de gens très actifs, très intelligents, vit des embarras que nous occasionnons aux Wallons et les Wallons ne nous ennuient pas moins, car enfin nous sommes très heureux de pouvoir recevoir à quai, devant nos magasins, devant nos ateliers, les charbons et autres marchandises ; mais il est fort désagréable d'être arrêté dix fois par jour devant un pont par un navire qui n'est pas même en destination de Gand. Ces messieurs, qui connaissent le prix du charbon, pourront vous dire que lorsque vous avez un navire à destination de Gand à Saint-Pierre, avant d'entrer en ville vous payez autant de centimes de moins pour les frais.

Débarrassez-vous, débarrassons-nous de toute cette kyrielle de ponts, d'écluses, de corvées, de frais, de perte de temps, et vous, producteurs du Hainaut, comme nous, consommateurs des deux Flandres, nous y gagnerons. Nous ne faisons maintenant que payer nos embarras et nos entraves.

Ce n'est pas pour nous seuls que je réclame, c'est pour vous et certes un peu aussi pour moi, car pendant que vous vous ennuyez à faire passer vos bateaux, je m'ennuie aussi à attendre que je puisse traverser le pont. Ainsi la ville a fait des règlements qui défendent d'ouvrir les ponts à de certaines heures qui sont déterminées, pour les convenances de nos innombrables ouvriers qui vont à la fabrique ou en reviennent, pour les départs et arrivées de certains convois, etc., etc.

Mais voyez, messieurs, après ces interruptions, voyez surtout aux Drijfdagen, l'accumulation des navires devant les ponts !

Au point de vue pratique, c'est-à-dire quant à l'exécution du travail, il n'y a pas d'objections sérieuses possibles.

Pour le Hainaut, pour le Brabant, pour la Flandre occidentale, pour Anvers et pour nous-mêmes, il faut supprimer ce casse-cou qui s'appelle la traverse de Gand. Cela est, au reste, d'une simplicité telle, qu'on est stupéfait de voir qu'il faille quarante ans pour ne pas résoudre la question.

J'appellerai M. le ministre sur le terrain et je le défie de ne pas dire que j'ai cinquante fois raison.

Il y a maintenant un travail qui va commencer. J'appelle la sérieuse attention de M. le ministre des travaux publics sur les ajoutes qui fatalement devront se faire. On a examiné la question de l'approfondissement et de l'élargissement du canal de Terneuzen. Eh bien, il faut encore être ingénieur pour ne pas faire tout de suite les observations que j'aurai l'honneur de vous indiquer.

Il y a deux obstacles principaux qui s'opposent au désir, énergiquement formulé par l'administration communale de la ville de Gand et par M. de Maere, alors membre de la Chambre, par la chambre de commerce, je dirai plus, par tout le commerce de Gand représenté par ses mandataires les plus compétents.

Il y a deux obstacles qui s'opposent à l'achèvement complet de ce travail, qui est pour nous une question d'être ou de ne pas être, « to be or not to be. »

La ville de Gand, si elle n'a pas son accès vers la mer, est définitivement condamné, et son industrie doit déloger.

Nous avons fait pendant des siècles des efforts pour arriver à la mer. C'est ainsi que, quand le port de Darame (M. le ministre de l'intérieur pourrait, à cet égard, nous en dire plus long), était un port de mer, lorsque le roi de France y arrivait avec ses trois cents navires, les Gantois se créèrent une voie vers la mer par Damme.

Lorsque ce port s'est obstrué, lorsque les ensablements ont eu lieu, Gand a creusé immédiatement le canal de Bruges à Ostende. Cette voie navigable vers la mer du Nord a été, dans les derniers temps surtout, bien tristement et bien incomplètement entretenue. Si j'avais devant moi le ministère qui a conçu et fait exécuter cette œuvre, je lui infligerais un blâme bien sévère. Ce que l'on a fait - qu'on me permette l'expression - c'est jeter de l'argent à l'eau.

Les études n'étaient pas faites convenablement. J'ai indiqué moi-même en pleine chambre des travaux exécutés d'une manière enfantine.

Il fallait faire passer un ruisseau par siphon sous le canal de Bruges. Il y avait un siphon maçonné. On décrète que le siphon doit disparaître. C'était assez logique, parce qu'il fallait abaisser le plafond du canal.

On a décrété alors un siphon en planches. Je suis allé voir, parce que quand je critique une œuvre d'art, je me donne la peine d'aller voir. On a trouvé qu'on avait mal calculé et qu'on ne pouvait placer les planches à la profondeur voulue.

Qu'a-t-on fait alors ? On a coupé le siphon par le haut, de façon que s'il y avait une crue extraordinaire, toute la rive gauche pourrait être inondée.

Deux obstacles se présentent contre l'aménagement efficace du canal de Gand à Terneuzen ; c'est d'abord l'écluse de navigation de Gand.

Là encore on a fait des merveilles.

Depuis 1827 on avait défendu de bâtir sur un espace de terrain s'étendant le long de l'écluse de la porte du Sas, à partir de la porte du Sas vers le canal. On ne pouvait pas même déposer des briques sur cette lisière.

Maintenant, et quand le terrain devait rester à l'Etat, on l'a aliéné et des maisons y ont été bâties, de façon que si on voulait l'utiliser, il faudrait l'exproprier. Or, dans de certaines éventualités, ce terrain pourrait être précieux. Mais passons pour le moment, sous réserve de revenir sur la question.

Il est une autre mesure que j'indique à la sollicitude de M. le ministre. Près de la place de l'Industrie, il y a de nombreux établissements industriels.

D'abord, celui de MM. Parmentier et Van Hoegaerden, dans lequel est intéressé, si je me trompe, M. De Rongé, notre ancien et excellent collègue de la députation de Bruxelles.

La fabrique de MM. Parmentier et Cie est une usine de premier ordre ; tout près de là se trouvent les établissements de MM. De Vos, la Lieve, une sucrerie en construction, etc., etc. A côté et derrière ces établissements, vous trouvez une suite de prairies qui à cette heure n'ont relativement que peu de valeur, qui ne valent que comme terrains agricoles. Eh bien, attendez pendant un an et, le chemin de fer de ceinture aidant, l'industrie aura fait invasion sur ce terrain. Prenez donc immédiatement vos mesures, expropriez par zone, et non seulement vous pourrez établir des bassins convenables à peu de frais, mais ces bassins vous seront payés par la valeur des terrains que vous aurez expropriés en vertu de la loi sur l'expropriation par zone.

Cela devient d'autant plus indispensable que notre dock, en ce moment, représente le tohu bohu le plus accentué. Je me suis encore piloté hier à travers les waggons qui inondent la station et je ne m'explique pas comment les malheurs ne s'y succèdent pas tous les jours ; il faut que le chef de station soit bien intelligent et bien servi par son personnel.

Depuis la plaine d'exercice jusqu'à l'entrepôt il y a deux voies ; sur ces voies stationnent tous les waggons qui apportent le charbon à plusieurs de nos établissements. Vous savez ce que consomment ces usines. J'ai demandé à MM. Parmentier et Van Hoegaerden combien de waggons ils recevaient par jour.

Ils en reçoivent cinq par jour ; la Linière gantoise, je pense, en reçoit également cinq par jour ; ajoutez les autres, et calculez : tout échange quelconque entre les convois qui arrivent de l'entrepôt et ceux qui partent de la station de l'Etat, est impossible puisqu'il n'y a pas de voie d'évitement.

Le gouvernement nous dit : Contourner l'entrepôt, c'est trop dangereux. Il y a une voie qui contourne l'entrepôt, elle est éloignée du bâtiment comme d'ici au parc ; eh bien, sous prétexte de sécurité publique, on empêche de laisser là circuler les locomotives. Mais qu'est-ce que vos gares ? Ce sont des entrepôts.

Remarquez bien que je ne demande pas que les locomotives circulent sous le hangar de l'entrepôt, mais qu'elles fassent un cercle autour. Eh bien que nous répond-on ? Nous n'avons pas de personnel, nous n'avons pas d'excentriques. Cette question peut être vidée en un instant ; l'industrie privée demande à faire elle-même le chemin de fer de prolongement de ces voies.

J'ai ici et je suis chargé de remettre une demande à M. le ministre des travaux publics de MM. Parmentier, Van Hoegaerden et Desmet. Ce sont des sommités industrielles de la Flandre ; ils demandent à pouvoir créer à leurs frais un chemin de fer américain qui ne produirait certes pas plus de malheurs que le chemin de fer américain de la rue Royale.

- Un membre. - Moins.

M. de Baets. - Moins, parce que les charbons ne sont pas aussi pressés d'arriver que les voyageurs.

On dégagerait par ce travail notre dock et notre entrepôt et on rendrait des services incalculables à l'industrie.

Cinq waggons par jour pendant les six jours ouvrables, cela fait trente ; multipliez par le nombre des établissements et concluez.

(page 319) J'aborde un autre point qui se rattache au canal de Terneuzen ; et ici je dois demander pardon à M. le ministre de l'intérieur parce que je chasse sur un terrain sur lequel mon droit pourrait être contesté. Je veux, en effet, parler d'un hameau qui dépend de la commune d'Ertvelde et, par conséquent, du district d'Eecloo ; mais comme je m'occupe d'une question d'intérêt général, qui touche à tout le régime du canal de Terneuzen, je crois ne pas abuser de mon droit en touchant un point particulier qui concerne une localité du district d'Eecloo, dont l'honorable ministre défend les intérêts avec une louable persistance.

Depuis un certain temps, nous avons un service de remorqueurs qui traînent les navires de Gand vers Terneuzen, au moyen du louage. Or, il se fait qu'on rencontre des convois composés d'un grand nombre de navires.

J'ai vu, pour ma part, à la remorque d'un bateau à vapeur, un trois-mâts, suivi d'un baquet wallon, de bateaux d'Anvers, de Louvain, etc. ; ce sont de véritables convois de navires. Un des plus grands inconvénients que rencontre la navigation, c'est la non-existence sur toute la longueur du canal de ce que j'appellerai une voie d'évitement. A défaut de cette voie d'évitement, ces convois, qui comptent parfois douze, treize et jusqu'à quatorze bateaux, causent des difficultés inextricables au passage des autres bateaux allant en sens inverse. De temps en temps, - c'est le seul agrément que cela me procure, - j'ai l'avantage de plaider contre des bateaux à vapeur qui ont fait sombrer d'autres navires qui ont le malheur de se trouver sur leur passage. J'ajoute qu'avec la meilleure volonté du monde, il est absolument impossible aux conducteurs de bateaux remorqueurs de prévenir tous les accidents.

Eh bien, je demande au gouvernement une voie d'évitement, ou plutôt, je lui demande de nous laisser la voie d'évitement qui existe. Il est question, paraît-il, de substituer à l'arc que décrit le canal de Terneuzen, la corde de cet arc. Or, sur tout le parcours de l'arc, il s'élève des établissements industriels et commerciaux de premier ordre qui cachent, sous leur modestie toute flamande, une solidité et une honnêteté à toute épreuve.

C'est là, du reste, le tort qu'on trop souvent les Flamands ; et je crois que s'ils avaient des allures un peu plus orgueilleuses, l'honorable M. Pirmez et d'autres ne viendraient pas nous parler à chaque instant du paysan des Flandres. Car enfin, quand je vois mes collègues des Flandres nous comparer à d'autres, je constate que nous ne sommes pas plus bêtes qu'eux.

Je dis donc qu'il y a à Ertvelde des établissements de premier ordre ; j'y connais des maisons qui font des affaires pour des millions. Or, si vous supprimez l'ancien canal, vous supprimez ce quartier commercial. Cela n'est pas possible.

La rectification aurait pour conséquence immédiate et inévitable la suppression entière de ce hameau.

D'un autre côté, si vous supprimez le canal qui existe, vous devez le combler ; mais ne le comblez pas, laissez-le ; et ce sera la voie d'évitement, et elle est indispensable. Cela ne vous coûtera rien ou peu de chose. Vous ne froisserez aucun intérêt, pas même des lapins sauvages qui habitent les sapinières de la rive droite.

Le gouvernement commettrait une faute énorme, s'il laissait supprimer cette branche du canal de Terneuzen.

Je demande pardon à la Chambre de l'occuper si longtemps, mais je suis obligé de dire une fois pour toutes : « Voilà ce que vous avez à faire ; voilà ce qu'on réclame à cor et à cri ; cela coûtera très peu, et vous ne ferez que redresser des passe-droits qui sont inqualifiables. »

Je n'ai plus qu'un seul point à traiter. Et ici encore je me rencontre en communauté d'intérêts avec les députés d'autres provinces.

Vous savez tous, messieurs, que le moindre souci du gouvernement autrichien était de sauvegarder les intérêts des provinces belges.

Quand on n'est pas près du soleil, on ne se chauffe pas ; et comme le soleil était à 300 lieues de nous, nous n'en éprouvions nullement l'influence bienfaisante. M. le bourgmestre d'Ostende pourra puiser dans les archives de sa ville une preuve de ce que j'avance.

Je fais allusion à la compagnie d'Ostende. Joseph II a eu un instant la volonté de nous faire secouer la torpeur mercantile ; et dans ce but, il autorisa la création de la compagnie d'Ostende.

Cette institution devait nous procurer de magnifiques débouchés pour l'industrie des Flandres ; mais, sur les réclamations de l'Angleterre et d'autres pays, on a supprimé purement et simplement la compagnie, c'est-à-dire qu'on a bouché le port d'Ostende.

Heureusement, la ville d'Ostende, sous un autre régime et d'autres idées, trouve maintenant un défenseur infatigable de ses intérêts, qui ne se contente pas de les soutenir à cette tribune, mais qui profile de toutes les occasions qui lui sont offertes souvent pour les plaider également devant les représentants des autres nations.

Il est résulté de l'état de choses que je signalais, deux faits : c'est la suppression complète de l'écoulement des eaux vers la mer ; j'en appelle à l'honorable M. Vleminckx ; l'honorable membre a donné tant de preuves de sympathie pour les habitants des polders, que je fais avec confiance un appel à son expérience personnelle.

Ce qu'il nous faut dans le nord des Flandres, c'est qu'on nous débarrasse de nos eaux ; le gouvernement a fait un premier pas en décrétant le canal de Heyst à Selzaete. Eh bien, j'ai pu constater que les terres dans la commune de Saint-Laurent ont doublé de valeur et que les médecins y délivrent maintenant par grains le sulfate de quinine, alors qu'ils le délivraient autrefois par kilog.

Je demande que l'on complète l'œuvre entamée par l'honorable M. Van Hoorebeke. Je donnerai les indications nécessaires à M. le ministre des travaux publics ; il faudrait, encore une fois, être ingénieur pour ne pas les comprendre.

A une lieue de Gand, vous avez un hameau très important qui s'appelle Langerbrugge, sur le canal de Terneuzen.

A cet endroit se détache du canal une rivière parfaitement navigable qui traverse une des plus jolies vallées de la Flandre, passe à côté du village d'Evergem, qui compte 7,000 habitants. Ce canal est navigable jusqu'à ce village ; il serait parfaitement navigable jusqu'à son extrémité, mais là il vient se heurter contre la berge du canal de Bruges, sous lequel il passe avec la Lieve, au moyen d'un siphon. Etablissez une éclusette et vous aurez de suite une voie navigable, qui est d'une importance majeure.

Au même hameau de Langerbrugge, et je demande encore pardon à M. le ministre de l'intérieur d'entrer dans son domaine...

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Je vous en remercie.

M. Bouvier. - Vous vous entendez.

M. de Baets. - Si je recevais les remerciements de l'honorable M. De Fré...

- Un membre. - C'est M. Bouvier.

M. le président. - N'interrompez pas, je vous prie.

M. de Baets. - J'avais, en effet, oublié que M. Bouvier est l'interrupteur perpétuel et qu'il a acquis la prescription.

En partant de Langerbrugge, si vous vous dirigez vers le nord, vous avez un canal parfaitement navigable et qui tout d'un coup s'arrête au village d'Ertvelde. Autrefois il contournait ce village et allait déverser les eaux du pays dans l'Escaut. Pourquoi ne pourrait-on pas rétablir ce prolongement ?

Il suffirait pour cela d'un travail insignifiant ; le résultat serait de nous débarrasser des eaux fétides et de la fièvre et de créer une nouvelle voie de navigation très importante.

Une autre branche du Burggraven-Stroom fait une perpendiculaire sur ce canal à Terdonck. Ce bras a été supprimé vers 1780 comme voie de navigation par la création de la voie militaire de Gand à Ostende, entre le village de Waarschoot et la ville d'Eecloo ; on a coupé le canal par la construction d'un aqueduc qui permet encore l'évacuation des eaux, mais qui rend la rivière non navigable.

Enlevez ce barrage et quelques autres petits obstacles, mettez le Burggraven-Stroom en communication avec le canal d'Eecloo, immédiatement vous obtenez une voie navigable entre Bruges et Anvers, non pas pour la grande navigation, mais pour la petite navigation intérieure.

En effet, le canal de Bruges, celui de Schipdonck seraient reliés au canal de Terneuzen, au Sloervaart, à la Durme et à l'Escaut. Vous trouvez, si je ne me trompe, dans Sanderus la trace que ce canal était autrefois navigable pour les navires à voiles. Ces travaux auront pour résultat immédiat :

1° L'assainissement des polders ;

2° La transformation complète de la zone de sapinières qui s'étend entre Oost-Eecloo, SIeydinge, Lembeke, Waarschoot et Eecloo. Toute cette contrée recevrait à bon compte les matériaux de construction, le charbon et les engrais, et exporterait dans de bonnes conditions ses sapins, pour l'étançonnement des mines du Hainaut.

Je finis, messieurs, en faisant une simple recommandation à M. le ministre des travaux publics pour une mesure transitoire et provisoire.

On demande à Gand la construction d'un chemin de fer américain contournant l'entrepôt jusqu'à l'établissement de M. Carels et allant jusqu'à la place de l'Industrie, près du Tolhuis. Ce travail se ferait sans frais pour le gouvernement et pour la ville. Il serait d'une importance considérable. (page 320) J'espère que M. le ministre reviendra sur la décision qu'il a prise à la suite de l'instruction à laquelle son département s'est livré.

Il s'agit, je le répète, d'un travail qui ne coûterait rien ni à l'Etat ni à la ville. La voie existe jusqu'à l'établissement de M. Carels, il s'agit de la prolonger, de dégager le dock et d'amener la houille jusque près de plusieurs de nos grands établissements industriels.

M. Thonissen. - Messieurs, dans son discours, l'honorable M. de Baets a dit quelques mots de la citadelle de Gand.

Quand, il y a bien longtemps déjà, l'honorable général Renard est venu annoncer que le gouvernement avait l'intention de faire démolir la citadelle de Gand, j'ai combattu cette mesure, en prouvant que, dans l'état actuel des choses, cette citadelle est le seul ouvrage défensif existant sur la rive gauche de l'Escaut.

En effet, l'honorable M. de Baets a tort de supposer que la citadelle de Gand ne pourrait résister que pendant deux ou trois heures. C'est un ouvrage modèle, construit suivant toutes les règles de la science, à tel point qu'il figure, comme exemple, dans plusieurs livres qui s'occupent de la défense des places.

Quoi qu'il en soit, l'honorable général Renard me répondit que j'oubliais deux choses. Nous allons, me disait-il, établir, sur la rive gauche de l'Escaut, une tête de pont fortifiée à Termonde, et nous allons créer, en avant d'Anvers, également sur la rive gauche, deux forts reliés par une digue défensive. L'honorable général ajouta que la citadelle de Gand ne serait démolie qu'à l'époque où ces travaux auraient été exécutés. En un mot, la citadelle de Gand ne devait disparaître que le jour où l'on aurait établi de nouveaux moyens de défense sur la rive gauche de l'Escaut.

Il est vrai que, plus tard, un peu avant les élections, une loi fut présentée, donnant au gouvernement le droit pur et simple de vendre et de faire démolir la citadelle de Gand. J'ai reproduit alors mes observations. On n'y a pas répondu, d'où j'ai conclu que l'intention du ministère était toujours de ne pas démolir immédiatement la citadelle de Gand.

Aujourd'hui, le gouvernement a incontestablement le droit de faire la démolition, car la loi est conçue en termes généraux. Mais j'engage le gouvernement, avant de prendre cette mesure, de se concerter avec le chef du département de la guerre, pour voir si les travaux commencés sur la rive gauche de l'Escaut sont assez avancés pour qu'on puisse faire disparaître la citadelle sans compromettre la défense nationale.

C'est la seule observation que j'avais à présenter.

M. Jacobs, ministre des finances. - Messieurs, je veux écarter du débat l'affaire de la citadelle de Gand. Après cela, M. le ministre des travaux publics pourra répondre aux nombreuses considérations que comprend le discours de l'honorable M. de Baets.

Il a été conclu, par rapport à la cession de la citadelle de Gand, une convention sons seing privé entre le département des finances et la ville de Gand, à la date du 25 avril dernier. Cette convention ne fixe pas la date à laquelle la démolition commencera, ou du moins ne la fixe pas d'une manière absolue ; car l'article 3 est ainsi conçu : « Les travaux qui seront jugés nécessaires par le département de la guerre pour mettre la citadelle hors d'état de défense seront exécutés par la ville et à ses frais, dans le délai de trois mois après la mise en possession. » La date de la mise en possession ne se trouve pas fixée par la loi.

Cette convention est devenue loi, et d'après ses termes mêmes, un acte authentique doit réaliser la convention sous seing privé.

La loi est du 31 mai. On y a donné suite immédiatement.

L'administration de la guerre s'est mise en rapport avec l'administration des finances pour que la citadelle de Gand passât du domaine militaire dans le domaine ordinaire de l'Etat. La remise a été effectuée le 9 juillet.

Aussitôt le receveur des domaines de Gand en a averti l'administration communale, mais sur ces entrefaites la guerre a éclaté et, à la date du 20 juillet, l'administration communale de Gand a adressé au receveur la lettre suivante :

« Gand, le 20 juillet 1870.

« Monsieur le receveur,

« En réponse à votre lettre du 14, nous avons l'honneur de vous informer que l'administration communale est prête à réaliser par acte authentique la convention conclue avec le gouvernement pour la cession des terrains et bâtiments de la citadelle.

« Avant de fixer jour et heure à cet effet, nous venons vous prier de vouloir nous faire connaître si, en présence des événements extérieurs, votre administration peut mettre la ville en possession de la citadelle dont elle devra commencer immédiatement le démantèlement conformément aux instructions reçues le 13 de ce mois du département de la guerre.

« Agréez, etc. »

L'administration communale de Gand, comme le département des finances, comme le département de la guerre, a compris que les événements extérieurs étaient de nature à faire ajourner le démantèlement et la passation du contrat authentique. Nous en avons référé naturellement au département de la guerre qui a jugé nécessaire de surseoir dans l'intérêt de la défense.

Ainsi donc la convention est irrévocable, l'acte authentique sera passé. Mais la loi n'ayant pas fixé de date de la mise en possession, nous sommes restés juges de l'heure.

Nous avons l'espoir que d'ici à peu nous pourrons exécuter cette convention qui, pour nous, est irrévocable ; M. le ministre de la guerre m'a même autorisé à déclarer aux députés de Gand que dès à présent il ne met pas d'obstacle à ce que la partie du glacis qui regarde la ville de Gand, qui s'étend entre elle et la citadelle, soit nivelée si elle peut utilement l'être par la ville.

Si donc la ville de Gand, pour donner du travail à la classe ouvrière, désire entamer ce démantèlement partiel, elle le pourra, mais aller au delà, pour le moment, serait dangereux, au jugement des autorités militaires.

Je puis rassurer l'honorable M. Thonissen ; le département de la guerre, tout en désirant conserver les éléments de défense dont il dispose en ce moment, ne voit pas d'inconvénients aux concessions que je viens d'indiquer.

M. Kervyn de Volkaersbeke. - Je remercie l'honorable ministre des finances des explications qu'il vient de donner. La démolition de la citadelle de Gand a été demandée à plusieurs reprises. Je l'ai réclamée dans cette enceinte il y a quelques années, avec mon honorable collègue, M. de Baets ; aujourd'hui nous allons probablement voir accomplir le vœu des habitants de Gand et je remercie l'honorable ministre de l'assurance qu'il vient de nous donner que la démolition de la citadelle de Gand aura lieu prochainement.

Puisque j'ai la parole, j'appuie les observations présentées par l'honorable M. de Baets. Les travaux qu'il a indiqués sont d'une haute importance et j'espère que le gouvernement ne tardera pas à mettre la main à l'œuvre. Il importe surtout que la ville de Gand sache si bientôt le chemin de fer de ceinture et les travaux du canal de Terneuzen seront entrepris. Je recommande spécialement ces travaux à l'attention du gouvernement.

M. Wasseige, ministre des travaux publics. - Messieurs, la Chambre ne s'attend pas, j'en suis convaincu, à ce que je suive l'honorable M. de Baets dans la longue mais parfaitement patriotique dissertation qu'il vous a faite.

Je n'ai pas à apprécier les lois votées avant mon entrée au ministère ; je n'ai qu'à les exécuter et je le ferai dans la mesure du possible.

Quant aux dispositions législatives que l'honorable membre a critiquées, elles ont été décrétées sous mes prédécesseurs, à qui je laisse le soin de répondre à l'attaque dont elles ont été l'objet, s'ils le jugent convenable.

Je dois dire cependant que je trouve mon honorable collègue et ami un peu dur, quelque peu injuste, et pour les fonctionnaires du département des travaux publics et pour les membres du corps des ponts et chaussées.

Les fonctionnaires du département des travaux publics sont connus pour être des hommes intelligents et capables ; l'opinion favorable que je m'étais, dès longtemps, formée sur leur compte ne fait que se fortifier tous les jours depuis que je les vois de plus près à l'œuvre.

Quant au corps des ponts et chaussées, sa réputation est faite, non seulement en Belgique, mais aussi à l'étranger, où ce corps nous fait honneur.

Dans les questions qui ont été traitées par l'honorable de M. de Baets, fonctionnaires et ingénieurs n'ont eu qu'à exécuter les ordres du chef du département.

Le ministre seul est responsable. Quant à moi, c'est ainsi que je comprends ma mission et j'accepterai, pour moi seul les reproches qui pourront être adressés à mon administration du chef des actes qu'elle pourra poser tant que j'aurai l'honneur de la diriger.

Je suis persuadé que mes honorables prédécesseurs pensent comme moi.

Maintenant, je répondrai brièvement à l'honorable M. de Baets.

Il a été décidé qu'un chemin de fer de ceinture serait établi à Gand.

Un crédit de 4,000,000 de francs a été voté pour cet objet. Cette somme se trouve actuellement absorbée ou peu s'en faut et, d'après les conditions du cahier des charges, le chemin de fer devra être exécuté dans un délai assez rapproché.

Il est à peu prés décidé que deux stations seront créées sur le parcours (page 321) de la nouvelle voie à construire : une station de marchandises à l'endroit dit : le Ribot, et une station à la porte de Bruges.

Mais, dit l'honorable M, de Baets, il y a lieu de prolonger ce chemin de fer de manière à envelopper parfaitement la ville. C'est là, messieurs, une question que j'examinerai avec la plus grande bienveillance.

Je ferai cependant observer que, contrairement à la définition de l'honorable membre, les chemins de ceinture ne décrivent pas toujours une circonférence bien fermée ; il arrive, au contraire, qu'ils ne font pas tout le tour de la ville auprès de laquelle on les établit. A Bruxelles, par exemple, le chemin de fer de ceinture est interrompu depuis la station du Luxembourg jusqu'à celle du Midi.

Certes, et je me hâte de le faire remarquer, ce n'est pas une raison pour que l'on fasse de même à. Gand ; aussi j'aime à répéter que j'étudierai la question avec la plus sérieuse attention.

Je prends volontiers un engagement identique pour le canal de jonction entre le haut Escaut et le bas Escaut, ainsi que pour l'agrandissement des bassins de Gand.

Mais notre honorable collègue me permettra de lui opposer ce qu'il rappelait tout à l'heure : Administrer, c'est prévoir ; car, si cela est vrai, il faut prévoir les voies et moyens avant de décréter les dépenses qu'ils doivent couvrir.

Les points signalés ne resteront pas dans l'oubli et l'honorable membre peut être certain que ses observations ne seront pas perdues de vue dans l'élaboration de la première loi de travaux publics que j'aurai l'honneur de présenter à la Chambre.

Au reste, je me rendrai volontiers avec lui sur le terrain et je suis persuadé que de notre rencontre il ne résultera rien que de très utile pour l'arrondissement qu'il représente avec tant de talent et dont il défend si bien les intérêts.

Je dois ajouter toutefois que je ne me contente pas de lui donner ce qu'il appellera peut-être, quoique à tort, de l'eau bénite de cour. Je veux, au contraire, lui faire part, dès à présent, de deux nouvelles qui, j'en suis sûr, lui procureront une grande satisfaction.

Je veux parler, en premier lieu, de mon vif désir de fixer, sans plus attendre, ma résolution quant à la voie de raccordement avec certaines fabriques et notamment avec celle de MM. Parmentier et Van Hoegaerden.

J'ai reçu la visite de notre ancien collègue M. de Rongé, je me suis entretenu avec lui ; l'exposé qu'il m'a fait m'avait rendu très sympathique au projet ; les observations qui viennent d'être présentées par M. de Baets hâteront une décision qui, dès ce moment, est à peu près arrêtée.

J'apprendrai à M. de Baets une autre nouvelle, qui lui fera également plaisir.

Les travaux à exécuter pour l'amélioration du canal de Gand à Terneuzen doivent, au préalable, faire l'objet des délibérations d'une commission internationale composée de délégués du gouvernement belge et de délégués du gouvernement néerlandais.

Mais certains ouvrages pouvaient être faits, quelle que dût être ultérieurement la conclusion de ces délibérations. Aussi a-t-il été adjugé une première entreprise ayant pour objet les travaux de redressement, d'élargissement et d'approfondissement à exécuter entre le pont du chemin de fer de Gand à Eecloo et celui de Langerbrugge, ainsi que dans la traverse de Rieme, en vue de redresser des courbes trop brusques et de donner au canal une largeur de plafond de 7 mètres avec une profondeur d'eau de 6 mètres 50 centimètres sous la flottaison réglementaire. Ces travaux comportent une dépense de 1,250,000 francs environ et comprennent particulièrement une coupure à faire à Rieme. Je suis d'ailleurs décidé à prescrire ce que sollicite l'honorable membre, c'est-à-dire à laisser subsister l'ancien canal pour servir à la voie d'évitement qu'il réclame,

Ces deux bonnes nouvelles engageront, sans aucun doute, l'honorable membre à prendre patience et je ne puis mieux terminer qu'en lui disant, en outre, que l'attente ne sera pas longue ; j'en ai, du moins, l'espoir.

M. de Baets. - Je remercie les honorables ministres des déclarations qu'ils viennent de faire. J'étais sûr que puisque je ne demandais que des choses raisonnables, j'aurais rencontré le concours du gouvernement.

J'ai oublié un seul point et je le soumets à la bienveillante attention de M. le ministre des affaires étrangères. Je disais qu'il y avait un obstacle dans le canal de Terneuzen : c'était l'écluse de Gand. Cet obstacle peut être supprimé en creusant des bassins en aval de la ville. Il y en a un autre : l'écluse du Sas de Gand.

Or, pour la solution de cette question, il y a un moyen d'une simplicité primordiale ; laisser le canal dans la traverse du Sas de Gand comme il est, la Hollande a besoin de celle écluse pour se défendre contre les inondations possibles, mais il y a une voie tracée, elle a même été indiquée par le gouvernement néerlandais. Faites un canal autour du sas ; ou plutôt achevez celui qui y est, l'ancien prolongement du golfe qui s'appelait Sassche Gat et qui laisse une grande Kille dans le Canisvliet. M. Van Overloop, qui connaît si bien ces parages, me fait un signe d'assentiment. Il comprend la portée pratique de mes observations, et le gouvernement hollandais ne demande pas mieux et n'exigera qu'une écluse de garde. De cette manière vous ne troublez rien, vous conservez le canal dans la traverse du sas, et vous obtenez un canal spécial pour la grande navigation. Un travail analogue a été. fait à Bruges.

M. Jamar. - Je n'assistais pas à la séance lorsque l'honorable M. de Baets a commencé son discours, dans lequel, paraît-il, il a attaqué très vivement certains actes de mon administration et de celle de mon prédécesseur et ami, M. Vanderstichelen, qui n'est plus dans cette enceinte pour se défendre.

L'acte que j'ai entendu critiquer remonte à 1865 et la Chambre comprendra aisément que je n'ai plus les souvenirs assez précis pour répondre à l'honorable membre.

Je prie donc mon honorable successeur de vouloir bien mettre à ma disposition les dossiers des affaires dont M. de Baets a entretenu la Chambre et je puis donner, dès maintenant, à tous mes collègues l'assurance, que je prouverai à M. de Baets le peu de fondement des critiques qu'il a dirigées, soit contre mon administration, soit contre celle de mon prédécesseur.

Je démontrerai aisément, je l'espère, la légèreté de ses critiques quant au corps des ingénieurs des ponts et chaussées ou du chemin de fer, qui compte dans son sein infiniment d'hommes distingués dont les services méritent mieux que les dédains de l'honorable député de Gand.

M. d'Anethan, ministre des affaires étrangères. - Je n'ai qu'un mot à répondre à M. de Baets.

Comme mon collègue des travaux publics vous l'a dit tout à l'heure, le gouvernement néerlandais et le gouvernement belge sont convenus de nommer une commission qui aura pour mission d'examiner et d'indiquer les travaux à exécuter au canal de Terneuzen.

Cette commission n'est pas encore formée ; j'espère qu'elle pourra l'être incessamment, et qu'elle s'occupera sans délai de l'examen des différentes questions qui se rattachent non seulement aux travaux proprement dits d'amélioration du canal de Terneuzen ; mais encore aux travaux nécessaires pour assurer l'écoulement des eaux des Flandres.

Les observations présentées par l'honorable M. de Baets, les indications qu'il a données sur les travaux qu'il considère comme d'une incontestable utilité, seront nécessairement soumises par le gouvernement belge à l'appréciation de la commission mixte et je suis persuadé qu'elle y aura égard.

M. de Baetsù. - Je demande pardon à la Chambre de parler encore ; mais je ne puis pas accepter les deux substantifs que vient de m'adresser l'honorable M. Jamar, ancien ministre des travaux publics.

Si l'honorable M. Jamar m'avait entendu, il ne me ferait pas le reproche d'avoir parlé avec légèreté et avec dédain. L'honorable membre ne m'a pas entendu : il peut donc difficilement juger mes paroles.

M. Jamar. - J'ai fait allusion à ce que vous avez dit des ingénieurs de l'Etat.

M. de Baets - L'honorable M. Jamar devrait se rappeler qu'un jour il était attaqué, en son absence, dans cette Chambre par un de ses amis de la gauche et que le premier et seul ici j'ai pris sa défense. Je n'avais certes pas à donner de certificat à l'honorable M. Jamar ; tout le monde était d'accord avec moi sur ce point que le député faisait trop preuve d'intelligence dans cette Chambre pour que, président du tribunal de commerce, il aurait agi avec dédain et légèreté.

Je n'ai articulé aucun reproche ni contre l'honorable M. Jamar, ni contre l'honorable M. Vanderstichelen. Je sais parfaitement bien le contraire : j'ai rendu hommage à leur zèle et à leur intelligence, j'en appelle à ceux qui m'ont entendu.

- Voix à droite. - C'est très vrai !

M. de Baets. - J'en appelle à ceux qui m'ont entendu à droite et à gauche.

M. Vandenpeereboom. - Et les actes ?

M. de Baets. - Oh ! vous savez bien que j'ai eu l'occasion de critiquer votre administration, mais que jamais je n'ai critiqué votre personne, parce que je connais la noblesse de vos sentiments et la sincérité de vos intentions.

Mais un ministre a son état-major et il assume la responsabilité des (page 322) actes de ses fonctionnaires ; ce qui expose le meilleur des ministres à faire des actes sujet à critique, sans qu'il en soit l'auteur.

Maintenant je suis prêt à retirer mes observations si l'on pouvait y voir la moindre intention de blâme personnel à l'égard des honorables MM. Vanderstichelen et Jamar. Cela n'est ni dans mes intentions ni dans mes paroles. J'ai critiqué des actes, j'en ai le droit et le devoir, mais dans mes critiques j'ai mis des réserves parce que, en définitive, je ne suis pas ministre des travaux publics ; je ne suis qu'un simple député et je suis obligé de raccrocher à droite ou à gauche les pièces dont j'ai besoin pour établir mes appréciations. Ce n'est pas pour le plaisir de critiquer que je critique et je serai le premier à me déclarer satisfait si l'on peut justifier que mes critiques ne sont pas fondées.

M. De Lehaye. - Lors de la discussion du budget des voies et moyens, j'avais appelé l'attention du gouvernement sur les péages du canal de Terneuzen. M. le ministre alors nous avait promis que, dans les négociations avec le gouvernement hollandais, cette question serait examinée d'une manière approfondie.

Je demanderai à l'honorable ministre des affaires étrangères s'il a déjà reçu une réponse relativement à la question des péages comme il en a reçu une au sujet de la question de l'approfondissement du canal.

M. d'Anethan, ministre des affaires étrangères. - La question des péages sur le canal de Terneuzen est une question pendante depuis 1867, à la suite de la loi du 5 juillet 1865, je pense, qui a accordé au gouvernement le droit de modifier les péages sur les canaux et les rivières.

Le gouvernement belge s'est adressé au gouvernement des Pays-Bas pour conclure une convention qui permît de modifier les péages sur le canal de Terneuzen, péages qui ont été fixés par une convention de 1842 ou 1843, et qui ont été réduits une première fois par le traité de commerce de 1821.

A la suite d'une correspondance quelque peu prolongée, le gouvernement belge a communiqué à celui des Pays-Bas les bases de la réduction qu'il désirait introduire dans les péages perçus sur ce canal.

Le gouvernement des Pays-Bas a répondu qu'il adoptait en principe les propositions du gouvernement belge, sous la réserve que les réductions ne seraient pas trop fortes et ne porteraient pas un préjudice notable aux finances néerlandaises.

Voilà où en était l'affaire, lorsque le ministère actuel s'est constitué. Depuis, nous avons adressé de nouvelles demandes au gouvernement des Pays-Bas pour obtenir de lui une réponse définitive relativement aux propositions qui lui avaient été soumises par l'ancien ministère.

J'ai reçu, ce matin même, un télégramme de La Haye dans lequel on m'annonce que le gouvernement des Pays-Bas s'occupe en ce moment de l'élaboration d'une loi générale, analogue probablement à la loi belge de 1865 ; et qu'il désire attendre la fin de ce travail avant de' répondre d'une manière définitive à nos propositions.

La Chambre peut être convaincue que le gouvernement ne perdra pas de vue cette importante affaire, car il apprécie comme les honorables préopinants l'intérêt qui s'attache à cette question ; aussi, j'espère que je pourrai bientôt annoncer la solution de cette question dans le sens d'une réduction notable de péages sur le canal de Terneuzen.

M. Jamar. - Messieurs, les deux mots que j'ai prononcés tout à' l'heure, légèreté et dédain, semblent avoir froissé l'honorable M. de Baets. Ils ne s'appliquaient nullement, dans ma pensée, aux critiques que l'honorable membre aurait pu diriger soit contre moi, soit contre l'honorable M. Vanderstichelen ; je pense que la Chambre aura parfaitement compris qu'il s'agissait uniquement de l'appréciation, faite par l'honorable M. de Baets, du mérite de nos ingénieurs.

L'honorable M. Wasseige a ressenti sur ce point la même impression que moi du discours de l'honorable M. de Baets.

L'honorable membre, comme il l'a rappelé tout à l'heure, m'a habitué à une grande courtoisie et rien n'était plus loin de ma pensée que de l'accuser d'avoir eu une intention blessante soit vis-à-vis de M. Vanderstichelen ou de moi-même.

Il a critiqué avec vivacité nos actes, c'était son droit. J'userai du mien en les défendant.

M. le président. - Personne ne demandant plus la parole, l'incident est clos.

Interpellation relative à la mise en œuvre de conventions faites avec la ville de Liège et relatives à l'instruction

M. le président. - L'ordre du jour appelle l'interpellation de M. d'Andrimont.

M. d'Andrimont. - Je demande à ne faire mon interpellation que demain.

M. De Lehaye. - Pourquoi pas aujourd'hui ? Il n'est que 4 heures et un quart.

M. Kervyn de Volkaersbeke. -Messieurs, si l'interpellation que l'honorable M. d'Andrimont nous a annoncée ne doit pas avoir lieu dans la séance d'aujourd'hui, je demanderai à l'honorable membre s'il ne lui convient pas de l'ajourner jusqu'à la discussion du budget de l'intérieur.

M. d'Andrimont. - Je ne crois pas pouvoir l'ajourner jusque-là ; l'affaire intéresse, non seulement la ville de Liège, mais le pays tout entier.

M. Kervyn de Volkaersbeke. - Vous n'attendriez pas longtemps, puisque le budget de l'intérieur est à l'ordre du jour.

M. De Lehaye. - Messieurs, la question que voulait soulever l'honorable député de Liège a été soulevée au sein de la section centrale par l'honorable M. Muller et, je dois le dire, M. Muller a défendu sa thèse avec beaucoup de chaleur et avec un véritable talent.

La question a été soumise au gouvernement et le gouvernement y a répondu. Aujourd'hui donc MM. les députés de Liège peuvent, me semble-t-il, attendre la discussion du budget, ils y verront la réponse aux questions qu'ils voulaient poser. Cette réponse, je le pense, les satisfera entièrement, le gouvernement ayant déclaré d'une manière positive qu'il était décidé à faire droit aux réclamations de la ville de Liège.

Or, je pense que les honorables députés de Liège ne peuvent pas réclamer davantage. Comme vient de le dire l'honorable M. Kervyn de Volkaersbeke, le budget de l'intérieur est à l'ordre du jour. Il sera probablement distribué dans le courant de la semaine. Les députés de Liège verront que leurs intérêts n'ont pas été perdus de vue.

Je propose donc que l'interpellation qui a été annoncée soit remise à la discussion du budget de l'intérieur.

M. Muller. - J'ai demandé la parole pour dire à la Chambre que c'est l'honorable ministre de l'intérieur lui-même qui tout à l'heure est venu nous demander s'il ne serait pas convenable, la séance étant déjà assez avancée, de remettre l'interpellation à demain.

M. d'Andrimont était d'accord avec M. le ministre et je ne comprends pas, qu'arrivés à la fin de la séance, l'interpellation ayant été acceptée comme devant être urgente, vous viendriez aujourd'hui, contrairement au vœu de M. le ministre et de mon collègue M. d'Andrimont, ajourner à la discussion du budget de l'intérieur une interpellation qui a dans notre opinion une importance considérable.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Messieurs, j'ai eu l'honneur de déclarer hier que j'étais prêt à répondre à l'interpellation qui était annoncée par M. d'Andrimont ; il me semble donc que cette interpellation ne peut pas être retirée de l'ordre du jour sans l'adhésion de l'honorable membre lui-même et c'est parce qu'elle a un caractère sérieux que tout à l'heure j'ai demandé, non pas sous forme de proposition, mais sous forme de simple entretien, s'il ne conviendrait pas de la remettre à demain.

M. Muller. - C'est cela.

M. le président. - Est-on d'accord pour remettre l'interpellation à demain ?

- Voix à droite. - Non ! non !

M. Bouvier. - Mais vous êtes plus ministériels, encore une fois, que le ministère lui-même.

M. De Lehaye. - Messieurs, je suis fort étonné de l'interruption de M. Bouvier. M. Bouvier nous reproche d'être plus ministériels que le ministère lui-même.

L'honorable membre peut être certain d'une chose : c'est que je ne pousserai jamais le ministérialisme au point où il l'a poussé lors de l'ancienne administration. En arrivant ici, messieurs, j'ai promis à mes amis, comme au pays, de rester fidèle à tous les sentiments que j'ai toujours exprimés dans cette enceinte. Quand le ministère libéral a proposé des mesures libérales et que ces mesures l'étaient réellement, je les ai appuyées, et je les appuierai encore.

Quand le ministère actuel, messieurs, nous proposera des mesures que ma conscience et mon honneur me défendront d'admettre, je les repousserai également. Je n'ai pas, messieurs, le bonheur qu'a M. Bouvier d'avoir une conscience qui se plie constamment aux exigences de mes amis politiques ; ma conscience à moi ne relève que de moi-même ; elle ne relève absolument que de l'idée de mon devoir et de la saine appréciation des choses.

Je prie l'honorable M. Bouvier d'être convaincu que ce reproche lui revient beaucoup plus qu'à moi.

On me reproche, messieurs, d'être plus ministériel que le ministère lui-même. Mais, messieurs, je le demande, depuis quelques jours n'avons-nous pas perdu beaucoup de temps déjà ? L'ordre du jour porte quelques (page 323) objets qui peuvent être discutés immédiatement, mais par des interpellations qui ne sont pas toujours conformes au règlement, on met obstacle à nos travaux et on nous empêche d'aborder l'ordre du jour.

Messieurs, j'ai eu le bonheur de partir d'ici avec un de mes honorables collègues du Congrès, dont le patriotisme et les services rendus au pays sont au-dessus de tout éloge, et nous nous disions qu'à cette époque nos travaux recevaient une impulsion plus grande et qu'il faudrait bien en revenir à ce système.

J'en reviens à l'interpellation de l'honorable député de Liège. De quoi s'agissait-il ? il s'agissait de savoir si le gouvernement prêterait la main à l'exécution de conventions faites avec la ville de Liège relativement à l'instruction.

Cette question a été soulevée avec talent, je le répète, par l'honorable M. Muller. Il suffit de deux minutes pour faire une pareille interpellation et pour qu'on y réponde. Pourquoi donc demander qu'elle soit remise à demain ?

Pourquoi ? Disons, messieurs, les choses comme elles sont, est-ce afin que nous perdions encore une grande partie de la séance de demain à ne rien faire ? C'est là la conséquence. Eh bien, à un pareil projet je m'oppose et je m'opposerai toujours et alors même que le ministère y prêterait les mains, je ne l'approuverais pas.

Je demande donc que cette interpellation soit remise à la discussion du budget de l'intérieur.

M. Bouvier. - On vient de me faire le reproche que j'étais très ministériel à l'époque où nous avions un cabinet libéral. Messieurs, je m'empresse de déclarer que j'ai voté toutes les lois où j'ai rencontré le caractère d'un libéralisme sincère, honnête et progressif et que je me suis séparé de lui,- que les nouveaux membres de la Chambre qui ne me connaissent pas le sachent bien - lorsque mes convictions m'en faisaient un devoir, et je puis invoquer à l'appui de mon assertion, entre autres circonstances, mon discours et mon vote à l'occasion de la loi sur le temporel des cultes.

J'ai prouvé, je pense, comme vous le pratiquez en ce moment encore, que je n'étais pas plus ministériel que le ministère lui-même. Je puis d'ailleurs me rendre ce témoignage que je n'ai jamais changé de conviction ni de drapeau ; que je suis toujours resté un franc libéral ; qu'en toutes occasions, je resterai libéral, et quels que soient les changements qui pourraient se manifester dans le pays, je ne trahirai jamais les convictions sincères que j'ai vouées au libéralisme sage et progressif.

M. d'Andrimont. - L'honorable M. De Le Haye s'est plaint de ce que la Chambre perdait son temps à discuter ce qu'il appelle des questions de détail.

M. De Lehaye. - Je n'ai pas parlé de questions de détail.

M. d'Andrimont. - Je ferai observer que ces sortes de questions n'ont pas été soulevées par des membres de l'opinion libérale, que c'est l'honorable M. Kervyn de Lettenhove qui a attaqué l'administration de l'honorable M. Pirmez et que l'honorable M. Pirmez a bien fait de se défendre. Je ferai remarquer également qu'aujourd'hui c'est l'honorable M. de Baets qui a parlé en faveur des intérêts de la ville de Gand et qui ne m'a pas permis de prendre la parole avant 4 heures et demie.

Je suis prêt à faire mon interpellation, mais, quoi qu'en dise l'honorable M. De Le Haye, elle aura une certaine étendue. Elle n'aura pas seulement trait à la non-exécution de l'école normale de Liège ; elle portera également sur des points qui intéressent le pays tout entier, je l'ai déjà dit. Cette interpellation provoquera une réponse de M. le ministre de l'intérieur, et comme j'ai tout lieu de croire que cette réponse ne me donnera pas une satisfaction complète, je serai obligé de reprendre la discussion. Ce n'est donc pas en une demi-heure que nous pourrons achever ce débat.

M. le président. - La parole est à M. de Theux.

- Des membres. - A demain !

MpdeNaeyerù. - Un moment, il s'agit d'abord de prendre une décision. (Interruption.) M. Vleminckxù. - Il y a eu décision.

M. le président. - Veuillez écouter ; c'est avec ces interruptions que nous n'arrivons à rien.

M. De Lehaye. - Je tiens à faire observer à la Chambre que nous nous écartons complètement de la voie qu'ont suivie les Chambres qui nous ont précédés. On n'attend pas la discussion d'un budget pour s'occuper des questions qui y sont relatives.

- Un membre. - Vous n'avez pas dit cela à M. de Baets.

M. le président. - Vous n'avez pas le droit d'interrompre. Observez donc le règlement, qui défend d'interrompre.

M. de Theux. - Je le dis à tous, amis et adversaires, si nous prenons l'habitude de discuter séparément une foule de questions qui regardent un département dans son ensemble, quant aux travaux publics, quant à l'instruction publique, quant à une autre matière, nous n'arriverons pas à faire nos budgets. C'est une manière d'agir que je ne puis jamais approuver.

Quels sont les intérêts les plus généraux dont la Chambre ait à s'occuper ? Evidemment, ce sont les budgets. Eh bien, les budgets ne se font pas. Comment veut-on qu'on les applique à temps ? On va encore demander des crédits provisoires.

Nous avons à l'ordre du jour deux objets d'un intérêt très général : un crédit pour les chemins vicinaux et un crédit pour les travaux publics ; je le demande, est-ce que le pays n'est pas bien plus intéressé à ce que ces lois soient votées qu'à ce que l'on distraie la question de l'école normale de Liège du budget de l'intérieur ?

Si l'on agissait ainsi, messieurs, noire session serait complètement infructueuse. Quant à moi, je n'en prends pas la responsabilité et j'appelle l'attention du pays sur cette manière de procéder.

M. Bouvier. - Le langage de l'honorable membre ne tend à rien moins qu'à supprimer le droit d'interpellation. Qu'avons-nous à l'ordre du jour ? Presque rien. Un projet de loi sur les chemins vicinaux, à l'égard duquel tout le monde est d'accord, qui ne donnera lieu à aucun discours.

L'interpellation de M. d'Andrimont intéresse au plus haut degré le pays.

Depuis l'avènement du ministère actuel, il a été agréé trois écoles normales, dirigées par des religieuses. Je dis que cette question est bien plus importante que celle de la voirie vicinale, sur laquelle il n'y a pas de discussion possible et qu'il est indispensable de renvoyer la discussion a demain, vu l'heure avancée où nous délibérons en ce moment.

M. Muller. - Je tiens à rappeler à la Chambre et à la majorité que, hier, l'interpellation a été acceptée par le gouvernement et je demande si, alors qu'il est 4 heures et demie passées et que l'auteur de l'interpellation déclare qu'il en a pour longtemps, vous pouvez rayer cette interpellation de l'ordre du jour de demain ? La majorité ne le fera pas, j'en suis convaincu, parce que ce serait un excès de sa part.

M. De Lehaye. - Mais vous oubliez donc que nous avons demandé que M. d'Andrimont fît immédiatement son interpellation et qu'il n'a pas voulu la faire !

Ce ne sont plus là des interpellations, quand on vous dit d'avance : « La réponse de M. le ministre ne me satisfera pas. »

Il faut donc que l'honorable membre ait conçu le projet d'entraîner la Chambre dans une très longue discussion.

Si vous faites une interpellation, vous devez avoir le désir qu'on vous réponde d'une manière convenable ; vous avez trop de respect pour la Chambre et pour vous-même, pour qu'il en soit autrement. Quiconque entreprend quelque chose désire aboutir. Vous dites : « La réponse du ministre ne me satisfera pas. » Quelle est la conséquence que nous devons en tirer ? C'est que vous avez l'intention de combattre le ministère, quelle que soit sa réponse. (Interruption.)

S'il n'en est pas ainsi, je ne sais plus quelle est la signification des mots.

Qu'ai-je demandé, messieurs ? C'est que l'honorable député de Liège fît son interpellation immédiatement après l'interpellation de M. de Baets et la réponse de MM. les ministres. M. d'Andrimont a déclaré qu'il ne la ferait pas aujourd'hui.

M. Vandenpeereboom. - Je ne comprends pas, en vérité, l'animation que l'on met, à droite, à vouloir empêcher l'honorable M. d'Andrimont de faire son interpellation ?

M. De Lehaye. - Nous avons demandé qu'il la fît.

M. Vandenpeereboom. - Voyez comme vous êtes calme ; j'ai à peine dit trois mots que vous m'interrompez.

Je suis étonné de voir l'animation de la droite et les efforts qu'elle fait pour empêcher l'honorable M. d'Andrimont d'adresser à M. le ministre de l'intérieur une interpellation que celui-ci accepte et désire lui-même voir fixer à demain.

On dirait, en vérité, que l'honorable M. d'Andrimont menace la Chambre de la tenir pendant plusieurs séances et l'on semble même contester que sa motion puisse présenter de l'intérêt.

Que savez-vous de ce qu'il dira ? Quant à moi je n'en sais rien et je suis curieux de l'entendre.

(page 324) Je demande que la droite se montre assez bienveillante et assez juste pour permettre à un membre de l'opposition d'adresser au gouvernement les questions qu'il juge utile de lui faire.

Je prie la majorité ministérielle de faire un retour sur elle-même et de se rappeler un peu ce qui s'est passé quand elle était minorité. J'ai le souvenir encore très frais qu'à cette époque on ne mettait pas de gants blancs (passez-moi le mot) pour interpeller les ministres.

On se gardait bien même de les prévenir. On les interpellait à bout portant et à l'improviste, à la façon des francs-tireurs.

On recommandait, au contraire, le secret et c'était souvent par un ami que nous parvenions indirectement à savoir que nous serions interpellés à jour et à heure fixe, à un moment où l'opposition tout entière serait réunie.

Je demande qu'on laisse à l'honorable M. d'Andrimont l'autorisation de faire son interpellation demain et à l'honorable ministre de l'intérieur l'autorisation d'y répondre.

En supposant, du reste, que vous voulussiez empêcher M. d'Andrimont de faire son interpellation, vous n'y réussiriez pas, car il pourrait demander la parole demain pour une motion d'ordre.

Vous demandez qu'il fasse ses observations à l'occasion de la discussion du budget de l'intérieur.

Soyez persuadés, messieurs, que nous aurons, à propos du budget de l'intérieur, un débat qui, j'ai tout lieu de le croire, ne manquera d'intérêt ni pour le ministère, ni pour la Chambre, ni pour le pays.

Permettez donc à l'honorable M. d'Andrimont de dégager dès maintenant une question.

Au surplus, c'est mon dernier mot, nous ne discuterons pas de sitôt le budget de l'intérieur. Il n'est ni imprimé ni distribué et je suppose que la minorité ministérielle n'exigera pas que nous abordions ce débat la veille du jour de notre entrée en vacances, car il est probable que la semaine prochaine, suivant les usages antiques et solennels, la Chambre entrera en vacances pour quinze jours ou trois semaines.

J'espère que la droite se montrera raisonnable et tolérante et qu'on nous permettra de lever la séance et de nous ajourner à demain.

M. Tack. - Je proteste contre l'idée qu'on prête à la droite de vouloir empêcher M. d'Andrimont de faire son interpellation ; cela n'est venu à l'idée de personne.

Qu'a voulu M. De Le Haye ? Ménager les. moments de la Chambre ; en engageant M. d'Andrimont à attendre la discussion du budget de l'intérieur, M. De Le Haye s'est appuyé sur cette considération très juste, c'est que déjà la réponse du ministre a été donnée à la section centrale et que M. d'Andrimont obtient satisfaction. Donc point de péril en la demeure ; et, par conséquent, qu'est-ce qui presse si fort ? Nous avons perdu une demi-heure en paroles inutiles. Puisque l'honorable député de Liège tient à ne pas remettre son interpellation, nous gagnerons du temps à ne pas prolonger ce débat et à ajourner l'interpellation à demain.

- Des voix. - A demain !

M. le président. - Est-on d'accord pour remettre l'interpellation de M. d'Andrimont à demain ?

- Voix nombreuses. - Oui, oui.

M. le président. - Il en sera donc ainsi.

Messieurs, d'après les renseignements qui m'ont été donnés, le projet qui figure en dernière ligne à notre ordre du jour présente un caractère d'urgence.

Je propose à la Chambre de le mettre en discussion immédiatement après l'interpellation de M. d'Andrimont.

- Adopté.

- La séance est levée à 4 heures trois quarts.