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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 15 mai 1863

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1862-1863)

(page 951) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Boe procède à l'appel nominal à 1 heure et quart et donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction n est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

Il communique ensuite l'analyse des pièces adressées à la Chambre :

« La direction du chemin de fer d'Aix-la-Chapelle à Maestricht, Hasselt, Landen, présente des observations contre la demande en concession du chemin de fer de Bevert à Hasselt. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la concession de chemins de fer.


« Les membres du conseil communal d'Harlebeke prient la Chambre d'autoriser la concession du chemin de fer de Courtrai à Denderleeuw et de décider que cette ligne passera par Harlebeke. »

- Même renvoi.


« Le sieur Colen, ancien commis à l'administration du chemin de fr, demande à être réintégré dans son emploi ou qu'on lui accorde un traitement jusqu'au jour de la restitution de ses pièces. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Vanhael, pensionné de 1830 et décoré de la croix de Fer, demande un subside pour faciliter à son fils, caporal au régiment des carabiniers, l'entrée à l'école militaire. »

- Même renvoi.


« Le sieur Contreras demande une place dans la société immobilière, prie la Chambre d'ajourner le projet de loi sur les bourses et propose une série de mesures relatives à des objets divers. »

- Même renvoi.


« Par dépêche en date du 13 courant, le Sénat informe la Chambre qu'il a adopté le projet de loi fixant les traitements de la magistrature militaire. »

- Pris pour notification.

Projet de loi relatif aux bourses d’études

Discussion des articles

Chapitre II. Fondations au profit de boursiers

Article 38

M. le président. - La Chambre a réservé la discussion et le vote sur l'article 38 et l'amendement de M. Orts.

« Art. 38. Le boursier a la faculté de fréquenter un établissement public ou privé, à moins que le fondateur n'ait stipulé qu'il devra suivre les cours d'un établissement organisé par la loi.

« Toutefois, le boursier ne pourra opter qu'entre les établissements du pays.

« Le gouvernement pourra, sur la demande de la famille et après avoir pris l'avis de la commission administrative, autoriser les études à l'étranger. »

L'amendement de M. Orts est ainsi conçu :

« Quelles que soient les stipulations de l'acte de fondation, le boursier a la faculté de fréquenter un établissement public ou privé à son choix. »

Le reste comme à l'article.

M. Wasseige. - L'amendement déposé par l'honorable M. Van Overloop et moi contient un principe absolu et radical, c'est l'abrogation de l'article 900 du Code civil en ce qui concerne les donations et legs en faveur de l'enseignement, c'est l'annulation de toutes les dispositions contenant des conditions contraires aux lois. Il me paraît devoir être discuté avant celui de M. Orts, qui donne, lui, une nouvelle consécration au principe contraire ; je pense donc que notre amendement devrait avoir la priorité. Mais l'on me dit que M. Van Overloop s'est rendu aux obsèques de notre regretté collègue de Virton, je ne vois pas non plus l'honorable M. Orts à son banc ; il me paraît donc qu'il serait convenable d'attendre la venue de es messieurs, toit en suivant l'ordre de discussion que j'indique, l'on pourrait, d'ailleurs, discute d'abord l'amendement de l'honorable M. Nothomb et consorts, sans qu'il y eût dans ces interversions le moindre inconvénient.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - On pourrait aborder le chapitre III en réservant les articles amendés.

Chapitre III. Dispositions générales

Article 43

« Art. 43. Le gouvernement veille à ce que les biens et les revenus des fondations en faveur de l'enseignement, ainsi que ceux des fondations au profit de boursiers, soient conservés et affectés à leur destination.

« Il pourra en tout temps se faire rendre compte de la situation de chaque fondation, et annuler les décisions des administrations qui seraient contraires aux lois ou à l'intérêt général.

« L'annulation des délibérations des administrations communales devra être prononcée dans les délais et de la manière fixés par l'article 87 de la loi communale.

« Les délibérations des autres administrations devront être annulées dans un délai de quarante jours à partir de celui où elles auront été portées à la connaissance du gouvernement.

« Après le délai de quarante jours fixé par les deux paragraphes précédents, les actes mentionnés dans le paragraphe 2 ne pourront être annulés que par le pouvoir législatif. »

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je propose de supprimer dans le paragraphe 2 les mots « en tout temps ».

Dans l’esprit de la disposition, ces mots ne se rapportent qu'au premier membre de phrase et d'après la réduction on pourrait croire qu'ils se rapportent également à la deuxième partie de ce paragraphe.

Les délais sont fixés par les paragraphes 3 et 4.

Le paragraphes 2 serait ainsi conçu : « Il pourra se faire rende compte de la situation de chaque fondation et annuler, etc. », attendu que c'est quand il le jugera convenable qu'il pourra se faire rendre compte.

- L'article 43 ainsi modifié est mis aux voix et adopté.

Article 44

« Art. 44. Il sera fait, tous les trois ans, un rapport spécial aux Chambres sur le nombre et sur la situation financière des fondations, avec un état des immeubles et des rentes affectés à chacune d'elles.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je propose de remplacer les mots « des immeubles et des rentes affectés », par ceux-ci : « des biens de toute nature affectés ».

- L'article 44 ainsi modifié et mis aux voix et adopté.

Article 45

« Art. 45. Si la volonté du fondateur ne peut plus être suivie en tout ni en partie, soit parce que l'établissement ou les branches d'enseignement n'existent plus, soit parce que les appelés font défaut, le roi, après avoir pris l’avis dis administrations intéressées, prendra les mesures pour y suppléer de la manière la plus conforme au but que s'est proposé le fondateur. »

M. le président. - M. le ministre de la justice propose la rédaction suivante :

« Si la volonté du fondateur ne peut être suivie en tout ou en partie, soit parce que l'établissement ou les branches d'enseignement n'existent plus, soit parce que les appelés font défaut, soit par tout autre motif, le roi, après avoir pris l'avis des administrations intéressées, prendra les mesures pour y suppléer de la manière la plus conforme au but que s'est proposé le fondateur.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est un simple changement de rédaction.

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 46

« Art. 46. Tous les actes contenant les libéralités affectées aux fondations prévues par la présente loi, ainsi que les arrêtés d'autorisation, seront, par ordre de date, transcrits sur un registre spécial qui devra être déposé au secrétariat de chaque administration, à l'inspection de tous ceux qui demanderont à pouvoir en prendre communication sans déplacement. »

M. le président. - M. le ministre de la justice propose de remplacer cet article par la rédaction suivante :

«Tous les actes contenant des libéralités affectées aux fondations prévues par la présente loi, ainsi que les arrêtés d'autorisation, seront, par ordre de date, transcrits sur un registre spécial déposé au secrétariat de chaque administration.

« Il en sera de même de tout arrêté concernant l'organisation des fondations.

« Un autre registre contiendra l'état exact des propriétés appartenant à chaque fondation, avec le montant des revenus annuels, la désignation cadastrale des immeubles, celle des noms et de la demeure des débirentiers et la description des biens servant d'hypothèques. Les mutations concernant ces divers objets y seront également inscrites.

« Ces registres seront à l'inspection du public sans pouvoir être déplacés. »

(page 952) M. de Theux. - Messieurs, je crois que l’article 46 tel qu'il est présenté donnera lieu à des dépenses considérables et ne suffira pas pour la publicité qui doit être faite en cette matière.

Il est tout naturel qu'on réunisse les actes des fondations en original tels que les administrations les possèdent au siège de l'administration qui sera ultérieurement chargée de l'administration et de la collation.

Cela est très bien.

Mais si la loi a un effet rétroactif, l'article 46 ne me paraît pas suffisant.

Comme les administrations seront déplacées, centralisées et que la consultation de ces actes donnera lieu à des frais assez considérables, je crois qu'il faudrait imprimer tous les actes de fondation anciens et en faire une collection qui reposerait d'abord au chef-lieu de chaque province et au chef-lieu de chaque arrondissement où les parties pourraient la consulter à l'aise.

L'impression de ce document coûterait beaucoup moins que la mesure proposée par l'article et qui ne donnerait pas toutes les facilités désirables, mais il est bien entendu que cet imprimé serait collationné et certifié conforme de manière qu'il eût un caractère d'authenticité.

Ce serait une grande facilité.

Je. demanderai à M. le ministre de la justice s'il a des objections à faire à cette proposition.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, je crois nécessaire d'insérer dans la loi la disposition de l'article 46.

Quant à la publication de tous les actes, je crois également qu'il sera utile de la faire, mais l'honorable M. de Theux n'ignore pas que c'est un travail très long ; depuis quatre ou cinq mois, je m'en occupe très sérieusement ; mais je ne pense pas qu'avant un an ou deux il soit possible d'avoir cette publication au complet, quelque zèle et quelque activité qu'on y mette.

Si cela avait été possible, bien loin de cacher les actes, j'aurais désiré les soumettre à la Chambre même avant la discussion. Pour que ce travail ait quelque utilité, il faut d'abord réunir tous les actes qui ont établi les fondations et tous les documents qui les ont modifiés, et comme une grande partie de ces actes sont en latin ou en flamand, il faut en faire la traduction ou tout au moins faut-il faire la traduction des passages concernants.

Ce travail doit encore comprendre, autant que faire se pourra, les renseignements qui ont été demandés sur la proposition de l'honorable M. de Theux, à savoir : les propriétés qui sont affectées à chaque fondation.

Ce travail se fera ; j'en prends l'engagement vis-à-vis de la Chambre. Depuis quatre ou cinq mois, comme je viens de le dire, j'en prépare les éléments, et avant peu l'on commencera à imprimer les documents relatifs aux fondations qui concernent la province d'Anvers, la première dans l'ordre alphabétique.

M. de Theux. - Du moment que M. le ministre de la justice s'occupe de ce travail et prend l'engagement de le continuer...

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'en prends l'engagement le plus formel.

M. de Theux. - Mon but est atteint, mais je ferai remarquer qu'il importe que la famille puisse obtenir des exemplaires de ce travail.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Ce travail sera dans le commerce. Il y aura un cahier par fondation, et ce cahier contiendra tous les titres qu'il sera possible de réunir relativement à cette fondation.

M. de Theux. - J'ajouterai que, quelque soit le sort ultérieur de la loi, ce sera une mesure qui aura toujours une grande utilité, et que le gouvernement peut toujours poursuivre.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Certainement.

M. de Theux. - Ce sera une mesure qui sera vue avec plaisir.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Si ce travail avait pu se faire dans un délai rapproché, il aurait été fait avant la discussion de la loi ; mais je donne à la Chambre l'assurance la plus formelle que cela était impossible ; tous les documents qu'il faut réunir, les traductions qu'il faut faire, les renseignements qu'il faut recueillir, prendront nécessairement quelques années.

Nous aurons, du reste, quand ce travail sera achevé, un des recueils des plus complets en ce qui concerne les fondations du pays.

M. de Theux. - Ces explications me satisfont complétement. Seulement je regrette qu'avant de présenter le projet, M. le ministre de la justice n'ait pas commencé par le travail dont il parle. Cela n'aurait pas laissé que de jeter du jour sur la discussion.

Mais c'est du passé ; c'est trop tard.

- L'article, modifié comme le propose M. le ministre de la justice, est adopté.

Article 47 (nouveau)

M. le président. - Vient l'article 47 nouveau proposé par la section centrale :

« Art. 47. Les libéralités faites par actes entre-vifs seront toujours acceptées tous réserve de l'approbation de l'autorité compétente. Cette acceptation liera sous la même réserve le donateur, dès qu'elle lui aura été notifiée.

« Cette notification et celle de l'approbation éventuelle pourront être constatées par une simple reconnaissance du donateur, délivrée à l'administration intéressée. »

M. Bara, rapporteur. - Messieurs, je propose un amendement à cet article : c'est de remplacer les mots « par une simple reconnaissance du donateur, délivrée à l'administration intéressée » par ce qui suit :

« Par une simple déclaration du donateur authentiquement certifiée au bas de l'acte portant acceptation.

« Lorsqu'il y aura donation de biens susceptibles d'hypothèque, la transcription des actes contenant la donation et l'acceptation provisoire ainsi que la notification de l'acceptation provisoire qui aurait eu lieu par acte séparé devra être faite aux bureaux des hypothèques, dans l'arrondissement duquel les biens sont situés.

« II en sera de même de la notification de l'acceptation définitive. La transcription des actes qui précèdent l'acceptation définitive se fera en débet. »

Messieurs, l'amendement que je propose a pour but de mettre le projet de loi en harmonie avec la loi hypothécaire. Il arrive souvent qu'une donation faite à une administration publique ne peut pas être acceptée définitivement parce que l'administration n'a pas reçu l'autorisation de l'autorité supérieure. Or, il importe de délier le donateur, et pour cela il faut inscrire dans la loi que l'acceptation pourra résulter de l'acceptation et de la notification au donateur. L'acceptation et la notification pourraient être faites sous seing privé, mais comme il faut que la donation soit transcrite, il faut dire que l'acceptation et la notification devront être faites par acte authentique et que la transcription de ces actes pourra se faire en débet.

M. de Theux. - Messieurs, jusqu'à présent, lorsqu'une donation est faite sous certaines conditions, l'acte ne devient parfait qu'après l'approbation de l'autorité supérieure, sans aucune modification à l'acte de donation. Je ne sais pas si la rédaction proposée par M. le rapporteur a pour objet de changer cette législation ; car il est bien certain que celui qui fait une donation sous certaines conditions peut retirer la donation si les conditions sont rejetées ; on l'a toujours entendu ainsi sous tous les régimes et je pense qu'on ferait mal de porter atteinte à ce principe.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, ni l'article additionnel, proposé par la section centrale, ni l'amendement proposé aujourd'hui par l'honorable M. Bara, ne touchent en rien aux principes dont a parlé l'honorable M. de Theux.

Voici la difficulté à laquelle il s'agit de parer. Aujourd'hui la donation n'est parfaite que par l'acceptation et cette acceptation doit être précédée de l'autorisation du gouvernement. Il arrive que cette acceptation éprouve des retards et le donateur peut venir à décéder avant que l'autorisation d'accepter n'ait pu être donnée à l'établissement institué.

M. Wasseige. - C'est ce qui est arrivé pour l'affaire de Burdinne.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est possible. On s'adresse souvent au département de la justice pour annoncer que la personne qui a fait une donation est malade et pour demander qu'une décision intervienne dans un bref délai. Pour éviter cette difficulté, le projet de loi consacre le principe d'une acceptation provisoire qui lie le donateur.

M. Notelteirs. - Si, dans le cas d'une donation entre-vifs acceptée provisoirement, il y a une condition qui pour le donateur a été le motif de sa donation et si le gouvernement, après l'acceptation provisoire, considère la condition comme non écrite, la donation sera-t-elle parfaite ? En cas d'affirmative, vous aurez un donateur qui, de son vivant même, verrait ses volontés foulées aux pieds. Cela n'est pas justifiable.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Vous avez aujourd'hui les mêmes principes. Que se passe-t-il dans l'application ? Quand le gouvernement, appelé à approuver, ne peut accepter une des conditions de la donation, il en avertit le donateur, avant de soumettre un arrêté à la sanction du Roi et si le donateur ne consent pas à modifier les conditions, il n'est pas donné suite à la libéralité. Du reste, je le répète, par la disposition du projet de loi, nous ne faisons que parer à un inconvénient. Nous ne modifions pas l'article 900 du Code civil. Nous ne touchons en rien aux autres principes.

(page 953) M. Notelteirs. - Les objections faites à mes observations prouvent, à mon avis, une fois de plus l'abus absurde que l'on pourra faire, au moyen de l'article, de la théorie des conditions non écrites.

M. Nothomb. - S'il y a acceptation provisoire de la part du gouvernement, le département de la justice aura-t-il soin d'en prévenir le donateur, afin que celui-ci, connaissant la position qui lui est faite, puisse agir en conséquence ? Cela me paraît indispensable, il faut que le donateur sache à quelle condition il serait lié.

Je demande sur ce point une explication catégorique à M. le ministre.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, l'honorable M. Nothomb ne se rend pas bien compte de la disposition. Ce n'est pas le gouvernement qui autorisera l'acceptation provisoire ; mais les parties qui interviendront à l'acte pourront accepter provisoirement, avant d'avoir été autorisées. Aujourd'hui, l'acceptation donnée avant l'autorisation n'est pas valable, eh bien, on veut donner un effet à l'acceptation provisoire, on veut que si le donateur vient à décéder avant que l’acceptation soit devenue définitive par l'autorisation, la donation ne soit pas caduque.

Si, par exemple, après l'acceptation provisoire, le gouvernement trouve qu'il y a dans l'acte des conditions qu'il ne peut pas approuver, il suivra la même marche qu'aujourd'hui : il déclarera qu'il ne peut pas approuver et la libéralité n'aura aucun effet. Cela ne peut pas faire l'ombre d'une difficulté.

Je le répète, le projet de loi n'introduit pas un principe nouveau. On n'a nullement pour but de changer le code civil ; on a voulu simplement parer à un inconvénient qui se produit tous les jours dans la pratique.

M. Nothomb. - C'est donc un acte purement conservatoire.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Pas autre chose.

M. Notelteirs. - J'admettrais la disposition si j'avais la certitude que le gouvernement agira toujours avec cette délicatesse.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est une marche qui a été toujours invariablement suivie.

M. Notelteirs. - En pratique, depuis quelque temps, c'est possible ; mais il n'est pas moins vrai que cette disposition devenue loi peut donner lieu aux plus grands abus ; et cette possibilité me suffit pour la repousser.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - On dit que cette législation peut donner lieu aux plus grands abus ; mais, messieurs, elle existe depuis fort longtemps et le gouvernement ne fait que l'appliquer comme elle doit l'être.

Je le répète, la loi, sous ce rapport, n'introduit aucun principe nouveau. Jamais aucune donation n'a été autorisée sans qu'à l'avance le donateur ait été averti quand il avait imposé quelque condition que l'administration croyait ne pas pouvoir accepter.

On a donc tort de faire ici le procès à cette disposition, puisque, loin d'introduire aucun principe nouveau, elle n'a pour but que l'application des principes généraux du droit.

M. B. Dumortier. - Cet article, messieurs, a une importance excessive... (interruption) car dans les termes où il est formulé, le gouvernement pourra s'emparer, par exemple, d'une donation faite, par une personne vivante, alors même qu'il rejetterait les conditions attachées à cette donation.

M. le ministre de la justice (M. Tesch) - Il le pourrait aujourd'hui.

M. B. Dumortier. - Il n'aurait pas le droit de le faire aujourd'hui. Depuis quand donc aurait-il ce droit ? Est-ce que les contrats ne lient pas le gouvernement comme les particuliers ?

Depuis quand donc vous est-il permis, à vous gouvernement, de prendre une donation en rejetant les conditions qui y sont attachées ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Mais depuis que le Code civil existe.

M. B. Dumortier. - Il en est des actes de donation comme des actes de commerce les uns et les autres doivent être considérés dans leur ensemble et acceptés ou rejetés complètement. C'est ce qu'a décidé la cour de cassation.

Je dis que vos principes sont contraires au droit et sont en opposition avec tout ce qui a été décidé par vos cours et tribunaux et spécialement par la cour d'appel et par la cour de cassation dans la question du legs de Raere.

Si votre principe était fondé, ce serait dans tous les cas un principe malhonnête et contraire à la loyauté et à la probité politique Encore une fois, une donation doit être acceptée dans son entier ou complètement rejetée ; mais il ne vous est point permis de prendre l'argent et de rejeter les conditions auxquelles il est donné.

D'après le premier paragraphe, les libéralités faites par acte entre-vifs seront toujours acceptées sous réserve de l'approbation de l'autorité compétente, et l'on ajoute : « cette acceptation liera sous la même réserve le donateur, dès qu'elle lui aura été notifiée. »

Ainsi l'acceptation du gouvernement, même lorsqu'il n'accepte pas les conditions sacramentelles, lie le donateur. Ainsi, je suis un curé de village, je fais une libéralité de 10,000 francs, mais si j'y mets la condition que mes successeurs, curés, auront le droit d'intervenir dans la donation.

Eh bien en vertu de cet article le gouvernement rejettera la condition et forcera le vieux curé de payer la somme. C'est dans ce but que l'article a été introduit ; il était inutile sans cela.

- Un membre. - Cela existe.

M. B. Dumortier. - Je connais un de mes amis à Tournai qui a fait au bureau de bienfaisance une donation, et y avait mis des conditions que le gouvernement ne crut pas devoir admettre ; le gouvernement lui a dit : Je n'accepterai votre legs qu'à la condition d'y apporter telle modification.

Aussi alors vous n'étiez pas armé d'un article 49 comme celui que vous demandez. La donation sera maintenue par vous, le donateur sera lié quand bien même les conditions ne seraient pas acceptées. M. le ministre de la justice prétend que c'est dans son droit à lui aux termes de l'article 900, ce qui est contraire à l'arrêt de la cour de cassation.

M. Wasseige. - La discussion à laquelle se livre mon honorable collègue M. Dumortier me paraît prématurée ; mais elle viendra parfaitement à point lorsque nous examinerons l'amendement que nous avons déposé, mon honorable ami M. Van Overloop et moi ; cet amendement a pour but de porter remède à tous les inconvénients signalés par l'honorable M. Dumortier, inconvénients très réels et très graves. Il est très vrai que le gouvernement applique l'article 900 du Code civil aussi bien aux donations entre-vifs qu'aux testaments. C'est parce que nous avons été frappés de l'injustice de ce système, que nous avons cherché à le faire disparaître par notre amendement qui l'abroge en ce qui est relatif aux donations et legs en faveur de l'instruction.

Si l'article nouveau proposé par l'honorable M. Bara avait la portée qu'on lui donne, il faudrait en renvoyer à la discussion jusqu'au moment où l'on s'occupera de l'amendement de M. Van Overloop.

Mais, autant que j'ai pu le comprendre à une première lecture, je ne le pense pas, et il me paraît que l'on pourrait le voter, tout en réservant complètement ses droits et son opinion sur le système du gouvernement relativement à l'article 900 du Code civil.

M. Bara, rapporteur. - D'après M. Dumortier, il y aurait un droit catholique et un droit libéral ; et nous voudrions faire prévaloir des principes contraires à certaines idées de la droite. Or, l'amendement que j'ai présenté contient la même disposition que le projet de loi de 1854 et celui de M. Nothomb de 1857 ; de sorte que si nous sommes complices d'une violation de la Constitution et de tous les principes de l'honnêteté, nous sommes en bonne compagnie.

M. B. Dumortier. - Ce n'est pas cela !

Ce que nous discutons, c'est l'amendement de la section centrale.

M. Bara, rapporteur. - Entre l'article de la section centrale, amendé par le projet de loi de 1854 et le projet de 1857 de M. Nothomb, il n'y a pas de différence.

Il ne faut donc pas prétendre que nous introduisons des principes nouveaux dans la loi.

Il s'agit de savoir si une donation faite à un établissement qui ne peut immédiatement accepter définitivement par suite des délais nécessaires pour l'obtention de l'autorisation des corps supérieurs, ne peut être de suite acceptée de manière à lier le donateur.

Il ne s'agit pas de l'article 900 du code civil. Vous pouvez voter cet article sans décider que l'article 900 subsistera ou sera modifié.

L'amendement de M. Van Overloop reste entier.

Au surplus, aujourd'hui le gouvernement pourrait s'emparer de la donation sans que le donateur sache rien du refus d'exécuter les conditions illégales. (Interruption.)

Je dis que sous l'empire des dispositions existantes, le curé qui aurait, d'après M. Dumortier, fait une donation avec la condition d'administration spéciale, pourrait voir accepter la donation et supprimer l'administration spéciale sans qu'il en sache rien ; on lui notifierait l'acceptation du gouvernement, il serait tenu d'exécuter la donation, l'acte serait complet. Ce n'est là ni du droit libéral, ni du droit catholique, c'est du droit selon le code civil. M. Wasseige le reconnaît en ce moment, vous voyez que nous pouvons voter cet article sans nous rendre coupables des énormités que M. Dumortier veut nous attribuer.

M. de Theux. - Du moment que l'amendement de M. Bara ne (page 954) préjuge en rien celui de MM. Wasseige et Van Overloop, nous pouvons passer outre. II ressort clairement de la déclaration de M. le ministre de la justice que le gouvernement n'accepte pas les donations en annulant les conditions sans avoir prévenu le donateur. Cela est loyal et doit être toujours pratiqué dans l'avenir.

Nous examinerons cela à l'amendement de M. Wasseige. Les hommes çe leurs principes passent, on ne sait pas ce qui peut arriver.

Puisque c'en la marche que suit le gouvernement, cette marche honnête et loyale, il n'est pas inutile de lui donner la garantie de la loi.

M. B. Dumortier. - M. le rapporteur nous a parlé de la jurisprudence et du Code civil ; messieurs, je vais vous donner lecture de l'avis de la cour de cassation sur cette mémo question ; le voici :

« Attendu, dit la cour de cassation, que si, aux termes des articles 910 et 957 du Cole civil, les dispositions au profit des hospices, des pauvres d'une commune ou d'établissements publics, ne peuvent être acceptées par les pauvres de ces communes ou établissements qu'après y avoir été dûment autorisées par le Roi, il en résulte bien que le pouvoir exécutif peut refuser cette autorisation, ou ne l'accorder que pour l'acceptation partielle de la libéralité, mais nullement qu'il puisse, en autorisant l'acceptation, supprimer arbitrairement les conditions apposées par le bienfaiteur en ce qui concerne la désignation des administrateurs spéciaux. »

Ainsi la cour de cassation a condamné votre système ; elle a déclaré que ce que vous qualifiez de conditions nulles dans une donation en sont au contraire les conditions essentielles.

Voilà la jurisprudence, c'est la jurisprudence de la Cour de cassation qui a interprété très sainement les articles du Code civil, dont il est question, comme on les interprète en France où le Code civil a pris naissance.

M. Pirmez. - On confond deux choses distinctes : La disposition qui est en discussion et la proposition de M. Van Overloop.

La disposition actuelle détermine quand le donateur est lié ; elle n'innove rien à cet égard ; le droit existant est maintenu ; qu'on rejette ou qu'on adopte l'article, on sera dans une position à peu près semblable. A côté de cette première question, il y en a une autre, celle de savoir si on maintiendra en entier l'article 900 du Code civil. Selon moi, cet article doit disparaître ou être profondément modifié.

Mais en conservant cette opinion qui est celle de M. Dumortier, nous ne devons pas la discuter dans la question qui nous est soumise actuellement.

Nous devons voter l'article de la loi tel qu'il nous est proposé, tout en faisant nos réserves quant à la disposition de l’article 900 du Code civil.

- L'amendement proposé par M. le rapporteur, d'accord avec la section centrale, est mis aux voix et adopté.

L'article ainsi amendé est ensuite adopté.

Article 48 (nouveau)

M. le président. - Il y a un article 48 proposé par la section centrale.

Il est ainsi conçu :

« Art. 48. Les décisions prises par l'autorité administrative, dans les cas des articles 47 et 42, ne portent pas préjudice au droit des intéressés de se pourvoir en justice réglée. »

- Cet article est adopté.

Chapitre IV. Dispositions transitoires

Article 49

M. le président - Nous sommes arrivés à l'article 47 du projet du gouvernement. Cet article devient l'article 49 par suite de l'adoption des deux articles précédents.

M. le ministre de la justice proposé une nouvelle rédaction ainsi conçue :

« Dans un délai qui ne pourra excéder un an, à partir de la publication de la présente loi, la gestion des biens de toutes les fondations d'enseignement ou des bourses ayant une administration distincte, ou rattachées à des établissements incompétents, sera, par arrêté royal pris sur l'avis de la députation permanente de la province et des administrations intéressés, remise aux administrations compétentes d'après la présente loi, pour régir des fondations semblables en appliquant s’il y a lieu les dispositions des articles 32 et 33 ci-dessus. »

Vient ensuite l'amendement de l'honorable M. Nothomb, ainsi conçu ;

« Les fondations reconnues en vertu des arrêtes-lois des 26 décembre 1818, 2 décembre 1823 et 12 février 1829, antérieurement à la publication de la présente loi, continueront à être administrées conformément aux actes d'autorisation, sauf au gouvernement à prescrire, s'il y a lieu, par arrêté royal les mesures propres à assurer le contrôle de la gestion des biens donnés ou légués et leur conservation. »

M. Nothomb. - Je désire compléter la rédaction de l'amendement et je crois que c'est le vrai moment de le faire.

Je me suis aperçu que notre amendement pouvait paraître incomplet ; il l'est surtout après la nouvelle rédaction que vient de proposer M. le ministre de la justice et qui est tout un système.

Nous n'avions parlé dans l'amendement que des fondations reconnues en vertu des arrêtés du gouvernement des Pays-Bas. Or, messieurs, jl y a d'autres fondations d'enseignement reconnues en vertu de diverses dispositions de loi, même autres que celles du roi Guillaume.

Je citerai par exemple les décrets du gouvernement antérieur à celui des Pays-Bas et ceux du gouvernement depuis 1830 qui ont étendu les droits des congrégations hospitalières quant à l'enseignement, de même des fondations reconnues au profit des fabriques d'église pour l'enseignement dominical et d'autres de ce genre.

Ce sont de véritables institutions d'enseignement qui pourraient ne pas tomber sous les termes de notre amendement primitif. Je veux le rectifier en ce sens et je propose la rédaction suivante :

« Les fondations d'enseignement ou de bourses reconnues, soit en vertu des arrêtés-lois des 26 décembre 1818, 2 décembre 1823 et 12 février 1829, soit en vertu d'autres dispositions législatives, antérieurement à la publication, etc. » Le reste comme à l'amendement primitif.

Nous voulons par-là bien constater que nous entendons préserver tout le passé, et le soustraire à la loi nouvelle.

Quant à l'amendement lui-même, je m'en réfère pour le moment aux explications qui ont été données dans la discussion générale.

M. le président. - Voici le changement proposé par l'honorable M. Nothomb :

« Les fondations d'enseignement ou de bourses reconnues, soit en vertu, des arrêtés-lois du 26 décembre 1823 et 12 février 1829, soit en vertu d'autres dispositions législatives, antérieurement à la publication... » (Le reste comme au texte de l'amendement primitif).

Je suppose que l'honorable membre est d'accord sur ce point avec les autres signataires de son amendement.

M. Nothomb. - Oui, M. le président.

M. B. Dumortier. - Je demande l'impression de cet amendement et surtout de celui de M. le ministre.

M. Julliot. - Le caractère exceptionnel au caractère de la plupart de toutes nos lois que revêt cet article m'a déterminé à dire quelques mots, pour motiver mes votes émis et à émettre.

La brièveté de mon discours et la réserve habituelle dans mes expressions me font espérer que vous me ferez l'honneur de m'écouter.

La question que soulève l'article 47, la voici :

Cet article consacre-t-il, oui ou non, le principe de rétroactivité des lois dans son application ? Je dis oui et non.

Non, si vous soutenez avec l'honorable M. Bara que la personnification civile dans tous les cas n'étant qu'une délégation du pouvoir central, il peut la retirer quand bon lui semble, et alors vous pouvez dire que qui peut le plus peut le moins, en respectant néanmoins les intentions du fondateur. Car je vous dénie d'une manière absolue le droit de substituer, dans les testaments, des clauses à d'autres clauses. Mais dans le système de M. le rapporteur, vous pourriez aussi retirer la personne civile à la commune et alors vous faites fausse route, car vous n'êtes plus dans la Constitution.

Oui, il y a rétroactivité dans votre article, si la possession séculaire, les mœurs, les coutumes, le sentiment populaire et la confiance dans les pouvoirs publics de chaque époque, sont encore quelque chose dans le monde.

Sous tous les régimes, on a respecté les traditions sur le respect des testaments dont les dispositions sont applicables, traditions que vous foulez aux pieds si vous confondez tous les testaments, si vous ne distinguez pas entre ceux qui commandent l'éducation religieuse avant tout et ceux qui ne s'occupent que de science.

Selon moi, le gouvernement a introduit cette loi au pas ordinaire, M. le rapporteur a emboîté le pas de charge, et M. le ministre de la justice fait tout ce qu'il peut pour le suivre. Voilà la gymnastique à laquelle nous assistons depuis quelques jours.

Selon moi, les bourses d'études fondées au profit de l'Etat, de la province, de la commune ou d’une administration spéciale constituée en personne civile, c'est de la charité légale, destinée à soulager la misère morale.

Or, comme je tiens pour vrai que la charité officielle, matérielle, crée la misère physique, je dois admettre que la charité officielle, morale, crée en partie la misère morale.

Je suis donc l'adversaire des fondations de bourses en général et je ne crois pas à leur utilité, quelle que soit leur direction.

Car un homme qui, à l'aide d'une bourse d'étude, occupe une place active dans la société est un produit factice qui a pris la place d'un (page 955) homme qui aurait occupé cette place par sa propre énergie et par son initiative ; si donc la bourse a produit son effet, vous avez substitué un homme à un autre, et si la bourse n'a pas opéré, que le boursier après avoir fait ses études et sans ressource, vous avez créé une misère morale. Voilà le résultat. Voilà, messieurs, le grand but social que de part et d'autre vous poursuivez.

Si vous croyez pouvoir proposer la suppression de toutes les bourses par la restitution des capitaux aux ayants droit, on examinera ; mais non, on conserve le principe pour en faire une question de boutique, et c'est le ministère qui a provoqué la querelle.

Or, messieurs, ceci admis, la loi se réduit à une question d'honnêteté.

Un grand nombre des fondations dont il est question respirent avant tout l'enseignement basé sur le principe religieux, il en est même qui exigent la production annuelle d'un certificat de piété.

Eh bien, j'ai entendu dire à cette tribune que cette condition de l'éducation religieuse devait être envisagée comme non écrite, parce que le gouvernement ne reconnaissait pas les établissements religieux.

Mais alors pourquoi ne pas enlever de suite toutes les bourses d'étude du séminaire de Liège qui, lui, ne vous reconnaît pas du tout et dont vous n'avez jamais vu ni compte ni budget ?

Vous ne reconnaissez pas l'existence des établissements religieux et vous y puisez le quart des jurys d'examen qui à ce titre reçoivent votre délégation ; vous exemptez de la conscription les élèves de théologie ; vous laissez subsidier par la commune, votre déléguée, les écoles des petits frères.

Vous fournissez des sommes considérables aux temples et aux presbytères et vous niez la connaissance des établissements religieux d'enseignement.

Vous ergotez sur les jésuites et Louvain pour savoir qui représente le caractère religieux selon les fondateurs. Si votre loi se borne à nier les établissements religieux quand il s'agit de bourses, votre loi est illogique ou hypocrite, mais dans tous les cas un tissu de mensonges.

Messieurs, je n'accuse ni n'excuse personne, je fais de la philosophie ; je vous conjure de ne pas quitter la ligne de la bonne foi ; les passions politiques ne dispensent pas de la droiture dans l'examen de ces questions.

Quand, dans un pays à discussion, les passions politiques sont surexcitées, on ne commet que des injustices et alors on pouvoir absolu est préférable Les passions politiques aveuglent au point qu'elles amènent parfois des désordres stupides et sauvages, sauf à tous ceux qui les ont provoqués à s'en laver les mains ; et cela s'est vu.

Je dis donc que, si votre loi ne respecte pas toutes les clauses des testaments dont l'application est possible, si vous remaniez tous ces actes au profit des universités qui languissent, alors je suis étonné d'une chose, c'est que MM. les ministres, dont l'honnêteté est proverbiale, veuillent nous imposer une loi que je déclare malhonnête au premier chef.

Vous allez vous donner une position quelque peu pareille à celle d'un débiteur de dix années de rente qui a conscience de sa dette ; il invoque la loi de la prescription quinquennale et ne paye que cinq ans. Il est en règle avec la loi, mais il foule sa conscience, la loi lui sert de manteau pour le vol. Cette loi est une voleuse et le débiteur est son complice.

Ici aussi la loi peut tout faire, mais pour qu'elle reste honnête elle doit s'arrêter devant les intentions des fondateurs quand elles sont d'une application possible ou on se rapproche du débiteur que vous savez.

Disposez comme bon vous semble des bourses laissées à l'université de Louvain comme université de l'Etat, mais respectez celles où le sentiment religieux domine comme vous respectez celles pour la théologie ; il n'y a pas de différence ; si vous niez le caractère religieux de Louvain et de Namur, vous devez nier celui des séminaires ou vous êtes illogiques.

Je veux donc, moi, respecter la volonté des fondateurs quand elle est explicite, ne fût-ce que pour éviter des regrets aux sans-culottes de France qui n'y ont pas pensé quand ils étaient au pouvoir.

Messieurs, je remarque avec peine que les lois qu'on nous présente depuis quelque temps, comme celles qu'on nous prépare, tendent à nous nationaliser, non pas selon notre Constitution, mais à la française. Toute loi réglementaire est une restriction, et le grand nombre de lois qu'on nous soumet, prouve que mes appréhensions sont fondées.

Je suis loin de dire du mal de cette nation que j'aime et que j'admire. Mais à chaque ménage ses mœurs et ses coutumes et nous ne devons pas plus nous identifier avec les lois françaises que la France ne s'identifie avec les nôtres ; c'est en France seulement qu'on a parfois rétroagi contre le passé.

Messieurs vous êtes aussi patriotes que moi et vos intentions sont pures ; mais j'ai la conviction que les fonctions de l'Etat que vous grandissez dans chacune de vos lois nous préparent des embarras d'avenir.

Messieurs, les petits pays n'ont de raison d'être que par la diversité de leurs institutions et de leurs mœurs. Quand un petit pays se rapproche d'un grand par ses institutions, il travaille à la disparition des petits Etats au profit des grands, il travaille à l'unité.

Je suis convaincu de cette vérité, j'espère donc des concessions sur le passé ; et si on efface de la loi ce qu'elle a d'odieux, elle sera votée à une grande majorité. J'ai dit,

M. de Haerne. - Messieurs, lorsqu'on voit ce qui se passe dans tous les pays, on doit reconnaître que toujours et partout, excepté en France à une certaine époque, on a eu recours aux fondations pour les études, et ne fût-ce qu'à ce point de vue, je dois envisager ces institutions comme éminemment utiles pour le développement de l'instruction et la diffusion des lumières. C'est parce qu'elles sont si utiles que non seulement il faut les admettre pour le présent et pour l'avenir, mais surtout qu'il faut les maintenir pour le passé.

Par conséquent, je viens m'opposer à la rétroactivité, qui, selon moi, est flagrante dans le projet de loi.

Messieurs, pour contester l'utilité de l'institution dont il s'agit et pour la rendre suspecte en quelque sorte, on a fait un parallèle entre la loi actuelle et la loi de 1857 et l'on a dit : Vous voulez rétablir ce que la Chambre n'a pas voulu admettre.

En 1857, j'étais partisan de la loi de l'honorable M. Nothomb, mais je dois dire qu'alors même que je n'aurais pas accepté cette loi telle qu'elle était proposée, ce ne serait pas un motif de donner mon consentement à la présente, parce que je trouve que les fondations d'enseignement ont un but plus utile au point de vue de l'instruction que les fondations de charité au point de vue du soulagement de la misère.

Si nous avons demandé la liberté des fondations en matière de charité, c'est pour que toutes les ressources propres à combattre les misères matérielles de l'humanité pussent être utilisées. Mais, messieurs, les misères morales sont beaucoup plus diverses, plus variées, et les moyens que l'on doit employer pour les extirper sont plus compliqués. Et la preuve, c'est qu'il y a encore plus d'ignorance que de misère dans les pays désolés par le paupérisme et que l'ignorance est souvent la cause de l'indigence.

Ainsi donc, la conclusion n'est pas logique, selon moi.

Je tiens donc, messieurs, à faire voir qu'il est de la plus haute utilité sinon de nécessité absolue, qu'il est de toute justice de maintenir ce qui existe et de rejeter tout principe de rétroactivité en cette matière.

Pour faire voir que la rétroactivité peut être admise dans un sens politique, comme on le dit, on a eu recours, dans la discussion générale, à des exemples d'autres pays. J'aurais voulu répondre immédiatement, mais cela ne m'a pas été possible. Je crois cependant que les arguments qui ont été fournis à cet égard, particulièrement par l'honorable ministre des finances, ont produit sur la Chambre une impression telle, que je ne puis les laisser passer sans y répondre.

On a donc invoqué contre nous, en opposition à ce que nous avions allégué, des exemples d'autres pays, notamment de l'Angleterre et de Rome. On a contesté ce que l'honorable comte de Liedekerke d'abord, ce que moi ensuite, nous avions eu l'honneur d'alléguer au sujet de l'Angleterre, au sujet de ce qui se passe dans ce grand pays en matière de fondations pour l'instruction.

D'abord on a dit qu'il y avait de grands abus en Angleterre, qu'une enquête parlementaire avait dû être instituée et que cette enquête avait constaté ces abus.

Sans doute, messieurs, il y a eu beaucoup d'abus en Angleterre, mais ces abus étaient en proportion avec le nombre des institutions de fondation.

Savez-vous combien il y a de fondations en Angleterre ? Mais pour les trois degrés d'enseignement, le revenu annuel des fondations est calculé, dans l'enquête sur l'éducation, à 9 millions de francs. Vous comprenez qu'avec un aussi grand nombre de fondations il doit y avoir des abus. Les membres de la commission d'enquête font remarquer que ces abus se sont introduits particulièrement lors des dernières guerres, lorsque tout était en désarroi, et que ce n'est pas seulement dans l'institution des fondations qu'on rencontre ces abus, mais dans tous les établissements quels qu'ils soient, parce que tout a été bouleversé en Angleterre comme dans les autres pays, lors de la guerre qui a commencé à la fin du siècle dernier et qui a duré jusqu'en 1815.

Si nous avions en Belgique une enquête parlementaire comme celle qui a été faite en Angleterre, pour constater les abus qui existent en matière d'hospices, de bureaux de bienfaisance, de monts-de-piété, de dépôts de mendicité et d'autres institutions publiques, je ne voudrais pas répondre que vous n'en rencontreriez pas autant en Belgique, (page 956) proportionnellement au nombre d'institutions, qu'on en a rencontré en Angleterre.

J'attends donc cette enquête avant d'admettre qu'on puisse faire une comparaison entre les institutions de l'Angleterre et les nôtres sous le rapport des abus ; car la centralisation, loin de supprimer les abus, les cache souvent.

Messieurs, l'Angleterre a une législation nouvelle sous ce rapport, et je dois nécessairement en parler, parce qu'elle a été citée, à plusieurs reprises, d'abord par M. le ministre des finances et ensuite par l'honorable M. Dechamps. Je dois ajouter quelques considérations à celles qu'a fait valoir l'honorable M. Dechamps en réponse à M. le ministre des finances.

Il y a, messieurs, un système nouveau en Angleterre, qui consiste en ce qu'on a combiné trois statuts différents : un statut de 1853, un autre de 1855 et enfin un troisième de 1860. Cela fait un même système. Mais voici la position qui est faite par cette législation aux corporations et aux sociétés constituées en personnes civiles.

Il faut faire une différence entre les sociétés constituées en personnes civiles et les corporations, en ce sens que les corporations, outre la personnalité civile, jouissent encore de certains droits, de certains privilèges.

Par charité, on comprend en Angleterre non seulement la charité proprement dite, mais aussi les institutions d'instruction et en partie les institutions relatives aux cultes.

Pour faire voir jusqu'à quel point M. le ministre des finances s'est mépris, a été inexact dans ses allégations, je me permettrai de vous citer un avocat anglais qui a fait une étude spéciale sur cette législation et qui analyse les trois statuts dont je viens de parler. C'est l'avocat W. F. Finlason. Dans un traité publié en 1860, à la suite des statuts, voici ce qu'il dit :

« L'administration extérieure des charités (j'emploie les mots « charités » dans le sens anglais, c'est-à-dire que je comprends par ce mot la charité proprement dite, l'instruction et le culte) ; l'administration extérieure des charités qui ont des visiteurs, est une matière qui concerne leur juridiction, laquelle est finale et conclusive (final and conclusive) dans les limites de son but. D'après un principe analogue à celui qui exclut l'intervention de la cour de chancellerie dans l'administration intérieure d'une corporation de charité ayant des visiteurs, la cour s'abstient d'intervenir dans la direction intérieure ou dans la gestion de toute charité de religion ou d'éducation, incorporée ou non, comme une chapelle, une école. Car les charités religieuses (et les écoles doivent être considérées comme étant plus ou moins religieuses) sont toujours censées être placées sous un système de surveillance ou de visite, soit épiscopale, soit autre ; et, dans ces cas, la juridiction de la cour s'exerce seulement pour assurer la bonne application des fonds soumis au contrôle des parties chargées de faire cette visite ou surveillance. Cela s'étend non seulement aux institutions de l'Eglise d'Angleterre, mais à celles des Eglises d'Ecosse, de Rome et des dissidents. Ainsi, la cour laisse à ces autorités le soin d'assurer l'accomplissement des devoirs concernant ces offices, de priver les parties intéressées, qui seraient en défaut, des profits attachés à leurs emplois.

« Le principe général qui circonscrit la juridiction de la cour de la Chancellerie dans tous les cas, consiste en ce qu'elle n'intervient pas dans l'administration intérieure (internal menagement) de la charité.

« En ce qui concerne la destitution ou l’éloignement des gérants ou fonctionnaires des charités, tels que maîtres d'écoles ou desservants de chapelles, lorsque ceux-ci sont à la fois les bénéficiaires et les administrateurs des biens de la charité, la juridiction de la cour de la Chancellerie ne s'y applique que par voie de contrôle. »

L'honorable ministre des finances a beaucoup appuyé sur l'institution de la commission nommée par la reine, pour administrer les institutions de charité et d'éducation, et il a donné à cette commission un pouvoir en quelque sorte illimité.

Voyons, messieurs, à quoi se réduit ce pouvoir.

Il ya, en effet, une commission composée de quatre membres, de deux inspecteurs et d'un secrétaire nommés par la reine, « pour aviser (dit l'acte du 20 août 1855) aux moyens d'assurer la bonne administration des fondations de charité et pour l'application la plus avantageuse des fonds dans certains cas. »

Voici en quoi consistent les pouvoirs de cette commission, à l’égard du personnel des charités, d'après les articles 2-4 de l'acte de 1860.

« La commission, soumise aux restrictions et au droit d'appel, stipulé à l'article 8, aura le pouvoir de donner de temps en temps des ordres de la même valeur que ceux que peut émettre maintenant un juge de la cour de la chancellerie ou d'une autre cour, à l'effet de nommer ou d'écarter des administrateurs d'une charité, à la demande des personnes autorisées par l'acte de 1855 à s'adresser à un juge ou à une cour. Ces ordres pourront se rapporter à des maîtres et maîtresses ou gérants et aux affaires de la charité.

« Ces pouvoirs ne s'étendront point aux charités dont les revenus, non compris les bâtiments, s'élèvent au-dessus de 50 liv. »

Ainsi, messieurs, la commission peut remplacer le juge ou la cour, mais sauf appel de la part des personnes intéressées.

Remarquez de plus que du moment qu'une de ces institutions a un revenu de plus de 50 livres, ces pouvoirs n'existent plus.

Il est dit aussi :

« La commission n'aura pas de juridiction dans les cas contentieux. »

Messieurs, je viens de parler du droit d'appel qu'on a contre cette commission, voici ce que porte l'article 8 :

« Le procureur général ou une personne autorisée par lui ou par la commission, pour toute charité, quel que soit son revenu, d'un côté, et de l'autre, tout administrateur d'une charité ayant un revenu annuel supérieur à 50 livres, ou deux habitants d'une paroisse ou district... peuvent, dans le délai et pour les intérêts indiqués, présenter une pétition à la haute cour de la chancellerie, pour interjeter appel contre les ordres de la commission et demander justice selon le cas. Les maîtres et maîtresses d'école ont le même droit d'appel... La cour peut, avant tout jugement, remettre la requête à la commission pour être examinée par elle, et demander les motifs qui ont dicté l'ordre de poursuite... La cour peut émettre un autre ordre quelconque, relativement à la matière qui fait l'objet de l'appel, et comme elle le trouvera juste. »

Tel est l'article 8 où les conditions de l'appel sont stipulées. Il ne s'agit donc pas de supprimer les fondations ; il s’agit de les régler, de les protéger, de les sauvegarder.

Peut-on dire après cela que l'Etat a le droit de s'immiscer dans les fondations pour les dénaturer ?

La loi arme les administrateurs spéciaux contre les instituteurs et les institutrices et, au besoin, elle arme l'être moral de la fondation, le fondateur contre les abus qui se seraient glissés dans la fondation par l'incurie, la mauvaise gestion et quelquefois par la malveillance ou l'intérêt des gérants ou des curateurs, il s'agit toujours d'en revenir à la volonté des fondateurs, et c'est ce que l'honorable ministre des finances a dû reconnaître, car quand il a parlé de Cambridge et d'Oxford, il a rappelé des mesures qui avaient pour but de faire exécuter l'intention principale (the main intention) des fondateurs. »

On peut s'en convaincre en lisant les débats qui ont eu lieu. C'est la religion surtout qui est en jeu ici, et les Anglais, lorsqu'il s'agit de religion en matière de fondations, regardent toujours cette condition comme tout ce qu'il y a de plus sacré ; et alors il n'y a plus d'administrateurs, il n'y a plus d'instituteurs ni d'institutrices qui puissent s'élever contre la volonté du fondateur, du moment qu'elle est constatée par l'acte de fondation.

M. le ministre a parlé aussi des testaments et du droit féodal en Angleterre ; j'en avais déjà dit un mot, mais M. le ministre a émis une observation à laquelle je dois r4pondre. Il a dit :

« En Angleterre, la liberté de faire des fondations par testament n'existe pas. »

Les restrictions apportées au droit de tester résultent du droit féodal, organisé en Angleterre par Guillaume le Conquérant, qui a confisqué tous les domaines des seigneurs saxons, pour les donner à ses guerriers à certaines conditions, qui ont limité leur droit de propriété, surtout en matière de testament.

Toutefois l'assertion de l'honorable ministre n'est pas tout à fait exacte et voici ce que je trouve également dans l'auteur que je viens de citer :

« Pour ce qui regarde les testaments relatifs aux fondations (remarquez qu'il pose bien nettement la question dont il s'agit) ; pour ce qui regarde les testaments en matière de fondations, dit M. Finlason, la loi a toujours défini les limites et les conditions de la transmission d'une propriété à perpétuité à un objet de charité, particulièrement par testament.

« Ainsi, d'après la loi commune on ne peut pas, même lorsqu'on est en parfaite santé, disposer de plus d'une partie raisonnable (a reasonable part) de sa propriété, et l'on ne pourrait pas le faire du tout, lorsqu'on se trouverait en état de maladie mortelle, au moins pour un objet auquel on n'aurait pas pensé lorsqu'on était en bonne santé. Cela date du temps d'Edouard III. »

(page 957) S'il était constaté, s'il y avait une preuve écrite, par exemple, ou des témoins constatant qu'on y avait songé avant de tomber en maladie mortelle, alors on pourrait disposer par testament d'une partie raisonnable de sa propriété dans un but charitable. Voilà la vérité.

Mais, messieurs, toute l'Angleterre est couverte d'institutions semblables, et tout cela n'a pas été fait par des donateurs ; il y a eu beaucoup de testaments en faveur des fondations.

Messieurs, j'ai déjà eu l'honneur de le dire, la loi anglaise, en matière de fondations d'instruction, est faite avant tout pour armer les curateurs ou les administrateurs spéciaux contre les abus introduits par les instituteurs et les institutrices, qui étaient parvenus quelquefois à se faire une position indépendante malgré leur incapacité, contrairement à la volonté des fondateurs.

En Angleterre, comme je viens de le dire, la religion est la première condition de presque toutes les fondations. C'est là ce qu'on appelle the main intention.

En suivant toujours le même ordre d'idées, en réponse à M. le ministre des finances, je dois dire que les intentions principales se rattachent quelquefois aussi à la nature de l'enseignement. Et ici l'on voit comment des abus se sont glissés dans ces institutions, souvent d'une manière inévitable, par suite des circonstances du temps.

Ainsi, par exemple, il y a en Angleterre de nombreuses fondations qui datent du XIIIème siècle, pour' es collèges, pour des écoles de grammaire (grammar schools). Les fonds qui ont été donnés au XIIIème siècle et qui étaient alors suffisants, sont devenus insuffisants.

Il en est résulté que plusieurs de ces établissement ne pouvaient plus marcher.

Et cependant certains instituteurs prétendaient pouvoir se mettre en possession des biens légués. Ainsi, un collège avait pour tout revenu 50 liv. st. L'instituteur prétendait être investi du droit d'en disposer. Il a fallu agir contre les instituteurs dans ce cas et dans les cas pareils ; et encore une fois voilà pont quoi une loi a été faite.

C'était pour en revenir à la véritable intention du fondateur, qui certes n'avait pas voulu que ses fonds fussent employés d'une manière infructueuse.

Il y a d'autres cas. Ainsi, parmi les bourses d'Oxford et de Cambridge dont on a tant parlé, il en est un grand nombre qui ont été fondées expressément en faveur d'étudiants pauvres, reconnus légalement comme tels.

Le cas s'est présenté qu'il n'y avait pas de candidats pauvres, et cela se conçoit dans un pays comme l'Angleterre, où les pauvres embrassent ordinairement une toute autre carrière que celle de la médecine, du droit ou même de l'état ecclésiastique.

En l'absence d'un nombre suffisant de candidats pauvres, des abus se sont introduits ; et encore une fois voilà pourquoi une loi est intervenue, afin de donner une interprétation saine et logique à la volonté des testateurs, ou pour appliquer les bourses là où il y avait des candidats pauvres.

Autre cas. Les populations d'anciennes villes où existaient des fondations, populations autrefois considérables, avaient disparu en partie par suite du mouvement industriel, et par conséquent il ne s'est plus trouvé assez de sujets dans ces localités.

Dans telle localité, la fondation constituait tout un collège ; les fonds étaient suffisants, mais il n'y avait pas d'élèves, et voilà encore une fois pourquoi une loi es1 intervenue.

Messieurs, je vous ai déjà dit qu'il y a des fondations de diverses espèces en Angleterre. Ainsi, pour ce qui regarde les fondations de 1 instruction primaire, d'après le rapport sur l'enquête que j'ai déjà eu l'honneur d'invoquer, on compte en Angleterre et dans le pays de Galles 560 écoles primaires de fondation, avec 35,000 élèves des deux sexes. Il y a des écoles pour les protestants, cela va sans dire ; il y a des écoles pour les catholiques ; il y en a pour les israélites ; il y en a enfin qui sont fondées par les francs- maçons pour garçons et filles. Tout cela est respecté, et je trouve cela très respectable, au point de vue de la liberté.

Toutes ces écoles sont placées sous le contrôle immédiat de corps d'administrateurs spéciaux. Je tire cette expression de l'enquête sur l'instruction imprimée en 1861.

Le pouvoir des curateurs est souvent beaucoup plus limité que celui des directeurs et des instituteurs, et voilà d'où viennent les conflits ; et c'est ce qui a donné pratiquement une position indépendante à des instituteurs qui en abusaient. D'après le rapport que je viens de citer, les maîtres s'appuyaient sur des instruments de fondations qui semblaient leur donner cette position indépendante, mais non pas lorsqu'ils sont incapables. Les curateurs étaient d'un avis contraire en cas d’incapacité.

Autrefois, les tribunaux devaient connaître de ces conflits ; les frais étaient énormes, car la justice est chère en Angleterre. Je trouve entre autres un cas où des administrateurs spéciaux ont été entraînés dans une dépense de 1,200 liv. pour agir contre des instituteurs qui se disaient indépendants ; il a donc fallu faciliter l'action des curateurs, il a fallu les dispenser de recourir aux tribunaux.

La commission des charités a obtenu, en conséquence, plus de moyens d'action ; je suis même d'avis que ces pouvoirs ne sont pas suffisants, car je pourrais citer des cas où l'action des administrations a été encore trop faible pour agir contre les instituteurs.

Ainsi la loi n'autorise l'action de la commission qu'endéans les 6 mois à partir de l'installation de l'instituteur. Dans l'enquête on a demandé des pouvoirs plus étendus.

Maintenant la commission est armée, en cas d'abus, du pouvoir de déposer les instituteurs, sauf à ceux-ci à recourir en appel.

Dans le même rapport, on dit ( vol. 1, p. 481) :

« Les nouveaux pouvoirs qu'on propose pour la commission remplaceraient ceux de la cour dans les fonctions administratives. Mais les pouvoirs judiciaires de la cour resteraient intacts (unimpaired) par rapport aux institutions d'éducation. »

Ainsi ceux qui ont fait l'enquête et qui demandent plus de pouvoirs ne dépassent pas la sphère administrative et laissent subsister le droit devant l'action judiciaire.

A propos d'instruction primaire, ce serait ici, je crois, le cas de parler de ces institutions donc mon honorable collègue M. Tack vous a entretenus avant-hier, notamment de l'institution Vandaele de Courtrai. Mais je ne veux pas m'étendre là-dessus pour le moment ; ce serait un peu en dehors de la question principale que je veux traiter. J'attendrai que M. le ministre de la justice se soit expliqué à cet égard, afin que nous sachions à quoi nous en tenir sur cette importante question, sur laquelle je reviendrai, au besoin.

J'espère que M. le ministre développera son amendement et nous expliquera la position où se trouveront ces établissements, car jusqu'ici nous n'y voyons pas trop clair.

Quant à la loi anglaise, sur laquelle j'ai encore à m'expliquer, j'ai déjà dit qu'elle ne paraissait pas assez forte aux yeux des commissaires et je crois qu'ils avaient raison. Les commissaires de l'enquête d'instruction font remarquer que la plupart des abus ont été introduits par les circonstances et ils ajoutent que des abus existaient également dans les autres écoles, dans les écoles non fondées, et que cela tenait à des circonstances extérieures.

Ils disent aussi qu'à mesure que le progrès se manifeste dans l'instruction en général, il se fait également sentir dans les écoles de fondation.

Sans doute, il y a beaucoup à faire encore, non seulement en Angleterre mais partout, en matière d'instruction, et voilà pourquoi l’on s'applique constamment à améliorer cet état de choses, tant pour les écoles de fondation que pour les autres. On a donc tort de ne voir des abus que dans les écoles de fondation, alors qu'on en rencontre tout autant et de nature diverse dans les autres écoles.

Après avoir démontré, messieurs, les inexactitudes dans lesquelles est tombé M. le ministre des finances, au sujet de l'Angleterre, je tiens aussi à lui répondre quant à un autre pays, qu'il a cité et sur l'exemple duquel il a beaucoup insisté avec son habileté et son talent habituels.

Je reconnais que cette partie de son discours a fortement impressionné l'assemblée ; mais il y a quelque chose au-dessus du talent, il y a quelque chose de plus éloquent que l’éloquence, c'est la vérité. J'aurai donc l'honneur de répondre à l'honorable M. Frère au sujet des institutions romaines.

L'honorable ministre vous a dit que Léon XII avait institué une commission qui avait centralisé tous les hôpitaux, toutes les institutions charitables de Rome en abolissant tous les droits spéciaux soit d'administration, soit de collation.

Il en a conclu que là aussi il y avait eu rétroactivité et que le ministère ne faisait, par conséquent, que suivre l’exemple donné par le saint-père. Que M. le ministre des finances me pardonne de lui faire d'abord une observation : il a été à Rome, où il a pu prendre des informations ; il a vu le saint-père, si je ne me trompe, les cardinaux et d'autres grands personnages ; il a l'esprit éminemment observateur ; par conséquent, il a dû visiter plusieurs fondations et remarquer notamment Saint-Julien des Belges ou des Flamands, comme on dit ; il doit avoir vu l’institut dell’anima, fondée en 1500 par un Flamand, Giovanni di Pietro ou Jean Pieters.

(page 958) La seconde de ces institutions, p3r un abus qui ne dépend pas du saint-siège, mais des circonstances, est maintenant sous le contrôle de l'Autriche. Eh bien, quand on voit ces in situtions d'étrangers qui sont indépendantes, comment peut-on croire que le pape aurait fait main basse sur les institutions romaines ? Cela seul fait voir que la mesure prise par Léon XII n'a nullement la portée qu'on y assigne.

Il est vrai que Léon XII, entrant dans les idées de Vivès, a pris une mesure qui, je le reconnais, est sage en général, et que la Belgique, du reste, a pratiquée depuis des siècles. Il a supprimé ou plutôt réuni un grand nombre d'établissements particuliers, mais en laissant substituer les institutions qui par les actes de fondations devaient rester indépendantes. Il n'a donc pas tout supprimé, comme l'a dit l'honorable ministre.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Pas tout, non.

M. de Haerne. - Il a centralisé ce qui pouvait être centralisé, ce qui avait été créé par des papes, par des personnes qui n'avaient pas fait de stipulations spéciales, et non pas contre la volonté des fondateurs

Voilà la distinction que je veux établir et je vais prouver que je suis dans le vrai.

Il y a aussi des institutions qui appartenaient au Portugal et l'Espagne, à la Russie et aux Florentins. Eh bien, ces hôpitaux créés par des personnes qui ont voulu y attacher leur nom ont conservé leur destination et leur indépendance, à cause de la volonté du fondateur. Il en a été de même pour les fondations faites par des Romains.

La preuve de ce que j'avance, messieurs, je la trouve dans un ouvrage tout spécial sur la matière, car je ne veux pas m'en rapporter seulement à mes souvenirs de voyage. Je veux parler de l'ouvrage de monseigneur Morichini (t. V, p. 186). Voici ce que j'y lis :

« Léon XII nomma, le 27 février 1826, une commission composée d'un cardinal président, de huit membres et d'un secrétaire, qu'il chargea de former l'état de toutes les sommes distribuées par la bienfaisance publique de la daterie, de la secrétarerie des brefs, de la chambre apostolique, des loteries et de toute antre institution même particulière. »

Voyons ce que l'on entend à Rome par institution particulière.

On forma donc une caisse générale et dans cette caisse, dit Mgr Morichini, on devait recueillir tous les legs des testateurs privés, « lorsque la personne chargée d'en faire la distribution n'était pas désignée (quando non fosse determinata la persona incaricata de l'erogazione). On devait y joindre les legs des institutions de charité et des lieux religieux (luoghi pii), excepté ceux des nations étrangères, pour les donner selon la volonté des légateurs. »

La commission chargée d'exécuter ce plan fut instituée par un motu proprio du 16 décembre 1826.

Ainsi la volonté des testateurs est respectée et les personnes désignées pour faire la distribution des charités peuvent continuer à remplir ces fonctions.

Si des hôpitaux, des fondations furent placés sous la juridiction de la commission, c'était lorsque la volonté du testateur n'avait pas stipulé en sens contraire. Tous ont été obligés cependant de rendre leurs comptes et de subir une surveillance, ce qui était parfait.

Et, en effet, il y a une foule d'hôpitaux, d'écoles et d'institutions de charité, qui ont conservé leur autonomie, outre les hospices dis étrangers.

Je n'en citerai que quelques-uns.

Ainsi, le grand hospice Saint-Sauveur et plusieurs autres sont dirigés par des députations.

Le grand hôpital de la Sainte-Trinité est administré par l'archiconfrérie de la aiinte-Trinité.

L'hôpital Saint-Laurent in Miranda est dirigé par le collège et l'archiconfrérie des pharmaciens.

L'hôpital Saint Jean, par la confrérie della Pieta des Florentins.

L'hôpital de l'ordre de Jérusalem, par le commandeur de l'ordre.

La congrégation des sœurs de la charité, par les curés.

L'hospice de Sainte-Galle, par un membre de la famille Odescalchi.

Quand aux écoles, il y en a un bon nombre d'indépendantes.

Ainsi, les écoles de la Providence sont dirigées par les sœurs de ce nom, instituées à cette fin par la princesse Borghèse.

La maison des orphelins et des vieillards de Tata Giovanni est administrée par deux prêtres délégués. Les pensionnaires sont entretenus par les revenus propres (dit Morichini) du lieu pieux, par le gain de ceux qui sont rétablis et par quelques aumônes.

La maison des orphelins della piu cassa di Carita est dirigée par la princesse Maria Doria et la baronne Frédérique Kymisky.

Les écoles des orphelines du Sacré-Cœur sont dirigées par les dames de ce nom.

Je pourrais citer bien d'autres institutions romaines qui se trouvent sur le même pied.

Mgr Morichini assigne souvent les revenus particuliers des institutions. Ainsi, il dit que l'hôpital Saint-Sauveur a un revenu de 32,000 écus, y compris 14,000 écus fournis par le trésor.

Les revenus annuels de l'institut du Saint-Esprit (dit Morichini), non compris l'hospice des aliénés, qui a une administration séparée, s'élèvent à 90,000 écus.

La famille Massimo entretient une école, qui porte son nom, et elle l'a placée sous une administration spéciale, bien que cette école doive subir la surveillance exercée sur les écoles régionnaires.

L'organisation des hôpitaux introduite par Léon XII, quoiqu'elle respectât la volonté des testateurs, parut trop centralisée à Pie VIII, qui, le 29 décembre 1849, supprima la députation chargée de surveiller tous les hôpitaux et rendit ceux-ci à leurs anciennes formes en leur donnant des administrations séparées et spéciales. (Morichini, vol. 1, p. 72.)

Cette députation était composée de la fleur de la noblesse romaine. Elle marchait bien, mais le pape n'était pas assez épris du système de centralisation française dont son prédécesseur avait fait l'essai, pour le maintenir. En Belgique, on veut absolument qu'on dise que nous singeons la France en tout.

Ainsi, messieurs, la commission chargée d'assurer la réalisation de ce but fut instituée, comme l'a dit l'honorable M. Frère, par un motu proprio en date du 16 décembre 1826. Mais la volonté du testateur fut respectée, et l'auteur que je viens de citer le dit formellement.

Toute la question est là ; et c'est ce que l'honorable ministre des finances a complètement perdu de vue.

Qu'on ait pu réunir et centraliser un grand nombre d'institutions, les placer, les unes sous le contrôle de la commission des subsides, les autres, sous celle de la députation prise dans la noblesse romaine, cela s'explique par le grand nombre d'établissements fondés par des papes, par des membres du clergé ou des personnes pieuses qui n'en avaient pas stipulé l'indépendance pour l'avenir.

Cette commission a centralisé ce qui pouvait être centralisé ; elle a respecté ce que la volonté du testateur commandait de respecter ; voilà la vérité.

Messieurs, il me reste encore une réflexion à faire au sujet des institutions romaines.

Que voulait Léon XII ? Faire un essai généreux, entrer dans la voie tracée par une foule de nations, la France notamment ; il a voulu obéir à cette impulsion du dehors, il a voulu centraliser parce que tout le monde centralisait.

Mais remarquez que, pour ce qui regarde les hôpitaux, il y avait une organisation distincte ; c'était la députation qui visitait, surveillait ces établissements, examinait les comptes et qui ne dépendait pas de la commission des subsides.

La centralisation n'était donc pas absolue. Cette députation, composée de la fleur de la noblesse romaine, était tout à fait indépendante. Mais qu'est-il arrivé ? Le successeur de Léon XII a préféré l'ancien système, il a trouvé que cette centralisation, quoiqu'elle ne fût pas contraire à la volonté du testateur, ne présentait pas l'utilité qu'on lui avait attribuée, que les abus au sujet desquels on avait fait tant de bruit, n'avaient pas entièrement disparu, bien qu'il y eût eu une grande amélioration.

Ainsi Pie VIII, le 27 décembre 1829, après le motu proprio porté par Léon XII, supprima la députation chargée de l'administration des hôpitaux, et rendit à ceux-ci leurs anciennes formes, en leur donnant des administrateurs séparés et spéciaux. Le système français fut remplacé par l'ancien système romain.

Permettez-moi de vous faire, avant de terminer, une citation qui tend à établir un parallèle entre les deux systèmes, et qui certes aura un grand poids aux yeux de tous les membres de la Chambre ; c'est une citation que j'emprunte à un homme éminent de France, un des premiers législateurs, un des plus grands écrivains de ce grand pays et qui juge cette matière avec la haute impartialité dont il a fait preuve en toute circonstance. Il compare le système français avec le système anglais, et celui-ci, on peut le dire, en matière de fondation, est tout à fait semblable à l'ancien système romain, rétabli par Pie VIII.

Voici ce que dit M. Guizot, dans ses mémoires, des deux systèmes qu'il met en parallèle, le système d'éducation nationale centralisé comme en France et le système d'enseignement libre basé sur les fondations, comme en Angleterre.

Après avoir constaté que les Anglais ne veulent pas du système français, cet homme éminent s'exprime ainsi :

« Je comprends comment les Anglais sont arrivés à cette conclusion et (page 959) je pense qu’ils ont raison. En France, nous n'avons pas même à considérer la question qui les y a conduits. Dans notre pays, tous les anciens établissements d'instruction publique ont disparu avec les instituteurs et la propriété, avec les corporations et les dotations. Nous n'avons plus dans la grande société de petites sociétés d'un caractère privé, ayant une existence indépendante et vouées aux divers degrés de l'éducation. Ce qui a été restauré, ou ce qui tend à renaître n'est évidemment pas de nature à suffire aux besoins.

« En matière d'instruction publique, comme dans l'ensemble de notre organisation sociale, un système général, fondé et maintenu par l'Etat, est une nécessité pour nous. C'est la condition que notre histoire et le génie de la nation nous ont imposée. Nous désirons l'unité ; l'Etat seul peut l'établir : nous avons tout détruit ; nous devons créer à nouveau. »

La France veut l'unité, c'est-à-dire la centralisation. Et cependant son budget de l'enseignement est bien au-dessous du nôtre, qui excède tous les budgets connus, comme je l'ai démontré dans mon discours du 27 février 1862, et comme l'honorable M. Dechamps l'a fait voir également dans une séance subséquente.

Ces parties de M. Guizot sont remarquables. Nous avons tout détruit ; nous devons créer à nouveau !

Il dit que les Anglais ont raison, que là où l'on n'a pas détruit, il faut conserver. Conservons donc les anciens monuments, relevons même les ruines, telle est la pensée de cet homme d'Etat.

Je puis donc répéter ce que j'ai dit le 30 avril : à l'exception de la France, on ne voit nulle part la centralisation en matière d'instruction publique comme en toute chose.

Savez-vous quel est le beau idéal en matière d'enseignement centralisé ? Un jour on demandait à un ministre de l'instruction publique en France ce qu'il y avait de plus beau dans le système d'instruction français ; il répondit : C'est qu'à un quart d'heure donné je puis dire à quel exercice on se livre dans chaque classe de chaque établissement d'instruction.

Voilà comment on forme et on fait marcher des automates. C'est pour cela que les connaissances positives sont plus variées et plus répandues en Angleterre et aux Etats-Unis qu'en France.

C'est pour cela que la science est plus généralisée en Allemagne. La France produit des hommes éminents sans doute ; mais la science n'y est pas vulgarisée, n'y est pas populaire comme dans les pays où la liberté exerce tout son empire.

Ainsi pour citer encore un exemple, aux Etats-Unis, dont j'ai beaucoup parlé dans la discussion générale, un nouveau collège de jésuites vient d'obtenir, il y a environ deux mois, une charte de corporation à Boston, et d'après cette charte, il est non seulement reconnu comme personne civile, mais il jouit de l'exemption des impôts pour l’établissement, de la libre entrée de livres et objets classiques, et il reçoit gratuitement tous les livres imprimés aux frais du gouvernement central. Tous les cultes jouissent des mêmes avantages, et voici un fait qui prouve les immenses résultats de cette liberté, quant à la diffusion des lumières : les bibliothèques de 150 établissements renseignés contiennent en moyenne 9,000 volumes chacun. Tels sont les fruits des fondations pour l'enseignement.

A part la France qui a produit plus de grands hommes sous l'ancien régime qu'elle n'en produit aujourd'hui, tous les autres pays donnent d'éclatants démentis à votre loi, tous reconnaissent les fondations pour l'enseignement ; les hommes éclairés comme M. Guizot, dont je viens de citer l'imposante autorité, regrettent la suppression des fondations en France.

La législation diffère sous divers rapports dans tous ces pays ; elle s'accorde sur le point des fondations, c'est-à-dire qu'on y voit quelque chose au-dessus de la politique. Tous ces pays conservent les fondations, les élèvent au-dessus de la politique, en font un principe de droit et de justice. Ce principe consacré par toutes les nations, je puis l'invoquer pour repousser la rétroactivité. En supposant qu'on n'admît pas cette justice rigoureuse, ce strict droit, il faudrait au moins admettre, comme le disait tout à l'heure M. Julliot, le principe d'équité. Aux yeux des anciens, l'Équité était fille de Thémis et de Jupiter, c'est-à-dire que c'était la justice appuyée sur la force. L'équité est plus que le strict droit dans le gouvernement des peuples, l'équité doit régner partout et en tout. Jamais les fondateurs de bourses n'ont pensé qu'on aurait renversé ce qu'ils créaient ; ils pouvaient admettre qu'on réformerait des abus possibles, mais non qu'on renverserait sans motif, sans raison sérieuse ce qu'ils avaient fondé. Ils comptaient sur l'équité, sur l'honnêteté des générations futures. Qu'il ne s'agisse donc pas, si l'on veut, du principe de justice rigoureuse qui, selon moi, cependant existe ; mais du principe d'honnêteté et d'équité,

Un écrivain français a dit :

« L'équité doit régler la conduite des rois. »

Un auteur belge, que la plupart d'entre nous ont connu et dont nous respectons tous la mémoire, un homme qui a occupé les plus hautes fonctions dans le pays, un homme qui s'est distingué dans la législature belge autant que dans les belles-lettres, le baron de Stassart, en parlant de l'équité, s'est énoncé d'une matière encore plus énergique.

Il a dit :

« Princes, les lois de l'équité seules dans tous les temps font votre sûreté. »

M. de Theux. - J'aurais voulu que M. le ministre de la justice expliquât l'amendement qu'il a déposé, car nous n'en comprenons pas la portée. Cet amendement ferait alors partie de la discussion.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'amendement que j'ai déposé a beaucoup moins pour but d'étendre le projet de loi, que d'éviter toute difficulté dans l'application ; en présence de l'amendement qui a été déposé par l'honorable M. de Theux et ses collègues, j'ai cru devoir proposer les modifications que j'ai eu l'honneur de soumettre à la Chambre, afin qu'il ne s'élevât aucun doute sur la portée de l'article.

L'amendement de l'honorable M. de Theux et de ses collègues avait pour objet de légaliser tous les actes illégaux qui ont été posés jusqu'à présent. C'est ainsi que je l'avais compris, et les explications qui ont été données aujourd'hui ainsi que les additions que cet amendement a reçues m'ont confirmé dans mon appréciation.

Ainsi, par exemple, contrairement au décret de 1809, différentes congrégations religieuses ont été autorisées à accepter des fondations pour l'enseignement.

C'est même au moyen de ces fondations qu'une partie de ces congrégations jouissent de la personnification civile, contrairement aux dispositions formelles du décret de 1809, contrairement à la jurisprudence du conseil d'Etat, contrairement à la jurisprudence unanime de notre pays.

Or, messieurs, ce qu'on propose aujourd'hui c'est de condamner cette jurisprudence, c'est de légaliser tous les actes posés contrairement à la loi.

Eh bien, l'amendement que j'ai eu l'honneur de soumettre à la Chambre a précisément pour objet de faire tomber sous l'application de la loi les fondations dévolues au service public de l'enseignement et qui sont aujourd'hui gérées par des administrations incompétentes et illégalement constituées.

C'est ce que j'avais voulu exprimer par les mots : « ayant une administration distincte ».

Quant aux fondations faites en faveur de l'objet qui rentre dans les attributions mêmes de ces corporations ou de ces administrations, il est inutile que je dise qu'il n'y sera touché en aucune manière.

Ce ne sont que les fondations illégalement constituées que j'entends faire entrer sous l'application de la loi.

Je crois, messieurs, que ces explications sont suffisantes pour faire comprendre la portée de l'amendement que j'ai eu l’honneur de déposer.

L'honorable M. de Haerne m'a interpellé de nouveau sur les fondations mixtes.

Je ne puis répondre à l'honorable M. de Haerne que ce que je répondais dernièrement à un autre honorable membre.

La loi pose des principes ; il m'est impossible d'analyser tous les actes. Je ne connais pas les fondations mixtes. La fondation Terninck m'a été signalée. J'ai lu l'acte et j'ai reconnu que c'était une fondation de bienfaisance, et il n'est pas douteux qu'elle ne tombe pas sous l'application de la loi. Si d'autres fondations sont dans le même cas, on leur appliquera le même principe.

Mais pour les fondations d'instruction qui ne présentent pas le même caractère, les biens mis en mainmorte de ce chef et ressortissant aux administrations publiques, doivent être gérés par ceux qui ont le service de l'instruction dans leurs attributions.

M. Tack. - Messieurs, l'amendement présenté par l'honorable M. Nothomb a un double objet. Il concerne les fondations en faveur de l'enseignement et celles au profit des boursiers.

Le but de l'amendement de l'honorable membre est le même que celui qu'a recherché le Sénat lorsqu'il a voté l'amendement qu'a proposé l’honorable M. Forgeur à la loi interprétative de l'article 84 de la loi communale.

Qu'a voulu l'honorable M. Forgeur par son amendement ? Qu'a voulu le Sénat ? Conserver ce qui existe ; donner la consécration légale aux fondations reconnues en matière de bienfaisance, à l'époque de la promulgation de la loi de 1859.

(page 960) En un mot ne pas faire d'innovation. Je me sers à dessein du terme « innovation », car celui de « rétroactivité » sonne désagréablement à l'oreille, je tâcherai de l'éviter, l'on n'est pas d'accord sur sa portée. Les uns disent qu'il n'y a pas de rétroactivité dans l'espèce, parce qu'il s'agit de droits politiques, les autres prétendent qu'il y a rétroactivité parce que, selon eux, il s'agit de droits civils. Pour moi, messieurs, je me borne à soutenir que le projet de loi innove, modifie, change l'état de choses tel qu'il existe en fait.

Je ne m'occuperai pas des fondations au profit de boursiers, je ne parlerai que des fondations au profit de l'enseignement, je ne reviendrai que très brièvement sur ce que j'ai dit au sujet de ces fondations dans la séance de mardi dernier, lors de la discussion de l'article premier ; dans cette séance on m'a contesté le droit de parler des modifications qu'apporte le projet de loi à la législation actuelle et on m'a renvoyé à l'article 47 du projet de loi devenu l'article 49. Pour ne pas abuser des moments de la Chambre, je ne ferai que résumer, en quelques minutes, les principales observations que j'ai fait valoir précédemment, puis je rencontrerai les réponses évasives que M. le ministre de la justice m'a faites ainsi qu'à l'honorable M. B. Dumortier.

J'ai affirmé d'abord que votre projet de loi est le contrepied de la loi de 1859 et cependant cette loi est l'œuvre de vos amis qui l'ont votée à l'unanimité.

Quelle est sa portée ? Je viens de le dire.

Conserver toutes les fondations de bienfaisance ayant un titre légal, et par titre légal, notez-le bien, on a entendu les arrêtés royaux contresignés par vos prédécesseurs, sans égard à la question de savoir si les décisions prises par eux étaient entachées d'illégalité ou nul.

On a mis en dehors des atteintes de l'autorité administrative toutes les fondations de bienfaisance existant au moment de la promulgation de la loi.

On a maintenu leurs administrateurs spéciaux, leur organisation, leur liberté d'action, leurs collateurs, la saisine et la régie des biens dans le chef des personnes civiles qui en étaient investies. Eh bien, votre projet de loi fait l'inverse.

Ainsi l'article premier et l'article 7 combinés attribuent à la commune la saisine et l'administration des biens de toutes les fondations en matière d'enseignement primaire. Ils suppriment les administrateurs spéciaux indistinctement. Ils dépouillent les fondations de leurs revenus pour les mettre aux mains de la commune, ils les transforment en établissements publics et les soumettent au régime de la loi sur l'enseignement primaire.

Je l'ai démontré, je reviendrai tantôt sur ma démonstration.

Votre arrêt de proscription, ai-je ajouté, est général, il n'épargne aucun des établissements antérieurement autorisés et ils sont nombreux.

J'ai consulté la statistique officielle qui a été publiée en 1857 ; si vous voulez comme moi y jeter les yeux, vous y trouverez une foule d'établissements avec administrateurs spéciaux qui tombent sous le coup des prescriptions nouvelles.

J'ai établi que rien ne justifie la différence de traitement que vous introduisez à l'égard des fondations en faveur de l'instruction comparées aux fondations charitables.

En effet, les fondations au profit de l'instruction ne sont-elles point des œuvres de bienfaisance au même titre que la création d'un hospice, le legs ou la donation d'une somme d'argent destinée à une distribution de secours aux pauvres ?

N'est-ce pas l'observation que vient de présenter tout à l'heure encore l'honorable M. Julliot ? Les fondations pour l'instruction ont pour but de soulager les misères morales et intellectuelles, les autres sont appelées à soulager les misères matérielles, physiques.

Et, vous le savez, trop souvent l'ignorance a été la cause et l'origine du paupérisme, de la misère qui désole les sociétés modernes.

Je vous ai rappelé que souvent vous êtes venus dire que vous ne répudiez pas d'une manière absolue les personnes civiles établies en vue d'un grand bienfait, que vous les autoriseriez au besoin par voie législative. Or, ai-je ajouté, vous êtes appelé, aujourd'hui à statuer législativement sur le passé.

N'y a-t-il donc aucun des établissements dont nos ancêtres ont doté la Belgique qui mérite d'être maintenu ?

N'y en a-t-il aucun qui ait assez d'importance pour conserver ses administrateurs spéciaux ?

N'y en a-t-il pas contre lesquels on n'a pu jamais articuler aucun abus, aucun grief ?

Pourquoi les englobez-vous tous dans le même arrêt de condamnation ? Cela est-il logique ? cela est-il justifiable ?

J'ai fait observer ensuite que les établissements existants sont plus dignes de faveur que ceux qu'il s'agit de créer législativement pour l'avenir. Pourquoi ?

Parce qu'ils ont fait leurs preuves ; parce qu'ils ont rendu des services éminents, incontestables au pays ; parce que l'on ne pourrait mettre en doute leur évidente utilité ; parce qu'ils ont rempli jusqu'à ce jour dignement leur noble mission.

J'ai enfin prouvé qu'il y avait beaucoup d'établissements ayant un caractère mixte, c'est-à-dire que beaucoup d'entre eux exerçaient la bienfaisance proprement dite et instruisaient en même temps gratuitement les pauvres.

J'en ai conclu que des difficultés sérieuses se présenteraient dans la pratique pour savoir si c'est la loi de 1856 ou la loi actuelle qu'il faudrait leur appliquer, pour savoir si ces établissements sont frappés de rétroactivité oui ou non ; ces difficultés vous les auriez évitées en mettant en harmonie votre projet de loi de 1863 avec la loi de 1859.

J'ai terminé par l'historique d'une fondation pareille qui existe dans ma ville natale depuis 1766, elle est conçue absolument dans le même esprit que la fondation Terninck dont parlait tantôt M. le ministre de la justice, à cette seule différence près, que la fondation Terninck a donné naissance à un internat pour orphelins et que la fondation Vandaele à Courtrai a créé un externat pour garçons.

Cependant vous faites grâce à l'établissement Terninck qui a toujours été envisagé comme un établissement d'instruction. Il n'est pas difficile se le prouver quoique vous insinuiez le contraire. L'établissement Terninck a été rétabli en vertu d'un arrêté du roi Guillaume qui, si je ne me trompe, invoque l'arrêté-loi de 1818, arrêté relatif aux bourses d'études. Il figure dans les états de 1846 comme une fondation d'instruction ; il se trouve parmi les annexes du projet en discussion.

Et puis, n'avez-vous pas été obligé d'introduire dans votre loi une exception pour les orphelinats ? N'avez-vous pas dû créer, en faveur des hospices, une faculté qu'ils n'avaient pas, dans votre pensée, pour leur donner capacité de gérer les établissements de cette catégorie ? Si vous n'aviez pas établi cette faculté dans la loi, les orphelinats ne seraient-ils pas frappés par votre loi ? Evidemment oui.

Fort de ces considérations, je vous ai reproché de venir, à quatre années d'intervalle, demander au Sénat et à la Chambre de se déjuger de la manière la plus formelle, la plus manifeste, et cela pour vous donner la satisfaction de prendre une revanche. Car, je le répète, votre loi de 1859 n'est qu'une demi-victoire remportée contre la cour de cassation et contre la majorité qui vous a précédés dans cette enceinte.

En réponse à mes observations et à celles de l'honorable M. Dechamps. et de l'honorable M. Dumortier, qu'a dit M. le ministre de ai justice et que vient-il dire encore aujourd'hui ?

Ma loi renferme des principes ; je n'ai pas à m'occuper des cas d'application. Ils sont réservés aux tribunaux. Quant à ceux dans lesquels doit intervenir le pouvoir administratif, on trouvera facilement une solution telle quelle. L'acte que vous me citez et sur lequel vous me demandez mon sentiment est un acte que je ne connais pas.

J'avais cependant fait connaître les statuts de l’établissement dont le sort m'intéresse et m'inquiète ; ils figurent aux Annales parlementaires. Ils valaient la peine d'être examinés.

Votre loi, dites-vous, ne renferme que des principes ; en cela vous ne nous apprenez rien de neuf, toutes les lois ont le même caractère. Elles sont des règles de conduite pour les citoyens, leur exécution est abandonnée au pouvoir judiciaire et au pouvoir administratif. Mais enfin nous qui faisons la loi, quel est notre premier devoir ? C'est de scruter les lois dans leurs conséquences, de voir quels seront leurs résultats pratiques.

Les tribunaux décideront ! J'admettrais votre réponse si je venais vous demander de vous expliquer sur un cas se rattachant à une loi existante, si je vous mettais en demeure de me dire quelle est votre opinion au sujet d'une espèce déterminée et qui fait l'objet d'un litige devant un tribunal ou une cour.

Vous seriez dans votre droit en me répondant : Adressez-vous aux tribunaux ; cela n'entre pas dans mes attributions, je n'ai ni le droit ni la mission de préjuger leurs sentences.

Mais encore une fois ce n'est pas ici le cas ; ce que nous vous demandons c'est de nous faire connaître la portée et les conséquences de votre œuvre et quant à l'acte sur lequel j'aurais voulu obtenir quelques explications, M. le ministre de la justice aurait pu, pour le connaître au juste, recourir à son collègue, M. le ministre des finances, qui, lui, le connaît parfaitement bien, attendu, comme je l'ai fait observer, qu'il figure dans un de ses ouvrages où l'établissement dont il s'agit est signalé comme rétabli en vertu d'un arrêté royal de 1846 entaché, d'après l'honorable ministre, d'illégalité.

Les réponses de M. le ministre de la justice ne sont que des fins de (page 961) non-recevoir et pas autre chose. Des fins de non-recevoir, on en trouve pour toutes les hypothèses.

L'autre jour, l'honorable M. Dumortier, se tenant dans des généralités, nous parlait de l'institut des Collettines de Tournai et voulait savoir de M. le ministre de la justice, s'il tombait sous l'application de la loi nouvelle. L'honorable M. Orts est venu, à l'instant même, en aide à M. le ministre de la justice. Vous vous renfermez dans des généralités, dans des banalités, a-t-il dit à M. B. Dumortier. Si vous citiez des actes, si vous apportiez ici les statuts des sœurs Collettines, nous pourrions discuter en connaissance de cause ; mais vous n'en faites rien. Et quand j'apporte les statuts d'un établissement aussi remarquable que celui de Courtrai, on me dit que ce sont des détails, des minuties dans lesquels on ne peut entrer.

M. le ministre de la justice et son collègue des finances ont cependant à leur disposition une réponse générale. La loi nouvelle, affirment-ils, ne touche pas aux cas que nous citons, car elle laisse intacte la législation actuelle. Cette déclaration a été faite en réponse au discours de l'honorable M. B. Dumortier.

C'est là tout bonnement une pétition de principe, un cercle vicieux ; c'est résoudre la question par la question ; c'est considérer comme indubitable le point qui est en discussion entre nous. Au surplus l'honorable ministre n'a pas plutôt eu fait cette déclaration qu'il l'a entourés de toutes espèces de réserves. Apostrophant l'honorable M. Dumortier : Vous vous trompez, lui dit-il, vous confondez toutes choses ; vous n'entendez pas le premier mot de la législation.

Voici ce qui est : Un legs fait à un incapable est un legs nul. L'incapacité du légataire vicie la disposition testamentaire, la rend caduque (article 911 du Code civil).

Là où le légataire est un incapable, la question se vide entre l'héritier et le légataire. Ceci ne concerne pas le gouvernement, il ne s'immisce jamais dans des cas semblables.

Aux tribunaux de décider si l'institution elle-même est immorale, impossible, contraire aux lois, viciée, ou si la stipulation tombe uniquement sur les conditions dont le testateur a fait dépendre sa libéralité.

Remarquons d'abord que le gouvernement ne se fait pas toujours scrupule de s'occuper des legs faits à des personnes incapables. Il a sur ce point des théories extraordinairement élastiques.

Pour justifier mon assertion, la Chambre me permettra de lui citer seulement deux cas pris entre beaucoup d'autres, où le gouvernement s'est occupé d'incapables. Ce ne sera pas long.

Je vois dans les documents statistiques publiés en 1857, à la page 479, un arrêté royal du 10 avril 1849, il concerne le testament de la dame De Pape, propriétaire à Thielt ; je lis à la page citée ce qui suit :

« Par disposition de dernière volonté la dame De Pape lègue 4 parcelles de terre de 2 hectares 75 ares 90 centiares à l'établissement des sœurs hospitalières dit Maison de Vieillards à Thielt, à la condition, par l'établissement favorisé, de recevoir et d'entretenir à perpétuité un pauvre de la commune de Thielt.

« L'établissement institué n'a pas été autorisé à accepter parce que l'objet des dispositions testamentaires de la dame De Pape rentre dans les attributions des hospices civils de Thielt. L'article 900 du Code civil a, entre autres, été appliqué, Voici les motifs de l'arrêt :

« Considérant que le service d'utilité publique qui fait l'objet des dispositions testamentaires de la dame De Pape rentre essentiellement dans les attributions des hospices civils de Thielt, et que par conséquent, c'est le dernier établissement qui a seul qualité pour recueillir les libéralités dont il s'agit. »

Il s'agissait là évidemment d'un incapable, la maison des vieillards ; pourquoi ne pas déclarer que le legs est nul et qu'il fera retour aux héritiers ? Pas du tout, ou déclare que le legs sera accepté par les hospices civils.

A la même page je trouve un cas semblable, il est réglé par arrêté royal du 21 avril 1849. Le sieur Philippe Matthys, desservant à Ruddervoorde, a fait un legs consistant en immeubles au profit de l'association des sœurs hospitalières de Marie, à Ruddervoorde, à la condition d'instruire gratuitement les jeunes filles pauvres de Ruddervoorde, et de leur faire enseigner les travaux manuels, de faire célébrer quatre anniversaires. L'établissement institué n'a pas été autorisé à accepter le legs du sieur Matthys ; le legs a été attribué au bureau de bienfaisance de la commune.

Cependant, messieurs, ces sortes d'institutions ont été regardées par l'honorable ministre des finances comme faites à des personnes incapables. Je vais vous en fournir la preuve. Voici ce que je lis dans l'ouvrage que j'ai déjà cité dans une précédente séance. Le passage ne sera pas denié par l'honorable ministre des finances :

« La loi a institué certains corps ; elle a défini et limité leurs droits et leurs attributions ; hors de là, ils ne sont pas, ils n'existent pas. Il est impossible de leur attribuer une existence autre que celle que la loi leur a donnée, à moins d'être aussi législateur. Ainsi une fabrique d'église est établie auprès de chaque église pour administrer le temporel du culte ; on lui ferait en vain un legs à la charge d'établir une école ou d'ouvrir un hospice : la capacité civile lui manque pour recueillir ce legs ; et ni testament, ni arrêté royal ne peuvent changer les conditions de son existence, déterminées par la loi. Ainsi encore on changerait vainement, par une donation ou un testament, une commission d'hospice ou un bureau de bienfaisance de recevoir ou de gérer des biens destinés à l'enseignement des prêtres dans les séminaires ou à l'entretien des églises. A plus forte raison le séminaire ou l'évêché ne pourraient recevoir des dons ou legs pour doter des couvents ; la nullité serait double : l'incapacité de l'intermédiaire choisi, l'illégalité de l'institution. »

Ainsi, d'après cette théorie, les sœurs hospitalières sont incapables, et dès lors, au lieu d'attribuer le legs à l'administration des hospices ou au bureau de bienfaisance, il aurait fallu le déclarer nul.

Au bas de la page je vois une petite réserve :

« Il est d'autant plus nécessaire de maintenir rigoureusement ces principes, que c'est le seul moyen d'assurer, lorsqu'elles ont un objet licite, l'accomplissement des volontés des testateurs et des donateurs. Autoriser des personnes ou des établissements capables à recueillir des dons et legs, c'est ouvrir à tout héritier le droit de refuser la délivrance des legs ou de revendiquer les biens donnés ; et si, lorsque ces legs ont un objet permis par les lois, un établissement capable n'intervient point pour les recueillir, le bienfait doit périr sans qu'il soit possible de le sauver. »

II me semble, messieurs, qu'il y a là une contradiction évidente : d'un côté on vient dire : L'institué est incapable, donc la condition doit être considérée comme entraînant la caducité du legs ; d'un autre côté on dit : Il y a cependant un moyen, c'est de considérer le legs comme ayant un objet licite, comme étant fait au profit d'un service public, et de l'attribuer au représentant légal de ce service.

Mais, soit ! j'admets que votre théorie est inflexible et que le gouvernement ne se mêle jamais de legs faits à des incapables. Quel est maintenant votre système ? Le voici : La loi s'occupe de libéralités faites en faveur du service public de l'enseignement à tous ses degrés et cela pour le passé comme pour l'avenir (les dispositions des articles 1 et 47 sont générales) ; ces libéralités doivent être recueillies et administrées par le représentant légal de ce service et par lui seul ; c'est ce que vient de répéter encore l'honorable ministre de la justice. Je vois que l'honorable ministre fait un signe d'assentiment, je suis donc d'accord avec lui. Le représentant légal de l'instruction primaire, c'est la commune.

Le legs fait aux indigents en vue de l'instruction primaire doit donc être recueilli et géré par la commune.

Quelles que soient d'ailleurs dans ce cas les conditions stipulées, le legs profitera à la commune. Les conditions jugées contraires aux lois, de ce nombre sont la nomination d'administrateurs spéciaux, la désignation d'une corporation chargée d'enseigner, seront biffées. Il est vrai que la cour de cassation ne vous reconnaît pas ce droit et c'est ce qui résulte du passage de l'arrêt de cassation dont l'honorable M. Dumortier a donné lecture tout à l’heure. Mais passons. Vous n'admettez pas qu'aucune disposition législative ou constitutionnelle donne au pouvoir exécutif le droit de reconnaître des fondations pour l'instruction, indépendantes des établissements publics, j'emploie votre propre langage ; c'est ce que je vois dans les considérants des arrêtés pris par le cabinet actuel. C'est la thèse que développait encore l'autre jour dans cette enceinte l'honorable M. Frère.

Voilà donc votre jurisprudence ; or, le fondement de cette jurisprudence est contesté, et que faites-vous ? Vous l'inscrivez dans la loi ; vous la convertissez en disposition législative applicable aux actes du passé comme aux faits de l'avenir. J'appelle sur de point la plus sérieuse attention de la Chambre, vous allez vous convaincre de la vérité de mon assertion.

En effet, messieurs, voici ce que porte l'article premier :

« Les libéralités en faveur de l'enseignement primaire d'une commune ou d'une section de commune sont réputées faites à la commune ou à la section de commune. »

Comme vous le voyez, il n'y a point ici de distinction, l'article est général, il embrasse le passé et l'avenir ; on ne le contestera pas, car si on le niait on ferait tomber tout le système de la loi concernant les fondations au profit de l'enseignement.

(page 962) L'article 47 dit, de son côté :

« Dans un délai qui ne pourra excéder un an, à partir de la publication de la présente loi, la gestion des biens de toutes les fondations de l'enseignement ou des bourses ayant une administration distincte, sera, par l'arrêté royal pris sur l'avis de la députation permanente de la province ou du conseil de la commune intéressée, remise aux administrations compétentes d'après la présente loi pour régir des fondations semblables. »

Ainsi la saisine et l'administration des biens des fondations anciennes sont remises aux administrations officielles.

Il n'y a d'exception pour aucune fondation ayant une administration distincte. M. le ministre vient tout à l'heure d'intercaler dans le texte après les mots « fondations d'enseignement » les suivants : « ou rattachés à des établissements incompétents » pour donner encore plus d'extension à la disposition, pour que rien n'échappe à la loi.

Qu'est-ce à dire ? Que par la loi, vous vous imposez à vous-même le devoir de faire rapporter tous les arrêtés royaux contresignés par vos prédécesseurs et que vous considérez comme illégaux. De quoi vous plaignez-vous ? disait avant-hier, l'honorable ministre des finances, l’article 23 de la loi du 23 septembre 1842 dispose de même ; il avait déjà tranché la question qu'il vous plaît de soulever ; l'honorable M. Tesch à son tour proclame que l'article premier ne fait que répéter ce qui se trouve déjà dans l'article 23 de la loi du 23 septembre 1842, sur l'instruction primaire ; donc nous n'innovons pas ; la disposition de l'article 47 combinée avec l'article premier n'est que la confirmation de la législation existante.

Eh bien, messieurs, je vais avoir l'honneur de vous lire l'article 23 de la loi de 1842, et vous allez juger ce que vaut le raisonnement des honorables ministres.

« Art. 23. A défaut de fondations, donations ou legs, qui assurent un local et un traitement à l'instituteur, le conseil communal y pourvoira au moyen d'une allocation sur son budget. »

Y a-t-il là l'ombre d'un rapport avec les dispositions des articles premier et 47 du projet de loi ?

Que signifie l'article 23 ?

Que pour le cas où il existe des fondations suffisantes appartenant à la commune, elle sera dispensée de porter à san budget l'allocation qui lui est imposée par la loi et qui doit assurer un local et un traitement à l'instituteur. L'article 23 n'a pas d'autre portée.

D'abord cette disposition législative est restreinte. Elle traite de donations et de legs qui assurent un traitement et un local à l'instruction primaire. Mais il y a d'autres fondations en faveur de l'instruction primaire.

Ainsi, une fondation peut avoir en vue de procurer l'entretien à l'instituteur ou le mobilier classique aux élèves de l'école.

Comment voulez-vous que cette disposition, restreinte à deux cas déterminés, les embrasse tous, voire même ceux qui concerneraient l'enseignement moyen dont la loi de 1842 ne s'occupe pas ? (Interruption.)

Comment ose-t-on soutenir qu'en vertu de l'article 23, les bâtiments d'école appartenant à des personnes civiles distinctes, ont été dévolus à la commune, que les revenus de ces personnes ont été réunis à son domaine, et qu'elle a reçu mission d'administrer leurs biens ?

Je vous ferai remarquer qu'il n'y a pas un mot de tout cela dans l'exposé des motifs, ni dans le rapport de la section centrale, ni dans les discussions qui ont eu lieu à l'occasion de la loi de 1842.

Eh quoi ! les hommes qui avaient signé, la veille de la présentation de la loi de 1842, des arrêtés royaux autorisant des fondations avec administrateurs spéciaux en faveur de l'enseignement primaire, seraient donc venus sournoisement, hypocritement, en quelque sorte, se donner un démenti à eux-mêmes, trahir la confiance des fondateurs ! Mais c'eût été de leur part un acte d'abominable félonie ; une trahison épouvantable.

Et ces mêmes hommes ont, le lendemain de la publication de la loi, continué à contresigner les arrêtés royaux qui instituaient des fondations avec administrateurs spéciaux. Pourrait-on comprendre une pareille conduite si leur pensée eût été celle que vous leur prêtez gratuitement ?

Si vous soutenez sérieusement ce que vous venez avancer, je dis alors que vous êtes grandement coupables, car vous avez suspendu l'exécution de la loi. Il était de votre devoir de stimuler les communes, de les inviter à faire valoir leurs droits vis-à-vis des administrateurs spéciaux ; vous aviez à sauvegarder l'intérêt du trésor ; les communes mises en possession des revenus de fondations, vous n'aviez pas à leur accorder des subsides pour la construction des locaux d'école ni pour d'autres besoins.

Que vous disiez que les anciennes corporations ont été supprimées, que tous leurs biens indistinctement ont été réunis au domaine ou qu'ils ont été attribués aux hospices ou aux bureaux de bienfaisance, je le comprends ; que vous souteniez que le roi Guillaume n'avait pas le droit de rétablir ou d'autoriser des fondations en faveur de l'enseignement, que la loi fondamentale ne lui octroyait pas cette faculté, d'autres que vous l'ont soutenu, avec peu de succès ; que vous contestiez la légalité des arrêtés royaux intervenus en matière de fondations au profit de l'enseignement, après 1830 et avant 1849 ; que vous veniez nous dire qu'il n'est pas permis sous le régime actuel de donner directement ou indirectement la personnification civile à des corporations enseignantes ; que vous affirmiez que c'est à tort que l'on invoque le décret du 18 février 1809 pour autoriser les corporations d'hospitalières à donner l'enseignement ; je conçois tout cela. On peut débattre ces questions douteuses et beaucoup d'autres. (Interruption.)

Je sais bien que vous avez en votre faveur un arrêt de la cour de cassation, pour le cas auquel vous vous raccrochez particulièrement : celui des sœurs hospitalières érigées en corporations enseignantes.

Mais il n'y a pas que des établissements d'enseignement dirigés par des sœurs hospitalières ; il y en a aussi à la tête desquels se trouvent les sœurs de Notre-Dame, les sœurs de Marie, des corporations exclusivement enseignantes. Il est des fondations dont la saisine et l'administration appartiennent à des bureaux de bienfaisance ou à des fabriques d'église ; il en est qui existent comme personnes civiles et qui ont été autorisées par application de dispositions législatives autres que le décret du 15 février 1809.

Messieurs, prétendre que l'article 23 de la loi sur l'instruction primaire a tranché les questions auxquelles je fais allusion dans le sens de l'opinion défendue par le cabinet, c'est se cramponner à une thèse peu digne de la part de jurisconsultes aussi éminents que M. le ministre de la justice et M. le ministre des finances. Mais, dirai-je aux honorables ministres : Vous aviez besoin de soutenir cette thèse pour faire passer l'article 47 sous le couvert d'une disposition législative quelconque, et vous n'avez rien trouvé de mieux que de vous prévaloir de l'article 23 de la loi du 23 septembre 1842 ; vous n'avez pas reculé, il fallait de toute nécessité pouvoir dire au pays : « Nous n'innovons pas ; nous ne faisons que consacrer la législation ancienne. »

Nous disons, nous, que l'article premier du projet de loi innove considérablement ; il énonce et stipule clairement ce que MM. les ministres de la justice et des finances trouvent dans l'article 23 de la loi du 23 septembre 1842 et ce qui manifestement ne s'y trouve pas ; il décide contre nous une question douteuse, la grande question qui depuis longtemps nous divise ; il consacre solennellement, législativement la jurisprudence de 1849 pour le passé comme pour l'avenir ; il impose à toutes les communes l'obligation de réclamer la saisine et l'administration des fonds particuliers ; il les oblige de réclamer aussi des bureaux de bienfaisance et des fabriques d'église les fondations d'instruction que, sous des conditions déterminées, immuables, ils ont été autorisés à gérer ; et c'est sans doute pour rendre la disposition plus explicite, sous ce dernier rapport, que M. le ministre de la justice a proposé tantôt sa disposition additionnelle à l'article 47. (Interruption.) Votre loi transforme tous ces établissements particuliers en établissements publics soumis à la loi de 1842. Elle les qualifie tels dans l'intitulé du chapitre premier.

Et quand la commune aura la saisine et l'administration de ses biens, quand les établissements particuliers seront devenus des établissements publics, je vous le demande, que restera-t-il des conditions imposées par le fondateur ? Rien, absolument rien. Ou l'article 47 a cette portée ou il n'en a aucune.

Il ne vous aura pas échappé que l'article 47 est complexe ; que les dispositions sont les mêmes pour les bourses d'études comme pour les fondations en matière d'enseignement.

Or, en vertu de l'article 47, la saisine et l'administration des bourses d'études vont être remises aux commissions provinciales ; cela n'est pas contesté, cela ne saurait être mis en question.

Evidemment, au même titre, les communes doivent exiger aussi à leur profit la saisine et l'administration des biens qui sont possédés, au nom des fondations existantes, par d'autres administrateurs que les administrateurs communaux. Il n'y a pas de doute à cet égard. Les mêmes termes employés dans la même disposition ne peuvent avoir qu'une seule et même signification.

Donc, M. le ministre de la justice, on si l'on veut, M. le ministre de l'intérieur, devra mettre les communes en demeure de faire valoir leurs droits contre les fondations particulières, leur donner à ce sujet des instructions précises. Cela ne se fera pas tout d'un coup, ce serait trop odieux mais cela se fera lentement et sûrement. Il y aura peut-être par-ci par-là quelques résistances, mais elles seront inefficaces ; (page 963) téméraires seraient les administrateurs spéciaux qui voudraient entamer un procès en dépit d'un texte aussi formel que celui de l'article 47. Ils seraient inévitablement déboutés !

Il ne faut pas qu'il y ait entre nous équivoque. Je vais mettre M. le ministre de la justice en mesure de se prononcer en précisant, en lui parlant de choses qu'il ne peut ignorer. Voyons quelles sont les fondations sur le sort desquelles nous désirons avoir des explications.

On peut aisément les diviser eu grandes catégories, soit d'après les dispositions en vertu desquelles elles ont été autorisées, soit d'après l’époque où elles ont été reconnues, soit d'après la qualité des institués.

Dans la première catégorie, il en est qui ont été reconnus en vertu des articles 910 et 937 du Code civil ; d'autres l'ont été en vertu des arrêtés de 1818, de 1823 et de 1829 ; d’autres, par application du décret du 18 février 1809, ou du décret du 30 décembre 1809, article 59.

Dans d'autres, enfin, l'article 76 de la loi communale, ou l'arrêté du 4 pluviôse an XII, ont été visés.

Je crois avoir cité les dispositions législatives les plus importantes, celles qui ont été le plus fréquemment invoquées, il se peut cependant que quelques-unes m'aient échappé.

Je crois devoir faire remarquer à la Chambre que c'est toujours au décret du 18 février 1809 seul que MM. les ministres des finances et de la justice font allusion dans leurs observations en réponse à nos observations.

Le décret du 18 février 1809 est relatif aux sœurs hospitalières.

Il serait bon de nous entretenir un peu des autres dispositions visées par les arrêtés d'autorisation.

Car, ainsi que je viens de le démontrer, les fondations en faveur de l'enseignement sont établies en vertu de différentes dispositions législatives ; et c'est à ces dispositions que l'honorable M. Nothomb rattache son amendement.

Si l'on veut maintenant distinguer les fondations en faveur de l'enseignement, avec administrateurs spéciaux, d'après la date des autorisations, on trouvera, sous tous les régimes, des actes du pouvoir exécutif qui les reconnaissent : sous le régime hollandais, avant 1830, sous le régime actuel après 1830, et avant la promulgation de la loi communale, postérieurement à la loi communale et avant la mise en vigueur de la loi de 1842 sur l'instruction primaire et enfin depuis la loi de 1842 jusqu'en 1849, époque où fut publiée la circulaire de M. de Haussy.

Si en troisième lieu on a égard, pour distinguer les diverses fondations, aux institués, on trouvera que les institués sont : tantôt la fondation elle-même, comme telle, érigée en personne civile, tantôt le bureau de bienfaisance, tantôt la fabrique d'église ; parfois une corporation enseignante, rarement une corporation hospitalière. Mais toujours, dans toutes ces dispositions qui autorisent la fondation ou l'acceptation de la donation ou du legs on commence par stipuler le respect de la volonté du fondateur et l'observation des conditions stipulées dans l'acte de fondation, dans le testament ou dans l'acte de donation.

Je pourrais, messieurs, étayer mes observations et justifier ces distinctions par une série d'exemples pris dans les documents officiels que j'ai déjà cités à diverses reprises ; mais, pour ne pas fatiguer la Chambre, je me contenterai d'en insérer quelques-uns aux Annales parlementaires. Je les ai pris au hasard et pourrais les multiplier : j'en ai sous les yeux une centaine.

Fondations avec administrateurs et distributeurs spéciaux (extrait des documents parlementaires et discussions concernant le projet de loi sur les établissements de bienfaisance. Tome II, pages 351 et suivantes. A : nom des fondateurs, date de la fondation ou du testament ; B : nature de la libéralité ; C : Etablissement 1° institué dans l’acte ; 2° autorisé par le gouvernement ; D : Clauses contenues dans l’acte de fondation ; E : Dispositions contenues dans l’acte d’autorisation ; F : Dispositions légales visées dans le préambule)

a) 18 mars 1833. Loncke, Jacques ; Debeir, Benoît ; Deves, Jean. Donation,

b) Maisons, parcelle de terre, rentes.

c) 1° L'école gratuite instituée pour les enfants pauvres, à Lendelede ; 2° le bureau de bienfaisance,

d) L'école est établie depuis 1811 ; elle est tenue actuellement (1833) par Catherine-Rosalie Loncke, Marie-Anne Van Ombergh, Catherine Mabien, Thérèse de Smet, Bénédicte Tremmerio, Rosalie Wyffels, Amélie Verhelt et Colette Deman.

e) Remplir les vœux des donateurs. L'article 2 porte : « Par suite de l'autorisation accordée à l'artic'elprécédent, ladite école devra être considérée comme une dépendance du bureau de bienfaisance donataire, et, comme telle, apte à recevoir, par son intermédiaire, les dons et legs qui seraient affectés à l'entretien de l'école.

f) Arrêté du 4 pluviôse an XII, articles 910 et 937 du Code civil.


a) 15 novembre 1833. Maquer, Anne. Testament du 7 mai 1833.

b) La fondation jouissait en 1831 d'un revenu de 600 fr. environ et d'un capital de près de 12,000 fr.

c) La fondation comme telle.

d) Fondation d'une école gratuite pour les filles pauvres de la ville de Virton, dont la direction sera donnée de préférence à des religieuses que choisiront les collateurs qu'elle désigne.

e) Le curé et le bourgmestre de Virton sont nommés administrateurs-collateurs.

f) Arrêtés des 26 décembre 1818 et 2 décembre 1823.


a) 24 décembre 1833. Paul, Philippe-Joseph, ancien chanoine de Dinant. Testament olographe du 27 février 1827.

b) Diverses rentes en nature consistant en soixante-trois mesures d'épeautre et en onze mesures et demie d'avoine.

c) La fabrique de l'église de Franchimont.

d) A charge par l'établissement légataire d'employer le revenu de ces rentes au traitement d'un instituteur chargé d'instruire gratuitement les enfants pauvres de Franchimont.

e) Autorisation accepter.

f) Art. 59 du décret du 30 décembre 1809, et les articles 910 et 937 du Colle civil.


a) 31 janvier 1834. Andries, Eugène. Donation du 6 décembre 1833.

b) Ferme (5,660 francs).

c) Le bureau de bienfaisance de Hooglede.

d) Affecter le revenu aux besoins de l'école instituée pour les enfants pauvres de l'endroit, et dirigée par les sœurs de la charité.

e) Remplir les intentions du donateur.

f) Arrêté du 4 pluviôse an XII ; articles 910 et 937 du Code civil.


a) 3 février 1841. Henrard, Jeannette. Testament du 27 décembre 1839.

b) Un jardin et bâtiments, évalués à 12,615 fr., capital de 27,000 francs.

c) La fabrique de l'église de Saint-Remacle, à Verviers.

d) 2,000 francs, pour payer les orgues de l'église de St-Remacle, à Verviers. 26,000 francs, pour construire une maison pour les vicaires. 5,000 francs, pour approprier un bâtiment appartenant à la fabrique, pour les écoles dominicales, tenues et dirigées par le clergé de l'église primaire de Saint-Remacle.

e) Remplir les charges apposées par la testatrice.

f) Article 59 du décret du 30 décembre 1809, article 76 de la loi communale, et article 910 et 937 du Code civil.


a) 3 mars 1841. Buysrogge, Cornelis, curé à Tamise. Donation du 20 mars 1840.

b) Une maison et 2 ares 70 centiares de terre.

c) La fabrique de l'église de Tamise.

d) Etablissement d'une école dominicale qui sera sous la direction exclusive du donateur et des curés de Tamise,

e) Remplir les charges apposées.

f) Articles 910 et 937 du Code civil ; article 59 du décret du 30 décembre 1809, et article 76 de la loi communale.

Ces deux derniers arrêtés sont contresignés par M. Leclercq.

Et maintenant, messieurs, pour la deuxième fois, je prie M. le ministre de la justice de me dire si, en vertu de l'article 47, les communes où se trouve le siège des fondations que je viens de caractériser, sont tenues, dans sa pensée, de réclamer la saisine et l'administration des biens de ces fondations.

(page 964) M. le ministre serait mal venu de me dire : Ce sont encore ici des cas d'application.

Ces cas, il doit les connaître, il a dû s'en préoccuper vivement, et, du reste, dès le lendemain de la publication de la loi, il aura à les résoudre ; il doit donc les avoir prévus.

Si M. le ministre ne me donne pas de réponse précise, catégorique, par un oui ou un non, j'en conclurai qu'il redoute de dévoiler devant le pays la portée de la loi.

- Voix à droite. - C'est cela !

M. Tack. - Mais pour lors, je le supplie, s'il ne veut pas s'expliquer sur les diverses hypothèses que j'ai nettement précisées, si sa loi n'est pas applicable aux cas que j'ai indiqués, de nous apprendre an moins à quels cas alors s'appliquera l'article 47.

Au demeurant, à quoi bon exprimer un doute sous ce rapport ? Est-ce que la jurisprudence de MM. les ministres de la justice et des finances n'est pas connue ? N'est-il pas évident que cette jurisprudence est convertie aujourd'hui en loi ? Donc j'avais le droit, malgré leurs réponses embarrassées et incomplètes, de dire, en commençant, que le projet de loi innove, qu'il bouleverse les fondations anciennes, qu'il est l'antithèse de la loi de 1859. Soit dit en passant, lors de la présentation de cette loi et avant la mise au jour de l'amendement de l'honorable M. Forgeur, les mêmes objections ont été faites ; on ne voulait pas entrer dans ces détails, examiner les actes, on signalait comme illégaux les actes des cabinets antérieurs, on les proscrivait par une disposition générale. Le Sénat s'est-il arrêté devant ces objections ? Non ; il a déclaré que les fondations existantes continueraient d'être régies conformément aux actes d'autorisation.

C'est une pareille garantie dont nous demandons l'insertion dans la loi. Sans cela, dès qu'on le voudra, l'acte de proscription qui frappe, aux termes de l'article 47, toutes les fondations d'enseignement ayant une administration distincte, sera exécuté et si les établissements continuent de subsister encore quelque temps, ce sera par pure tolérance, par pure condescendance, par pure générosité de la part de MM. les ministres.

En attendant elles se trouveront placées sous le coup d'une menace incessante.

Voilà donc quelle est la position qui leur est faite. Il est facile au reste de prévoir que le jour viendra où l'Etat et ses délégués, comme on les appelle, les provinces, les communes auront tout accaparé. Dans un avenir plus ou moins éloigné, l'enseignement officiel aura pour subsister et pour se développer, non seulement les budgets communaux, les budgets provinciaux, celui de l'Etat, mais de plus, le grand nombre des bourses, les fondations en faveur de l'enseignement anciennes et récentes ; et c'est contre ce monopole, contre cette concurrence, armée de l'argent des contribuables et de toutes les influences, dont dispose le gouvernement, qu'on voudra bien permettre à l'enseignement libre, réduit à des ressources précaires, toujours incertaines, d'entrer en lutte.

L'issue d'une telle lutte, vous le comprenez, messieurs, ne saurait être douteuse.

M. le président. - La parole est à M. B. Dumortier.

M. B. Dumortier. - Je n'avais pas demandé la parole, mais je prie M. le ministre de la justice de répondre au remarquable discours de l'honorable M. Tack. Ce discours exige absolument une réponse ; il s'agit encore là d'un cas de confiscation de tous les établissements de femmes où l'on donne l'instruction. Aucun doute à cet égard n'est possible, surtout après les dispositions que M. le ministre propose d'ajouter à son amendement.

Il est évident comme la lumière du jour que le droit prétendu qu'il se crée n'existe pas et qu'il propose à la Chambre de se déjuger en la conviant à voter précisément le contraire de ce qu'elle a voté en 1859. Il faut absolument que nous sachions si le gouvernement a sérieusement et réellement l'intention de s'emparer de tous les établissements de filles, sans lesquels il n'y a pas d'éducation possible pour les enfants du sexe féminin. La Chambre doit savoir à quoi s'en tenir ; elle ne peut pas voter dans le sac une pareille spoliation.

Je demande donc une explication formelle sur cette grave question.

M. le président. - Personne ne demande plus la parole ?

- Voix à droite. - C'est vraiment incroyable !

M. de Theux. - Il est évident que nous ne pouvons pas contraindre M. le ministre de la justice à parler ; mais le pays appréciera la convenance de cette conduite.

Je me bornerai donc à faire remarquer, pour le moment, qu'il ne s'agit pas de prononcer la clôture, car il a été entendu que le vote sur ces dispositions serait retardé jusqu'au retour des membres de la Chambre qui ont été chargés d'une mission officielle.

D'ailleurs, je viens de rédiger un amendement à l'article 38 que je vais faire parvenir au bureau.

M. le président. - Il a été entendu, en effet, qu'on ne voterait pas sur la proposition de M, Nothomb avant le retour de la députation qui a été chargée d'assister aux obsèques de M. Pierre, mais il n'y a pas eu de décision sur ce point.

- Plusieurs membres. - Cela a été entendu.

M. le président. - Nous sommes donc d'accord.

Voici l'amendement de M. de Theux :

« Quelles que soient les dispositions contraires, l'étudiant jouissant à ce titre soit d'une bourse, soit d'une faveur quelconque résultant d'actes de fondations, de budgets de l'Etat, de la province, de la commune, ou de tout autre établissement public, a la faculté de fréquenter un établissement public ou privé à son choix.

« Ces bourses et ces avantages seront conférés par les commissions provinciales, à moins qu'un autre mode de collation ne soit déterminé par des lois spéciales ; dans ce dernier cas, la liberté de l'étudiant restera néanmoins entière.

« Il n'est point dérogé, par la présente loi, aux dispositions en vigueur pour les écoles normales primaires ou d'enseignement moyen. »

M. de Theux. - Il est bien entendu que je maintiens l'amendement que j'ai présenté de concert avec M. Nothomb et d'autres collègues concernant la rétroactivité ; celui que je viens de déposer dispose pour l'avenir.

L'amendement quî je propose est issu de la discussion générale. L'honorable M. Orts a présenté un amendement pour consacrer la liberté de l'étudiant de choisir l'établissement où il fera ses études.

Dans le discours que j'ai prononcé, j'ai interpellé l'honorable membre sur le point de savoir s'il s'appliquait aux bourses à ériger pour le budget prochain, par les communes et les provinces, il m'a répondu oui. (Interruption- La réponse de M. Orts a été claire. En examinant la matière à fond, j'ai trouvé que l'amendement n'était pas rédigé en termes suffisamment explicites ; c'est ce qui m'a déterminé à proposer l'amendement dont il s'agit. Cet amendement sera discuté demain quand on abordera l'article 38 et l'amendement de M. Orts.

M. le président. - Veut-on aborder aujourd'hui l'article 38 et les amendements ?

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Réservant l'article 47, on pourrait s'occuper des dispositions suivantes, elles viendraient à tomber si l'opinion que défend la droite triomphait ; de cette manière nous ne perdrions pas notre temps, la droite pourrait consentir à cela.

M. de Theux. - Ce mode de procéder serait irrégulier ; je proposerai d'anticiper demain l'heure de la séance, pour qu'on puisse en finir du premier vote de la loi. Notre intention n'est pas de prolonger davantage la discussion. Les opinions sont formées sur l'amendement de M. Nothomb comme sur celui de M. Wasseige, la liberté du choix de l'établissement d'instruction et la rétroactivité. Après de courtes observations, demain on pourra procéder au vote.

Je désire, ainsi que mes amis, que le premier vote soit terminé dans la séance de demain. Je propose donc d'anticiper l'heure de la séance de demain.

- Plusieurs voix. - A midi.

- La Chambre renvoie la suite de la discussion à demain à midi.

M. le président. - La Chambre veut-elle passer à la discussion des projets de loi qui paraissent ne pas devoir donner lieu à des débats ? (Oui ! oui !)

Ou bien veut-elle entendre le prompt rapport dont elle a décidé qu'elle s'occuperait ?

- Plusieurs voix. Non ! non les projets de loi.

- La Chambre décide qu'elle s'occupera des projets de loi à l'ordre du jour.

Projet de loi autorisant à aliéner des biens domaniaux

Vote des articles et vote sur l’ensemble

Personne ne demande la parole. La Chambre passe à la discussion des articles.

« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à aliéner, par voie d'adjudication publique, les biens domaniaux désignés dans l'état annexé à la présente loi, sous les n°1 à 17 inclusivement. »

- Adopté.


« Art. 2. La propriété reprise sous le n°18 du même état pourra être vendue à main ferme à la province de Hainaut, au prix de 2,000 francs. »

- Adopté.


(page 965) Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet.

Il est adopté à l'unanimité des 67 membres qui ont répondu à l'appel nominal. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel : MM. Prévinaire, Rodenbach, Sabatier, Schollaert, Snoy, Tack, Tesch, Thibaut, A. Vandenpeereboom, Van de Woestyne, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Volxem, Wasseige, Ansiau, Bara, Beeckman, Braconier, Ch. Carlier, Crombez, David, de Bronckart, Dechamps, de Gottal, de Haerne, de Lexhy, de Liedekerke, de Macar, de Mérode, de Montpellier, de Muelenaere, de Naeyer, de Renesse, de Ridder, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, B. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frère-Orban, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, J. Lebeau, Lesoinne, Loos, Magherman, Mercier, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Pirson et Vervoort.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires au budget du ministère de la guerre

Vote des articles et vote sur l’ensemble

« Art. 1er, § 1er. L'article 12 (Traitement et solde de l'infanterie) du budget de la guerre pour l'exercice 1862, est diminué de cinquante et un mille septante francs dix-sept centimes.

« § 2. Les crédits ouverts au même budget sont augmentés :

« Savoir :

« Art. 15. Traitement et solde du génie : fr. 14,000.

« Art. 26. Frais de route et de séjour des officiers : fr. 6,300.

« Art. 32. Pensions et secours : fr. 5,300.

« Art. 35 (nouveau). Créances arriérées restant à liquider sur des exercices clos : fr. 25,470 17

« Ensemble cinquante et un mille septante francs dix-sept centimes : fr. 51,070 17. »

- Adopté.


« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »

- Adopté.


Il est procédé à l'appel nominal.

67 membres y prennent part.

Tous répondent affirmativement.

En conséquence la Chambre adopte. Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel nominal : MM. Prévinaire, Rodenbach, Sabatier, Schollaert, Snoy, Tack, Tesch, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van de Woestyne, Van Humbeeck, Van Renynghe, Van Volxem, Wasseige, Ansiau, Bara, Beeckman, Braconier, C. Carlier, Crombez, Dechamps, de Gottal, de Haerne, de Lexhy, de Liedekerke, de Macar, de Mérode, de Montpellier, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Renesse, de Ridder, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Theux, Devaux, B. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frère-Orban, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, J. Lebeau, Lesoinne, Loos, Magherman, Mercier, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Pirson et Vervoort.

Projet de loi prorogeant pour les deux sessions de 1864 le mode de nomination des membres des jurys d’examen universitaires

Vote de l’article unique et vote sur l’ensemble

Personne ne demandant la parole, la discussion générale est close.

« Art. unique. Le mode de nomination des membres des jurys d'examen déterminé par l'article 24 de la loi du 1er mai 1857, et qui cessera d'être en vigueur après la seconde session de 1863, est prorogé pour les deux sessions de 1864.

« Le système d'examen établi par la même loi, et dont la révision, aux termes du second paragraphe de l'article unique de la loi du 8 août 1862, devait avoir lieu avant la seconde session de 1865, sera révisé avant la seconde session de 1864. »

- Adopté.


Il est procédé à l'appel nominal.

69 membres y prennent part.

68 répondent oui.

1 répond non.

En conséquence la Chambre adopte.

Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont voté oui : MM. Prévinaire, Rodenbach, Sabatier, Schollaert, Snoy, Tack, Tesch, Thibaut, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van de Woestyne, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Volxem, Wasseige, Ansiau, Bara, Braconier, C. Carlier, Crombez, Dechamps, de Gottal, de Haerne, de Lexhy, de Liedekerke, de Macar, de Mérode, de Montpellier, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Renesse, de Ridder, d« Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Devaux, B. Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, J. Lebeau, Lesoinne, Loos, Magherman, Mercier, Moncheur, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Pirson et Vervoort.

A voté le rejet, M. Kervyn de Lettenhove.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires au budget du ministère de la justice

Discussion générale

M. de Theux. - Je ne viens pas m'opposer au crédit demandé, mais je ne puis m'empêcher de faire cette remarque qu'il y a quelques années on se plaignait toujours des crédits supplémentaires, et qu'aujourd'hui ils sont plus nombreux que jamais. Ils ont de plus le tort de venu à la fin de la session.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, ces crédits ont été demandés il y a plusieurs mois. Ils figurent à l'ordre du jour depuis bien longtemps. S'ils n'ont pas été discutés plus tôt , c'est que la Chambre s'est occupée d'autre chose, mais ils n'ont certes pas été proposés à la fin de la session.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le projet de loi a été déposé au mois de mars.

- La discussion générale est close.

Vote des articles et vote sur l’ensemble

« Art. 1er. Le budget des dépenses du ministère de la justice, pour l'exercice 1862, fixé par la loi du 17 mars 1862 (Moniteur, n°79), est augmenté :

« 1° D'une somme de sept mille trente et un francs cinquante-quatre centimes, qui sera ajoutée à l'allocation chapitre premier, article 3, Matériel de l'administration centrale : fr. 7,031 54 ;

« 2° D'une somme de cinq mille francs, qui sera ajoutée à l'allocation chapitre II, article 8, Cours d'appel. Personnel : fr. 5,000 ;

« 3° D'une somme de vingt francs, qui sera ajoutée à l'allocation chapitre II, article 11, Justices de paix et tribunaux de police : fr. 20 ;

« 4° D'une somme de dix-neuf mille quatre cent quatre-vingt-dix-huit francs vingt et un centimes, qui sera ajoutée à l'allocation du chapitre VI, article 19, Impression du Recueil des lois, du Moniteur et des Annales parlementaires : fr. 19,498 21 ;

« 5° D'une somme de huit cents francs, qui sera ajoutée à l'allocation chapitre X, article 48, Traitement des employés attachés au service domestique : fr. 800. »

« 6° D'une somme de trois mille francs, qui sera ajoutée à l'allocation chapitre X, article 57, Honoraires et indemnités de routes aux architectes pour la rédaction de projets de prisons, la direction et la surveillance journalière des constructions : fr. 3,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Le budget des dépenses du ministère de la justice, pour l'exercice 1863, fixé par la loi du ... (Moniteur, n°...) est augmenté d'une somme de cent soixante-quatorze mille six cent cinquante francs vingt-cinq centimes (fr. 174,650 fr. 25 c), destinée à la liquidation et au payement des dépenses concernant les exercices clos de 1861 et années antérieures, qui fera l'objet d'un chapitre XIII nouveau, conformément au détail ci-après :

« Chapitre XIII

« Paragraphe premier. Frais de justice.

« Art. 64. Frais de justice en matière criminelle, correctionnelle et de police, années 1861 et antérieures : fr. 13,000.

« Paragraphe 2. Palais de justice.

« Art. 65. Construction, réparations et entretien de locaux en 1861 : fr. 817 87.

(page 966) « Paragraphe 3. Établissements de bienfaisance.

« Art. 66. Frais d'entretien et de transport d'indigents dont le domicile de secours est inconnu ou qui sont étrangers an pays, en 1861 et années antérieures : fr. 40,000. »

« Art. 67. Subsides à accorder extraordinairement à des établissements' de bienfaisance et à des hospices d'aliénés en 1861 : fr. 10,308 18.

« Art. 68. Frais de route et de séjour des membres des commissions spéciales pour les établissements de charité, de bienfaisance et d'aliénés, en 1861 et années antérieures : fr. 1,000.

« Paragraphe 4. Prisons.

« Art. 69. Frais d'entretien des détenus de 1851 à 1861 : fr. 40,916 45.

« Art. 70. Frais de voyage des membres des commissions administratives des prisons, ainsi que des fonctionnaires et employés des mêmes établissements, en 1861 : fr. 648 42.

« Art. 71. Entretien et travaux d'amélioration des bâtiments des prisons en 1861 et années antérieures : fr. 3,100 70.

« Art. 72. Honoraires et indemnités de route aux architectes, pour la rédaction de projets de prisons, la direction et la surveillance journalière des constructions en 1861 : fr. 1,681 75.

« Art. 73. Apurement du déficit provenant des détournements commis par un agent des prisons en 1861 : fr. 53,421 04.

« Paragraphe 5. Dépenses diverses.

« Art. 74. Dépenses diverses de toute nature et catégorie, mais antérieures à 1862 : fr. 3,755 84.

« Total général : fr. 204,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Les allocations qui font l'objet de la présente loi s'élevant ensemble à deux cent quatre mille francs (fr. 204,000), seront couvertes au moyen des ressources ordinaires des exercices 1862 et 1863. »

- Adopté.


« Art. 4. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »

- Adopté.


Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

60 membres prennent part au vote.

59 votent l'adoption.

1 vote le rejet.

En conséquence le projet est adopté ; il sera transmis au Sénat.

Ont voté l'adoption : MM. Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Tack, Tesch, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van de Woestyne, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Volxem, Wasseige, Braconier, Carlier, Crombez, de Boe, de Gottal, de Lexhy, de Macar, de Mérode, de Montpellier, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Renesse, de Ridder, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, B. Dumortier, Frère-Orban, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Lesoinne, Loos, Magherman, Mercier, Moncheur, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs, Orban, Orts, Pirmez, Pirson et Vervoort.

A voté le rejet : M. Snoy.

- La séance est levée à 4 heures trois quarts.