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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 20 décembre 1864

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1864-1865)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 245) M. Thienpont procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. Van Humbeeck donne lecture du procès-verbal de la séance précédente.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. Thienpont présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« La veuve du sieur Laureys, garde-frein au chemin de fer de l'Etat, mort dans l'exercice de ses fonctions, demande une pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Eemans, ancien commis aux écritures des hôpitaux militaires, demande la révision de sa pension. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Goyck demandent que les Annales parlementaires soient publiées en flamand comme en français. »

« Même demande de membres d'une société littéraire à Termonde. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Nazareth prie la Chambre d'accorder au sieur De Perre-Montigny la concession d'un chemin de fer d'Eecke vers Breskens. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent une loi qui abroge toute répression de la coalition comme telle et qui punisse simplement la menace et la violence. »

M. Lelièvre. - Cette pétition se rattache à d'autres demandes ayant le même objet et renvoyées à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport. Je désire que la même disposition soit prise à l'égard de la pétition qui vient d'être analysée.

- Adopté.


« Le sieur Mertens, raffineur de sel à Selzaete, demande que l'eau de mer pour l'usage des raffineurs de sel puisse être prise à Terneuzen, comme dans les ports mentionnés à l'article 5 de la loi du 5 janvier 1844. »

M. Kervyn de Lettenhove. - Messieurs, cette requête se rattache à une question très intéressante, et le principe sur lequel elle s'appuie a été reconnu hier dans une autre enceinte par M. le ministre des finances.

Je prie la Chambre de renvoyer la pétition à la commission d'industrie avec demande d'un prompt rapport. Il sera d'autant plus facile à la commission de faire droit à cette demande que déjà un rapport a été fait sur cette question par l'honorable M. Jacquemyns.

- La proposition de M. Kervyn est adoptée.


« Des habitants de Quiévrain demandent la diminution des droits d'accise sur la bière indigène. »

- Même renvoi.


« Des bijoutiers, à Bruxelles, demandent la liberté complète du travail d'or et d'argent ou du moins que les orfèvres-bijoutiers puissent travailler à tous les titres lorsqu'il s'agit d'exportation. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Spa présentent des observations contre la suppression des jeux de cette ville. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de l'intérieur.


« Par message du 19 décembre, le Sénat informe la Chambre qu'il a adopté le budget des finances pour 1865. »

- Pris pour notification.


« Par dépêche du 16 décembre, M. le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation du sieur de Gringer, rentier à Bruges. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« L'administration communale de Wichelen adresse à la Chambre deux exemplaires du rapport sur la situation des affaires de cette commune en 1864. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« M. de Florisone, obligé de s'absenter par suite de la mort de son oncle, demande un congé. »

- Accordé.


« M. Laubry, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé. »

- Accordé.

Motion d’ordre

M. Rodenbach. - Messieurs, j'ai appris par les journaux que M. le ministre de l'intérieur a envoyé une circulaire à MM. les gouverneur de province pour être transmise aux commissaires d'arrondissement et aux bourgmestres, en les invitant à vouloir détruire les séparations qu'il y a dans les cimetières de presque toutes nos communes. Comme le public s'occupe beaucoup de la question des cimetières, je désirerais savoir ce qu'il en est de cette circulaire, et si réellement M. le ministre l'a fait parvenir aux autorités. Une pareille mesure serait généralement désapprouvée et produirait une légitime émotion dans le pays.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, depuis quelque temps j'avais eu connaissance que les prescriptions du décret relatif aux inhumations n'étaient pas observées dans diverses communes ; des abus graves m'étaient signalés en ce qui concerne le mode des inhumations ; les règles les plus élémentaires de l'hygiène, de la salubrité publique étaient méconnues dans grand nombre de localités.

J'ai cru qu'il était de mon devoir de chercher à mettre un terme à ces abus parfois scandaleux et j'ai adressé aux gouverneurs la circulaire à laquelle différents journaux ont fait allusion et dont vient de parler l'honorable M. Rodenbach. Si la Chambre le désire, je lui en donnerai lecture.

M. de Theuxµ. - Vous pourriez l'insérer au Moniteur.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Bien, je la ferai insérer au Moniteur.

Je ne me bornerai pas, messieurs, à cette circulaire. J'ai invité le conseil supérieur d'hygiène à vouloir bien préparer une instruction pratique afin que toutes les administrations communales sachent quelles sont, à l'occasion des inhumations, les mesures à prendre dans l'intérêt de l'hygiène publique.

Quant aux instructions secrètes que j'aurais adressées aux administrations communales et auxquelles l'honorable M. Rodenbach a fait allusion, c'est là un fait purement imaginaire.

Je n'ai adressé à aucune administration communale, ni directement, ni indirectement, une circulaire, soit publique, soit secrète, relativement aux inhumations envisagées au point de vue des différents cultes ; comme je l'ai dit plusieurs fois, c'est un point que le gouvernement laisse complètement à l'appréciation des administrations communales.

Je remercie l'honorable M. Rodenbach de m'avoir fourni l'occasion de répondre aux bruits inexacts qui circulent relativement aux instructions secrètes que j'aurais données, sur cette question importante, à des administrations communales du pays.

(page 246) M. Vleminckxµ. - J'ai demandé la parole pour appuyer ce que tient de dire l'honorable ministre de l'intérieur, relativement à la tenue de plusieurs cimetières. Les faits sont tellement scandaleux qu'il serait presque impossible de les faite connaître à la Chambre. C'est à la demande du conseil supérieur d'hygiène que M. le ministre de l'intérieur a bien voulu l'inviter à faire une instruction à l'effet de mettre un terme aux abus graves qui existent actuellement.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1865

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XI. Agriculture

Article 58

« Art. 58. Conseil supérieur et commissions provinciales d'agriculture ; subsides pour concours et expositions ; encouragements aux sociétés et aux comices agricoles ; achats d'instruments aratoires nouveaux, destinés à servir de modèles ou à être distribués aux Commissions d'agriculture, aux comices et sociétés agricoles ; achat de graines nouvelles à répartir par l'intermédiaire des commissions d'agriculture ; dépenses diverses.

« Charge ordinaire : fr. 123,700.

« Charge extraordinaire : fr. 21,000. »

- Adopté.

Article 59

« Art. 59. Enseignement professionnel de l'agriculture et de l'horticulture ; personnel de l'Institut agricole et des écoles d'horticulture de l'Etat ; matériel de ces établissements ; bourses ; traitements de disponibilité, frais de conférences d'agriculture, d'horticulture et de drainage.

« Charge ordinaire : fr. 118,000.

« Charge extraordinaire : fr. 3,000. »

M. Bouvierµ. - Messieurs, je viens donner mon approbation au chiffre demandé à l'article 59. Les conférences sont excessivement utiles. Ce sont jusqu'ici en grande partie des conférences horticoles. J'ai assisté à quelques-unes de celles-ci et j'y ai toujours vu un auditoire très avide de la parole du maître.

Aujourd'hui dans beaucoup de pays les mauvais fruits ont fait place aux bons. C'est une nouvelle industrie qui donne déjà lieu à un trafic considérable. L'Angleterre achète pour des sommes importantes une grande partie de nos meilleurs produits. C'est, je le répète, une industrie qui est aujourd'hui très florissante.

Je voudrais que ces conférences s'étendissent à d'autres objets. Ainsi, je voudrais que le gouvernement demandât aux vétérinaires de donner des conférences agricoles qui porteraient sur l'hygiène du bétail, sa nourriture, l'emploi judicieux des amendements, les matières fertilisantes, les irrigations, le drainage, en un mot sur toutes les grandes questions qui ont trait à l'agriculture.

Nos vétérinaires en général sont fort instruits, et je suis persuadé que si le gouvernement leur demandait d'ouvrir des conférences dans tous les cantons du royaume, moyennant une faible indemnité, ils donneraient avec le plus louable empressement ces conférences qui seraient très suivies.

En effet il y a quelques années j'ai assisté à Virton à une de ces conférences donnée par un réfugié politique, un Français, un homme fort distingué, M. Joigneaux.

Eh bien, messieurs, cette conférence était très suivie. J'ai entendu manifester le désir par beaucoup de cultivateurs que ces conférences fussent plus multipliées. En effet, messieurs, ces conférences donnent des idées nouvelles à nos cultivateurs. Personne n'ignore que dans les campagnes il existe encore beaucoup de préjugés. Eh bien, messieurs, il n'y a qu'un seul moyen de les extirper, c'est de multiplier sur tous les points du pays ces conférences, et je demanderai à M. le ministre de l'intérieur de faire en sorte que les vétérinaires employassent leurs talents à propager chez les cultivateurs les connaissances utiles aux intérêts agricoles.

Ces conférences, je le répète, seraient parfaitement accueilles et ne coûteraient presque rien à l'Etat ; la preuve que cette institution est excellente, c'est que toutes les conférencees horticoles, entre autres celles auxquelles j'ai assisté, étaient encombrées de monde, et la preuve qu'elles donnent d'excellents résultats, c'est que les fruits sont meilleurs aujourd'hui qu'ils n'étaient il y a 25 à 30 ans. En Belgique tout le monde aime le jardinage et surtout les bons fruits ; eh bien, si nous arrivons à ce résultat, nous le devons un peu à la bienveillante sollicitude de M. le ministre de l'intérieur pour encourager l'ouverture de ces conférences partout où on les demandait.

J'insiste pour que les conférences agricoles proprement dites soient aussi favorablement accueillies par le département de l'intérieur que toutes les autres et j'espère que M. le ministre de l'intérieur voudra bien accueillir le vœu que j'émets, vœu qui ne trouvera de contradicteurs sur aucun de nos bancs.

M. de Theuxµ. - Il a été annoncé que la commission instituée pour recueillir les observations sur le procédé de l'inoculation de la pleuro-pneumonie du docteur Willems, avait fait un rapport favorable à ce procédé, consacré d'ailleurs par de longues années d'expérience et reconnu efficace dans presque tous les pays de l'Europe.

Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur s'il n'entre pas dans ses intentions de publier ce rapport in extenso dans le Moniteur.

Je saisis cette occasion de payer un juste tribut de reconnaissance au docteur Willems pour toutes les peines qu'il s'est données pour faire réussir ce procédé et des sacrifices que son père, distillateur à Hasselt, a faits en mettant à sa disposition le bétail nécessaire pour faire ces expériences.

M. Rodenbach. - Depuis plusieurs années, j'ai eu l'occasion d'entretenir la Chambre du procédé du docteur Willems ; la commission chargée d'examiner ce procédé a fait, nous dit-on, un rapport favorable. Quant à moi, je sais personnellement qu'il est adopté dans diverses provinces et notamment dans des distilleries du Brabant et des Flandres. Je connais des distillateurs, il en est dans ma famille, qui ont obtenu par ce procédé un succès complet.

Le docteur Willems a déjà reçu de la part de divers pays des marques de distinction pour son système ; si ce système est reconnu bon par les hommes spéciaux qui ont été chargés de l'examiner, je crois que nous devons également lui donner une marque distinctive en Belgique, à titre d'encouragement.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Comme vient de le dire M. Bouvier, l'utilité des conférences agricoles, horticoles, etc., n'est plus contestée ; elle est reconnue par tous les hommes compétents. Aussi je me fais un devoir de les multiplier autant que possible dans les limites des crédits qui me sont alloués. Le nombre des localités où on demande l'établissement de ces conférences augmente considérablement ; tout le monde en demande, car le gouvernement paye toute la dépense.

J'ai donc cru qu'il était plus sage d'adopter un autre système, qui, d'un côté, aura pour objet de multiplier les conférences et, de l'autre, de les établir là où leur utilité est spécialement reconnue. Aujourd'hui, en donnant un subside pour organiser des conférences, j'exige que soit la commune, soit la province, soit la société locale d'agriculture paye une part. Je crois que c'est là une très bonne mesure.

Quant à la question posée par l'honorable M. de Theux, j'ai été au-devant de son désir ; le rapport fait par la commission de la pleuropneunomie est sous presse.

- Personne ne demandant plus la parole, l'article 59 est adopté.

Article 60

« Art. 60. Service des défrichements en Campine ; charge extraordinaire : fr. 23,670. »

- Adopté.

Article 61

« Art. 61. Mesures relatives aux défrichements, dépenses et indemnités nécessitées par le contrôle établi pour assurer l'exécution de la loi du 25 mars 1847. Pépinières d'arbres forestiers. Subside pour l'établissement d'une école forestière ; charge extraordinaire. 30,000. »

MpVµ. - C'est à cet article que se rattachent l'amendement de MM. Van Hoorde et Thibaut et celui de MM. de Moor, Bouvier et Orban.

La parole est à M. Van Hoorde.

M. Van Hoordeµ. - Messieurs, quoique l'honorable ministre de l'intérieur se soit opposé à l'adoption de la proposition qui vous a été soumise de maintenir au budget une allocation destinée à la distribution de la chaux à prix réduit en Ardenne, je ne puis pas me faire à l'idée que la Chambre consente à encourir le reproche d'inconséquence, qu'on serait en droit de lui adresser, si elle ratifiait l'arrêt de mort qu'ont prononcé la semaine dernière, contre cette proposition, quelques partisans enthousiastes du principe de non-intervention.

Et, en vérité, l'opposition de M. le ministre me semble incompréhensible. D'une part, il nous dit que la question n'est pas pour lui une question d'argent, que le principe de non-intervention est son seul mobile.

D'autre part, il nous déclare que, bien qu'adversaire décidé de l'intervention de l'Etat, il n'est pas partisan des mesures radicales. Il croit qu'il ne faut pas, d'emblée et d'un seul trait de plume, détruire ce qui existe depuis longtemps, et ce qui s'est, en quelque sorte, incarné dans les usages. Ce sont ses propres expressions. Cette manière de voir il l'a, du reste, constamment appliquée jusqu'ici, en se ralliant à toutes les demandes de réductions successives, qui ont été faites par ses honorables collègues du département des finances et du département des affaires étrangères.

Cependant, il veut maintenant que le crédit pour la chaux disparaisse (page 247) immédiatement, tout enfer. Le voilà subitement devenu salutaire, à ses yeux, ce culte des théories qui en porte brusquement l'application jusqu'aux conséquences extrêmes, et qu'il a jugé absurde et dangereux, d'accord avec la majorité de la Chambre, à trois ou quatre reprises, coup sur coup, en moins d'un mois.

Je le répète, son opposition est tellement en contradiction avec les déclarations qu'il nous a faites, avec les conseils qu'il nous a donnés, avec les actes qu'il a posés, que je ne puis pas croire qu'elle ait de l'influence sur la décision que vous allez prendre.

Cette contradiction se justifie d'autant moins que nous sommes en présence d'une expérience déjà faite, et que le passé nous offre une leçon dont nous devons profiter. La brusque suppression de l'encouragement en 1854 a été funeste à la culture des terrains de la zone ardennaise. Les mêmes causes produisant les mêmes efforts, la disparition complète de l’allocation leur sera de nouveau nécessairement fatale en 1865.

L'honorable ministre da l'intérieur n'est d'ailleurs pas tout à fait convaincu quand il avance que les raisons qui ont provoqué la mesure ont cessé d'exister.

Je pense lui avoir démontré que tous les motifs qui ont été invoqués autrefois subsistent encore aujourd'hui. Je ne puis pas recommencer cette démonstration, mais qu'il me permette néanmoins de lui dire encore une fois qu'il est tout à fait dans l'erreur quand il soutient que la distribution de la chaux à prix réduit n'a été conservée de 1847 à 1854, qu'elle n'a été rétablie en 1858, puis conservée encore pendant six années consécutives, que pour apprendre aux cultivateurs des Ardennes que la chaux leur est utile ; qu'il faudrait avoir excessivement mauvaise opinion de leur intelligence pour croire à la nécessité de ce long enseignement, et qu'aucun document ne la constate.

Qu'il me permette aussi de lui rappeler qu'il est absolument dans le faux en argumentant des travaux publics qui doivent être exécutés dans le Luxembourg. Cet argument est sans valeur aucune pour le présent. Dans le plus grand nombre des localités qui ont à se pourvoir de chaux, les conditions de transport sont encore aujourd'hui ce qu'elles étaient à l'époque du rétablissement du crédit.

L'honorable M. Bouvier vous a dit dans quelle situation se trouve l'arrondissement de Virton. En ce qui concerne les voies de communication rapides et économiques, il n'a qu'une espérance, et encore est-elle bien vague ! L'arrondissement de Bastogne, plus heureux, est doté d'un projet magnifique, mais son exécution n'est pas même annoncée, et il est trop éloigné de la grande ligne du Luxembourg, qui est à plus de cinq lieues de Bastogne, à huit d'Houffalize, à onze de Vielsalm, pour en profiter d'une manière sensible.

Je dois faire observer enfin à l'honorable ministre qu'il se trompe également quand il nous répond que nous restreignons le crédit dans des limites tellement étroites que les frais de surveillance l'absorberont presque entièrement

Le crédit actuel est de 40,000 francs et les dépenses faites pour la distribution de la chaux, en vertu de ce crédit, s'élèvent en moyenne à cinq mille et quelques cents francs par année.

Je propose, puisque la Chambre veut des réductions, de porter le crédit à 30,000 francs, et, en définitive, telle est aussi l'intention de l'honorable M. de Moor. Il n'y a, l'erreur commise par lui était rectifiée, qu'une seule et même proposition ; et ainsi que je l'ai déclaré, je voterai son amendement s'il est présenté le premier, comme il votera le mien, j'espère, si, comme je le pense, il a la priorité.

Or, si un crédit de 40,000 francs a entraîné pour frais de surveillance une dépense d'environ 5,000 francs, le crédit de 30,000 francs devant être épuisé plus tôt, suppose une dépense de 4,000 francs au maximum. Il restera donc encore une somme de 26,000 francs à partager.

Je sais bien que cette dernière objection, sans importance en ce moment, deviendra plus sérieuse au budget de 1866, si la Chambre, conséquente avec elle-même, adopte ici la réduction annuelle de 10,000 fr. qu'elle a admise au budget des affaires étrangères. Mais il y aura un moyen fort simple de parer à cet inconvénient. Il consisterait à faire porter les réductions suivantes, non seulement sur le chiffre du subside, mais aussi sur la distribution même du subside, en ce sens qu'un nombre moins considérable de cultivateurs serait appelé à en jouir.

La chambre de commerce d'Arlon constate que la difficulté et la cherté des transports en dehors de la zone du chemin de fer, restreint considérablement l'usage de la chaux. Eh bien, on pourra décider, aux prochains budgets, que le crédit sera exclusivement affecté aux cultivateurs qui ne peuvent pas profiter du chemin de fer pour les transports de chaux, ou qui n'en profitent que dans une proportion minime, qui sera déterminée.

En 1868, l'arrondissement de Bastogne aura son chemin de fer ; le réseau Forcade sera à la veille d'être achevé, et l'allocation s'étant éteinte peu à peu pourra alors disparaître sans trop d'inconvénients. Mais jusqu’alors, soyez-en convaincus, l'encouragement de l'Etat sera le seul moyen de mettre la production en Ardenne en équilibre avec la consommation.

Ce résultat est assez beau, pour que les théoriciens les plus obstinés s'honorent de permettre, pour l'obtenir, une exception temporaire à des règles dont, après tout, on ne doit pas porter le respect jusqu’au fétichisme.

M. Orban. - Je ne veux pas rentrer dans le fond du débat ni vous parler de l'utilité de la distribution de la chaux dans le Luxembourg. Je crois que les honorables orateurs qui m'ont précédé vous l’ont parfaitement établie. Je veux seulement répondre un mot à une observation faite par M. le ministre de l'intérieur.

M. le ministre de l'intérieur dit : Qu'est-ce que 5 fr. pour un cultivateur ? quelle importance cela peut-il avoir ? Il est possible qu'aux yeux de M. le ministre de l'intérieur, 5 francs n'aient pas d'importance ; mais aux yeux des cultivateurs ils en ont énormément, et j'en trouve la preuve dans les chiffres qui nous ont été fournis par M. le ministre. En 1858, première année de la distribution de la chaux à prix réduit, 4.282 cultivateurs ont profité de la mesure et ont demandé 130,000 hectolitres de chaux. En 1863, dernière année dont nous ayons les chiffres, 6,346 cultivateurs ont profité de la mesure et ont demandé 181,000 hectolitres de chaux. Il y a donc augmentation de 50 p. c. dans le nombre des cultivateurs et dans la quantité de chaux délivrée.

Quant à la priorité à donner à l'un ou à l'autre amendement, cela nous est indifférent ; et si l'amendement de M. Van Hoorde est mis aux voix le premier, nous nous y rallierons, comme il se ralliera au nôtre s'il obtient la priorité.

M. Dolezµ. - Au fond les deux amendements n'en font qu'un.

M. Orban. - C'est le même amendement ; il consiste à réduire de 40,000 à 30,000 fr. le crédit accordé pour distribution de chaux, crédit dont le gouvernement propose la suppression complète.

M. Mullerµ. - Je demande la parole pour motiver mon vote. Cette année-ci je voterai l'amendement proposé par les représentants du Luxembourg, je le voterai par une seule considération, c'est qu'il peut y avoir des engagements pris, des conventions conclues par certains cultivateurs pour des livraisons de chaux, et qu'ils ont pu compter plus ou moins que la faveur du prix réduit ne leur serait pas enlevée brusquement.

Je crois donc devoir, uniquement par ce motif, voter l'amendement ; mais je suis d'accord avec M. le ministre de l'intérieur sur la question du principe de la suppression du subside, et l'année prochaine j'émettrai un vote négatif, si l'allocation était reproduite.

M. Bouvierµ. - Messieurs, je viens faire un appel à la bienveillante sollicitude de la Chambre. Cette question de la chaux peut être considérée, entre la droite et la gauche, comme une véritable question de fusion. Je crois que quand il s'agit d'un chiffre aussi minime que celui que nous demandons, la Chambre devrait se montrer en quelque sorte large et généreuse.

Quand nous jetons un regard sur les autres provinces de la Belgique, que voyons-nous ? Nous trouvons dans la Campine le canal qui porte ce nom, qui a, en quelque sorte, transformé le Limbourg et qui coûte des sommes considérables au pays, en faveur duquel nous venons de voter, il y a un moment, une somme assez ronde.

Si nous poursuivons nos investigations dans d'autres provinces, nous voyons la province d'Anvers, en faveur de laquelle le gouvernement a dépensé une somme énorme pour le rachat du péage de l'Escaut. Si nous nous dirigeons vers les Flandres, encore une fois nous y trouvons des canaux d'écoulement, nous y voyons le canal de Bossuyt, qui entraîne une dépense considérable par la garantie d'un minimum d'intérêt.

Poursuivant notre route, nous voyons la Lys, la Dendre, l'Escaut améliorés. (Interruption.) Lisez l'article : fleuves et rivières, et vous verrez qu'ils absorbent des sommes très considérables chaque année.

Si nous avançons toujours, dans la province de Liège nous avons la Meuse, mais au moins nous rencontrons une voix amie, celle de l’honorable M. Muller, c'est une considération qui m'empêche de m'étendre trop sur les dépenses que ce fleuve occasionne au trésor. (Interruption.)

M. de Naeyer vient de me dire qu'il y a encore le canal de l'Yperlée. Il y a en a bien d'autres ; je l'avais oublié, mais vous venez de le souffler à mon oreille. J'ajoute encore à ma liste déjà trop longue le canal de l'Yperlée.

Ainsi, messieurs, vous voyez que toutes les provinces obtiennent de grands avantages, que partout nous rencontrons la main du gouvernement et que, quand il a une faveur à accorder, nous voyons surgir des réclamations sur tous les bancs de la Chambre.

(page 248) Je ne veux pu faire de l'intimidation, mais j'avoue que je serais désolé si notre amendement n'était pas accueilli. Soyez sympathiques, je vous en supplie, messieurs, à la province de Luxembourg qui ne réclame qu'un misérable encouragement de 30,000 francs, alors que partout ailleurs le gouvernement met des sommes considérables à la disposition des provinces. Soyez justes si vous ne voulez pas qu'il s'élève chaque fois de nos bancs des protestations quand vous viendrez réclamer dans cette enceinte l'intervention du gouvernement.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je suis réellement au regret de ne pas pouvoir me rendre à la demande de nos honorables collègues du Luxembourg. Mais ce n'est qu'après y avoir mûrement réfléchi que le gouvernement s'est décidé à proposer la suppression de la prime pour la distribution de la chaux. Dans une des dernières séances j'ai eu l'honneur de dire qu'à nos yeux l'intervention du gouvernement ne se justifie que dans le cas de nécessité absolue ; or il est évident que cette nécessité, aujourd'hui, n'existe pas.

Je crois qu'on a très bien fait, dans le temps, d'encourager l'emploi de la chaux dans la zone ardennaise ; mais aujourd'hui l'expérience étant complète, le gouvernement peut cesser les secours accordés ; ce qui le prouve, c'est que tous les ans la quantité de chaux consommée augmente ; or, il est évident que le cultivateur du Luxembourg a pu apprécier l'utilité de cet amendement et qu'il n'y renoncera pas parce qu'il n'obtiendra pas une prime tout à fait insignifiante. (Interruption.)

L'honorable M. Muller nous dit : « Laissons le crédit au budget pour une année encore. » Mais c'est ainsi qu'on raisonne toujours, c'est toujours la dernière fois. Je dois déclarer à la Chambre que, dès 1863, le gouvernement avait l'intention de supprimer le crédit ; d'honorables députés du Luxembourg sont intervenus et ont demandé que le crédit fût encore maintenu pour un an. En 1864, même demande.

Le gouvernement y a consenti, et cependant déjà il avait informé le gouverneur de la province de Luxembourg et la députation permanente qu'il n'était plus disposé à demander le renouvellement du crédit pour cette année ; on a donc été averti.

M. Bouvierµ. - Vous n'aurez plus d'amendement l'année prochaine.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Les députés du Luxembourg sont encore intervenus, c'était encore pour un an, pour la dernière fois !

Les avertissements n'ont donc pas fait défaut.

L'honorable M. Van Hoorde demande que la réduction se fasse graduellement, c'est-à-dire que l'on diminue aujourd'hui d'un quart, l'année prochaine d'un autre quart et ainsi de suite.

Je crois que cela n'est pas possible.

S'il y avait un crédit considérable dont la brusque suppression pourrait léser des intérêts engagés, je comprendrais cette réduction successive ; mais il s'agit en réalité d'une somme minime, d'une somme de 30,000 fr. à répartir entre les cultivateurs de toute une province ; il s'agit de retirer à ceux qui jouissaient de cet avantage un léger bénéfice de 5 fr. à 5 fr. 50 par an.

Ces avantages ne me semblent pas assez grands pour qu'il faille suivre la voie que l'on a suivie parfois, c'est-à-dire la réduction successive.

Quant aux engagements dont a parlé l'honorable M. Muller, je ne sais pas quels ils peuvent être. Le gouvernement n'a aucun engagement, et je crois que les cultivateurs de leur côté n'en ont pu prendre aucun.

Ils étaient avertis. Dès l'année passée ils ont pu savoir qu'aucun crédit ne serait porté au budget de 1865.

Il y a même des inconvénients dans cette distribution de la chaux. On a découvert à cette occasion des fraudes réelles.

M. de Moorµ. - Il y en a ailleurs.

M. Bouvierµ. - Et le haras, il est démoli, démoli !

M. de Moorµ. - Et les pêcheurs !

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - L'industrie privée a réclamé, des chaufourniers se sont plaints de la concurrence que leur fait le gouvernement en leur accordant des primes.

L'honorable M. Bouvier demande la prime pour distribution de chaux comme une compensation aux voies de communication par terre et par eau accordées à d'autres provinces.

Je ferai remarquer que la province de Luxembourg n'est pas déshéritée sous ce rapport. Elle a d'excellentes routes. Des sacrifices spéciaux ont été faits par le trésor public.

Cette province, croyait-on, n'aurait jamais de chemins de fer ; on lui a accordé des millions pour construire des routes, et quand ces millions ont été dépensés, elle a eu des chemins de fer par-dessus le marché. Elle a en outre des routes de l'Etat, des routes communales parfaitement établies. Le gouvernement intervient...

M. de Moorµ. - Pour un tiers.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Pour un tiers et même plus que dans d'autres provinces.

Je ne puis, pour ces motifs, me rallier à l'amendement proposé par les honorables députés du Luxembourg et je prie la Chambre de ne pas l'admettre.

M. de Moorµ. - Messieurs, je serai fort court. Je comprends l'impatience de la Chambre d'en finir avec la chaux, mais je ne puis laisser passer les paroles de M. le ministre sans lui dire que les députés du Luxembourg n'ont pas joué vis-à-vis de lui le rôle officieux de solliciteurs insatiables, de mendiants.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je n'ai pas dit cela.

M. de Moorµ. - Vous avez laissé supposer que nous vous avions prié, supplié de maintenir le crédit pendant une année, puis pendant une année encore, C'est absolument comme si nous vous avions tendu la main en vous implorant.

Nous n'avons demandé qu'une chose, c'est que l'on maintînt ce que nous considérons comme un droit, au point de vue des avantages que le gouvernement accorde à d'autres provinces, sous formes différentes et qu'il ne propose pas de supprimer.

Nous espérions que le gouvernement se montrerait tout au moins juste envers nos agriculteurs.

Il ne peut me convenir de faire ici l'énumération des faveurs qui ont été accordées et continuent à l'être à la Campine, au Limbourg, pour leurs irrigations et leurs défrichements. Je ne veux point faire de récriminations. Je demande que la Chambre, dans le vote qu'elle va émettre, ne soit guidée que par le sentiment de l'impartialité.

Il a été démontré, je pense, qu'il y a beaucoup d'industries qui ne se trouvaient pas dans le droit commun, par le fait de primes qui leur sont octroyées.

Je ne vois pas pourquoi, lorsque vous accordez aux pêcheurs la continuation d'une prime qui s'éteindra graduellement, vous voudriez que les petits cultivateurs des trois provinces de Luxembourg, Liège et Namur, ne jouissent pas du bénéfice que leur donne la chaux à prix réduit, qui n'est accordée, remarquez-le bien, qu'aux plus éloignés des fours et des stations où on en distribue.

Je fais appel à l'esprit de justice de la Chambre et j'espère qu'elle ne nous laissera pas sous le poids d'une discussion que M. le ministre de l'intérieur a laissé dégénérer en quelque sorte en une question peu digne pour les députés du Luxembourg qui ont toujours défendu officiellement et officieusement les intérêts de leur province avec convenance, dignité et indépendance.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, je n'ai pas voulu insinuer que les députés du Luxembourg se fussent conduits comme des espèces de mendiants. J'ai voulu au contraire leur dire quelque chose d'agréable ; car j'ai constaté qu'ils avaient défendu avec persévérance les intérêts de leurs commettants et qu'ils y avaient réussi pendant quelques années. Voilà ce que j'ai voulu dire et je proteste contre toute intention contraire.

M. Bouvierµ. - Messieurs, je dirai à la Chambre qu'il y a intérêt pour le gouvernement et pour le pays même à ce que vous accordiez cette allocation. En effet, messieurs, il est certain qu'aujourd'hui il y a encore beaucoup de terres incultes dans la zone ardennaise proprement dite.

Eh bien, messieurs, ces terrains sont en quelque sorte à l'état de mainmorte. Du moment que ces terres stériles peuvent être cultivées, il est évident que le gouvernement recouvre immédiatement au centuple, et par les droits de succession et par les droits de mutation, la maigre somme que nous lui demandons.

Vous voyez, messieurs, que je n'avais que cette simple réflexion à ajouter à mes précédentes observations.

- La discussion est close.

MpVµ. - Il s'agit de mettre aux voix les amendements.

Je pense que la Chambre consentira à ce que l'on mette les deux amendements aux voix en même temps, puisqu'ils ont le même but et qu'ils portent le même chiffre.

M. Mullerµ. - Je propose, par sous-amendement, d'ajouter les mots : Pour la dernière fois.

M. Bouvierµ. - Je me rallie à la proposition de M. Muller.

MpVµ. - L'amendement serait donc ainsi conçu :

« Dernier subside pour la distribution de chaux à prix réduit aux (page 249) cultivateurs des communes des provinces de Liège, de Luxembourg et de Namur, 30,000 fr. »

M. Guillery. - M. le président en lisant l'amendement a employé les mots : « Dernier subside. » Je dois faire observer à la Chambre que le mot « dernier » n'est pas dans l'amendement.

MpVµ. - Les membres qui ont proposé le sous-amendement n'insistant pas, le mot « dernier » est retiré.

M. Mullerµ. - Permettez-moi, messieurs, de faire remarquer à la Chambre que, d'après le sens et la signification que l'honorable M. Bouvier vient de donner à l'amendement, ce sera un dernier subside.

Il est procédé au vote par appel nominal.

74 membres y prennent part.

37 votent pour.

37 votent contre.

- En conséquence, l'amendement n'est pas adopté.

Ont voté l'adoption : MM. Muller, Orban, Thibaut, T'Serstevens, Valckenaere, Van Hoorde, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vleminckx, Warocqué, Wasseige, Allard, Bara, Bouvier-Evenepoel, Carlier, Crombez, C. de Bast, de Borchgrave, de Brouckere, de Kerchove, de Macar, de Moor, de Rongé, de Terbecq, de Theux, de Vrière, Devroede, Dolez, Dumortier, d'Ursel, Grosfils, Jacquemyns, J. Jouret, Lange, Lelièvre, Lesoinne et E. Vandenpeereboom.

Ont voté le rejet : MM. Mascart, Moreau, Mouton, Reynaert, Rodenbach, Tack, Thienpont, Thonissen, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Humbeeck, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Vilain XIIII, Bricoult, Couvreur, de Conninck, de Haerne, Delaet, Delcour, de Muelenaere, de Naeyer, de Ruddere de Te Lokeren, de Wandre, Dupont, Elias, Funck, Guillery, Hymans, Jacobs, Janssens, Jamar, M. Jouret, Kervyn de Lettenhove, Le Hardy de Beaulieu et Lippens.

MpVµ. - Il reste à voter maintenant sur le chiffre proposé par le gouvernement qui est de 30,000 fr. ; une modification a été proposée par la section centrale ; elle consiste à transférer une somme de 3,000 fr. de l'article 61 à l'article 59 déjà adopté ; si cette modification était adoptée le chiffre de l'article 59 serait élevé à 6,000 fr. à l'extraordinaire et celui de l'article 61 réduit à 27,000 fr.

M. le ministre de l'intérieur se rallie t-il à cette proposition ?

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Oui, M. le président.

- L'article, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.

Article 62

« Art, 62. Personnel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat : fr. 67,600. »

(page 255) M. Vleminckxµ. - Dans une de nos dernières séances, l’honorable ministre de l’intérieur, en vous entretenant de ses projets de décentralisation, vous a fait connaître quelles étaient ses vues relativement à l'école vétérinaire. Si je l'ai bien compris, il est en présence d'un des deux projets suivants : ou le déplacement de l'école ou l'annexion de celle-ci à une de nos universités.

Si j'avais un conseil à donner à l'honorable ministre, je lui recommanderais de renoncer au déplacement. Ce déplacement, ce serait toujours le maintien de l'école dans ses conditions actuelles, et on pourrait difficilement en distraire la pension.

Or, l'honorable ministre est fort peu désireux, paraît-il, de continuer à être maître de pension. Et il a raison. Je ne crois pas, d'ailleurs, que le déplacement soit une mesure économique, car les terrains à acquérir dans notre vieux Bruxelles coûteraient peut-être autant que lui rapporterait le produit de la vente du local actuel, et si l'établissement se trouvait plus loin de Bruxelles qu'il ne l'est actuellement, on ne pourrait se dispenser d'y annexer un pensionnat.

La seule mesure vraiment raisonnable à prendre, à mon avis, serait l'annexion de l'enseignement vétérinaire à l'une de nos universités, et si quelque chose m'étonne, c'est que cette annexion n'ait pas été décrétée dès le moment où l'on a institué cet enseignement. Elle nous eût épargné une dépense de plusieurs millions.

Quelques mots suffiront pour vous prouver combien cette mesure serait bonne et fructueuse.

L'enseignement vétérinaire se divise en deux parties distinctes : il y a des cours communs et des cours spéciaux ; les cours communs sont donnés dans nos universités, et ils sont en assez grand nombre ; ce sont les cours de chimie, de physique, de botanique, de zoologie, de pharmacie, de pharmaco-dynamie, d'autres encore. Il y a ensuite quelques cours spéciaux qui ont trait principalement à la médecine vétérinaire.

Il en résulte que plus de la moitié de l'enseignement se trouve déjà installée dans nos universités ; il suffirait, par conséquent, pour que l'enseignement fût complet, d'adjoindre à une faculté de médecine trois ou quatre professeurs pour les branches spéciales. Quel serait le résultat de cette opération ? C'est qu'au lieu de coûter annuellement quelque chose comme 140,000 fr., l'enseignement vétérinaire ne nous imposerait plus qu'une dépense de 50,000 à 40,000 fr., peut être même n'irions-nous pas à ce chiffre ; nous pourrions, en outre, vendre tout entiers les terrains de grande valeur qui sont affectés actuellement à l'école, et il faudrait se borner purement et simplement à rechercher un local pour la clinique, l'amphithéâtre d'anatomie et la forge.

De cette façon l'enseignement se trouverait établi sur d'excellentes bases. Nous sommes loin, vous le voyez, du désir manifesté par les honorables représentants de Namur de voir s'établir l'école vétérinaire à Gembloux, ce qui est véritablement impossible. L'enseignement vétérinaire a pour couronnement une bonne clinique et les leçons de clinique vétérinaire ne peuvent se donner utilement que dans les grandes villes ou à leurs abords, car là seulement se trouvent les sujets nécessaires à cet enseignement. Je mets dans cette question le plus grand désintéressement, car si le projet que je recommande à l'honorable ministre se réalise, il est à craindre, quelque désir que j'en aie d'ailleurs, que ce ne soit pas à l'université de Bruxelles qu'on annexera l'enseignement en question ; mais lorsqu'il s'agit des grands intérêts du pays, et des intérêts élevés de la science, il faut que les mesquines prétentions des localités sachent s'imposer silence.

(page 249) M. Wasseige. - Je ne crois pas qu'il soit aussi impossible que semble vouloir le faire entendre l’honorable M. Vleminckx d'annexer l'école vétérinaire à l'école agricole de Gembloux ; si cette école doit être transférée, on aurait d'abord en la transférant à Gembloux, l'avantage d'y trouver des locaux dont l'appropriation ne coûterait rien à l'Etat ; il ne s'agirait pas là d'acquisitions, d'achat de terrains, ni de toutes les grandes dépenses dont M. Vleminckx nous a entretenus.

La seule objection que l'on ait faite à Gembloux c'est de ne pas avoir suffisamment de sujets pour faire une bonne clinique ; mais, si les renseignements qui m'ont été donnés sont exacts, il serait très facile, quant aux chevaux du moins, d'obvier à cet inconvénient.

Gembloux est situé entre deux villes qui possèdent des garnisons de cavalerie : Namur et Bruxelles. Un arrangement avec le département de la guerre pour faire traiter à Gembloux les chevaux malades permettrait de fournir des sujets à suffisance pour la clinique, sans le moindre inconvénient pour l'armée.

Quant au bétail, il est impossible de trouver une meilleure situation que Gembloux ; il est situé au milieu d'un centre agricole populeux ; de grands fermiers s'y occupent spécialement de l'élève du bétail.

Et sous ce rapport l'école vétérinaire y serait plus favorablement placée que près d'une grande ville où l'on ne trouve guère de bétail à soigner.

J'insiste donc auprès de M. le ministre de l'intérieur pour qu'il prenne en considération les motifs que j'ai eu l'honneur de faire valoir en faveur du transfert de l'école vétérinaire à Gembloux.

J'ajoute que l'école d'agriculture de Gembloux est assez peu fréquentée. Son utilité a déjà été contestée par M. Rodenbach.

Il est à peu près certain que si on ne l'améliore pas, si on ne la complète pas, lorsque l'occasion s'en présente si naturellement, les adversaires reviendront à la charge, et c'est au gouvernement à aviser, s'il croit la conservation de cette école chose utile.

M. Lelièvre. - Je ne puis que m'associer aux observations qu viennent d'être proposées. Je prie M. le ministre ds l'intérieur de vouloir bien examiner avec impartialité la question soulevée, et j'espère qu'il sera plus juste envers Gembloux que les honorables députés de Bruxelles, qui veulent tout accaparer au profit de leur arrondissement. La suppression du haras occasionne à un grand nombre d'habitants de Gembloux un tort considérable ; des constructions avaient été faites en vue de l'établissement aujourd'hui supprimé, il est certainement dû une juste indemnité à cette localité gravement lésée. Il ne s'agit pas ici de mesquines prétentions, il s'agit de ne pas sacrifier la ville de Gembloux aux prétentions excessives de ceux qui veulent transférer tous les établissements dans la capitale au préjudice d'autres communes dignes d'intérêt et ayant des droits qu'une administration sage appréciera avec justice.

- La discussion est close.

L'article 62 est mis aux voix et adopté.

Article 63

« Art. 63. Matériel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat ; bourses ; jury vétérinaire : fr. 68,100. »

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, dans la discussion générale, j'ai eu l'honneur de faire connaître que je présenterais un amendement à cet article. Cet amendement a pour objet d'augmenter le crédit d'une somme de 3,000 fr. au littera A. Je vous ai indiqué les motifs de cette augmentation. Lorsque l'école vétérinaire était en même temps une école d'agriculture, on y a annexé plusieurs hectares des terrain exploités encore aujourd'hui par l'école. Le produit de ces terrains est de 3,000 fr. environ, cette somme sera représentée par 3,000 fr., augmentation que je demande.

Cette mesure me paraît excellente. Le gouvernement pourra vendre immédiatement ces terrains : les constructions pourront se développer dans les environs de la nouvelle station du Midi ; des quartiers et des rues nouvelles y seront ouvertes ; les intérêts du prix de la vente de ces terrains produiront une somme de beaucoup supérieure à celle que produit l'exploitation ou terrains à vendre.

M. Dumortier. - Messieurs, j'approuve beaucoup ce que vient de dire M. le ministre de l'intérieur. Les terrains qui sont annexés à l'école vétérinaire avaient été achetés dans le temps, parce que l'école vétérinaire était en même temps une école d'agriculture. Ces terrains sont vastes. Comme l'école d'agriculture a cessé d'exister, ces terrains deviennent inutiles ; ils ont acquis une grande valeur, et rien de mieux que de voir l’Etat en profiter.

Cependant il faut savoir si par la vente de ces terrains nous ne préjugeons en rien la question de l'école vétérinaire elle-même.

Je ne partage pas l'opinion des honorables membres qui ont parlé tout à l'heure. Je crois que cette école doit rester dans les environs de Bruxelles. La capitale seule peut offrir une clinique suffisante pour cet établissement. C'est à Bruxelles qu'on peut rencontrer les meilleurs vétérinaires. Ce serait une faute grave que de priver la capitale de l'école vétérinaire.

Puisque j'ai la parole, je dirai qu'à mon avis il est indispensable de maintenir l'internat de l'école vétérinaire.

Les fils de nos fermiers entrent dans cette école en payant, si je ne me trompe, une pension de 800 fr. par an. Or, c'est un sacrifice que beaucoup d'agriculteurs peuvent faire. Mais le jour où l'internat serait supprimé, cette somme serait complètement insuffisante, et on aurait nui ainsi au développement de l'enseignement vétérinaire. Ce serait une chose très préjudiciable pour les habitants des provinces, pour les fermiers qui envoient leurs fils à l'école vétérinaire.

A mon avis, toutes ces questions doivent rester intactes.

(page 269) M. Vander Donckt. - Messieurs, je crois que les honorables MM. Wasseige et Lelièvre ont perdu de vue une observation des plus essentielles présentée par l'honorable M. Vleminckx : c'est que pour le cas où l'école vétérinaire serait réunie à l'une des deux universités de l'Etat, un très grand nombre de branches accessoires s'y trouvent déjà enseignées et contribueront à diminuer de beaucoup les frais actuels de l'école vétérinaire.

Quel est donc le puissant motif qui existerait en faveur du maintien de l’école vétérinaire à Bruxelles ? Pourquoi ne l’annexerait-on pas à l’une des universités de l’Etat ? En opérant cette réunion, ainsi que l’a dit l’honorable membre, les dépenses de l’école vétérinaire qui s’élèvent aujourd’hui à 125,800 fr. seraient réduites à une quarante de mille francs. Devant cette considération d’un ordre majeur doit sans doute fléchir l’espèce de provincialisme qu’on fait valoir en faveur de Gembloux ou d’autres localités.

Je crois que l'observation de l'honorable M. Vleminckx mérite l'attention la plus sérieuse de la Chambre.

Je voterai donc l'amendement de M. le ministre de l'intérieur, d'autant plus que la conséquence de ce vote amènera probablement, dans un avenir peu éloigné, le déplacement de l'école vétérinaire et son annexion à l'une des universités de l'Etat.

(page 249) M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, l'honorable M. Vander Donckt va trop loin, s'il pense que le vote de mon amendement aura pour conséquence nécessaire l'adjonction de l'école vétérinaire à l'une de nos universités de l'Etat.

Le fait est que le vote de l'amendement ne préjuge rien quant au déplacement de l'école vétérinaire elle-même. Cette question, comme je l'ai dit, mérite une étude sérieuse. On ne peut se prononcer à la légère. Si j'ai soulevé la question devant la Chambre, c'est uniquement pour que l'assemblée y fût rendue attentive.

Lorsqu'elle aura été discutée, le gouvernement pourra s'éclairer des lumières que le débat lui aura fournies.

Quant à l'opinion plus ou moins personnelle que j'ai exprimée, je devrai nécessairement, avant de prendre une décision, consulter les hommes compétents.

Ce que je dis du déplacement de l'école vétérinaire et de son annexion éventuelle à une de deux universités de l'Etat, s'applique aussi à l'institut de Gembloux. Je ne puis pas cependant laisser naître des espérances qu'en conscience je ne crois pas pouvoir réaliser. On examinera la (page 250) question, mais il sera très difficile, pour ne pas dire impossible, de placer l'école vétérinaire à Gembloux.

Cette question a été examinée déjà, et c'est pour cela que je puis mieux me prononcer sur ce point que sur beaucoup d'autres,

- La discussion est close.

Le chiffre de 73,200 fr., proposé par M. le ministre de l'intérieur, est adopté.

Article 64

« Art. 64. Subside à la Société d'horticulture de Bruxelles : fr. 24,000. »

- Adopté.

Chapitre XII. Voirie vicinale et hygiène publique

Article 65

« Art. 65. Encouragements pour l'amélioration de la voirie vicinale ; indemnités aux commissaires voyers, et encouragements pour les améliorations qui intéressées l'hygiène publique : fr. 1,150,000. »

M. Lelièvre. - Messieurs, j'appelle l'attention de M. le ministre sur la nécessité d'inviter les administrations des communes, auxquelles il accorde des subsides pour la voirie vicinale, à s'occuper principalement des chemins aboutissant aux stations des voies ferrées Ce sont les chemins de cette catégorie qui doivent être améliorés en première ligne.

Quant aux cours d'eau non navigables ni flottables dont il question au chapitre en discussion, ils devraient faire l'objet d'un projet de loi. Il s'agit, en effet de décider législativement s'ils appartiennent au domaine public et à quel régime ils doivent être soumis.

Tout ce qui concerne cette matière devrait être réglé par une loi spéciale attendue depuis longtemps.

C'est là une amélioration qui mérite d'être l'objet d'un eamen sérieux du gouvernement.

M. Bouvierµ. - Je n'ai que quelques observations à présenter sur l'allocation demandée par le gouvernement en ce qui concerne la voirie vicinale, dont la cause est désormais gagnée, comme l'indique d'ailleurs le vote favorable sur l'amendement adopté dans une précédente séance.

On ne discute plus les avantages de chemins vicinaux bien tracés et entretenus qui mettent les villages en relations entre eux et avec les grandes voies de communication, qui laissent en tout temps et avec facilité au cultivateur l'abord des champs pour la culture, le transport facile des engrais et la rentrée de ses récoltes.

Je forme donc, malgré l'adoption de cet amendement, le vœu le plus ardent de voir augmenter considérablement encore le chiffre actuel, augmentation qui aurait pour conséquence immédiate une élévation correspondante et proportionnelle des crédits alloués à cette utile destination par les provinces et les communes.

Toutes les provinces du pays donnent d'ailleurs l'exemple d'une noble émulation qui devrait stimuler l'élan du gouvernement. Elles votent avec un entraînement louable, digne d'un meilleur sort, des centimes additionnels extraordinaires à la contribution foncière. Mais je le déclare bien haut, ce zèle intelligent resterait stérile et impuissant si le chiffre de l'allocation portée à l'article que nous discutons devait rester à l'état de lettre morte. Il y a d'ailleurs un chiffre éloquent qui vient donner raison à nos conseils provinciaux, c'est celui qui constate qu'il reste encore, d'après les renseignements fournis par le gouvernement, 672 chemins à améliorer dont la longueur s'élève à 2,023,720 mètres et la dépense à 32,841,835 fr. sans compter les nouveaux chemins à construire.

Ces chiffres indiquent mieux que les meilleurs discours quelles dépenses le pays devra s'imposer encore pour compléter le réseau de nos chemins vicinaux.

II est telles provinces que l'on pourrait citer dont les allocations déjà votées ne peuvent trouver leur emploi parce que l'écart entre le chiffre du budget de l'intérieur et celui consenti par ces provinces est trop considérable.

Le vœu que j'exprime pour l'augmentation du chiffre en discussion recevra, sur tous les bancs de la Chambre, une vive et chaleureuse sympathie.

De la voirie vicinale à l'encouragement pour les travaux d'assainissement et d'hygiène publique, la transition ne sera pas trop brusque. Là encore il y a énormément à faire et le chiffre de 150,000 francs inséré au budget est vraiment dérisoire lorsqu'on songe, qu'il doit se répartir entre les 2,500 communes du pays, ce qui donne à chacune d'elles la misérable somme de 60 fr.

Et le gouvernement voudrait-il par hasard que les administrations des bourgs, villages et hameaux procurassent à leurs habitants pour les alignements, empierrements et nivellements des rues en présence d'un subside annuel de 60 francs autre chose qu'une longue et presque éternelle espérance ?

Comment voulez-vous fournir de l'eau potable, construire des lavoirs publics, éconduire les eaux stagnantes, sources de maladies et le plus souvent, d'épidémies avec la bagatelle de 60 francs par an ?

Ce crédit est dérisoire en présence du relevé des demandes des subsides adressée au département de l'intérieur pour les différentes provinces, lesquelles demandes s'élèvent au chiffre de 5,764,745 fr. J'abandonne les centimes.

Je sais fort bien que toutes améliorations dans l’intérêt de l'hygiène publique ne peuvent se faire en un jour, mais ce n'est pas un motif non plus pour qu'il faille employer des siècles à leur réalisation. C'est encore un nouveau vœu que j'exprime de voir le crédit prendre des proportions plus larges, et j'espère que ce vœu rencontrera, au sein de la législature, un bienveillant et sympathique appui.

M. de Theuxµ. - Messieurs, assurément rien n'est plus utile qui la dotation pour les chemins vicinaux. Mais je pense qu'il est à propos de faire connaître à M. le ministre de l'intérieur et à la Chambre qu'une des causes pour lesquelles il y a plus ou moins un temps d'arrêt dans la construction des chemins vicinaux, c'est la dépense d'entretien.

Vous vous rappelez que plusieurs provinces ont voulu mettre une grande partie de cette dépense à charge du gouvernement. Le gouvernement et les Chambres s'y sont opposés par de très bonnes raisons. Mais pour que ces dépenses d'entretien soient le plus faibles possible, il est nécessaire que quand on construit de nouveaux chemins vicinaux ou quand on fait de grandes réparations, on apporte le plus grand soin à construire solidement les parties les plus exposées aux détériorations.

Il est à ma connaissance que ce qui effraye le plus les communes, c'est la dépense d'entretien. Elles seraient beaucoup plus portées à faire des dépenses pour construction de routes si elles n'avaient pas à redouter les dépenses d'entretien.

Je ferai une autre observation en ce qui concerne les dépenses du chef d'hygiène publique. Je crois qu'il n'est pas au budget un seul crédit dont il soit fait plus abus que de celui-là. Car on fait des demandes, du chef d'assainissement, qui réellement n'ont aucune espèce de fondement. C'est tout bonnement un moyen d'obtenir une allocation extraordinaire à laquelle on n'a pas droit. C'est ce qui arrive fréquemment, mais si l'on veut assainir les communes rurales il y a un moyen bien simple et très peu dispendieux.

C'est de faire exécuter strictement les règlements sur la voirie vicinale, de ne pas permettre qu'il y ait des eaux stagnantes et croupissantes le long de la voirie publique.

A cet égard, la négligence est telle, que les cultivateurs préfèrent marcher pendant six mois dans la boue plutôt de se donner la moindre peine pour faire écouler les eaux.

Or, si la police prenait cette partie de sa besogne sérieusement à cœur, il y aurait peu d'eaux croupissantes dans les communes rurales.

Je recommande ceci à l'attention particulière de M. le ministre de l'intérieur.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Les observations faites par l'honorable M. Lelièvre, en ce qui concerne les chemins vicinaux aboutissant aux chemins de fer, seront prises en considération. Elles l'ont toujours été, et lorsque des subsides sont demandés pour des travaux de ce genre, non seulement le département de l'intérieur, mais le département des travaux publics interviennent en général pour une part dans la dépense.

Quant au projet de loi sur les cours d'eau, c'est une question extrêmement grave et et difficile. Mon honorable prédécesseur ou mes honorables prédécesseurs avaient commencé l'examen de ce projet. Moi-même, je l'ai poursuivi, et au moment de la dernière crise ministérielle, j'étais sur le point de déposer sur le bureau un projet restreint. On examine en ce moment le projet d'ensemble. Si ma mémoire est fidèle, il est soumis à M. le ministre de la justice. Mais c'est une matière ardue et complique. Je crois donc qu'avant de déposer ce projet, il faut que le gouvernement en fasse lui-même un examen très sérieux.

L'honorable M. de Theux pense qu'il y a un temps d'arrêt dans l'exécution des travaux de voirie vicinale. Il est possible qui cela se produise dans quelques provinces, dans quelques arrondissements. Ce temps d'arrêt n'est pas général. Je crois au contraire que les travaux de voirie se poursuivent dans le pays avec plus d'activité que jamais. En effet, les subsides qu'accorde le gouvernement n’ont pas varié.

(page 251) Mais les provinces augmentent leur intervention ; c'est donc une erreur de dire qu'il y a un temps d'arrêt dans l'exécution.

L'honorable M. de Theux nous a recommandé de veiller à ce que les chemins vicinaux fussent bien exécutés. Il a dit que la mauvaise exécution de ces chemins est une des causes principales des dépenses d'entretien. Cela est parfaitement exact. Dans certaines provinces, les travaux de voirie ne sont pas exécutés comme ils devraient l'être. Dans d'autres provinces, au contraire, dans les Flandres, par exemple, ces travaux sont parfaitement faits.

Les chemins de grande communication sont payés exactement comme les grandes routes de l'Etat, et dès lors, dans nos Flandres, il n'y a presque pas de dépenses d'entretien.

Dans d'autres provinces, au contraire, les travaux se font par empierrements, système de macadam. Ces travaux sont exécutés moins bien et coûtent moins, mais ce n'est pas la faute du gouvernement. La construction et l'amélioration de la voirie vicinale est une affaire purement communale. Le gouvernement, qui donne des subsides, a le droit et le devoir sans doute de contrôler autant que possible l'emploi de ces subsides. Mais le gouvernement n'a pas un personnel suffisant pour pouvoir exercer une surveillance salutaire et efficace. C'est aux communes, aux autorités provinciales et aux commissaires voyers que ce devoir incombe.

Quant aux dépenses d'entretien, l'honorable M. de Theux vous l'a dit, ce n'est pas une charge de l'Etat. La loi met formellement l'entretien de la voirie à la charge des communes. Le gouvernement doit se borner, en pareille matière, à intervenir par voie de conseil. C'est ce qu'il a fait ; il envoie des instructions ; de temps en temps il délègue un inspecteur pour visiter les routes d'une province. C'est à cela que doit se borner l'intervention du gouvernement en matière d'entretien de la voirie vicinale.

Quant aux subsides pour l'hygiène publique, je suis tenté de croire avec l'honorable comte de Theux que quelques-uns de ces subsides, les petits subsides surtout, ont été employés d'une manière peu utile. Parfois cependant ces subsides ont reçu un excellent emploi.

Dans certaines communes, par exemple, on a établi des distributions d'eau avec le concours du gouvernement, et on a obtenu de fort bons résultats. Il est possible que le gouvernement ferait bien de ne liquider les subsides qu'après l'adjudication publique et la reprise des travaux, et d'adopter le même système pour la construction de routes d'une certaine importance au moins.

M. Wasseige. - Je dois répondre un mot à ce que vient de dire l'honorable ministre de l'intérieur relativement à l'entretien des routes dans certaines provinces.

Dans les provinces de Namur, de Liége et de Luxembourg les routes sont empierrées, il est vrai, mais ce n'est pas parce qu'elles sont mal construites qu'elles demandent plus d'entretien, c'est à cause de la nature même de ces routes, c'est parce qu'elles demandent plus d'entretien que les routes pavées. Je pense, quant à moi, que le gouvernement ferait chose parfaitement convenable s'il accordait ceratains subsides pour l'entretien des routes.

On dit que cet entretien est à la charge des communes ; cela est vrai, comme cela est vrai pour ce qui concerne la voirie vicinale, même la construction de eoutes nouvelles. Pourquoi intervient-il quant à cette construction, et pourquoi n'intervient-il pas dans ce cas, au risque d'engager les communes à faire toujours de nouvelles constructions et à négliger l'entretien des routes anciennes ? Les communes auraient bien plus d'intérêt à entretenir avec soin leurs routes, qu'à en avoir une plus grande étendue en les laissant se détériorer.

J'engage M. le ministre à ne pas se montrer si sévère sur le principe qu'il vient d'établir et à permettre que certains subsides soient accordés pour l'entretien des chemins vicinaux.

Il le peut d'autant mieux qu'il n'y aurait d'injustice pour personne. Dans les provinces où il n’y a pas de frais d'entretien, les subsides seraient délivrés pour la construction de nouvelles voies de communication ; dans celles, au contraire, où l'entretien est une lourde charge pour les communes, on autoriserait les députations permanentes à diviser les subsides, et cela serait de l'excelleute justice distributive pour tout le monde.

- L'article 65 est adopté.

Article 66

« Art. 66. Inspection des chemins vicinaux, des cours d'eau et de l'agriculture : fr. 15,550. »

- Adopté.

Chapitre XIII. Industrie

Article 67

« Art. 67. Frais du conseil supérieur de l'industrie et du commerce ; traitement de l'inspecteur pour les affaires d'industrie et du secrétaire du conseil : fr. 12,500. »

- Adopté.

Article 68

« Art. 68. Enseignement professionnel : Ecoles industrielles, ateliers d'apprentissage : fr. 197,300. »

M. Jamar. - Il y a trois ans, messieurs, le gouvernement chargeait une commission de lui proposer un projet de réorganisation du Musée de l'industrie.

Dans le rapport au Roi qui précédait l'arrêté royal instituant cette commission, le ministre s'exprimait ainsi :

« En fondant au Musée une école industrielle, semblable à celles qui fonctionnent avec succès dans plusieurs de nos grandes villes, on offrirait à la classe si nombreuse des artisans et des ouvriers une source d'instruction qui lui fait à peu près complètement défaut dans la capitale. En y ouvrant un laboratoire de chimie, où les applications si variées de cette science à l'industrie pourraient être mises en lumière, on donnerait, dans une foule de cas, aux fabricants le moyen de se rendre compte de la valeur de leurs travaux et de la portée de leurs innovations, en même temps qu'on fournirait à de jeunes chimistes l'occasion de compléter par la pratique leurs études, dont le fruit ne manquerait pas de tourner au profit de l'industrie.

La commission, messieurs, comprit l'utilité et l'importance de la mission qui lui était confiée, en présence surtout du régime commercial nouveau, inauguré par le traité franco-belge et de la lutte industrielle que le pays allait avoir à soutenir.

Elle se livra à ses travaux avec une grande activité et au bout de quelques semaines, elle présenta au gouvernement un projet de réorganisation du Musée de l'industrie.

Approuvé par le gouvernement et présenté aux Chambres, ce projet reçut de vous, messieurs, un accueil très sympathique, et vous mîtes à la disposition du gouvernement les fonds nécessaires pour la création d'une école industrielle.

Malheureusement, messieurs, le zèle de la commission et votre concours ont été stériles jusqu'ici.

Trois ans se sont écoulés et le gouvernement vient de nous dire qu'il n'a pas encore de local pour l'école industrielle.

Les représentations de l'Académie, celles de la commission administrative de la bibliothèque, ont fut abandonner le local du Musée de l'industrie, qui avait été primitivement désigné.

Le gouvernement espère pouvoir établir l'école industrielle, dans un avenir plus ou moins prochain, dans l'un des bâtiments occupés aujourd'hui par les départements ministériels qui doivent s'installer dans les nouveaux hôtels de la rue de la Loi.

Le gouvernement a engagé, nous dit-il, une correspondance avec l'administration communale pour demander un local.

Quoi qu'il en soit, que la responsabilité de cette situation doive peser sur le gouvernement ou sur l'administration communale de Bruxelles, toujours est-il qu'on ne peut assez déplorer ce retard. Il s'agit, en effet, d'un enseignement indispensable au succès de nos industriels, qui ont courageusement engagé la lutte avec de puissants rivaux, d'un enseignement pour lequel l'Allemagne et la France font, en ce moment, des sacrifices considérables.

Je tiens à ce propos, messieurs, à appeler votre attention et celle du gouvernement sur une pétition qui vous a été adressée il y a quelques jours par les conseils communaux de St-Josse-ten-Noode et de Schaerbeek.

Ces administrations se sont réunies pour fonder, il y a bientôt un an, une école normale des arts du dessin.

Il ne s'agit pas ici d'une académie organisée pour l'enseignement purement artistique, il s'agit d'une institution dont le but est de propager les connaissances, de développer les aptitudes qui doivent faire de nos ouvriers des hommes de goût et des artistes industriels.

Les deux communes ont consacré à cet établissement une somme de 8,000 francs et la province a accordé un subside de 2,000 francs. Aujourd'hui l'on demande au gouvernement d'assurer le succès de ces efforts.

Pour moi j'appuie d'autant plus volontiers la demande des pétitionnaires que les hommes d'intelligence et de cœur qui dirigent l'établissement avec un désintéressement auquel il faut rendre hommage, ont toutes les qualités nécessaires pour mener l'entreprise à bonne fin.

Le but qu'ils se proposent a été atteint en Angleterre au prix des plus grands sacrifices.

Un grand nombre d'entre nous, messieurs, ont pu constater à (page 252) l'exposition universelle de Londres les progrès considérables qui ont été réalisés de 1851 à 1862 dans toutes les industries qui empruntent le concours de l'art. Ces résultats ont été obtenus surtout par la création de l'école de Kensington, admirable pépinière d'où sortent tous les ans des centaines d'instituteurs qui vont répandre dans tous les centres industriels de l'Angleterre les connaissances artistiques, qui donneront aux produits de l'industrie anglaise la supériorité incontestable sur ceux des pays qui ne suivront pas cet exemple.

Il y a là, messieurs, un grand, intérêt national à sauvegarder, et c'est à ce titre que les pétitionnaires pensent avec raison pouvoir compter sur l'appui de la Chambre et du gouvernement.

L'Angleterre, je le répète, a fait pour cet enseignement spécial des dépenses considérables, et j'espère que M. le ministre ne marchandera pas son concours non seulement aux communes de Saint-Josse-ten-Noode, de Schaerbeek et d'Ixelles, mais à toutes les communes du pays qui suivront cet exemple.

M. Funckµ. - Je tiens à constater, messieurs, que si la responsabilité du manque d'une école industrielle doit incomber à quelqu'un, ce n'est pas, à coup sûr, à la ville de Bruxelles.

Lorsque la convention a été faite pour la création de l'école industrielle, la ville de Bruxelles prit toutes les mesures nécessaires pour l'organisation de cette institution ; seulement il manquait un local. Il y avait cependant à Bruxelles un local désigné d'avance pour une institution de ce genre, c'est le musée de l'industrie.

Je ne sais pas pour quelle cause le musée de l'industrie n'a pu être mis à notre disposition et je crois que M. le ministre de l'intérieur seul pourrait nous dire comment il se fait qu'un local qui était désigné par l'opinion publique n'a pas pu être approprié au but auquel il était destiné.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, l’honorable M. Jamar vient de parler de faits qui concernent le musée de l'industrie et l'organisation de l'école industrielle à Bruxelles.

La commission qui a été chargée d'élaborer le projet de loi a fait preuve de l'activité la plus louable. La Chambre de son côté s'est empressée de voter le crédit ; mais, lorsqu'il a fallu mettre à exécution le projet tel qu'il avait été conçu par la commission et approuvé par le gouvernement, on a adressé au ministère de l'intérieur un grand nombre de réclamations.

La commission de la bibliothèque a constaté que ses locaux étaient insuffisants et qu'ils devaient être agrandis, qu'une partie du musée de l'industrie actuel servirait admirablement à cet agrandissement.

D'un autre côté, la commission du musée a fait la même observation. L'Académie elle même a chargé une députation de venir faire aussi des observations dans le même sens.

Après avoir bien examiné la question, le gouvernement a pensé que ces réclamations ne manquaient pas de fondement et espérant trouver un autre local pour établir le musée de l'industrie et au besoin l'école industrielle, bien que les bâtiments de cette école dussent, en règle générale, être fournis par la ville, le gouvernement a ajourné la question.

Comme l'utilité de l'école industrielle ne faisait pas le moindre doute le gouvernement s'est adressé à la ville de Bruxelles pour demander si elle ne pourrait fournir un local au moins provisoire.

La ville n'avait pas pu jusqu'ici fournir le local.

On avait cherché vainement des locaux convenables et l'on comptait, quand les ministères, par suite de l'achèvement des constructions de la rue Ducale, seraient déplacés, pouvoir réunir le musée de l'industrie, l'Académie des beaux-arts et l'école industrielle dans un des bâtiments qui deviendraient disponibles.

Les négociations entre le gouvernement et la ville de Bruxelles n'ont pas cessé, et l'honorable M. Funck sait probablement aussi bien que moi qu'elles sont plus près d'aboutir qu'elles ne l'ont été jusqu'ici.

Je crois que si le projet qui a été conçu par l'administration communale se réalise, on n'aura rien perdu pour attendre.

Quant aux écoles de Saint-Josse-ten-Noode et de Schaerbeek dont parlait l'honorable M. Jamar, le gouvernement est tout disposé à leur accorder des subsides.

L'année dernière on a demandé une augmentation de crédit de 25,000 francs pour les académies et les écoles de dessin.

Cette année on maintient ce crédit.

Il n'a pas été réparti jusqu'ici parce que je désirais que la répartition fût faite d'après certaines règles fixes et en raison même des sacrifices que font les communes.

Lorsque des bases générales seront admises, Schaerbeek, Ixelles, St-Josse-ten-Noode auront leur part du subside.

M. Bara. - Et les autres communes aussi.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). Evidemment.

(page 255) M. Hymans. - Messieurs, je considère les faits qui ressortent de ce débat, comme fort regrettables.

Il y a trois ans, on a décrété la création à Bruxelles d'un enseignement industriel complet.

A cette époque, M. le ministre reconnaissait avec nous qu'un enseignement de ce genre était indispensable dans la capitale.

L'honorable M. Jamar vient de rappeler que cette nécessité avait été constatée une fois de plus dans le rapport précédant l'arrêté royal qui institua une commission chargée d'élaborer un projet d’organisation de l'école industrielle.

Vous n'avez pas oublié que l'institution de cette commission et le travail qu'on lui demanda furent cause de l'ajournement d'un projet dû à l'initiative privée.

En effet, des particuliers notables de Bruxelles s'étaient associés en vue d'organiser un enseignement industriel dans la capitale, et ils ne renoncèrent à leur projet que parce que le gouvernement manifesta l’intention de créer cet enseignement lui-même.

Aujourd'hui, après trois ans, nous nous trouvons exactement dans la situation où nous étions alors, avec cette différence que nous continuons à voter des crédits au budget pour le Musée de l'industrie qui, d'après l'exposé des motifs du budget d'il y a trois ans, ne servait à rien. On demandait à cette époque de maintenir le crédit pour le Musée de l'industrie, à titre provisoire, parce qu'on allait le réorganiser.

Le Musée de l'industrie reste dans la situation d'inutilité où il était et nous n'avons pas l'école industrielle.

M. le ministre nous dit que les réclamations ont surgi de la part de la commision de la bibliothèque, de la part de la commission du Musée, de la part de plusieurs autres commissions. Mais je me demande si le gouvernement est absolument tenu de s'arrêter devant ces réclamations. Il me semble que lorsqu'on est venu nous proposer d'établir l'école industrielle dans les locaux du Musée, ce devait être après mûr examen.

Aujourd'hui trois commissions différentes protestent à l'unisson.

Je considère ces oppositions comme fort regrettables, et il me semble qu'il et du devoir du gouvernement de résister quelquefois avec énergie à des prétentions de ce genre.

Nous avons voté autrefois un crédit pour le palais Ducal afin de donner des locaux à l’Académie royale. L'Académie n'a pas voulu y aller. Elle affirme son droit, mais le gouvernement n'a-t-il pas aussi le droit de l'inviter à céder aux décisions des Chambres ?

Je ne comprends pas une pareille façon d'administrer. C'est à cause des réclamations de la commission de la bibliothèque, de la commission du Musée et de l'Académie que nous n'avons pas d'école industrielle à Bruxelles. Au point de vue administratif, je ne comprends pas un tel état de choses.

En définitive, je ne suppose pas qu'un local nous tombera du ciel. L'honorable M. Funck a dit tout à l'heure que la ville de Bruxelles n'a pas de local à donner au gouvernement. Le gouvernement ne peut pas en donner à la ville. Voilà donc un provisoire qui menace de se prolonger indéfiniment.

Je suppose qu'on se décide à construire un local, il faudra du temps pour l'approprier et nous n'aurons pas l'école industrielle de longtemps, à moins qu'on ne nous donne le local du haras qu'on vient de supprimer à Gembloux. (Interruption.)

M. Wasseige. - Nous acceptons tout.

M. Bouvierµ. - Vous n'êtes pas difficiles.

M. Hymans. - Le tout c'est de trouver des élèves de Bruxelles qui consentent à se rendre à Gembloux.

Du reste, ce n'est pas sur ce point seul que je regrette l'espèce d'inaction du gouvernement. Je dirai deux mois de l'enseignement des arts industriels. Si l'on veut travailler à leur développement, ce que je considère comme indispensable, il faut étudier des méthodes, créer des professeurs. Or, il y a trois ans, nous avons été saisis d'une pétition, émanée d'un artiste fort distingué, M. Hendrickx, qui s'engageait à ouvrir des cours normaux, afin de permettre aux ouvriers, aux instituteurs, aux enfants de se former à l'art du dessin.

Je ne sais pas ce que le gouvernement a fait de cette méthode ; toujours est-il que d'autres autorités constituées ont accordé à M. Hendrickx un patronage efficace ; le conseil provincial de Liège a décidé l'adoption de sa méthode dans plusieurs établissements de la province. Un cours normal a été ouvert à Liège aux frais de la province ; le conseil provincial du Brabant a pris une décision à peu près dans le même sens ; la ville de Bruxelles a pris, de son côté, des mesures efficaces, en sorte que tout le monde a agi, excepté le gouvernement.

Je sais bien que l'honorable ministre de l'intérieur est entravé dans ses bonnes dispositions par des observations comme celles présentées par la bibliothèque et l'Académie, mais je voudrais que lorsqu'il s'agit d'un objet si utile, aussi urgent, le gouvernement mît un peu plus d'énergie dans ses résistances.

Nous nous trouvons aujourd'hui dans une position où il faut faire preuve de courage et d'énergie si nous voulons continuer à lutter sur les marchés étrangers contre la concurrence de nos rivaux. Avec la liberté commerciale qui tous les jours fait des progrès, avec la suppression de toute protection, il n'y a plus que le mérite, que les bons produits qui puissent se créer une place sur les marchés du dehors, et il est indispensable que le gouvernement avise à créer un enseignement comme celui qui a été créé en Angleterre, comme celui qu'on a créé en France, s'il veut, pour les industries de luxe, rendre à la Belgique la position brillante qu'elle occupait il y a plusieurs siècles.

J'insiste donc ; d'abord, pour que M. le ministre de l'intérieur chercha (page 256) à mener à bonne fin la question d'une école industrielle, non par des négociations vagues comme celles dont il a été question et qui, j'en suis sûr, ne reposent sur rien de bien positif, mais en maintenant son droit vis-à-vis des diverses administrations qui le contestent.

La section centrale a demandé au gouvernement quelle était la grande objection produite contre l'établissement de l'école industrielle au Musée ; cette objection était non que la bibliothèque était logée dans un local trop étroit, mais qu'il devait y avoir un laboratoire au Musée de l'industrie. Or, il y en a un actuellement, et si vous voulez ouvrir le budget, vous verrez que nous votons annuellement un crédit pour le laboratoire. Or, ou bien ce laboratoire ne fonctionne pas, et alors il faut supprimer le crédit, ou il fonctionne, et alors il est aussi dangereux que celui qu'il s'agit de créer aujourd'hui.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Il y a laboratoire et laboratoire.

M. Hymans. - C'est possible, mais n'y a pas de laboratoire sans feu et le danger existe aujourd'hui. En ce qui concerne les subsides à donner aux écoles de dessin industriel, je crois que le gouvernement se trouve lié sous ce rapport par des promesses qu'il tiendra, j'en suis convaincu, dans la mesure du possible.

M. Bara. - Et vis-à-vis des autres communes du pays ?

M. Hymans. -Dans les communes qui organiseront des écoles industrielles et qui leur donneront une dotation sur leur budget comme celle de St-Josse-ten-Noode, je crois qu'il est juste et légitime que le gouvernement intervienne ; mais il le serait moins que le gouvernement prît sur un crédit global de l'argent pour l'offrir à des communes qui ne font pas au préalable elles-mêmes quelque effort en vue de créer de ces utiles institutions. (Interruption.)

Ce n'est pas d'ailleurs avec 25,000 francs que l'on créera l'enseignement des arts industriels en Belgique.

Je crois que l'honorable ministre de l'intérieur verse dans une erreur lorsqu'il attribue les 25,000 francs dont il a parlé, aux Académies. Il s'agit de tout autre chose. Nous avons un grand nombre d'Académies en Belgique destinées à produire des artistes ; il s'agit ici de donner aux ouvriers le moyen d'acquérir les connaissances techniques et spéciales et si le gouvernement nous propose un crédit, je demanderai qu'il soit réparti entre les écoles de dessin industriel et ne soit pas ajouté à la dotation des Académies de peinture.

M. Kervyn de Lettenhove. - L'heure avancée de la séance m'engagera à résumer en peu de mots les observations que je comptais présenter au sujet des démarches faites par l'Académie, démarches auxquelles je n'ai pas été étranger.

Je ne pense pas devoir expliquer pourquoi l'Académie n'a pas été disposée à se réléguer dans une salle basse du rez-de-chaussée du palais Ducal, et pourquoi elle a préféré le local qu'elle occupe depuis longtemps. Je ne m'appesantirai pas sur une autre considération qui présente toutefois quelque intérêt : c'est que l'Académie est depuis plusieurs années en possession d'un legs important, de la bibliothèque réunie par M. le baron de Stassart avec tant d'érudition et de soin et qui est entassée dans un grenier faute d'un local convenable pour la placer.

Il y a une autre raison bien plus impérieuse qui a déterminé la démarche faite par l'Académie, c'est celle que l'honorable M. Hymans indiquait tout à l'heure, sans en apprécier la valeur ; je veux parler du danger qu'il y aurait pour des collections très considérables, très précieuses, dans l'existence d'un laboratoire qui jusqu'ici a peu servi et auquel on voudrait inévitablement donner une plus grande extension. Cette considération est assez importante pour que l'Académie ait cru remplir un devoir en s'interposant auprès du gouvernement dans l'intérêt de la science, des lettres et des collections qui en renferment les trésors.

(page 252) M. Dumortier. - J'avais demandé la parole pour dire en partie ce que vient de dire mon honorable ami.

Je crois qu'il y aurait de grands dangers à placer l'école industrielle auprès des collections scientifiques. L'école industrielle doit tenir ses séances la nuit ; il faudra qu'elle soit éclairée par le gaz.

M. Hymans. - Il y a des bibliothèques qui sont éclairées au gaz.

M. Dumortier. - Pas en Belgique, et ce serait s'exposer gravement que de créer des établissements qui peuvent occasionner des incendies près de nos collections. Je ne voudrais pas pour mon compte qu'on sacrifiât les hautes sciences aux petites et je crois que c'est ce que fait M. Hymans dans ses prétentions.

Les hautes sciences, c'est-à-dire la littérature représentée par les bibliothèques, les arts représentés par les musées de tableaux, d'histoire naturelle, les corps d'académie, ne doivent pas être sacrifiées aux petites sciences que je respecte, mais qui ne jettent pas sur le pays le lustre que lui donnent les hautes sciences. Il faut faire la part de l'un et de l'autre. Je ne demande pas mieux que de voir ouvrir des écoles industrielles, mais il faut le faire sans s'exposer à occasionner un préjudice aux établissements qui font l'honneur du pays.

L'honorable membre va plus loin encore ; il ne voudrait pas que le crédit que nous allons voter puisse être affecté aux académies.

Je ferai remarquer à l'honorable membre que c'est cependant le moyen le plus efficace pour les petites villes de donner un enseignement industriel artistique aux jeunes gens. Ainsi à Tournai à l'académie de dessin, il y a un cours de dessin appliqué aux arts qui produit un grand bien. Supprimez le crédit pour ces institutions, comme le demande M. Hymans, serait occasionner un préjudice réel à l'industrie locale, et en résumé je ne sais pas où vous arriveriez. Si je ne me trompe il y a aussi à Gand un cours de dessin appliqué à l'industrie.

Il y a des industries qui ne peuvent prospérer qu'autant qu'elles peuvent disposer d'artistes exercés ; nos magnifiques fabriques de porcelaine ne produisent plus aujourd'hui ce qu'elfes produisaient jadis, parce que les artistes leur manquent ; vous comprenez combien elles doivent tenir à ce qu'on leur en fournisse.

Je crois que l'honorable membre se trompe lorsqu'il critique la conduite de M. le ministre de l'intérieur en pareil cas. Laissons l'honorable ministre disposer au mieux du crédit selon les besoins des localités.

(page 256) M. Hymans. - Messieurs, l'honorable M. Dumortier me fait dire toute autre chose que ce que j'ai dit :

Il m'accuse d'abord de vouloir sacrifier la grande science à la petite. Je ne sais trop ce que cela signifie.

Je ne crois pas que ce soit un local plus ou moins beau qui fasse la supériorité de la science. Je n'ai rien dit de blessant pour l'Académie, que je respecte beaucoup ; ni pour la bibliothèque qui, si elle est un être moral, ne doit pas sa renommée aux bâtiments qu'elle occupe.

Je me suis plaint de ce qu'on soit venu nous proposer d'établir « hic et nunc » une école industrielle à Bruxelles, dans un local dont on ne pouvait pas disposer.

Je demande que M. le ministre de l'intérieur veuille bien en chercher un, et je serais heureux qu'il nous proposât d'en fournir un plus convenable aux collections scientifiques qui redoutent le voisinage d'une école industrielle. Et à ce propos je proteste encore contre le dédain manifesté par l'honorable M. Dumortier.

Je proteste au nom de l'industrie qui a dans tous les temps valu à la Belgique plus de gloire que les travaux de ses Académies. Ceci soit dit en passant, et sans faire injure à personne.

L'honorable M. Dumortier s'est encore complètement trompé en répondant à ce que j'ai dit au sujet de la répartition d'un crédit qui ne nous est pas soumis en ce moment. L'honorable M. Jamar avait demandé que le gouvernement voulût bien encourager les écoles de dessin créées aux portes de la capitale. M. le ministre de l'intérieur a répondu qu'il avait l'intention de répartir le crédit entre les diverses académies de dessin, après qu'un projet définitif aurait été formulé.

J'ai dit à ce propos qu'il y avait une distinction à faire entre les académies et les écoles de dessin industriel ; que ces dernières étaient des écoles cliniques destinées à la classe ouvrière. Je ne veux rien enlever aux académies, quoi qu'en dise l'honorable M. Dumortier.

Je me borne à demander que le crédit nouveau, s'il est proposé, soit destiné aux écoles de dessin industriel, sans que je veuille par là diminuer la part des Académies, et en émettant un pareil avis, je crois faire une chose éminemment utile au travail national, dont l'honorable M. Dumortier a été pendant si longtemps l'énergique défenseur.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, ce qui se passe en ce moment prouve une fois de plus que le gouvernement a tort de se mêler de choses qui ne le regardent pas.

Les locaux affectés au service des écoles industrielles doivent être fournis par les communes, c'est la règle générale. Il en est ainsi dans toutes les localités qui possèdent une école industrielle.

Mais le gouvernement croyant pouvoir disposer d'un local dans le Musée de l'industrie avait proposé à la ville de Bruxelles d'annexer à ce Musée une école industrielle.

On a été plus loin. La capitale mérite des égards particuliers ; le gouvernement avait consenti à payer une partie des frais d'établissement.

Nous avions donc été au-delà de ce que nous devions faire. Malheureusement au moment de mettre à exécution le projet que je croyais pratique, les difficultés dont j'ai parlé ont surgi. Après un nouvel examen, j'ai acquis la conviction que l'école industrielle ne pouvait pas être établie convenablement dans ce local ; que si on voulait que la bibliothèque royale se développât, on devait tenir à sa disposition les salles attenantes que nous pourrions approprier sans grands frais. D'un autre côté, une partie de la bibliothèque de l'Académie ne peut pas rester enfouie dans le grenier où elle est déposée maintenant. Il faut donc lui réserver d'autres salles.

Il a fallu, à mon grand regret, renoncer à ce projet primitif. Le gouvernement a demandé alors à la ville de Bruxelles si elle ne pouvait pas disposer d'un bâtiment.

Des négociations ont eu lieu, et je crois que nous sommes à la veille d'avoir des locaux où l'on pourra très convenablement réunir le Musée de l'industrie, l'académie de dessin de Bruxelles et l'école industrielle. Mais le gouvernement ayant fait une première offre d'intervention pécuniaire, quand il s'agissait de placer l'école industrielle au Musée de (page 253) il faudra que la Chambre mette le gouvernement à même d'accorder un subside pour réaliser la seconde combinaison qui, j'en ai l'espoir, pourra aboutir.

Quant aux écoles de dessin et de dessin industriel, je désire, comme j'ai dit, adopter certaines règles pour la répartition du crédit de 25,000 fr.

Les communes suburbaines de la capitale ont droit à obtenir d'aussi forts subsides que les autres localités ; mais je n'admets pas qu'elles aient le droit d'avoir plus. Si je m'étais laissé aller aux conseils qu'on m'a donnés, j'aurais dépensé les 25,000 fr. pour trois ou quatre communes ; il ne serait rien resté pour les autres et alors j'aurais dû peut-être demander à la Chambre des crédits s'élevant à 80,000 ou 100,000 fr.

Il est donc entendu que tout le monde sera traité sur le même pied. On a demandé si le gouvernement prescrirait d'adopter dans ses établissements la méthode de M. Hendrickx. Le gouvernement croit ne rien devoir prescrire à cet égard. Les professeurs ont le droit de suivre la méthode qui leur semble la meilleure, sous leur responsabilité.

Messieurs, vous me demandez enfin pourquoi le gouvernement maintient au budget le crédit destiné au Musée de l'industrie. Il est constaté, dit-on que ce musée a peu de valeur. On maintient le crédit provisoirement.

Il y a là des objets de grande valeur. Le crédit demandé est d'ailleurs très peu élevé. Je bornerai là mes observations.

M. Funckµ. - Messieurs, il est une affirmation de M. le ministre de l'intérieur que je ne puis pas accepter : je ne connais aucun texte de loi qui mette à la charge des communes les locaux destinés au service des écoles industrielles.

Lorsque des négociations ont été ouvertes avec le gouvernement, il était bien convenu que l'école industrielle serait établie dans les locaux du Musée. Cela n'a jamais été contesté en principe.

Des objections se sont ensuite élevées. L'administration de la bibliothèque a trouvé que l'exécution de ce projet pouvait avoir certains dangers. L'Académie des sciences a trouvé aussi que l'établissement de l'école industrielle au musée pouvait produire des causes d'incendie. Mais, je le répète, il avait été formellement convenu que le gouvernement mettrait à la disposition de l'école industrielle les locaux disponibles au Musée de l'industrie.

Quant aux projets dont a parlé M. le ministre de l'intérieur, je pourrais certifier à mon honorable collègue M. Hymans, si la chose était nécessaire, qu'ils sont excessivement sérieux, qu'ils sont très positifs et qu'ils sont sur le point de se réaliser. Mais je crois que la réalisation de ces projets ne nous fournirait peut-être pas immédiatement les locaux nécessaires à l'école industrielle, et je me joindrai à l'honorable M. Hymans pour engager M. le ministre de l'intérieur à mettre provisoirement à la disposition de cette école une partie des locaux du musée.

On a, il est vrai, fait une objection ; on a dit que l'école industrielle ne pouvait être établie au musée parce que les locaux de cette école devaient être éclairés au gaz. Cette objection n'est pas sérieuse. Il y a des établissements publics qui offrent plus de danger d'incendie qu'une école industrielle, et notamment les théâtres, qui sont éclairés au gaz, et généralement ce n'est pas le gaz qui produit les incendies.

M. Tack. - J'avais demandé la parole avant d'entendre les explications que vient de donner M. le ministre de l'intérieur ; après les avoir entendues, je pourrais renoncer à la parole ; je tenais à stipuler pour la ville de Courtrai. M. le ministre m'a prévenu en disant que toutes les communes qui créeraient des écoles industrielles seraient traitées sur le pied d'égalité.

J'ai cependant à faire une réserve ; j'espère que le travail de répartition, dont M. le ministre s'occupe, ne retardera pas l'instruction des demandes des communes qui sont disposées à voter des fonds à leurs budgets et à fournir les locaux et auxquelles déjà les conseils provinciaux ont accordé leur intervention.

La ville de Courtrai, si essentiellement industrielle, est dans ce cas, et j'ose compter qu'elle obtiendra le concours pécuniaire du gouvernement dès qu'elle se sera mise en règle.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - L'honorable M. Tack se trompe ou plutôt il confond deux choses, les écoles industrielles et les écoles de dessin. Des règles fixes ont été tracées par le département de l'intérieur pour l'encouragement des écoles industrielles proprement dite, et celle dont parle l'honorable M. Tack est dans cette catégorie, je pense.

M. Tack. - Il s'agit réellement d'une école industrielle.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Il est donc évident qu'elle pourra participer aux subsides en se soumettant aux règles générales qui ont été tracées à cet effet.

Mais pour les écoles de dessin, il s'agit d'une innovation, et avant d'accorder des subsides, il faut arrêter des bases fixes. C'est ce dont je m'occupe.

- L'article 68 est adopté.

Article 69 à 73

« Art. 69. Achat de modèles et de métiers perfectionnés ; voyages et missions ; publications utiles et souscriptions ; prix ou récompenses pour des ouvrages, mémoires, etc., traitant de questions de technologie, de droit ou d'économie industrielle ; subsides en faveur d'industries nouvelles ; frais relatifs aux caisses de prévoyance et aux sociétés de secours mutuels, et dépenses de la commission permanente instituée pour faciliter l'examen des affaires qui se rattachent à ces associations ; encouragement à la société de pisciculture de Belgique ; frais résultant de la collation des décorations industrielles ; indemnité du secrétaire de la commission permanente pour les sociétés de secours mutuels.

« Charge ordinaire : fr. 17,450.

« Charge extraordinaire ; fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 70. Indemnités des greffiers des conseils de prud'hommes : fr. 15,040. »

- Adopté.


« Art. 71. Frais de publication du Recueil officiel des brevets d'invention ; traitement du rédacteur du recueil : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 72. Musée de l'industrie. Traitement du personnel : fr. 21,650. »

- Adopté.


« Art. 73. Musée de l'industrie. Matériel et frais divers : fr. 17,450. »

- Adopté.

Chapitre XIV. Poids et mesures

Articles 74 à 76

« Art. 74. Traitement des vérificateurs : fr. 59,450. »

- Adopté.


« Art. 75. Frais de bureau et de tournées : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Art. 76. Matériel : fr. 2,000. »

- Adopté.

La séance est levée à 4 heures trois quarts.