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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 26 août 1864

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session extraordinaire de 1864)

(Présidence de M. Lange, doyen d'âgeµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. G. de Borchgrave, secrétaire provisoireµ, (page 25) procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. Jacobs, secrétaire provisoireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

MpLangeµ. - M. Jamar, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé de deux jours.

- Ce congé est accordé.

MM. Coomans et Warocqué, dont les pouvoirs ont été vérifiés dans une précédente séance, prêtent serment.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement de Louvain

M. de Brouckere. - Messieurs, dans votre séance de mercredi, je vous ai fait, au nom de votre deuxième commission, un premier rapport, sur l'élection de Louvain.

Par ce rapport, je vous ai fait connaître l'incident qui a surgi dans plusieurs bureaux à l'occasion d'un certain nombre de bulletins que les uns prétendaient être autographiés, tandis que les autres soutenaient qu'ils avaient été écrits à la main.

Ces bulletins s'élèvent au nombre de 489, dont 122 ont été annulés dans deux bureaux et 367 ont été déclarés valables par quatre autres bureaux.

Conformément aux conclusions que je vous avais présentées, vous avez autorisé votre commission à soumettre tous ces bulletins à une expertise, aussi bien ceux qui avaient été déclarés valables que ceux qui avaient été annulés.

A la suite de cette décision, la deuxième commission a nommé experts trois savants chimistes, M. Jouret, professeur à l'école militaire, M. Henri, professeur à l'université de Louvain, et M. Francqui, professeur à l'université de Bruxelles.

Les 489 bulletins leur ont été remis avec les indications et les instructions que nous avons crues convenables, et ces messieurs se sont immédiatement livrés à l'examen que nous leur avions demandé de faire.

Ils viennent de remettre leur rapport à votre deuxième commission, et il résulte de ce rapport que tous les bulletins indistinctement ont été écrits à la main. Ils en ont fait la déclaration unanime et de la manière la plus positive.

En conséquence, votre deuxième commission vous propose d'admettre comme membres de la Chambre des représentants MM. Schollaert, Delcour, Landeloos et Beeckman.

Je dépose sur le bureau le rapport des experts, les procès-verbaux des séances de votre deuxième commission et tous les bulletins qui ont donné lieu à contestation.

Je dois faire remarquer que, par suite des conclusions que je viens de vous présenter, si elles sont admises, 122 voix doivent être ajoutées au nombre des voix que les quatre élus ont obtenues.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées. MM. Delcour et Landeloos prêtent serment.

Arrondissement de Nivelles

MpLangeµ. - La discussion est reprise sur les élections de Nivelles.

M. Nothomb. - Messieurs, je vous prie de me permettre de compléter rapidement les observations que j'ai commencées hier.

Je reprends la discussion au point où je l'avais laissée. J'en étais à la lecture de quelques extraits du rapport présenté par l'honorable M. Vervoort, à propos d'une question identique relative à l'élection de M. Frison. Je tiens d'autant plus à rappeler l'opinion de M. Vervoort, qu'à raison de son auteur elle est de nature à n'inspirer aucune espèce de défiance à mes contradicteurs, et que, d'un autre côté, elle détermine, selon moi, de la manière la plus précise les véritables règles dans une matière aussi délicate. Voici comment s'exprimait l'honorable M. Vervoort :

« La loi veut une désignation suffisante, mais elle ne prescrit, à cet égard, aucune formule. Il faut donc consulter, avant tout, l'intention des électeurs.

« Si le nom inscrit sur un bulletin est celui d'un candidat ouvertement indiqué et reconnu comme tel, s'il ne peut pas raisonnablement s'appliquer à un autre éligible, malgré l'identité de nom et de lieu d'habitation, si la lutte est longue, ardente et appelle l'attention soutenue des électeurs sur ce candidat, comment pourrait-on lui enlever des suffrages qui portent de courtes indications, précisément parce que l'électeur croit la mention du nom suffisante et le doute impossible ?

« Quand, par sa position et sou titre de candidat, celui-ci se trouve naturellement indiqué, la nomenclature des prénoms, de la qualité, de la demeure (quoique toujours désirable) n'est plus indispensable pour arriver à une désignation suffisante, c'est-à-dire à une désignation qui ne permette pas de soulever un doute sérieux et consciencieux. »

Vous l'entendez, messieurs.

MfFOµ. - Oui ! Mais il y a encore quelque autre chose dans le document dont vous parlez !

M. Nothomb. - Je prends l'extrait dans un journal, tel que je l'ai trouvé et je suis convaincu qu'il est exact. Au surplus, M. le ministre veuillez-le compléter.

MfFPµ. - Le journal s'est arrêté bien à propos ! On aura sans doute jugé inutile de reproduire la conclusion du rapporteur. Mais je pense qu'il n'est pas sans intérêt de la rappeler à la Chambre.

Après les considérations générales, citées par l'honorable M. Nothomb, le rapport de M. Vervoort, que l'on invoque, conclut en ces termes : « Le bureau, pris parmi les électeurs, est mieux à même qu’aucune autre autorité de statuer sur la suffisance de la désignation renfermée dans les bulletins électoraux. Aussi, la loi lui confère ce mandat. Il est vrai que c'est à charge du droit de réclamation, mais la Chambre ne saurait, selon nous, sans de sérieuses raisons, s'éloigner de la décision du bureau et, dans le doute, sa décision, nous paraît devoir être respectée. »

C'est ce qui a été adopté par la Chambre. La décision du bureau doit donc être maintenue, à moins que l'on ne prouve qu'il y a eu erreur et ce n'est pas certainement ce qui se présente dans le cas qui nous occupe.

M. Nothomb. - C'est tout ? Eh bien, je ne vois pas en quoi les paroles que vient de citer l'honorable M. Frère peuvent affaiblir l'induction que je tire du rapport de M. Vervoort. Tout au contraire, car. Si jamais il y a eu de sérieuses raisons de s'écarter de la décision d'un bureau, c'est bien ici.

J'ai déjà répondu hier à cette objection, la seule qui ait été présentée par l'honorable M. de Rongé ; elle tend à faire accorder aux bureaux locaux l'omnipotence en matière de vérification des pouvoirs. C'est, messieurs, nous demander l'abdication des droits de la Chambre si nous n'avons plus le droit et le devoir de contrôler les décisions des bureaux, si nous devons nous incliner toujours et quand même devant ces déclarations, mais alors c'en est fait de notre prérogative la plus sérieuse et nous ne serons plus ici que pour enregistrer humblement les résolutions prises ailleurs.

Et comment le sont-elles souvent ? Dans des conditions où l'impartialité n'est pas aussi grande que dans cette assemblée, qui juge les choses de plus haut, dans une atmosphère plus sereine, moins agitée que celle des bureaux électoraux, qui décident généralement au milieu de la plus vive agitation, sous l'empire des passions les plus ardentes, et rendent ces décisions arbitrairement sans les expliquer, sans les motiver. Et, dans ce système, que devient le droit de réclamation ? Un vain mot. C'est la Chambre, en cas de contestation, qui est appelée à statuer définitivement et à déclarer souverainement quel est le candidat élu.

Je n'admets donc pas cette doctrine, et hier déjà, je l'ai dit, je n'entends pas plus m'asservir aux résolutions des bureaux électoraux que m'incliner toujours et quand même devant les décisions de l'autorité judiciaire.

En examinant ces décisions j'use de mon droit de critique, qui appartient à tout citoyen, qui appartient surtout à ceux qui représentent ici la nation.

J'ajoute, messieurs, que le rapport de M. Vervoort devrait exercer une influence d'autant plus vive sur notre décision qu'on le croirait écrit expressément pour l'incident de Nivelles.

Sur quoi s'appuyait M. Vervoort pour demander la validation de l'élection de M. Frison ? D'abord sur ce fait que la lutte avait été longue. Or, Dieu merci ! elle a été longue aussi pour M. le comte Ferdinand de Meeûs : voilà un an qu'elle dure ; voilà trois fois en un an que M. le comte Ferdinand de Meeûs est candidat. (Interruption.)

M. Bouvier-Evenepoelµ. - Il le sera longtemps encore.

M. Nothomb. - Il est candidat permanent depuis un an, et voulez-vous que j'ajoute qu'il est candidat imperturbable ? Mais il fait du chemin. (Interruption.) Permettez-moi donc de continuer ; je ne dis rien, je pense, de contraire aux convenances parlementaires.

Je dis que M. le comte de Meeûs était un candidat désigné d'une manière éclatante au corps électoral de Nivelles : trois fois depuis un an il s'est présenté ; la première fois il a eu 30 à 40 voix de minorité ; la seconde (page 26) fois, cette minorité était réduite à 9 voix ; enfin dans la troisième épreuve la majorité réelle et effective.

Voilà le chemin qu’il a fait ; et l’on viendrait prétendre qu’un pareil candidat n’est pas désigné d’une manière incontestable et comme le seul possible, à l’attention et à la volonté de l’électeur ! Cela n’est pas soutenable.

M. Vervoort parlait ensuite de lutte « ardente » ; mais n’a-t-elle pas été ardente à Nivelles ? On a, pendant trois semaines, discuté les candidats, les journaux ne se sont occupés que de cela ! on en a même créé de spéciaux pour la circonstance ; il faut donc reconnaître que nulle part la lutte n’a été ni plus longue, ni plus animée.

En un mot, toutes les conditions voulues par M. Vervoort et qui servaient à formuler les conclusions que vous avez adoptées se rencontrent et de la manière la plus évidente, et je dis, après lui, qu’il est impossible d’émettre un doute sérieux et consciencieux sur l’admission de M. le comte Ferdinand de Meeûs. A moins de fouler aux pieds votre propre précédent, vous devez la prononcer.

J’invoque encore d’autres précédents posés dans des circonstances certainement désintéressées pour nous ; je veux parler de précédents du gouvernement parlementaire de France. Il est de jurisprudence, dans ce pays, qu’on doit attribuer au candidat qui se présente « notoirement seul de son nom » tous les bulletins portant ce nom sans désignation expresse, alors même qu’il reste des homonymes sur la liste du collège. Ceci répond à un autre objet que l’on fait, objection basée sur ce qu’il existe des homonymes de M. le comte de Meeûs. Or, en France, malgré cette coïncidence, on a toujours, dans tous les cas, attribué les bulletins qui ne portaient pas de désignation bien précise, au seul candidat notoirement sur les rangs. Les précédents fourmillent ; il n’y a pour ainsi dire pas eu de vérification de pouvoirs en France où pareille question ne se soit présentée.

Je me bornerai à vous en coter un seul qui s’est produit en 1842 et je l’indique parce que vous y trouverez une singulière analogie avec notre incident de Nivelles.

Dans la séance du 28 juillet 1842, il s’agissait de la vérification des pouvoirs de M. le baron de Maingoval ; on avait protesté contre cette élection par une réclamation signée de 97 personnes et qui se fondait sur les motifs suivants.

Je lis le « Moniteur universel », séance du 28 juillet 1842, page 1697 :

« M. de Maingoval n’a eu que 3 voix de plus que la majorité. Parmi les suffrages qui lui ont été attribués, 18 doivent être considérés comme douteux. Le doute se fonderait sur ce qu’il y a dans le collèges deux frères de M. de Maingoval qui sont électeurs et éligibles. L’élu porte le nom de Félix de Maingoval ; les autres se nomment Prosper et Fortuné. Les 18 voix contestées ont été partagées ainsi qu’il suit : 8 bulletins portaient Maingoval seulement, 6 portaient de Maingoval, enfin 4 portaient F. de Maingoval. Comme M. de Maingoval a un frère qui s’appelle Fortuné, on soutient que la désignation F. de Maingoval peut aussi bien s’appliquer à lui qu’à M. Félix de Maingoval.

« On a ajouté que plusieurs électeurs qui sont fermiers de terres appartenant aux deux frères ont pu être dans l’erreur et vouloir donner leurs voix plutôt à M. Fortuné Maingoval qu’à M. Félix Maingoval.

« On a indiqué une autre circonstance : M. de Maingoval (Félix), celui qui a été élu, est généralement connu sous le nom de baron de Maingoval, tandis que l’autre est connu sous le nom de Fortuné de Maingoval ; et on fait remarquer que les lettres adressées à M. Félix de Maingoval aux électeurs de Valenciennes sont signées B. de Maingoval (baron de Maingoval).

« Tels sont les points essentiels sur lesquels porte la protestation.

« Les amis de M. Félix de Maingoval ont, de leur côté, rédigé une contre-protestation et soutiennent qu’il n’y avait dans le collège de « candidat sérieux » du nom de Maingoval que M. Félix ; que cela est de notoriété publique et résulte de tout ce qui a été dit et publié à l’occasion des élections ; qu’il n’a jamais été question, ni dans les journaux ni dans les réunions, de MM. Prosper ou Fortuné de Maingoval ; que le jour de l’élection les bulletins imprimés distribués à la porte du collège n’indiquaient que deux concurrents ; d’une part, M. Boulanger ; d’autre part, M. Félix de Maingoval. »

Voici maintenant ce qu’a dit la commission de vérification des pouvoirs :

« Après avoir pesé ces arguments divers, votre sixième bureau a pensé qu’il n’y avait aucun motif de considérer comme douteux les 18 bulletins qui ont fait l’objet de la réclamation ; l’intention des électeurs lui a paru certaine ; en conséquence, il m’a chargé de vous proposer l’admission de M. Félix de Maingoval, qui d’ailleurs satisfait aux exigences de la loi sous le double rapport de l’âge et du cens.

« - L’admission est prononcée. »

Dans la séance suivante (29 juillet 1842), il s’est présenté également une difficulté de ce genre qui portait sur un nom qui pouvait très aisément donner lieu à un doute. C’était, à propos de l’élection d’un Larochejacquelein. On a attribué à l’élu, comme valables, tous les bulletins portant le nom de Larochejacquelein, sans plus ; cependant tout le monde sait que ce nom est porté en France par plusieurs personnes.

Je pourrais multiplier ces citations ; mais je ne veux pas en fatiguer la Chambre. Elles me suffisent pour affirmer que la règle constante sous le gouvernement parlementaire en France, a été d’accepter pour le seul candidat notoirement sur les rangs, les bulletins ne donnant que le nom seul, alors même qu’il y a des homonymes sur la liste électorale.

Pour les élections municipales et départementales, la même jurisprudence a été constamment suivie par le conseil d’Etat. Les exemples abondent dans les décisions de ce corps. En voici quelques-uns :

D’abord une décision du 27 février 1847, portant une réclamation adressée au conseil d’Etat, au sujet d’un grief tiré de ce que 4 bulletins portant seulement le nom, auraient été attribués à un candidat, bien qu’il ne fût pas seul de ce nom sur le texte des éligibles.

« Louis-Philippe, etc.

« Vu la loi du 22 juin 1833 ;

« Sur le grief tiré de ce que quatre bulletins portant seulement le nom Lamarque auraient été attribués au sieur Jean-Baptiste Lamarque ;

« Considérant que le sieur Jean-Baptiste Lamarque était notoirement le seul candidat à l’élection du nom de Lamarque ; que, dès lors, c’est avec raison que les quatre bulletins susmentionnés lui ont été attribués. »

Dans un autre cas, des bulletins portant seulement le nom n’avaient pas été attribués au candidat.

Le conseil d’Etat, saisi de la réclamation, a restitué à ce candidat des bulletins qui lui avaient été indûment enlevés, et toujours par le même motif :

« Considérant que le sieur Vincendon était le seul candidat notoire de ce nom ; que, dès lors, le bulletin portant Vincendon devait lui être attribué. »

Ainsi, partout la même règle : la notoriété du candidat doit déterminer l’attribution du bulletin.

Je puis donc réunir et l’autorité de la majorité libérale qui a consacré l’opinion de M. Vervoort en 1857, l’autorité parlementaire en France et celle du conseil d’Etat. Toutes concourent à fixer le principe en vertu duquel nous vous demandons l’admission du comte Ferdinand de Meeûs.

La contestation se résume en ces quelques points ; il n’y avait pas d’autre candidat de ce nom sur les rangs dans l’arrondissement de Nivelles et il n’y en a jamais eu. La discussion de cette candidature avait été longue et ardente.

Elle avait été d’une notoriété publique telle, que raisonnablement et consciencieusement personne n’a pu penser à un autre candidat de ce nom.

Aussi, messieurs, telle a été la première impression du bureau de Nivelles. En lisant les pièces, je constate que l’on a d’abord tenu comme valables les bulletins et que ce n’est que sur une réclamation, en quelque sorte posthume, qu’ils ont été annulés. Et puisque l’on évoque la décision de sbureaux électoraux locaux comme la seule bonne, je ferai remarquer que l’appréciation n’a pas été uniforme à Nivelles même, car dans un autre bureau on a validé des bulletins portant simplement les noms de MM. Nélis et Mascart.

On ne saurait donc, messieurs, trop s’élever contre cette doctrine du respect absolu des décision des collèges électoraux.

Que devient donc, je le répète en terminant, le droit des citoyens lésés, que devient le droit de réclamation si toujours et quand même il faut aveuglément se ranger à la décision des bureaux électoraux et subordonner à cette résolution la vérification des pouvoirs ? Ce serait l’abdication de notre prérogative la plus importante.

Ainsi, messieurs, à tous les points de vue, en raison, en équité, en droit, en bonne foi, je dirai même, en honnêteté politique, vous ne pouvez vous refuser à proclamer l’admission du comte de Meeûs, demandée par 700 électeurs de l’arrondissement de Nivelles, dont les réclamations sont déposées sur votre bureau. Nous sollicitons cette décision au nom de l’impartialité, au nom de la loyauté politique.

Nous ne pouvons croire que la majorité nouvelle veuille signaler son avénement par un acte d’injustice et de partialité criante. Si vous le faites, vous vous exposez infailliblement à ce que l’on dise qu’il y a deux représentants de l’arrondissement de Nivelles, l’un accepté par vous quoique non élu, l’autre refusé bien qu’élu ; deux représentants, l’un le produit de la complaisance politique, et celui-là siégera, l’autre le produit de la volonté claire et manifeste du corps électoral, et celui-là ne siégera pas.

- M. Schollaert, dont les pouvoirs ont été vérifiés, prête serment.

M. Lelièvre. - (page 27) Il est impossible de ne pas reconnaître la validité de l'élection de M. le Hardy de Beaulieu.

Il est d'abord à remarquer que les bureaux de Nivelles ont adopté une règle uniforme à l'égard de tous les candidats. C'est ainsi qu'on a déclaré nuls un grand nombre de suffrages donnés à MM. Mascart et Le Hardy, pour cause de désignation insuffisante.

Il était donc rationnel de suivre le même mode de procéder vis-à-vis de M. de Meeûs.

Les bulletins déclarés nuls à son égard n'ont donc pas dû lui être attribués, puisque des bulletins contenant des désignations analogues avaient été déclarés nuls à l'égard de ses compétiteurs.

Du moment qu'on admet pour principe que les désignations doivent être telles que le candidat soit indiqué de manière à ne pouvoir être confondu avec une autre personne, il est clair que les bulletins contestés ont dû être déclarés nuls. C'est une conséquence nécessaire de la règle adoptée par les bureaux d'une manière uniforme à l'égard de tous les candidats, mesure contre laquelle il ne s'est élevé aucune réclamation.

Déclarer valables dans l'espèce les suffrages au profit de M. de Meeûs, ce serait une véritable injustice, puisque des bulletins analogues n'ont pas profité à MM. Mascart et Le Hardy de Beaulieu.

Il se présente, du reste, une circonstance remarquable et même décisive, c'est qu'avant le ballottage personne n'a réclamé contre l'annulation des bulletins dont il s'agit.

Cette annulation a donc reçu l'assentiment de tous. :

Après le ballottage la contestation n'était plus possible, les choses ayant cessé d'être entières.

Personne n'ayant réclamé contre l'annulation des bulletins dont il s'agit, il est évident que le ballottage a été régulièrement et légalement ordonné par le bureau principal.

Cette mesure a été décrétée sans protestation, ni réserve de la part de qui que ce fût. Dès lors, il faut bien en accepter les résultats.

Si le ballottage a dû être ordonné, alors que personne ne réclamait contre l'annulation des bulletins, il est évident que le résultat du scrutin, conséquence d'une mesure légitime, ne saurait être frappé de nullité.

Une dernière considération qui ne me permet pas d'élever le moindre doute sur la validité des opérations, c'est que bien certainement la teneur des bulletins contestés faisait naître des doutes sérieux sur leur validité, sur la personne à laquelle ils étaient attribués.

Or, le doute qui pouvait se présenter à cet égard a été tranché par le corps électoral lui-même, qui lors du ballottage l'a résolu au profit de l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu.

Nous avons donc le jugement du corps électoral lui-même, qui est venu confirmer la décision du bureau.

Or, il est impossible que la Chambre n'accepte pas à cet égard l'arrêt prononcé par les électeurs eux-mêmes.

J'appelle toute l'attention de la Chambre sur le nombre des bulletins, obtenus au ballottage par M. Le Hardy de Beaulieu. Ce nombre si remarquable ne permet pas d'élever le moindre douté sur la volonté du corps électoral, qui est la loi suprême en pareille matière. Ne perdez pas de vue que presque tous les électeurs qui ont voté au premier scrutin ont également pris part au ballottage.

M. Le Hardy a obtenu un nombre de suffrages supérieur à celui qui lui avait été attribué par le bureau au premier tour de scrutin.

Dans cet état de choses, le jugement du corps électoral me paraît être d'une évidence incontestable. Ce sont ces considérations qui me détermineront à voter l'admission de M. Le Hardy.

M. Pirmez. - Je crois que la Chambre doit adopter les conclusions de la commission et admettre dans son sein l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu. En venant soutenir cette opinion, je ne fais que me conformer aux principes que j'ai admis en 1857 lorsqu'il s'est agi de l'élection d'un de mes amis politiques, de notre ancien collègue M. Frison.

Lors de la discussion de cette élection, l’honorable M. Vervoort a fait un rapport dans une partie duquel il a émis la doctrine que l'honorable M. Nothomb vient de développer.

L'honorable M. Nothomb a oublié de vous dire que cette partie même du rapport de l'honorable M. Vervoort a été combattue par presque tous ses amis politiques, et dans cette circonstance j'ai voté, avec plusieurs des membres de la gauche, dans le même sens.

Je crois que j'ai voté alors conformément aux véritables principes et c'est ce qui m'autorise à venir les défendre encore aujourd'hui.

La question est celle-ci : la loi électorale veut, à peine de nullité, que la désignation des bulletins soit suffisante ; que faut-il entendre par là ?

Faut-il ne voir une désignation suffisante que dans celle qui désigne l’élu de manière qu'il ne puisse être confondu avec une autre personne ?

Peut-on, au contraire, admettre que la désignation est suffisante même lorsqu'elle s'applique à plusieurs individus, mais qu'on peut arriver, par des circonstances étrangères au bulletin, à présumer en faveur de qui l'électeur a voulu voter ?

Lorsque l'honorable M. Vervoort a soutenu cette dernière opinion, l'honorable M. Dumortier a constaté que jamais ces principes n'avaient été admis. Voici ce qu'il disait à cette époque :

« Maintenant, messieurs, dans son rapport, M. Vervoort vient de dire que si une lutte a été longue, que si les candidats sont connus, alors on doit admettre les bulletins comme ils se présentent.

« J'admets cette jurisprudence, elle me paraît bonne. Mais elle n'a jamais été admise jusqu'ici. Je voudrais qu'elle le fût, mais, je le répète, jusqu'ici dans aucune élection provinciale, municipale, dans aucune localité ce système n'a jamais été admis.

M. Thibaut. - Lisez l’interruption de l’honorable M. de Brouckere.

M. Pirmez. - Voici.

« M. de Brouckere. - Je le conteste, il n’en est pas ainsi ici.

« M. B. Dumortier. - Partout ailleurs, toutes les fois qu’il y a eu désignation insuffisante, les bulletins ont été annulés. »

A Bruxelles, je le reconnais ; on procède autrement. Mais dans la plupart des arrondissements du pays, on suit cette jurisprudence, et ce que l'honorable M. Dumortier a dit, et maintenu est parfaitement exact.

L'honorable M. Malou soutenait la même opinion que l'honorable M. Dumortier. Partant de ce qu'il avait proposé à la Chambre de décider dans l'élection de M. le prince de Chimay, M. Malou disait : « Ce n'était pas une exception à la règle, mais l’application de la règle qui qui a servi de base constante à la jurisprudence, règle d’après laquelle la désignation doit être complète, soit s’appliquer à quelqu’un et pas à tous. Il ne s'agit pas d’interpréter les intentions, mais d’appliquer les faits aux personnes qui sont éligibles.

« Le bureau de Louvain a fait une interprétation très judicieuse des principes de la jurisprudence.

« Ainsi, un bulletin annexé au dossier portait quatre noms, un seul a été reconnu contenir une désignât suffisante, parce qu’en Belgique il n’y a qu’une seule personne connue sous le nom de Deman d’Attenrode.

« On a écarté les trois autres noms, parce que ce n’étaient pas des désignations individuelles et en quelque sorte exclusives.

« Messieurs, que fais-je en ce moment ? J’indique quelle est la question de principe, quelle est la jurisprudence. Cette jurisprudence est-elle bonne ? »

M. Dumortier. - Je n’ai pas exprimé cette pensée d’une manière aussi absolue.

M. Pirmez. - Je lis vos paroles : « J’admets cette jurisprudence ; elle me paraît bonne, mais elle n’a jamais été admise jusqu’ici. Je voudrais qu’elle le fût ; mais, je le répète, jusqu’ici dans aucune élection provinciale, municipale, dans aucune localité, ce système n’a jamais été admis.

M. Dumortier. - C’est à propose de l’élection de M ? Frison que j’ai dit cela ; il y avait autre chose.

M. Pirmez. - Si vous voulez, je lirai encore ce que vous avez dit.

M. Dumortier. - Lisez tout mon discours. (Interruption.) Il est facile de faire pendre un homme en prenant une seule phrase de son discours ; cela est très connu.

M. Pirmez. - Vous avez constaté deux choses ; c’est que vous désiriez que la doctrine de M. Vervoort prévalût, ce qui ne vous a pas empêché de voter de manière qu’elle ne prévalût pas ; et en second lieu c’est que la jurisprudence contraire avait toujours été suivie.

L’honorable M. Malou demandait : Cette jurisprudence est-elle bonne ?

Pour moi, elle est bonne, et voici pourquoi. La loi exige une « désignation suffisante. »

Qu’est-ce qu’une désignation suffisante ?

C’est une désignation qui suffit. Or, la désignation suffit-elle, lorsque vous êtes obligé de la compléter par des circonstances étrangères au bulletin ? Si M. le comte de Meeûs n’a pas été candidat, auriez-vous pu soutenir que la désignation « le comte de Meeûs » s’appliquait uniquement à lui ? Non, certainement. C’est donc par une circonstance étrangère au bulletin, par la circonstance que M. le comte Ferdinand de Meeûs est candidat, que vous prétendez compléter la désignation. Eh bien, s’il en est ainsi, si vous invoquez cette circonstance qui est la base de toute (page 28) l’argumentation de l'honorable M. Nothomb, vous reconnaissez que la désignation n'est pas suffisante.

En effet, si elle était suffisante, vous n'auriez pas besoin de la compléter. Vous la complétez par une circonstance étrangère au bulletin, donc vous reconnaissez qu'elle n'est pas suffisante dans le bulletin.

S'il s'agissait de faire une loi, on pourrait soutenir qu'il faut être plus large, mais d'après le texte de la loi actuelle, vous commettriez une illégalité si vous proclamiez valable une désignation qui, telle qu'elle se lit dans le bulletin, est insuffisante. D'autre part, messieurs, il est, au point de vue moral, une circonstance qui doit dominer ce débat, c'est l'accord des candidats et des électeurs de Bruxelles sur la règle du combat engagé.

Quelle règle les deux partis admettaient-ils ? Il n'y a pas l'ombre d'un doute à cet égard ; pour tout le monde, pour les catholiques comme pour les libéraux, il était certain que tous les bulletins qui ne contenaient pas une désignation ne pouvaient s'appliquer qu'à un seul individu.

Ainsi lorsqu'on a fait le dépouillement des bulletins qui nous occupent, on ne les a pas attribués à M. le comte Ferdinand de Meeûs et personne n'a réclamé.

Vous savez, messieurs, quelle est la foule qui entoure les bureaux chaque fois qu'une élection est vivement disputée ; or pas une voix n'a protesté ni parmi les membres du bureau ni parmi les électeurs qui entouraient le bureau. Tout le monde a reconnu que la règle de la lutte était que les bulletins devaient contenir la désignation suffisante comme je le comprends.

On a réclamé plus tard, mais quand ? Non seulement lorsque tout était terminé pour le premier scrutin, mais après que tout le monde avait pris part au deuxième scrutin. (Interruption.)

Voyez le procès-verbal.

Maintenant, messieurs, remarquez bien que ce n'est pas seulement vis-à-vis de M. le comte de Meeûs que les choses se sont passées ainsi, mais qu'elles se sont passées de la même manière vis-à-vis des candidats libéraux.

Ainsi plusieurs bulletins portant M. Le Hardy de Beaulieu ont été annulés sans contestation, pourquoi ? Parce que les amis de M. Le Hardy de Beaulieu étaient aussi convaincus que les amis de M. de Meeûs qu'ils ne pouvaient pas réclamer.

Mais, messieurs, il y a plus ; parmi les pièces qui nous ont été distribuées, il y a un certificat ainsi conçu :

« Je soussigné, Henri Brunard, bourgmestre de Maransart, conseiller provincial du Brabant, déclare avoir été appelé, aux élections législatives qui ont, eu lieu le 11 de ce mois, à faire partie du bureau du canton de Genappe, lequel bureau était composé de MM. Piéret ; président, Collin, Gustave, Dumont, Louis, Semal-Durbecq, Maubille, Romain, et le soussigné. Je certifie également que dix à douze bulletins ainsi conçus : Nélis, Mascart, A. Le Hardy de Beaulieu et baron de Vrints de Truenfeld, bourgmestre de Malèves, ont été annulés pour les trois premiers candidats précités, attendu qu'ils ne portaient pas une désignation suffisante, plusieurs personnes domiciliées dans l'arrondissement portant le même nom. Le bureau du canton de Genappe, en prenant cette décision, s'est conformé aux usages qui ont été suivis à Nivelles dans les élections antérieures.

« Délivré à Maransart, le 22 août 1864.

« Henri Brunard. »

- Un membre. Cela n'est pas au procès-verbal.

M. Pirmez. - Je n'ai pas dit que c'était au procès-verbal, j'ai dit que c'était constaté par un certificat. Mais pourquoi cela ne se trouve-t-il pas au procès-verbal ?

Parce que tout le monde est convaincu à Nivelles que quand un suffrage peut s'appliquer à plusieurs personnes, on ne peut pas l'appliquer à l’une ou à l'autre de ces personnes, qu'il est nul.

Ainsi, messieurs, il était admis comme règle de la lutte que tout bulletin ne portant pas une désignation exclusivement applicable à un individu devait être annulé.

Dans les dix ou douze bulletins dont je viens de parler, cette règle a été appliquée aux trois premiers suffrages, tandis que le quatrième suffrage a été validé par le motif que M. de Vrints de Treuenfeld était seul de son nom.

On a dit, messieurs, que la désignation : « comte de Meeûs, propriétaire à Ohain », suffisait parce que dans les familles nobles il est d'usage de désigner l'aîné de la famille par le nom de famille précédé du titre et sans le nom de baptême.

J'avoue d'abord, messieurs, que, pour ma part, je ne connaissais pas cet usage ; j'en ai entendu parler pour la première fois dans cette discussion, et je crois que parmi les électeurs de Nivelles, il en est fort peu qui en sachent plus que moi sur ce point. Si cette règle est connue de quelques familles nobles, elle n'est certainement pas connue des roturiers, tout au moins des roturiers qui n'ont pas de prétention à la noblesse.

Vous ne pouvez donc pas venir invoquer un usage qui est complètement inconnu des paysans électeurs du canton de Nivelles.

M. Wasseige. - Qui nous dit que ce sont des bulletins de paysans ?

M. Pirmez. - Je supposerai bien volontiers que ce sont des bulletins déposés par des bourgeois de Nivelles, je pense que les bourgeois ne sont pas plus éclairés à cet égard que les paysans.

Mais, messieurs, chose remarquable, non seulement cet usage n'est pas connu des bourgeois ni des paysans, mais il n'est pas même suivi dans la famille de Meeûs.

En effet, j'ai sous les yeux la lettre de faire part par laquelle la famille de Meeûs annonce la mort de M. le comte Ferdinand-Philippe de Meeûs.

Il était bien le chef de la famille, on indique son prénom. Mais M. Ferdinand de Meeûs, le candidat, ne se conforme pas plus à l'usage que l'on invoque en sa faveur. Voici la lettre :

« La comtesse de Meeûs, mademoiselle Anna de Meeûs, le comte et la comtesse Ferdinand de Meeûs et leurs enfants, le comte et la comtesse Henri de Meeûs et leurs enfants, le comte Julien de Meeûs, le comte et la comtesse Joseph de Meeûs et leurs enfants, le baron et la baronne François de Roest d'Alkemade et leurs enfants, le comte de Bruneteau de Sainte-Suzanne et son fils, le comte Eugène de Meeûs, mademoiselle Henriette de Meeûs et le comte Paul de Meeûs ont la douleur de vous faire part de la perte cruelle qu'ils viennent de faire en la personne de leur époux, père, beau-père et grand-père, M. le comte Ferdinand-Philippe de Meeûs. »

Ainsi, messieurs, dans la famille de Meeûs cet usage n'est pas suivi dans une circonstance où l'on agit toujours avec certaines formes et où l'on observe avec soin les usages.

M. Nothomb. - Je n'ai pas invoqué cette raison.

M. Pirmez. - Je n'ai pas dit que vous ayez invoqué cette raison, mais elle a été invoquée par d'autres orateurs, et je constate avec plaisir que vous la répudiez.

Vous avez prétendu que par cette circonstance que M. le comte de Meeûs était candidat...

M. Nothomb. - Parce qu'il était notoirement le seul et unique candidat de son nom.

M. Pirmez. - Soit. Si vous me demandiez mon opinion sur l'intention des électeurs qui ont déposé les bulletins en question, je dirais qu'il est très probable qu'ils ont voulu voter pour le comte Ferdinand de Meeûs, mais comme la loi veut une désignation suffisante, nous ne pouvons pas nous contenter de probabilités. Il nous faut une certitude résultant de la désignation. Je ne la trouve pas, donc j'annule le suffrage et je l'annule pour M. le comte de Meeûs, comme je l'ai fait pour mon ami M. Léopold Frison, qui cependant avait pour lui la décision du bureau.

Maintenant, j'ai sous les yeux un écrit de M. le comte de Meeûs intitulé : « Un mot sur les associations ouvrières par M. le comte Ferdinand de Meeûs. » Qu'en conclure, messieurs, si ce n'est qu'on ne peut pas exiger de la population de l'arrondissement de Nivelles, la connaissance d'un prétendu usage que M. le comte Ferdinand de Meeûs ne suit pas lui-même ?

Enfin, messieurs, il est une circonstance bien digne de remarque ; c'est le résultat du ballottage auquel il a été procédé.

Au scrutin de ballottage, M. Le Hardy de Beaulieu a obtenu 1,385 voix, tandis qu'au premier tour de scrutin, il n'en avait obtenu que 1,373. Ainsi, le nombre de voix accordées à M. Le Hardy de Baulieu a augmenté au scrutin de ballottage. Par contre, le nombre de voix obtenues par M. le comte de Meeûs, qui, au premier tour, avait été de 1,388, est descendu à 1,337.

Je crois, messieurs, que c'est là une circonstance très remarquable, et qui ne peut s'expliquer que d'une manière : c'est qu'au premier tour de scrutin il y a eu des électeurs qui ont été forcés de voter pour M. le comte de Meeûs. (Interruption.)

S'il n'en était pas ainsi, je voudrais bien qu'on m'expliquât comment M. Le Hardy de Beaulieu a pu obtenir plus de voix au ballottage qu'au premier tour de scrutin. Il y avait moins d'électeurs au ballottage qu'au premier vote, et cependant M. Le Hardy de Beaulieu a obtenu plus de voix au ballottage qu'au premier tour de scrutin. Comment expliquer cette circonstance si ce n'est comme je le fais ?

Il est évident pour moi que si plus d'électeurs ont accordé leurs suffrages à. M. Le Hardy de Beaulieu au scrutin de ballottage qu'au premier (page 29) vote, c'est que la première fois un certain nombre d'entre eux ont dû être contraints de voter pour M. le comte de Meeûs.

M. de Naeyer. - On ne peut pas faire de telles suppositions. Est-ce que des électeurs qui n'avaient pas pris part au premier scrutin n'ont pas pu participer au ballottage ?

M. Vilain XIIII. - Il faut tenir compte des suffrages accordés à M. Le Hardy de Beaulieu qui ont été accordés au premier tour de scrutin.

M. Pirmez. - L'honorable M. de Naeyer me dit : Des électeurs absents lors du premier vote ont pu prendre part au ballottage. Au premier tour de scrutin il y avait 2,781 électeurs ; au scrutin de ballottage il n'y en avait plus que 2,731 ; et voici que, malgré cette diminution, M. Le Hardy de Beaulieu obtint plus de suffrages que la première fois ! La supposition de l'honorable M. de Naeyer tombe donc devant ce simple rapprochement.

M. de Naeyer. - Aucunement.

M. Pirmez. - Maintenant j'arrive à l'objection de l'honorable comte Vilain XIIII : des suffrages accordés à M. Le Hardy de Beaulieu ont été annulés.

Sans doute, et c'est justement la confirmation de ce que j'ai dit, car si les suffrages donnés à M. Le Hardy de Beaulieu, sans autre désignation, suffrages dont l'existence est constatée par une déclaration du bourgmestre de Maransart, si ces suffrages, dis-je, n'avaient pas été annulés, M. Le Hardy de Beaulieu eût été nommé au premier tour de scrutin.

Vous voyez donc l'injustice que vous consacreriez en annulant l'élection de M. Le Hardy. Vous auriez pour les deux candidats deux poids et deux mesures. Vous appliqueriez à M. de Meeûs une règle que l'on n'a pas suivie pour son compétiteur.

Telles sont, messieurs, les considérations qui me paraissent devoir faire admettre les conclusions de la commission. La première est une considération de droit, une considération basée sur un texte de loi que nous devons nécessairement observer : nous ne pouvons pas nous livrer à l'arbitraire ; notre devoir est d'observer scrupuleusement la loi, surtout en matière de validité d'élections, où l'on n'a que trop à craindre que des considérations étrangères au droit n'entraînent nos votes. La seconde considération, essentiellement morale, c'est qu'il s'agit d'un arrondissement où l'interprétation que je donne à la loi est admise par tout le monde. (Interruption.)

M. Thibaut. - Non ; cela n'est pas exact.

MI. Pirmezµ. - Citez un fait.

M. Thibaut. - Dans le huitième bureau, on a admis comme valables deux bulletins portant MM. Nélis et Mascart sans autre désignation.

M. Mullerµ. - C'est inexact.

M. Thibaut. - Lisez le procès-verbal.

M. Mullerµ. - C'est précisément sur le procès-verbal que je me fonde.

M. Pirmez. - Je dis, messieurs, que la seconde considération, c'est que l'interprétation que je défends est unanimement admise dans l'arrondissement de Nivelles et que dans cette situation ce n'est pas après la partie perdue qu'il faut attaquer la loi du combat, mais vaincre ou succomber d'après cette loi,

- Voix nombreuses. - La clôture ! Aux voix !

M. Dumortier. - Messieurs, quels sont les faits qui se révèlent dans l'élection de Nivelles ! C'est le point de départ de la discussion actuelle, exposons-le. Au premier scrutin, 2,789 électeurs prennent part i ; 2,781 bulletins sont déclarés valables ; majorité absolue, 1,392 ; M. le comte de Meeûs obtient 1,390 voix ; M. Le Hardy de Beaulieu en obtient 1,370. Il manque à M. le comte de Meeûs 2 voix pour être proclamé ; à M. Le Hardy de Beaulieu, 1,370 voix, il en manque 22 pour atteindre la majorité absolue. Voilà les chiffres qui résultent du procès-verbal.

Mais il existe dans l'urne des bulletins ne contenant pas, dans l'opinion des bureaux, une désignation suffisante.

Ces bulletins sont au nombre de 11 pour M. le comte de Meeûs, de 5 pour M. Le Hardy de Beaulieu ; toutefois, ce dernier chiffre serait de 17 d'après une déclaration additionnelle. Eh bien, prenons les chiffres résultant de ces documents ; quelle est la conclusion à en déduire ? M. le comte de Meeûs ayant obtenu 1,390 suffrages, si on lui tient compte des onze voix annulées, il arrive au chiffre de 1,401, dix voix de plus que la majorité absolue.

Maintenant, ajoutez aux suffrages et comptez à M. Le Hardy de Beaulieu ceux qui ont été annulés et vous n'arrivez encore qu'au chiffre de 1,387, c'est-à-dire cinq voix de moins que la majorité absolue.

Ainsi, en aucune hypothèse M, Le Hardy de Beaulieu ne pouvait être élu, et il importe assez peu par conséquent d'épiloguer sur la valeur des bulletins qui lui ont été décomptés.

L'honorable M. Le Hardy de Beaulieu est donc hors de cause et tout ce qu'on dit des bulletins portant son nom qui ont été annulés n'a aucune espèce de valeur, puisque, en lui accordant le maximum des suffrages qui pourraient lui être attribués, savoir, les 5 bulletins relatés dans le procès-verbal et les 12 bulletins mentionnés dans la note d'un scrutateur, il ne parvient pas encore à à avoir la majorité absolue.

Mais si les bulletins sont comptés à M. le comte de Meeûs, il a 10 voix de majorité absolue ; il est élu.

Voilà dans quelle situation la question se présente.

Faut-il maintenant compter, oui ou non, ces bulletins à l'honorable M. Meeûs ? Faut-il refaire le travail du bureau, comme on vient de le refaire à l'instant même pour l'élection de Louvain ?

Vous avez entendu tout à l'heure l'honorable rapporteur dire, en descendant de la tribune, qu'il fallait ajouter 122 bulletins au nombre de voix obtenu par les élus de Louvain.

Faut-il agir pour Nivelles autrement que nous venons de le faire à l'instant même pour Louvain, comme vous avez agi il y a à peine une demi-heure ? ou bien faut-il faire comme on a fait il y a quelques années c'est-à-dire voter le pour et le contre dans la même séance ? Voilà la question. Nous y viendrons tout à l'heure.

Messieurs, il ne peut y avoir aucun doute sur la personne que les bulletins portant le nom du comte de Meeûs ont voulu désigner. Déjà l'honorable député qui vient de se rasseoir a déclaré que dans sa conviction les bulletins étaient moralement donnés à M. le comté Ferdinand de Meeûs, mais qu'il ne les trouvait pas suffisants, comme énonciation au point de vue législatif. Mais moralement même pour lui il n'y a pas de doute.

Messieurs, deux objections principales out été présentes à l'admission de ces 11 votes.

D'abord on est venu prétendre que la réclamation adressée au bureau était tardive, qu'elle avait été faite après le scrutin de ballottage.

Déjà mon honorable ami M. Snoy, présent aux opérations, a protesté tout à l'heure contre cette assertion en déclarant que la réclamation avait été faite avant le scrutin de ballottage en faveur de M. le comte de Meeûs. Mais je tiens en mains la constatation de cette déclaration. Voici, messieurs une pièce dont je prendrai la confiance de vous donner lecture et qui émane du magistrat qui, je pense, a présidé le bureau principal :

« Je soussigné, juge de paix du canton de Nivelles, déclare qu'en ma qualité de président du huitième bureau électoral, j'ai remis, quoique n'y étant pas tenu par la loi, au bureau principal, avec mon procès-verbal des opérations de l'élection, neuf bulletins sur lesquels était inscrit : M. le comte de Meeûs, propriétaire à Ohain. Je déclare, en outre, que ces neuf bulletins n'ont pas été comptés à M. le comte Ferdinand de Meeûs, parce que le huitième bureau, malgré les réclamations verbales qui ont été faites de part et d'autre, a jugé qu'ils ne portaient pas une désignation suffisante.

« Nivelles, 21 août 1861.,

« Signé : De Prelle. »

M. Orts. - Le procès-verbal dit le contraire.

M. Dumortier. - Messieurs, le procès-verbal ne dit pas le contraire ; c'est inexact. Que dit le procès-verbal ? Le procès-verbal ne constate pas que la réclamation a été faite avant le scrutin de ballottage ; rien de plus ; mais vous savez, tous que le procès-verbal ne se fait que lorsque l'opération entière est terminée ; le procès-verbal dressé, on y joint les réclamations et les protestations qui ont été faites dans le cours de l'opération électorale.

On a agi dans le cas actuel comme je viens de le dire, et il est ainsi constaté que des réclamations ont été faites lors du dépouillement des bulletins, au premier scrutin, et qu'on a demandé que les bulletins contestés fussent comptés à. M. le comte de Meeûs.

Au reste, peu importe le moment où la réclamation s'est produite. C'est une circonstance insignifiante au point de vue de la réclamation même ; j'allais dire que ce n'est qu'une chicane. Dès l'instant qu'une réclamation est jointe au procès-verbal, elle a été faite en temps utile. Mais il n'est pas exact de dire que ce n'est qu'après le scrutin de ballottage qu'on est venu réclamer. Je viens de fournir la preuve évidente du contraire. Remarquez d'ailleurs que d'après l'article 34 les résolutions du bureau d'élection ne sont que provisoires, et qu'en vertu de l'article 40, c'est à la Chambre qu'il appartient de statuer sur leur validité.

Messieurs, on nous a parlé des précédents de la Chambre. L'honorable membre qui vient de se rasseoir, a invoqué une opinion produite par moi dans la séance à laquelle je faisais allusion tout à l'heure, séance dans laquelle la gauche a voté à la fois le pour et le contre, en validant (page 30) l'élection de M. Frison, et en invalidant celle de M. Thibaut, alors que cependant ils se trouvaient l'un et l'autre dans les mêmes conditions... Pardon ! ils ne se trouvaient pas dans les mêmes conditions, en ce sens que pour M, Thibaut il n'y avait pas doute, et qu'il y avait doute pour M. Frison.

L'un des deux représentants était député sortant : c'était M. Thibaut, donc son nom était connu ; il n'en était pas de même de l'autre, qui se présentait pour la première fois ; donc son nom était plus ou moins contestable. Voici comment les faits se sont passés :

En 1857, lors de la vérification des pouvoirs, trois cas entièrement identiques se sont présentés, le premier relatif à Louvain, le second relatif à Ath, le troisième relatif à Dinant.

A Louvain, on n'avait pas compté à M. de Wouters un certain nombre de votes, à cause que les bulletins ne portaient que de Wouters, bien que ces bulletins fussent la liste complète des députés sortants, parmi lesquels se trouvait M. de Wouters. Qu'à fait alors la majorité ? Elle a déclaré que ces bulletins ne pouvaient être comptés à M. de Wouters, faute de désignation suffisante, et l'élection de M. de Wouters a été annulée.

Alors est arrivée l'élection d'Ath. A Louvain, il s'agissait d'un catholique ; à Ath, il s'agissait d'un libéral, et tout à l'heure nous verrons qu'à Dinant il s'agissait encore d'un catholique. M. Frison avait été nommé à une seule voix de majorité, et les bulletins sur lesquels les contestations s'établissaient portaient la simple énonciation : « M. M. Frison ». Or, le prénom de M. Frison ne commençait point par la lettre M ; il se nommait Léopold ; et j'ai alors démontré par les listes électorales qu'il y avait, dans le canton qu'il habitait, plusieurs électeurs du nom de Frison, et que le prénom de l'un d'eux commençait par un M ; cet électeur se nommait, je crois, Marcelin Frison.

Si l'on peut établir à bon droit une contestation sur un fait de désignation insuffisante, c'est lorsque l'initiale du prénom ne se rapporte pas à l'élu qui a été proclamé. Qu'a fait la majorité prétendue libérale ? Changeant tout à coup de jurisprudence, elle a déclaré que ces bulletins devaient être comptés à M. Frison et elle a validé l'élection de M. Frison, alors que la veille, elle avait annulé l'élection de M. de Wouters, de Louvain.

Dans la même séance, on rejette l'élection de Dinant, où mon honorable ami M. Thibaut, député sortant, avait été porté sur les listes électorales avec l'honorable comte de Liedekerke.

Là encore, la majorité dépendait d'une ou de deux voix, d'une seule voix, je pense. Il y avait là trois bulletins portant tout simplement Thibaut. Eh bien, en vertu de la jurisprudence que vous avez admise dans cette même séance en attribuant à M. L. Frison les bulletins portant M. Frison, en vertu d'une jurisprudence beaucoup plus large encore puisqu'il n'y avait pas d'initiale contraire, vous deviez attribuer ces mêmes bulletins à M. Thibaut.

MfFOµ. - Ce n'est pas la jurisprudence.

M. Dumortier. - C'était une jurisprudence à l'usage du parti libéral, mais ce n’est pas ainsi que l’on procède. Nouvelle voltige, nouvelle volte-face.

De façon qu'à cette époque on a décidé le pour et le contre dans la même séance, comme aujourd’hui après avoir restitué tout à l’heure à nos amis de Louvain les bulletins qui leur avaient été enlevés dans les bureaux électoraux, on ne veut pas maintenant refaire le compte des bulletins pour Nivelles.

En bien, messieurs, voilà à quelle série d’inconséquences, à quelle série d’erreurs, la Chambre peut arriver lorsque l’esprit de parti la pousse en dehors des limites de la vérité, en dehors de sentiments de la justice !

Nous avons alors, nous conservateurs, réclamé une justice uniforme, et nous avons soutenu que s’il y avait désignation insuffisance dans les votes données à M. de Wouters, le cas devait être jugé de la même manière quant à M. Frison.

Il est évident qu’il y a ici une chose que vous ne contestez pas, que personne ne peut songer à mettre en doute, c’est que les bulletins étaient attribués à M. le comte Ferdinand de Meeûs. Ils ne portaient, il est vrai, que les mots ; « le comte de Meeus », mais il est certain que c’était le seul candidat, aucun de ses frères n’a obtenu un seul vote. Cette thèse a été développée par l’honorable M. Nothomb avec tant de talent que je n’ai rien à ajouté à ce qu’il a dit sur ce point.

Mais, dit-on, la désignation est insuffisante parce que le comte de Meeûs a plusieurs frères du même nom.

Et bien, messieurs, sans vouloir faire ici de la science héraldique, je puis rappeler une chose ; C'est que vous avez un précédent sur ce point dans l'élection du prince de Chimay, qui a eu lieu en 1852, Le prince Joseph de Chimay avait une majorité de 2 ou 3 voix et il se trouvait 4 bulletins portant uniquement « le prince de Chimay », comme aujourd'hui 11 bulletins portent pour inscription : « le comte de Meeûs ».

C'était précisément la même chose. De même qu'il y a plusieurs comtes de Meeûs, de même il y a plusieurs princes de Chimay ; il y a le prince Joseph et le prince Alphonse, et je n'oserais pas affirmer qu'ils ne fussent pas concurrents alors.

Une voixµ. - Il en a été question.

M. Dumortier. - Le prince Alphonse de Chimay a eu notoirement 46 voix à cette élection. Or, ici pas un seul vote n'a été accordé à un des frères du comte Ferdinand de Meeûs,

Par conséquent, c'est, une raison très forte à faire valoir en faveur du comte Ferdinand de Meeûs et dès lors il est bien démontré que c'est à lui que les 11 votes ont été accordés.

Mais qu'a fait la Chambre ? Sachant que, dans la noblesse, le titre appartient sans prénom à l'aîné de la famille seul et que le prince Joseph de Chimay avait seul le droit de s'intituler le prince de Chimay tandis que tous les cadets devaient s'appeler le prince Alfred, le prince Alphonse, c'est à-dire en ajoutant leur prénom, la Chambre a compté les votes contestés au prince Joseph de Chimay, validant ainsi son élection.

C'est précisément ce qui se passe ici. Il y a donc, en faveur de la désignation suffisante des 11 bulletins donnés à M. le comte de Meeûs, un précédent parlementaire qui doit faire loi.

La question des appellations n'est pas aussi insignifiante qu'on voudrait le faire croire, et l'on peut en avoir la preuve sans sortir de cette Chambre.

Mon honorable ami M. Vilain XIIII seul a le droit de signer comte Vilain XIIII ; ses frères prennent le titre de comte Amédée, de comte François, de comte Jean.

M. Goblet. - Cela n'est pas légal.

M. Orts. - Prenez la liste électorale de Nivelles. C'est plus simple.

M. Dumortier. - Nous n'avons pas à nous occuper ici des listes électorales, mais bien des votes des électeurs : où trouvez-vous écrit que les électeurs doivent inscrire sur leurs bulletins ce qui se trouve sur les listes électorales. La loi électorale ordonne d'inscrire sur les listes électorales bien des indications que l'électeur ne doit pas inscrire sur son bulletin.

La loi ne prescrit pas d'inscrire les prénoms dans le bulletin. (Interruption.)

Nous savons bien que cela gêne un peu M. Goblet, mais cela ne doit pas nous arrêter. Sa gêne ne me gêne pas du tout.

Maintenant, messieurs, pour élucider cette question, je prends la liste d'appel du Sénat, et qu'y vois-je ?

Il y a au Sénat deux MM. de Robiano, Qu'est-ce que je lis dans cette liste ? L'aîné est désigné sous le nom de M. le comte de Robiano, sans prénom, comme dans les billets en question, et le cadet, sous celui de M. le comte Maurice de Robiano, avec son prénom. Voilà l'usage consacré par les documents officiels du Sénat.

Je prends, la liste des commissions du Sénat et j'y trouve la même chose. Pour l'un, c'est le comte, sans prénom, pour l'autre, c'est le comte Maurice. Pourquoi ? parce que l'aîné ne prend pas le prénom et que le cadet doit le prendre. (Interruption.)

Messieurs, si cette question se présentait au Sénat qui a les mêmes pouvoirs que vous, qui est élu par le peuple comme vous, qui se trouve dans les mêmes conditions que vous, il n’y aurait pas l’ombre d’une difficulté, car les listes du Sénat en main, on ne pourrait refuser d’accorder au comte de Meeûs les 11 voix qui lui ont été enlevées.

- Plusieurs membres. - Aux voix !

M. Dumortier. - Ce n’est pas par des cris que l'on combat des raisons. C'est parce qu'on ne saura pas répondre à ce que je dis que l'on crie aux voix. Il est plus commode d'étouffer la voix de l'orateur que de répondre.

Vous le voyez, messieurs, tout milite en faveur de la validation de l'élection du comte de Meeûs. Les 11 bulletins annulés doivent lui être comptés, comme vous avez compté au prince de Chimay les bulletins portant : « le prince de Chimay » ; le compte des élections de Nivelles doit être refait comme vous venez de refaire le compte des élus de Louvain, et M. le comte de Meeûs doit obtenir les 10 voix de majorité qu'il a eues au premier scrutin.

Si vous n'agissez pas d'après les mêmes principes qui vous ont guidés dans cette circonstance, si après avoir validé l'élection du prince de Chimay vous invalidez aujourd'hui l'élection du comte de Meeûs, si après avoir refait le compte des élus de Louvain, vous refusez de refaire le compte de M. de Meeûs, vous aurez fait un acte de parti et rien qu'un acte de parti, car vous ne sauriez le contester, le comte de Meeûs, pour (page 31) tout homme impartial, a obtenu 10 voix de majorité à l'élection de Nivelles et par conséquent il doit être proclamé représentant.

- Plusieurs membres. - La clôture !

M. Thibaut. - Messieurs, je désire présenter quelques observations pour réfuter les assertions erronées des préopinants.

- Plusieurs membres. - Aux voix !

M. Thibaut. - Messieurs, vous êtes de singuliers amis des lumières. Au lieu de vous éclairer en laissant continuer la discussion, vous étouffez par des cris la voix de vos adversaires. (Interruption.)

M. le président, je demande que la clôture ne soit pas prononcée.

M. Wasseige. - Je viens aussi m'opposer à la clôture, je désire vivement répondre à un des orateurs qui viennent de parler ; je serai très court, mais j'ai d'autant plus lieu de croire que ma réponse sera victorieuse, que je n'aurai qu'à opposer M. Lelièvre à lui-même.

MpLangeµ. - Je vais mettre la clôture aux voix.

- L'appel nominal est demandé.

La clôture est mise aux voix par appel nominal.

103 membres prennent part au vote.

61 votent pour la clôture.

42 votent contre.

En conséquence, la clôture est prononcée.

Ont voté pour la clôture : MM. T'Serstevens, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Ernest Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vilain XIIII, Vleminckx, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Bricoult, Carlier, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Kerchove, de Macar, de Moor, de Rongé, Devroede, de Wandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Giroul, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, J. Jouret, M. Jouret, Laubry, Lebeau, Le Hardy de Beaulieu, Lelièvre, Lesoinne, Lippens, Mascart, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Sabatier, Tesch et Lange.

Ont voté contre la clôture : MM. Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Renynghe, Van Wambeke, Wasseige, Coomans, François de Borchgrave, Guillaume de Borchgrave, de Conninck, de Decker, de Haerne, Delaet, Delcour, de Liedekerke, de Muelenaere, de Naeyer, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, d'Hane-Steenhuyse, du Bois d'Aische, Dumortier, d'Ursel, Hayez, Jacobs, Janssens, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Le Bailly de Tilleghem, Magherman, Notelteirs, Nothomb, Reynaert, Rodenbach, Royer de Behr, Schollaert, Snoy, Tack, Thibaut et Thonissen.

Les conclusions du rapport tendantes à l'admission de M. Le Hardy de Beaulieu sont mises aux voix par appel nominal.

103 membres répondent à l'appel nominal.

58 votent pour les conclusions.

43 votent contre.

2 s'abstiennent.

En conséquence, les conclusions de la commission sont adoptées.

Ont voté l'adoption : MM. T'Serstevens, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vleminckx, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Bricoult, Carlier, Couvreur, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Kerchove, de Moor, de Rongé, Devroede, de Wandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Giroul, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, J. Jouret, M. Jouret, Laubry, Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Lippens, Mascart, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Sabatier, Tesch et Lange.

Ont voté le rejet : MM. Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Renynghe, Van Wambeke, Vilain XIIII, Wasseige, Coomans, François de Borchgrave, Guillaume de Borchgrave, de Conninck, de Decker, de Haerne, Delaet, Delcour, de Liedekerke, de Muelenaere, de Naeyer, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, d'Hane-Steenhuyse, du Bois d'Aische, Dumortier, d'Ursel, Hayez, Jacobs, Janssens, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Le Bailly de Tilleghem, Magherman, Notelteirs, Nothomb, Reynaert, Rodenbach, Royer de Behr, Schollaert, Snoy, Tack, Thibaut et Thonissen.

Se sont abstenus : MM. de Macar et Le Hardy de Beaulieu.

MpLangeµ. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. de Macarµ. - Messieurs, les relations de famille qui existent entre M. le comte Ferdinand de Meeûs et moi m'ont fait un devoir de stricte convenance de ne pas prendre part à un vote où il se trouvait directement en jeu.

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - La Chambre comprendra, sans explications, les motifs de délicatesse qui m'ont fait abstenir dans cette question.

- M. Le Hardy de Beaulieu prête serment.

Formation du bureau définitif

Nomination du président

Il est procédé au scrutin pour la nomination du président. En voici le résultat :

Nombre des votants, 101.

Majorité absolue, 51.

M. Ern. Vandenpeereboom obtient 61 voix.

M. Vilain XIIII, 37.

Voix perdues, 3.

En conséquence, M. Ern, Vandenpeereboom est proclamé président.

Nomination du premier vice-président

Nombre des votants, 94.

Majorité absolue, 48.

M. Moreau a obtenu 58 voix.

M. de Naeyer 52.

Voix perdues, 4.

En conséquence M. Moreau est proclamé premier vice-président.

Nomination du second vice-président

Nombre des votants, 86.

Majorité absolue, 41.

M. Crombez a obtenu 49 suffrages.

M. Royer de Behr 52.

Voix perdues, 5.

En conséquence M. Crombez est proclamé second vice-président.

Nomination des secrétaires

Nombre des votants, 81.

Majorité absolue, 41.

M. de Florisone obtient 53 suffrages.

M. Van Humbeeck, 53.

M. de Moor, 51.

M. Thienpont, 51.

M. Jacobs, 28.

M. G. de Borchgrave, 25.

M. de Conninck, 25.

Voix perdues, 6.

En conséquence, MM. de Florisonde, Van Humbeeck, de Moor et Tienpont ayant obtenu la majorité absolue, sont proclamés secrétaires définitifs.

Installation du bureau définitif

MpLangeµ. - Messieurs, votre bureau définitif est maintenant constitué ; votre bureau provisoire n’a plus autre chose à faire que de vous remercier du concours bienveillant et intelligent avec lequel vous l'avez aidé à remplir ses fonctions.

Je prie les honorables président et secrétaires de venir prendre place au bureau. (Applaudissements.)

- M. E. Vandenpeereboom monte au fauteuil de la présidence accompagné de MM. de Moor et de Florisone.

MpVµ. - Messieurs, c'est pour la seconde fois que vous m’appelez à l'honneur de vous présider. Je remonte à ce fauteuil avec la volonté persistante d'accomplir consciencieusement les difficiles pouvoirs.

Maintenir la régularité et la dignité de vos débats et ainsi contribuer au renom et à la stabilité de notre excellent régime parlementaire est le premier de ces devoirs.

Je ne sais que trop combien il faut de fermeté, de justice et d’impartialité pour atteindre ce but. Vous pouvez y compter, messieurs, tous mes efforts tendront à ne pas rester en dessous de mon important mandat.

En retour, je réclame le concours nécessaire de votre indulgente bienveillance et de votre sympathique appui.

C'est avec cet espoir que j'accepte l’insigne honneur que vous venez de m'accorder.

Je vous remercie, messieurs, bien cordialement de cette nouvelle marque de votre haute confiance. (Interruption.)

Messieurs, je vous propose de voter des remerciements à notre excellent président d'âge et aux autres membres du bureau provisoire.

- Ces remerciements sont votés par acclamation.

MpVµ. (page 32) - La Chambre est constituée. Il en sera donné avis au Roi et au Sénat.

Messieurs, je viens de recevoir un message de M. le président du Sénat, annonçant que cette assemblée s'est constituée dans sa séance du 23 août.

- Pris pour notification.

Projets de loi portant le budget du département des travaux publics pour l’exercice 1864 et accordant des crédits supplémentaires et spéciaux au même département

Dépôt

MfFOµ. - Messieurs, d'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer :

1° Un projet de loi contenant le budget des travaux publics pour l'exercice 1864 ;

2° Un projet de loi accordant au même département un crédit de 1,200,000 francs, pour l'exécution du traité conclu avec les Pays Bas, en vue de régler le régime des prises d'eau à la Meuse ;

3° Un projet de loi allouant au même département un crédit extraordinaire de 210,000 fr. pour l'acquisition d'un immeuble destiné à une partie des bureaux de l'administration centrale ;

4° Un projet de loi ouvrant au même département un crédit spécial de 6,000,000 de francs pour l'extension du matériel du chemin de fer et pour des constructions nécessaires à leur exploitation ;

5° Un projet de loi accordant au même département divers crédits destinés à l'exécution de plusieurs travaux d'utilité publique.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du département de la guerre

Dépôt

6° Un projet de loi qui ouvre au département de la guerre un crédit supplémentaire de 5,575,000 francs pour l'achèvement des travaux d'agrandissement de la ville d'Anvers et des travaux de défense, et qui autorise l'aliénation, au profit du trésor, de certaines parcelles de terrain dépendantes du domaine de la guerre, à Anvers ;

Projet de loi relatif à la liberté du prêt à intérêt

Dépôt

7° Un projet de loi consacrant la liberté du prêt à intérêt ;

Projet de loi relatif à la suppression du timbre sur certains avis

Dépôt

8° Un projet de loi portant suppression du timbre sur les avis imprimés non destinés à être affichés ;

Projets de loi relatif à des aliénations immobilières

Dépôt

9° Un projet de loi autorisant le gouvernement à effectuer l'aliénation de quelques biens domaniaux ;

10° Un projet de loi autorisant le gouvernement à opérer un échange d'immeubles, avec la dame Duchaîne ;

Projets de loi portant règlement des comptes des recettes et des dépenses des exercices de 1851 à 1859

Dépôt

11° Enfin, neuf projets de loi portant règlement de compte des recettes et dépenses afférentes à chacun des exercices 1851 à 1859 inclus.

- Il est donné acte à M. le ministre des finances du dépôt de ces projets de loi qui seront imprimés et distribués.

Fixation de l’ordre des travaux de la chambre

M. Allard (pour une motion d’ordre). - Messieurs, à la demande d'honorables collègues de la droite et de la gauche, je viens proposer à la Chambre de renvoyer à des commissions nommées par le bureau, les projets de loi dont le détail suit :

1° Le budget du ministère des travaux publics, pour l'exercice 1864 ;

2° Le crédit de 1,200,000 francs, au ministère des travaux publics, pour l'exécution du traité conclu avec les Pays-Bas, en vue de régler le régime des prises d’eau à la Meuse.

3° Le crédit spécial de 6,000,000 de fr. pour l'extension du matériel des chemins de fer et pour des constructions nécessaires à leur exploitations.

4° Le projet de loi ouvrant au département des travaux publics divers crédits destinés à l’exécution de plusieurs travaux d’utilité publique.

5° Le projet de loi portant suppression du timbre sur les avis imprimés non destinés à être affichés.

6_ Le projet de loi autorisant le gouvernement à effectuer l'aliénation de quelques biens domaniaux.

7° Le crédit supplémentaire de 800,000 fr. au département de la justice.

8° Le projet de loi autorisant le gouvernement à opérer un échange d'immeubles.

- Ces projets de loi ont tous été examinés dans la dernière session, les sections ont nommé leurs rapporteurs ; et cinq rapports ont été déposés et imprimés par ordre de la Chambre. La Chambre activerait ses travaux si elle autorisait le bureau à nommer les commissions qui seraient chargées, d'examiner les projets ; car il n'y a pas de doute que le bureau nommerait les membres des sections centrales qui ont déjà examiné ces projets de loi, sauf à remplacer les membres qui ne font plus partie de la Chambre ! Le bureau devrait également être autorisé à livrer à l'impression les rapports et à faire distribuer immédiatement ceux dont l'impression serait terminée.

Je proposerai de fixer la prochaine séance à mercredi et de mettre à l'ordre du jour de cette séance les rapports qui auraient été distribués.

M. Bouvierµ. - Je demande que la Chambre se réunisse mardi prochain.

MpVµ. - Nous allons proposer d'abord de confier au bureau le soin de nommer des commissions qui seraient chargées d'examiner les projets de loi dont il vous a été donné lecture et qui tous ont déjà fait l'objet des travaux de la Chambre dans la dernière session.

M. Orts. - La Chambre pourrait décider qu'elle nomme comme membres de commissions spéciales les membres des sections centrales qui ont examiné les projets de loi dans la dernière session, sauf au bureau à compléter celles de ces sections centrales qui ne seraient plus complètes.

MpVµ. - C'est ce que je voulais proposer : maintenir les membres des anciennes sections centrales, et se borner à remplacer ceux qui ne feraient plus partie de la Chambre. S’il n'y a pas d'opposition (Non ! non !), il en sera ainsi. M. Allard demande ensuite que la prochaine séance publique soit fixée à mercredi ; M. Bouvier demande que la Chambre se réunisse mardi.

M. Delaetµ. - Je prierai M. le ministre des finances de vouloir bien me donner un renseignement. Je désirerais savoir s'il entend faire discuter, dans cette session extraordinaire, le projet de loi de 5,575,000 fr. pour Anvers.

MfFOµ. - Certainement.

M. Delaetµ. - Dans ce cas, il n'y a rien à gagner à revenir mardi au lieu de revenir mercredi, comme l'honorable M. Allard l'a proposé, puisque la session se prolongera au-delà du 3 septembre. Le projet de loi est trop important pour pouvoir être discuté en deux jours.

M. Orts. - Je demanderai au bureau de vouloir bien procéder, séance tenante, au tirage au sort des sections ; sans cela nous allons perdre un jour.

MpVµ. - Il y sera procédé tout à l'heure.

M. Dumortier. - Il est sans doute entendu que les projets de loi qui n'ont pas été examinés dans la dernière session seront renvoyés aux sections.

MpVµ. - Sans doute ; il n'est pas question de ces projets de loi dans les propositions de MM. Allard et Orts.

Il ne reste plus qu'à décider h quel jour la Chambre se réunira en séance publique.

- La Chambre fixe sa prochaine séance à mercredi 31 août, à deux heures.

Tirage des sections

Il est procédé au tirage des sections.

MpVµ. - Voici la composition des sections :

Budget des travaux publics. MM, Braconier, Vermeire, Ch. Lebeau, T’Serstevens, Van Overloop et Allard.

Crédit de 1,200,000 francs au ministère des travaux publics. MM. de Kerchove, de Moor, Muller, Hymans, de Naeyer, de Macar.

Crédit spécial de 6,000,000 de francs au département des travaux publics. MM. Mouton, Bouvier-Evenepoel, Lesoinne, Tack, Le Hardy de Beaulieu, Warocqué.

Crédits pour travaux d'utilité publique. MM. de Moor, Lelièvre, de Macar, Van Iseghem, Wasseige, Muller.

Suppression du timbre d'avis. MM. J. Jouret, Bouvier-Evenepoel, Lesoinne, T'Serstevens, Delcour, Jamar.

Aliénation de biens domaniaux. MM. Vander Donckt, Bouvier-Evenepoel, Ansiau, Van Overloop, Vau Nieuwenhuyse, de Terbecq.

Crédit supplémentaire de 800,000 fr. au département de la justice. MM. Mouton, Bouvier-Evenepoel, Van Overloop, De Fré, Delcour, Le Hardy de Beaulieu.

Echange d'immeubles. MM. de Kerchove, de Moor, Dupont, de Macar, Delcour, Ansiau.

- La séance est levée à 5 heures trois quarts.