Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Documentation Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 3 août 1865

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1864-1865)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1602) M. de Moor, sécrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Van Humbeeck, secrétaireµ, fait lecture du procès-verbal de séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Moorµ présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre :

« Des habitants de Pamel demandent l'établissement d'une station à Okegem sur le chemin de fer de Dendre-et-Waes. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des habitants de Zonhoven demandent que la halte du chemin de fer international de Hasselt à Eyndhoven, qui doit être établie à Zonhoven, soit placée au lieu dit : Op het zand. »

- Même renvoi.


« MM. Vleminckx et Jacobs demandent des congés. »

- Accordés.

Interpellation

M. Thibaut. - Messieurs, je demande pardon à la Chambre de la distraire un moment de son ordre du jour, mais je ne puis laisser passer inaperçu un arrêté royal du 13 juillet dernier qui concerne la ville de Dinant. Cet arrêté est arrivé presque fortuitement à ma connaissance, car il n'a pas paru au Moniteur. Je le trouve dans un journal de la localité du 30 juillet. Voici comment il est conçu :

« Sur la proposition de notre ministre de l'intérieur :

« Nous avons arrêté et arrêtons :

« Art. 1. Sont retirés les actes par lesquels la députation permanente du conseil provincial de Namur a accordé aux communes de cette province, désignées dans le tableau ci-joint, l'autorisation d'adopter des écoles privées pour tenir lieu d'écoles communales.

« Art. 2. Notre ministre de l'intérieur, etc.

« Donné à Laeken, le 13 juillet 1865.

« (Signé) Léopold. »

Dinant, école du sieur Dominique Pierron, Florennes, Surice, les instituteurs refusent de se soumettir au régime de l'inspection établi par la loi.

Messieurs, à cette époque de notre session, je n'ai pas l'intention de provoquer une discussion de principe. Je demanderai seulement quelques explications à M. le ministre de l'intérieur sur le fait allégué à l’appui de son arrêté. Plus lard, à la session prochaine, lors de la discussion de l'adresse ou du budget de l'intérieur, nous pourrons, si nous le jugeons convenable, revenir sur les questions de principe que cet arrêté peut soulever. Je me borne donc à demander à M. le ministre de. l'intérieur une explication sur le motif allégué à l'appui de son arrêté.

M. le ministre déclare que les instituteurs dont il est question refusent de se soumettre à l'inspection.

Il est évident que M. le ministre ne le sait pas personnellement, il ne peut l'avoir appris que par des communications du conseil communal de Dinant, ou par le rapport, soit de l'inspecteur provincial, soit de l'inspecteur cantonal.

Je demande à M. le ministre de nous dire sur quelle autorité il s'appuie pour déclarer que les frères de la doctrine chrétienne (car il s'agit de frères) de Dinant se refusent à l'inspection.

Je puis, quant à moi, déclarer à la Chambre que le fait est controuvé.

Je pourrai entrer sur ce point dans quelques détails, lorsque M. le ministre aura bien voulu fournir des explications.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, depuis quatre ans à peu près que j'ai l'honneur de siéger sur ces bancs, j'ai eu maintes fois l’occasion d'expliquer à la Chambre en quel sens le gouvernement interprète les articles 1, 2, 3 et 4 de la loi du 23 septembre 1842.

Cette interprétation a été combattue par des membres de la législature, elle a été soutenue par d'autres, mais je ne crois pas me tromper en disant qu'elle a été approuvée par la majorité du parlement, et qu'en conséquence le gouvernement est autorisé à appliquer les principes qui ont été approuvés dans cette enceinte.

M. Thibaut. - Nous réservons cette question-là.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Soit, mais je maintiens que j'ai le droit et le devoir de mettre en pratique l'interprétation que je crois la seule bonne, la seule légale, et que mes prédécesseurs, y compris l'honorable M. de Decker, avaient, du reste, déjà admise avant moi. Il serait inopportun, je pense, de discuter en ce moment la question de principe.

M. Mullerµ. - Nous l'avons déjà discutée.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Sans doute, nous l'avons discutée cinq ou six fois depuis quatre ans ! Une de ces discussions a duré quinze jours, et ces débats forment la matière de plusieurs volumes avec notes et commentaires. Il n'y a donc pas lieu de recommencer cette discussion ; aussi je me borne à constater que la jurisprudence admise par le gouvernement peut se résumer ainsi :

L'école communale est la règle, l'école adoptée est l'exception.

Pour dévier de la règle et pour autoriser l'exception, il faut que la commune qui demande à avoir une école adoptée se trouve dans une position exceptionnelle et qu'elle ne puisse pas organiser une école communale ; or, je vous le demande, la ville de Dinant qui compte, si je ne me trompe, une population de 7,000 à 8,000 âmes, se trouve-t-elle dans une pareille position ?

Je ne puis l'admettre ; une ville de cette importance ne peut pas abdiquer ses droits en matière d'enseignement ; elle ne peut les déléguer même en partie à des tiers, elle doit diriger l'enseignement primaire, l'enseignement des enfants pauvres surtout, c'est son devoir, et le gouvernement doit le lui imposer si elle ne l'accomplit pas. Tels sont les principes que j'ai soutenus dans cette enceinte, et ces principes, je les applique sans hésitation.

Se conformant à l'interprétation donnée par le gouvernement, les autorités supérieures qui ont la haute surveillance des écoles dans la province de Namur ont émis l'avis qu'il y avait lieu de retirer l'autorisation d'adoption pour l'école de Dinant.

M. Thibaut. - Quelles sont ces autorités ?

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Les autorités chargées de la haute surveillance de l'enseignement primaire, l'inspecteur provincial civil et le gouverneur... (Interruption.) Ces fonctionnaires ont bien fait d'appliquer les principes admis par le gouvernement sur la matière, et je n'ai pas hésite à proposer au Roi de retirer l'autorisation d'adoption de l'école adoptée de Dinant.

Quant à la position du personnel de l'école adoptée, il résulte, paraît-il, du rapport ou du tableau fourni, que les frères de Dinant se soumettaient plus ou moins...

M. Thibaut. - Vous devez le savoir mieux que moi.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je ne connais pas de noms propres.

M. Thibaut. - Vous devez savoir ce que vous avez écrit.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Sans doute, mais je ne connais, dis-je, que des instituteurs privés ; je ne connais en administration ni frères ni sœurs.

En ce qui concerne donc la question de savoir à quel point les instituteurs adoptés se soumettaient à l'inspection, je ne pourrais pas donner en ce moment des renseignements positifs. Je n'ai pas pu examiner le rapport détaillé sur lequel l'arrêté est basé ; ce rapport a été distrait du dossier (page 1603) pour être communiqué, je pense, à l'un des fonctionnaires de la province de Namur ; mais il résulte d'une note que si les instituteurs adoptés de Dinant se sont soumis à l'inspection, ifs ne s'y sont soumis que partiellement, plus ou moins. Ainsi, par exempke, quand il s'est agi de faire usage des livres adoptés par le gouvernement, ces instituteurs n'ont consenti à les employer que lorsque ceux provenait de la corporation et qui étaient en magasin auraient été épuisés ; quant aux conférence ces instituteurs ont bien voulu consentir à y assister, mais à la condition que ces conférences eussent lieu chez eux ou à Dinant ; il en est de même de quelques autres dispositions réglementaires.

Quoi qu'il en soit, ces circonstances, en réalité, sont secondaires ; le véritable motif qui m'a déterminé à retirer l'autorisation d'adoption, c'est qu'une ville de l'importance de Dinant doit avoir des écoles communales et qu'elle doit soigner par elle-même l'instruction des enfants pauvres ; telles sont les explications que je puis donner à la Chambre.

Si l'on veut recommencer, sur cette question de l'instruction primaire, une discussion sérieuse et approfondie, je suis aux ordres de l'assemblée, et je suis prêt à discuter, soit maintenant, soit lors de l'examen du budget de l'intérieur.

M. Thibaut. - Je ne demandais pas à M. le ministre de l'intérieur une déclaration de principes. Nous les connaissons de longue date ; il les maintient, soit ; vous connaissez aussi les nôtres ; nous les maintenons également. Mais je ne crois pas qu'il y aurait utilité, ni possibilité même, d'entamer une grande discussion aujourd’hui sur ces questions. Nous la soutiendrons, je suis loin de m'y opposer, dans un moment plus opportun.

Quoi qu'il en soit, M. le ministre a cru devoir résumer l'interprétation qu'il donne à la loi de 1842. Je regrette qu'il n'ait pas mis dans l'arrêté du 13 juillet la franchise qu'il a montrée devant la Chambre. Si M. le ministre a cru devon retirer l'adoption en vertu de ses principes, pourquoi ne l'a-t-il pas dit dans l'arrêté ? pourquoi s'est-il basé sur un fait controuvé, sur une erreur qu'il avoue ? (Interruption.)

Je vous demande mille pardons, M. le ministre, vous avez dit que l'inspection était acceptée plus ou moins par l'établissement dont il s'agit.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Mais pas assez pour que l'adoption fut maintenue.

M. Thibaut. - Je ne sais pas ce que c'est qu'une inspection acceptée a plus ou moins forte dose. L'inspection est acceptée ou elle ne l'est pas. Je puis dire ceci : c'est que plusieurs fois les inspecteurs se sont présentés à l'école des frères de Dinant et qu'ils ont pu inspecter toutes les classes sans la moindre difficulté.

Il y a, en possession du directeur de l’établissement des frères,, une volumineuse correspondance avec les inspecteurs, qui démontre que ces fonctionnaires ont été en relation fréquente avec l'école des frères et que toutes les questions qui pouvaient intéresser l'instruction ont été agitées entre eux et le directeur de l'établissement.

Ici je dois faire observer qu'ua nouvel inspecteur cantonal a été nommé il y a moins d'un an. Il est chargé de trois cantons de la province de Namur ; il n'a pu jusqu'aujourd’hui visiter qu'une fois toutes les écoles de son ressort et il a inspecté l'école des frères de Dinant au mois de mai dernier. Le frère directeur a engagé cet inspecteur à veair le plus souvent possible visiter sou école.

M. le ministre a abordé une autre question : les frères ne veulent pas se soumettre aux prescriptions de la loi en ce qui concerne les livres. Voici ce qui s'est passé.

En 1863, l'inspecteur provincial a demandé au directeur de l’école des frères de remplacer certains livres en usage dans l'établissement par d'autres livres qu'il recommandait d'une manière toute spéciale. Qu'est-il arrivé ? Mais le directeur de l'établissement a répondu à l'inspecteur : Nous sommes prêts à accepter les livres que vous nous recommandez ; mais comme nous avons deux cents enfants pauvres, nous demandons que la commune de Dinant nous accorde un subside pour procurer à tous tes enfants les nouveaux livres dont il est question.

L'inspecteur a trouvé que cela était raisonnable, mais le conseil communal de Dînant a refusé le subside ; M. l'inspecteur, je crois pouvoir l'affirmer, a déclaré qu'en présence de ce refus de l'administration communale, il y avait lieu, selon lui, de maintenir le statu quo.

M. le ministre a dit aussi que les frères ne veulent assister aux conférences que lorsqu'elles ont lieu dans leur établissement. C'est encore une erreur.

D'abord je crois que les inspecteurs peuvent dispenser les instituteurs privés d'assister à toutes les conférences ; ou a toujours accordé la dispense aux frères de la doctrine chrétienne quand les conférences ont lieu dans des communes éloignées.

A Dinant, lorsque la conférence a lieu soit à l'école des frères, soit à l'école communale, le directeur de l'école des frères y assiste.

Je puis même affirmer que le directeur de l'école des frères de la doctrine chrétienne de Dinant a assisté, au mois de juillet dernier, à une conférence qui a eu lieu dans la commune de Gerin.

M. le ministre n'a pas parlé des concours ; serait-ce à cause des brillants succès que les élèves des frères y out toujours obtenus ?

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je répète que je n'ai pas trouvé le rapport dans le dossier ; ce que j'ai dit, je l'ai vu dans une note.

M. Thibaut. - J'insiste sur le fait relatif à l'inspection ; vous devez savoir ce que vous avez consigné dans l'arrêté. Vous déclarez que les instituteurs se refusent à se soumettre à l'inspection. C'est contre cette erreur, que je proteste. Pourquoi énoncez-vous dans un arrêté un fait qui n'est pas exact ?

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Ce qui se trouve dans l'arrêté est textuellement extrait du travail d'ensemble fourni par M. le gouverneur de la province de Namur et par M. l'inspecteur provincial.

M. Thibaut. - C'est alors l'inspecteur provincial qui vous a induit en erreur.

- Des membres. - Et le gouverneur donc ?

M. Thibaut. - Le gouverneur a jugé sur le rapport de l'inspecteur. Je répète donc que l'arrêté est basé sur une erreur de fait.

Je tiens à constater que cela résulte des déclarations mêmes de M. le ministre de l'intérieur.

Quant aux questions de principe, je les réserve, en ce qui me concerne, pour la session prochaine.

M. Dumortier. - Messieurs, il m'est impossible de laisser passer sans protestation la manière dont M. le ministre de l'intérieur interprète la loi sur l’enseignement primaire.

Quand une loi est claire, on appelle souvent interprétations des abus que les légistes en font. C'est ici le cas. La loi sur l'enseignement primaire est formelle. Il y a une règle : c'est l'obligation à la commune de donner l'enseignement aux enfants.

Mais quant au mode d'exécution, on a laissé la liberté à la commune.

Je suis surpris que M. le ministre de l'intérieur, si grand partisan des droits des communes, veuille enlèver à la commune la plus belle de ses prérogatives, celle de ne pas être liée à la volonté du pouvoir, en matière d'enseignement.

La loi met à la disposition de la commune trois moyens da faire donner l'enseignement aux enfants : créer une école, adopter une école, subsidier uue école. Prétendre que l'école communale est la règle, que l'école adoptée est l'exception et que l'école subsidiée ne peut pas exister, c'est refaire par des circulaires une loi dont le texte est clair et certain.

Maintenant, pour obtenir un subside en faveur d'une école, il faut que l'école se soumette à l'inspection.

Il faut que l'école se soumette à la double inspection, à l'inspection de l'autorité civile et à l'inspection de l'autorité ecclésiastique, c'est-à-dire qu'il faut qu'on donne dans l'école et l'enseignement civil et l'enseignement religieux. Voilà la seconde règle établie par la loi.

Uue fois ces règles accomplies, la commune est libre de faire ce qu'elle veut, de choisir ce qu'elle veut, et c'est là un des grands principes, c'est un des plus beaux principes de l'autorité communale.

Maintenant on veut de l'instruction faire une affaire du gouvernement. Mais c'est attenter à la liberté communale. Encore une fois, la commune a trois moyens : ou bien créer une école, ou bien adopter une école, ou bien subsidier une école. Voilà les moyens qui sont à son choix. La commune doit l'instruction ; l'instruction doit être donnée sous la double inspection ; après cela, la commune est libre.

Mais je le vois, et le fait n'est que trop évident, c'est une guerre déclarée à l'enseignement religieux des frères.

Or, savez-vous qai a fondé les écoles des frères de Dinant ? Je m'en souviens comme si c'était aujourd'hui ; c'est un des vôtres, c'est un des hommes les plus honorables qui soient sortis de la révolution de 1830 ; c'est l'honorable M. Pirson, ce vieil athlète de la liberté. C'est lui qui a fondé les écoles des frères de la Doctrine chrétienne de Dinant ? C'est cette œuvre d un des hommes les plus méritants, d'un des hommes les plus dévoués à la liberté, que vous venez renverser ; et c'est un ministère libéral qui renverse l'œuvre de cet honnête citoyen.

(page 1604) Mais tandis qu'on veut ainsi écarter les écoles chrétiennes des frères, sans doute pour se venger de l'arrêté pris par le conseil provincial de la Flandre orientale, je voudrais bien savoir si certaines écoles de filles fondées à Bruxelles, dans lesquelles on fait profession de solidarisme et d'athéisme, et qui reçoivent un subside de la commune, reçoivent ce subside avec l'assentiment du gouvernement. On supprime les écoles catholiques et l'on approuve la fondation d'écoles d'athéisme, qui ont pour but d'enlever au peuple le plus saint de ses droits, le principe religieux, qui fait sa force, qui fait la force de la nationalité belge. Qu'on s'explique sur ce point.

Quelle est la position du gouvernement dans cette affaire ? Ces sortes d'écoles sont-elles soumises à l'inspection religieuse ? Et si elles sont mises à l'inspection religieuse, l'on doit avoir des rapports des inspecteurs. Que l'on produise ces rapports et nous serons éclairés. Si votre système est de bannir la religion de l'instruction et de favoriser les écoles d'athéisme, dites-le, nous saurons sur quoi nous devons compter.

Je demande donc une explication formelle. Puisque le gouvernement supprime, sous un prétexte mensonger, les écoles chrétiennes de la province de Namur, je demande quelle est sa conduite vis-à-vis de ces écoles de filles, fondées dans la capitale, et dans lesquelles on ne permet pas aux enfants de dire leurs prières, dans lesquelles on va jusqu'à enlever le crucifix pour que les enfants n'aient pas sous les yeux le signe du principe religieux. Puisque la question est soulevée, je demande si le gouvernement a deux lignes de conduite, l'une contraire à l'enseignement catholique, l'autre favorable à l'enseignement des athées et des solidaires.

M. Wasseige. - Je n'ai pas l'intention de prolonger ce débat, cette séance étant probablement la dernière de la session. Je ne dirai qu'un mot.

L'honorable ministre, dans les explications qu'il a données à propos de l'acte qu'il a posé à Dinant, a été beaucoup plus catégorique, a été beaucoup plus net que son arrêté ; c'est que les explications viennent de lui qui a un parti pris et qui sait où il veut aller, et que son arrêté a été, comme il le dit lui-même, la reproduction exacte des rapports de ses agents, qui ne savent pas encore jusqu'où ils peuvent le suivre dans l'interprétation de la loi de 1842.

L'honorable ministre vous l'a dit carrément ; si les écoles adoptées se soumettent ou ne se soumettent pas à l'inspection, c'est pour lui le petit côté de la question ; ce n'est pas pour si peu de chose qu'il maintient ou supprime. Pour lui toutes les écoles adoptées doivent disparaître dans un temps donné. Il nous l'a déclaré dans une discussion antérieure, il l'a répété à plusieurs reprises.

Toutes les écoles adoptées, tenues par des corporations religieuses, doivent disparaître dans un délai donné. Leur existence n'est qu'une question de temps. Pour Dinant et Florennes, on les fait disparaître aujourd’hui ; toutes disparaîtront bientôt si la jurisprudence, dont l'honorable ministre est ici l'interprète, doit encore triompher longtemps. Eh bien, je répète que cela est en contradiction manifeste avec le texte de la loi, et avec les circulaires qui ont accompagné sa mise à exécution, et avec tous les précédents ; mais je me contente, pour le moment, de cette protestation.

Je désire seulement qu'il soit bien constaté aux yeux du pays que c'est d'après un principe arrêté et irrévocable que toutes les écoles adoptées doivent disparaître. Voilà la raison et la seule raison pour laquelle on a fait disparaître celles de Dinant et de Florennes. Que le pays le sache et apprécie, voilà tout ce que je veux.

Quant aux motifs invoqués dans l'arrêté royal, ce n'est un prétexte que des agents plus timides que le ministre ont pu exagérer, inventer même, comme on le dit derrière moi, pour colorer aux yeux des populations mécontentes l'acte qu'ils provoquaient, mais dont ils n'osaient pas avouer tout crûment les véritables raisons.

Ils n'ont pas eu l'énergique franchise de M. le ministre. Le prétexte est d'eux seuls, mais M. le ministre déclare qu'il n'a pas besoin de prétexte pour faire disparaître à sa volonté toutes les écoles adoptées.

Cependant, nous dit l'honorable ministre : « Je n'ai fait que suivre les rapports de mes agents, de l'inspecteur provincial et du gouverneur. » Eh bien, messieurs, c'est comme si l'honorable ministre nous disait : J'ai suivi le rapport de mon inspecteur seul, rapport qui ne se trouve pas même au dossier et dont l'honorable ministre ne peut apprécier le contenu que par une note très succincte, car en général on sait comment ces choses se passent ; c'est l'inspecteur qui examine les faits, qui les exagère ou même les invente pour les besoins de la cause, comme cela paraît avoir eu lieu dans l'espèce actuelle. (Interruption.) Mais, messieurs, l'inspecteur ou du moins l'arrêté royal pris en conséquence de son rapport, déclare d'une manière catégorique que les frères refusent de se soumettre à l'inspection et M. le ministre vient de nous dire qu'ils s'y soumettent en partie, qu'ils s'y soumettent plus ou moins ; il est donc bien certain que pour la partie de l’inspection qu'ils acceptent, l'inspecteur a inventé, en déclarant qu'ils s'y refusaient absolument.

M. de Moorµ. - C’est un fonctionnaire des plus honorables.

M. Wasseige. - Quant au gouverneur, il aura probablement, visé le rapport de l’inspecteur provincial, ne pouvant, quant au refus fait par les frères de se soumettre à l'inspection, puiser ces renseignements au rapport.

Mais il est une autre considération que je me permets de soumettre à l'honorable ministre, et que je crois très importante dans la question qui nous occupe.

L'article 4 de la loi de 1842 porte :

« Art. 4. Dans les cas prévus par les articles précédente, la députation permanente du Conseil provincial, sauf recours au Roi, statue sur les demandes de dispense ou d'autorisation faites par la commune.

« Il sera annuellement constaté, par les soins du gouvernement, s'il y a lieu ou non de maintenir la dispense ou l'autorisation. En cas de négative, la dispense ou l'autorisation sera retirée par arrêté royal. »

C'est donc la députation permanente qui statue, qui dispense les communes d'établir une école ou qui les autorise à en adopter une.

Le paragraphe 2 dit :

La députation dispense ou autorise ; le gouvernement maintient ou retire la dispense ou l'autorisation.

Mais il est évident, messieurs, que pour rester d'accord avec le texte et surtout avec l'esprit de la loi, le gouvernement ne peut agir sur le rapport seul de ses agents directs, et retirer l'autorisation demandée, par l'autorité communale et accordée par la députation permanente, sans consulter auparavant ces administrations, qui certainement sont le plus à même d'éclairer sa religion et de discuter les raisons que d'autres agents pourraient faire valoir afin d'annuler des actes provoqués et autorisés par elle. Cela serait de toute convenance, quand cela ne se trouverait pas dans la loi ; mais, je le répète, cela est implicitement contenu dans l'article 4.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Mais pas sur les retraits.

M. Wasseige. - La loi permet aux communes l'adoption d'une école avec l'autorisation de la députation permanente et je maintiens que d'après le texte et l'esprit de l'article cité par moi, si le gouvernement est autorisé à retirer cette autorisation, il ne peut convenablement le faire sur les seuls rapports de ses agents directs ; il est dans l'esprit de la loi qu'il consulte également les autorités qui ont été appelées d'abord à examiner les choses.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Cela n'a jamais été fait.

M. Wasseige. - Eh bien, tant pis, cela aurait dû être fait. Qui aurait donc dû être d'abord consulté ici ? L'administration communale de Dinant et la députation permanente du conseil provincial de Namur. Voilà les deux autorités qui ont concouru à créer à Dinant une école adoptée, et le gouvernement ne peut, à mon avis, sans injustice retirer cette autorisation avant d'avoir consulté ces deux autorités, et soumis à leur appréciation les raisons invoquées contre le maintien de l'état des choses.

Or, elles n'ont pas été consultées, et le journal libéral de Dinant lui-même paraît le regretter ; il déclare positivement « que le gouvernement a agi spontanément sur les rapports, sans doute, de ses agents, les inspecteurs des écoles, qui ont constaté que les écoles adoptées des sœurs et des petits frères ne remplissaient pas les conditions voulues pour l'adoption. Mais, nous pouvons l'affirmer, l'autorité communale est étrangère à ces actes. Elle n'en a pas pris l'initiative, d'une manière directe ou détournée. »

Je suppose qu'il en a été de même pour la députation permanente, et je signale cette manière d'agir comme une violation évidente de la loi de 1842 qui a déjà eu à subir de l'administration actuelle tant d'autres violations directes et détournées et qui continuera à se voir dénaturée dans son texte et son esprit, jusqu'au jour où l'on aura le courage d'en demander positivement l'abrogation.

M. Funckµ. - Messieurs, au milieu des paroles que vient de prononcer l'honorable M. Dumortier et auxquelles je n'ai ni l'envie, ni l'intention de répondre, j'ai saisi ces mots : « que l'administration communale de Bruxelles aurait établi une école de solidarisme et d'athéisme où l'on (page 1605) défendrait aux enfants de dire leurs prières. Je crois que ce sont là les paroles de l'honorable M. Dumortier.

M. Bouvierµ. - Il l'a dit.

M. Funckµ. - J'ai déjà eu l'occasion de protester devant vous contre ces allégations.

L'honorable M. Dumortier doit savoir, comme tout le monde, qu'elles sont fausses. Quant à moi, je les repousse de toutes mes forces. Ce sont là de ces bruits calomnieux qui ont été répandus par certaine presse et que je regrette, pour l'honneur du parlement, de voir reproduire ici par l'un de ses membres.

M. Bouvierµ. - Très bien ! Aux voix ! (Interruption.)

Nous ne sommes pas condamnés aux travaux forcés à perpétuité, je pense !

M. Wasseige. - Vous vous trompez de moment, M. Bouvier, nous ne sommes plus à la loi sur les fraudes électorales.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je prends la parole pour protester contre les accusations irréfléchies et injustes qu'on vient de lancer contre d'honorables fonctionnaires de la province de Namur. Je ne puis permettre qu'on vienne dire dans cette enceinte que ces fonctionnaires font des rapports faux et qu'ils induisent le ministre en erreur. L'inspecteur de la province de Namur est un des fonctionnaires les plus honorables, les plus actifs, les plus intelligents, les plus zélés que l'administration compte dans son sein ; je suis très heureux de pouvoir lui rendre ici publiquement hommage et je remercie mes honorables contradicteurs de m'en avoir fourni l'occasion. Quant à l'honorable gouverneur de cette province, je suis convaincu que lorsqu'il donne un avis il l'a mûrement médité. En se conformant avec instructions qu'il reçoit du gouvernement, ce haut fonctionnaire fait loyalement son devoir et je l'en félicite ; nul ne peut soutenir qu'il donne son avis sans avoir consciencieusement contrôlé les rapports qui lui sont fournis par l'inspecteur.

J'ai cru devoir relever ces accusations injustes, parce qu'il est pénible, pour des fonctionnaires publics qui fout leur devoir, de se voir constamment attaqués ici d'une manière injuste et quand ils ne peuvent se défendre...

M. Wasseige. - Nous n'avons pas fait de grief au gouvernement.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Vous avez fait des griefs à tous les fonctionnaires. Il n'y a pas plus de grief à faire à l'un qu'à l'autre.

M. Dumortier. - Si le fait est faux !

M. Wasseige. - Nous ne faisons pas de grief au gouverneur.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Les faits ne sont pas faux. Le gouverneur a assurément examiné les pièces fournies par les inspecteurs tout comme je les examine,moi-même. Quoi qu'il en soit, j'assume toute la responsabilité de l'acte sur moi seul.

L'honorable M. Wasseige a de très singuliers principes. Il prétend, malgré le texte formel de la loi, malgré un usage constant, que le gouvernement doit consulter le conseil communal et la députation permanente chaque fois qu'il s'agit de maintenir ou de retirer une adoption.

Les conseils communaux, messieurs, ont leurs droits ; quand ils ne veulent pas maintenir l'adoption, ils demandent l'autorisation de la retirer. Mais le gouvernement a son droit aussi. Quand il croit que les conditions sont telles que l'adoption ne doive pas être maintenue, il peut agir d'office, et il ne peut le faire qu'après s'être éclairé au moyen de renseignements que peuvent lui donner ses propres fonctionnaires. Le maintien ou le retrait d'adoption ne s'appliquent pas plus, comme on veut l'insinuer, aux établissements tenus par des membres du clergé qu'à ceux tenus par des laïques.

A la fin de chaque année, tous les gouverneurs envoient un rapport sur la situation des écoles adoptées de leur province. Dans ce rapport, qui renferme l'opinion de l'inspecteur et celle du gouverneur, on propose de maintenir les adoptions qui doivent l'être et de supprimer celles qui ne peuvent être maintenues.

J'ai reçu ce rapport pour la province de Namur à la fin de 1864. Le travail s'est fait pour cette province comme pour les autres.

Il y avait 20 propositions, les unes de maintien, les autres de retrait. Après avoir examiné ces propositions, j'ai soumis au Roi l'arrêté qui a été pris sous ma responsabilité.

L'honorable M. Dumortier, croyant défendre la liberté communale, vous dit que j’empêche les communes d'exercer leurs droits ; le contraire est vrai, car je ne veux pas que les communes abdiquent leur droit, leur prérogative la plus importante, la plus sérieuse, celle de diriger l’instruction publique. Je ne veux pas que les communes aliènent ces droits, ces prérogatives au profit de tiers et selon l'honorable M. Dumortier, la plus belle prérogative des communes serait celle de pouvoir aliéner leurs droits les plus précieux, leurs plus belles prérogatives ; je ne puis admettre pareil système.

Du reste, il est impossible de traiter cette question à la fin de la session. Sur certains détails particuliers, les documents me manquent ; mais je suis tout disposé, lors de noite prochaine réunion, à fournir à la Chambre tous les renseignements désirables. La Chambre, qui pourra se convaincre alors que tous les faits allégués sont parfaitement exacts, voudra bien, je l'espère, approuver dès à présent l'acte que j'ai posé, car aucun doute ne peut exister sur la loyauté des fonctionnaires qui, en cette circonstance, m'ont aidé de leurs conseils.

- Des voix. - La clôture !

MpVµ. - Il n'est pas d'usage de prononcer la clôture après le discours d'un ministre.

M. Dumortier. - Je ne puis pas admettre, comme l'a dit M. le ministre de l'intérieur, que le droit de la commune puisse devenir l'aliénation de ses droits. La commune qui choisit, la commune qui adopte n'aliène rien, puisque en définitive l'inspection est toujours là comme garantie de la bonté de l'instruction. Mais on a un but, on veut créer, sous une forme nouvelle, le monopole de l'instruction publique entre les mains du gouvernement. En 1831, on voulait prévenir le retour de ce monopole, et si les principes que M. le ministre professe aujourd'hui avaient été exposés alors, il ne se serait pas trouvé trois membres dans la Chambre pour les soutenir. Rétablir le monopole contre lequel la révolution de 1830 s'est faite, c'est un acte odieux.

Je me réserve de répondre à ce qu'a dit M. Funck ; je prendrai des renseignements.

Mais je crois pouvoir affirmer que ces renseignements ne feront que confirmer ce que j'ai avancé.

M. Funckµ. - En attendant je donne à vos accusations le démenti le plus formel.

- Des voix. - La clôture !

M. Wasseige. - Je demande la parole pour un fait personnel.

MpVµ. - Il n'y a rien de personnel dans ce qui a été dit.

M. Wasseige. - Il me paraît que je suis le meilleur juge.

MpVµ. - La clôture a été demandée, je vous accorde la parole sur la clôture.

M. Wasseige. - J'ai été mis en cause par l'honorable ministre de l'intérieur qui m'a reproché d'avoir accusé avec légèreté dos fonctionnaires de la province de Namur ; je demande à pouvoir me justifier.

- Des voix. - Non ! non ! la clôture !

MpVµ. - Vous le voyez, M. Wasseige, on insiste pour la clôture.

M. Wasseige. - Je ne tiendrai pas trois minutes.

M. de Borchgraveµ. - Si vous l'aviez laissé parler, il aurait déjà fini.

- Voix nombreuses. - Parlez, parlez !

M. Wasseige. - L'honorable ministre de l'intérieur me reproche d'avoir accusé avec légèreté des fonctionnaires de la province de Namur qui n'étaient pas ici pour se défendre.

Je ferai remarquer à M. le ministre que lorsqu'il se sert dans la discussion et pour faire triompher son opinion du rapport d'un fonctionnaire, le droit de tous les membres de la Chambre est de discuter ce rapport à tous les points de vue et que le droit de la Chambre serait complétement illusoire, si nous ne pouvions pas le faire avec toute liberté d'appréciation. D'ailleurs l'honorable ministre est là pour justifier ses agents, tandis que les autres accusés n'ont personne.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Vous ne pouvez pas les calomnier.

M. Wasseige. - Je ne les ai pas calomniés, il n'y a eu personne de calomnié ici si ce n'est les malheureux instituteurs que l'on voulait supprimer. (Interruption.) J'ai dit que les faits contenus dans le rapport devaient avoir été exagérés, sinon inventés, puisque d'après le dire du ministre lui-même, ils avaient donné lieu à l'arrêté royal que je critique. J'ai expliqué ce que je voulais dire par là ; l'honorable (page 1606) ministre ayant déclaré que les frères s'étaient soumis plus au moins à l'inspection, j'ai dit que lorsque les fonctionnaires affirmaient le contraire ils avaient inventé au moins en partie.

Quant à l'honorable gouverneur de la province de Namur, je n'ai articulé contre lui aucun grief...

- Voix à gauche. - Je le crois bien.

M. Wasseige. - J’estime son honorabilité et son impartialité, autant que qui que se soit, autant que l'honorable ministre lui-même et en ce qui le concerne je me suis borné à dire que sans doute il n'avait pas été à même de vérifier les choses par lui-même et qu'il n'avait pu que se référer au rapport qui lui était soumis, quant au fait spécial du refus des frères de la doctrine chrétienne de se soumettre à l'inspection.

Ce n'est guère en effet que dans ce rapport qu'il pouvait puiser les éléments de sa conviction. Si le rapport n'était pas exact, la faute n'en remontait pas jusqu'à lui ; il n'y avait dans cela aucun reproche à l'adresse de c ï haut fonctionnaire.

M. Dumortier. - Je demande la parole pour un fait personnel.

MpVµ. - Je vous la donne, mais je vous prie de vous renfermer dans le fait personnel.

M. Dumortier. - M. Funck s'est écrié tout à l'heure qu'il donnait à mes paroles le démenti le plus formel. C'est bien le cas, je pense, de demander la parole tour un fait personnel. Eh bien, puisque M. Funck s'exprime ainsi, je lui demanderai si les inspecteurs ecclésiastiques établis par la loi visitent l'école dont il s'agit...

M. Funckµ. - C'est une autre question.

M. Dumortier. - ... si l'enseignement religieux y est donné ; et dans ce cas je demanderai les rapports des ecclésiastiques.

MpVµ. - Mais, M. Dumortier, vous n'êtes plus dans le fait personnel.

M. Dumortier. - Comment ! Je soutiens que c'est le fait personnel.

MpVµ. - Personnel à votre argument,

M. Dumortier. - Puisque M. Funck dément mes paroles, je demande qu'on nous communique les rapports des inspecteurs ecclésiastiques. (Aux voix ! aux voix !)

M. Funckµ. - Je demande la parole.

- Voix nombreuses. - La clôture !

MpVµ. - L'incident est clos.

Projet de loi portant application générale des tarifs conventionnels et extension de la réforme douanière

Discussion générale

M. Couvreurµ. - Je servirais mal la cause que je veux servir, si j'entrais en ce moment, à la fin de la session, dans un examen approfondi du projet de loi qui nous est soumis. Le vote en serait retardé et notre plus pressant intérêt est d'assurer l'adoption de la loi.

Je me bornerai donc à quelques considérations générales, non pas pour critiquer ce qui se trouve dans la loi, mais pour exprimer des regrets au sujet de ce qui ne s'y trouve pas. Mes observations, si elles n'ont pas d'utilité immédiate, pourront au moins servir d'indication pour ce qui doit être fait dans l'avenir, et comme j'entends me tenir sur un terrain pratique, je n'invoquerai, pour signaler les lacunes de la loi, que les vœux exprimés il y a deux ans par le conseil supérieur de l'industrie et du commerce.

Vous connaissez la composition de ce conseil. Des délégués des chambres de commerce y siègent à côté de fonctionnaires des divers départements ministériels. Certes on n'accusera pas un corps ainsi constitué d'être l'organe d'utopistes. Ceux auxquels je servirai d'écho sont avant tout des hommes du fait ; ce sont des industriels, des négociants qui peuvent tous les jours apprécier combien notre régime douanier est encore défectueux.

Qu'a demandé ce conseil en matière douanière ? ^ Son premier vœu, par ordre d'importance, a été de réclamer l'abolition des douanes. Ce vœu est formulé comme un vœu de principe. L'application est réservée, mais uniquement à cause des difficultés financières qu’elle soulève. Le gouvernement est invité à les résoudre. S'en occupe-t-il ? Je l'espère et m'en remets à l'avenir. Une discussion en ce moment sur ce sujet nous mènerait trop loin.

Le second vœu est un vœu d'actualité. Il est ainsi formulé :

« Le tarif des douanes ne doit être qu'un simple instrument de perception fiscale. Il y a lieu d'abord d'en retrancher les matières premières et les machines, puis d'en éliminer graduellement tous les articles, autres que ceux soumis à l'accise dont le produit brut est peu élevé. Il faut concentrer l'impôt sur un petit nombre de natures de marchandises, prendre garde de comprimer la consommation et s'efforcer de gêner le moins possible la liberté d'allure du public consommateur. »

Voilà la profession de foi du conseil supérieur d'industrie et du commerce.

En a-t-il été suffisamment tenu compte par le projet actuel ? Je n'hésite pas à répondre négativement.

Et d'abord les machines restent frappées. Pourquoi ? Parce qu'il fallait en même temps affranchir les fontes et les fers. Maïs voilà plus de dix ans que cette mesure est réclamée par tous les partisans de la liberté commerciale, et les exportations prouvent qu'elle peut se décréter sans danger.

Le conseil demandait encore l'affranchissement des matières premières et de toutes les catégories d'articles qui, d'un mince produit pour le trésor, encombrent inutilement le tarif.

On peut beaucoup étendre ce terme de matières premières, mais tout le monde reconnaîtra qu'aucune matière ne mérite autant cette qualification que les denrées alimentaires. Les objets qui servent à réparer les forces de l'ouvrier sont des matières premières qui, avant toutes les autres, devraient entrer libres de droit. Or elles sont encore beaucoup trop frappées, et le projet actuel ne tient pas assez compte des nécessités de l'alimentation.

Je comprends qu'un ministre des finances, soucieux de conserver l'équilibre des budgets, hésite à toucher aux droits sur les céréales et sur les cafés, ces deux articles rapportant plus de cinq millions au trésor ; mais en dehors des céréales et des cafés, il y a encore beaucoup d'autres denrées d'un produit bien inférieur, tels que les poissons, par exemple, qui eussent pu être l'objet ou de réductions plus fortes ou d'une suppression complète des taxes.

Les denrées alimentaires ne sont pas les seuls objets que je voudrais signaler à l'attention du gouvernement. Il en est d'autres encore dont l'énumération complique inutilement le tarif. Le projet de loi en fait disparaître quelques-uns, notamment les cordages, l'étain, le plomb et le zinc. Ces matières ne donnaient qu'une recette de 1,000 fr. pour les cordages, de 233 fr. pour l'étain laminé, de 95 fr. pour le plomb étiré et de 113 fr. pour le zinc. C'étaient là des recettes ridicules et on a parfaitement bien fait de rayer du tarif les articles qui les produisaient.

Mais pourquoi s'est-on arrêté en si beau chemin ? Si je parcours la statistique douanière de 1863, j'y constate encore les recettes suivantes : amidon 900 fr., caractères d'imprimerie, 650 fr., cartes à jouer 580 fr., cartes géographiques 29 fr., cire 2,000 fr., crins frisés 28 fr., estampes 149 fr., filaments végétaux non tarifés 68 fr., autres que chanvre, étoupes et lin 1 fr., manuscrits 374 fr., nattes 2,200 fr., objets d'art 792 fr., pelleteries 2,200 fr., rubanerie écrite 44 fr., chandelles 14 fr.

M. le ministre me répondra peut-être que ce n'est pas pour ces malheureux 14 fr. qu'il maintient le droit sur les chandelles, mais parce que cet article s'assimile aux bougies. La raison n'en serait pas une. La chandelle c'est la bougie du pauvre, elle mérite bien une exception.

Mais les bougies elles-mêmes n'ont donné au trésor, en 1863, que 3,200 francs, et par conséquent elles pourraient disparaître du tarif avec autant de raison que les cordages, le plomb, l'étain et le zinc.

Les fabricants de bougies ne peuvent pas être opposés à cette réforme ; la plupart d'entre eux travaillent à l'aide de l'article 40 de la loi sur les entrepôts ; ils exportent les articles de leur fabrication.

Si je cite ces rubriques, c'est surtout pour faire ressortir les lacunes du projet de loi. C'est pour bien faire comprendre comment, sans compromettre les recettes du trésor, sans se jeter dans des folies téméraires, sans s'exposer à être accusé de chercher l'impossible, on aurait pu encore améliorer sensiblement notre régime douanier. Le plus important de ces articles, au point de vue de la recette, ne produit pas 2,500 francs. Les rayer tous du tarif n'eût pas imposé au trésor un sacrifice dépassant dix mille francs.

Maintenant, messieurs, que j'ai fini ma tâche la plus désagréable, que j'ai fait la part de la critique, laissez-moi faire aussi la part de l'éloge.

Le conseil supérieur aurait, indépendamment du vœu dont je viens (page 1607) de vous donner lecture, demande encore que l’administration des douanes pût s'abstenir, sans encourager la fraude, de visiter las bagages des voyageurs.

Eh bien, j'avoue que je ne trouve pas mauvais que le gouvernement n'ait pas fait droit à ce vœu. Sans doute la gêne est grande pour les voyageurs, mais elle l'est bien autrement et pour le commerce qui importe et pour le consommateur. Il est bon que MM. les protectionnistes, lorsqu'ils voyagent, s'indignent un peu contre le douanier qui bouleverse leurs coffres et tâte leurs poches ; il est bon pour tout le monde que l'aiguillon reste dans la plaie. Comme le nombre des voyageurs augmente chaque année en Europe, il faut espérer qu'il se formera contre la douane une coalition de rancunes ; c'est le moyen de former la grande ligue universelle qui renversera cet impôt, le plus odieux de tous les impôts indirects.

Le vœu du conseil supérieur de l'industrie et du commerce relatif à l'abolition des certificats d'origine a obtenu pleine satisfaction.

Ceci constitue une excellente réforme, et je félicite le gouvernement d'en avoir pris l'initiative. Cette disposition seule justifierait un vote approbatif donné au projet de loi. Le secret des opérations du commerce est un de ses privilèges ; obliger le négociant à dévoiler ces opérations, l'astreindre à mettre la douane et ses concurrents dans la confidence des lieux où il parvient à acheter au meilleur marché possible, tarir ainsi les bénéfices à leur source était une odieuse vexation.

Elle va disparaître, félicitons-nous-en et approuvons le gouvernement d'avoir, sur ce point, donné satisfaction aux réclamations dont il était saisi.

Une autre disposition sur laquelle le conseil supérieur n'avait pas spécialement porté son attention, mais qui se trouve déposée dans le projet de loi, et mérite d'être approuvée, c'est celle qui tend à substituer à la perception du droit au poids, la perception du droit à la valeur. En principe, cette substitution est excellente, à la condition, toutefois, que dans l'application il n'en résultera pas, soit une aggravation de droits, soit des vexations et des embarras.

En principe, je le répète, c'est une chose excellente. La perception du droit sur la valeur est la perception rationnelle ; la perception du droit au poids est un masque de protection ; lorsqu'dle fonctionne, il est difficile de se rendre compte de la hauteur réelle du droit. Le législateur qui vote le droit, le douanier qui l'applique, le négociant étranger qui l'étudié pour en faire la base de ses opérations, s'exposent à de graves erreurs. Tarifer à la valeur, c'est simplifier le tarif seulement ; il doit être bien entendu, comme je viens de le dire, qu'il n'en résultera pas une aggravation pour certains objets qui étaient antérieurement tarifés au poids. Le corollaire d'une bonne tarification à la valeur, c'est un bon système de perception. Si la tarification à la valeur a rencontré souvent de vives résistances dans le monde commercial, cela provenait surtout de la façon vicieuse dont fonctionnait le système des préemptions.

Pour ne pas prolonger ce débat, je ne veux pas revenir sur les abus qui se commettent en matière de préemption. Quoique, depuis quelques années, une amélioration très sensible se fasse sentir, il se présente cependant encore des faits regrettables dignes de l'attention de M. le ministre des finances.

Un des vices de la préemption, c'est de ne pas permettre la rectification d'erreurs commises de bonne foi. Ainsi, pourquoi cette rigoureuse application de la loi qui va jusqu'à frapper d'une amende un négociant importateur qui a fait une déclaration inexacte à son détriment et au profit du trésor ?

C'est un cas qui se présente souvent et qui, à ma connaissance, s'est encore présenté récemment.

Un négociant, important des marchandises anglaises, avait, en faisant sa déclaration sur la facture, confondu des livres anglaises avec des kilogrammes. Il s'était trompé à son détriment de toutes la différence qu'il y a entre les deux poids. Il eût suffi d'une pesée pour s'en assurer. Cela n'a pas empêché la douane de percevoir les droits sur la déclaration inexacte du négociant et de lui infliger en outre une amende. Pourquoi dans ce cas ne pas permettre qu'une erreur soit rectifiée ? Si la loi prescrit les rigueurs que je signale, il faut modifier la loi.

Un autre vice de la loi sur les préemptions, c'est le silence qu'elle garde quant au mode à employer pour les ventes.

Elle détermine la manière de déclarer la préemption, les expertises, pourquoi ne prescrit-elle pas également le mode de disposer des marchandises préemptées ?

Je sais bien que des instructions ministérielles suppléent à l'insuffisance de la loi, mais ces instructions ministérielles n'ont pas la précision qu'aurait un texte de loi et varient même dans leurs dispositions.

Voici ce que disait, en mai 1861, une instruction ministérielle sur la matière.

« Tous les mois, ou plus fréquemment si c'est nécessaire, le directeur charge l'entreposeur de procéder publiquement et sans fais pour l'acquéreur, à la vente des marchandises préemptées. La vente se fait en gros. Cependant si, à raison de circonstances exceptionnelles, ce mode ne peut être suivi, la vente en détail peut avoir lieu. Dans tous les cas les lots sont déterminés à l'avance par l'entreposeur et la division en est soumise à l'approbation du directeur qui est spécialement chargé de veiller à l'exécution de ces dispositions. »

Un arrêté ministériel de 1863 porte ce qui suit :

« La vente se fait publiquement et en gros à moins de circonstances exceptionnelles. L'entreposeur peut s'abstenir d'adjuger quand les prix offerts pour les marchandises sont notoirement inférieurs à la valeur réelle. »

La comparaison entre ces deux textes est curieuse. Le second est bien moins impératif que le premier. Cela prouve combien il peut être dangereux pour le négociant d'être à la merci des décisions de l'administration, au lieu d'avoir à obéir aux prescriptions invariables de la loi.

Aussi qu'arrive-t-il ? L'exception tend à devenir la règle ; on ne fait plus guère de ventes publiques.

La dernière vente publique de marchandises préemptées a eu lieu, si je suis bien informé, le 28 mars 1864. Cependant, depuis lors il y a eu encore des saisies. Voici celles que je connais : le 19 décembre 1864, on a saisi une caisse de montres ; le 6 janvier 1865, une caisse de tissus de cotons imprimé ; le 26 mai 1865, une caisse de passementeries ; le 29 mai, une caisse de passementeries ; le 12 juin, une partie de tissus de laine.

Voilà les préemptions qui ont eu lieu à ma connaissance. Sans doute il y en a eu d'autres encore. Et cependant la dernière vente publique a eu lieu le 28 mars 1864 ; les autres marchandises préemptés depuis cette date ont donc été vendues de la main à la main. (Interruption.)

Les instructions ministérielles portent que ces ventes de la main à la main ne doivent se faire qu'exceptionnellement. (Nouvelle interruption.)

Les ériger en règle, c'est favoriser les abus. (Nouvelle interruption.)

Je bornerai là pour le moment mes observations. L'heure s'avance et je ne veux pas prolonger le débat.

En toute autre circonstance, j'aurais présenté divers amendements ; si je m'en abstiens, c'est pour ne pas compromettre le bien que la loi nous promet et parce que je nourris l'espoir que, dans un avenir prochain, la Chambre aura à statuer sur de nouvelles propositions dans l'intérêt du commerce et de l'industrie.

M. de Naeyer. - Messieurs, je voterai sans la moindre hésitation le projet de loi qui nous est soumis. Cependant je dois exprimer un double regret. D'abord je regrette que ce soit dans ce moment-ci que nous ayons à nous occuper de cette question, assurément très importante ; car il est évident que la Chambre n'est guère disposée maintenant à se livrer à un examen approfondi de notre régime douanier.

Je regrette, en second lieu, qu'à cette occasion le gouvernement n'ait pas fait quelques pas de plus dans la voie de la liberté commerciale. J'aurais voulu, notamment, qu'on nous proposât l'abolition complète des droits sur l'entrée du poisson.

Messieurs, en ce qui concerne les divers articles qui ont été passés en revue par l'honorable M. Couvreur, évidemment les recettes qu'ils procurent au trésor sont sans importance et compensent à peine les frais de perception. Il y aurait donc lieu de décréter l'exemption de droits dans un but de simplification ; mais je pense qu'il est déjà satisfait en grande partie à ce que l'honorable membre a demandé. Si je ne me trompe, plusieurs des articles qu'il a énumérés entreront désormais librement en vertu des traités et surtout en vertu de la convention conclue avec la France en 1863.

Messieurs, il serait injuste de méconnaître que depuis huit à neuf ans, notre régime douanier a été considérablement simplifié et amélioré. Cependant ce serait aussi, suivant moi, une grave erreur de croire que ce projet de loi est en quelque sorte le couronnement de notre réforme douanière...

MfFOµ. - Non ! non !

M. de Naeyer. - D'après moi, cette réforme est une œuvre commencée, mais qui est loin d'être achevée. En effet, il s'en faut beaucoup que nous ayons un tarif purement fiscal, comme l'Angleterre, c'est-à-dire un tarif réduit à un petit nombre d'articles et ne frappant que des objets dont les similaires ne sont pas fabriqués dans le pays.

(page 1608) Un très grand nombre de nos industries jouissent encore d'une protection douanière qui s'élève souvent à 10 p. c. et au delà. Je crois que notre douane produit annuellement à peu près 14 millions de francs, et plus de la moitié de cette recette provient de la perception des droits protecteurs proprement dits.

Or, ces 7 millions et au delà qui sont perçus sur les produits venant de l'étranger sont loin d'équivaloir aux charges qui pèsent de ce chef sur la consommation du pays, car évidemment la taxe perçue sur les objets qui viennent de l'étranger a pour effet immanquable d'augmenter, même dans une proposition plus forte, le prix des objets similaires fabriqués dans le pays.

Je dis même dans une proportion plus forte, parce que manifestement les pertes de temps, les entraves auxquelles la perception des droits donne nécessairement lieu, forment une taxe additionnelle qui entre nécessairement en ligne de compte pour la fixation du prix des marchandises importées et qui exerce également son influence sur le prix des produits similaires fabriqués dans le pays.

En calculant sur cette base, et c'est là la seule base vraie, il serait facile de constater que nos droits protecteurs, quoique déjà considérablement réduits, imposent encore aux consommateurs belges des charges extrêmement lourdes, dont une bien faible partie entre dans les caisses de l'Etat, tandis que la très grosse part est perçue par les industries privilèges. Il arrive même très souvent que ces droits protecteurs font, en quelque sorte, l'office de primes d'exportation, et amènent ainsi ce résultat que les produits fabriqués dans le pays se vendent à des prix moins élevés sur les marchés étrangers que sur notre propre marché.

Comme les différentes industries réagissent nécessairement les unes sur les autres, il y a là une véritable perturbation dans les conditions économiques de notre travail national.

Je crois que cette situation ne peut être que provisoire ; je crois que la justice et en même temps les vrais intérêts du pays nous commandent d'arriver aussi promptement que possible à un tarif purement fîscal, c'est-à-dire à un régime d'égalité parfaite pour toutes les industries devant la douane.

C'est ce qui existe à peu près complètement en Angleterre. En parcourant les tarifs anglais, il est très difficile, je dirai même impossible, d'y trouver encore une trace quelconque d'un droit protecteur.

Les produits de l'industrie cotonnière, de l'industrie linière, de l'industrie lainière, de l'industrie du fer, de l'industrie de la soie, les machines, les mécaniques, en un mot tous les articles manufacturés entrent librement en Angleterre.

Messieurs, il y a un autre principe qui domine dans le tarif anglais et qui mérite de fixer notre plus sérieuse attention.

Ce principe, on pourrait le formuler en ces termes : Il faut que tous les objets de consommation qui se rapportent aux nécessités de la vie, n'aient rien à démêler avec la douane ni avec le fisc.

Permettez-moi de mettre sous vos yeux quelques applications de ce principe.

Ainsi le sel qui chez nous continue d'être grevé d'un droit scandaleusement exorbitant est affranchi en Angleterre de toute taxe quelconque, depuis plus de 40 ans. Celui qui songerait à imposer de nouveau cette substance indispensable à la vie passerait incontestablement pour un revenant de l'autre monde.

C'est ainsi que le sel raffiné servant aux usages domestiques, coûte à peine, en Angleterre, la quinzième partie de ce qu'il coûte en Belgique et quand l'ouvrier belge dépense 5 francs pour cet objet, l'ouvrier anglais se procure le même avantage moyennant la bagatelle de 35 centimes.

Messieurs, toutes les substances alimentaires, à l'exception d'un simple droit de balance qui est encore établi sur les céréales, entrent librement en Angleterre.

MfFOµ. - Et le sucre, et le thé ?

M. de Naeyer. - Ce ne sont pas des objets de première nécessité. On doit les considérer comme appartenant à la consommation d'aisance. Le sucre est d'ailleurs moins imposé en Angleterre qu'en Belgique. Là où le sucre est frappé d'un droit de 45 fr. en Belgique, il ne paye que 30 fr. en Angleterre.

MfFOµ. - Le thé est frappé d'un droit très fort.

M. de Naeyer. - Le thé n'est pas un objet de première nécessité.

MfFOµ. - C'est un objet de première nécessité en Angleterre.

M. de Naeyer. - Je crois que la viande est beaucoup plus indispensable que le thé.

MfFOµ. - Il y en a qui le nient.

M de Naeyerµ. - C'est possible ; mais je pense que mon appréciation sera généralement partagée.

Le beurre est libre en Angleterre ; il est imposé en Belgique.

Le fromage est libre en Angleterre ; il est imposé en Belgique.

Il en est de même d'autres substances : ainsi le miel, les fruits, à l'exception de quelques fruits de luxe, entrent librement en Angleterre ; il en est encore de même du bétail, de la viande, du poisson, en un mot de toutes les denrées alimentaires répondant aux vrais besoins de la vie, et tous ces objets de consommation sont malheureusement encore frappés de droits en Belgique.

La viande paye, le poisson paye, et outre les taxes que perçoit le trésor, vous avez encore à porter en compte, si vous voulez évaluer exactement les charges qui pèsent sur la consommation, toutes les tracasseries et les pertes de temps que la douane fait subir aux importateurs, et pour lesquelles ceux-ci ont bien soin de se faire indemniser par les consommateurs.

Messieurs, ce ne sont pss seulement,les substances alimentaires qui sont dégrevées en Angleterre ; ces substances ne suffisent pas à la vie de l'homme, il lui faut des vêtements, il lui faut un certain mobilier et certains ustensiles de ménage. Eh bien, encore une fois, sur tous ces objets il y a abolition complète de droits daus le tarif anglais, et les mêmes objets restent imposés en Belgique.

Les tissus qui servent à la confection des habits, de quelque nature qu'ils soient, de même que les habits confectionnés, entrent librement en Angleterre ; ils sont frappés en Belgique d'un droit d'au moins 10 p. c. Les cuirs, les souliers sont encore grevés en Belgique et libres en Angleterre. La même différence de traitement existe pour le savon, les meubles, les ustensiles de ménage. En résumé, le tarif anglais fait une application rigoureuse du principe que j'ai énoncé plus haut, tandis qu'il y a peu d'articles répondant même aux premières nécessités de la vie, qui ne soient frappés de droits à leur entrée en Belgique. Cette situation me paraît digne de la plus sérieuse attention.

Que devons-nous en conclure ? Je crois que la conclusions!e présente à l'esprit de tout le monde : évidemment en adoptant le système de liberté que je viens de signaler, l'Angleterre cherche à procurer aux classes ouvrières des conditions aussi favorable que possible, elle le fait par des motifs d'humanité sans doute, mais elle le fait aussi parce qu'elle est convaincue que le bien-être des classes ouvrières est le grand et même le principal élément de la puissance industrielle.

Messieurs, si nous voulons que nos industries prennent tout le développement dont elles sont susceptibles, il ne suffit pas d'avoir dégrevé les matières premières proprement dites, il faut en faire autant et pour les substances alimentaires, et pour tous les objets de consommation répondant aux premières nécessités de la vie.

Ce sont là les matières premières par excellence ; ce sont elles, si je puis m'exprimer ainsi, qui servent à la production des forces musculaires qui ont des rapports intimes avec les forces de l'intelligence, et qui dans tous les cas sont une condition indispensable de la prospérité industrielle d'un pays.

Messieurs, sur les marchés étrangers, nous rencontrons principalement la concurrence de l'Angleterre. Or, l'Angleterre puise sa force industrielle dans la liberté, et, si nous voulons chercher ailleurs les moyens de soutenir cette concurrence, nous nous épuiserons en efforts stériles.

Je crois pouvoir m'arrêter à ces considérations pour démontrer ce que j'ai énoncé en commençant, à savoir que notre réforme douanière est loin d'être complète, qu'elle est loin d'être au niveau des exigences de notre situation. Je le répète, je regrette particulièrement que le gouvernement n'ait pas saisi cette occasion pour dégrever complètement l'entrée du poisson étranger ; c'est une substance éminemment utile pour l'alimentation de nos classes ouvrières, son prix est moins élevé que celui de la viande, et sa composition la rend particulièrement propre à suppléer à l'insuffisance nutritive des autres substances généralement consommées par les classes ouvrières.

Il est d'ailleurs à remarquer que pour l'entrée du poisson les formalités douanières entraînent des inconvénients exceptionnellement onéreux.

J'ajouterais encore que les déchets mêmes de cette denrée forment un des plus puissants engrais pour notre agriculture. Je ne fais qu'indiquer ces considérations, et je m'abstiens de faire aucune (page 1609) proposition pour le moment ; mais j'espère que le droit que l'on maintient encore ne sera que très provisoire.

Il ne s'agit pas ici d'une très grande ressource pour le trésor, car, d'après les calculs que j'ai faits, ce droit, au taux proposé, pourra produire 70,000 à 80,000 fr. tout au plus.

J'espère que, dans un aven'r prochain, l'honorable ministre des finances avisera aux moyens d'abolir complètement le droit sur le poisson. Ce sera une réforme utile au plus haut degré, car elle servira à améliorer le régime alimentaire de nos populations.

MfFOµ. - Messieurs, je n'ai guère d'objections à formuler contre les considérations qui ont été présentées par les honorables préopinants ; je suis certainement d'accord avec eux sur les principes qui doivent régir notre système commercial. Personne plus que moi n'est convaincu de la nécessité d'opérer des réformes successives en matière de douane, et je crois avoir donné, à la Chambre et au pays quelques gages des sentiments dont je suis animé à cet égard ; j'ai contribué dans la mesure de mes forces à amener la situation nouvelle que nous constatons aujourd'hui et que nous pourrons encore améliorer graduellement.

En effet, messieurs, comme l'a dit l'honorable M. de Naeyer, tout n'est pas terminé en ce qui concerne les réformes douanières ; sans doute, nous avons déjà fait beaucoup, mais nous ne présentons pas le projet qui est en ce moment soumis à vos délibérations, comme étant le couronnement de l'édifice ; nous n'entendons pas dire que notre tarif sera désormais immuable. Mais ce que nous disons, c'est que nous avons cru devoir nous borner jusqu'à présent à proposer successivement aux Chambres les réformes qui étaient de nature à être réalisées, sans jeter le trouble dans aucun intérêt industriel ou commercial, pas plus que dans les intérêts financiers du pays. Nous avons réussi à opérer ainsi des modifications assurément très importantes à notre régime douanier, et nous sommes parvenus à répandre dans le pays des idées plus saines en matière économique, sans avoir compromis aucun intérêt.

En effet, aucune plainte ne s'est fait entendre, depuis que ces mesures ont été prises. Il est vrai qu'avant leur adoption, des appréhensions très vives se sont souvent manifestées ; mais les faits n'ont pas tardé à démontrer combien peu elles étaient fondées.

Nous continuerons à appliquer progressivement ce système, jusqu'à ce que nous soyons arrivés à avoir le tarif qui sera jugé le plus convenable au pays, c'est-à-dire un tarif uniquement fiscal.

L'honorable M. de Naeyer a fait remarquer que notre tarif actuel est encore bien loin sous ce rapport du tarif anglais, qui laisse complètement libres les denrées alimentaires et, en général, tous les objets de première nécessité, tandis que certains objets de cette nature sont encore taxés en Belgique.

Messieurs, cela n'est pas précisément exact. Il y a des objets de très grande consommation, et qui par conséquent peuvent être considérés comme étant de première nécessité, qui sont imposés par le tarif anglais. J'ai dit tout à l'heure, en interrompant l'honorable M. de Naeyer, que le thé, entre autres, et comme conséquence le sucre, sont fortement imposés en Angleterre et fournissent une très notable partie du revenu de la douane.

M. de Naeyer. - Les sucres payent moins qu'en Belgique.

MfFOµ. - C'est à peu près la même chose. (Interruption.)

M. Couvreurµ. - Le café est également très imposé en Belgique.

MfFOµ. - Oui, et pour le même motif : Eu Angleterre, c'est le thé qui est l'objet de la grande consommation ; en Belgique, c'est le café.

Je ne fais que répondre à l'honorable M. de Naeyer, en faisant observer qu'il y a en Angleterre des objets de très grande consommation, et, par conséquent, de première nécessité, qui sont encore grevés de droits de douane. Il est vrai que l'on est parvenu, en Angleterre, à faire disparaître une grande quantité de taxes ; mais c'est que le pays a consenti à accepter un autre impôt pour les remplacer. Ainsi, l'on a fait disparaître, en effet, les taxes dont parle l'honorable membre, mais on a établi l'Income tax.

Si vous voulez accepter un système d'ensemble et examiner si l'Income tax peut être appliqué en Belgique....

- Plusieurs membres. - Non ! non !

MfFOµ. - Je dois dire que je ne suis pas le moins du monde partisan d'une telle innovation, que je ne trouve pas que l'impôt sur le revenu soit un bon impôt ; je ne le trouve pas aussi juste qu'on le prétend ; il me semble, au contraire, qu'il renferme de graves injustices, les divers revenus n'ayant pas assurément la même valeur. C'est d'ailleurs une question beaucoup trop importante pour la discuter ainsi incidemment. Je bornerai donc là ma réponse aux observations générales qui ont été faites par les honorables préopinants.

Je vais rencontrer maintenant les points de détail qui ont été examinés par l'honorable M. Couvreur et par l'honorable M. de Naeyer.

L'honorable M. de Naeyer a critiqué le maintien d'une taxe, même réduite, sur le poisson. Eh bien, messieurs, je suis venu réaliser par le projet de loi les engagements pris vis-à-vis de la Chambre, lorsque la question du poisson a été spécialement discutée. J'ai fait connaître alors quel était le tarif qui me paraissait devoir être introduit pour satisfaire, dans une juste mesure, l'intérêt du consommateur et celui du trésor. Les droits qui sont fixés par le projet de loi sont extrêmement modérés ; ils assurent néanmoins un revenu d'une certaine importance au trésor et ne peuvent pas être considérés comme grevant la consommation.

M. Couvreurµ. - Je crois que c'est une erreur.

MfFOµ. - Mais non ; l'impôt ne représente qu'une quotité infinitésimale de la valeur des poissons taxés. C'est ce qui a été démontré, notamment pour ce qui concerne les harengs qui sont principalement consommés par les classes nombreuses. Dans ces conditions, le droit ne peut exercer absolument aucune influence sur le prix de l'article taxé.

L'honorable M. Couvreur a signalé quelques articles qui sont maintenus au tarif, quoique ne produisant qu'une recette insignifiante.

Je ne suis pas en mesure de vérifier ici-même l'exactitude des faits cités par l'honorable membre ; mais je crois que l'observation faite par l'honorable M. de Naeyer est fondée, et que la plupart de ces articles seront en réalité affranchis des droits en vertu des traités, ou groupés avec d'autres marchandises d'espèce analogue.

Quant aux préemptions, il s'en fait aujourd'hui très peu, et d'après les instructions données par mon administration pour assurer la perception des droits à la valeur, on est arrivé dans ce rapport à un état de choses que l'on peut considérer comme très satisfaisant. Dans les premiers temps, il y a eu des préemptions plus ou moins considérables ; mais par suite des dispositions conciliantes des fonctionnaires de la douane et des agents du commerce, la nécessité de recourir aux préemptions ne se révèle plus que rarement. (Interruption). L'honorable membre dit qu'il faudrait vendre publiquement les produits préemptés ; il veut bien reconnaître que les instructions de l'administration, et qui prescrivent la vente publique, ont donné satisfaction aux griefs qui avaient été formulés. Toutefois l'honorable membre préférerait que l'obligation de vendre publiquement fût consacrée par une loi.

Pour ma part, messieurs, je ne pense pas que l'on pourrait insérer dans une loi autre chose que ce qui est prescrit par les instructions. En principe, la vente publique est de rigueur, à moins cependant qu'il n'y ait impossibilité reconnue de procéder de cette manière. Il y a des cas où la vente publique ne peut pas avoir lieu ; mais ces cas sont la très rare exception, et, en règle générale, c'est par vente publique que l'on procède.

Il y a des annonces et des affiches qui font connaître que des objets préemptés seront mis en vente par lots, à la convenance du public. Le commerce est ainsi suffisamment averti, et depuis que ces choses sont ainsi pratiquées, les plaintes que l'on avait élevées auparavant ont complètement cessé.

L'honorable M. Couvreur a encore signalé un point. Il a dit que pour de simples erreurs dans les déclarations, on infligeait une amende, et que cela ne lui paraît pas juste, lorsque la bonne foi du déclarant ne peut être mise en doute.

M. Couvreurµ. - On fait payer les droits sur les déclarations erronés.

MfFOµ. - Pour pouvoir donner une réponse précise à l'honorable membre, je devrais connaître les circonstances dans lesquelles s'est produit le fait auquel il a fait allusion. Il se peut, par exemple, que la perception ayant eu lieu, on soit venu ensuite réclamer sous prétexte d'erreur, et que la restitution n'ait pas été accordée, parce que la marchandise ayant été enlevée, on n'avait plus le moyen d'en constater le poids réel. Mais dans le cas d'une erreur reconnue au moment même de la perception, le droit n'est jamais perçu sur la déclaration erronée, ou bien, si la perception doit être effectuée pour obéir au vœu de la loi, on ne refuse jamais d'accorder la restitution de l'excédant.

Quant aux amendes appliquées du chef de déclarations fautives, il est de principe qu'en matière de contraventions on ne peut se préoccuper de la question de savoir si le contrevenant a été de bonne foi, ou non, du moment que le fait matériel est constaté, la contravention existe et elle (page 1610) doit être réprimée. Il en est ainsi en toute matière contentieuse, pour les délits ce chasse, par exemple ; il ne serait pas possible d'exécuter les lois de police, s'il fallait admettre la discussion du point de savoir si le contrevenant a été de bonne ou de mauvaise foi.

Tout ce que l'on peut faire, et ce que l'on fait en réalité, c'est de se montrer très modéré. Il y a d'ailleurs un maximum déterminé au delà duquel l'erreur est passible d'amende, et cela afin d'empêcher que l'on ne simule des erreurs afin d'essayer d'échapper au payement d'une partie des droits dus à l'Etat. Le commerce est prévenu qu'à part certaine tolérance, toute fausse déclaration peut entraîner une pénalité. C'est une garantie indispensable pour la bonne exécution de la loi.

Discussion des articles

Article premier

« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à généraliser les tarifs et les dispositions de douane résultant des traités de commerce et de navigation conclus le 1er mai 1861 et postérieurement à cette date.

« Pendant les trois mois qui suivront la mise en vigueur de la présente loi, le gouvernement pourra en outre régulariser la classification des marchandises, pour autant qu'il n'en résulte pas une augmentation de droits d'entrée. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Les droits d'entrée sur les marchandises indiquées ci-après sont modifiés ainsi qu'il suit :

« 1. Bois d’ébénisterie : Mêmes droits que les bois de construction.

« 1. Bois divers. Base : 100 fr. Quotité : 5 fr. Disposition particulière : les pièces de bois en grume ayant moins de 75 centimètres de circonférence au gros bout, sont tarifées comme bois divers.

« 2. Boissons distillées et fermentées : Droits actuels. Disposition particulière : les droits sur les boissons tarifées à l'hectolitre portent sur la quantité nette, sans préjudice du degré alcoolique, s'il y a lieu.

« 3. Cacao brut (fèves et pelures) : Base : 100 kil. Quotité : 15 fr.

« 3. Cacao préparé (chocolat, racahout, etc.) : Base : 100 kil. Quotité 30 fr.

« 4. Cannelle commune et fine : Base : 100 fr. Quotité : 15 fr.

« 5. Chicorée : Libre.

« 6. Cordages : Libres. Disposition particulière : les cordes ou ficelles ayant moins de deux millimètres de diamètre sont tarifées comme fils suivant l'espèce.

« 7. Epiceries non spécialement tarifées. Base : 100 fr. Quotité : 15 fr.

« 8. Etain laminé : Libre.

« 9. Fer et acier :

« Fonte brute et vieux fer. Base : 100 kil. Quotité : 1er juillet 1866 : 50 c.

« Fer battu, étiré ou laminé. Base 100 kil. Quotité : en 1865 : 2 fr., 1er juillet 1866 : 1 fr.

« Fonte ouvrée : Base 100 kil. Quotité : en 1865 : 3 fr., 1er juillet 1866 : 2 fr.

« Acier fondu brut : Base 100 kil. Quotité : 50 c.

« Acier en barres, feuilles ou fil. Droit actuel.

« 10. Fer-blanc non ouvré. Base 100 kil. Quotité : en 1865 : 5 fr., 1er juillet 1866 : 3 fr.

« 11. Filets et autres ustensiles pour la pêche : Tarifés selon l’espèce. Disposition particulière :les filets et autres ustensiles pour la pèche maritime sont exempts de droits d'entrée.

« 12. Fruits

« Amandes : Base : 100 kil. Quotité : 20 fr.

« Pruneaux et raisins secs. Base : 100 kil. Quotité, 15 fr.

« Pruneaux et raisins verts. Même droit que les fruits non spécialement tarifés.

« 13. Habillement et vêtements de coton ou de lin. Base : 100 kil. Quotité ; 10 fr.

« 14. Laques en boules ou en feuilles. Libres

« 15. Machines et mécaniques :

« de fonte : Base : 100 kil. Quotité : en 1865 : 3 fr., 1er juillet 1866 : 2 fr.

« de fer ou d’acier. Base : 100 kil. Quotité : en 1865 : 5 fr., 1er juillet 1866 : 4 fr.

« 16. Plomb étiré ou laminé : Libre.

« 17. Poissons

« Homards et huîtres. Base : 100 kil. Quotité 1 fr.

« Morue et poissons frais : Base 100 kil. Quotité : en 1865 : 5 fr., 1er juillet 1866 : 4 fr.

« 18. Poivre et piment. Base : 100 fr. Quotité : 15 fr.

« 19. Poteries : Faïences. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

(page 1611) « 20. Produits chimiques.

« Acides acétique et hydrochlorique : Libres.

« Chlorure de chaux : Libre.

« Sels ammoniacaux : Libre.

« 21. Produits divers pour l’industrie. Base : 100 fr. Quotité : 5 fr.

« 22. Riz.

« en paille ou non pelé. Base : 100 kil. Quotité : 1 fr.

« pelé. Base : 100 kil. Quotité : 1 fr. 50

« 23. Tissus de coton, savoir :

« Tissus unis ou croisés pesant moins de 3 kilog. par 100 mètres carrés. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« Couvertures de coton. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« Gazes et mousselines pour ameublement et tentures. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« Tulles unis ou brodés. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« Piqués, basins, façonnés, damassés et brillantes, pesant moins de 3 kilog. par 100 mètres carrés. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« Mélangés, le coton dominant en poids. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« Objets confectionnés en tout ou en partie. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« 24. Tissus de laine : Tapis de toute espèce. Base : 100 fr. Quotité : 10 fr.

« 25. Tissus de lin, de chanvre ou de jute.

« Tulles de lin. Tissus den, de chanvre on de jute.

« Tissus de toute espèce, à l'exception des batistes et linons et des dentelles. Tissus den, de chanvre on de jute.

« Tissus mélangés, le lin, le chanvre ou le jute dominant en poids. Tissus den, de chanvre on de jute.

« Articles confectionnés en tout ou en partie et articles non dénommés. Tissus den, de chanvre on de jute.

« 26. Vermout. Même régime que le vin.

« 27. Zinc étiré ou laminé. Libre.

MpVµ - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose de remplacer dans le tableau les mots : « droits actuels » par ceux-ci : « droits établis par les conventions. »

M. Couvreurµ. - La loi maintient les droits sur les filets et autres ustensiles pour la pêche. Il est dit qu'ils seront tarifés selon l'espèce. Or, les filets et autres ustensiles pour la pêche maritime étant déjà exemptes de droits d'entrée, il résulte du tableau qu'en 1863 le droit n'a rapporté que 124 fr. M. le ministre des finances croit-il utile de maintenir le droit sur les filets, même en les tarifant selon l'espèce ? Ne pourrait-il pas consentir à la libre entrée de ces objets au lieu d'obliger la douane à vérifier en quelle espèce de matière ils sont fabriqués ? Le trésor n'y est pas intéressé.

MfFOµ. - C'est pour éviter toute espèce de confusion.

- Adopté.

Article 3

« Art. 3. Les droits de sortie sur les drilles et chiffons sont modifiés ainsi qu'il suit :

« Drilles et chiffons :

« Chiffons de laine et de soie sans mélange d'autres matières. Libres.

« Cordages vieux, goudronnés ou non. Libres.

« Autres chiffons et drilles de toute espèce, et pâte a papier. Base : 100 kil. Quotité : 9 fr., au 1er janvier 1866 : 6 fr., au 1er janvier 1867 : 3 fr. ; au 1er janvier 1868: libres.

(page 1612) M. de Macarµ. - Je n'ai qu'une observation à présenter. Je désire demander à l'honorable ministre des affaires étrangères qu'il veuille bien insister le plus vivement possible auprès des gouvernements étrangers pour qu'ils suivent la voie oh le gouvernement belge est entré.

Les chiffons payent des droits de sortie considérables dans les pays qui nous sont limitrophes. Dans un très bref délai, la libre sortie existera en Belgique.

L'industrie de la fabrication du papier est déjà très importante en Belgique, elle tend à s'accroître encore ; dans les conditions qui vont lui être faites, elle pourra difficilement s'approvisionner de chiffons, matière première indispensable jusqu'ici à sa fabrication, si les pays voisins maintiennent des droits de sortie équivalents à une prohibition d'exportation. J'appelle donc très vivement l'attention de l'honorable ministre sur ce point, et je ne doute nullement qu'il voudra bien faire ce qu'il pourra pour obtenir la solution que je désire.

Je demanderai aussi s'il n'y aurait pas lieu de réduire les droits d'entrée sur certains produits chimiques, et notamment sur le sel de soude. Ces matières sont employées déjà en assez grande quantité pour la fabrication du papier.

Si dans la suite on était obligé de remplacer les chiffons par d'autres matières premières, les produits chimiques seraient certainement indispensables pour arriver à faire une pâte convenable avec ces matières.

Il y a donc un intérêt majeur pour l'industrie papetière belge à ce que ces produits chimiques fussent dégrevés suffisamment pour qu'on pût les employer utilement. Ces produits sont actuellement plus chers en Belgique qu'en Angleterre et même que dans certains autres pays.

Je bornerai là mes observations ; je comprends qu'il me serait difficile d'obtenir l'attention de la Chambre en ce moment, si j'insistais plus longuement.

- Adopté.

Articles 4 et 5

« Art. 4. La loi du 6 juin 1839 (Bulletin officiel, n° 262) cessera ses effets le 1er juillet 1866. »

- Adopté.


« Art. 5. La présente loi sera obligatoire le 1er juillet 1865. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé à l'appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

70 membres y prennent part.

69 membres répondent oui.

1 membre (M. Dumortier) s'abstient.

On voté l'adoption :

MM. Warocqué, Wasseige, Allard, Bara, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Couvreur, Crombez, Debaets, de Bast, de Borchgrave, de Brouckere, de Decker, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, Delaet, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, Devroede, de Woelmont, d'Hane-Steenhuyse, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Hayez, Janssens, Jacquemyns, Jamar, M. Jouret, Julliot, Lebeau, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Moreau, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orts, Pirmez, Reynaert, Rogier, Tack, Thibaut, Thonissen, Vanden Branden, de Reeth, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Vermeire, Verwilghen et E. Vandenpeereboom.

M. Dumortier. - Je me suis abstenu parce qu'il y a, dans le projet de loi, des dispositions que j'accepte et d'autres que je ne puis accepter.

MpVµ. - La pétition des brasseurs sera renvoyée à M .le ministre des finances.

Projet de loi ouvrant des crédits au budget du ministère de la guerre

Discussion des articles

Articles 1 à 3

Personne ne demandant la parole, la discussion générale est close.

« Art. 1er. Il est ouvert au département de la guerre un crédit de soixante-cinq mille quatre cent trente-six francs soixante-douze centimes (65,436 fr. 72 c.), applicable au payement de créances arriérées appartenant à des exercices clos, qui restent à liquider, et qui sont détaillées dans le tableau annexé à la présente loi. »

- Adopté.


« Art. 2. Cette allocation formera l'article 35 du budget de la guerre pour l'exercice 1865, et sera couverte au moyen des ressources ordinaires. »

- Adopté,


« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »

- Adopté.

(Le tableau des créances restant à liquider, inséré au Moniteur, n’est pas repris dans la présente version numérisée.)

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble.

66 membres y prennent part.

65 membres adoptent.

1 membre rejette.

En conséquence, la Chambre adopte ; le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont voté l'adoption :

MM. Warocqué, Wasseige, Allard, Bara, Bouvier, Bricoult, Couvreur, Crombez, de Bast, de Borchgrave, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, Devroede, de Woelmont, Dumortier, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Janssens, Jacquemyns, Jamar, M. Jouret, Julliot, Lebeau, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Moreau, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orts, Pirmez, Reynaert, Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, (page 1613) Vanden Branden de Reeth, Alp, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Vermeire, Verwilghen et E. Vandenpeereboom.

A voté le rejet :

M. Hayez.

Projet de loi ouvrant des crédits supplémentaires au budget du ministère des finances

Discussion des articles

Articles 1 et 2

Personne ne demandant la parole, la discussion générale est close et l'assemblée passe à la discussion des articles.

« Art. 1er. Des crédits supplémentaires sont alloués au budget du ministère des finances de l'exercice 1865, jusqu'à concurrence de trente-deux mille francs, savoir :

« Chapitre premier, article 5. Matériel, impressions, frais de translation des archives : fr. 25,000.

« Art. 10. Magasin général des papiers : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Ces crédits seront imputés sur les ressources ordinaires de 1865. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé an vote par appel nominal sur l'ensemble.

65 membres y prennent part, tous répondent oui.

En conséquence, la Chambre adopte ; le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel :

MM. Warocqué, Wasseige, Allard, Bara, Bouvier, Bricoult, Couvreur, Crombez, de Bast, de Borchgrave, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, Devroede, de Woelmont, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Hayez, Janssens, Jacquemyns, Jamar, M. Jouret, Julliot, Lebeau, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Moreau, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orts, Pirmez, Reynaert, Rogier, Royer de Behr, Tack, Thibaut, Vanden Branden de Reeth, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Vermeire, Verwilghen et E. Vandenpeereboom.

Ajournement de la chambre

MpVµ. - La Chambre entend-elle épuiser son ordre du jour ?

- Voix nombreuses. - Non, non.

MpVµ. - La Chambre s'ajourne indéfiniment.

- La séance est levée à 4 heures et demie.