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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 25 novembre 1864

(Annales parlementaires de Belgique, Chambre des représentants, session 1864-1865)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 67) M. de Moor, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Florisone donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. de Moorµ présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Laurent Lembinon et Koppman, président et secrétaire de la chambre des notaires de l'arrondissement judiciaire de Liège, demandent l'abrogation des articles 41 et 42 de la loi de frimaire an VII, qui défendent aux notaires de recevoir des actes en conséquence d'actes authentiques non enregistrés. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Wuyts demande que les officiers du premier ban de la garde civique de 1830 soient compris dans la décoration que le gouvernement est dans l'habitude de donner aux officiers de la garde civique à chaque anniversaire de la naissance ou de l'avènement au trône de S. M. le Roi. »

- Même renvoi.


« Le collège des bourgmestre et échevins de Nieuport prie la Chambre d'accorder aux sieurs Popp et François, la concession d'un chemin de fer direct de Bruges à Furnes, sous la condition que la station soit établie sur le terrain concédé à cet effet par le gouvernement. »

- Même renvoi.


« Les membres de l'administration communale et des habitants de Meir prient la Chambre d'accorder aux sieurs Panaux et Lambert la concession du chemin de fer d'Anvers à Turnhout avec embranchement vers Breda et Herenthals. »

- Même renvoi.


« Les membres de l'administration communale et des habitants de St-Joris prient la Chambre d'accorder aux sieurs Popp et François la concession du chemin de fer de Bruges à Furnes par Nieuport. »

- Même renvoi.


« Les membres de l'administration communale de Belœil réclament l'intervention de la Chambre pour que la société concessionnaire du chemin de fer entre St-Ghislain et Ath soit mise en demeure de remplir ses engagements à bref délai, sinon qu'elle soit dépossédée au profit de toute autre société qui s'engagerait à exécuter cette voie ferrée en respectant le tracé adopté. »

« Les membres des administrations communales de Huissignies et de Ladeuze appuient cette demande. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Wybo, cafetier à Courtrai, demande des modifications au tarif des douanes en ce qui concerne le vermout, qui est assimilé aux boissons distillées. »

- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.


« Des habitants de Neuve-Cour demandent la réduction des droits d'accise sur la bière indigène. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent que la Chambre fasse de la réforme des articles 414, 415 et 416 du code pénal, l'objet d'une loi spéciale qui serait mise immédiatement en vigueur, abrogerait toute répression de la coalition comme telle, et qui punirait simplement la menace et la violence, lorsqu'elles viennent des ouvriers comme lorsqu'elles viennent d'autres citoyens. »

- Renvoi à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.


« Des habitants de La Panne adressent des observations sur la décroissance de la pêche maritime et demandent une réglementation sage de cette pêche et un tarif modéré pour le transport par chemin de fer. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des affaires étrangères.

Projet de loi portant le budget des voies et moyens pour l’exercice 1865

Discussion du tableau des crédits

Contributions directes, douanes et accises

Douanes

MpVµ. - La Chambre en était restée à l'article douanes ; il a été entendu que la discussion ne serait close que sur l'article poisson ; d'après l'ajournement adopté, tous les amendements relatifs à cet objet se trouvent écartés.

M. Coomans. - Je demande la parole.

Il est une observation qui a été faite plusieurs fois dans cette Chambre, ce qui prouve qu'elle est fondée, et que je maintiens en ce qui me concerne.

On se plaint des obstacles presque insurmontables qu'on apporte au mariage des employés des accises et des employés des douanes en les soumettant à des conditions exceptionnelles qu'il leur est difficile de remplir. On me dit : Et les soldats ? Si vous voulez élargir la discussion, je le veux bien. Je ne veux pas qu'on prive un citoyen quelconque du droit naturel et civil, celui du mariage.

Les employés des accises et des douanes ne sont pas des employés forcés ; j'admets que le gouvernement puisse apporter des conditions aux emplois qu'il concède, cependant ces conditions doivent être raisonnables quand elles sont difficiles à remplir, elles doivent être nécessaires. On ne m'a jamais prouvé qu'il fût nécessaire que les employés dont je parle vécussent dans un célibat officiel fictif, pas réel.

Je ne vois pas quel intérêt peut avoir le gouvernement à empêcher ces citoyens de se marier, quand il ne défend pas le mariage à une foule d'autres employés de même ordre, entre autres aux gendarmes. Je demande de deux choses l'une, des raisons acceptables à cette interdiction ou qu'on la lève.

M. le ministre me fera plaisir en me donnant une fois pour toutes cette satisfaction ; il faut que la question soit tranchée, d'abord parce qu'elle est importante en elle-même et en second lieu qu'elle préoccupe des centaines de citoyens belges qui nous adressent une foule de pétitions.

Une déclaration du gouvernement apprendra à ces fonctionnaires ce qu'ils doivent faire.

MfFOµ. - Déjà plusieurs fois la question dont il s'agit a été soulevée par l'honorable membre. Je ne puis que me référer à cet égard aux réponses qui ont été faites. Les employés des douanes sont dans une position qui se rapproche, sous plusieurs rapports, de l'état militaire ; ils sont placés pour la plupart à la frontière, et l'on doit avoir la possibilité de les déplacer facilement, de les faire passer d'un point un autre sans leur causer un grand préjudice.

Si les douaniers étaient mariés sans avoir les ressources nécessaires pour entretenir convenablement leurs familles, on serait souvent dans l'impossibilité de satisfaire aux nécessités du service. D'un autre côté le traitement qui leur est alloué peut suffire et suffit en effet à un célibataire, mais il ne serait pas suffisant pour un chef de famille.

Au surplus, on n'interdit pas le mariage d'une manière absolue, on exige seulement que la personne qu'épouse le douanier ait un certain revenu, un revenu minime de 200 fr., si je ne me trompe, et ainsi l'on cherche à concilier les exigences du service avec les intérêts des agents dont il s'agit.

Cette mesure, toute de prévoyance, ne présente pas tous les inconvénients dont parle l'honorable membre, Si l’on était en pénurie de douaniers, on concevrait encore l'objection ; mais nous n'en sommes certainement pas là. Il y a un très grand nombre de demandes d'emploi auxquelles on est dans l'impossibilité de satisfaire, et l'on ne manque pas de célibataires pour remplir les cadres aux conditions déterminées par les règlements. Ces conditions sont d'ailleurs communiquées aux employés avant leur entrée en fonctions, et c'est de leur plein gré qu'ils acceptent les avantages et les inconvénients de leur position.

M. Coomans. - Messieurs, je tiens à constater que les explications de l'honorable ministre des finances ne m'étaient pas inconnues, mais qu'elles ne peuvent pas me satisfaire ; en un point, elles ne sont même pas pertinentes.

M. le ministre fait observer que les douaniers remplissent des fonctions quasi militaires, qu'ils sont distribués sur les frontières, qu'il importe de pouvoir les déplacer souvent sans qu'ils soient embarrassés de charge de famille, etc.

Ces raisons existent pour les douaniers, je le reconnais, quoique je ne les trouve pas satisfaisantes ; mais elles n'existent pas pour les employés des accises. Les employés des accises sont disséminés sur tout le territoire belge ; ils ne sont pas à la frontière seulement.

Maintenant, s'il convient au gouvernement de déplacer souvent les employés des accises et les préposés des douanes, je n'y trouve rien à (page 68) à redire. Je veux bien admettre qu’il ne fait cela qu’en cas de nécessité absolue. Mais il y a une foule d’autres fonctionnaires qui doivent être déplacés aussi et qui ne jouissent pas d’un traitement plus élevé que les employés des accises ou les préposés des douanes. Ces autres fonctionnaires ne sont pas soumis à l’interdiction du mariage.

M. le ministre rappelle que l’interdiction n’est pas absolue, qu'il suffît que la fiancée possède un revenu de 200 fr. pour que l’interdiction soit levée. Ce revenu, messieurs, est assez important, il suppose un capital de 5,000 fr., et il y a peu de jeunes personnes qui puissent justifier d'un revenu de 200 fr. (Interruption.) Elles le peuvent au bout d'un certain nombre d'années, après avoir recueilli leur héritage, mais beaucoup à 20 ou 25 ans ne jouissent pas de ce revenu.

Je connais des demoiselles d’excellentes familles qui n’ont pas 200 fr. de rente. Je connais des fils de famille qui n’ont pas 200 fr. de rente et dont les parents ont des milliers de francs de revenus. Ces conditions sont donc très difficiles à remplir, et encore une fois je ne conçois pas quelles graves raisons il peut y avoir à empêcher aussi rigoureusement le mariale des employés des accises et des préposés des douanes. Qu’on l’impose dans certains cas, je le veux bien, pourvu que cet empêchement soit dicté par une appréciation paternelle des besoins du service et la situation des intéressés.

Mais empêcher le mariage dans tous les cas où les femmes ne peuvent pas justifier d’un revenu de 200 fr. de rente, c’est une prétention exorbitante, et, je regrette de devoir le dire, immorale. Car en définitive, il en coûte souvent moins à un homme de vivre avec une femme légitime qu’avec une autre (interruption). Ce ne sont pas les femmes légitimes qui coûtent le plus ; les plus chères souvent sont les femmes illégales. Si. M. le ministre des finances faisait une enquête sur la situation des ménages des 17 ou 18 mille fonctionnaires civils de Belgique, il trouverait des résultats très conformes à la thèse que je défends ici, c'est à-dire que, dans lintérêt même des fonctionnaires, dans l'intérêt du service, dans l'intérêt des affaires, il conviendrait de laisser la liberté du mariage aux fonctionnaires.

J'aurais mille autres considérations à vous soumettre, mais je n'ajouterai que celle-ci : c'est que le sentiment qui porte un citoyen à se marier est un sentiment louable et qui certainement diminue beaucoup le nombre des bons employés. En n'acceptant que des célibataires, on force des employés très honnêtes, très capables, à quitter le service, parce qu'ils ont à choisir entre leur place et le mariage, et qu'ils préfèrent le mariage.

Messieurs, cette rigueur n'est pas nécessaire. (Interruption.)

Encore une fois, quand ou use de rigueur, il faut que cette rigueur soit parfaitement justifiée, surtout dans un pays libre. Nous réclamons une foule de libertés qui sont moins intéressantes, moins naturelles que la liberté du mariage. Nous nous opposons à tous les obstacles que l'on veut mettre à la liberté, alors que ces obstacles ne sont pas exigés par la nature des choses, par l'ordre public. Encore une fois, je ne conçois pas qu'on défende à ces fonctionnaires inférieurs de se marier alors qu'on laisse se marier une foule d'autres fonctionnaires inférieurs.

En remerciant l'honorable ministre d'avoir reproduit les explications que nous venons d entendre, je maintiens mes observations et je me réserve de les présenter ici jusqu'à ce que justice s'ensuive.

- La discussion est close.


« Droits d'entrée : fr. 13,000,000. »

- Adopté.


« Droits de sortie : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Droit de tonnage : fr. 15,000. »

- Adopté.

Accises

« Sel : fr. 5,400,000. »

- Adopté.


« Vins étrangers : fr. 2,080,000. »

- Adopté.


« Eaux-de-vie indigènes : fr. 6,500,000. »

- Adopté.


« Eaux-de-vie étrangères : fr. 26,000. »

- Adopté.


« Bières et vinaigres : fr. 8 ;580,000. »

- Adopté.


« Sucre de canne et de betterave : fr. 3,900,000. »

- Adopté,


« Glucoses et autres sucres non cristallisables : fr. 20,000. »

- Adopté.

Garantie

« Droits de marque des matières d'or et d'argent : fr. 250,000. »

- Adopté.

Recettes diverses

« Droits de magasin des entrepôts, perçus au profit de l'Etat : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Recettes extraordinaires et accidentelles, recouvrement de frais de vérification de marchandises, etc. : fr. 25,000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

Droits additionnels et amendes

« Enregistrement (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 14,000,000. »

M. Pirmez. - Messieurs, je désire soumettre à M. le ministre des finances une observation sur l'application des droits de timbre et d'enregistrement. Cette observation est d’une très faible importance au point de vue des recettes de l'Etat, mais elle est sérieuse au point de vue des principes essentiellement respectables.

Tous les actes de procédure sont soumis à l'impôt du timbre et de l'enregistrement ; cette règle s'applique même à la juridiction répressive. Il en résulte que tous les actes faits à la requête des prévenus doivent être timbrés et enregistrés.

Lorsque le prévenu est condamné, il n'y a pas grand inconvénient, car ces droits perçus sur lui peuvent être considérés comme un complément de peine, ou comme une juste indemnité envers l'Etat, pour les frais de la juridiction criminelle ; mais il en est malheureusement de même lorsque le prévenu est acquitté, de sorte qu'un innocent traduit devant une juridiction répressive et qui doit faire assigner des témoins n'en aura pas moins, malgré son acquittement, dû payer à l'Etat un impôt. Or, cet impôt n'est fondé sur autre chose que sur les nécessités de sa défense.

Il me paraît que c'est là un abus révoltant. Il est impossible d'admettre qu'un innocent doive payer des impôts, parce qu'il a été poursuivi à tort.

Lorsqu'un prévenu arrêté obtient sa mise en liberté provisoire moyennant un cautionnement qui se verse d'ordinaire à la caisse des dépôts et consignations, il doit, pour retirer ce dépôt, produire une expédition du jugement qui l'acquitte ; cette expédition se délivre sur timbre, et est enregistrée ; il faut en outre donner une quittance authentique ; enfin, tous les actes dont il a besoin sont soumis aux droits de timbre et d'enregistrement. Ainsi un individu présumé innocent dont l'innocence sera plus tard reconnue, s'il veut jouir de sa liberté provisoire, doit supporter des frais qui ne sont pas autre ehose qu'un impôt sur sa liberté compromise sans aucune espèce de motif.

Je le répète, messieurs, cette observation a une importance extrêmement minime au point de vue de la somme que perçoit le gouvernement. Mais il y a là un principe, et M. le ministre des finances doit faire en sorte de faire disparaître l'abus que je viens de signaler.

Je voudrais, messieurs, que ce fût là le premier pas dans la voie d'une autre réforme beaucoup pins grave, qui sera la solution de cette question : Ne faut-il pas, dans certains cas, rembourser aux prévenus acquittés une partie des frais qu'ils ont dû faire pour leur défense ? Je ne veux pas traiter cette question maintenant, mais il me semble, dans tous les cas, qu'il n'y a pas à hésiter à faire la petite réforme que j'indique, quant aux droits de timbre et d'enregistrement.

MfFOµ. - Messieurs, au point de vue théorique, l'observation que vient de présenter l'honorable M. Pirmez a certainement quelque valeur.

Il est vrai qu'on peut considérer comme assez pénible et même comme assez injuste, d'imposer certains frais de procédure et d'enregistrement à celui qui est traduit en justice et qui doit se défendre. Mais dans la pratique, cet inconvénient est considérablement atténué ; dans bien des cas, cela disparaît même complètement.

D'abord les témoins qu'un prévenu croit devoir assigner peuvent comparaître volontairement, et c'est ce qui arrive fréquemment. En second lieu, en supposant qu'ils ne comparaissent pas volontairement, on demande généralement aux procureurs du roi de vouloir bien les assigner, ce à quoi ils ne se refusent guère, de sorte que, quant aux frais relatifs à l'assignation des témoins, ils n'ont en réalité que très peu d'importance.

Du reste, le principe, comme l’a dit l'honorable préopinant, mérite certainement d'être examiné.

(page 69) L’honorable membre a fait la même observation quant aux actes de cautionnement pour obtenir la mise en liberté provisoire. Pour ce cas spécial, la chose peut avoir plus d'importance.

Quoi qu'il en soit, je ne me refuse pas à examiner jusqu'à quel point il y a lieu de modifier nos lois, pour éviter les inconvénients qui ont été signalés.

- Personne ne demandant plus la parole, le chiffre de 14,000,000 de francs est mis aux voix et adopté.


« Greffe (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 275,000. »

- Adopté.


« Hypothèques (principal et 25 centimes additionnels) : fr. 2,600,000. »

- Adopté.


Successions (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 9,240,000. »

- Adopté.


« Droit de mutation en ligne directe (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 1,600,000. »

- Adopté.


Droit dû par les époux survivants (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 160,000. »

- Adopté.


« Timbre : fr. 3,750,000. »

- Adopté.


« Naturalisations : fr. 5,000. »

- Adopté.


« Amendes en matière d'impôts : fr. 150,000. »

- Adopté.


« Amendes de condamnation en matières diverses : fr. 140,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des recettes (II. Péages)

Domaines

« Rivières et canaux : fr. 2,700,000. »

- Adopté.


« Routes appartenant à l'Etat : fr. 1,550,000. »

- Adopté.

Travaux publics

Postes

« Taxe des correspondances en général : fr. 3,265,000. »

- Adopté.


« Droits sur les articles d'argent : fr. 35,000. »

- Adopté.


« Emoluments perçus en vertu de la loi du 19 juin 1842 : fr. 60,000. »

- Adopté.

Marine

« Produit du service des bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres : fr. 225,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des crédits (III. Capitaux et revenus)

Travaux publics

« Chemins de fer : fr. 32,500,000. »

D'accord avec le gouvernement, la section centrale propose de porter le chiffre à 33,000,000 de francs.

- Le chiffre de 33,000,000 est mis aux voix et adopté.


« Télégraphes électriques : fr. 700,000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

« Domaines (valeurs capitales) : fr. 900,000. »

- Adopté.


« Forêts : fr. 1.050,000. »

M. Vilain XIIII. - Je voudrais demander à M. le ministre des finances un renseignement qui eût peut-être mieux trouvé sa place à l'article Impôt foncier, mais qui cependant se rapporte indirectement à l'article Domaines et Forêt.

L'Etat a vendu naguère pour dix millions de domaines nationaux ; auparavant on en avait encore vendu pour 4 à 5 millions, soit 15 millions depuis 1830.

C'est une excellente opération qu'a faite l'Etat et je voudrais qu'il la continuât, car nous avons encore beaucoup de domaines qui ne nous servent à rien.

Quoi qu'il en soit, voici l'observation que j'ai à faire, L'Etat ne perçoit pas d'impôt foncier sur ses domaines ; mais quand il en vend une partie immédiatement elle est soumise à l’impôt foncier.

Cependant je n'ai pas vu que le chiffre de cet impôt se soit accru en proportion des contributions qui ont dû être imposées aux acquéreurs des domaines nationaux. Que devient l'argent que payent ces propriétaires ?

- Un membre. - Il diminue le chiffre du contingent.

M. Vilain XIIII. - Il diminue le contingent des provinces ? Mais, messieurs, c'est là une suprême injustice. Comment ! les contribuables de la province où sont situés les domaines vendus sont dégrevés de toute la somme nouvellement imposée ?

MfFOµ. - Comment voudriez-vous faire autrement, l'impôt étant de répartition et non de quotité.

M. Vilain XIIII. - Eh bien, je considère cela comme une injustice et j'espère bien qu'elle sera réparée dans la nouvelle loi qui nous a été annoncée ; car, messieurs, veuille-le remarquer, il n'y a pas seulement ici une injustice en moins, il y a aussi une injustice en plus. Je m'explique, et je prends pour exemple le Brabant. L'Etat a acheté à Bruxelles plusieurs hôtels considérables, sur lesquels l'Etat percevait autrefois un impôt considérable ; aujourd'hui cet impôt n'est plus perçu et par conséquent la cote de tous les habitants du Brabant a été augmentée de tout le chiffre de l'impôt qui était autrefois perçu sur ces hôtels. Dans le Limbourg, le département de la guerre a acheté plusieurs centaines d'hectares pour établir une grande place de manœuvres au camp de Beverloo, et bien certainement le département de la guerre ne paye de ce chef aucun impôt foncier à l'Etat. De sorte que ce sont les Limbourgeois qui sont obligés de payer cet impôt, et qui voient leur cote augmentée parce qu'il a plu à M. le ministre de la guerre d'acheter des propriétés dans leur province.

Eh bien, je dis que c'est une suprême injustice des deux parts ; et j'espère bien que M. le ministre des finances aura égard à mon observation quand il rédigera la loi annoncée sur la péréquation cadastrale.

MfFOµ. - Messieurs, tous les domaines productifs sont soumis à l'impôt foncier ; au contraire, les propriétés affectées à des services d'utilité publique ne sont pas soumis à l'impôt. La taxe foncière étant un impôt de répartition et non de quotité, il en résulte, comme l'a dit l'honorable membre, que si, par une cause quelconque, il y a des augmentations de valeur dans le revenu total d'une province, le contingent provincial demeurant invariable, cet accroissement de valeur vient, non pas en accroissement de l'impôt, mais en déduction du marc le franc applicable à chaque propriétaire de la province.

M. Vilain XIIII. - C'est très injuste.

MfFOµ. - Ce fait tient à la nature même de l'impôt de répartition : du moment que vous avez un contingent fixe, il faut bien qu'il en soit ainsi. Ce contingent ne peut pus être élevé en raison de l'accroissement de la valeur imposable.

Pour qu'il en fût autrement, il faudrait que l'impôt eût pour base une quotité déterminée applicable au revenu des propriétés, et je pense qu'il devrait en effet en être ainsi pour la contribution foncière, comme cela existe pour tous les autres impôts.

Mais pourquoi a-t-on jugé préférable de donner à la contribution foncière la forme d'un impôt de répartition, plutôt que celle d'un impôt de quotité ? Parce que, avant le cadastre l'on s'est trouvé eu présence de grandes difficultés pour asseoir équitablement la taxe sur les diverses parcelles. On a donc résolu à l'origine (et c'est pourquoi on a appelé avec raison cet impôt, l'impôt du conquérant) de subdiviser le contingent de l'impôt entre les provinces, proportionnellement au revenu supposé de chacune d'elles, et d'opérer ensuite une sous-répartition entre chaque commune, puis entre chaque parcelle.

L'impôt a été établi sur ce principe, qu'il faut faire contribuer chaque propriétaire en raison de son revenu. Mais une fois la péréquation cadastrale terminée, opération qui a coûté tant de peines, d'argent et de temps, on a maintenu le mode ayant pour base le contingent fixe, bien que le cadastre eût été fait pour arriver à un impôt de quotité.

C'est lorsque se sont produites certaines des anomalies qu'a signalées l'honorable membre. Pour les faire disparaître, il faudrait arriver à faire de l'impôt foncier un impôt de quotité. Si l'on ne veut pas, au lieu d'un impôt absolu, en faire un impôt de quotité, il faut décider au moins que les valeurs nouvelles viendront en accroissement de l'impôt. On ne s'explique pas, par exemple, pourquoi les habitants du Brabant voient réduire successivement leur cote foncière, par suite des constructions nouvelles qui s'élèvent chaque année dans la province.

M. de Mérode. - Ce n'est pas ce qui arrive.

(page 70) MfFOµ. - Pardonnez-moi ; le fait est certain. Sans doute la réduction n'est guère sensible, car cela se réduit à quelques centimes. Mais dans tous les cas, il serait préférable, au point de vue de l'équité, que ces valeurs nouvelles vinssent en accroissement du produit de l'impôt. On devrait donc ajouter au contingent l'impôt résu'tant de ces nouvelles bâtisses.

- Un membre. - On devrait le faire tous les ans.

MfFOµ. - L'accroissement annuel des valeurs n'est peut-être pas assez important pour faire modifier le contingent chaque année. Il faudrait procéder par périodes.

Mais, je le répète, aussi longtemps que la contribution foncière sera un impôt de répartition, et non un impôt de quotité applicable dans la même proportion au revenu de toutes les propriétés, il y aura des anomalies, et les accroissements de valeurs ne donneront pas lieu à une augmentation du produit.

M. de Naeyer. - Pour faire cesser les anomalies qui ont été signalées, il n'est pas nécessaire de faire de l'impôt foncier un impôt de quotité au lieu d'un impôt de répartition ; car à quoi tiennent ces anomalies ?

Suivant le système qui est aujourd'hui en vigueur, il y a d'abord la fixation d'un contingent général pour tout le royaume ; si on s'arrêtait là, il n'y aurait pas d'anomalie, mais on a fait la répartition du contingent général entre les provinces de manière à assigner à chacune d'elles un contingent spécial qui doit rester invariable quels que soient les changements qui surviennent dans la matière imposable. Il en résulte que les augmentations ou diminutions du revenu imposable tournent exclusivement à l'avantage ou au désavantage des contribuables de chaque province, ce qui donne nécessairement lieu à des inégalités de position plus ou moins choquante entre les contribuables des différentes provinces, puisqu'il est impossible que le revenu imposable augmente ou diminue dans la même proportion dans toutes les provinces. C'est ainsi que dans la province de Flandre orientale, l'impôt est de 11 1 /2 francs par 100 francs, tandis que dans le Brabant il n'est que de 11 fr. 6 c. par 100 francs, parce que la matière imposable a plus augmenté dans le Brabant que dans la Flandre orientale.

Le mal provient donc, non de ce que l'impôt foncier est un impôt de contingent ou de répartition, mais de ce que l'on a assigné à chaque province un contingent invariable dans la répartition du contingent général.

L'inconvénient cesserait complètement si l'on se bornait à fixer un contingent général. De cette manière le marc le franc serait toujours uniforme dans tout le royaume, les diminutions du revenu imposable seraient à charge de tous les contribuables dans la même mesure et les augmentations du revenu imposable leur profiteraient à tous dans la même proportion ; en un mot les anomalies qui ont été signalées disparaîtraient complètement.

Je n'admets aucunement que le système actuel ait été introduit et maintenu uniquement par les raisons en quelque sorte historiques indiquées par l'honorable ministre des finances ; on a fait aussi de l'impôt foncier, un impôt de répartition, c'est-à-dire un impôt en quelque sorte invariable quant au produit, puisque la propriété immobilière est particulièrement exposée à la rapacité du fisc, parce que c'est toujours à elle qu'on a principalement recours dans les circonstances extraordinaires, quand il s'agit de faire face à de grands besoins, par des motifs de justice et d'équité, on a voulu que les accroissements de revenu imposable profitassent au moins momentanément aux contribuables, d'autant plus que les charges que supporte la propriété immobilière sont réellement exorbitantes en comparaison de celles imputées aux autres branches de la fortune publique et notamment aux valeurs mobilières.

La propriété immobilière ne paye pas seulement l'impôt foncier, elle supporte la plus lourde part des droits de succession et des droits d'enregistrement. Voilà des motifs bien légitimes pour conserver à l'impôt foncier son caractère d'impôt de répartition, et je le répète, il n'est aucunement nécessaire de changer cet ordre de choses ; il suffit d'employer le moyen que j'ai indiqué pour que l'égalité proportionnelle de l'impôt ne soit plus rompue ; il suffit, en un mot, de ne plus assigner à chaque province un contingent invariable.

MfFOµ. - La raison historique que j'ai donnée pour expliquer l'établissement de la contribution foncière sous forme d'impôt de réparation, et les motifs qui ont fait maintenir cet état de choses jusqu'aujourd'hui, après l'établissement du cadastre ne sont pas contestables ; on en trouverait au besoin la preuve dans des décrets de l'empire.

Ce n'est pas, comme le prétend l'honorable M. de Naeyer, parce que l'on aurait reconnu que la propriété foncière était grevée de trop lourdes charges, que l'on a voulu réduire successivement la taxe à mesure que se produisent des valeurs nouvelles, et arracher ainsi la terre à la rapacité du fisc. Les motifs qui ont déterminé l'adoption du système actuel, sont tout autres que ceux que l'honorable membre a supposés. Les raisons qu'il a indiquées pouvaient-elles engager l'avenir, et assurer indéfiniment la fixité invariable du contingent ?

Quelle est, en effet, au point des modifications que le législateur pourrait introduire, la différence entre un impôt de quotité et un impôt de répartition ? Est-il plus difficile d'augmenter le contingent que la quotité ? La mesure ne peut-elle pas être prise par les mêmes pouvoirs ? Il n'y a donc, sous ce rapport, aucune différence entre les deux systèmes. Cela est incontestable. Si l'impôt de quotité peut être augmenté, il en est évidemment de même quant au contingent. Ni l'un ni l'autre ne sont à l'abri de ce que l'honorable membre appelle la rapacité du fisc.

Maintenant, quelle raison y a-t-il pour que, par une exception toute spéciale, par un pur privilège, l'impôt foncier jouisse d'un amortissement, et pour qu'il diminue en raison de l'augmentation des valeurs imposables ? Il n'y a certainement aucune raison équitable à invoquer pour justifier une telle anomalie. Et d'ailleurs, quel est l'avantage qui résulte aujourd'hui pour les contribuables de cette situation ? Il est assurément fort insignifiant. Est-ce qu'un contribuable s'est aperçu de la faible réduction de sa cote foncière ? Je ne le pense pas. Cette réduction agit centime par centime, et, même après un temps fort long, cela ne représente pas un dégrèvement appréciable. Si cette diminution insignifiante ne s'était pas produite, nul n'aurait assurément songé à s'en plaindre, tandis qu'en élevant graduellement le contingent de l’impôt en raison de l'accroissement successif des valeurs, on obtiendrait une augmentation légitime de produit, qui serait peut-être de cent mille francs par an, selon les circonstances. Je pense que ce système serait parfaitement équitable.

M. de Naeyer. - Je trouve que toutes les critiques que l'honorable ministre des finances dirige contre le système actuel, en tant qu'on a fait de l'impôt foncier un impôt de répartition, sont absolument dénuées de fondement.

Je le répète, en adoptant ce système on a été guidé par des moiifs de justice et d'équité, on a voulu que les contribuables profitassent des accroissements de la matière imposable pour plusieurs raisons que j'ai indiquées et que l'honorable ministre n'a pas même essayé de réfuter. Ou a voulu notamment accorder à la propriété immobilière une certaine compensation parce que, dans les circonstances difficiles, c'est elle qui supporte principalement le fardeau des charges extraordinaires et exceptionnelles, et vous devez vous rappeler que c'est ainsi que les choses se passent, notamment quand on est obligé de recourir aux emprunts forcés.

Ces emprunts forcés ont frappé surtout les possesseurs d'immeubles, et voilà sous quel rapport il était juste de leur accorder une compensation en adoptant, pour ce genre de propriété, un système d'imposition qui consiste à fixer d'avance le produit que l'impôt doit donner. Et qu'on ne dise pas que c'est une chose insignifiante et que ce système ne forme pas obstacle à ce qu'une somme plus considérable soit demandée aux contribuables, tout comme s'il s'agissait d'un impôt de quotité. En raisonnant ainsi, on perd complètement de vue que l'impôt de répartition implique une espèce d'engagement moral de conserver invariablement le même contingent général, à moins de circonstances extraordinaires et exceptionnelles.

Cette question a été assez longuement discutée à différentes reprises, si je ne me trompe, et je crois que l’honorable ministre revient tout bonnement à une idée ou à un système qu'il a cherché inutilement à faire triompher, de manière que je m'attends à avoir à discuter encore cette question lorsque la nouvelle loi de péréquation cadastrale nous sera soumise.

Une première fois on a ajouté globalement à l'impôt foncier les accroissements qu'avaient reçus les bases imposables ; cela s'est fait, je pense, sous l'honorable M. Liedts, qui invoquait à l'appui de sa proposition des besoins extraordinaires et exceptionnels. Et bien, il y eut alors de ce chef une augmentation de plus d'un demi-million.

Primitivement le principal n'était que de 15 1/2 millions, et il fut porté à près de 16 millions, si vous comptez en outre les 18 centimes additionnels, vous trouverez que les charges de la propriété immobilière ont été augmentées de plus d'un demi-million, Vous voyez donc que ce n'est pas aussi insignifiant que l'on veut bien (page 71) le dire,et quant aux facilités d'accroissement que vous prétendez être les mêmes dans les deux systèmes, je dis que cela n'est pas exact.

Je le répète.par cela même qu'on adopte le système de l'impôt de contingent ou de répartition, on contracte l'engagement moral de ne pas augmenter le produit à tout moment, tandis qu'il n'en est pas ainsi pour l'impôt de quotité dont le produit augmente par le fonctionnement même du système, et sans une intervention spéciale de la législature.

Je ne puis donc admettre les raisons alléguées par l'honorable ministre et j'ose espérer que si la question nous est encore soumise, la Chambre ne consentira pas à aggraver la position faite jusqu'ici à la propriété immobilière qui, certes, contribue assez largement aux charges publiques.

MfFOµ. - L'honorable M. de Naeyer me paraît avoir la mémoire assez malheureuse. Il y a chez lui de singulières infidélités de souvenirs. Hier, il s'imaginait pouvoir me mettre en contradiction avec moi-même sur la question des denrées alimentaires. Aujourd'hui, il croit se rappeler que j'ai autrefois proposé à la Chambre de changer la nature de la contribution foncière, et d'en faire un impôt de quotité au lieu d’un impôt de répartition ; et il ajoute même que c'est après une discussion très vive et malgré une opposition violente de ma part, que le système contraire a prévalu.

M. de Naeyer. - Je n'ai pas affirmé positivement. (Interruption.)

MfFOµ. - Vous avez fait ce récit à la Chambre ; vous me permettrez sans doute de rectifier vos souvenirs.

M. de Naeyer. - Vous avez indiqué ce système à différentes reprises.

MfFOµ. - Vous êtes complètement dans l'erreur ; je n'ai jamais proposé l'impôt de quotité à la Chambre. J'ai pu dire à certaine époque ce que je dis encore aujourd'hui, qu'un impôt de quotité est préférable à un impôt par contingent ; mais je n'ai jamais été au-delà, et jamais je n'ai eu occasion de lui soumettre la proposition que vous m'attribuez.

Maintenant je me demande en quoi la Chambre serait plus gênée pour décider l'augmentation de la quotité de l'impôt foncier, que pour adopter un accroissement du contingent ? C'est là une question de simple bon sens. Il n'y a pas moyen d'empêcher la législature de se prononcer sur l'une ni sur l'autre de ces deux bases de contribution. Mais ce que j'ai proposé un jour et ce qui a été combattu dans la Chambre avec vivacité, c'était d'ajouter au contingent de la contribution foncière le montant des accroissements résultant des valeurs nouvelles. La Chambre a rejeté impitoyablement cette proposition. Il est vrai de dire que, quelque temps après, l'honorable M. Liedts, mon successeur, ayant reproduit cette proposition, la Chambre l'a parfaitement adoptée. (Interruption.)

L'honorable M. de Naeyer trouvera peut-être dans le rapprochement de ces deux actes, l'explication aussi de ces deux votes.

Je n'ai pas annoncé non plus que je présenterais un nouveau système quant à l'impôt foncier, après l'achèvement des opérations de la révision cadastrale.il est donc parfatement inutile de me prêter cette intention, pour avoir un prétexte de la combattre anticipativement. J'ai dit que je proposerais incontestablement une mesure analogue à celle qui a déjà été adoptée, lorsque l'occasion serait venue de faire profiter le trésor de l'accroissement des valeurs nouvelles.

Eh, messieurs, pourquoi faudrait-il qu'il y eût sans ce rapport une exception, un privilège en faveur de l'impôt foncier ? Pourquoi faudrait-il que les propriétaires fonciers jouissent d'une réduction d'impôt, dont ils ne s'aperçoivent même pas ? Il ne s'agit pas d'augmenter la part contributive de chacun d'eux dans la totalité du contingent, mais de maintenir cette part au taux actuel, sauf à faire profiter le trésor de l'impôt provenant de l'augmentation des valeurs.

Pourquoi du reste, si l'on a la prétention de maintenir le système actuel quant à la contribution foncière, n'appliquerait-on pas ce même système à la contribution personnelle et à l'impôt des patentes ? Evidemment, si le principe est équitable, il ne faut pas en faire une application exceptionnelle, il faut le généraliser. Au point de vue de la justice et de la raison, il est incontestable que c'est au profit du trésor qui doit tourner l'accroissement des valeurs.

S'il survient de nouveaux imposables, de nouveaux contribuables, ils payeront dans la même proportion que les anciens, et personne n'aura le droit de se dire lésé, car cette disposition ne changera pas la condition des autres propriétaires fonciers.

Au surplus, messieurs, je réserve mon opinion sur cette question ; mais je déclare qu'à l'occasion je n'hésiterai pas à présenter à la Chambre une proposition dans ce sens.

- Le chiffre est adopté.


« Dépendances des chemins de fer : fr. 75,000. »

- Adopté.


« Etablissements et services régis par l'Etat : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Produits divers et accidentels, y compris ceux des examens universitaires : fr. 900,000. »

- Adopté.


« Revenus des domaines : fr. 275,000. »

- Adopté.

Travaux publics

« Abonnement au Moniteur, etc., perçu par l'administration des postes : fr. 24,000. »

- Adopté.

Trésorerie générale

« Produits divers des prisons (pistoles, cantines, vente de vieux effets) : fr. 130,000. »

- Adopté.


« Produits de l'emploi des fonds de cautionnements et de consignations : fr. 950,000. »

- Adopté.


« Produits des actes des commissariats maritimes : fr. 55,000. »

- Adopté.


« Produits des droits de chancellerie : fr. 4,000. »

M. Coomans. - Messieurs, je voudrais demander une explication à propos de cet article : produit des droits de chancellerie.

Il a été décidé à la fois par la Chambre et le gouvernement, il y a deux ou trois ans, que tous les droits de chancellerie en ce qui concerne le visa des passe-ports seraient désormais supprimés. Je ne sais pas à quoi se rapporte la somme renseignée au budget des voies et moyens. J'espère qu'elle ne constitue pas une exception au principe que nous avons vivement approuvé naguère et c'est à ce sujet que je désire une explication.

MfFOµ. - Comme le dit l'honorable membre, les droits de chancellerie, en ce qui concerne les passe-ports, ont été supprimés. Seulement ils n'ont été supprimés qu'à charge de réciprocité. Ainsi, quant aux puissances qui continuent à percevoir des droits de chancellerie à charge de nos nationaux, nous percevons également des droits semblables sur les nationaux de ces puissances.

Il s'agit d'ailleurs d'un chiffre insignifiant ; c’est 4,000 fr. que nous proposons ; mais il est possible que cela se réduise à rien.

M. Coomans. - M. le ministre veut bien me donner l'explication que j'ai demandée ; je l'en remercie. Mais je ne crois pas cependant qu'il faille maintenir cette exception. Je ne conçois pas l'intérêt que peut avoir le gouvernement à appliquer le principe de la réciprocité en cette matière. Nous ne pouvons avoir aucun intérêt à empêcher les étrangers de recevoir des passe-ports pour la Belgique. Par conséquent c'est bien le cas de renoncer à ce prétendu principe de réciprocité dont ou a énormément abusé. La question est toujours de savoir quelle est la voie directe et c'est celle-là qu'il faut suivre. Si d'autres se fourvoient à gauche ou à droite, qu'importe ! je voudrais que notre gouvernement se maintînt dans la « via recta ». Or, nous avons tous trouvé qu'il était juste, qu'il était convenable tout au moins, de supprimer tous ces droits de chancellerie, alors qu'on supprimait les passe-ports.

J'ajoute qu'il n'était pas à ma connaissance que l'exception eût été maintenue, Je le regrette.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Il y a des voyageurs qui désirent encore des passe-ports, bien que ces passeports ne soient plus obligatoires. Ils doivent en demander.

M, Coomansµ. - Je crois avoir été un des premiers à demander la suppression des passe-poris à titre obligatoire.

MfFOµ. - Beaucoup d'autres l'ont demandée,

M. Coomans. - Beaucoup d'autres l'ont demandée, je n'en doute pas, attendu que quiconque en a usé, a dû en désirer la suppression. Mais j'ai reconnu à cette époque qu'il ne fallait pas supprimer les passe-ports, qu'il fallait supprimer seulement l'obligation d'en avoir. Car, dans beaucoup de cas, le passe-port est fort utile et je serais fâché qu'il fût supprimé. Je pourrais citer plusieurs exemples ; j’en indiquerai un seul. Il peut être très important pour un citoyen belge d'avoir un moyen certain ; d'être reconnu à l'étranger, alors qu'on lui expédie de l'argent notamment. Dans la plupart des bureaux de poste étrangers on exige pour ainsi dire le passe-port, avant de vous délivrer des lettres ou de l'argent. On fait bien, dans l'hypothèse qu il n'y ait pas d'autre titre équivalent à celui du passe-port.

J'approuve donc le maintien des passe-ports, mais il ne faut pas punir le citoyen belge de la précaution qu'il prend de demander un passeport. Vous devriez au contraire multiplier les passe-ports qui sont, après (page 72) tout, une garantie, et vous faites le contraire, en exigeant encore des droits de visa. Messieurs, abolisons-les complètement. Si d’autres gouvernements (je voudrais bien les connaître) sont dans leur tort, laissons-les-y ; montrons-nous plus généreux, plus logiques, plus justes et supprimons les droits de visa.

Ce sera peut-être une raison décisive d'obliger ces gouvernements rétrogrades à supprimer la formalité du passe-port à titre obligatoire.

Maintenant je prie M. le ministre des affaires étrangères de me désigner les gouvernements qai exigent encore des passe-ports. Ce n'est pas simplement pour satisfaire ma curiosité, c'est à titre de punition et de mise en demeure vis-à-vis de ces gouvernements, que je prends la liberté de demander ces renseignements à M. le ministre des affaires étrangères.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Je pourrai donner ces explications à la discussion du budget des affaires étrangères.

M. Coomans - Très bien.

MfFOµ. - Je pense que vous confondez deux choses bien différentes. Il ne s'agit pas de droit de passe-port, il s'agit de visa.

M. Coomans. - Au fond c'est la même chose, car je ne me plains que de la charge financière.

- L'article est adopté.


« Produits des droits de pilotage : fr. 700,000. »

- Adopté.


« Produit des droits de fanal : fr. 125,000. »

- Adopté.


« Produit de la fabrication de monnaies de nickel : fr. 2,400,000. »

M. Delaetµ. - Je désirerais savoir de M. le ministre des finances, s'il a pris quelques informations pour connaître quel et le droit public en Angleterre quant à la fabrication des monnaies étrangères. Si M. le ministre ne me répond pas, je crois pouvoir regarder son silence comme une réponse négative.

MfFOµ. - J'attends que vous ayez fini ; expliquez vous.

M. Delaetµ. - Il n'y a pas de peine en Angleterre pour ceux qui fabriquent de la monnaie étrangère ; il n'y a de peine que pour ceux qui font de la fausse monnaie. Or, quelque difficile que soit la fabrication du nickel, les bénéfices de cette fabrication sont tellement énormes, que nous devons craindre de voir l'Angleterre nous inonder de billon belge. Quelle sera alors la situation du trésor public vis-à-vis de cette monnaie de fabrication étrangère qui affluera par millions et que la législation anglaise permet de faire au titre et au poids ?

La question est assez grave. Elle intéresse à un assez haut degré le trésor public, pour que le gouvernement s'en occupe. Quant à moi, je remplis mon devoir en avertissant le gouvernement.

MfFOµ. - J'ai déjà eu l'honneur de répondre à l'honorable membre que rien ne prouvait que l'on fabriquât de la monnaie de nickel à l'étranger ; que le fait ayait été allégué plusieurs fois, qu'il m'avait même été signalé par un honorable membre qui le tenait d'un négociant d'Anvers ; mais qu'après des investigations faites dans le but de vérifier s'il y avait certain fondement dans ce bruit, on avait été dans l'impuissance d'apporter aucune espèce de preuve à l'appui de cette allégation.

L'honorable membre est dans le même cas ; il croit, on lui a dit que l'on imite en Angleterre notre monnaie de nickel ; mais il lui est également impossible de produire aucuu fait pour justifier cette supposition.

Au surplus, messieurs, avec le système de douane qui existe, je pense qu'il serait assez difficile que l'on introduisît en Belgique une certaine quantité de monnaie de billon sans qu'on s'en aperçut. L'introduire en fraude me paraît presque impossible ; cela ne pourrait se faire que pour de très petites quantités. Il y a là un obstacle réel à la fabrication étrangère, et à l'importation dans le pays.

L'honorable membre fait un signe de dénégation. Il ne voit à cela aucune espèce de difficulté.

Mais si facile qu'il s'imagine la chose, ses observations ne s'appliquent pas seulement à notre monnaie de nickel ; elles s'appliquent nécessairement à toute espèce de monnaie de billon ; car la fabrication de toutes les monnaies de billon donne un bénéfice considérable. On pourrait par conséquent fabriquer en Angleterre de la monnaie de billon pour tous les pays.

Maintenant, quelle est la législation anglaise ? Selon l'honorable membre, on peut fabriquer impunément, en Angleterre, toute espèce de monnaie sans encourir aucune sorte de pénalité. Je ne suis pas aussi savant que l'honorable membre sur cette question spéciale, mais je crois qu'il est dans l'erreur. Je crois qu'une fabricition de ce genre, qui constituerait un faft dommageable pour les nations étrangères, doit vraisemblablement être réprimé par la législation anglaise.

Du reste, c'est là une discussion sans aucune utilité pratique, jusqu'à ce qu'on démontre qu'il existe un fait qui légitime un examen, un acte quelconque de la part du gouvernement.

M. Delaetµ. - M. le ministre se trompe, s'il croit que je veux soulever une discussion hic et nunc ; je demande à M. le ministre de prendre des informations par voie diplomatique. M. le ministre, lorsqu'il s'agit d'un amendement que nous proposons, vient très bien nous dire ; « Vous n'êtes pas aussi bien informés qusenous. » Maintenant il veut nous charger de lui fournir des renseignements. M. le ministre a sa diplomatie ; qu'il demande des informations ; c'est à nous d'en recevoir et non pas d'en donner.

- Le chiffre de 2,400,000 fr. est mis aux voix et adopté.


« Produit de la fabrication de monnaies de cuivre : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Chemin de fer rhénan. Dividendes : fr. 232,500. »

- Adopté.


« Part réservée à l'Etat, par la loi du 5 mai 1850, dans les bénéfices réalisés par la Banque Nationale : fr. 350,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des crédits (IV. Remboursements)

Contributions directes, etc.

« Frais de perception des centimes provinciaux et communaux : fr. 150,000. »

- Adopté.


« Remboursement, par les communes, des centimes additionnels sur les non-valeurs de la contribution personnelle : fr. 20.000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

« Reliquats de comptes arrêtés par la cour des comptes. Déficit des comptables : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Recouvrements d'avances faites par les divers départements : fr. 525,000. »

- Adopté.

Trésorerie générale

« Recouvrements d'avances faites par le ministère de la justice aux ateliers des prisons, pour achat de matières premières : fr. 770,000. »

- Adopté.


« Remboursement, par les provinces, des centimes additionnels sur les non-valeurs de la contribution personnelle : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Recettes accidentelles : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Abonnement des provinces pour le service des ponts et chaussées : fr. 80,000. »

- Adopté.


« Abonnement des provinces, pour réparations d'entretien des maisons d'arrêt et de justice, achat et entretien de leur mobilier : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Prélèvement sur les fonds de la masse d'habillement de la douane, à titre de remboursement d'avances : fr. 9,000. »

- Adopté.


« Prélèvement sur les fonds de la caisse générale de retraite, à titre de remboursement d'avances : fr. 1,000. »

- Adopté.


« Recette du chef d'ordonnances prescrites : fr. 30,000. »

- Adopté.

Fonds spécial

« Produit des ventes de biens domaniaux, autorisées par la loi du 3 février 1843 : fr. 100,000. »

- Adopté.

Discussion des articles

Articles 1 à 3

« Art. 1er. Les impôts directs et indirects, existant au 1er décembre 1864, en principal et centimes additionnels ordinaires et extraordinaires, tant pour le fonds de non-valeurs qu'au profit de l'Etat, ainsi que la taxe des barrières, seront recouvrés, pendant l'année 1865, d'après les lois et les tarifs qui en règlent l'assiette et la perception.

« Le principal de la contribution foncière est maintenu, pour l’année 1865, au chiffre de 15,944,527 francs, et sera réparti entre les provinces conformément à la loi du 31 décembre 1853. »

- Adopté.


« Art. 2. D'après les dispositions qui précèdent, le budget des recettes de l'Etat, pour l'exercice 1865, est évalué à la somme de cent cinquante-neuf millions cinq cent douze mille sept cent quatre-vingt-dix francs (159,512,790 fr.), et les recettes spéciales, provenant des ventes de bien domaniaux autorisées par la loi du 3 février 1843, à la somme de cent mille francs (100,000 francs). »

- Adopté.


« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le ler janvier 1865. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet qui est adopté par 77 voix contre 8.

Ont voté l'adoption : MM. de Kerchove, Delcourt, de Liedekerke, de Macar, de Mérode, de Moor, de Ruddere de te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Dewandre, de Woelmont, Dolez, Dupont, d'Ursel, Elias, Frère-Orban, Funck, Giroul, Goblet, Grosfils, Hymans, Janssens, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lange, Laubry Le Baillet de Tilleghem, Lebeau, Lesoinne, Lippens, Magherman, Mascart Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Orban, Pirmez, Reynaert, Rodenbach Rogier, Sabatier, Schollaert, Tesch, Thonissen, T'Serstevens, Vanden Branden de Reeth, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Renynghe Vermeire, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Warocqué, Wasseige Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Bricoult, Couvreur, de Baillet-Latour, de Brouckere, De Fré et E. Vandenpeereboom.

Ont voté le rejet : MM. Delaet, de Naeyer, d'Hane-Steenhuyse, Hayez, Jacobs, Thibaut, Coomans et de Conninck.

Projet de loi portant le budget du ministère des affaires étrangères de l’exercice 1865

Discussion générale

M. Van Iseghem, rapporteur. - Messieurs, je demande la parole pour rectifier une erreur qui se trouve dans mon rapport. Au nom de la section centrale, j'avais prié l'honorable ministre des affaires étrangères de vouloir nous dire quelle est la somme disponible sur les exercices précédents pour le service des bateaux à vapeur entre la Belgique et le pays étrangers.

Je parlais de l'article 2 du texte de la loi ; et au ministère on a cru qu'il s'agissait de l'aricle. 2 du projet du budget. Il y avait donc un malentendu Or, en ce qui concerne l'article 2 du texte, d'après une note remise par M. le ministre, il y aura une somme disponible de 66,662 fr. 90 c.

Je désire que cette erreur soit rectifiée dans le rapport de la section centrale.

MpVµ. - Les Annales parlementaires rectifieront le rapport ; les chiffres restent les mêmes.

La discussion générale est ouverte sur le budget du ministère des affaires étrangères.

La parole à M. d'Hane-Steenhuyse.

M. d’Hane Steenhuyseµ. - Messieurs, déjà l'année dernière j'avais eu l'intention de présenter à la Chambre quelques observations au sujet du budget des affaires étrangères ; mais, par suite de circonstances indépendantes de ma volonté, je n'ai pu assister à la séance dans laquelle le budget a été discuté et voté ; il a été, en effet, discuté et voté le même jour.

La Chambre aura remarqué, comme moi, que la Belgique, qui possède six ministères, dépense tous les ans :

Pour le ministère de la justice, 14,838,168 fr.

Pour le ministère des finances, 13,825,120 fr.

Pour le ministère des travaux publics, 29,369,735 fr.

Pour le ministère de l'intérieur, 11,366,076 fr.

Pour le ministère des affaires étrangères, seulement, 3,175,792 fr.

Et pour le budget qui, selon moi, devrait être non pas précisément le plus faible, car il faut assurer la défense nationale, mais qui du moins ne devrait par s'éloigner autant du chiffre des autres budgets, pour le budget de la guerre, la Belgique dépense annuellement 34,904,950 francs.

Une idée m'est venue, en voyant cette énorme différence : c'est que par cela même que la Belgique constitue un pays neutre, qu'elle n'a ni le droit ni le pouvoir de se mêler aux luttes qui peuvent surgir en Europe, il me semble, et il m'a semblé depuis longtemps, qu'elle devait, autant que possible, tourner ses regards vers ce qui peut augmenter sa richesse commerciale ; c'est vous dire l'importance que j'attache aux consulats, à toutes les missions qui pourront être envoyées à l’étranger et qui ont pour but de nous ouvrir de nouveaux débouchés.

Dans le rapport fait au nom de la section centrale par l'honorable M. Van Iseghem, l'honorable ministre des affaires étrangères, répondant à la section centrale, au sujet d’une demande de crédit qui a été faite pour la mission du Mexique, imaginée il y a peu de temps, prit pour terme de comparaison les pays suivants : la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, l’Espagne, c’est-à-dire les premières puissances de l’Europe.

Or, messieurs, je suivrai l'exemple de l'honorable M. Rogier et je remarque qu'en France, qui est certes l'une des premières puissances de l'Europe, exerçant partout une influence incontestable, je remarque qu'en France le budget des affaires porte en dépenses pour le corps diplomatique 3,468,000 francs, et pour les agents consulaires, c'est-à-dire pour les fonctionnaires qui, en Belgique, pourraient nous rendre de véritables services au point de vue commercial, 3,248,000 francs. Donc en France, il n'y a qu'une différence d’environ 200,000 francs entre ces deux chiffres. Cette différence est bien minime.

En Belgique, nous payons pour nos agents diplomatiques 869,770 fr., et pour nos agents consulaires environ 161,650 fr.

Je pense que ce parallèle vous aura frappés, comme moi, et qu'avec moi aussi vous reconnaîtrez qu'il est nécessaire, qu'il est indispensable de porter remède à un pareil mal.

Notre pays, depuis 1830, n'a pas pris, au point de vue du commerce extérieur, tout le développement désirable. J'espère l'établir par des chiffres que je produirai tout à l’heure, et je ferai même intervenir particulièrement la ville d'Anvers dans ce mouvement général du commerce belge.

Depuis longtemps on s'occupe des moyens d'améliorer l'état de notre navigation nationale qui, comme vous le savez, est presque complètement anéantie. Norre marine de gueire n'est plus représentée que par un sabot pourri, auquel tenait compagnie un vieux brick qui a servi récemment à des expériences pyrotechniques sur l'Escaut, à Lillo ; de manière que nous pouvons déclarer que notre marine de guerre est morte et que si nous n'avions au budget quelques pensions d'officiers, et la solde de disponibilité pour quelques autres, on ignorerait qu'en Belgique nous avons possédé pendant quelques années l’ombre d'une flottille de guerre.

Notre marine marchande n'est pas dans une voie meilleure. Depuis 1830, nous en avons perdu à peu près les quatre sixièmes.

Ce sont, messieurs, des points faciles à constater. Vous n'avez qu'à ouvrir les statistiques du royaume, et vous y trouverez qu'à Ostende, à Bruges, à Gand et à Anvers, la marine marchande a décliné depuis notre émancipation politique et qu'elle ne cesse malheureusement de décliner tous les jours.

Le gouvernement s'est efforcé, je le reconnais, de trouver le moyen d'améliorer notre situation commerciale à l'étranger, mais, selon moi, les mesures qu'il a prises sont inefficaces. Nous avons eu d'abord l'intervention directe de l'Etat dans les affaires de commerce et de navigation. Cette intervention, que j’ai déjà combattue dans d'autres circonstances et dans cette enceinte, cette intervention, dis-je, tend à centraliser entre les mains du gouvernement tous les efforts et toute l'initiative des particuliers, au grand détriment du commerce, qui ne peut vivre que d'indépendance.

Je désire que, sous ce rapport, toute liberté soit laissée aux particuliers. Cependant il faut les aider, sans les empêcher toutefois de suivre leurs propres impulsions.

Or, le moyen, selon moi, d'aider au commerce et à la navigation, serait d'augmenter d'une manière considérable le nombre de nos agents consulaires à l'étranger.

Nous avons, il est vrai, des consuls dans les différents pays du monde, mais remarquez qu'ils sont presque tous, je dirai même tous, des étrangers.

Ce sont des négociant anglais, allemands, français etc., qui n'ont d'autre but, pour la plupart, en acceptant l'honneur de hisser une fois par semaine le pavillon belge au haut de leur demeure, que de recevoir, après un certain nombre d’années, un bout de ruban, à titre de récompense pour les soins qu'ils sont changés de donner aux intérêts belges.

En outre, messieurs, ces consuls qui sont, comme je viens de le dire, des étrangers, sont aussi ou chefs de maisons ou commanditaires de fortes maisons auxquelles notre pays n'a rien à voir ; ils n'ont donc aucun intérêt à favoriser le placement de nos produits ; ils continuent de prendre ceux de leur pays à eux ; ils ne sont pas fonctionnaires diplomatiques, et ils ne peuvent pas être des agents disposés à favoriser l'extension et la prospérité commerciale de la Belgique.

(page 74) Le gouvernement, en 1861I, a décidé d'accorder des bourses de voyage à des élèves de l'institut commercial d'Anvers qui seraient jugés dignes de cette faveur. Or, voici ce qu'il répondit à la section centrale qui lui demandait des renseignements à ce sujet :

« La valeur et la durée des bourses pourront être déterminées en raison :

«1° De l'aptitude montrée par les jeunes gens ;

« 2° Des pays à visiter par eux ;

« 3° Du séjour qu'ils s'engageront, sous les conditions à déterminer, à faire à l'étranger.

« Ce sont là de simples indications ; comme le dit la note préliminaire : c'est de concert entre les départements de l'intérieur et des affaires étrangères, les chambres de commerce entendues, que les dispositions réglementaires seront arrêtées.

« Quant à subordonner l'allocation de bourses de voyage à la preuve que l'aspirant possède les ressources nécessaires pour créer une maison belge à l'étranger, il n'entre en aucune façon dans la pensée du gouvernement d'imposer une telle condition.

« La bourse doit être accessible à tous les jeunes Belges, quel que soit leur état de fortune.

« S'ils possèdent les ressources nécessaires, et qu'ils en aient la volonté, ils établiront une maison à l'étranger, le but en sera d'autant mieux atteint. S'ils n'ont point cet avantage, ils pourront entrer en qualité de commis d'abord, d'associés ensuite, dans des maisons du pays, avec la perspective de s'y établir plus tard pour leur propre compte.

« Ce placement sera d'autant plus praticable, que la plupart de nos consuls à l'étranger sont les chefs de maison de commerce plus ou moins considérables. »

Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères s'il peut nous faire connaître le nombre de ces jeunes gens qui ont les moyens nécessaires pour s'établir à l'étranger, et si le crédit qui a été demandé a porté des fruits. Il est vrai que cette mesure n'a été prise qu'en 1861, mais je doute qu'en persévérant dans cette voie, il s'établisse, d'ici à dix ans, une seule maison à l'étranger.

La section centrale demande en outre quelle est la véritable portée du but que le gouvernement se propose d'atteindre en favorisant les jeunes négociants qui se rendront à l'étranger.

Veuillez, messieurs, prêter un moment d'attention à la réponse du gouvernement à cette question.

« Le but capital de la mesure, c'est d'encurager la création de maisons belges dans les contrées lointaines.

« Une des causes prépondérantes de l'extension des débouchés qu'ont acquis l'Angleterre, la France, l'Allemagne, la Susse et jusqu'à de simples villes, telles que Hambourg et Brème, c'est le mouvement qui pousse une partie de leurs habitants, les jeunes gens surtout, à voyager à l'étranger, à y résider, à s'y établir.

« Ceux qui ont des capitaux y créent d'emblée des maisons de commerce. Ceux qui n'ont que leur intelligence et leur activité, s'y font commis. Beaucoup, la plupart même, y trouvent des compatriotes.

« De commis, ils deviennent associés, d'associés chefs de maison. On comprend qu'ils adressent de préférence leurs commandes à la mère patrie. »

Ceci, messieurs, vient à l'appui de ce que j'ai dit tantôt au sujet de nos consuls étrangers.

« On comprend aussi que de la mère patrie, on leur adresse de préférence les marchandises en consignation, ou les ordres d'achat.

« Il s'établit un courant d'affaires qui s'accroît parfois d'une manière prodigieuse.

« Le Suisse, par exemple, pour citer une nation placée en général dans des conditions relativement désavantageuses, le Suisse est répandu sur toute la surface du globe ; c'est le Suisse expatrié qui fait la prospérité industrielle et commerciale de son pays. Après avoir acquis la fortune à l'étranger, il vient l'appliquer reproductivement dans sa patrie. Il y rapporte un autre trésor encore : c'est la longue expérience acquise des goûts, des besoins, de la langue, des ressources des pays où il a résidé ; c'est en outre le lien des relations qu'il y a nouées et qu'il y entretient.

« De ce qu'il y a partout des Suisses, le gouvernement fédéral est sûr de liouver parmi des nationaux pour occuper les postes consulaires.

« Eh bien, ce qui existe pour la Suisse, puisque j'ai spécialement cité ce pays, le gouvernement veut, dans les limites de sa sphère d'action, s'efforcer de le réaliser pour la Belgique. Il ne songe point à établir des maisons belges aux frais de l'Etat, mais il croit nécessaire d'indiquer le but au commerce et de stimuler la jeunesse à l'aide d'une raclure dont, comme le dit assez le chiffre du crédit demandé, il faut envisager l'effet moral bien plus que l'importance matérielle.

« Encourager les études commerciales d'une part, faciliter l'accès à la pratique commerciale de l'autre, le tout au point de vue de l'extension de nos débouchés, tel est le but de l'institution des bourses de voyage.

« Il est bien entendu qu'il ne s'agit que des voyages en dehors des pays d'Europe. »

Messieurs, vous remarquerez que M. le ministre des affaires étrangères reconnaît l'avantage de l'expatriation au point de vue belge ; il reconnaît l'utilité de l'établissement de maisons de commerce à l'étranger. Eh bien, je vous le demande, lorsqu'un Belge s'expatrie, alors même qu'on lui accorde 2,000 ou 3,000 fr. par an pour voyager, quel résultat peut-il réaliser ?

Il devient commis dans une maison de commerce ; parfois, après un certain nombre d'années, il parvient à s'associer avec le chef de la maison. Mais est-il possible que, dans cette position, il fasse admettre par cette maison des produits belges au détriment de ceux dont elle est habituée de se pourvoir ?

II en résulte que les bénéfices que la Belgique peut retirer de cette combinaison sont tellement vagues, tellement lointains surtout que, revenant à ma première proposition, je dis que le moyen le plus pratique de faire connaître et placer nos produits à l'étranger serait d'y établir des agents consulaires belges, convenablement rétribués ; des agents qui s'occuperaient exclusivement de notre commerce national ; qui noueraient au loin des relations directes et fructueuses et qui n'auraient pas à s'occuper d'affaires particulières, au détriment des nôtres. Ils se mettraient en rapport avec nos fabricants et nos industriels ; ils useraient enfin de toute leur influence pour faire apprécier et rechercher dans leur résidence les produits belges.

On se plant souvent, à l'étranger, que nos fabricants ne veulent pas donner à leurs produits les dimensions et les couleurs qui leur sont recommandées ; mais ces plaintes ne sont pas écoutées ; il en résulte que souvent nos fabricats sont refusés parce qu'ils ne sont pas conformes au goût des consommateurs, et qui la préférence est accordée aux produits de la fabrication anglaise et allemande quoique souvent plus chères.

Il s'agirait donc d'avoir des fonctionnaires qui, prenant à cœur les intérêts de notre pays, étudieraient les goûts et les besoins des contrées où ils résideraient et parviendraient ainsi à rendre d’immenses services à notre commerce.

Je désirerais donc que, pour l'année prochaine, le gouvernement pût nous proposer au budget une augmentation de crédit pour au moins une trentaine d'agents nouveaux convenablement rétribués.

Il faudrait augmenter le budget des affaires étrangères.

- Une voix. - Ou diminuer la diplomatie.

M. d'Hane-Steenhuyseµ. - Je sais qu'il est des personnes qui sont de cet avis ; pour moi, je ne voudrais pas diminuer le corps diplomatique actuel, mais aussi je m'opposerais à toute augmentation de ce genre. De plus, je proposerai de n'accorder à la nouvelle mission du Mexique, que le traitement alloué au ministre résidant à Rio.

Je me suis vainement efforcé de trouver les motifs qui ont fait demander pour le résident de Mexico 42,000 fr., alors que le Brésil n'en a que 22,000 et Lisbonne 20,000.

Dans sa réponse à la section centrale, M. le ministre a dit, qu'à Washington le résident avait 22,000 fr., que c'était trop peu, et que, la vie étant plus chère à Mexico qu'à Washington, il faut mieux traiter le Mexique que les Etats-Unis, le premier ayant de plus une autre forme de gouvernement.

Je me permettrai de dire que la vie à Rio est au moins aussi chère qu'à Mexico ; la distance est plus grande et la forme gouvernementale est la même. En outre la Chambre doit prendre en considération le danger permanent qu'on court à Rio, tandis qu'on n'en court aucun à Mexico, A Rio la fièvre jaune est endémique, à Mexico elle n'existe pas. Si la cour mexicaine résidait à la Vera-Cruz, notre envoyé se trouverait dans les mêmes conditions que celui de Rio,

Quand nous serons à cet article, je ferai la proposition de réduire l'allocation de 20,000 fr. et de mettre le ministre du Mexique sur le même pied que celui du Brésil,

Je bornerai là mes observations dans la discussion générale, me réservant de reprendre la parole dans la discussion des articles.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - L'honorable représentant d'Anvers a signalé la diminution du commerce maritime d'Anvers depuis 1830. Il aurait dû faire observer qu'il ne parlait que des navires belges occupés au commerce d'Anvers, car lui, représentant d'Anven, doit savoir que le commerce maritime général a pris des (page 75) développements considérables, non par des navires anversois, du moins par des navires quelconques. Si les Anversois ne consacrent pas leur activité à la construction et à l'armement de navires, ce n'est pas la faute du gouvernement ; on voudra bien, je pense, le trouver innocent en ce point.

Je regrette qu'au lieu de dépenser leur énergie à l'intérieur, ils ne la consacrent pas davantage à des opérations à l'étranger. S'ils le faisaient tout le monde y gagnerait et y applaudirait.

Quoi qu'il en soit, s'il est un fait incontestable en Belgique, c'est le développement considérable du mouvement commercial depuis 1830.

L'honorable membre croit avoir trouvé un remède à la prétendue décadence qu'il signale. Lui, adversaire de l'intervention du gouvernement en matière commerciale...

M. d'Hane-Steenhuyseµ. - Dans les affaires.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - ... il propose pour remède d'augmenter le nombre de nos consuls rétribués. Voilà, selon lui, l'unique remède à appliquer à l'état de prétendue souffrance du commerce. Ce remède a été essayé depuis longtemps. Il y au budget une somme de 160,000 fr. destinés à rétribuer des consuls. S'il veut que l'on crée de nouveaux consulats rétribués, je le prie d'indiquer les places où ils seraient utiles.

Nous en avons un assez grand nombre ; ce qu'il y aurait à faire, ce sera peut-être d'augmenter leurs traitements ; nos consuls rétribués en Amérique comme en Asie se plaignent de l'insuffisance de leur traitement. Outre les consuls rétribués, nous avons des agents consulaires non rétribués, répartis sur la plupart des points commerciaux du globe. Ces agents recueillent et transmettent des renseignements propres à éclairer le commerce et l'industrie du pays. Leurs rapports reçoivent une grande publicité. Fournir des éclaircissements et des directions, là se borne l'intervention du gouvernement. Tous les jours, le Moniteur publie des rapports consulaires qui sont ensuite réunis en un recueil qu'on livre à très bon compte aux intéressés ; mais, je le dis à regret, il y a très peu d'abonnés à ce recueil, qni cependant renferme des documents très importants.

Les consuls rétribués ne doivent pas faire le commerce pour leur compte, c'est là un avantage sans doute, mais aussi c'est là un inconvénient, car ils ne sont pas toujours pratiquement aussi bien renseignés que ceux qui font des opérations et entretiennent des relations commerciales pour leur compte.

On dit que l'on nomme aux consulats belges des étrangers.

Messieurs, les Belges établis à l'étranger dans de bonnes conditions ont naturellement la préférence quand il s'agit de pourvoir à des consulats ; mais il est des pays où il n'y a pas de Belges, et dès lors il faut choisir des étrangers ; mais partout où il y a des Belges dans une condition convenable, ils ont la préférence, et, lorsqu'ils ont rendu des services gratuits et désintéressés pendant un grand nombre d'années, il arrive, comme on vient de le dire, qu'on récompense leurs services par un ruban.

Je ne puis croire que l'honorable représentant d'Anvers trouve cette rémunération blâmable ou onéreuse pour le trésor.

Si les distinctions honorifiques sont bien placées, c'est surtout lorsqu'elles s'adressent à ceux qui rendent des services gratuits au pays.

Du reste, je n'ai certes pas abusé de ce mode de rémunération pour nos consuls. J'espère avoir cependant une occasion prochaine de proposer au Roi d'en récompenser quelques-uns.

Revenant au remède proposé par l'honorable représentant, je dois l'avouer, si nous n'avions à offrir au commerce pour tout remède que l'augmentation du nombre de nos consuls rétribués, je crois que le commerce ne nous saurait pas grand gré de ce nouveau sacrifice.

Il faudrait d'abord pour cela accroître les dépenses du budget, et telle n'est pas mon intention. Je trouve que la somme qui figure au budget pour rétribuer nos consuls est suffisante. Seulement le traitement de plusieurs d'entre eux ne suffit pas. En supprimant un ou deux consuls rétribués et en reportant sur les autres consulats la somme dont on disposerait ainsi, on arriverait à une meilleure situation.

Aujourd'hui je le constate avec regret, plusieurs de nos consuls à l'étranger reçoivent des traitements insuffisants.

Messieurs, on m'a demandé combien d'établissements belges pouvaient être constatés à l'étranger depuis la création des bourses de voyage.

Je ne sache pas que jusqu'ici cette tentative du gouvernement pour provoquer à l'étranger des établissements de commerce ait réussi.

Voici ce qui se passe : des bourses ont été créées en faveur de jeunes gens sortis de nos écoles de commerce et qui s'engagent à explorer les pays étrangers, et à y chercher les moyens de former des établissements.

Beaucoup de ces jeunes gens n'ont pas de fortune. Beaucoup appartiennent à des familles honnêtes, mais qui n'ont pas de grands capitaux à consacrer aux entreprises commerciales. Il leur est donc très difficile d'arriver immédiatement à créer un établissement de commerce à l’étranger.

Il serait à désirer que des fils de famille, de négociants qui ont des capitaux, fissent ces explorations à leurs frais. Quoi qu'il en soit, nos boursiers ne font pas de voyages inutiles. Ils parcourent les divers pays que le gouvernement leur indique ; ils font des rapports intéressants sur ce qu'ils observent dans ces diverses contrées ; ils y établissent des relations avec les négociants.

Je crois qu'avec le temps le pays pourra retirer des avantages des voyages de ces jeunes gens, que j'appellerai des missionnaires commerciaux ; mais pour établir des maisons de commerce à l'étranger, il faut des maisons belges qui fassent des entreprises ; on ne voudra pas, je pense, que le gouvernement se charge d'établir des maisons belges à l'étranger ; on ne proposera pas une pareille intervention de la part du Dieu-Etat. La providence gouvernementale ne peut aller jusque là.

Il faudrait que l'énergie des Belges et notamment l'énergie des Anversois se déployât à l'étranger comme à l'intérieur, et arrivât à créer des établissements solides sans l'intervention de l'Etat.

Il y a des pays moins riches et moins commerçants que la Belgique, la Suisse, par exemple, qui ont leurs établissements et leurs agents à l'étranger. Les Allemands ont leurs établissements à l'étranger, les Anglais ont leurs établissements à l'étranger. Pourquoi les Belges n'ont-ils pas en plus grand nombre leurs maisons à l'étranger ? Ceux qui en ont établi ne demandent rien au gouvernement.

Le rôle du gouvernement est d'éclairer le pays, de faciliter les moyens de transport ; mais quant à intervenir directement, à créer des maisons de commerce, à multiplier sans nécessité les dépenses pour les consulats rétribués, je ne pousse pas jusque-là l'amour de l'intervention de l'Etat. Je suis cependant un partisan de l'intervention de l'Etat, dans certaines limites.

M. d'Hane-Steenhuyseµ. - Je n'ai pas demandé cela.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Vous avez parlé d'augmenter le nombre des consulats rétribués, c'est vrai, vous n'avez rien proposé au-delà.

Quant à la légation de Mexico, nous pourrons attendre l'article du budget relatif à cette légation, pour discuter ce point.

Je dirai alors comment nous avons été amené à demander non pour un ministre résident, mais pour un ministre plénipotentiaire à Mexico, un traitement plus élevé que pour le ministre du Brésil et celui des Etats-Unis.

Maintenant si l'on veut augmenter le traitement des envoyés au Brésil et à Washington, je ne demande pas mieux.

M. Coomans. - Non, non, supprimez-les et remplacez-les par des consuls.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Je voudrais bien que l’honorable M. Coomans, qui a l'art de démontrer beaucoup de choses, me démontrât comment nos diplomates seraient remplacés utilement par des consuls. Je serais charmé d'entendre ses théories à cet égard. Pour le moment, je ne crois pas avoir autre chose à ajouter. Si d'autres observations se produisent dans la discussion générale, j'y répondrai.

M. d'Hane-Steenhuyseµ. - Messieurs, M. le ministre des affaires étrangères n'a pas saisi la portée de mes paroles ; il se plaint de ce que j'ai indiqué l'accroissement du nombre des consuls comme seul moyen de porter remède à l'état de marasme dans lequel se trouve notre marine, à l'état peut-être défectueux dans lequel se trouve notre commerce, malgré l'augmentation constatée tout à l'heure.

Il me paraît que nous discutons dans ce moment-ci le budget des affaires étrangères, et je trouve que l'un des moyens que l'on pourrait employer serait non pas d'augmenter le nombre des agents diplomatiques qui n'ont qu'une valeur relative au point de vue commercial, mais bien d'augmenter le nombre de nos consuls rétribués.

C'est un moyen qui ne peut être accepté et qui ne gênera pas énormément les finances de l'Etat.

Du reste, on pourrait trouver sur le budget de la guerre les ressources nécessaires pour payer l'augmentation demandée.

M. le ministre des affaires étrangères nous dit : Les Anversois feraient mieux d'employer leur énergie à l'extérieur qu'à l'intérieur.

Il ne m'est pas plus possible qu'à l'honorable M. Rogier de changer la nature du Belge. Il n'aime pas à s'expatrier, c'est un fait reconnu.

(page 76) Je ne demande pas que l’Etat, ainsi que le disait M. le ministre des affaires étrangères, se mette à la place des négociants, qu’il établisse des maisons de commerce, et que le commerce se passe par l’Etat et au profit de l’Etat. Je demande simplement que l’Etat pose des jalons au loin ; je demande que l’Etat envoie des Belges à l’étranger ; puisqu’il n’y a pas moyen de les décide rà s’y rendre d’eux-mêmes, il faut les engager par la nomination de consuls. Il faut travailler au loin dans l’intérêt du commerce belge.

Voilà le but de mes observations et je crois qu’elles sont fort rationnelles, fort logiques.

M. le ministre des affaires étrangères a fait remarquer à la Chambre que, depuis 1830, le commerce belge avait doublé. Je n’ai pas dit le contraire, j’ai accusé, dans le commerce belge, une marche moins rigide que dans celui fait par d’autres pays. Il est évident que le commerce d’Anvers a dû faire quelques progrès, mais ce n’est qu’un progrès relatif.

Et aujourd’hui, si l’on ne s’était pas ingénié à entourer Anvers de ses terribles engins de destruction, il est évident que son port deviendrait l’un des premiers ports du monde.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Les étrangers n’ont pas peur ; ils viennent en foule à Anvers.

M. d’Hane-Steenhuyseµ. - M. le ministre des affaires étrangères dit que l’on vient en foule à Anvers. Je vais avoir l’honneur de vous citer quelques chiffres. Vous pouvez les constater dans les statistiques officielles. L’honorable ministre peut s’en rendre compte par lui-même et il s’apercevra, après inspection, que j’ai parfaitement raison et qu’il est dans l’erreur.

Etablissant un parallèle entre les ports suivants : Hambourg, Brême, Amsterdam, Liverpool, Le Havre, Boulogne, Anvers, Bordeaux, Dunkerque, Nantes, Dieppe, Rouen et Calais, je trouve qu’Anvers n’arrive qu’au n°6 ; non pas après Hambourg, on le comprend ; Hambourg est la première place de commerce du continent ; non pas après Amsterdam, après Liverpool, après le Havre, mais après Boulogne.

MfFOµ. - C’est une erreur.

M. d’Hane-Steenhuyseµ. - Il s’est fait à Boulogne, en 1863, importations et exportations comprises, pour 1,000,000 d’affaires, et à Anvers pour environ 480,000.

Hambourg fait à peu près un milliard et demi d’affaires ; Amsterdam pour un milliard 85 millions ; Liverpool pour à peu près 2 1/2 milliards.

Or si vous établissez un parallèle entre ce qui se faisait dans ces différents ports en 1830 et ce qui s’y fait aujourd’hui, vous trouverez qu’ils ont gagné à peu près 500 p. c., tandis qu’Anvers, de l’aveu de M. le ministre, n’a gagné que 100 p. c.

M. Bouvierµ. - Est-ce la faute du gouvernement ou celle des Anversois ?

M. d’Hane-Steenhuyseµ. - M. le ministre des affaires étrangères me dit que les étrangers arrivent en foule à Anvers ; c’est au point de vue de la navigation que l’honorable M. Rogier a dit cela. Eh bien, là encore je trouve une réciprocité marquée pour ce qui regarde Anvers, lorsqu’on la compare aux autres ports que j’ai cités.

Consultons en effet la statistique, et nous trouvons qu’en 1856 il est entré à Rotterdam 2,363 navires, au Havre 7,623 navires, à Liverpool 20,886 navires, à Hambourg 4,082 navires, et 12,798 en compte la navigation du Haut et du Bas-Elbe.

A Anvers, il est entré, en 1856, 1,920 navires.

Depuis cette époque, les chiffres n’ont fait qu’augmenter chaque année dans des proportions considérables pour les ports étrangers, et la ville d’Anvers accuse pour elle, en 1863, celui de 2,513 navires.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Je voudrais savoir quel est le but des observations de l’honorable représentant.

MpVµ. - La parole est à M. Goblet.

M. Goblet. - L’heure est très avancée.

Je veux présenter un amendement sur la pêche. Si la Chambre veut que j’en commece les développements aujourd’hui, je suis prêt.

- Plusieurs membres. - A demain.

M. Goblet. - Je me bornerai à donner quelques explications.

L’année dernière, la Chambre a voté sur les primes pour la pêche une diminution effective, quoique non réelle, de 10,000 fr. Je dis non réelle, parce qu’il y avait trois mois d’exercice écoulés lorsque le budget a été voté.

Mais la diminution de la prime sur la pêche a été portée à 10,000 fr. Cette année elle n’est que 5,000 fr. C’est toujours le même système, on revient sur ses pas.

Les motifs qui ont décidé la Chambre à voter l’année dernière une diminution de 10,000 fr. sont plus sérieux encore cette année-ci ; il faut en finir avec les primes. C’est par esprit de conciliation que l’honorable M. Sabatier vous a proposé, l’année dernière, de ne réduire le chiffre que de 10,000 fr.

C’est encore par esprit de conciliation que je propose à la Chambre de procéder cette année-ci comme elle a procédé l’année dernière.

MpVµ. - L’amendement de M. Goblet sera imprimé et distribué. La Chambre s’en occupera en même temps que de l’article qu’il concerne.

La séance est levée à 4 heures et demie.