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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 15 mars 1864

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1863-1864)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 359) M. de Florisone, secrétaire, procède à l'appel nominal à 3 heures et un quart.

M. Van Humbeeck, secrétaireµ, lit le procès-verbal de la séance du 11 mars. La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Florisone présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le conseil communal d'Assche prie la Chambre d'accorder aux sieurs de Haulleville et Wergifosse la concession d'un chemin de fer d'Anvers à Saint-Vith par Braine et Namur. »

« Même demande d'habitants de Ternath. »

M. H. Dumortierµ. - Messieurs, je demande que le bureau veuille bien renvoyer cette pétition à la commission des pétitions, afin qu'elle en fasse l'objet d'un prompt rapport.

M. Van Humbeeck. - Messieurs, je viens appuyer la proposition de l'honorable M. Dumortier, et je me permettrai de la compléter. Le chemin de fer dont il s'agit dans la pétition se confond, à son origine, avec celui d'Anvers à Douai par Tournai, au sujet duquel un projet de loi nous a été annoncé. Je demanderai que la commission des pétitions présente son rapport assez à temps pour qu'il puisse être discuté en même temps que celui que la section centrale aura à faire sur le chemin de fer d'Anvers à Douai.

M. H. Dumortierµ. - Messieurs, je ne m'oppose pas du tout à l'extension que l'honorable M. Van Humbeeck veut donner à ma proposition ; je doute cependant que cette affaire puisse être instruite assez à temps pour pouvoir être examinée à fond, en même temps que l'autre affaire, extrêmement importante, relative au chemin de fer d'Anvers à Douai par Tournai.

- La Chambre décide que la pétition sera renvoyée à la commission des pétitions avec invitation de faire un prompt rapport.


« Le sieur Colin, ancien commis de l'administration des chemins de fer, prie la Chambre de statuer sur sa demande ayant pour objet d'être réintégré dans son emploi. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« L'administration communale de Tubize demande une diminution du droit d'accise sur la fabrication de la bière. »

« Même demande d'habitants de Tamine, Peuthy, Bruxelles et de membres du conseil communal de Duras. »

-Renvoi à la commission permanente de l'industrie.


« Le sieur Adrien Van Gool, ouvrier à Poppel, né à Goirle (Pays-Bas), demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« Le sieur Pol présente des observations à l'appui de ses pétitions en date du 23 janvier et du 11 mars derniers. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le conseil communal de Lessines déclare appuyer la demande de concession, faite par le sieur Hoyois, d'un chemin de fer de Binche à Lessines. »

- Même renvoi.


« Le sieur Rulot demande que l'étude du traité d'hygiène publié par M. le docteur Bodart soit rendue obligatoire dans toutes les écoles primaires du pays. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent la révision des articles 618 et 619 du code de commerce, et de l'article 50 de la loi du 4 août 1832. »

- Même renvoi.


« L'administration communale d'Elst prie la Chambre d'accorder aux sieurs Gillon et Peeters-Baertsoen la concession d'un chemin de fer d Anvers à Tournai vers Douai.

« Mêmes demandes de la chambre de commerce de Tournai, des administrations communales d'Hautem-Saint-Lievin, Vlierzele, Alost, Strypen, Renaix, Borgerhout, Cordes, Arc-Ainières, Hundelghem, Lettenhautem, Tournai, Schoorisse, Nukerke, Celles, Saint-Antelinckx, Sottegem, Woubrechtegem, Steenhuyse-Wynhuysen, Essche-Saint-Lievin, Popuelles, Aygem, Flobecq, Ath, Escanaffles, Mont-Saint-Aubert, Rongy, Taintignies, Boom, Anvaing, Hoorebeke-Saint-Corneille, Edegemn. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la concession du chemin de fer.


« Les membres du conseil communal de Freux prient la Chambre de passer à l'ordre du jour sur les pétitions ayant pour objet une loi qui règle le mode de sépulture. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les membres de l'administration communale de Merckem demandent que le chemin de fer projeté d'Ostende à Armentières passe par Merckem et Dixmude. »

M. de Conninckµ. - Messieurs, j'ai l'honneur de proposer à la chambre de déposer cette pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la concession du chemin de fer d'Ostende à Armentières.

- Cette proposition est adoptée.


« Les membres du conseil communal de Couckelaere demandent que le chemin de fer projeté d'Ostende vers Armentières passe par Ghistelles, Couckelaere et Dixmude, pour se diriger sur Ypres et Armentières. »

- Même décision.


« Les membres du conseil communal de Dixmude demandent que le chemin de fer projeté d'Ostende à la frontière de France passe par Dixmude et la partie ouest de la province, avec embranchement d'un côté d'Ypres sur Roulers et de l'autre de Dixmude sur Nieuport. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la concession d'un chemin de fer d'Ostende à la frontière de France.


« Le sieur Guyaux, ancien commis des accises, prie la Chambre de statuer sur sa demande tendante à obtenir une pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des conseillers communaux à Vonêche se plaignent de mesures prises par le président du conseil communal. »

- Même renvoi.


« Des habitants d'une commune non dénommée demandent l'abrogation de la loi sur les étrangers. »

- Renvoi à la section centrale qui est chargée d'examiner le projet de loi concernant la loi sur les étrangers.


« Plusieurs habitants des communes des provinces d'Anvers, de Brabant, de Flandre occidentale, de Flandre orientale, de Hainaut, de Liège, de Limbourg, de Luxembourg et de Namur, se plaignent d'abus dans le mode de sépulture et prient la Chambre d'aviser aux mesures nécessaires pour les faire cesser. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« M. Crombez, obligé de s'absenter, demande un congé. »

« M. Lesoinne demande un congé pour motifs de santé. »

- Ces congés sont accordés.

Projet de loi portant concession d'un chemin de fer d'Anvers à Tournai avec prolongement jusqu'à la frontière française dans la direction de Douai et d'un chemin de fer de Roulers à Ypres

Dépôt

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen. - Messieurs, d'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un projet de loi portant concession : 1° d'un chemin de fer d'Anvers à Tournai avec prolongement jusqu'à la frontière française dans la direction de Douai ; 2° d'un chemin de fer de Roulers à Ypres.

- Impression, distribution et renvoi à la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi relatif au chemin de fer d'Ostende à Armentières.

Projet de loi accordant un crédit spécial au budget du ministère des travaux publics pour l'extension des lignes et appareils télégraphiques

Dépôt

MfFOµ. - Messieurs, d'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau :

1° Un projet de loi allouant un crédit spécial de 100,000 fr. au département des travaux publics pour l'extension des lignes et appareils télégraphiques ;

Projet de loi allouant un supplémentaire de 36,132 fr. 50 c. spécial au budget du ministère des finances

Dépôt

2° Un projet de loi allouent au département des finances un crédit supplémentaire s'élevant à 36,132 fr. 50 c ;

Projet de loi ayant pour objet de faciliter la nationalisation des navires étrangers

Dépôt

(page 360)

60

CHAMBRE DES REPRESENTANTS, SÉANCE DU i'J MARS i«4.

3° Un projet de loi ayant pour objet de faciliter la nationalisation des navires étrangers

- Impression, distribution et renvoi aux sections.

Projet de loi portant concession d'un chemin de fer d'Ostende à Armentières et d'un chemin de fer de Lokeren à Selzaete

Rapport de la section centrale

M. de Kerchoveµ. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi portant concession d'un chemin de fer d'Ostende à Armentières et d'un chemin de fer de Lokeren à Selzaete. »

- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour.

Motion d’ordre

M. Allard. - La semaine dernière, le 9 de ce mois, il est arrivé à la Chambre une pétition de l'administration communale de Blandain, ayant pour objet d'appuyer le projet de loi de concession d'un chemin de fer d'Anvers à Tournai vers la frontière de France.

J'ai demandé alors le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions avec prière qu'elle en fît l'objet d'un prompt rapport. Deux jours après, le 11 mars, l'honorable M. Vander Donckt a fait un rapport sur cette pétition.

L'honorable M. Dumortier avait demandé la parole pour appuyer ce projet de loi lorsque déjà M. le ministre des travaux publics avait annoncé la présentation prochaine de ce projet.

L'honorable M. Dumortier disait, entre autres : « J'appuie de tous mes moyens le projet de loi dont il s'agit ; je l'appuie d'autant plus que beaucoup de mes amis savent que, depuis plusieurs années, j'en ai signalé la grande utilité. »

Ici j'ai interrompu en disant : C'est cela !

Je voulais dire par là que, depuis quelques jours, l'honorable M. Dumortier s'appliquait à dire que depuis longtemps il avait eu l'idée de ce chemin de fer. Ce qu'il y a de vrai, c'est que, il y a quelques jours, M. Dumortier m'a demandé comment je trouvais son chemin de fer dont, je l'avoue, je, n'avais pas entendu parler jusqu'alors par l'honorable membre. Je lui ai répondu que j'ignorais s'il avait conseillé ou inventé ce chemin de fer.

M. Dumortier étant venu dire que depuis de longues années il parlait de ce chemin de fer, j'ai lâché un Oh ! oh ! (Interruption.) Mais M. Dumortier a dit alors : Vous n'aimez pas d'entendre dire que d'autres ont depuis longtemps sollicité ce chemin de fer. A quoi j'ai répondu : Vous n'en parlez que depuis deux jours ! Et effectivement, M. Dumortier pouvait avoir parlé de ce chemin de fer dans des conversations particulières, mais jamais il n'en a dit un mot à la Chambre ; tandis que moi j'en avais parlé depuis longtemps. (Interruption ) Un moment, messieurs. Il ne faut pas que M. Dumortier aille se poser devant les électeurs de Tournai comme la providence de cet arrondissement. (Nouvelle interruption.) J'ai dit que depuis longtemps j'ai parlé de ce chemin de fer, et je tiens à le prouver en m'appuyant sur les Annales parlementaires.

Le 7 mars 1861 je disais ceci :

« Si nous n'avions pas les chemins de fer de Tournai à Jurbise et de Tournai à Mouscron, on irait de Tournai à Bruxelles par Ath, Enghien et Hal, de Tournai à Lille par Baisieux ou Templeuve, de Tournai à Paris par Douai, de Tournai à Mons par Antoing, Péruwelz et Saint-Ghislain, de Tournai à Gand par Audenarde. »

Voilà ce que je disais déjà en 1861.

M. B. Dumortier. - Mais cela ne concerne pas du tout le chemin de fer d'Anvers vers la frontière française.

M. Allard. - L'observation que je fais n'a d'autre but que de constater que, cette fois encore, vous avez ajouté, après coup, aux Annales parlementaires, une phrase que vous n'avez pas prononcée ici.

- Voix à gauche. - Ah ! ah !

M. Allard. - Je vous ai donc interrompu pour vous dire ; Vous ne parlez de ce projet que depuis deux jours.

Et voici ce que vous avez ajouté, après coup, aux Annales parlementaires :

« Je suis surpris que M. Allard ne connaisse pas mieux les intérêts de la ville qu'il représente. >

Eh bien, j'en appelle à la Chambre tout entière, cette phrase vous ne l'avez pas prononcée, car si vous l'aviez dite, je vous aurais interrompu pour vous dire que si Tournai a deux malencontreux chemins de fer, c'est à vous qu'il le doit, parce que pendant que vous étiez député de Tournai vous avez laissé voter les chemins de fer de Jurbise à Tournai et de Mouscron à Tournai. Vous eussiez beaucoup mieux fait de vous y opposer que de venir prétendre que si l'on projette aujourd'hui un chemin de fer d'Anvers à Tournai, c'est à vous qu'on le doit.

(erratum, page 370) Ce n'est pas à vous, c'est aux ministres, c'est à nos amis que nous le devrons, comme ce sont eux qui nous ont donné le chemin de fer d'Ath à Hal, de Tournai à Lille ; je ne demanderai pas qu'on fasse comme il y a deux ans, quand M. Dumortier avait introduit dans son discours des phrases injurieuses pour M. Guillery ; la Chambre alors décida qu'il serait fait un nouveau carton, je ne demanderai pas qu'on en agisse de même aujourd'hui, je crois que ma protestation suffit.

M. B. Dumortier. - L'honorable membre qui vient de s'asseoir use d'un système nouveau dans les assemblées délibérantes, celui d'interpeller ses collègues. Jusqu'ici je savais bien que les membres des Chambres avaient le droit d'interpeller les ministres, mais non d'interpeller leurs collègues.

M. Allard. - Vous n'avez pas le droit de falsifier le compte rendu.

M. B. Dumortier. - Nous y viendrons. L'honorable membre m'a interpellé sur une question de chemin de fer et sur une phrase que j'ai ajoutée à mon discours et dont je prends toute la responsabilité ; vous même, M. Allard, vous avez souvent ajouté dans les Annales des choses que vous n'aviez pas dites.

M. Allard. - Je n'ai jamais rien ajouté de désobligeant pour mes collègues.

M. B. Dumortier. - Personne n'a rien à dire du moment que je prends la responsabilité de ce que j'ai ajouté. Si je trouve dans mon discours une interruption malveillante qui n'est pas arrivée à mon oreille, et à laquelle j'aurais répondu si je l'avais entendue, j'ai bien le droit de ne pas laisser cette interruption intercalée dans mon discours sans la faire suivre de la réponse que j'aurais certainement faite si elle m'était parvenue.

Vous prétendez que tandis que j'étais député de Tournai, j'ai desservi les intérêts de cette ville en faisant faire deux chemins de fer, celui de Jurbise et celui de Mouscron.

Je réponds que si ces deux chemins de fer n'avaient pas été faits, Tournai serait encore aujourd'hui sans chemin de fer.

C'est moi, comme rapporteur de section centrale chargée d'examiner des demandes de construction de chemin de fer, qui ai à deux reprises demandé et fait obtenir à la ville de Tournai ces deux chemins de fer, les seuls qu'elle possède aujourd'hui.

Quant au chemin de Tournai sur Lille, celui d'Ath à Hal et la ligne directe de Lille sur Tournai, l’honorable membre a peu de mémoire ; car, dès 1849 nous l'avions proposé à la Chambre, MM. Faignart, Ansiau et moi. M. Allard a donc bien tort de se prévaloir d'une demande faite par lui bien des années après.

Messieurs, vous l'avez compris, c'est une question d'amour-propre que soulève ici l'honorable membre ; il ne veut pas que j'aie songé à doter ma ville natale d'un chemin de fer direct d'Anvers vers la France par Tournai. Heureusement je suis en mesure de prouver ce que j'avance. Mon honorable ami M. Magherman est ici, qui pourra dire si depuis plusieurs années je n'ai pas tracé ce chemin sur la carte. Mais le hasard me fournit une preuve plus directe encore de la vérité que j'ai énoncée, car je viens à l'instant de recevoir une lettre du plus grand entrepreneur d'Anvers. Voici ce qu'il m'écrit :

« J'ai vu par les journaux que la Chambre était saisie du projet de loi pour la ligne directe d'Anvers à Douai par Tournai dont vous m'aviez remis le tracé à Aix-la-Chapelle en 1861 ; je le regrette d'autant plus que dans ce moment j'ai les mains entièrement libres ! » Voilà comment M. Allard invente des chemins de fer ! Le signataire de cette lettre est Keller, entrepreneur des plus beaux travaux de la Campine et inventeur des fortifications d'Anvers.

Loin d'être confondu par cette interpellation, j'y trouve le moyen de réduire à sa valeur la prétention de M. Allard, d'avoir inventé le chemin de fer dont il s'agit.

Je n'en dirai pas davantage, parce que cela me suffit pour démontrer que, malgré les ricanements de M. Allard que je ne souffrirai jamais, j'avais raison de dire que je portais d'autant plus d'intérêt à ce chemin de fer que depuis longtemps j'en poursuivais l'exécution.

M. Allard. - J'ai dit que ce n'était que depuis deux jours que vous parliez de ce chemin de fer dans cette enceinte. Que vous en ayez parlé avant dans des conversations particulières, je n'en sais rien, mais ce n'était pas une raison pour dire que c'était à vous que la ville devait que la concession en avait été accordée.

Au reste la question n'est pas là, elle est dans l'addition de la phrase que vous n'aviez pas prononcée. J'avais dit : Vous n'en parlez que depuis deux jours, et ce dont je me plains c'est de la phrase désobligeante pour un collègue, que vous avez intercalée dans le Moniteur.

(page 361) Vous avez renouvelé, clans cette circonstance, ce que vous avez fait pour M. Guillery.

Mais pour M. Guillery j'avoue qu'il y avait quelque chose de très outrageant, tandis que pour moi il n'y a que le désagrément d'une phrase désobligeante.

M. B. Dumortier. - Mais ce que vous m'avez dit n'était pas aimable non plus.

M. Allard. - Soit, mais ce n'était pas une raison pour aller falsifier les Annales parlementaires.

M. B. Dumortier. - Je n'entends pas que l'honorable M. Allard me représente comme un falsificateur des Annales parlementaires.

Je repousse ces expressions comme une indignité.

Comment ! j'aurais falsifié les Annales parlementaires parce que j'y ai mis une réponse à des paroles malveillantes qui n'étaient pas arrivées à mon oreille ?

M. Goblet. - Messieurs, je ne me permettrai pas de qualifications ; mais je rappellerai à la Chambre que le 4 juin 1862 elle a ordonné la rectification et la réimpression d'un discours qui avait été prononcé par l'honorable M. Dumortier et dont l'honorable membre avait altéré le texte primitif. C'est moi qui ai fait la motion à la suite de laquelle cette décision a été prise.

M. B. Dumortier. - Je trouve fort étrange que l'honorable membre vienne parler d'une altération lorsque c'est moi-même qui ai demandé tout le premier que, puisque des réclamations avaient lieu, le texte du sténographe fût rétabli.

Que s'est-il passé ?

La sténographie était tellement défectueuse que j'avais dû prendre le discours chez moi pour le revoir, attendu que cette partie était presque complètement tronquée.

Quant aux phrases auxquelles fait allusion l'honorable membre, je les ai insérées de bonne foi, avec 1a conviction de les avoir prononcées, et dès que la rectification fut demandée, je déclarai que je m'y ralliais.

M. Goblet. - La mémoire peut faire défaut, c'est vrai, mais on ne peut comprendre comment la mémoire rappelle des paroles comme celles-ci, alors surtout qu'elles n'ont pas été prononcées. Voici un spécimen de ce que vous avez cru bon d'ajouter à votre discours adressé à l'honorable M. Guillery : « qui coulent à grands flots de vos lèvres trompeuses et déshonorées. »

Et celles-ci encore que je trouve plus loin :

« Ah ! je le conçois, votre langue a besoin de cacher la honte de votre face et c'est ce qui la fait parler. »

Et vous appelez cela des erreurs de mémoire ! Vous dites que vous vous êtes rappelé, par hasard, avoir prononcé de pareilles expressions.

Je ne vous ai pas accusé d'avoir falsifié les Annales, mais j'ai dit que vous aviez inséré au Moniteur des choses que vous n'avez pas dites, et cela est vrai et constaté.

M. B. Dumortier. - Je répète ce que j'ai déjà dit. La sténographie du Moniteur était complètement défectueuse. J'ai dû refaire mon discours de mémoire, et quand on improvise de la plume on peut se tromper. De quel droit, lorsqu'un incident est clos, vient-on le rouvrir ?

M. Goblet. - Si vous l'entendez ainsi, vous feriez bien de vous taire.

M. B. Dumortier. - Comment pouvez-vous dire que j'ai falsifié un discours qui n'était point écrit ? Ce n'est pas falsifier un discours que d'y ajouter, en le refaisant de mémoire, une phrase que de bonne foi on croyait avoir prononcée. Et cela est tellement vrai que le premier, sur l'observation de l'honorable membre, j'ai dit que je me ralliais à la demande de réimpression du discours.

M. Goblet. - Je n'avais pas terminé. J'allais ajouter une raison qui est parfaitement concluante.

MpVµ. - C'est pour cela que je vous donne la parole pour la troisième fois.

M. Goblet. - Je n'ai pas la parole pour la troisième fois, je l'ai pour la seconde, puisque je n'avais pas terminé.

La preuve que le discours inséré aux Annales parlementaires était contraire à tout ce qui avait été dit, c'est que la Chambre a ordonné l'impression des paroles de l'honorable membre telles qu'elles avaient été recueillies par la sténographie ; c'est qu'on a pu retrouver le discours tel qu'il avait été prononcé, discours qui n'était pas du tout celui qui a d'abord paru au Moniteur. Tous ceux qui ont conservé la première épreuve des Annales peuvent le vérifier ; ils verront de grandes différences entre les deux discours ; dans le premier imprimé se trouvaient beaucoup d'injures que l'on n'aurait pas osé dire à la Chambre.

M. B. Dumortier. - Cela est inexact. Mon discours avait été recueilli d'une manière tellement incomplète, que plus de moitié de ce que j'avais dit ne se trouvait pas dans les notes sténographiques. Je suis allé au Moniteur, je me suis vivement impatienté contre la sténographie et j'ai dû refaire mon discours.

Ou ne peut se rappeler exactement aujourd'hui ce que j'ai dit. Mais le lendemain de l'impression du second discours, tous les députés m'ont dit : Ce ne sont pas là les paroles que vous avez prononcées.

- L'incident est clos.

Motion d’ordre

M. d’Hane de Steenhuyseµ. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour obtenir du gouvernement quelques explications et pour lui faire en même temps une recommandation.

Vous vous rappelez tous sans doute l'événement terrible qui a eu lieu à Liverpool il y a deux mois. Un navire chargé de 14,000 kilogrammes de poudre a sauté et a causé des dommages très grands dans la ville.

Le même fait a failli se présenter il y a peu de jours à Anvers, et j'aurais fait mon interpellation plus tôt si je n'avais voulu m'entourer de renseignements ultérieurs.

Je demanderai donc au gouvernement que lorsque de pareils chargements de poudre doivent arriver devant la ville d'Anvers, il exige que le déchargement s'en opère immédiatement.

Je comprends que lorsque le temps est excessivement mauvais, comme c'était le cas, ce déchargement immédiat soit très difficile. Mais on pourrait alors prendre des mesures de nature à préserver la ville de tout danger ; ainsi l'on pourrait envoyer le bateau à une et même à deux lieues de la ville et le mouiller de telle manière qu'il ne gênerait pas la navigation des passes de l'Escaut.

Mais le déchargement ne pouvant être opéré de suite, le bateau est resté à l'ancre dans une passe dont se servent tous les navires qui quittent Anvers ou qui y arrivent. Le bateau à vapeur hollandais le Télégraphe l'a pris par le travers, faute de signaux et l'a littéralement coupé en deux.

Vous comprenez, messieurs, l'immensité du désastre qu'aurait amené l'explosion de 70 mille kilog. de poudre devant la ville d'Anvers.

Je demande donc que le gouvernement prenne toutes les mesures nécessaires pour que de pareils faits ne se reproduisent plus.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement de Bastognes

M. B. Dumortier (pour une motion d’ordre). - Messieurs, il y a quatre mois que l'élu de Bastogne ne peut siéger dans cette enceinte par suite de l'enquête que vous avez ordonnée, il y a quatre mois que le district de Bastogne se trouve privé de son représentant.

Je désirerais savoir à quel point en est l'enquête, si les pièces seront bientôt distribuées et si, avant peu, l'on pourra procéder à la vérification des pouvoirs de l'honorable M. Van Hoorde.

M. Van Humbeeck. - Messieurs, la loi organique de l'enquête de Bastogne a été promulguée le 12 janvier. La commission s'est immédiatement réunie et a consacré diverses séances à prendre des disposions d'ordre intérieur. Elle a procédé, pour la première fois, à une audition des témoins, le 27 janvier. Depuis lors, elle a continué ses travaux à peu près sans interruption jusqu'à l'époque où la Chambre a repris les siens. Elle a siégé quelquefois depuis 10 heures du matin jusqu'à 7 1/2 heures du soir.

La moyenne de la durée de ses séances a toujours été de 7 heures.

La commission n'a donc pas à se reprocher d'avoir perdu du temps ou d'avoir manqué de zèle. A l'époque où la Chambre a repris ses travaux, nous n'avons pas cru devoir continuer les nôtres ; nous pensions que plusieurs jours pouvaient être absorbés par des discussions politiques et que notre devoir de députés exigeait notre présence à ces discussions. Notre intention était de reprendre cette semaine les travaux de l'enquête, mais comme la Chambre est à la veille de se séparer et que le rapport ne pourra jamais être fait qu'à la rentrée, il nous a semblé que, pourvu que le rapport fût fait à cette époque, les intérêts de l'élu de Bastogne et les intérêts de la Chambre elle-même seraient sauvegardés dans la limite du possible.

Notre intention est donc, messieurs, de reprendre nos travaux dès que la Chambre se sera ajournée et de nous mettre en mesure de présenter le rapport sur l'élection à la rentrée.

Je crois, messieurs, que ces explications sont de nature à satisfaire l'honorable M. Dumortier qui, du reste, a assisté à quelques séances de la commission et qui a pu apprécier la manière dont elle procède à l'accomplissement de sa mission.

M. B. Dumortier. - Je suis heureux de rendre hommage au zèle de la commission d'enquête. Comme le dit fort bien l'honorable M. Van Humbeeck, j'ai assisté à plusieurs séances de la commission et (page 362) je puis témoigner du zèle que les honorables membres ont mis dans l'exercice de leur mandat.

Je suis heureux d'apprendre que le rapport pourra être fait à la rentrée de la Chambre ; cependant je prendrai la confiance de faire une observation : l'enquête de Bastogne est très volumineuse, l'impression en durera très longtemps, et si l'on veut, à la rentrée après les vacances de Pâques, examiner les pouvoirs de l'élu de Bastogne, il serait à désirer que dès maintenant l'on commençât l'impression. J'ai entendu dire que l'impression durera 3 semaines. Si l'on ne commence pas immédiatement, il pourrait arriver que la vérification des pouvoirs fût encore différée de deux mois.

M. Van Humbeeck. - Messieurs, je ne demande pas mieux que de voir la commission prendre toutes les mesures propres à activer ses travaux, mais celle que l'honorable M. Dumortier propose ne me semble pas pratique.

Elle me paraît devoir entraver les travaux, au lieu de les hâter. Il est impossible que la commission poursuive l’accomplissement de son mandat si elle n'a pas le dossier à sa disposition ; il est impossible également que M. le rapporteur fasse son travail, s'il n'a pas toutes les pièces sous les yeux.

Si maintenant l'inaction de la commission devait se prolonger pendant quelque temps, on pourrait peut-être profiter de cet intervalle pour commencer l'impression ; dans ce cas, la motion de l'honorable M. Dumortier pourrait être prise en considération. Mais je le répète, faire imprimer pendant que la commission continue ses travaux, cela me paraît tout à fait impossible.

Motion d’ordre

M. Delaetµ. - Messieurs, il est à regretter que M. le ministre de la guerre, que le transport des poudres concerne particulièrement, ne soit pas présent à la séance, car nous désirerions avoir ure réponse rassurante à transmettre à Anvers sur l'interpellation qu'a faite mon honorable ami, M. d'Hane.

Tout le monde comprendra que lorsqu'on transporte en une seule fois 70,000 kilogrammes de poudre, il suffirait d'une telle charge pour menacer de ruiner la ville entière, si un accident devait arriver, et que les digues se rompraient et causeraient des inondations sur une très vaste étendue de territoire.

Je conçois qu'un bateau chargé de poudre ne puisse pas être muni la nuit d'une lumière ; mais ce qu'il serait possible de faire, ce serait de mettre alors à distance des bateaux hâleurs chargés d'avertir les navires et surtout les bateaux à vapeur et de les inviter à s'éloigner d'un endroit où stationnerait une charge si dangereuse.

La présence des poudres était ignorée de la population d'Anvers, et elle ne lui a été révélée que par un accident, de force majeure, nous voulons bien l'admettre, mais accident que nous ne voudrions pas voir se renouveler.

En effet, si une seule étincelle avait mis le feu aux poudres, la ville aurait pu être détruite et les digues rompues en plus d'un endroit. La question est donc grave.

Nous devons demander au gouvernement de rassurer au moins la population d'Anvers.

Nous savons très bien que le gouvernement n'aime pas trop la ville d'Anvers, mais ce n'est pas une raison suffisante pour refuser de nous rassurer.

Nous ne voulons pas que des dangers pareils pèsent sur nos têtes avant la guerre. J'invite donc le gouvernement de i'en vouloir répondre à la question posée par mon honorable ami.

MIVDPBµ. - Messieurs, je suis convaincu que M. le ministre de la guerre, s'il avait été prévenu, se serait rendu à la séance, et il aurait probablement pu donner des explications en réponse à 1'interpellation qui vient d'être faîte.

Je n'ai pas besoin, je pense, de repousser l'espèce d'insinuation à laquelle on vient de se livrer : à savoir que le gouvernement négligerait en quelque sorte systématiquement les moyens de garantir la population d’Anvers contre le danger auquel on a fait allusion. Je me bornerai à dire que le gouvernement prend toutes les mesures qui sont en son pouvoir, afin d’éviter à la ville d’Anvers, et à toutes les autres villes du pays, les inconvénients et les dangers qui pourraient résulter du transport des poudres.

Projet de loi qui ouvre des crédits supplémentaires au budget du ministère des travaux publics

Discussion générale

La discussion générale est ouverte.

La parole est à M. Kervyn de Lettenhove.

M. Kervyn de Lettenhove. - Messieurs, je ne viens pas combattre le projet de loi qui est soumis à vos délibérations ; mais je trouve dans le travail de la section centrale ure note assez développée relative à la part qui incomberait aux propriétaires riverains dans les frais de construction et d'entretien du canal de Selzaete, et je ne crois pas pouvoir la passer sous silence.

La loi de 1807 qui consacrait le principe de l'intervention des propriétaires intéressés dans les frais de construction des routes et des canaux, et abrogée en fait ; nous en avons constamment la preuve sous les yeux, et tout le monde reconnaît aujourd'hui que l'Etat, en étendant successivement sa sollicitude sur tous les points spéciaux où se trouvent en souffrance des intérêts sérieux, ne fait que remplir la mission qui lui est confiée, celle de développer la prospérité générale.

Cependant, il y a un peu plus de 20 ans, l'Etat et les Chambres crurent devoir faire revivre le principe de la loi de 1807, en l'appliquant à deux grands travaux : le canal de jonction de la Meuse à l'Escaut et le canal qui de Selzaete devait se diriger vers la mer du Nord.

Vous savez, messieurs, que de nombreuses réclamations surgirent à cet égard ; elles furent surtout très vives de la part des propriétaires de la Campine qui contestaient l'étendue et l'importance, des améliorations et qui alléguaient surtout que cette partie du pays méritait d'être relevée de l'infériorité dans laquelle la plaçait sa production agricole. Il fut fait droit à ces réclamations par un projet de loi qui fut déposé sur le bureau de la Chambre au mois de décembre 1858 et qui fut promulgué le 3 mars 1859.

La question de l’application de la loi de 1807 à ces grands travaux était connexe, et il était évident que dès que le principe cessait d'être appliqué au canal de la Campine, il ne pouvait être maintenu pour le canal de Selzaete.

Aussi, dans la discussion qui eut lieu à la Chambre et même dans l'exposé du projet de loi, la même question fut abordée, quoique d'une manière indirecte, pour le canal de Selzaete.

Dans la note qui est insérée au rapport de la section centrale, je trouve quelques lignes de l'exposé des motifs de la loi de 1859 ; elles sont ainsi conçues ;

« En appelant à ce sujet votre attention, nous ne prétendons pas soutenir qu'il faille maintenir, pour le canal de Selzaete, les dispositions dont nous demandons l'abrogation pour le caral de la Campine. Nous nous réservons, si le projet actuel est adopté, d'examiner, pour la soumettre au besoin à vos délibérations, la question de savoir si les propriétés intéressées à l'exécution du premier de ces canaux devront également être affranchies du concours imposé par la loi du 26 juin 1842. »

Cette citation ne permet d'apprécier qu'incomplètement ce qui s'est passé en 1859. L'exposé du projet de loi dont je viens de donner lecture fut l'objet de nombreuses critiques, aussi bien dans les sections que dans la Chambre ; et pour apprécier l'intention de la législature, je suis forcé de recourir au rapport présenté, au nom de la section centrale, par l'honorable M. Mascart.

Le 28 janvier 1859, l'honorable M. Mascart, organe de la section centrale, qui s'était prononcée, à l'unanimité, s'exprimait en ces termes :

« La section centrale n'a pas pensé que la situation des riverains du canal de Selzaete, en ce qui concerne le concours qui leur a été imposé, dût être changée d'une manière incidente ; mais si elle reconnaît qu'il n'y a pas péril en la demeure (l'honorable rapporteur faisait allusion à la non-exécution de la loi de 1842), elle insiste néanmoins pour que la Chambre soit saisie le plus tôt possible d'un projet de loi qui mette fin à une situation tout à fait irrégulière.

« Par l'accueil qui est fait au projet de loi par toutes les sections et par la section centrale, il ne peut rester aucun doute sur les dispositions de la législature à revenir complètement sur les mesures exceptionnelles qui ont été prises en 1842 et en 1845 à l'égard des canaux de Selzaete et de la Campine, dispositions presque inexécutables et présentant, en outre, un caractère peu équitable, quand on considère qu'elles ne sont appliquées qu'à une faible partie des travaux publics exécutés par l'Etat depuis 1830. »

Dans un autre passage de ce discours, l'honorable M. Mascart continuait en ces termes, en parlant du territoire qui traverse le canal de Selzaete :

« Avant 1830, les eaux de cette partie du pays avaient leur principal écoulement par le canal de Terneuzen et par deux embouchures du bras de mer qui, avant son ensablement, formaient une île du pays de Cadzand.

« Messieurs, par le fait de la révolution la Belgique se trouva privée de la majeure partie de ses voies d'écoulement, il ne lui resta que deux écluses ; les six autres étaient sur le territoire hollandais.

(page 363) « S'il est vrai qu'avant 1830, les moyens d'écoulements étaient déjà incomplets et insuffisants, ce furent néanmoins les événements politiques qui amenèrent la nécessité de créer le canal. On tenait à ne pas rester presque entièrement à la merci d'une puissance étrangère qui n'avait aucun intérêt direct à préserver une masse de propriétés de l'envahissement des eaux. Ce fut donc un acte de justice parce que les anciens moyens d'écoulement n'existaient plus, sans que ce résultat pût être attribué aux propriétaires du sol.

« D'ailleurs, cette voie d'écoulement, qui a coûté 5 millions, n'est pas le seul travail qu'on ait exécuté dans les Flandres depuis 1830 et ayant une destination identique. On a encore créé le canal du sud de Bruges, celui de Deynze par Schipdonck à la mer du Nord, le plus considérable de tous, dont la dépense est évaluée à près de 10 millions, et cela sans exiger aucun sacrifice des partes intéressées.

« D'un autre côté, quand on considère qu'au 1er janvier 1854 une somme de 265,671,000 francs avait été dépensée à améliorer nos voies de communication, si favorables au développement de tous les intérêts privés, il devient difficile de maintenir la mesure exceptionnelle prise à l'égard des canaux de Selzaete et de la Campine. »

Dans la discussion qui s'ouvrit, l'honorable M. AIp. Vandenpeereboom prit le premier la parole en déclarant qu'à ses yeux le principe de la loi de 1807 ne devait plus être appliqué ni au canal de la Campine, ni au canal de Selzaete, ni aux autres voies navigables.

Le même jugement, la même appréciation se retrouvent dans les discours de tous les orateurs, et la loi fut votée à l'unanimité.

Je sais bien, messieurs, que la loi de 1859 ne parle que des frais de construction ; mais il est évident que, dès qu'on ne demande plus aux propriétaires riverains une part dans les irais de construction, on ne saurait pas davantage leur imposer une part dans les frais d'entretien. Il y a une connexité dans les principes, il y en a une aussi dans l'application ; et l'article 4 de la loi de 1842, qui parle du concours annuel des propriétaires dans les dépenses d'entretien, est évidemment subordonné à l'article 2 qui leur impose une part dans les frais de construction.

Dans cet état de choses, je ne pense pas que la question puisse encore aujourd'hui soulever le moindre doute ; il serait impossible de demander aux propriétaires intéressés une part dans les frais d'entretien lorsque, depuis un grand nombre d'années, l'Etat les a pris à sa charge. Cela serait complètement injuste à l'égard des riverains du canal de Selzaete, puisqu'on ne songe plus à demander cette intervention pécuniaire aux riverains du canal de la Campine. Cela serait injuste parce que ce serait une mesure exceptionnelle ; cela le serait aussi par ce motif que l'honorable M. Mascart a développé dans son rapport, que le canal de Selzaete a été une œuvre de réparation ; et, en effet je puis le dire, les populations auxquelles ce canal a été accordé n'y ont pas seulement vu un bienfait considérable pour l'avenir, mais l'acquit d'une dette du passé, et d'une dette sacrée puisqu'elle se liait à la fondation de l'indépendance nationale.

- La discussion générale est close ; l'assemblée passe à la discussion des articles.

Discussion des articles

Chemin de fer

« Art. 1er. Des dépenses se rapportant à des exercices clos (1862 et antérieurs) pourront être imputées à charge du budget des travaux publics pour l'exercice 1863, jusqu'à concurrence de 40,783 fr. 12 c. et y formeront un chapitre X, subdivisé comme suit :

« Paragraphe premier. Ponts et chaussées.

« Routes :

« Art. 89. Entretien ordinaire, etc. Exercice 1831 : fr. 1,609 30, exercice 1832 : fr. 30 92.

« Canaux et rivières.

« Art.90.Entretien ordinaire, etc. Exercice 1861 : fr. 600, exercice 1862 : fr. 5,600.

« Art. 91. Dyle et Demer (travaux d'amélioration) (exercice 1862) : fr. 387 43.

« Ports et côtes.

« Art. 92. Entretien ordinaire, etc. (exercice 1862) : fr. 7,246 57.

« Frais d'études et d'adjudications.

« Art. 93. Etudes de projets etc. Exercice 1860 : fr. 550, exercice 1861 : fr. 450, exercice 1862 : fr. 803.

« Total : fr. 17,277 22.

« Paragraphe 2. Chemin de fer, etc.

« Art. 94. Services en général : matériel (exercice 1862) : fr. 3,881 22.

« Paragraphe 3. Commission des annales des travaux publics

« Art. 95. Publication du recueil, frais de bureau, etc. (exercice 1862) : fr. 641.

« Paragraphe 4. Dépenses imprévues

« Art. 96. Entretien du canal de Selzaete (exercice 1861) : fr. 18,983 68.

« Total général : fr. 40,785 12. »

M. Guillery. - Cet article qui comprend un crédit pour le chemin de fer, m'amène à adresser une interpellation à M. le ministre des travaux publics, relativement à un accident qui dernièrement a eu lieu sur la ligne de raccordement des deux stations de l'Etat à Bruxelles. Je ne sais quelle est la part de responsabilité qui revient à l'administration dans cet accident ; mais j'ai ouï dire par plusieurs personnes que souvent les convois de marchandises excédaient la vitesse qui leur a été prescrite par la convention faite entre le département des travaux publics et la ville de Bruxelles. J'appelle donc l'attention de M. le ministre sur ce point et spécialement sur une chose plus importante encore que de régler la vitesse des convois ; ce serait d'exécuter le plus tôt possible le raccordement en dehors de Bruxelles.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen. - Je déplore comme tout le monde l'accident qui est arrivé dernièrement sur le chemin de fer de raccordement établi au boulevard du Midi ; mais je crois que l'administration en est parfaitement innocente. J'ai la conviction que le convoi n'avait pas une marche plus rapide que ne le permettent les règlements.

Les convois qui circulent par le boulevard du Midi sont précédés d'un guide marchant au pas gymnastique, mais qui ne peut évidemment pas excéder une certaine vitesse, très modérée pour un convoi de chemin de fer.

Le guide était parfaitement à son poste, mais la malheureuse dame qui a été la victime de cet accident, s'est jetée sous le convoi entre le guide et la machine.

Messieurs, les accidents sont très rares sur la ligne de raccordement entre la section de l'Allée Verte et celle du Midi ; il faut cependant reconnaître aussi que la disposition des lieux y prête beaucoup et que, pour motif seul, il y a lieu évidemment de déplacer le plus tôt possible cette voie de raccordement. La Chambre s'est occupée à diverses reprises déjà de cet objet, et je puis lui annoncer que je considère comme définitivement et complètement terminées les études qui le concernent.

Le plan arrêté me semble remplir toutes les conditions désirables ; on raccorderait les stations du Nord et du Midi par une ligne extérieure traversant Molenbeek-Saint-Jean et rejoignant au pont da Laeken le chemin de fer de Dendre et Waes. Ce n'est plus qu'une question d'argent. Quand le gouvernement pourra demander et que la Chambre voudra allouer les fonds nécessaires, ce travail si utile pourra être commencé et promptement achevé. La dépense est évaluée à cinq millions de francs.

M. Magherman. - Je désire appeler l'attention du gouvernement sur un autre raccordement : c'est celui du chemin de fer d'Eecloo à Gand avec le chemin de fer de l'Etat. Il paraît qu'il y avait quelques difficultés provenant du département de la guerre. Il y a plus d'une année que, sur mon interpellation, l'honorable ministre des travaux publics a déclaré que cet obstacle était sur le point de s'évanouir. Depuis lors on n'a plus entendu parler de ce raccordement. Il est important cependant de relier le chemin de fer d'Eecloo à la ligne de l'Etat et aux lignes concédées qui aboutissent et vont aboutir à la station de Gand.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen. - Je regarde le raccordement dont vient de parler l'honorable membre comme indispensable et urgent. L'état de choses existant entre la ligne d'Eecloo et le chemin de fer de l’Etat est très fâcheux.

Il faut transborder, pour Eecloo, et les voyageurs et les marchandises. Cela nuit à la ligne concédée comme aux lignes de l'Etat et est un obstacle à ce qu'elles fassent le trafic qu'elles devraient faire.

En réalité, c'est là une situation qu'il appartient exclusivement au concessionnaire de redresser. C'est à lui à relier à ses frais, comme il pourra, sa ligne au réseau de l'Etat. Il devrait pour cela traverser le champ de manœuvres ; le département de la guerre s'est opposé à ce qu'il le fît jusqu'au moment où un nouveau champ de manœuvres convenable lui serait offert par le concessionnaire.

D'après les communications officielles que j'ai reçues récemment, un arrangement serait sur le point d'intervenir entre ce département et la société du chemin de fer d'Eecloo.

(page 364) La compagnie fournirait un autre champ de manœuvres ; il y aurait lieu à un échange de terrain, par suite duquel le champ de manœuvres actuel pourrait être employé par la compagnie.

M. Magherman. - Je remercie M. le ministre des explications qu'il vient de donner à la Chambre ; je l'engage à activer autant que possible l'exécution de ce raccordement.

M. Kervyn de Lettenhove. - Je viens joindre mes sollicitations à celles de l'honorable M. Magherman.

- La discussion est close.

L'article premier est mis aux voix et adopté.

Article 2

« Art. 2. Des crédits supplémentaires, à concurrence de 527,837 fr. 53 c, sont alloués au département des travaux publics, pour couvrir les insuffisances que présentent certaines allocations du budget de 1863 ; ils se répartissent comme suit entre les divers articles de ce budget auxquels ils sont rattachés :

« Chapitre premier. Administration centrale

« Art. 3. Frais de déplacements : fr. 723 88

« Art. 5. Matériel, impressions, chauffage, éclairage, etc. : fr. 5,200. »

« Art. 6. Honoraires des avocats du département : fr. 184 70.

« Chapitre II. Ponts et chaussées

« Section première. Routes

« Art. 7. Entretien ordinaire, etc. : fr. 25,000.

« Section III. Canaux et rivières

« Art. 13. Meuse : Travaux d'amélioration : fr. 10,084 77.

« Art. 15. Canal de Maestricht à Bois-le-Duc, id. : fr. 2,793 28

« Art. 27. Canal de Gand à Ostende, id. : fr. 2,988 09

« Art. 31. Moervaert, id. : fr. 135 64

« Art. 35. Rupel, id. : fr. 162 78

« Section IV.—Ports et côtes.

« Art. 39. Entretien ordinaire, etc. : fr. 13,661 61

« Art. 41. Phares et fanaux : travaux d'amélioration : fr. 1,552 78

« Section V. —Frais d'études, etc.

« Art. 62. Etudes de projets, frais d'adjudications, etc. : fr. 7,600

« Chapitre IV. Chemin de fer, etc.

« Section première. Voies et travaux.

« Art. 55. Salaires : fr. 23,000

« Section II. Traction et matériel.

« Art. 59. Salaires : fr. 55,000

« Section III. Transports.

« Art. 64. Salaires : fr. 111,500

« Art. 65. Frais d'exploitation : fr. 50,000

« Art. 66. Camionnage: fr. 57,500

« Art. 67. Pertes et avaries : fr. 30,000

« Art. 68. Redevances aux compagnies : fr. 75,000.

« Section V. Télégraphes.

« Art. 74. Salaires : fr. 11,000

« Chapitre IX. Dépenses imprévues

« Art. 88. Entretien du canal de Selzaete : fr. 44,770

« Total : fr. 527,837 53. »

- Adopté.

Articles 3 à 5

« Art. 3. II est ouvert au département des travaux publics un crédit complémentaire de 1,075,000 francs pour renouvellement extraordinaire du matériel de transport.

« Ce crédit formera le chapitre XI, article 97 du budget de ce département pour l'exercice 1863. »

- Adopté.


« Art. 4. Le crédit de 120,000 francs alloué au département des travaux publics par la loi du 1er juin 1863, pour l'exécution de divers travaux d'amélioration et d'ornementation à la salle des séances du Sénat, est augmenté de 17,000 francs. »

- Adopté.


« Art. 5. Ces crédits seront couverts au moyen des ressources ordinaires de l'exercice 1863. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet.

Le projet est adopté à l'unanimité des 76 membres qui ont répondu à l'appel. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel :

MM. Verwilghen, Visart, Wasseige, Allard, Bara, Beeckman, Bouvier, Coppens, David, de Baillet-Latour, de Brouckere, Declercq, de Conninck, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, Delaet, Delcour, De Lexhy, de Macar, de Mérode, de Montpellier, de Moor, de Renesse, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, d'Hane-Steenhuyse, Dolez, Dubois, Barthélémy Dumortier, Henri Dumortier, d'Ursel, Frère-Orban, Frison, Goblet, Grandgagnage, Grosfils, Guillery, Hayez, Hymans, Jacobs, Jamar, M. Jouret, Kervyn de Lettenhove, Lange, Le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Magherman, Mascart, Moncheur, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Rogier, Soenens, Tack, Thienpont, Thonissen, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Overloop, Van Renynghe, Van Volxem et Ernest Vandenpeereboom.

- La séance est levée à 4 heures trois quarts.