(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1866-1867)
(Présidence de (M. E. Vandenpeereboom.)
(page 125) M. Thienpont, secrétaire., procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.
M. Van Humbeeck, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est approuvée.
M. Thienpont,. présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur Dubois demande le rétablissement du train de Bruxelles pour Mons à 8 1/2 heures du soir, ou du moins qu'il y ait un train partant tous les dimanches de Bruxelles pour Mons vers 10 heures du soir. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Crucifix demande que le secrétaire communal de Jeneffe soit révoqué de ses fonctions ou du moins qu'on lui retire l'autorisation de cumuler les fonctions de receveur et de secrétaire communal. »
- Même renvoi.
« Le sieur Rousseau réclame l'intervention de la Chambre pour faire rentrer en Belgique son fils Joseph Prosper qui fait partie de la légion belge au Mexique. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Bouillon se plaignent des retards mis par la grande compagnie du Luxembourg à la construction de l'embranchement de Bastogne. »
- Même renvoi.
« L'administration communale de Spa prie la Chambre de renvoyer au gouvernement, pour examen détaillé des faits, la pétition de quelques habitants de cette ville ayant pour objet une enquête sur les frais de construction de l'hôtel des bains. »
- Même renvoi.
« Le sieur Dugauquier, appuyant le projet de loi qui permet aux pensionnés de résider à l'étranger sans l'autorisation préalable du gouvernement, demande une modification à l'article 57 de la loi du 10 mars 1865, instituant une caisse générale d'épargne et de retraite, afin que les participants aient la faculté de fixer leur résidence hors du royaume. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Bruxelles demandent la révision de la loi de 1858 sur la garde civique. »
- Même renvoi.
« MM. de Moor et Royer de Behr, obligés de s'absenter pour affaires urgentes, demandent un congé de quelques jours. »
« M. De Fré demande un congé pour la séance de ce jour. »
- Ces congés sont accordés.
MpVµ. - La discussion est ouverte sur ce chapitre.
M. Hagemansµ. - Messieurs, la 4e section a émis le vœu d'une réduction de 50,000 fr. sur le chapitre des lettres et beaux-arts. Elle voudrait voir supprimer tout ce qui est prime ou protection. Elle désirerait que les sommes affectées à l'encouragement des beaux-arts fussent consacrées à la création d'un musée moderne.
Je faisais partie de la quatrième section et je dois avouer que je ne partage pas complètement cette opinion. Je suis loin d'être partisan du système de protection en général ; je l'ai prouvé dernièrement par mon vote sur le chapitre de l'agriculture. Je ne crois pas que ce système soit bon.
Mais il n'en est pas de même pour les lettres et les arts. Bien malgré moi, je crois qu'on sera obligé, pendant quelque temps encore, d'exiger des contribuables, des sommes plus ou moins fortes pour soutenir les artistes et les hommes de lettres. Aussi ai-je vu avec bonheur que l'honorable ministre de l'intérieur, dont nous connaissons le goût éclairé pour les arts et les belles-lettres, loin de réduire le chiffre, est disposé à l'augmenter.
Je crois que, pour l'agriculture, pour l'industrie, la protection est plus nuisible qu'utile, qu'elle entrave la liberté. Mais pour les arts, il n'en est pas de même. Nous ne pouvons faire des artistes des économistes et si nous voulons qu'ils restent des artistes, il ne faut, pas vouloir en faire des financiers. Quant aux jeunes gens qui s'engagent dans la voie des lettres et des avis, on aura beau vouloir les arrêter dès le principe père et mère auront beau faire des observations, ils ne s'écarteront pas de la voie où les entraîne leur confiance dans l'avenir ; qu'ils aient des subsides ou qu'ils n'en aient pas, ils iront en avant. Beaucoup certainement resteront sur la brèche ; mais d'autre part cependant il y en a beaucoup qui seront soutenus par ce subside et qui deviendront peut-être nos hommes de l'avenir, nos grands peintres, nos grands littérateurs.
Or, messieurs, la Belgique a toujours eu un éclat trop resplendissant pour que nous voulions aujourd'hui l'éteindre.
Quant à nos littérateurs, nous n'en avons pas tant, que nous ne devions craindre plutôt qu'ils ne fassent ce qui n'est arrivé malheureusement que trop souvent, qu'ils ne portent le produit de leur intelligence sur le sol étranger, comme s'ils n'en avaient pas le placement dans leur propre pays.
Une quantité de sociétés archéologiques, historiques, littéraires et scientifiques se forment partout. Ces sociétés rendent d'immenses services, des services beaucoup plus grands qu'on ne pourrait le croire. Elles répandent les lumières, les sciences ou tout au moins l'amour de la science. Elles extirpent les préjugés et font peut-être, pour préparer la Belgique à être digne un jour du suffrage universel, plus que bien des discours.
Je pense donc qu'il faut soutenir les littérateurs et les artistes, et que nous restions dignes de la Belgique d'autrefois qui compte tant de grands hommes.
Eh bien, messieurs, ne lésinons pas avec la gloire, et je vous assure que la gloire nous remboursera.
On a émis le vœu de voir employer cette allocation à la fondation d'un musée moderne. Messieurs, c'est une idée excellente, que j'approuve, beaucoup ; mais je ne crains qu'une chose, c'est que si vous faites un musée moderne, ce ne soit aux dépens d'autres besoins intellectuels tout aussi nécessaires et que si vous supprimez les subsides vous n'aurez bientôt plus d'artistes pour orner ce musée.
J'ai remarqué dans le discours du trône une phrase qui m'a fait grand plaisir, celle qui rendait justice à nos artistes ; mais, à côté de cela, je dois exprimer mes regrets de voir ces artistes que nous admirons et leurs confrères venus de loin, si mal logés dans ce qu'on appelle à juste litre la baraque.
Messieurs, sachons élever des palais à ceux qui font des œuvres dignes de palais ;' ne jetons pas inutilement notre argent à des provisoires qui malheureusement deviennent trop souvent définitifs.
- La discussion est close.
« Art. 103. Subsides et encouragements ; souscriptions, voyages et missions littéraires, scientifiques ou archéologiques ; fouilles et travaux dans l'intérêt de l'archéologie nationale ; sociétés littéraires et scientifiques ; dépenses diverses ; secours à des littérateurs ou savants qui sont dans le besoin ou aux familles de littérateurs ou savants décédés ; subsides aux veuves et aux orphelins délaissés par les littérateurs Van Ryswyck, Vankerckhove, Gaucet, Denis Sotiau et H. Van Peene ; prix quinquennaux fondés par les arrêtés royaux du 1er décembre 1845, du 6 juillet 1851 et du 23 novembre 1859 ; encouragements à la littérature et à l'art dramatique (littéraire et musical) ; publication des Chroniques belges inédites, rédaction et publication de la table chronologique des chartes, diplômes, lettres (page 126) patentes et autres actes imprimés, concernant l'histoire de la Belgique ; bureau de paléographie, publication de documents rapportés d'Espagne ; exécution d'une description géographique et historique du royaume de Belgique ; continuation de la publication des actes des anciens états généraux : fr. 112,000.
« Charge extraordinaire : fr. 27,500. »
- Adopté.
« Art. 104. Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique ; subsides extraordinaires à l'Académie royale de Belgique, afin de la mettre à même d'augmenter le chiffre des prix pour les principales questions portées aux programmes de ses concours ; publication des anciens monuments de la littérature flamande et d'une collection des grands écrivains du pays ; publication d'une biographie nationale ; publication d'un texte explicatif de la carte géologique de la Belgique : fr. 48,000.
« Charge extraordinaire : fr. 19,200. »
MpVµ. - Le gouvernement propose, d'accord avec la section centrale, de porter ce chiffre à l'ordinaire à 50,500 fr. et à l'extraordinaire à 22,200 fr.
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 105. Observatoire royal ; personnel : fr. 18,540. »
- Adopté.
« Art. 106. Observatoire royal ; matériel et acquisitions : fr. 8,060. »
- Adopté.
« Art. 107. Bibliothèque royale ; personnel. Frais de la fusion des trois fonds de la bibliothèque royale et Irais de la rédaction du catalogue général : fr. 41,450. »
MpVµ. - Le gouvernement propose, d'accord avec la section centrale, une augmentation de 2,050 fr. Le chiffre serait donc porté à 43,500 fr.
- L'article, ainsi modifié, est adopté.
« Art 108. Bibliothèque royale ; matériel et acquisitions : fr. 38,320. »
- Adopté.
« Art. 109. Musée royal d'histoire naturelle ; personnel : fr. 11,495. »
- Adopté.
« Art. 110. Musée royal d'histoire naturelle ; matériel et acquisitions : fr. 7,000. »
- Adopté.
« Art. 111. Subside à l'association des Bollandistes pour la publication des Acta Sanctorum ; charge extraordinaire : fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 112. Archives du royaume ; personnel : fr. 44,225.
« Charge extraordinaire : fr. 1,800. »
M. Kervyn de Lettenhove. - Je désire renouveler une observation que j'ai déjà eu l'honneur de présenter plusieurs fois et je viens demander à M. le ministre de l'intérieur si, conformément à l'engagement qu'il a pris, il s'est occupé de la grave question du nouveau local qu'il convient d'assigner aux archives du royaume. La situation est connue de tous les membres de cette Chambre, elle l'est également de M. le ministre de l'intérieur, dont la sollicitude pour les lettres ne s'est jamais démentie. Nous apprécions tous le prix de ces archives, qui possèdent des collections d'une valeur considérable pour nous, et qu'admirent également les érudits étrangers. Nous savons que le local qu'elles occupent est menacé de l'incendie par les cheminées qui le traversent, par sa situation dans un pâté de maisons où se trouvent des boulangeries et d'autres établissements dont le voisinage est excessivement dangereux. En présence de cette situation, et lorsque la Chambre a exprimé sa sollicitude pour un dépôt si précieux, lorsque l'honorable ministre s'est associé à ce sentiment, nous nous trouvons tous les ans en présence des mômes inquiétudes et du même péril.
J'appelle avec une vive instance, sur ce point, l'attention du gouvernement.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je reconnais avec M. Kervyn que les archives ne peuvent continuer à rester déposées dans le local où elles se trouvent aujourd'hui. Mais si cette nécessité est bien constatée, d'autre part, il n'est pas facile de se procurer un local suffisamment grand et convenable pour y placer ces précieux documents.
Cette affaire n'est pas perdue de vue. J'ai cherché de divers côtés et je crains que l'on ne puisse trouver dans Bruxelles un terrain pour construire un local pour nos archives, à moins que ce ne soit sur les terrains nouveaux à établir sur la Seine.
M. Bouvierµ. - Et le palais de justice ?
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Ce local pourrait convenir, je pense.
Mais je n'en ai pas parlé, parce que l'on m'eût probablement répondu qu'il faudrait bien du temps encore avant que l'on puisse utiliser ce local.
Si l'on pouvait disposer du palais de justice actuel, on aurait de quoi établir un palais des archives très convenable, mais il ne peut encore en être question maintenant et je crains bien qu'en attendant nous soyons obligés de loger les archives hors de Bruxelles. Quant à moi, j'ai le plus vif désir de les voir caser convenablement ; je comprends tout l'intérêt qui s'attache à ces précieux documents et combien serait irréparable la perte de ces archives, si, par un accident quelconque, nous avions le malheur de les perdre.
- L'article est adopté.
« Art. 113. Archives du royaume. Matériel ; atelier de reliure pour la restauration des documents : fr. 4,700.
« Charge extraordinaire : fr. 3,500. »
- Adopté.
« Art. 114. Archives de l'Etat dans les provinces ; personnel : fr. 29,600. »
- Adopté.
« Art. 115. Frais de publication des Inventaires des archives ; frais de recouvrement de documents provenant des archives, tombés dans des mains privées ; frais d'acquisition ou de copie de documents concernant l'histoire nationale ; dépenses de matériel des dépôts d'archives dans les provinces ; subsides pour le classement et pour la publication des inventaires des archives appartenant aux provinces, aux communes, aux établissements publics ; dépenses diverses relatives aux archives. Recouvrement d'archives restées au pouvoir du gouvernement autrichien ; frais de classement, de copie et de transport, etc. : fr. 6,800.
« Charge extraordinaire : fr. 10,000. »
- Adopté.
« Art. 116. Location de la maison servant de succursale au dépôt des archives de l'Etat ; charge extraordinaire : fr. 3,000. »
- Adopté.
« Art. 117. Subsides à de jeunes artistes pour les aider dans leurs études ; encouragements à de jeunes artistes qui ont déjà donné des preuves de mérite ; voyages dans le pays et à l'étranger pour les aider à développer leur talent ; missions dans l'intérêt des arts ; secours à des artistes qui se trouvent dans le besoin ou aux familles d'artistes décédés ; encouragements à la gravure en taille-douce, à la gravure en médailles, aux publications relatives aux beaux-arts ; subsides ; souscriptions ; acquisitions d'œuvres d'un intérêt artistique ou archéologique ; subsides aux sociétés musicales ; aux écoles de musique, aux villes pour l'institution de grands festivals de musique classique ; sociétés pour l'encouragement des beaux-arts, aux expositions locales,- etc. ; commandes et acquisitions d'œuvres d'artistes vivants ou dont le décès ne remonte pas à plus de dix ans ; subsides aux établissements publics pour aider à la commande ou à l'acquisition d'œuvres d'art ; encouragements à la peinture murale, avec le concours des communes et des établissements intéressés ; académies et écoles des beaux-arts autres que l'Académie d'Anvers ; conseil de perfectionnement (page 127) de l'enseignement des arts du dessin ; grands concours de composition musicale, de peinture, de sculpture, d'architecture et de gravure en taille-douce ; pensions des lauréats ; frais relatifs aux grands concours ; dépenses diverses : fr. 411,000. »
M. Dumortier. - Je profite de la mise en discussion de ce chapitre pour demander au gouvernement d'obtenir, en fait de gravure de type de nos monnaies, quelque chose de plus satisfaisant que ce que nous possédons actuellement.
Il est un fait certain, c'est que les monnaies parcourent le monde entier et qu'on se fait généralement une idée de l’état de l'art dans un pays par l'exécution du type de ses monnaies.
Aussi, messieurs, est-ce avec infiniment de raison qu'on s'est élevé, dès l'apparition de nos dernières pièces de monnaie, contre la manière dont l'effigie de notre souverain y a été reproduite.
Comment, messieurs, nous avons la prétention d'être un peuple éminemment artistique ; nous le sommes en effet, nous en sommes fiers et avec raison ; mais si nous sommes un peuple artistique, si nous avons de grands peintres, de grands sculpteurs, de grands artistes dans tous les génies, comment se fait-il que nos types monétaires soient tellement déplorables, au point de vue de l'effigie, et qu'en vérité, il n'y en a aucun autre en Europe qui puisse y être comparé en laideur et en déplorable qualité artistique ?
Je sais que le gouvernement a ouvert un concours pour obtenir des modèles du type du Roi ; mais je voudrais savoir ce qui s'est passé à cette occasion et comment il se fait que, dans les monnaies qu'on vient de mettre en circulation, on soit arrivé à quelque chose qui est au-dessous du médiocre.
Il n'y a qu'une seule opinion dans cette Chambre sur ce point ; j'en trouve la preuve dans les signes d'adhésion à ce que je dis, que je remarque de divers côtés de cette Chambre.
Nous avons, messieurs, un puissant intérêt à conserver intact l'honneur artistique de notre pays. Dans le siècle dernier, les monnaies belges étaient, sans comparaison et sans conteste, les plus belles monnaies de l'Europe. Voyez les monnaies qui ont été battues à Bruxelles sous Marie-Thérèse et à l'époque de la révolution brabançonne et vous reconnaîtrez que ce sont de véritables chefs-d'œuvre. D'un autre côté, quand on constate combien l'art de la numismatique était alors inférieur dans tous les autres pays de l'Europe, quand on constate à quel degré était arrivée sous ce rapport notamment, la gloire artistique de notre pays, on doit reconnaître que la Belgique régénérée, la Belgique de 1830, qui a produit tant d'artistes éminents, a des devoirs à remplir envers elle et qu'elle perdrait de son antique prestige si elle devait être jugée par les déplorables monnaies qui ont été mises en circulation depuis quelque temps.
En terminant, je prierai M. le ministre de l'intérieur de vouloir bien nous dire où en est le concours qui a été ouvert par le gouvernement.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, je n'ai pas à répondre à la partie du discours de l'honorable membre qui concerne le type des monnaies ; M. le ministre des finances, qui a ces affaires dans ses attributions, s'expliquera à cet égard ; mais je dois un mot de réponse à l'honorable M. Dumortier en ce qui concerne le concours dont il a parlé.
Le département de l'intérieur a ouvert en effet un concours, avant d'arrêter un type, non pour les monnaies belges, mais pour les médailles que ce département distribue en assez grand nombre, notamment aux académies de dessin, aux citoyens qui se sont distingués par des actes de courage et de dévouement.
De nombreux artistes ont pris part à ce concours ; le jury a décidé qu'aucun des modèles présentés ne réunissait les conditions voulues ; bien qu'il y eût des ouvrages dignes d'estime et qui avaient des qualités réelles, aucun, dans son ensemble, ne présentait les qualités exigées et spécialement le cachet national que ce genre de travail doit avoir. Le concours n'a donc pas abouti.
M. Jacquemynsµ. - Messieurs, l'honorable M. Dumortier a très vivement critiqué les coins de nos monnaies avant que M. le ministre des finances fût dans la salle ; il les a critiqués en termes généraux, sans entrer dans aucun détail. J'avoue, pour ma part, que je ne trouve pas les coins aussi détestables que le prétend l'honorable M. Dumortier ; j'estime même qu'il y a une amélioration très remarquable dans la fabrication de nos monnaies. Je prierai donc l'honorable M. Dumortier de vouloir bien spécifier ses critiques contre nos nouvelles monnaies.
M. Dumortier. - Messieurs, je croyais m'être clairement exprimé, Je ne conteste pas que la fabrication de noire monnaie, comme monnaie, ne présente quelque amélioration. Mais de quoi ai-je parlé ? Uniquement de la partie artistique. J'ai fait remarquer, et en cela j'ai obtenu l'assentiment d'un grand nombre de membres de cette Chambre, j'ai fait remarquer qu'il n'existe pas aujourd'hui en Europe de monnaie ayant un type plus mal exécuté que le type belge. J'ai ajouté que dans un pays qui se glorifiait non sans raison d'être la terre classique des beaux-arts, il était fortement à désirer que le type de notre monnaie fût à la hauteur de notre école artistique.
Si le type est exécuté d'une manière déplorable, il ne l'est pas moins pour les timbres-poste. Tout ce qui est fait en cette matière laisse infiniment a désirer.
La Belgique n'est pas tellement pauvre en artistes que nous ne puissions pas avoir un type aussi convenable que celui qui existe dans les autres pays. Prenez les monnaies d'Allemagne, d'Angleterre et de France, et vous verrez qu'elles fournissent la preuve que, sous ce rapport, l'art est en progrès dans ces pays. Je ne parle ici que de l'art. Comment se fait-il, alors que tous les peuples qui nous environnent ont des monnaies si bien faites, que nous ayons l'effigie du Roi rendue sur nos monnaies d'une manière si déplorable ?
J'espérais que le concours ouvert par M. le ministre de l'intérieur avait pour but de porter remède à cet état de choses.
Il dit que non, que c'était uniquement pour les médailles, ce que j'ignorais complètement. Je trouve que dans un pays comme la Belgique, quand à la fin du siècle dernier, je le répète, parce que M. le ministre des finances n'était pas présent tout à l'heure, nous étions les plus avancés de l'Europe pour les types monétaires, il est regrettable, il est déplorable que nos types monétaires soient aujourd'hui les plus affreux de l'Europe, j'ajouterai les plus odieux de l'Europe.
C'est une chose regrettable à tous les points de vue, d'abord parce que nous ne devons pas laisser du chef de l'Etat une impression mauvaise au moyen de nos monnaies, eu second lieu parce que nos monnaies parcourant le monde entier, on juge l'art belge sur ces monnaies, et qu'en jugeant ainsi, on doit le croire dans la dernière dégradation.
Les observations que j'ai l'honneur de présenter n'ont qu'un seul but : c'est de faire améliorer notre type monétaire et de le faire mettre à la hauteur de notre école artistique qui occupe dans toute l'Europe une position tellement honorable, tellement glorieuse qu'il est regrettable que notre type monétaire en soit tout à fait indigne.
MfFOµ. - L'honorable M. Dumortier critique d'une manière très vive ce qu'il appelle le type monétaire.
J'ai fini par comprendre ses explications. Il s'agit de l'effigie reproduite sur les monnaies. Il prétend que nous avons le malheur, pour nos monnaies, comme pour nos timbres-poste, d'avoir les gravures les plus déplorables de l'Europe. Il a été jusqu'à employer le mot « hideux ».
Messieurs, pour que l'on puisse apprécier la valeur des critiques de l'honorable M. Dumortier, je rappellerai-une circonstance qu'il semble ignorer. C'est que, pour la gravure des timbres-poste, on a ouvert un concours en Belgique ; or, ce concours a donné des résultats si peu satisfaisants, que l'on a été obligé de s'adresser à l'étranger pour cet objet, et nous devons le type de nos timbres-poste, si défectueux selon l'honorable membre, à un artiste étranger du plus grand mérite, et qui est chargé de la confection des timbres-poste de presque tous les pays de l'Europe.
M. Dumortier. - Pour la gravure, mais non pour le dessin.
MfFOµ. - Cet artiste fait le dessin, la gravure, en un mot le type complet des timbres-poste de la plupart des puissances européennes.
Vous pouvez, messieurs, par ce seul fait, juger de la valeur des critiques de l'honorable membre relativement aux timbres-poste. Quant aux reproches qu'il adresse à nos coins monétaires, je ne les crois pas mieux justifiés.
Pour les monnaies également, on a ouvert, il y a quelques années déjà, un concours entre les artistes du pays. Encore une fois, les résultats de cette tentative n'ont pas été satisfaisants. Les essais produits ne répondaient nullement aux conditions requises. Dans cette situation, on a chargé cette fois le graveur de la Monnaie, artiste très distingué, de faire ce que l'honorable M. Dumortier appelle le type monétaire.
Ce type n'a été admis qu'avec l'approbation d'un conseil composé de nos artistes les plus compétents ; et j'ai eu sous les yeux le témoignage tout spontané d'un artiste étranger, véritable spécialité en cette matière, (page 128) qui jouit d'une grande réputation et qui a fait les plus grands éloges de la monnaie belge.
J'admets certainement que les opinions peinent être partagées sur la beauté d'un dessin, sur la fidélité de la reproduction d'une effigie. Mais je crois que l'honorable M. Dumortier exagère beaucoup, lorsqu'il place notre monnaie au dernier rang, et qu'il la signale comme la plus détestable de l'Europe.
Je ferai remarquer, messieurs, que notre nouvelle monnaie réunit beaucoup de conditions très satisfaisantes. A part ce que l'honorable membre critique, n'admet-il pas que, sous les autres rapports, notre monnaie est bonne ?
M. Dumortier. - Je ne parle que de l'effigie.
MfFOµ. - C'était donc trop dire que, par cela seul, notre monnaie était la plus déplorable et la plus mauvaise de l'Europe entière.
Une bonne monnaie doit réunir un grand nombre de conditions fort difficiles à réaliser. IL ne suffit pas d'avoir des coins bien gravés, un beau dessin, un bel ensemble artistique, il faut encore que les espèces monétaires aient d'autres qualités, d'autres perfections ; il faut que les pièces soient bien frappées, qu'elles se présentent uniformément, que les rouleaux composés d'un même nombre de pièces empilées aient une hauteur sensiblement uniforme, et qu'ils aient un degré suffisant de stabilité.
L'absence de l'une ou de l'autre de ces qualités donne lieu à de sérieux inconvénients. Or, notre monnaie satisfait à toutes ces conditions, et d'une manière, on peut le dire, presque exceptionnelle. Il a fallu se livrer à beaucoup de travaux, à de nombreux essais pour atteindre à cette perfection.
C'est donc bien à tort que l'honorable M. Dumortier trouve la nouvelle monnaie si défectueuse. Je la tiens, quant à moi, pour très satisfaisante, à part les différences d'appréciation sur le plus ou le moins de perfection de l'effigie.
M. Coomans. - Il me répugne énormément de traiter des questions de personne, même d'y faire allusion. Mais mon devoir, cette fois, m'oblige à en soulever une.
Je voudrais savoir du gouvernement, ce qu'il a payé pour la plus remarquable toile du dernier salon de Bruxelles. Je dis la plus remarquable, au moins au point de vue de ses dimensions.
D'après le bruit public, la somme payée par le gouvernement serait très forte ; elle serait d'une vingtaine de mille francs. Fût-elle de beaucoup moindre, je la trouverais encore trop élevée.
Messieurs, quand des particuliers font de ces folies, il n'y a rien à en dire. Ils les font à leurs dépens et en toute liberté. Mais le gouvernement, qui dispose de la bourse de tout le monde, ne peut distribuer les revenus publics qu'au point de vue de la justice, de l'équité et de la raison ; et quand je vois payer énormément cher des objets soi-disant d'art qui ne valent, rien du tout, j'ai le droit de le blâmer et d'intervenir, non pour faire rembourser la somme dépensée, hélas ! cela n'est pas possible, mais pour empêcher que de pareilles dilapidations ne se renouvellent dans l'avenir.
Je suis partisan, je le reconnais, du principe d'abstention absolue du gouvernement en cette matière. Cependant, puisque l'opinion contraire prévaut, soit, je m'y rallie, à la condition que ce soient bien les beaux-arts que l'on protège, et non les arts qui ne sont pas beaux.
Je prie l'honorable ministre d'indiquer la somme qu'il a payée pour la toile à laquelle je fais allusion et je le prie en outre de me dire ce qu'il compte en faire.
M. Bouvierµ. - Indiquez-le.
M. Coomans. - La Prise de Jérusalem, ou plutôt. la prise du budget, puisque l'on jette l'argent par les croisées et les portes.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je suis heureux de pouvoir donnera l'honorable M. Coomans des explications qui, j'en suis convaincu, le satisferont complètement.
Le gouvernement ne jette pas l'argent par portes et fenêtres, comme s'exprime l'honorable orateur, et il n'a pas à se préoccuper du placement de la toile à laquelle l'honorable membre a fait allusion.
Voici ce qui est arrivé. Je remercie d'abord l'honorable M. Coomans de n'avoir, en cette circonstance, rien dit de désobligeant pour l'artiste qui s'est conduit de la manière la plus loyale.
Il y a une quinzaine d'années, le tableau dont il s'agit avait été commandé.
J'ai cherché, messieurs, à terminer toutes les anciennes affaires qui existaient au département de l'intérieur ; comme ce tableau n'arrivait pas, j ai demandé à l'artiste qu'il voulût bien produire sa toile. L'artiste s'est engagé à avoir fini pour la dernière exposition, et le tableau a été exposé.
L'honorable artiste avant reconnu que son œuvre couronnée n'était pas digne de lui, m'a écrit très loyalement qu'il reprenait sa toile et que les avances faites par le gouvernement seraient remboursées par lui soit au moyen de fournitures de dessins, soit autrement.
On a fait, messieurs, beaucoup d'histoires autour de ce tableau. On a parlé de sommes fabuleuses. Or, les sommes fabuleuses qui ont été avancées depuis quinze années, s'élèvent à 8,000 fr. Ces sommes seront remboursées, soit en argent, soit en dessins, que l'artiste fait si bien.
Je suis heureux, je le répète, que l'honorable M. Coomans ait touché cette question, parce qu'il m'a fourni l'occasion de rendre hommage à la délicatesse de l'artiste, qui est M. Hendrickx.
M. Hagemansµ. - Messieurs, j'avais demandé la parole quand il a été question des timbres-poste.
C'était, messieurs, pour rendre justice à M. Wiener, dont le talent est reconnu dans tous les pays. Je crois pouvoir ajouter qu'on se fatigue de ce qui est grand et beau en Belgique pour admirer parfois ce qui n'est que passable à l'étranger. C'est là souvent le triste produit de l'habitude.
M. Coomans. - Messieurs, cette fois je suis satisfait, et très satisfait d'apprendre que l'Etat n'aura pas à faire les sacrifices dont on se préoccupait et je n'hésite pas à dire que la conduite de cet artiste est celle d'un honnête homme et d'un bon citoyen ; je n'en ai du reste jamais douté ; je ne le connais ni de près ni de loin.
Je suis heureux d'apprendre que le gouvernement n'aura pas à dépenser, en tout état de cause, plus de 8,000 fr. pour ce tableau ou pour un autre équivalent.
M. Thonissenµ. - Messieurs, il y aune demande de réduction de 50,000 francs formulée par la section centrale.
Le chiffre global est de 411,000 francs. Il comprend une somme de 100,000 francs pour des dépenses libellées de la manière suivante :
« Commandes et acquisitions d'œuvres d'artistes vivants ou dont le décès ne remonte pas à plus de dix ans ; subsides aux établissements publics pour aider à la commande ou à l'acquisition d'œuvres d'art. »
De même que l'honorable M. Hagemans, la section centrale pense qu'en Belgique les arts ne peuvent se passer des encouragements du gouvernement. C'est un fait incontestable, pour peu qu'on réfléchisse à la situation intérieure du pays.
Les finances communales, principalement celles des grandes villes, sont en général peu brillantes ; la plupart des fabriques d'église n'ont pas d'excédants ; les familles opulentes sont rares et elles n'ont pas toutes un goût artistique très développé.
La section centrale admet donc la nécessité de l'intervention de l'Etat ; mais elle croit, d'autre part, que les dépenses doivent être faites avec modération, avec mesure, avec prudence.
Malheureusement cela n'a pas toujours eu lieu. Le gouvernement a fait l'acquisition d'œuvres réellement remarquables ; mais aussi, dans un très grand nombre de cas, il en a acheté non seulement de médiocres, mais de mauvaises.
On en a fourni la preuve à la section centrale. Je ne citerai ni tableaux ni noms de peintres ; mais, pour ne parler que d'artistes morts et encore sans citer leurs noms, les membres de l'assemblée n'ont qu'à faire le tour des locaux du palais dans lequel je parle pour savoir à quoi s'en tenir. Qu'ils traversent le local assigné à notre honorable président, qu'ils jettent un coup d'œil sur les salles des sections, et ils verront que l'on dépense des sommes énormes pour des œuvres dépourvues d'un mérite réel.
C'est pour ce motif que la section centrale propose de réduire le chiffre de 100,000 fr. à 50,000 fr. La somme ainsi réduite suffirait pour encourager les artiste de mérite et acquérir des œuvres dignes de figurer dans nos musées ; mais, comme la somme sera moins élevée, on devra se montrer plus sévère et l'on n'acquerra plus que des tableaux et des statues qui puissent donner aux générations futures une idée exacte de l'état de l'art en Belgique à notre époque.
Je dois ajouter que ce n'est pas une mesquine pensée d'économie qui a guidé la section centrale. Elle laisse les 50,000 fr. à la disposition de M. le ministre de l'intérieur pour hâter le développement de l'enseignement artistique.
MpVµ. - Messieurs, voici la position de la question.
A l'article 117, le gouvernement, d'accord avec la section centrale, propose une augmentation de 10,000 fr. et la section centrale propose une diminution de 50,000 francs. Il faudra donc procéder par division.
(page 129) M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je ne puis naturellement pas me rallier à la proposition de la section centrale.
Je ferai observer d'abord à la Chambre que, dans le budget qui lui est soumis, le gouvernement n'a pas perdu de vue le grand intérêt de l'enseignement artistique. La Chambre voudra bien remarquer en effet que spontanément on a proposé une augmentation de 25,000 fr. au littera C de cet article pour l'enseignement du dessin, c'est-à-dire : pour l'organisation des écoles de dessin dans les provinces.
Il sera donc satisfait à ce besoin par cette demande d'augmentation de crédit, sans qu'il soit nécessaire de distraire quelque chose de l'article qui concerne les acquisitions d'œuvres d'artistes vivants.
Je pense, messieurs, que ce crédit demandé se justifie à tous les points de vue.
On vous a déjà dit que dans un pays comme le nôtre le gouvernement doit encourager les beaux-arts et acheter les œuvres de nos artistes.
Or, consacrer à ces encouragements une somme de 100,000 fr. est-ce une demande exagérée ? Et l'augmentation demandée au budget de celle année pour cet objet ne s'élève qu'à 25,000 fr.
Dans une autre circonstance, alors que nous demandions des crédits pour l'encouragement de la peinture murale, d'honorables orateurs, entre autres M. Dumortier, insistaient fortement pour qu'on augmentât le crédit destiné à l'acquisition d'œuvres d'artistes vivants.
M. Dumortier. - C'est encore mon avis.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Eh bien, on a fait droit à ce vœu, l'augmentation demandée n'a pas d'autre but, et je pense que la Chambre, qui a émis le vœu de voir augmenter le crédit, ne refusera pas le vote que' nous lui demandons aujourd'hui.
On a fait de graves reproches au gouvernement ! On a prétendu que le gouvernement, en matière d'art comme en toute autre matière, du reste, est d'une incompétence notoire, le gouvernement est toujours trompé, le gouvernement ne fait que de mauvais choix.
M. Thonissenµ. - Je n'ai pas dit cela.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je n'ai pas parlé de vous. On l'accuse de n'acheter que des croûtes (permettez-moi le mot, il est consacré). Il suffit qu'un artiste de 14ème ou de 15ème ordre se voie déçu dans ses espérances pour qu'il inflige un blâme aussi sévère qu'immérité au gouvernement et à ses agents ; ce blâme et les cancans trouvent bientôt un écho dans la presse.
M. Coomans. - Cela n'est pas flatteur pour la presse.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je parle de certains petits journaux où l'on trouve moyen de faire insérer un article, ne fût-ce qu'à titre de réclame.
M. Coomans. - Vous dites : Toute la presse...
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - on, non ; si j'ai dit toute la presse, ma parole n'a pas rendu ma pensée. Quoi qu'il en soit, il est facile d'accuser le gouvernement d'acheter des œuvres d'art médiocres ou mauvaises, mais il sera souvent fort difficile de préciser. Je ne prétends pas que le gouvernement n'ait jamais fait d'acquisition médiocre, mais on n'a pas toujours la main heureuse, et lorsqu'on commande un tableau à un artiste, l'artiste ne peut pas toujours faire un chef-d'œuvre.
Cependant je puis constater que, depuis quelques années surtout, on a fait pour le Musée moderne des acquisitions importantes, et pleinement approuvées. Je prierai les honorables membres qui en doutent de vouloir bien visiter le palais Ducal. Les personnes qui critiquent les choix du gouvernement se gardent en général de citer les noms des artistes dont le gouvernement a acquis des œuvres mauvaises ; je puis en citer moi, Clays, Bossuet, Stroobant, Lamorinière, Van Moer, Geernaert, Voordecker, Stevens. Sont-ce là des noms d'artistes vulgaires, et dont les œuvres ne méritent pas de figurer dans nos Musées ?
M. Thonissenµ. - Ce n'est pas à ces artistes-là qu'on a fait allusion ; on approuve, au contraire, l'acquisition de leurs œuvres.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - A qui donc avez-vous fait allusion ? Je déclare que c'est pour faire de pareils achats et de meilleurs encore que j'ai demandé une augmentation de crédit et je suis persuadé qu'après les explications que je viens de donner à la Chambre, M. Thonissen lui-même consentira à voter cette augmentation.
Depuis quelques années, suivant en cela mon système de décentralisation, même en matière d'art, je me suis, dit qu'il ne fallait pas accaparer pour la capitale toutes les œuvres de nos artistes et qu'il serait sage de contribuer, autant que possible, à enrichir les musées de province, afin de répandre le goût de l'art dans le pays entier.
Dans ce but j'ai fait appel aux communes et aux provinces et je suis heureux de pouvoir le constater, communes et provinces ont dans une certaine mesure répondu à mon appel ; en 1865 les provinces ont consenti à porter à leur budget des augmentations de crédits pour l'encouragement d'œuvres d'art, qui s'élèvent ensemble à 75,000 fr. Il faut que le gouvernement soit à même de seconder l'élan qui s'est produit et d'enrichir pour sa part autant que possible les musées de province. Et que l'on ne dise pas que les tableaux acquis pour les musées de province seront nécessairement des œuvres médiocres ; pour répondre aux doutes qui pourraient se produire à cet égard, je citerai encore des noms ; je citerai les noms de Bosquet et de feu Lies, artiste très distingué et très regretté, dont un tableau a été acquis, avec le concours de l'Etat, pour le musée d'Anvers.
Toujours dans le but de favoriser l'art et de le faire rayonner sur tout le pays, le gouvernement a adressé une circulaire aux communes pour les engager à perpétuer, soit au moyen de statues, les personnages marquants nés dans ces localités, soit au moyen de tableaux, celui des principaux événements de leur histoire.
II m'a semblé qu'il serait intéressant de voir dans les gouvernements provinciaux des œuvres d'art représentant l'histoire des provinces et jusque dans la plus mince commune quelque tableau représentant des événements qui se sont passés dans ces localités. Ici encore mon appel a été entendu. C'est ainsi que, d'accord avec l'administration communale d'Anvers, on a pu commander, avec le concours de l'Etat, un tableau représentant la Mort du comte Frédéric de Mérode ; pour Bruxelles, on a pu acheter un tableau de Robert, grâce aussi à la généreuse intervention de l'administration de la ville. Pour la petite ville de Comines, sur les frontières de France, on a acquis un tableau représentant l'Arrestation de Busbecq, à la cour de Soliman ; Busbecq était né dans cette ville et, je dois le dire, ce tableau excite l'admiration de nos voisins d'Outre-Lys ; nos voisins admirent non seulement le tableau, mais encore la petite ville et le gouvernement qui encouragent les arts et la reproduction des scènes historiques.
Un tableau a également été acquis pour Ath, avec le concours de cette ville ; des commandes sont faites pour Mons, pour Malines et pour d'autres localités.
Voilà, messieurs, comment le gouvernement dépense les fonds que la Chambre veut bien voter ; il surveille l'emploi de ces fonds avec la plus grande vigilance et avant d'acquérir un tableau quelconque il s'entoure des lumières des hommes spéciaux les plus compétents. Est-ce à dire que nous réussissions toujours à avoir des œuvres parfaites ? Je ne veux pas le soutenir. Parfois des œuvres commandées ne répondaient pas à ce que l'on était en droit d'attendre de leurs auteurs ; aussi pour ma part, je ne suis pas partisan des commandes et j'aime mieux acheter des tableaux faits.
Mais il est des circonstances où il faut bien avoir recours à ce moyen ; cela est inévitable, et d'ailleurs il faut tenir compte que les tableaux, lorsqu'ils ne conviennent pas, ne sont pas acceptés par le gouvernement.
Je crois ne pas devoir insister davantage sur ce point ; la Chambre me paraît disposée à voter les crédits demandés. Je ne réclame jamais de crédit supplémentaire pour les beaux-arts, mais il faut cependant que nous puissions donner à nos artistes les encouragements auxquels ils ont droit, surtout lorsque, comme c'est souvent le cas, le pays fait en même temps une bonne affaire.
M. Dumortier. - Je ne partage pas l'opinion de la section centrale, qui demande la réduction du crédit des beaux-arts. Je dois rendre cet hommage à M. le ministre de l'intérieur : la marche qu'il a adoptée ne laisse rien à désirer. Il y a eu peut-être quelques acquisitions qui ne sont pas heureuses, mais ce n'est pas lui que j'en rendrai responsable, ce sont les personnes qui ont examiné les tableaux. D'ailleurs, messieurs, les plaintes qui s'élèvent sur les mauvais tableaux que nous possédons, s'appliquent à des acquisitions faites il y a un grand nombre d'années, quand notre école n'était pas arrivée au degré de perfection où elle est aujourd'hui. Quant aux acquisitions modernes, je trouve qu'elles sont heureuses.
Je pense, messieurs, qu'en matière de beaux-arts le gouvernement devrait procéder un peu comme on le fait en France : les tableaux sont généralement de deux espèces ; les tableaux de chevalet et les tableaux d'histoire ; quant aux tableaux de chevalet, il convient de les acheter avant l'ouverture de l'exposition ; à ce moment, le gouvernement a seul entrée au salon, il connaît le prix des tableaux, il a toutes les facultés possibles (page 130) pour faire son choix et chaque artiste sera heureux que son tableau ait été acquis par le gouvernement. Quant aux tableaux d'histoire, jamais artistes ne consentira à entreprendre une œuvre de ce genre sur l'éventualité de la vente, et le gouvernement n'a qu'un seul moyen d'encourager la grande peinture, c'est de faire des commandes. Or si nous avons une bibliothèque dans laquelle nous réunissons avec le plus grand soin tout ce que produisent les auteurs contemporains nationaux, nous devons avoir, au Musée national, des œuvres de tous nos grands artistes et je pense, pour ma part, que le gouvernement ferait très bien de ne pas se borner à une seule acquisition de chacun de nos grands artistes ; il importe d'en avoir plusieurs, afin que plus tard on puisse apprécier complètement notre école. Nous avons aujourd'hui des artistes qui ont été encouragés par le gouvernement au début de leur carrière, les œuvres acquises de ces artistes ne représentent pas leur talent arrivé à son apogée.
Le gouvernement ne doit pas non plus se borner à acheter des tableaux de peintres de troisième ou d. quatrième ordre, mais il doit acquérir plusieurs tableaux de chaque chef d'école. Allez voir le musée de Paris, vous y trouverez 20 ou 30 Rubens ; nos propres musées auront-ils autant de tableaux des grands artistes belges ?
Je pense que l'intention de l'honorable ministre est de marcher dans cette voie.
Maintenant, messieurs, faites attention à une chose, c'est la difficulté de la position du ministre vis-à-vis du monde artistique. Vous avez de grands artistes, ceux-là ne sollicitent guère les commandes du gouvernement, mais vous avez aussi des artistes du 4ème, 5ème, 6ème ordre, qui sont extrêmement désireux de prendre part au budget, mais ce sont précisément ceux-là dont les œuvres ne doivent pas figurer au Musée, car cela donnerait une triste et bien fausse idée de l'art belge.
Messieurs, la création d'un musée national est une chose très désirable ; les arts ont toujours fait la plus belle gloire de la Belgique et les productions de nos artistes sont comme des plaidoyers en faveur de notre nationalité. Même dans les chambres de nos oppresseurs, il y avait des œuvres de nos grands maîtres qui venaient dire : Il y a une Belgique qu'il faut respecter.
M. de Maere. - Le crédit qui est maintenant en discussion est destiné en partie, d'après le libellé de l'article, aux grands concours de composition musicale. Vous savez, messieurs, que depuis l'année dernière, grâce à une heureuse initiative de M. le ministre de l'intérieur, le concours de composition musicale a eu lieu sur un texte double, texte français et texte flamand, et qu'un premier prix a été décerné à l'auteur de celle des deux compositions qui a paru la meilleure. Il me semble que l'obligation pour le jury de se prononcer sur des œuvres qui peuvent différer d'idée et de forme rend sa tâche extrêmement difficile, sinon impossible ; car il a à choisir entre des œuvres qui n'ont souvent aucun rapport entre elles.
Je voudrais que désormais le concours fût divisé en deux parties distinctes, c'est-à-dire qu'on ouvrît une section française ou italienne, une section allemande ou flamande ; que dans chacune de ces divisions un texte unique fût choisi, et qu'un prix de même valeur, auquel les mêmes avantages seraient attachés, fût décerné à la meilleure œuvre produite.
Je recommande cette idée à l'examen bienveillant de M. le ministre, et j'espère qu'il tiendra bonne note de la recommandation que je viens de faire.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je reconnais qu'il y a quelque chose de fondé dans l'observation que vient de faire l'honorable député de Gand. Il peut être, en effet, assez difficile pour un jury, ayant à statuer sur des cantates composées sur des textes français et flamand, de discerner celle qui doit être proclamée la meilleure, bien que la musique soit de toutes les langues.
Il y a deux ans, on a, pour la première fois, autorisé les compositions en langue flamande et ce n'est pas sans peine qu'on a pu aboutir à un résultat. cette année, le texte flamand ou français sera encore admis et les compositeurs pourront choisir.
Pour atténuer une partie des inconvénients dont vient de parler l'honorable M. de Maere, j'ai décidé que la cantate française serait traduite en flamand et la cantate flamande en français, afin que tous puissent en prendre connaissance. Mais ceci encore ne sera fait qu'à titre d'essai ; si cet essai ne réussit pas, il y aura lieu d'aviser à d'autres mesures et de voir, par exemple, s'il ne serait point préférable de faire deux concours, un tous les quatre ans pour les auteurs français et l'autre tous les quatre ans pour les auteurs flamands.
M. Coomans. - Cela vaudrait mieux.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je le crois aussi, d'autant plus que de cette façon on aurait encore tous les deux ans un concours de composition musicale.
C'est une question à examiner ; mais j'espère que nous finirons par triompher de cette difficulté. L'Académie, si ce système prévalait, voudrait bien nommer comme jurés des membres connaissant la langue flamande, quand le concours aurait lieu en texte flamand.
M. Delaetµ. - Je crois, messieurs, devoir appuyer la seconde des mesures que vient d'indiquer M. le ministre de l'intérieur ; elle me paraît être infiniment plus rationnelle que la première, qui me semble imparfaite à tous égards.
Il est parfaitement vrai que la musique est de toutes les langues ; mais quand il s'agit d'une cantate, les juges du concours ont à décider lequel des musiciens a le mieux exprimé la pensée poétique du texte.
D'autre part, une traduction est quasi impossible, surtout une traduction en vers ; quant à moi, je n'en ai jamais rencontré de pleinement réussie, et qui rendît toutes les délicatesses du texte original.
L'honorable M. de Maere, assis près de moi, me fait observer avec beaucoup de raison que les textes flamand et français peuvent être d'un caractère différent ; l'un sera une idylle, par exemple, l'autre un dithyrambe, l'un sera descriptif, l'autre dramatique. Le caractère de la musique, devant être celui du texte, la comparaison entre la composition musicale flamande et la composition française sera sinon impossible, du moins excessivement difficile.
Il s'agit aussi, si je ne me trompe, de faire exécuter, aux fêtes de septembre la cantate couronnée. Mais si toutes deux méritent de l'être, les fera-t-on exécuter l'une et l'autre ? Cela me paraît assez difficile, et je crois que, dans ce cas, il faudra s'arrêter à exécuter soit le texte français, soit le texte flamand.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Dans ma pensée il y aurait alternativement un concours sur texte français et un concours sur texte flamand.
M. Delaetµ. - C'est aussi le système qui me paraît être le meilleur.
M. T'Serstevensµ. - Sur le crédit qui nous est demandé pour encouragements à donner aux beaux-arts en Belgique, le gouvernement se propose de prélever 25,000 francs pour être distribués en subsides aux sociétés musicales, aux écoles de musique et aux villes pour propager l'enseignement élémentaire de la musique et organiser les concours et festivals.
En 1865, messieurs, lorsque la somme consacrée au même service ne s'élevait qu'à 15,000 francs, on a prélevé sur cette somme 7,000 francs qui ont été distribués à cent et quelques sociétés de musique, soit, en moyenne, par société, environ 70 francs. Il est évident, messieurs, que des subsides aussi minimes ne peuvent guère exercer d'influence sur l'existence et le développement de ces sociétés, ni les déterminer à organiser des concours ou des festivals.
Je demanderai donc au gouvernement s'il ne croit pas qu'il serait infiniment préférable de distribuer les 25,000 francs portés au budget exclusivement aux communes et aux sociétés de musique qui voudraient établir des écoles de musique ou organiser des cours de musique d'ensemble.
Je crois qu'on obtiendrait ainsi des résultats beaucoup plus sérieux, plus favorables au développement de l'art musical qu'en accordant à une foule de sociétés des subsides insignifiants.
Aujourd'hui, il est démontré que toutes cantates faites sur texte flamand ou français peuvent être exécutées dans notre pays : il ne nous manque pas de masses chorales ; loin de là, nous en avons suffisamment, et Dieu merci, de très bonnes.
Je viens donc, et c'est dans ce seul but que j'ai demandé la parole engager M. le ministre de l'intérieur à s'arrêter au second des systèmes qu'il nous a indiqués tout à l'heure.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Le gouvernement, dans la collation de ces subsides, a toujours eu soin de traiter plus favorablement les sociétés qui ont des écoles de musique.
Quant à ceux qu'il accorde à d'autres sociétés, je reconnais qu'en général, ils ne sont pas considérables ; mais il faut tenir compte aussi de l'influence morale de ces petits subsides, de la satisfaction qu'ils procurent. Les sociétés qui les obtiennent y trouvent une sorte d'approbation que leur donne le gouvernement et, sous ce rapport, ils produisent les meilleurs résultats.
- La discussion est close.
(page 131) L'augmentation de 11,000 francs, demandée par le gouvernement et consentie par la section centrale, est mise aux voix et adoptée.
M. le président. - este à présent le principal qui est porté de 411.000 à 421,000 francs.
-Le chiffre de 421,000 francs est mis aux voix et adopté.
« Art. 118. Académie royale d'Anvers : fr. 38,850.
« Charge extraordinaire : fr. 25,000. »
- Adopté.
« Art. 119. Conservatoire royal de musique de Bruxelles. Dotation de l'Etat destinée, avec les subsides de la province de Brabant et de la ville de Bruxelles, à couvrir les dépenses tant du personnel que du matériel : fr. 65,540. »
MpVµ. - Le gouvernement a proposé à cet article une augmentation de 4,000 fr., ce qui porte le chiffre à 69,540 francs.
La section centrale a proposé une diminution ; mais M. le ministre de l'intérieur maintient le chiffre de 69,540 francs.
- Le chiffre de 69,540 fr. est mis aux voix et adopté.
« Art. 120. Conservatoire royal de musique de Liège. Dotation de l'Etat, destinée, avec les subsides de la province et de la ville de Liège, à couvrir les dépenses tant du personnel que du matériel : fr. 40,240. »
- Adopté.
Art. 121. Musée royal de peinture et de sculpture. Personnel : fr. 12,425. »
- Adopté.
« Art. 122. Musée royal de peinture et de sculpture. Matériel et acquisitions ; frais d'impression et de vente du catalogue : fr. 23,400. »
MpVµ. - Le gouvernement propose à l'extraordinaire une augmentation de 7,405 fr. 50 c. La section centrale adopte cette proposition.
- L'article 122 modifié est adopté.
« Art. 122 bis (proposé par le gouvernement et adopté par la section centrale). Musée Wiertz. Personnel, surveillant et concierge ; matériel et frais d'entretien : fr. 3,500. »
- L'article 122 bis est mis aux voix et adopté.
« Art. 123. Musée royal d'armures et d'antiquités. Personnel : fr. 8,700. »
- Adopté.
« Art. 124. Musée royal d'armures et d'antiquités. Matériel et acquisitions ; frais d'impression et de vente du catalogue ; frais de publication d'une édition illustrée de planches et de vignettes du catalogue des collections du musée ; création d'une section sigillographique : fr. 12,000.
« Charge extraordinaire : fr. 7,000. »
- Adopté.
« Art. 125. Monument de la place des Martyrs ; salaire des gardiens. Frais de surveillance de la colonne du Congrès. Traitement du concierge du palais de la rue Ducale. Frais d'entretien des locaux de ce palais et chauffage des locaux habités par le concierge ; frais de surveillance du musée moderne établi audit palais ; frais de conservation, d'entretien, de chauffage et de mobilier, et frais divers imprévus de ce musée : fr. 14,240. »
- Adopté.
« Art. 126. Monuments à élever aux hommes illustres de la Belgique ; subsides aux villes et aux provinces ; médailles à consacrer aux événements mémorables : fr. 10,000.
« Charge extraordinaire : fr. 80,000. »
- Adopté.
« Art. 127. Subsides aux provinces, aux villes et aux communes dont les ressources sont insuffisantes pour la restauration des monuments ; subsides pour la restauration et la conservation d'objets d'art et d'archéologie, appartenant aux administrations publiques, aux églises, etc. ; travaux d'entretien aux propriétés de l'Etat qui ont un intérêt exclusivement historique : fr. 50,000. »
- Adopté.
« Art. 128. Commission royale des arts et monuments. Personnel. Jetons de présence, frais de voyage des membres de la commission, du secrétaire et des dessinateurs ; bibliothèque, mobilier, chauffage, impressions, frais de bureau, achat d'instruments, compte rendu des séances générales, indemnités des sténographes et frais de publication : fr. 23,700. »
- Adopté.
« Art. 129. Rédaction et publication du bulletin de la commission d'art et d'archéologie : fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 130. Frais de route et de séjour des trois commissaires de l'Académie royale de Belgique, adjoints à la commission royale des arts et des monuments, et des membres correspondants de cette commission : fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 130 bis. Appropriation de la rotonde du Musée royal de peinture qui doit servir d'annexe à la salle des séances publiques de l'Académie royale des lettres, des sciences et des beaux-arts de Belgique : fr. 10,000. »
MpVµ. - La section centrale a adopté l'article 130bis.
- L'article 130bis est mis aux voix et adopté.
« Art 131. Inspection des établissements dangereux, insalubres ou incommodes projetés ou en exploitation ; personnel ; frais de route et de séjour, dépenses diverses et travaux relatifs à cette inspection ; charge extraordinaire : fr. 12,000. »
- Adopté.
« Art. 132. Frais des commissions médicales provinciales ; service sanitaire des ports de mer et des côtes ; subsides en cas d'épidémies ; encouragements à la vaccine ; subsides aux sage-femmes pendant et après leurs études : 1° pour les aider à s'établir ; 2° pour les indemniser des soins de leur art qu'elles donnent aux femmes indigentes ; récompenses pour services rendus pendant les épidémies ; impressions, souscriptions et achat de livres ; dépenses diverses ; prix quinquennal institué par l'arrêté royal du 25 novembre 1859, en faveur des meilleurs ouvrages qui auront été publiés par des auteurs belges, relativement aux sciences médicales : fr. 84,000.
« Charge extraordinaire : fr. 5,000.
MpVµ. - Le gouvernement, d'accord avec la section centrale, propose de supprimer les 5,000 francs qui figuraient à l'extraordinaire et de biffer du libellé de l'article les mots : « Prix quinquennal institué par l'arrêté royal du 25 novembre 1859 en faveur des meilleurs ouvrages qui auront été publiés par des auteurs belges, relativement aux sciences médicales. »
- L'article 132, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.
« Art. 133. Académie royale de médecine : fr. 23,140. »
- Adopté.
« Art. 134. Conseil supérieur d'hygiène publique ; jetons de présence et frais de bureau : fr. 4,200. »
- Adopté.
« Art. 137. Traitement du commissaire du gouvernement près la société concessionnaire des jeux de Spa : fr. 7,000. »
- Adopté.
M. Kervyn de Lettenhove. - Messieurs, l'année dernière, le gouvernement a promis d'examiner la question de la suppression des jeux de Spa. Je viens demander à M. le ministre de l'intérieur ce qu'il pense de cette suppression et quelles sont les mesures qu'il a prises pour la préparer.
M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, l'année dernière, le gouvernement a eu l'honneur de soumettre à la Chambre un rapport très détaillé sur les jeux de Spa, leur histoire, le produit de ces jeux, l'emploi de ce produit.
Il a, comme l'a dit l'honorable M. Kervyn, déclaré à la Chambre qu'il aurait probablement cette année a faire connaître ses intentions quant à la suppression des jeux.
(page 132) Je crois pouvoir déclarer aujourd'hui que le gouvernement a l'intention de supprimer les jeux de Spa. En principe, c'est une question décidée.
Mais la Chambre, l'année passée, à la suite de la lecture du rapport, a bien voulu comprendre qu'il y avait certains ménagements à prendre à l'égard de la ville de Spa, qui est engagée dans des dépenses considérables et à qui il faut nécessairement assurer les moyens de recevoir les étrangers, lorsque les jeux seront supprimés, de manière à leur rendre agréable le séjour de cette ville. Il faut donc concilier deux choses : la suppression des jeux et les intérêts de la ville, de Spa.
C'est pour ce motif, que le gouvernement pense que la suppression immédiate est impossible.
Il y a d'ailleurs, dans les circonstances où nous nous trouvons, des motifs pour ne pas prononcer cette suppression immédiate. C'est que très probablement ces jeux seront supprimés prochainement dans les localités des nouvelles provinces du royaume de Prusse ; il convient donc que nous fassions coïncider la suppression des jeux de Spa avec la suppression des jeux dans ce pays.
En maintenant donc encore les jeux pendant quelques années, il sera possible de laisser à la ville de Spa les moyens de faire face à toutes ses dépenses, et nous pourrons, lorsque cette suppression sera prononcée dans les pays étrangers, voir jusqu'à quel point le gouvernement doit abandonner à la ville une partie des ressources que les jeux lui procurent jusqu'ici.
Je pense donc, tout en déclarant de la manière la plus formelle que la suppression des jeux aura lieu, qu'il convient de laisser au gouvernement le soin de régler ce qu'il y a à faire pour sauvegarder les intérêts de la ville de Spa.
On me demande : A quelle époque supprimez-vous ? Il me serait assez difficile de le dire. Cependant, je crois pouvoir déclarer à la Chambre que les jeux ne seront pas maintenus au delà de 1870, bien que le contrat de concession porte le terme de 1880.
Les jeux seront donc supprimés dix années avant l'expiration du contrat. Peut-être le seront-ils plus tôt ; mais, dans aucun cas, ils ne le seront plus tard.
M. Kervyn de Lettenhove. - Je comprends que, vis-à-vis la ville de Spa, il y a des ménagements à garder et une négociation à conduire, mais je ne pense pas que, dans l'opinion de la Chambre, ces ménagements soient synonyme des retards trop prolongés.
J'appelle donc sur ce point toute l'attention du gouvernement, afin que, par une conduite à la fois prudente et énergique, il hâte autant que possible la suppression des jeux de Spa.
En effet, lorsque la section centrale émet à l'unanimité le vœu de cette suppression, lorsque à plusieurs reprises déjà le même sentiment a été exprimé en quelque sorte par l'unanimité de la Chambre, il serait déplorable qu'on restât impuissant devant cette situation et que, sous un prétexte de retard, on perpétuât un mal que nous flétrissons à juste titre.
Au moment où la Chambre, dans une adresse récente, a déclaré que le développement de l'instruction et de la moralisation dans toutes les classes de notre population serait toujours le but de ses efforts, elle n'en saurait donner une meilleure preuve qu'en effaçant ce qui aujourd'hui constitue la responsabilité, je dirais volontiers la complicité du gouvernement et du pays dans ces jeux qui sont à la fois une cause de dégradation pour les classes riches et une cause d'envie pour les classes laborieuses.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art. 136. Traitements temporaires de disponibilité ; charge extraordinaire : fr. 35,932. »
- Adopté.
« Art. 137. Dépenses imprévues non libellées au budget. Loyer du local qui a servi à l'exposition générale des beaux-arts : fr. 5,900.
« Charge extraordinaire : fr. 7,400. »
- Adopté.
La Chambre décide qu'elle passera immédiatement au vote définitif du budget.
Les articles amendés au premier vote sont définitivement adoptés.
L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Article unique. Le budget du ministère de l'intérieur est fixé, pour l'exercice 1867, à la somme de douze millions quatre-vingt-sept mille cent quatre-vingt-cinq francs trente-neuf centimes (12,087,185 fr. 39 c.), conformément au tableau ci-annexé. »
Il est procédé au vote par appel nominal sur cet article unique.
74 membres répondent à l'appel nominal.
68 votent l'adoption.
5 votent le rejet.
1 (M. de Naeyer) s'abstient.
En conséquence, le budget est adopté ; il sera transmis au Sénat.
Ont voté l'adoption :
MM. Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Van Renynghe, Van Wambeke, Warocqué, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Beeckman, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Broustin, Bruneau, Carlier, Couvreur, Crombez, David, de Baillet-Latour, de Brouckere, de Coninck, de Haerne, Delcour, de Liedekerke, de Maere, de Mérode, de Rossius, Descamps, Desmedt, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Dewandre, Dumortier, Frère-Orban, Funck, Hagemans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Lange, Le Hardy de Beaulieu, Lienart, Lippens, Magherman, Moncheur, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Nothomb, Preud'homme, Rogier, Sabatier, Tesch, Thonissen, T' Serstevens, Van Cromphaut, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde et Ernest Vandenpeereboom.
Ont voté le rejet :
MM. Coomans, Delaet, Gerrits, Hayez et Jacobs.
MpVµ. - Le membre qui s'est abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.
M. de Naeyerµ. - Je me suis abstenu par des motifs que j'ai fait connaître à différentes reprises. Dans ma manière de voir, le budget de l'intérieur consacre un système exagéré d'intervention gouvernementale, auquel il m'est impossible de donner mon adhésion.
M. Kervyn de Lettenhove (pour une motion d’ordre). - Messieurs, l'ordre du jour porte en première ligne le projet de code pénal amendé par le Sénat ; jusqu’à ce moment le rapport n'a pas été distribué et il soulève de graves questions qu'il convient d'étudier avec soin. Je crois donc qu'il est impossible de maintenir cet objet à l'ordre du jour de la prochaine séance.
M. Teschµ. - Messieurs, le rapport sera distribué, je pense, aujourd'hui ou demain. Je crois néanmoins qu'il vaut mieux discuter d'abord tous les budgets pour les envoyer à temps au Sénat qui doit se réunir le 17.
M. le ministre de la justice (M. Bara). - La proposition de M. Tesch est évidemment ce qu'il y a de plus convenable, seulement je crois qu'il n'a pas entendu dire que dans aucun cas le code pénal ne serait discuté avant les vacances de Noël ; il peut très bien se faire que les budgets prennent très peu de temps.
L'honorable M. Kervyn a dit que le code pénal soulève des questions qui nécessitent un long examen : cela est très vrai, mais il est à noter que le code pénal est à l'étude depuis 1854, je pense, et les membres de la Chambre ont depuis longtemps entre les mains le projet amendé par le Sénat. Quant à la discussion qui a pu avoir lieu en section centrale, je n'en ai pas encore connaissance, mais il est évident qu'elle portait sur des points débattus dans la doctrine, qui l'ont été de nouveau, soit au Sénat, soit au sein de la Chambre des représentants. Toutes ces questions se trouvent depuis longtemps posées devant l'opinion publique.
M. Kervyn de Lettenhove. - J'ai été mal compris par M. le ministre de la justice ; ce n'était pas un ajournement prolongé que je venais demander ; je me suis borné à faire remarquer à la Chambre que dans le cas où le rapport de l'honorable M. Pirmez ne serait distribué que lundi, nous serions dans l'impossibilité d'aborder la discussion dès le lendemain.
M. Teschµ. - Mon intention n'est pas du tout de faire renvoyer la discussion après les vacances, mais je demande que, pour satisfaire à la loi de comptabilité, nous votions d'abord les budgets qui sont prêts.
MpVµ. - Ainsi, le code pénal sera placé à la suite des budgets à l'ordre du jour.
(page 133) « Article unique. La convention conclue, le 11 octobre 1866, entre la Belgique et le Portugal pour la garantie réciproque de la propriété des œuvres d'esprit et d'art, des dessins, des modèles et des marques de fabrique, sortira son plein et entier effet. »
Ce projet de loi est mis aux voix par appel nominal et adopté à l'unanimité des 67 membres présents.
Ce sont :
MM. Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Wambeke, Warocqué, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Beeckman, Bouvier, Bricoult, Broustin, Bruneau, Carlier, Coomans, Crombez, David, de Baillet-Latour, de Brouckere, de Coninck, Delaet, Delcour, de Liedekerke, de Maere, de Mérode, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Dewandre, d'Ursel, Frère-Orban, Funck, Hagemans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jouet, Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Lange, Le Hardy de Beaulieu, Lienart, Lippens, Magherman, Moncheur, Moreau, Mouton, Muller, Rogier, Sabatier, Thonissen, T' Serstevens, Van Cromphaut, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde et Ernest Vandenpeereboom.
« Article unique. L'acte d'accession du duché de Saxe-Altenbourg à la convention conclue le 28 mars 1863, entre la Belgique et la Prusse, pour la garantie réciproque de la propriété des œuvres d'esprit et d'art, des dessins et marques de fabrique, sortira son plein et entier effet. »
Il est procédé au vote par appel nominal.
62 membres seulement répondent à l'appel. La Chambre n'est plus en nombre.
Ont répondu à l'appel nominal :
MM. Van Humbeeck, Van Renynghe, Van Wambeke, Warocqué, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Beeckman, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Broustin, Bruneau, Carlier, Coomans, Crombez, David, de Baillet-Latour, de Brouckere, de Coninck, Delaet, Delcour, de Maere, de Mérode, de Naeyer, Descamps, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Dewandre, Dumortier, d'Ursel, Frère-Orban, Funck, Gerrits, Hagemans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jouet, Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Lange, Le Hardy de Beaulieu, Liénart, Lippens, Magherman, Moncheur, Moreau, Preud'homme, Rogier, Sabatier, Thonissen, T'Serstevens, Alphonse Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde et Ernest Vandenpeereboom.
Sont absents sans congé :
MM. Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Wasseige, Ansiau, Braconier, Couvreur, de Florisone, de Haerne, de Lexhy, d'Elhoungne, de Liedekerke, (erratum, page 170) de Muelenaere, de Rongé, de Rossius, de Woelmont, d'Hane-Steenhuyse, Dubois d'Aische, Dupont, Elias, Guillery, Hayez, Janssens, Lambert, Landeloos, Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Mascart, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Reynaert, Schollaert, Snoy, Tack, Tesch, Thibaut, Valckenaere, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth et Vander Maesen.
Sont absents avec congé :
MM. Goblet, Rodenbach, (erratum, page 170) de Moor, Dolez, Le Bailly de Tilleghem, Vleminckx, Van Overloop, Hymans, de Kerchove, de Macar, De Fré, Royer de Behr et Thienpont.