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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 18 juillet 1862

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1861-1862)

(page 1821) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Thienpont, secrétaire., procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Florisone donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

(page 1822) M. Thienpont présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Les sieurs Vanlandewyck, Maton et autres membres des sociétés charbonnières du Couchant de Mons prient la Chambre d'autoriser la concession du canal de Jemmapes à Ath, avec garantie d'un minimum d'intérêt. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi des travaux publics.


« Des membres du conseil communal d'Ambly demandent que la concession du chemin de fer dit de la Vallée de l’Ourthe ne soit accordée à la compagnie du Grand-Luxembourg qu'avec la condition expresse de construire la ligne tout entière jusqu'à Givet dans un délai qui n'excédera pas 3 ou 4 années. »

- Même décision.


« Des membres du conseil communal et habitants de Buissonville font la même demande et sollicitent, en outre, que la jonction du chemin de fer de la vallée de l'Ourthe avec celui du Luxembourg, se fasse à Aye. »

- Même décision.


« Les membres du conseil communal et des habitants de Quaregnon demandent l'exécution du canal direct de Jemmapes à Ath. »

- Même décision.


« Des habitants de Chérain prient la Chambre de stipuler dans le projet de loi de travaux publics, qu'il sera construit un chemin de fer partant de Spa et se dirigeant vers la frontière du grand-duché de Luxembourg, en passant par Stavelot et Vielsalm ; que ce chemin de fer sera construit en quatre ans au plus, à partir de la promulgation de la loi ; que la compagnie versera un cautionnement dans les trois mois qui suivront cette promulgation et que jusqu'à l'entier achèvement de cette ligne et de la ligne de l'Ourthe, la part afférente à l'une d’elles dans la subvention ne pourra dépasser 400,000 francs. »

- Même décision.

« Le collège échevinal de Putte demande que le chemin de fer projeté d'Anvers à Hasselt passe aussi près que possible de Putte, au moins à l'est du point dit : les Quatre-Bras, sous Heyst-op-den-Berg. »

- Même décision.


« Des propriétaires, agriculteurs, industriels et commerçants, habitants du Hainaut, et spécialement du canton du Rœulx, demandent la construction d'un chemin de fer de Houdeng (centre) à Jurbise, passant par le Rœulx et avec embranchements sur Soignies. »

M. Ansiau. - Je demande que cette pétition soit déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.

- Adopté.


« Les greffiers des justices de paix de l'arrondissement de Tournai demandent que le traitement des greffiers soit égal aux deux tiers de celui des juges de paix. »

- Renvoi à la commission chargée de l'examen du projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« Le sieur Gustave Herman, commis greffier près le tribunal de commerce de Tournai, demande l'assimilation des commis-greffiers des tribunaux de commerce aux commis greffiers des tribunaux civils. »

- Même décision.

Projet de loi accordant un crédit au budget du ministère de la justice

Rapport de la section centrale

M. de Gottal. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le projet de loi qui alloue un crédit d'un million au département de la justice.

- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi érigeant la commune de Schuyfferscappel

Dépôt

Projet de loi prorogeant certaines dispositions de la loi sur les jurys d’examen universitaires

Dépôt

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - D'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre :

1° un projet de loi portant séparation du hameau de Schuyfferscappel, dépendant de la commune de Thielt ;

2° un projet de loi portant prorogation de certaines dispositions de la loi sur les jurys universitaires de renseignement supérieur.

- La Chambre charge le bureau de la nomination d'une commission pour l'examen du premier projet de loi et renvoie le second à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif aux jurys d'examen.

Projet de loi relatif à certains travaux d’utilité publique

Discussion des articles

Article premier. Amendement

M. le président. - M. Allard vient de faire parvenir au bureau l'amendement suivant :

« Le gouvernement est autorisé à accorder à la compagnie du chemin de fer Hainaut et Flandres :

« A. La concession d'un chemin de fer de Péruwelz à la frontière de France vers Condé, aux clauses et conditions ordinaires.

« B. Pour l'exécution de l'embranchement du chemin de fer de Péruwelz à Tournai, le minimum d'intérêt de 72,000 fr. par an dont jouissait la ligne du chemin de fer d Audenarde à Gand, en vertu de la loi du 27 octobre 1855.

« C. D'ajourner l'exécution de l'embranchement de Saint-Ghislain à Ath, jusqu'à ce que les lignes de Saint-Ghislain à Gand, et de Basècles à Tournai, produisent une recette brute de 25,000 fr. par kilomètre.

« Allard. »

M. Allard. - Je demande que la Chambre ordonne l'impression et la distribution de cet amendement.

M. le président. - C'est de droit, si la Chambre ne s'en occupe pas dans le cours de la séance.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - A quel littera l'honorable M. Allard rattache-t-il son amendement ?

M. Allard. - Peu importe la place qu'on lui donne, si le gouvernement s'y rallie et si la Chambre l'adopte.

M. le président. - Je pense qu'il faut le placer à la suite de l'amendement de M. de Lexhy.

Article premier. Paragraphe H

M. le président. - La discussion est reprise sur le littera F, relatif au chemin de fer de Gand vers Terneuzen.

M. d'Hoffschmidt, rapporteur. - Messieurs, j'ai demandé hier la parole pour soutenir les conclusions de la section centrale, mais je pense que le vote de la Chambre est bien assuré en faveur de l'article du projet de loi qui est en discussion, et dès lors je me dispenserai, pour le moment, de parler. Seulement si la discussion se prolongeait, je me réserve d'y prendre part ultérieurement.

M. de Naeyer. - Messieurs, mon intention n'est pas d'intervenir dans la lutte assez vive, assez ardente, qui s'est élevée entre les représentants de quelques-uns de nos grands centres de population.

Je me bornerai, à cet égard, à dire avec le poêle latin :

« Non nostrum inter vos tantas componere lites. »

Les observations que j'ai à présenter, messieurs, rentrent dans un ordre d'idées beaucoup plus modeste, et sous ce rapport peut-être plus conforme à la nature de ces débats, car j'avoue franchement que j'ai été étonné d'entendre quelques orateurs s'élever à des considérations de très haute politique commerciale à propos d'un pauvre petit chemin de fer qui est à peine connu et qui, dans l'opinion d'hommes de l’art fort habiles, n'est pas sûr d'arriver à terme.

J'ai eu plusieurs fois l'occasion d'appeler l'attention de l’honorable ministre des travaux publics sur l'utilité, sur la nécessité même de prolonger le chemin de fer de Termonde à Lokeren vers la Hollande dans la direction de Terneuzen. Ce chemin de fer se trouve aujourd'hui dans la situation la plus déplorable ; je ne sais pas même s'il couvre ses frais d'exploitation ; il a cependant l'honneur d'être exploité par le gouvernement.

Il semble qu'il serait de la dignité du gouvernement de donner un peu de vie à cette ligne, de faire en sorte qu'elle ne soit plus une impasse, qu'elle puisse se rattacher aux populations de la Zélande et rendre ainsi des services très importants en facilitant et en multipliant nos relations avec nos voisins du nord.

Cependant, messieurs, mes sympathies bien connues pour cette ligne, sympathies que j'ai exprimées à plusieurs reprises, ne m'empêcheront pas de voter la concession du chemin de fer de Gand à Terneuzen. Voici pourquoi.

C'est que d'abord il est dit positivement dans l'exposé des motifs que cette ligne n'a pas la prétention d'exclure celle que nous défendons, celle de Lokeren à Terneuzen ; ensuite la ligne dont la concession est soumise à notre approbation doit se faire avec les seuls capitaux de l'industrie privée ; or, j'avoue franchement qu'il m'est impossible de voter contre un chemin de fer né de la liberté et qui veut vivre sous le régime de la liberté.

Je ne combats que les chemins de fer exclusifs, c'est-à-dire ceux qui ont la prétention de vivre en empêchant les autres de naître ; celui de Gand à Terneuzen n'est pas dans ce cas, et M. le ministre me fait en ce moment un signe qui me confirme dans cette manière de voir et qui me rassure complètement.

Je voterai donc pour ce chemin de fer.

(page 1823) Ainsi, ce n'est pas pour combattre les propositions du gouvernement que j'ai pris la parole, mais uniquement pour exprimer quelques regrets. D'abord, je regrette beaucoup que la concession de la ligne de Lokeren à Terneuzen n'ait pas été comprise dans le projet de loi.

Je regrette aussi que l'honorable ministre ait infligé à notre ligne une épithète qui n'est ni fort jolie ni agréable.

Il a dit que c'était une mauvaise ligne, et je ne sais vraiment pas pourquoi Cui bono !

En effet, au point de vue de l'intérêt général, cette ligne n'est certainement pas mauvaise ; car elle est destinée à desservir des communes importantes qui se trouvent aujourd'hui privées du bienfait des voies ferrées et parmi lesquelles il en est plusieurs qui appartiennent à l'arrondissement que représente l'honorable ministre des travaux publics. Je citerai notamment Moerbeke, Wachtebeke et Saffelaere.

Est-ce au point de vue des concessionnaires que la ligne serait mauvaise ? Mais, mon Dieu, si cela était vrai, voici ce que je serais forcé de dire : Si la ligne de Lokeren à Terneuzen est mauvaise au point de vue des concessionnaires, alors celle de Gand à Terneuzen est détestable.

Veuillez remarquer, messieurs, qu'en m'exprimant ainsi, et en qualifiant de cette manière la ligne de Gand à Terneuzen, je ne fais que tirer une conclusion parfaitement logique des prémisses posées par l’honorable ministre, mais ces prémisses me paraissent évidemment dénuées de fondement. Je répète donc mon argument.

Si les prémisses de M. le ministre sont vraies, si la ligne de Lokeren à Terneuzen pouvait être considérée comme mauvaise, je soutiens que l'autre ligne, celle de Gand à Terneuzen, serait détestable.

Messieurs, on a prétendu que notre ligne n'est destinée à desservir qu'une zone assez restreinte.

Et cependant cette zone si restreinte comprend toute la ligne de l'Est ; elle comprend en outre une partie considérable de la ligne de Dendre-et-Waes et de la ligne de l'Ouest, et même les relations de la capitale avec la Zélande et avec Terneuzen. Il suffit de jeter les yeux sur la carte pour être convaincu qu'une ligne droite tirée de Bruxelles vers Terneuzen doit passer par Termonde et Lokeren. Quant aux populations intermédiaires, la ligne de Lokeren traversera certainement des localités même plus importantes que celle de Gand à Terneuzen ; et pour cela il suffirait de citer les communes d'Exaerde, de Saffelaere, de Moerbeke et de Wachtebeke. Ces quatre communes seules ont une population de près de seize mille âmes, elles ont plus d'importance que celles qu'on a citées sur le parcours de l'autre ligne, et qui sont : Cluyze, Ertvelde, Assenede et Selzaete, dont la population est inférieure à treize mille âmes. Voilà pour le territoire belge, et quant à la Hollande, le chemin de fer de Gand suivant la direction proposée ne rencontre pour ainsi dire aucune localité de quelque importance jusqu'à Terneuzen, tandis que la ligne que nous soutenons passe à Axel qui est le véritable centre de la Flandre zélandaise. Il est une autre considération qu'on semble perdre de vue, c'est que la ligne de Gand fait double emploi avec le canal de Terneuzen, qui est la plus belle ligne de navigation du pays.

Cette concurrence, ce double emploi, nous ne l'avons pas sur l'autre ligne : elle est destinée à desservir des populations qui sont privées de toute voie de communication, tandis que la ligne de Gand à Terneuzen ne doit desservir que des populations qui ont déjà un canal à leur disposition ; aussi, n'a-t-elle d'autre prétention que d'être une voie auxiliaire, c'est-à-dire qu'elle travaillera lorsque le canal chômera, c'est-à-dire encore qu'elle n'est certainement pas exposée à un excès de travail et que, pendant dix mois de l'année au moins, elle se contentera de vivre de la vie de rentier.

On a parlé des grands transports de houille qu'on va faire à l'aide de ce chemin de fer ; il paraît que cette nouvelle voie ferrée nous permettra de reconquérir le marché de la Hollande ; je ne sais pas même si nous ne sommes pas sur le point de transporter des houilles en Angleterre.

Mais ici je suis presque tenté de croire que ce chemin de fer appartient à la famille des sorciers ; car à moins d'être sorcier, comment voulez-vous qu'il ait la prétention de faire des transports de houille, qui n'ont pu s'effectuer jusqu'ici par le canal ?

Ici je crois devoir fixer un moment votre attention sur la situation de la ville de Gand, en ce qui concerne les charbons expédiés du couchant de Mons. Ces charbons arrivent à Gand par des voies navigables, ayant un développement d'environ 150 kilomètres. Or, savez-vous quel est le fret pour ce long parcours ? Ce fret varie de 2 1/2 à 3 francs, mettons 3 francs ; eh bien, cela ne fait que 3 centimes par tonne kilométrique.

Or, de Gand jusqu'à Terneuzen, il n'y a que 30 kilomètres par le canal, comme par le chemin de fer, 30 kilomètres à 2 centimes, cela fait donc un fret de 60 centimes par tonne ; or, cette évaluation est même trop élevée.

Pourquoi ? Mais parce que sur les voies navigables en amont de Gand et notamment sur les canaux de Condé et de Pommeroeul, il y a encore un péage d'un centime et une fraction par tonne kilométrique, tandis que de Gand à Terneuzen vous n'avez rien ou presque rien, c'est-à-dire un dixième de centime par tonne kilométrique, soit trois centimes depuis Gand jusqu'à Terneuzen, et quant aux autres éléments du fret, il y a également des avantages incontestables pour le parcours sur le canal de Terneuzen ; la navigation y est plus commode, elle se fait avec un tirant d'eau de quatre à cinq mètres et de Gand jusqu'à la mer il n'y a que trois ou quatre écluses ; beaucoup de navires sont obligés de partir sur lest et sont ainsi très disposés à faire des transports à bas prix. En résumé donc le fret de Gand à Terneuzen par le canal ne peut guère être que de 40 à 50 centimes par tonne, et comment voulez-vous que le chemin de fer, ayant également un parcours de trente kilomètres, se charge de faire des transports qui n'ont pas lieu aujourd'hui à des conditions aussi favorables, mais le prix le plus bas dont on ait parlé jusqu'ici, en fait de chemins de fer, c'est trois centimes par tonne kilométrique.

Je pense même que des prix aussi bas sont inconnus en Belgique, et on les considère à bon droit comme ruineux pour tout chemin de fer qui n'a pas un long parcours ; or, à trois centimes par tonne kilométrique, le fret de Gand à Terneuzen par chemin de fer serait environ de 90 centimes à un franc, c'est-à-dire à un prix double de celui par la voie navigable. Ces conditions seraient détestables pour les concessionnaires, et encore-elles seraient insuffisantes pour soutenir la concurrence avec le canal, et dans tous les cas il est clair comme le jour qu'elles ne seraient pas de nature â provoquer un mouvement de transport qui n'existe pas aujourd'hui ; or le mouvement actuel est loin d'être considérable, car il résulte de l'exposé de la situation de la province de la Flandre orientale qu'en 1861 il ne s'est guère élevé qu'à dix-huit mille tonnes de charbon, dont six mille ont même quitté le canal de Terneuzen pour suivre le Moervaert.

Il est donc évident que le canal de Terneuzen doit faire une concurrence écrasante au chemin de fer qui a été concédé par le gouvernement ; or, sous ce rapport, la ligne que nous défendons se trouve dans des conditions bien meilleures, puisqu'elle n'aurait à soutenir aucune concurrence de la part des voies navigables, puisqu'elle est destinée à apporter des éléments de vie et de civilisation à des localités privées jusqu'ici de moyens de communication. Je ne veux pas pousser plus loin cette argumentation, je n'ai présenté ces observations qu'en termes de défense à une attaque de la part de l'honorable ministre des travaux publics, mais j'en ai dit plus qu'il ne faut pour prouver que s'il pouvait être vrai que notre ligne est mauvaise, celle de Gand à Terneuzen serait réellement détestable ; toutefois, je le répète, je suis convaincu que les prémisses posées par l'honorable ministre sont erronées, et si ces prémisses sont retirées, je puis également retirer mes conclusions ; au fond je pense que les deux lignes, au lieu de s'administrer des épithètes malsonnantes, feraient mieux de s'entendre, et je pense qu'elles ont un véritable intérêt à s'aider mutuellement. En adoptant une section commune entre Terneuzen et Axel, cela ne ferait pour la ligne de Gand qu'un détour de quelques kilomètres, le tracé proposé pourrait être conservé jusqu'à Selzaete. Il n'y aurait de modification que sur le territoire hollandais, et voici quels en seraient les avantages :

D'abord une section commune est en général une bonne fortune pour les chemins de fer, parce qu'avec une même dépense on dessert plusieurs intérêts à la fois ; ensuite à partir de Selzaete, la ligne de Gand perdrait ainsi son grand défaut, celui qui consiste à faire double emploi avec le canal. Cette ligne, en passant par Axel, relierait à notre métropole industrielle des populations importantes qui se trouvent aujourd'hui dans un déplorable isolement, étant privées tout à la fois de canal et de chemin de fer. J'ajouterai que cette direction est évidemment la plus avantageuse pour la Hollande, et je suis convaincu qu'un gouvernement aussi éclairé et aussi soucieux des intérêts de ses administrés, que le gouvernement hollandais ne consentira probablement pas à accorder la concession à d'autres conditions. Il paraît, il est vrai, que le concessionnaire ne serait guère disposé jusqu'ici à adopter ce tracé. Mais pour les motifs exposés plus haut, je suis persuadé qu'il a tort, et suivant un proverbe flamand on pourrait dire : Dat hy in zijn eygen licht staet.

Je prends la liberté de recommander ces observations à l'honorable ministre. Evidemment en ce qui concerne la Hollande, les choses sont encore entières ; dès lors j'espère que l'honorable ministre usera de son influence pour faire prévaloir définitivement la direction qui est la plus avantageuse pour nos frères du nord et qui est en même temps la plus propre à concilier tous les intérêts belges.

(page 1824) M. E. Vandenpeereboom. - Je suis assez embarrassé pour parler du chemin de fer en discussion. S'il faut en croire l’honorable M. Loos il sera si important qu'il pourra faire de Terneuzen un port assez important pour faire ombrage à Anvers.

Si j'en crois l'honorable député qui vient de s'asseoir, il sera si petit qu'à peine il pourra suffire. J'espère, messieurs, que ce chemin de fer sera comme beaucoup d'autres ; et qu'il réussira, après quelque temps, à avoir des produits suffisants, car il satisfait à un besoin réel, qui est de joindre Terneuzen, c'est-à-dire la mer, à Gand, au moment où il y a interruption de la navigation, et que, d'un autre côté, comme l'a fait remarquer l'honorable M. de Baets, il dessert des localités très importantes.

L'honorable M. de Naeyer vient de préconiser un chemin de fer dont il a été un moment question.

Je l'ai déclaré dès l'abord, je suis partisan de ce chemin de fer pourvu que celui dont il s'agit ici se fasse. L'honorable membre dit : Mettez votre chemin de fer sur l'autre rive ; mais, messieurs, il faut prendre les demandes de concession comme elles se présentent.

Les plans et devis sont faits pour passer sur une rive, et vous dites : Passez sur l'autre.

M. de Naeyer. - Je n'ai pas dit cela.

M. E. Vandenpeereboom. - Vous engagez le ministre à faire passer le chemin de fer par Axel, qui est sur l'autre rive.

M. de Naeyer. - Je ne demande le passage sur l'autre rive que pour une partie seulement.

M. E. Vandenpeereboom. - Axel est déjà très loin de Gand ; il faudrait faire un détour pour aller à Terneuzen par Axel.

En fin de compte vous ne pouvez obliger un soumissionnaire à exécuter un autre plan que celui qu'il a conçu et qu'il présente.

Je vois avec plaisir que l'honorable M. de Naeyer est disposé à voter le chemin de fer dont il est question. Cela ne m'étonne pas, puisqu'il est favorable à tous les chemins de fer qui peuvent vivre sans le concours du gouvernement, sous le régime de la liberté.

Je l'en remercie, mais il est impossible d'espérer que le concessionnaire consente à la modification qu'indique l'honorable membre. Il me l'a dit il y a deux jours.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Il l'a écrit.

M. E. Vandenpeereboom. - Il l'a écrit. Il est donc impossible de le forcer à passer sur l'autre rive.

Que le chemin de fer que préconise l'honorable M. de Naeyer soit présenté, il peut être assuré d'avoir mon concours. Je suis partisan de tous les chemins de fer utiles.

Je crois celui de Gand à Terneuzen utile. Je ne pense pas qu'il puisse nuire à Anvers. Naturellement il fera du bien à Terneuzen, mais il est certain que les navires arrivant à Terneuzen n'iront pas décharger dans ce port pour rester là, quand ils n'ont qu'à passer par un excellent canal pour arriver à Gand, lieu de leur destination, et qui a des entrepôts où les marchandises sont libres, aussi bien qu'elles le seraient à Terneuzen. Les cosignataires n'iront pas décharger à Terneuzen pour le simple plaisir d'y payer des frais, mais il est évident que Terneuzen y gagnera.

Cet avantage lui a été aussi contesté par une ville rivale et c'est surtout pour cela que j'ai demandé la parole. Il y a eu, en Hollande, une espèce d'opposition, comme ici. Flessingue a jalousé Terneuzen, comme Anvers jalouse Gand.

Je tiens ici les Annales parlementaires des Pays-Bas. Dans la séance du 8 novembre 1861, où cette affaire a été discutée, un député de Flessingue est venu demander si le gouvernement permettrait la construction d'un chemin de fer de Gand à Terneuzen, et ici je réponds aux doutes qu'a manifestés l'honorable M. de Naeyer, à savoir si le gouvernement hollandais consentirait à la ligne de Gand à Terneuzen telle qu'elle est proposée, je puis lui donner l'assurance que le gouvernement hollandais est disposé à la faire ; notre gouvernement en a été officiellement instruit.

Mais enfin, cette jalousie de Flessingue s'est manifestée à la chambre. Un député est venu dire : Vous allez faire tort à notre chemin de fer projeté de Flessingue à Rosendael et à notre transit ; à peu près comme le dit Anvers ici.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - C'était un député de Flessingue et de Rotterdam.

M. E. Vandenpeereboom. - Voici ce qu'a répondu M. le ministre de l'intérieur et des travaux publics :

« Si une concession est demandée, sans charge pour le trésor public, pour un chemin de fer de Gand à Terneuzen, alors on examinera ce qu'exige l'intérêt public ; mais à coup sûr le chemin ne sera pas refusé, par moi du moins, par le seul motif que le chemin de fer de Flessingue en éprouverait quelque dommage. »

Eh bien, voilà des idées libérales. Vous aurez un chemin de fer de Flessingue à Rosendael et Terneuzen aura son chemin de fer vers Gand.

Nous avons voté hier le chemin de fer d'Anvers à Hasselt.

Quant à moi, messieurs, je ne suis point partisan absolu d'un chemin de fer direct d'Anvers vers l'Allemagne, parce que je suis d'avis qu'un simple abaissement de tarif résoudrait plus facilement la question que l'on voudrait trancher par la création de ce chemin de fer ; et que je ne vois pas la nécessité de dépenser deux fois le même capital, quand on peut obtenir le même résultat au moyen d'une simple réduction du tarif.

Il importe peu aux marchandises de rester en route quelques heures de plus ou de moins ; la question n'est pas là : la question est tout entière dans les frais de transport. Cette considération ne m'empêchera cependant pas de voter le chemin de fer direct d'Anvers vers l'Allemagne, quoiqu'il doive en résulter une dérivation des revenus du chemin de fer de l'Etat, parce que, si l'on s'arrêtait à de pareilles considérations, on en reviendrait à ces temps éloignés où l'on hésitait à construire une route qui devait raccourcir de 2 ou 3 lieues la distance d'une localité à une autre, parce qu'on aurait causé quelque préjudice à certains intérêts de villages ou de hameaux.

Je ne suis nullement opposé au chemin de fer de Lokeren, je le prouverai quand nous y arriverons un jour ou l'autre. Mais, en ce moment, de quoi s'agit-il ? On demande à construire un chemin de fer sans le concours du gouvernement. Il est évident que ce chemin de fer va faire beaucoup de bien aux localités intermédiaires, qu'il va faciliter l'arrivée à Gand des céréales d'une partie de la Zélande, pays très fertile, des orges, des graines et des pommes de terre que produisent les polders.

D'un autre côté, cette ligne est le prolongement naturel des deux lignes de Braine-le-Comte à Gand et de Hainaut à Flandres ; et n'y eût-il qu'une faible partie de charbon qui s'infiltrerait par cette voie, ce serait déjà un notable bienfait.

Je ne ferai pas à la Chambre l'injure de réfuter les craintes que mon honorable ami a manifestées, très consciencieusement sans doute, mais certainement très à tort, sur le sort futur de Terneuzen. Il ne me paraît pas sérieux de supposer que Terneuzen acquière jamais l'importance nécessaire pour nuire sensiblement à Anvers. Il me paraît superflu d'insister plus longtemps sur ce point. Si cette fortune avait dû arriver à Terneuzen, elle lui serait arrivée par le canal.

Je n'avais, du reste, pris la parole que pour citer l'opinion de M. le ministre de l'intérieur de Hollande, opinion qui prouve que dans ce pays on ne recule pas devant la construction d'un chemin de fer, dans la crainte de nuire à un autre. Et comme je suis disposé à voter tous les chemins de fer qui se présentent dans de bonnes conditions, j'espère que la majorité de la Chambre autorisera l'établissement de celui dont il est ici question. Je n'ai pas le moindre doute à cet égard.


M. le président. - Le bureau, conformément à la délégation que lui a donnée la Chambre, a composé de MM. de Muelenaere, de Ridder, M. Dumortier, Van Iseghem et de Florisone, la commission chargée d'examiner le projet de loi portant séparation du hameau de Schuyfferscapel dépendant de la commune de Thielt.


M. le président. - La discussion est reprise sur le projet de loi des travaux publics.

La parole est à M. Hymans.

M. Hymans. - J'avais demandé la parole hier pour répondre à l’honorable M. Loos. Comme cet honorable collègue est absent et qu'il n'y a plus rien à dire, ce me semble, sur le fond de la question, je renonce à la parole.

M. de Boe. - La chambre de commerce d'Anvers, le conseil communal de cette ville, le conseil provincial, enfin M. le gouverneur lui-même, appelés à se prononcer sur l'utilité de la construction du chemin de fer de Terneuzen à Gand à Lokeren, ou à Malines ont émis un avis négatif au point de vue des intérêts spéciaux de la ville d'Anvers. C'est pour ce motif que je crois devoir émettre quelques considérations dans le débat dont la Chambre s'occupe en ce moment.

La chambre de commerce, qui est spécialement chargée de sauvegarder les intérêts et la prospérité du commerce anversois, exerce naturellement dans cette question une action prépondérante et une légitime influence sur les autres corps de la commune et de la province.

On disait hier qu'on ne comprenait pas la contradiction dans laquelle la chambre de commerce d'Anvers était tombée, d'une part en se prononçant pour l'abolition complète des douanes, c'est-à-dire, des restrictions qui s'opposent à la liberté la plus large des transactions commerciales, et d'autre part, en s'opposant à la construction d'un chemin de fer de Gand à Terneuzen, parce qu'il pourrait créer une certaine concurrence au port d'Anvers.

(page 1825) Messieurs, depuis l'époque où la chambre de commerce d'Anvers a exprimé cette opinion, elle a subi une très grande transformation dans son personnel et dans ses idées. La chambre de commerce a, en effet, émis le vœu que le gouvernement abolît complètement les douanes, et il est très possible que si elle était saisie en ce moment de la question du chemin de fer de Gand à Terneuzen, elle formulerait une autre opinion qu'antérieurement.

Demander l'abolition des douanes, de toutes les entraves existant en matière de commerce et d'industrie, c'est vouloir que tout individu puisse acheter les produits dont il a besoin où il le juge convenable, à l'intérieur ou à l'étranger, sans être tenu de payer sur ces produits des droits plus considérables que ceux qu'il aurait à payer pour des produits indigènes.

C'est vouloir, de plus, que tout individu puisse transporter ses marchandises où il le trouve bon, de la façon la plus économique, et qu'il puisse aussi établir telles lignes de communication qu'il juge convenable pour effectuer ses transports au meilleur marché possible.

La ligne de Gand à Terneuzen a précisément ce but, et quant à moi personnellement, je regrette de devoir faire opposition à la construction de cette ligne.

Il fut un temps où le gouvernement croyait devoir protéger ses chemins de fer en se montrant très exclusif en matière de concessions. Depuis un certain temps, il a adopté une politique beaucoup plus libérale ; le projet de loi que nous discutons en est une des plus éclatantes manifestations, car il contient des lignes qui feront concurrence aux lignes de l'Etat.

C'est ainsi que l'on concède une ligne d'Anvers à Hasselt, et que, il y a trois jours, M. le ministre des travaux publics nous annonçait qu'il était disposé, s'il se présentait un concessionnaire sérieux, à concéder une ligne directe d'Anvers vers l'Allemagne. Je crois savoir que ce concessionnaire sérieux existe, et je fonde l'espérance sérieuse que, dans la session prochaine, nous aurons enfin ce chemin direct vers le Rhin.

Cependant, messieurs, il y a, dans l'opposition que certains corps de la ville d'Anvers font à la construction du chemin de fer de Gand à Terneuzen, quelque chose de très sérieux. Ainsi, les frais de navigation de la mer vers Terneuzen seront beaucoup moins considérables que de la mer vers Anvers. Le gouvernement hollandais, a, vous le savez, dans ces dernières années, aboli les droits de tonnage.

Terneuzen étant un port hollandais, les navires y entreront sans avoir à payer de droit de tonnage. De plus, comme la distance de la pleine mer vers Terneuzen est moins considérable que de la pleine mer vers Anvers, de ce chef encore il y aura, en faveur de Terneuzen, une différence sur le droit de pilotage.

Si, comme nous l'espérons, nous obtenons dans un bref délai l'abolition du droit de tonnage, la réduction du droit de pilotage, un chemin de fer direct vers l'Allemagne, la libération complète de l'Escaut, de telle sorte que ce fleuve soit libre comme la mer quant aux droits de navigation ; pour ma part, je redouterais fort peu la concurrence que le port de Terneuzen pourrait faire au port d'Anvers. Cependant, en considération des vœux émis à Anvers, et en attendant que ces grandes mesures soient prises en faveur du port d'Anvers, je volerai contre la concession qui nous est demandée.

M. Kervyn de Lettenhove. - La Chambre me saura gré, je pense, de ne pas prolonger ce débat.

Les intérêts de la ville de Gand, déjà exprimés par le vote unanime du conseil communal et de la chambre de commerce, ont été de nouveau défendus dans cette enceinte par leurs légitimes représentants.

Je ne reviendrai pas sur des questions qui ont été déjà suffisamment traitées ; je n'ai pas même l'intention de répondre à certaines objections qui ont été présentées sur le parcours de la ligne de Gand à Terneuzen. Il me serait aisé de démontrer que cette ligne traverse un pays qui offre des ressources importantes puisqu'on y rencontre, à des distances rapprochées, trois bourgs riches et industrieux dont la population réunie atteint le chiffre de 12,400 habitants.

Je crois, messieurs, que la ligne qui nous est demandée est viable et qu'elle peut être fructueuse. Il ne faut pas la considérer seulement au point de vue des deux principales localités qu'elle doit relier ; il faut aussi tenir compte des embranchements qui probablement viendront s'y rattacher.

Ainsi je comprends très bien le prix que plusieurs membres de cette Chambre ont ajouté à l'établissement d'une voie ferrée de Lokeren ou de St-Nicolas vers la Zélande, et je ne doute pas que cette voie ne s'établisse, non point par Axel où se présentent de sérieuses difficultés d'exécution, mais par Zelzaete qui est le point tout naturel du raccordement,

Je prévois encore la création d'autres voies auxiliaires ; car je ne doute pas qu'il ne s'en établisse vers Bouchaute, vers Caprycke, vers Waterliet.

En ce qui touche le marché d'Axel, dont on a beaucoup parlé, je tiens à faire remarquer que la ligne projetée passe à une lieue de la ville d'Axel et qu'elle y est rattachée par une excellente chaussée.

Enfin, si la ville de Flessingue. qui ajoute une grande importance à l'établissement d'un chemin de fer vers Resendaal, s'effraye du projet d'avoir un railway de Gand à Terneuzen, c'est évidemment parce qu'elle le juge favorable aux intérêts belges. N'est-ce point un motif sérieux pour ne pas repousser les concessionnaires ?

Il est un point que je ne puis passer sous silence. Quand j'entends dire qu'il s'agit d'établir un chemin de fer qui aboutit à la misérable bourgade de Terneuzen, je ne puis oublier que cette bourgade est le centre d'un des pays les plus remarquables par leur fertilité qu'il y ait au monde ; je ne puis oublier que c'est vis-à-vis de cette bourgade que s'ouvre (erratum, page 1857) un canal maritime qui convie l'industrie et le commerce de la Belgique à développer leurs relations dans toute la Zélande.

Il est, messieurs, une autre considération sur laquelle j'appelle toute votre attention.

La Zélande, située au sud de l'Escaut, est séparée de la Néerlande par un fleuve qui est un véritable bras de mer. La propriété du sol y appartient en grande partie à des Belges.

Beaucoup de familles belges s'y sont fixées, et l'on peut dire que presque tous ses habitants viennent sur les marchés belges y vendre leurs céréales et y prendre en échange les produits de notre industrie.

Ces relations quotidiennes, suspendues un instant après 1830, se sont depuis plusieurs années rétablies et consolidées ; elles tendent tous les jours à s'accroître, sous ce rapport nous avons un devoir à remplir. Il est bon, il est utile de multiplier nos rapports avec nos voisins, afin de nous rattacher de plus en plus par les relations commerciales et industrielles, ces populations qui, quoique hollandaises en vertu des délimitations politiques, sont presque devenues belges par les liens si nombreux qui les unissent à notre pays.

Il y a ici plus qu'un intérêt local, il y a un véritable intérêt national, et à ce point de vue, je ne doute pas que le projet soumis à la Chambre n'obtienne une grande majorité dans cette enceinte.

M. d’Hoffschmidt, rapporteur. - L'honorable M. de Boe, pour motiver son opposition au chemin de fer de Gand à Terneuzen, s'est appuyé sur l'avis de la chambre de commerce d'Anvers.

Or, messieurs, cette chambre de commerce, d'après les documents qui sont au dossier de l'enquête, a reconnu la haute utilité du projet dont il s'agit ; elle s'y est opposée seulement au point de vue de l'intérêt local. Je vais vous en donner la preuve eu lisant l'avis qu'elle a émis le 11 mai 1861 :

« La question peut être envisagée sous un double rapport, dit-elle ; d'abord celui de l'intérêt général de la Belgique et en second lieu celui de l'intérêt particulier de notre port.

« Si nous ne devions le considérer que sous le premier rapport, nous devrions appuyer cette demande en concession de chemin de fer, car il est évident que la promptitude et l'économie des moyens de transport ne peuvent que faciliter les relations sociales.

« Mais en examinant la question au point de vue de l'intérêt de la ville d'Anvers, nous croyons qu'il y a lieu de combattre cette demande afin de ne pas favoriser un port hollandais. »

Ainsi au point de vue de l'intérêt général, la chambre de commerce reconnaît que cette voie de communication sera utile, mais comme elle craint une concurrence pour le port d'Anvers, elle croit devoir s'y opposer.

Il est impossible, il faut en convenir, d'être plus naïf. Dans la séance d'hier, on accusait la ville d'Anvers d'égoïsme ; les paroles sévères de l'honorable député de Bruxelles ne sont-elles pas justifiées par ce que je viens de lire ?

Cette opposition d'Anvers dans la crainte de la concurrence du port de Terneuzen n'est pas sérieuse, elle est mesquine ; elle n'est pas digne de cette grande cité, elle n'est pas digne de l'honorable bourgmestre d'Anvers et des députés si distingués de cette localité.

Quand on voit d'une part cette ville opulente dont les maisons de commerce sont connues et estimées dans toutes les parties du globe, qui possède un port admirable, des quais, des bassins, des entrepôts, et qu'on met en regard cette petite localité de Terneuzen, qui n'a pas de port, qui n'a rien, et contre laquelle on manifeste des craintes de concurrence, on ne peut se défendre de les trouver étranges.

(page 1826) L'honorable M. Loos a exprimé hier cette opinion que le gouvernement n'avait pas fait assez pour le port d'Anvers. Or, je vous le demande, y a-t-il jamais eu de mauvais vouloir de la part du gouvernement ou de cette Chambre à l'égard de notre métropole commerciale ? La ligne de chemin de fer que nous avons votée hier et qui fera concurrence au chemin de fer de l'Etat, n'est-ce pas dans l'intérêt du commerce d'Anvers qu'on l'a adoptée ?

Et M. le ministre, n'a-t-il pas dit qu'il était prêt à demander la ligne directe d'Anvers à Düsseldorf. N'a-t-on pas réduit de 40 p. c. le tarif du chemin de fer pour le transit vers l'Allemagne dans l'intérêt du commerce d'Anvers ? Et les droits de tonnage, ne sait-on pas qu'ils sont compris dans les négociations du traité avec l'Angleterre ? Le gouvernement a annoncé, d'ailleurs, que les droits seront fortement réduits, sinon supprimés. Ne portons-nous pas au budget deux millions de francs chaque année pour rembourser le péage de l'Escaut, toujours dans l'intérêt du commerce d'Anvers ?

Anvers n'a donc pas la moindre raison de se plaindre du gouvernement ni des Chambres ; on est parfaitement disposé en sa faveur pour tout ce qui est raisonnable et légitime.

Mais quand Anvers réclame des choses impossibles, contraires à l'intérêt général, peut-on les lui accorder ?

Or, c'est le cas encore pour un chemin de fer qu'on veut exécuter sans intervention du gouvernement et qui est réclamé par de nombreuses populations, de nombreux intérêts.

Aussi je suis sûr que la Chambre entière votera le paragraphe en discussion.

- Le paragraphe est mis aux voix et adopté.

Article premier. Paragraphe G

« Art. 1er. G. Un chemin de fer de Tongres à Ans, par Glons, avec embranchement par Herstal sur Vivegnis-lez-Liége, et un chemin de fer de Hasselt à la frontière des Pays-Bas, dans la direction d'Eyndhoven, par le camp de Beverloo, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges du 7 juin 1862. »

M. le président. - M. de Theux a proposé par amendement la disposition suivante :

« Les péages d'Ans à Tongres et de Tongres à Hasselt ne seront perçus qu'en raison du parcours calculé sur la distance directe. »

La parole est à M. de Theux pour développer son amendement.

M. de Theux. - J'ai développé mon amendement dans la discussion générale. J'attendrai la discussion.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je dirai deux mots relativement aux amendements présentés par l'honorable comte de Theux. Il propose deux paragraphes, dont voici le premier :

« Les péages d'Ans à Tongres et de Tongres à Hasselt ne seront perçus qu'en raison du parcours calculé sur la distance directe. »

Il est déjà stipulé dans la convention passée avec les concessionnaires que le détour pour le parcours entre Tongres et Hasselt par Bilsen sera négligé.

L'honorable comte de Theux propose un amendement ayant pour but d'étendre cette disposition au détour de Tongres à Ans.

Les concessionnaires se sont formellement obligés à admettre l'extension réclamée. C'est donc simplement un point à régulariser dans la convention lors de la concession définitive.

L'honorable comte de Theux propose en second lieu de stipuler dans la convention que : « les trains de la compagnie, tant aux Guillemins qu'au quartier du Nord, seront organisés sans transbordement, sans faire changer de convois, soit aux voyageurs, soit aux colis et aux marchandises. »

C'est là, selon moi, messieurs, une stipulation qui ne doit pas figurer dans la convention ; c'est une question de service d'exploitation. Ce n'est pas autre chose.

Dans la mesure de ce qui est possible, ce que demande l'honorable membre se fait déjà dans toutes les relations de service mixte, soit entre l'Etat et les compagnies concessionnaires, soit entre les compagnies concessionnaires elles-mêmes. On peut donc se reposer sur le régime qui existe, qui est universellement appliqué.

Mais il pourrait y avoir des difficultés en ce qui concerne le trajet entre Ans et la ville de Liège, à cause de la position de cette ville et du service spécial qu'exigent les plans inclinés. Ce que permet le service on le fera, mais on le fera spontanément et il n'était besoin d'aucune indication à cet égard pour que l'organisation la plus favorable au public fût introduite.

L'honorable comte de Theux propose également d'introduire dans la loi un article nouveau ainsi conçu :

« Art. 4 nouveau. Les compagnies seront tenues de transporter les électeurs aux prix réduits accordés par le gouvernement sur les lignes qu'il exploite et d'organiser les convois d'arrivée et de départ suivant les prescriptions du gouvernement. »

Je me suis déjà expliqué sur cet amendement. J'ai dit que l'observation de l'honorable comte de Theux mérite certainement d'être prise en considération, seulement que nous étions en présence de conventions faites. Je chercherai à introduire cette clause dans toutes les conventions qui sont aujourd'hui soumises à la Chambre ; non seulement dans la convention relative à la ligne d'Ans, mais dans toutes, parce que l'intérêt est général. Seulement je ne pense pas qu'il faille faire de l'insertion de cette clause dans les conventions, une condition absolue d'approbation de ces mêmes conventions.

Car voici la difficulté contre laquelle nous pourrions venir nous heurter : Si l'un ou l'autre concessionnaire voulait se retirer, il pourrait profiter de cette circonstance pour le faire. Or, il est évident que le résultat ne serait pas proportionné au but que se propose l’honorable membre par son amendement.

J'engage donc l'honorable comte de Theux à ne pas insister sous le bénéfice de la promesse que je viens de faire, que je chercherai à faire admettre cette clause dans toutes les conventions que nous avons passés et que je l'introduirai dans toutes les conventions futures que je serais appelé à passer encore.

M. Muller. - Je suis partisan de l'amendement de l'honorable M. de Theux, qui consiste à réduire le parcours entre Ans et Tongres à une distance qu'on appelle légale.

Je crois cependant que comme les concessionnaires ont pris l'engagement envers la section centrale de déterminer cette distance à 14,500 mètres, il serait préférable d'ajouter un dernier paragraphe à l'article 32.

Voici d'abord comment est rédigé le second paragraphe de cet article 32 : « Pour le parcours de Tongres à Hasselt, par Bilsen, et vice-versa, la taxe ne se percevra que sur une distance égale à celle de la longueur de la route de l'Etat de deuxième classe, de Tongres à Hasselt. »

Je propose cet article 32 de la convention du 7 juin, dernier paragraphe ainsi conçu :

« Pour le parcours d'Ans à Tongres par Glons et vice-versa, la taxe ne se percevra que sur une distance ne dépassant pas 14,500 mètres. »

C'est la condition qu'a acceptée la compagnie demanderesse en concession, je pense que je me trouve d'accord avec l'honorable M. de Theux sur cette modification.

M. de Theux. - Je me rallie entièrement à la rédaction proposée par l'honorable M. Muller, d'autant plus que l'article 32 de la convention satisfait à un des points de mon amendement. Ainsi en déterminant la distance d'Ans à Tongres au chiffre de 14,500 mètres, il ne peut plus y avoir de difficulté.

Je renonce donc au premier paragraphe de mon amendement.

Reste l'organisation des trains.

Il est vrai que la stipulation que je propose n'est pas d'usage, mais ici elle a un caractère tout particulier. Le chemin de fer nouveau doit emprunter en partie la ligne d'une autre compagnie, celle de Maestricht à Hasselt.

Or, c'est une des grandes objections qu'on a faites, à Hasselt, contre le tracé indirect de la compagnie de Bruyn, et c'est un des grands motifs pour lesquels on a appuyé la ligne Clacs et Flechet. On a prévu que si la compagnie n'exploitait pas sans transbordement jusqu'à Hasselt, il en résulterait de graves embarras pour les voyageurs et pour le commerce.

Du reste la compagnie elle-même a accepté la condition que je propose, dans un mémoire qui a été distribué à la Chambre.

Je ne vois donc pas d'inconvénient à prendre acte, par une disposition législative, des engagements que la compagnie a contractés vis-à-vis de la Chambre. La clause que j'ai copiée textuellement du cahier qui a été distribué à la Chambre constitue un engagement moral. Mais il n'est pas accepté par la Chambre, c'est un engagement moral qui n'aura d'effet qu'autant que la bonne volonté de la compagnie le maintiendra. M. le ministre des travaux publics a beau dire que cela s'applique assez généralement. Il peut y avoir des dérogations à cette pratique, et il se pouvait cette dérogation se fit ici au grand détriment de la province de Limbourg, qui souffre déjà en partie du tracé indirect de la compagnie de Bruyn.

Je tiens donc à ce que cette disposition soit mise dans la loi.

Je ne m'expliquerai pas pour le moment relativement à l'article 4. Ce n'est pas le moment. Quand nous arriverons à cet article, je répondrai aux observations faites par M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je fournirai à (page 1827) l'honorable comte de Theux ce simple renseignement que dans le cahier des charges de la ligne de Hasselt à Maestricht, il est stipulé un droit de parcours ; c'est-à-dire que légalement et en payant la redevance ordinaire, redevance à fixer, si l'on ne s'entend pas à titre d'expert, la compagnie de Bruyne peut emprunter la ligne de Hasselt à Maestricht. Il n'y a donc pas l'ombre de difficulté pour la circulation des voyageurs. Il n'y aura pas transbordement.

Quant aux marchandises il n'y a jamais transbordement.

Je crois donc que l'honorable M. de Theux a par le fait pleine et entière satisfaction.

M. de Renesse. - L'honorable ministre des travaux publics a déjà, en partie, répondu aux observations présentées par l'honorable comte de Theux ; en effet, en 18553$, lorsque nous avons eu à nous occuper de la loi accordant la concession d'un chemin de fer de Hasselt à Maestricht, il a été formellement stipulé que la société de cette voie ferrée serait obligée de laisser parcourir sur sa ligne les convois de l'embranchement à décréter peu après entre Liège, Tongres et Bilsen et à exécuter soit par l'Etat, ou par une société ; une indemnité serait au besoin fixée (erratum, page 1845) par expers.

Il a en outre été déterminé, par cette convention, qu'il serait loisible au gouvernement d'exécuter, par lui-même, ou d'accorder la concession d'une voie parallèle à celle de Hasselt à Maestricht, sans que la société de ce railway puisse s'y opposer.

Il y a tout lieu de croire que la société du chemin de fer de Hasselt à Maestricht s'entendra à l'amiable avec la société de Bruyn, pour la fixation de l'indemnité du parcours des convois venant de la ligne de Liège, qui sera un affluent très notable pour la voie ferrée de Hasselt à Maestricht, et améliorera la position financière de cette société.

M. Julliot. - Messieurs, la section centrale, par l'organe de son rapporteur, nous dit, à la première page de son rapport :

« Après l'achèvement de ces grands travaux, la Belgique, sauf quelques lacunes qu'il faudra combler, sera en possession d'un réseau à peu près complet, etc. » Tel est aussi mon avis. Et en ce qui concerne le Limbourg, la ville de Tongres reçoit une part convenable, et la ville de Hasselt est accablée de faveurs telles, que les vieux bourgeois de l'endroit ne croient pas à tant de prospérité d'avenir, attendu qu'ils ont la conscience de ne rien avoir fait pour la mériter. Ce qui n'a pas empêché l'honorable comte de Theux de se lever encore hier pour se plaindre.

Mais, messieurs, parmi les lacunes à combler dans un bref délai, il en est une des plus importantes ; elle s'adresse à la ville la plus populeuse du Limbourg.

J'ai nommé la ville de Saint-Trond, qui possède sur son territoire et dans son voisinage des établissements considérables qui consomment de grandes quantités de charbons ; il s'y fait un commerce étendu en bois grains et autres marchandises encombrantes. Son commerce principal se fait à Liège, et par la ligne ferrée qui existe, elle est éloignée de 30 kilomètres de cette ville, alors qu'en passant par Tongres, cette distance est raccourcie de 16 à 17 kilomètres, c'est-à-dire d'un tiers.

Quand la ligne sur Liège sera en voie d'exécution, il s'agira de combler cette solution de continuité de Saint-Trond à Tongres, et cette ville sera satisfaite.

Cette considération seule doit déterminer le gouvernement à agir sans retard.

Mais il est une considération plus forte encore : c'est que tous doivent être égaux devant la loi économique, comme devant toute autre loi, et que le tracé que j'indique traversera dans son centre un des cantons les plus riches et les plus populeux du Limbourg ; il compte 36 communes et produit considérablement.

Les habitants de ces contrées ne connaissent jusqu'à présent que M. le ministre des finances, qui a soin de se rappeler à leur souvenir chaque année au mois de janvier ; il est temps qu'ils fassent à leur tour la connaissance de M. le ministre des travaux publics, qui gagne, sous tous les rapports, à être connu.

Je recommande donc tout particulièrement cette ligne comme étant la première lacune à combler et à donner satisfaction au canton de Looz, complètement déshérité jusqu'à ce jour.

Je présenterais un amendement dans ce sens, si je ne savais qu'il sera repoussé, et que ma juste impatience pourrait nuire à la cause que je défends ; quand M. le ministre honorera notre province de sa présence, il pourra se convaincre de suite de la réalité de cette situation, et je compte bien que ces besoins commerciaux étant reconnus, ne tarderont pas à être satisfaits.

Je puis donc m'attendre, à bon droit, à voir figurer cette ligne dans le projet à produire l'année prochaine, si pas plus tôt.

M. de Theux. - Messieurs, certes je ne m'oppose en aucune manière au vœu exprimé par l'honorable M. Julliot quant à la concession d'un chemin de fer de Saint-Trond à Tongres ; au contraire, j'accepterai cette concession avec plaisir.

Mais, en attendant, je demande qu'il soit fait droit à la juste demande de la capitale de la province, demande à laquelle la compagnie s'est engagée à faire droit, dans le mémoire qui a été distribué à tous les membres de la Chambre J'ai cru qu'il était utile de consigner cet engagement dans la loi et j'en ai fait la proposition, après avoir consulté M. Julliot sur le point de savoir si cela ne présentait pas d'inconvénient.

Remarquez bien, messieurs, qu'il ne s'agit pas du tout d'imposer une condition à la compagnie d'Aix-la-Chapelle à Hasselt ; cette condition existe dans la loi de concession, mais il s'agit d'une condition d'exploitation pour la compagnie de Bruyn.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Elle y a intérêt.

M. de Theux. - Si elle y a intérêt, la disposition ne peut pas nuire.

Je demande donc, messieurs, que ma deuxième disposition soit adoptée.

Quant à la première, il y est fait droit par la rédaction de M. Muller. Au moyen de la deuxième modification, il sera fait droit, au moins en partie, aux réclamations du chef-lieu de la province.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Il peut y avoir des difficultés insurmontables en ce qui concerne l'organisation des trains entre Ans et les Guillemins, et, je dois, dans l'intérêt du service, m'opposer à l'amendement de l'honorable M. de Theux. S'il n'y avait pas de plan incliné, il n'y aurait pas d'inconvénient, nous nous trouverions alors, quant à la ligne d'Ans, dans la position où nous sommes, par exemple, à Gand par rapport à la ligne d'Audenarde, dans la position où l'on sera à Liège même par rapport à la ligne de l'Ourthe.

Mais à raison des plans inclinés vous avez des difficultés spéciales et des dépenses spéciales pour la compagnie concessionnaire. Or, qui nous dit que la société se prêtera à ces dépenses ? Elles sont peut-être assez considérables.

Je dois donc engager de nouveau l'honorable comte de Theux à retirer sa proposition.

M. de Theux. - Voici maintenant une autre objection qui vient de la part du gouvernement : le parcours sur le plan incliné d'Ans. Je demanderai à M. le ministre des travaux publics, s'il s'engage à stipuler que si le gouvernement consent à l'organisation des convois aux Guillemins, la compagnie sera obligée de s'y soumettre et de tenir la promesse qu'elle a faite dans le mémoire adressé à la Chambre.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Dans ces conditions, oui.

M. de Theux. - Alors je consens à retirer mon amendement. Je conçois très bien qu'il peut y avoir quelque difficulté pour le plan incliné, mais la difficulté ne pourrait venir que de la part du gouvernement. A la suite de la déclaration de M. le ministre, je retire ma proposition.

- La proposition de M. Muller est mise aux voix et adoptée.

Le paragraphe G est mis aux voix et adopté.

Article premier. Paragraphe H

« Article premier. H. Un chemin de fer de Furnes à la frontière française, aux clauses et conditions ordinaires. »

(page 1831) M. De Lexhy. - Messieurs, ainsi qu'on le disait dans une précédente séance, il y a parmi nous des satisfaits et des non-satisfaits. Je regrette de me trouver rangé dans la seconde catégorie.

Le chemin de fer de Tamines à Landen est certainement destiné à procurer certaine utilité à une partie de mon arrondissement, et je me félicite de voir l'exécution de ce grand travail. Mais il est un autre chemin de fer dont j'ai eu l'honneur de parler plusieurs fois, et qui aurait procuré à mon arrondissement une plus grande somme d'utilité : je veux parler de la ligne de Namur à Landen par Hannut.

Mon honorable ami M. de Sélys-Longchamps en a également fait l'objet de plusieurs discours dans l'autre Chambre. Nous espérions, messieurs, grâce à nos efforts combinés, arriver à doter d'un railway la partie de notre arrondissement qui s'étend de Wasseiges à Landen, en passant par Hannut. Les députés de Namur disaient même que cette ligne avait les caractères d'une ligne internationale entre la France et la Hollande. C'était, pour me servir des expressions de l'honorable M. Coomans, une grande et noble ligne.

Nous nous bercions de vaines espérances. Au lieu de cette grande et noble ligne que donne-t-on ? Namur obtient un tronçon vers Mont-Saint-André, je pense, et mon arrondissement se voit enlever la part qu'il espérait obtenir dans cette grande ligne. Et ce qu'il y a de plus étrange, c'est que cela arrive par le fait du gouvernement. C'est M. le ministre des travaux publics qui, par amendement présenté à la section centrale, a proposé le raccordement de Namur à Mont-Saint-André.

Pourquoi cette proposition du gouvernement ? Qui l'a sollicitée ? Quels sont les motifs qui ont pu déterminer le ministre à agir de la sorte ? Le rapport de la section centrale est d'un mutisme regrettable à cet égard et j'ai le droit de m'en plaindre.

Ce projet de raccordement satisfait peut-être Namur ; mais il condamne à l'isolement une notable partie de mon arrondissement. Je suis lésé et je proteste de toutes mes forces contre le préjudice qui m'est causé. Me trouvant lésé, j'ai droit à une réparation et je la revendique. J'ai droit à une compensation, et j'espère l'obtenir.

Maintenant, qu'un railway vers Namur devient impossible, je me vois forcé de tourner mes regards vers un point plus hospitalier et de trouver une ligne qui coupe l'arrondissement de Waremme sur une grande étendue. Cette ligne est celle de Landen à Huy, par Hannut et la vallée de la Méhaigne, et qui fait l'objet de l'amendement que j'ai eu l'honneur de déposer.

Ce chemin de fer doit apporter le mouvement commercial et industriel dans la riche contrée que je viens d'indiquer. Les éléments de prospérité que présente cette ligne sont incontestables : elle traverse un pays dont la richesse agricole est proverbiale. Aux richesses agricoles viennent s'ajouter les richesses minérales dans les environs de Huy. Dans l'avenir, cette ligne pourrait même se poursuivre vers le Luxembourg. Je crois utile de dire que ce chemin de fer serait un affluent considérable pour le railway de l'Etat. L'utilité de cette ligne, au point de vue des intérêts généraux, est donc manifeste.

Quand l'intérêt général vient s'ajouter à l'intérêt spécial, local, il y a nécessité absolue de leur donner satisfaction.

Je ne développerai pas plus longuement toutes les considérations qui militent en faveur de mon projet, me réservant de le faire en temps utile. J'insisterai sur un seul point.

C'est que quand on rencontre une population groupée dans une contrée et que là se trouvent des éléments de prospérité, il y a droit incontestable pour elle à obtenir un chemin de fer et il y a devoir pour l'Etat à lui procurer ce grand instrument de progrès. Il y a droit pour les populations et devoir pour l'Etat. Dans d'autres circonstances j'ai déjà établi ce droit de l'important canton d'Avennes et d'une partie du canton de Landen. J'invoque en leur faveur le grand principe de justice distributive qui doit présider au partage des avantages sociaux.

Par mon amendement, messieurs, je veux conférer au gouvernement le pouvoir de nous appliquer immédiatement ce principe d'équité.

Mon but est d'appeler la spéculation, d'appeler les capitaux vers ce travail et d'engager le gouvernement à nous seconder de toutes ses forces, dans cette entreprise.

Quant aux moyens d'exécution, ce n'est pas le moment de les discuter et je laisse de côté toutes les questions qui s'y rattachent, telles que la question de la garantie d’un minimum d'intérêt, etc.

J'espère que le gouvernement acceptera le pouvoir que je prie la Chambre de lui conférer. Ce système a été préconisé par plusieurs collègues dans cette discussion, et a été pratiqué avec succès dans plusieurs circonstances.

Cela n'impose d'ailleurs aucune charge au gouvernement ; cela le met seulement dans la nécessité de faire tous ses efforts pour faire réussir l'entreprise.

En terminant, je ferai appel aux sentiments généreux de ceux qui sont satisfaits, de ceux qui participent au splendide festin que le gouvernement leur offre en ce moment.

(page 1827) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - L'honorable membre n'a pas pu penser que je ne lui ferais pas l'objection que je me suis trouvé obligé de faire aux honorables députés de Termonde qui ont demandé un chemin de fer de Saint-Nicolas à Termonde. C'est une question qui n'est pas étudiée que celle que soulève l'honorable membre, une question qui surgit pour moi de la manière la plus inopinée.

J'ignore quelle est l'utilité de cette ligne, je suis prêt à en croire le bien qu'en dit l'honorable membre, mais encore dois-je me réserver l'examen.

En deuxième lieu, messieurs, ce n'est pas ici un amendement, puisque ce n'est ni l'extension ni la restriction d'un article du projet.

Enfin il s'agit d'un chemin de fer qui se présente sans concessionnaire.

Je prie donc l'honorable membre de vouloir bien ne pas insister pour le moment.

Le retrait de cet amendement n'aurait pas pour signification que l'idée n'est pas bonne ; il signifierait simplement qu'il y a lieu d'ajourner la question jusqu’à une prochaine occasion.

J'espère que dans ces termes l'honorable membre consentira à retirer sa proposition.

(page 1831) M. De Lexhy. - Je prends acte des déclarations sympathiques de l'honorable ministre. Cependant, je dois faire remarquer que dans plusieurs circonstances on a autorisé le gouvernement à concéder des chemins de fer qui n'avaient pas été l'objet de la moindre étude. (Interruption.)

C'est ainsi que l'on avait autorisé le gouvernement, il y a une dizaine d'années, à concéder un chemin de fer d'Ans à Tongres, sans qu'il y eût ni plan ni étude. Ce système a été pratiqué dans plusieurs autres cas, avec succès. C'est pourquoi je demande qu'on me l'applique. L'utilité de ce système, c'est d'éveiller la spéculation, c'est de l'appeler vers les projets en question.

Mais enfin, puisque le gouvernement ne veut pas persévérer dans ce système, je dois bien me résigner.

J'accepte, messieurs, avec empressement les promesses que le ministre veut bien me faire pour un avenir assez prochain. Je le prie de porter son examen sur ce projet, qui accordera une légitime satisfaction aux intérêts que je défends. J'ai la conviction que le résultat de cet examen de la part du gouvernement nous sera favorable, et que ce projet sera compris dans le prochain projet d'ensemble de travaux publics. Cette ligne est viable, et elle est appelée à satisfaire de si grands et si légitimes intérêts que j'ai l'espoir fondé de la voir se réaliser. Les déclarations du ministre me paraissent assez rassurantes pour m'engager à retirer mon amendement.

Article 2

« Art. 2. Le gouvernement est autorisé à accorder, séparément, la concession d'un chemin de fer de Tamines à Landen et d'un chemin de fer de Groenendael à Nivelles.

« Ces concessions ne pourront toutefois être octroyées que sous les conditions stipulées dans l'article 2 de la loi du 5 mars 1858. »

M. Wasseige. - Messieurs, j'ai l'espoir que nous touchons enfin au moment tant désiré de voir se construire le chemin de fer de Tamines à Landen. J'espère que les populations qui attendent depuis neuf ans le bénéfice de la loi que vous avez votée, vont enfin se voir satisfaites, et que les nombreux intérêts que le chemin de fer est appelé à desservir v. nt prendre un nouvel essor.

Si cependant la ligne de Tamines à Landen était restée ce qu'elle était dans le premier projet du gouvernement ; si les nombreux intérêts dont les députés de Namur vous ont si souvent entretenus à propos d'un autre projet n'avaient pas trouvé dans cette circonstance une satisfaction légitime, c'eût été une injustice criante pour la ville de Namur et pour les riches cantons de Namur nord et d'Eghezée.

C'était pour faire cesser cette injustice que j'avais proposé un amendement tendant à faire décréter un chemin de fer partant de Namur et se reliant à un point à déterminer, de la ligne de Tamines à Landen.

L'amendement a été favorablement accueilli par ma section. M. le ministre des travaux publics l'a fait sien, il forme le deuxième paragraphe de l'article que nous discutons, et je l'en remercie.

Mais il me paraît que le point de raccordement vers Jauche est mal choisi dans le parcours de la nouvelle ligne ; un point surtout est important à indiquer, c'est Eghezée ; c'est, d'ailleurs, le chef-lieu d'un canton populeux et riche, plusieurs routes viennent y converger ; toutes les conditions se réunissent donc pour désigner Eghezée comme l'une des stations les plus importantes et les plus productives de la ligne ; mais cela étant acquis, l'intérêt de la ville de Namur et de toutes les localités que doit desservir l'embranchement est évidemment de se raccorder directement avec l'embranchement de Tirlemont, de manière à former une ligne aussi directe que possible entre ces deux villes, tout en restant dans d'aussi bonnes conditions, quant à la direction vers Landen ; or, pour arriver à ce résultat, le point de Jauche est évidemment mal choisi et il me paraît que le paragraphe devrait être rédigé comme suit :

« A concéder aux clauses et conditions ordinaires un chemin de fer de Namur à la ligne de Tamines à Landen, passant par Eghezée et aboutissant au point de cette ligne d'où partira l'embranchement sur Tirlemont. »

Tel est l'amendement que je propose.

J'espérais, je l’avoue, que l’embranchement de Namur à la ligne de Tamines à Landen n’aurait formé qu’une seule et même concession avec (page 1832 la ligne principale et que la compagnie sérieuse, dont nous parle M. le ministre des travaux publics dans son exposé des motifs, se serait chargée de la construction tout entière. J'avais d'autant plus lieu de le croire que l'embranchement de Namur sera bien certainement l'affluent le plus productif de la ligne principale et que l'intérêt bien entendu de la compagnie concessionnaire est de le construire au plus tôt sans le laisser tomber en d'autres mains. Il est d'ailleurs d'une bonne administration que l'exploitation des lignes ferrées soit le moins scindée que possible ; cela est avantageux, et pour l'exploitant, et pour l'industrie, et pour le commerce. Toutes ces raisons me paraissaient assez importantes pour engager M. le ministre à ne pas diviser la concession et à charger du tout la même compagnie, mais j'apprends qu'il n'en est rien et que la compagnie concessionnaire s'est seulement réservé un droit de préférence à la construction de l'embranchement de Namur, droit qu'elle doit faire valoir dans les trois mois qui suivraient la demande formée par un autre concessionnaire.

J'aime à croire que la compagnie n'attendra pas longtemps pour exercer son droit, j'en ai pour gage son propre intérêt et je suis certain que pour obtenir la meilleure exploitation possible, M. le ministre des travaux publics l'en pressera également ; cependant cela ne me paraît pas encore suffire, et je voudrais qu'un délai fatal fût fixé à la compagnie pour exercer son droit de préférence, passé lequel elle serait déchue de plein droit ; le délai d'un an, par exemple, qui lui donne tout le temps largement nécessaire pour étudier la chose et former sa conviction.

Il est évident, en effet, qu'un droit de préférence qui n'est limité que par la demande d'un autre concessionnaire, peut faire traîner en longueur la construction de l'embranchement de Namur, que cela peut même empêcher un concessionnaire sérieux de se présenter, dans la crainte de voir le fruit de ses études complètement perdu, par la préférence accordée à un concurrent auquel ses études mêmes auront ouvert les yeux ; sans délai fatal imposé au droit de préférence, la construction de l'embranchement peut être retardée indéfiniment, et ce n'est pas ce que doit vouloir M. le ministre plus que moi. J'espère donc qu'il ne verra pas d'inconvénient à insérer dans la convention à passer avec la compagnie concessionnaire, la garantie que je réclame.

En fixent ce délai, nous engagerons la compagnie à mettre la main à l'œuvre le plus tôt possible et, de plus, nous serons certains de trouver, à son défaut, un concessionnaire sérieux.

Je le répète, j'espère que M. le ministre des travaux publics ne verra pas de difficulté à nous accorder cette satisfaction.

(page 1828) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, au fond nous sommes parfaitement d'accord. Lorsque au sein de la section centrale, j'ai présenté mon amendement portant sur l'embranchement de Namur à la rencontre du chemin de Tamines à Landen, j'avais fixé Jauche comme point de raccordement. Ce point est un peu trop au Nord : voici pourquoi : l'embranchement de Tirlemont au chemin de fer de Tamines à Landen doit passer par Jodogne, et l'embranchement de Namur, doit autant que possible passer par Eghézee. Or, la ligne droite entre Jodogne et Eghezéc passe par le village de Geest-Gérompont.

Maintenant, l'honorable M. Wasseige ne voudrait pas qu'on indiquât d'une manière précise le point de raccordement.

J'ai dit que ce point serait vers Geest-Gérompont, ce qui laisse une certaine latitude ; mais où je vois une difficulté, c'est de stipuler que l'embranchement passera par Eghezée ; or, l'honorable membre, tout en liant le gouvernement d'une manière si étroite en ce qui concerne Eghezée, ne veut pas qu'on indique un point de raccordement à la ligne principale que cette direction rend inévitable ; l'honorable membre n'est pas tout à fait logique.

La rédaction que je propose sauvegarde tous les intérêts ; je crois que l'honorable membre pourrait s'y rallier. Il est entendu que les deux embranchements doivent se raccorder en formant une ligne droite passant autant que possible par Eghezée d'un côté et par Jodogne de l'autre.

(page 1832) M. Wasseige. - Les explications de M. le ministre, explications dont je prends acte, prouvent qu'il veut, comme moi, que Namur soit relié directement à Tirlemont ; qu'il veut également, comme moi, qu'Eghezée soit traversé par l'embranchement de Namur. Le point de raccordement, désigné par M. le ministre, rendant d'ailleurs son intention évidente, il est satisfait à mes justes observations, et je retire mou amendement.

Mais je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir bien me donner quelques explications sur l'autre point dont j'ai parlé et qui est relatif à la fixation d'un délai pour l'exercice du droit de préférence accordé à la compagnie concessionnaire.

(page 1828) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, la plupart des actes de concession contiennent un semblable droit de préférence en faveur des compagnies pour une ligne ou pour un embranchement quelconque ; cette clause de préférence y est formulée dans les mêmes termes ; les concessionnaires n'ont à se prononcer que lorsqu'ils sont mis en demeure par la production d'une autre demande, je ne vois aucune raison pour introduire dans la convention actuelle une stipulation exceptionnelle à cet égard.

M. de Montpellier. - Les représentants de Namur et ceux de Dinant avaient l'intention de proposer à l'article 2 un amendement dans le but d'autoriser le gouvernement à accorder la concession d'un chemin de fer de Tamines à Fosses et de Fosses à la Meuse ; ce chemin de fer étant à nos yeux le complément de celui de Tamines à Landen. Mais, en présence du sort réserve aux amendements présentés incidemment, nous avons cru devoir retirer notre proposition : nous avons cru cela très prudent en vue de l'avenir de notre proposition ; la contrée que traverserait notre ligne est fort riche en minerai et en carrières de marbre ; c'est aussi un canton agricole d'une haute importance. C'est le canton le plus populeux de la province de Namur et jusqu'à cette heure il est encore privé de moyens de communication rapides. Nous ajournons donc notre proposition en la recommandant tout spécialement à l'attention de M. le ministre.

Je prie M. le ministre d'engager la société de Tamines à Landen à faire elle-même cette ligne (de Tamines à la Meuse) ; elle est pour elle du plus haut intérêt.

M. d'Hoffschmidt. - Messieurs, comme l'a dit tout à l'heure M. le ministre des travaux publics, c'est sur sa proposition que la section centrale avait adopté l'amendement à l'article 2 avec les mots « vers Jauche ».

Il paraît que les députés des localités intéressées sont parfaitement d'accord avec M. le ministre des travaux publics pour modifier cette rédaction.

Il est évident qu'il importe que l'embranchement vers Namur puisse se relier directement à l'embranchement vers Tirlemont.

Je pense que cette modification est rationnelle, et je crois pouvoir dire qu'aucun membre de la section centrale ne s'y opposera.

Je ne crois pas non plus qu'il y ait le moindre intérêt pour l'honorable M. Wasseige de voir adopter l'amendement qu'il propose en ce qui concerne le délai à déterminer à la société concessionnaire.

Comme l'a fort bien dit l'honorable ministre des travaux publics, dans toutes les concessions où il y a privilège on n'a pas fixé de terme, parce qu'il est évident que du moment qu'une société est mise en demeure, il faut qu'elle se prononce.

Dès lors, il y a plus d'avantage encore à lui laisser quelque latitude qu'à lui fixer un terme où elle pourrait renoncer à son privilège alors qu'aucune autre société ne se présenterait.

Je crois donc que, sous ce rapport, il n'y a aucun intérêt à adopter la proposition de l'honorable député de Namur.

Je n'en dirai pas davantage ; il me semble qu'on est parfaitement d'accord sur la rédaction.

M. Thibaut. - Messieurs, puisque l'usage paraît s'introduire de recommander des lignes futures, je viens me joindre à l'honorable M. de Montpellier pour appeler l'attention non seulement du gouvernement, mais des entrepreneurs de travaux publics sur la ligue qu'il indique de Tamines à Fosses et de Fosses à la Meuse.

Je crois même qu'il y aurait lieu de faire de cette ligne le tronçon d'une ligne beaucoup plus considérable en la prolongeant jusqu'au chemin de fer de Luxembourg vers Rochefort.

Il y aurait alors une ligne importante non seulement pour le pays qu'elle traverserait, mais également pour tous les charbonnages de la Sambre et surtout de la basse Sambre qui auraient ainsi un moyen plus facile qu'aujourd'hui de conduire leurs produits jusque dans le Luxembourg.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, j'ai demandé la parole, mais je ne sais pas si je dois la garder, pour faire connaître à la Chambre l'usage que je compte faire de la loi, si elle est votée, en ce qui concerne l’autorisation de concéder séparément la ligne de Tamines à Landen et de Groenendael à Nivelles. J'aurai à expliquer pourquoi je ne ferai point usage de cette autorisation, en faveur de ceux qui ont produit d'avance une protestation qui a été distribuée aux membres de la Chambre contre l'octroi d'une concession à des tiers, et qui ont également fait distribuer les statuts d'une société anonyme, qui n'est point la société à laquelle je compte accorder la concession.

Je ne sais si je dois m'occuper de cette affaire devant la Chambre. Si elle le désire, j'expliquerai la situation en très peu de mots.

- Plusieurs membres. - Non, non. C'est inutile.

M. le président. - L'article serait rédigé comme suit :

« Le gouvernement est autorisé :

« 1° A accorder séparément les concessions d'un chemin de fer de Tamines à Landen, avec embranchement sur Tirlemont, et d'un chemin de fer de Groenendael à Nivelles.

« Ces concessions ne pourront, toutefois, être octroyées que sous les conditions stipulées dans l'article 2 de la loi du 5 mars 1858.

« 2° A concéder, aux clauses et conditions ordinaires, un chemin de fer de Namur à la ligne de Tamines à Landen, à un point à déterminer vers Geest-Gérompont. »

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 3

« Art. 3. Le gouvernement est autorisé à concéder, aux clauses et conditions qu'il déterminera, soit à la compagnie du Grand-Luxembourg, soit à toute autre société :

« 1° Un chemin de fer se dirigeant de Liège vers le chemin de fer du Grand-Luxembourg, par la vallée de l’Ourthe ;

« 2° Un chemin de fer de Spa à la frontière du grand-duché de Luxembourg dans la direction de Weiswampach.

« Si la concession de ces lignes est accordée à la compagnie du Grand-Luxembourg, elle ne le sera que sous la condition qu'elle renoncera au minimum d'intérêt annuel de 800,000 fr., qui lui est garanti en exécution de l'article premier de la loi du 20 décembre 1851, pour la ligne de Namur à Arlon.

« Ce minimum pourra être reporté sur les deux lignes dont il est fait mention au paragraphe premier du présent article.

« Dans le cas où la concession sera accordée à toute autre société, cette société pourra obtenir la garantie du même minimum d'intérêt annuel, mais ce minimum ne lui sera servi en tout en en partie que jusqu'à concurrence, au maximum, de la différence entre la somme payée au même titre à la compagnie du Luxembourg pour la ligne de Namur à Arlon et le minimum accordé en vertu de la loi du 20 décembre 1851. »

M. le président. - Ici vient l'amendement de M. Allard.

M. Thibaut. - Je demanderai à être autorisé, après les développements de l'amendement de l'honorable M. Allard, à développer un autre amendement que je propose au n°1° de cet article.

M. Allard. - Messieurs, dans la séance de mercredi j'ai appelé l'attention de la Chambre sur l'inexécution de la ligne de chemin de fer de Saint-Ghislain à Tournai. Je disais alors que les conseils communaux de Tournai, de Péruwelz, d'Antoing et d'autres localités s'étaient adressés à la Chambre pour demander l'exécution de ce chemin de fer.

Le conseil provincial du Hainaut, dans la séance du 10, a émis le vœu qu'il soit pris telle mesure qui puisse être jugée efficace à l'effet d'arriver à ce que ces deux embranchements de la ligne Hainaut-Flandres soient construits sans retard.

Il y aurait moyen, je pense, d'aider la Compagnie Hainaut et Flandres, qui a dépensé déjà 25 millions pour la ligne directe de Saint-Ghislain à Gand ; et il y aurait véritablement équité à le faire pour relever son crédit et lui faciliter l'exécution des deux embranchements qui ont été décrétés par la loi de 1856.

(page 1829) Lorsque le gouvernement nous a soumis un projet de loi, il nous disait entre autres dans l'exposé des motifs :

« Les lignes du chemin de fer qu'il s'agit de concéder aux sieurs Maertens et Dessigny, ont notamment pour but de mettre les charbonnages du Couchant de Mons, plus directement qu'elles ne le sont sur les lignes existantes, en communication avec les deux Flandres.

« C'est ainsi que les distances de Saint-Ghislain à Ath, à Gand et à Tournai, qui sont aujourd'hui, par la voie la plus courte, respectivement de 37, 103 et 69 kilomètres, seront induites respectivement à 21, 76 et 39 kilomètres environ.

« Il y aura donc pour les relations de Saint-Ghislain avec Ath et la vallée de la Dendre d'une part, avec Gand d'autre part, et avec Tournai, Courtrai, Ypres et Bruges, de troisième part, des réductions de distance s'élevant à environ 16, 32 et 30 kilomètres respectivement. »

Vous le voyez, messieurs, par l'exécution du chemin de fer de Saint-Ghislain à Tournai la distance de 69 kilomètres serait réduite à 30 kilomètres ; et l'on reconnaîtra sans doute que les Flandres ont aussi le plus grand intérêt à ce que cette ligne soit exécutée.

Le gouvernement, par l'article 3 du projet de loi en discussion, propose de reporter, sur les lignes mentionnées aux numéros 1 et 2 de l'article 3 en discussion, le minimum d'intérêt de 800,000 francs dont la ligne du Luxembourg a joui.

Eh bien, comme extension de ce principe, je demande que le minimum d'intérêt qui a été accordé pour la ligne d'Audenarde à Gand par la loi du 27 octobre 1853 et qui a été forcément abandonné par la société Hainaut et Flandres lorsqu'elle l'a rachetée pour la réunir à sa concession de Saint-Ghislain à Audenarde, Tournai et Ath, lui soit accordé de nouveau pour la construction de la ligne de Péruwelz à Tournai.

De même que le gouvernement demande l'autorisation de reverser sur de nouvelles lignes le minimum d'intérêt accordé à la compagnie du Luxembourg, je demande que le minimum d'intérêt attaché à la construction de la ligne d'Audenarde à Gand soit reporté sur la ligne de Péruwelz à Tournai.

Le gouvernement est autorisé à concéder, sans l'autorisation des Chambres, des chemins de fer de dix kilomètres au maximum. Celui de Péruwelz à la frontière de France aurait tout au plus un kilomètre et demi de longueur. Par conséquent, le gouvernement n'a pas besoin d'autorisation pour accorder cette concession.

Mais j'entends que la compagnie Hainaut et Flandres devrait construire immédiatement la ligne de Basècles vers Condé pour rejoindre la ligne que la société d'Anzin va construire immédiatement, car j'ai reçu hier soir l'assurance qu'avant la fin de l'année la ligne de Valenciennes arrivera à Condé.

Il ne faudrait plus qu'une ligne de 1 1/2 kilomètre pour relier Péruwelz à la ligne française. Ce serait, comme je l'ai dit déjà, un très grand affluent pour le chemin de fer Hainaut et Flandres ; et l'on ferait acte de justice, je le répète, en reversant sur l'embranchement de Péruwelz à Tournai le minimum d'intérêt de 72,000 fr. qui avait été accordé par la loi de 1853 pour l'embranchement d'Audenarde à Gand.

Comme il faut que les actionnaires de la société Hainaut et Flandres sachent quand ils seront appelés à verser le complément de leur souscription pour terminer tous les travaux, je crois qu'il est nécessaire d'insérer dans la loi que l'exécution de la ligne de Saint-Ghislain à Ath, pourra être ajournée, jusqu'à ce que la ligne principale de Saint-Ghislain à Gand, et la ligne de Basècles à Tournai, rapportent une recette brute de 23,000 francs par kilomètre. La ligne de Saint Ghislain à Ath ne raccourcira la distance que de 16 kilomètres, et il me semble qu'Ath peut bien en attendre un peu la construction après la concession qui vient de lui être faite hier d'un chemin de fer sur liai.

Je crois en avoir dit assez, messieurs, pour justifier l'amendement que j’ai eu l'honneur de proposer.

- Cet amendement est appuyé.

M. le président. - Voici l'amendement annoncé tout à l'heure par M. Thibaut :

« Art, 3. Le gouvernement est autorisé à concéder, aux clauses et conditions qu'il déterminera :

« 1° Un chemin de fer de Liège à la frontière française vers Givet par la vallée de l'Ourthe, Aye, Rochefort et Beauraing.

« 2° Le reste comme dans le projet.

« A. Wasseige. Thibaut, Ch. de Montpellier, Royer de Behr, Comte de Baillet-Latour. »

(page 1847) M. Thibaut. - Messieurs, on nous a distribué, avant-hier soir, une pétition imprimée, datée de Liège le 14juillet, portant pour titre : « Observations sur la concession octroyée du chemin de fer de l’Ourthe », et signée par MM. L. Lonhienne, sénateur, et G. Lonhienne, conseiller communal.

J'ai lu ces observations avec autant d'étonnement que de satisfaction. Elles m'ont fait reconnaître l’erreur profonde où j'avais été entraîné par l'exposé des motifs de l'article 3 du projet de loi.

Le silence que M. le ministre des travaux publics a gardé, dans ce document, sur la demande en concession de la ligne de Liège à Givet, par MM. Lonhienne, les questions de droit et les considérations de fait qu'il a multipliées pour justifier l'acceptation des offres de la compagnie du Luxembourg, semblaient démontrer l'existence d'un traité entre cette compagnie et MM. Louhienne, ou le désistement de ces derniers.

Le rapport de la section centrale ne contient pas un mot qui pût nous mettre sur les traces de la vérité. Je suis persuadé que la section centrale, elle-même, a partagé mon erreur.

Personne, en effet, n'a pu supposer un instant que le gouvernement se trouvant en présence de deux demandes de concession, l'une ancienne, l'autre toute récente, - l'une appuyée de plans, devis, profils exécutés à grands frais, l'autre accompagnée seulement d'une carte marquée d'une ligne rouge, - l'une destinée à établir une voie de communication internationale et s'étendant dans trois provinces, Liège, Luxembourg et Namur, soit un parcours de 103 kilomètres, l'autre découpant la première en deux parties pour rejeter toute celle qui intéresse spécialement la province de Namur, personne, dis-je, n'a dû supposer que le gouvernement avait donné la préférence à la plus nouvelle, à la plus restreinte, à la moins étudiée, à celle qui répond le moins aux intérêts du pays.

Personne ne pouvait imaginer non plus que le gouvernement avait renoncé, sans motifs, à faire exécuter le canal de l’Ourthe, et que mis en position d'obtenir ce canal de la société du Luxembourg, et le chemin de fer de la société Lonhienne, il avait consenti à concéder le chemin de fer à la société du Luxembourg et à l'exonérer en même temps de l'obligation d'achever le canal.

Et cependant tout cela s'est fait. MM. Lonhienne le prouvent dans leur pétition.

Messieurs, cette affaire peut se résumer en peu de mots : M. Vanderstichelen a subi la loi de la grande compagnie du Luxembourg ; la grande compagnie du Luxembourg s'est annexé ce qu'elle trouvait de mieux à sa convenance dans le projet Lonhienne ; MM. Lonhienne sont provisoirement évincés, et en même temps l’intérêt public est manifestement sacrifié.

Messieurs, si tous, vous aviez eu le loisir de lire attentivement la pétition de MM. Lonhienne, je pourrais m'arrêter et attendre le vote de la Chambre sur l'amendement que d'honorables collègues et moi nous avons déposé. Mais il est évident que dans l'examen d'un projet de loi complexe où il s'agit de douze ou quinze chemins de fer, l'attention n'a pu se porter sur chacun d'eux, ni sur toutes les publications qu'ils ont provoquées. Permettez-moi donc d'entrer dans quelques détails.

La première question sur laquelle vous désirez être éclairés, est sans doute celle-ci : MM. Lonhienne représentent-ils une société sérieuse ? Voici en quels termes ils donnent témoignage d'eux-mêmes :

« Nous étions en mesure de réaliser l'exécution de notre tracé et nous offrions de le faire immédiatement. Notre ligne n'est pas un embranchement ni une extension de celle du Grand-Luxembourg. Nous ne sollicitions pas du trésor un sacrifice supérieur à celui qu'il s'impose éventuellement en faveur de la compagnie du Luxembourg.

« Le 13 octobre 1861, nous transmettions à M. le ministre des travaux publics le plan et le profil définitivement arrêtés de notre ligne entière, de Givet à Liège. Nous y joignions un projet de convention par lequel nous prenions l'engagement d'exécuter toute la ligne dans le délai de trois ans, à compter du jour de l'octroi de la concession définitive, et nous offrions de déposer le cautionnement provisoire dans les huit jours. Nous déclarions être aux ordres de M. le ministre quand il lui conviendrait de nous appeler pour conférer sur cette affaire. Nous avions ouvert des négociations nouvelles avec plusieurs maisons importantes ; nous avions la certitude de réunir les capitaux nécessaires.

« Nous étions donc des demandeurs sérieux, résolus à exécuter la ligne sollicitée, et capables démener cette œuvre importante à bonne fin. Le gouvernement n'avait aucune raison de nous accorder financièrement moins de confiance qu'à une compagnie connue par ses fautes et ses désastres, bien plus que par ses succès. »

Cela est clair ; je n'ai rien à ajouter.

Deuxième question : La ligne entière de Liège à Givet, présente-t-elle assez d'importance et d'utilité pour faire l'objet d'une concession ?

Messieurs, quant à la section de Givet à Aye, je vous apporte d'abord les études de MM. Lonhienne résumées dans un mémoire publié en 1857 et que je tiens à la main, mémoire où le revenu net de cette section est évalué à environ 10 p. c. de la dépense. En second lieu, je vous apporte l'autorité du conseil provincial de Namur qui, il y a quelques jours, a chargé à l'unanimité sa députation permanente de faire près du gouvernement et des Chambres les démarches les plus pressantes, afin que le chemin de fer de l'Ourthe passant par Aye, Beauraing et Givet soit concédé en entier et non par section.

Pour la section d'Aye à Liège, son importance ne peut être révoquée en doute, puisque la compagnie du Luxembourg cherche à s'en emparer et que le gouvernement propose de l'octroyer.

Troisième question : MM. Lonhienne, demandeurs sérieux d'une ligne internationale excellente, peuvent-ils opposer à la compagnie du Luxembourg, demanderesse en concession d'une partie seulement de cette ligne, ce qu'on appelle le droit de priorité ?

Voyons les dates, messieurs, elles ont leur éloquence.

Le projet de MM. Lonhienne fut présenté dès le 7 mai 1855. Des études complètes furent soumises au département des travaux publics en 1856.

Deux ans après, le chef de ce département adressait à MM. Lonhienne des observations sur quelques points de détail, et plus tard, leur demandait en outre d'étudier un projet de station centrale à Liège.

MM. Lonhienne se montrèrent prêts à satisfaire sur tous les points aux demandes du ministre, et celui-ci, dans une lettre rapportée par extrait dans la brochure, déclare, à la date du 12 juin 1858, que MM. Lonhienne sont jusqu'à présent les seuls demandeurs en concession ; que « leur titre de priorité ne peut être contesté, » et il ajoute : « Vous pouvez donc à loisir faire vos nouvelles études et ne me soumettre vos propositions définitives qu'après mûr examen. »

Survint une crise financière, qui fit ajourner beaucoup d'entreprises. Cependant le 19 mars 1861, MM. Lonhienne renouvelèrent leur demande de concession en sollicitant toutefois la garantie d'un minimum d'intérêt. Ils exprimaient le désir que leur demande fût comprise dans le projet de loi de travaux publics de cette année.

M. le ministre des travaux publics n'acquiesça pas à leur demande. Toutefois il déclara qu'à la date du 8 avril aucune proposition en concurrence à celle de MM. Lonhienne ne lui avait été présentée.

Voici maintenant comment MM. Lonhienne s'expriment dans leur Mémoire : « Le principe d'une garantie de minimum d'intérêt fut accepté par M. le ministre à la suite de diverses conférences ; la quotité seulement devait en être réglée.

« Pour la fixer M. le ministre demanda le projet définitif contenant les modifications nécessitées par le canal de l'Ourthe et par l'injonction qui nous avait été faite de passer par Marche. Ce dernier projet lui fut transmis le 13 octobre 1861 accompagné d'un modèle de convention.

«... Nous avions accompli loyalement et laborieusement notre tâche de demandeurs en concession ; nous touchions au but... mais la compagnie du Luxembourg s'est tout à coup jetée à travers de nos espérances et comme César elle a pu s'écrier : Veni, vidi, vici. »

Et en effet, la demande en concession par la compagnie du Luxembourg date seulement du 5 juin 1861.

MM. Lonhienne posent en fait qu'elle n'a fourni aucune des pièces qui constituent un projet complet, et que sa demande n'a pu être examinée que d'après les plans des demandeurs primitifs.

Messieurs, je n'en dirai pas davantage sur la question de priorité qui, sans constituer un droit absolu, donne cependant un titre incontestable à MM. Lonhienne.

Je passe à l'examen des raisons que M. le ministre invoque dans l'exposé des motifs pour justifier la concession d'un chemin de fer restreint de l'Ourthe à la compagnie du Luxembourg.

M. le ministre nous montre la compagnie du Luxembourg menaçant l'Etat d'un procès, si on ne lui accorde pas cette concession, par préférence, en vertu de l'article 47 de son cahier des charges.

Messieurs, il suffit, pour dissiper toute crainte à cet égard, de lire l'article 47. Voici le paragraphe auquel on fait allusion :

« Les concessionnaires auront la préférence pour construire, dans le Luxembourg, les chemins de fer et embranchements mentionnés aux paragraphes 1 et 3 du présent article, et qui feront, le cas échéant, l’objet de concessions nouvelles octroyées par arrêté royal et d'après les bases de la convention primitive. »

(page 1848) Vous l'entendez, messieurs, le droit de préférence est borné aux chemins de fer et embranchements à construire dans le Luxembourg.

Les chemins de fer traversant une partie du territoire du Luxembourg, mais non circonscrits dans le Luxembourg, font l'objet du paragraphe 2 de l'article 47. Ce paragraphe avait uniquement pour but, d'après 1'explication qu'en a donné l'honorable M. d'Hoffschmidt, en 1846, d'empêcher pendant douze ans la construction d'un chemin de fer de la Meuse en amont de Liège vers Trêves.

Du reste, en supposant un droit de préférence, il doit s'appliquer à toute la ligne projetée et non pas à une partie seulement de cette ligne.

M. le ministre demande aussi si l'on pourrait légalement donner à un tiers la concession d'une ligne dont fait partie l'embranchement de l'Ourthe, déjà concédé au Luxembourg.

Messieurs, j'ai lieu de m'étonner de ce doute.

Comment, en 1846 cet embranchement, comme celui de Bastogne, a été imposé à la compagnie du Luxembourg, qui alors était anglaise ; en 1851, on a allégé cette charge en accordant aux deux embranchements qualifiés d'obligés, une garantie de minimum d'intérêt. Pendant quinze ans la compagnie s'est soustraite à ses obligations, et aujourd'hui, elle s'en ferait un titre pour évincer une demande en concession d'une ligne de 103 kilomètres !

Cet embranchement obligé vers l'Ourthe, il devait relier la ligne principale au canal, et on l'invoque comme obstacle à la concession d'une grande ligne à MM. Lonhienne, dans l'exposé des motifs d'une loi qui exonère la compagnie du Luxembourg de l'obligation de créer le canal !

Un procès, dans de telles circonstances, n'est qu'un épouvantail que M. le ministre a eu tort de prendre au sérieux.

J'en viens aux considérations de fait.

Le point de départ de la combinaison proposée, dit M. le ministre, c'est le transfert de la garantie dont jouit aujourd'hui la compagnie du Luxembourg.

Messieurs, il y aurait beaucoup à dire sur cette combinaison, dans laquelle intervient une autre société.

D'abord la renonciation de la compagnie du Luxembourg au minimum d'intérêt pour la ligne de Namur à Arlon, est d'assez mince valeur ; mais passons.

Ce qui est plus grave, c'est que la garantie transférée, bien qu'elle soit étendue à la ligne de Spa, semble, d'après le projet, promise tout entière à la ligne restreinte de l'Ourthe, pour le cas où la ligne de Spa ne serait pas exécutée ; or cette éventualité elle-même est admise comme probable dans l'article 7 de la convention conclue avec la compagnie du Luxembourg.

La combinaison qui offre, suivant M. le ministre, un avantage précieux, peut donc devenir une grande déception.

Cette combinaison présuppose, entre les deux sociétés, une convention que nous ne connaissons pas. Nous pouvons prévoir que la compagnie du Grand-Luxembourg sera réellement maîtresse des deux lignes nouvelles et qu'elle les exploitera d'accord avec l'Est-Français. N'est-ce pas accorder une influence trop considérable à une société qui pourrait passer sous une direction étrangère ou hostile ?

ïl me suffit, du reste, d'avoir indiqué ce côté très grave de la question. La Chambre appréciera.

Je passe à un autre argument de M. le ministre : Il ne faut pas morceler les exploitations.

Sans doute, cet argument aurait quelque valeur, si les deux demandeurs concurrents ne proposaient d'exécuter que la ligne de Givet à Aye, qui comporte 65 kilomètres. Mais la société Lonhienne demande une concession de 103 kilomètres, se rattachant par chaque extrémité à des villes industrielles, d'où rayonnent des chemins de fer dans toutes les directions. Combien de lignes que nous venons de concéder n'ont pas un développement aussi considérable !

Cet argument n'est donc pas applicable ici.

Enfin, M. le ministre s'appuie sur l'opportunité de saisir l'occasion de modifier les conditions, si onéreuses pour l'industrie, de la concession du canal de l'Ourthe.

Messieurs, la concession du canal de l'Ourthe, à ce qu'on assure, est surtout onéreuse pour la société, et celle-ci désire vivement en être déchargée. Quant aux péages qui grèvent l'industrie, le chemin de fer de MM. Lonhienne en aurait promptement amené la réduction.

M. le ministre a trouvé qu'il était opportun aussi de fixer le terme endéans lequel la compagnie du Luxembourg devra exécuter l'embranchement de Bastogne.

Dans mon opinion, cet embranchement aurait dû être terminé comme la ligne principale, dès 1859. Le délai qu'on propose d'accorder n'est donc qu'une faveur nouvelle.

Mais il y a plus que cette faveur. Dans la session de 1851, l'honorable M. d'Hoffschmidt prononçait ces paroles :

« L'embranchement de Bastogne coûtera, d'après les derniers rapports qui ont été faits, 1,200,000 fr... M. l'ingénieur de Moor et M. l'ingénieur Splingard sont parfaitement d'accord sur le coût de cet embranchement.

« C'est donc une affaire de 1,200,000 fr. ; or une garantie de 4 p. c. sur 1,200,000 fr., c'est 48,000 fr. Voilà l'immense sacrifice que ferait l'Etat, en supposant que ce chemin de fer ne rapportât rien. »

Maintenant, messieurs, l'Etat garantira non pas 48,000 fr., mais 70,000, ce qui représente près de 6 p. c., d'un capital de 1,200,000. Vous voyez donc que si, en 1846, l'honorable M. Rogier a pu dire que dans cet embranchement de Bastogne on a été porté à voir une sorte de gracieuseté en faveur du ministre qui avait accordé la concession (c'était M. d'Hoffschmidt), la compagnie est bien près de réussir à faire payer cette gracieuseté par l'Etat.

Je termine, messieurs, et je dis : Si la compagnie du Luxembourg eût demandé, comme la société Lonhienne, la concession de toute la ligne de Liége à Givet, le gouvernement aurait eu, avant de faire son choix, à tenir compte des titres tout particuliers de MM. Lonhienne, titres que j'ai rappelés. Mais, comme la compagnie du Luxembourg ne demandait pas la concession de toute la ligne, l'intérêt public plaçait le gouvernement dans cette alternative, ou de traiter avec MM. Lonhienne, ou d'ajouter à la convention proposée par la compagnie du Luxembourg, l'obligation de prolonger la ligne de l'Ourthe jusqu'à Givet. C'est à rétablir cette situation que tend l'amendement.

Il ne me reste plus qu'à vous signaler, messieurs, les conclusions de la pétition de MM. Lonhienne :

« Nous avons démontré, disent-ils, que nous étions les auteurs d'un projet de chemin de fer international, s'étendant de Liège à Givet, pour lequel nous avions fait toutes les études et rempli toutes les conditions prescrites par les arrêtés en vigueur.

« Nous avons établi que nous voulions exécuter ce projet, que nous étions prêts, que nous offrions au gouvernement toutes les garanties possibles.

« Nous avons montré comment le gouvernement a détaché de notre tracé la partie principale pour en gratifier la compagnie du Grand-Luxembourg, sans que celle-ci ait fait aucune étude de ce chemin de fer, ni rempli les principales conditions requises, pour que sa demande fût régulièrement instruite, pour qu'elle fût recevable.

« Nous avons prouvé que la compagnie n'avait à cette concession aucun droit, ni comme demandeur ordinaire, ni comme jouissant d'une préférence antérieurement stipulée. Nous avons fait voir que le gouvernementale pouvait alléguer sérieusement aucune raison d'intérêt public pour justifier cette spoliation.

« Nous avons mis en évidence qu'elle aurait pour conséquences directes, d'empêcher toute construction d'une voie ferrée entre Aye et Givet et de livrer le commerce et l'industrie de la vallée de l'Ourthe à la merci d'une seule société.

« Vous conclurez vous-mêmes, messieurs, mais nous tenons à vous déclarer que nous persistons dans notre demande en concession, que nous sommes toujours prêts à déposer le cautionnement garantissant son exécution, et que nous pouvons entreprendre celle-ci, dès qu'elle nous serait accordée. »

A mon tour je dis, vous conclurez, messieurs, je l'espère, en adoptant la rédaction de l'article 3, que nous avons l'honneur de proposer.

(page 1829) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je serai court aujourd'hui, car je n'entends nullement épuiser le débat, pas même en ce qui me concerne personncllement. Sous ce rapport, au contraire, je fais mes réserves les plus formelles, car j'aurais considérablement d'observations à présenter si je voulais suivre l’honorable préopinant dans tous les détails de l'exposé qu'il a fait de la réclamation de MM. Lonhienne.

Je veux me borner aujourd'hui à donner quelques explications, à fournir quelques renseignements de fait que je trouve dans le dossier de l'administration et que je suis par conséquent seul en mesure de communiquer.

La Chambre comprendra que j'ai à cœur de la mettre immédiatement à même d'apprécier le fondement de l'accusation formulée à mon adresse en termes peu obligeants par l'honorable préopinant, d'avoir subi la loi de la compagnie du Grand-Luxembourg, Je ne subis pas plus la loi de la compagnie du Grand-Luxembourg que celle de n'importe qui, mais l'honorable membre me permettra de lui dire à lui-même que parce qu'un très honorable collègue appartenant au cabinet est intéressé dans la compagnie du Grand-Luxembourg, ce n'est pas une raison pour exclure cette compagnie d'une affaire où les intérêts publics sont engagés d'une manière aussi évidente.

Pour restreindre les renseignements que j'ai à fournir à la Chambre, précisons le point de départ de l'attaque de l’honorable M. Thibaut. C'est que MM. Lonhienne sont antérieurs en date, quant à la demande en concession ; qu'ils ont, comme on dit en termes usités, un droit de priorité.

Or, chose qui surprendra l'honorable membre, qui surprendra peut-être MM. Lonhienne eux-mêmes, je prétends qu'ils ne sont pas antérieurs en date, qu'ils n'ont à aucun titre la priorité, quant à la demande en concession.

Et si je fournis cette preuve, je ne sais plus sur quoi se fondent la protestation et l'accusation qu'on vient d'articuler.

Je dis que les frères Lonhienne n'ont pas la priorité ; je vais, pour établir cette thèse d'une manière irréfragable, dépouiller tout simplement devant la Chambre le dossier officiel de cette affaire.

Ainsi que le disent MM. Lonhienne, dans le mémoire qu'il ont fait distribuer à la Chambre, ils ont déposé une demande en concession d'un chemin de fer de Liège à Givet, par la vallée de l'Ourthe, vers les années 1855 ou 1856 ; ils ont fait des études, transmis des plans.

Mais quelle demande ont-ils faite ? Là est le point capital ? Une demande en concession pure et simple. Qu'est-ce que cette demande est devenue ?

En 1858, le 21 avril, MM. Lonhienne écrivent au département pour proposer de passer une convention ayant pour objet la concession de ce chemin de fer. Voyez comme ils étaient avancés dans la demande de concession, d'abord pure et simple ; ils ajoutaient maintenant que si à la suite des nouvelles études nécessitées par la canalisation de l'Ourthe, ils reconnaissaient que la dépense primitive devait être dépassée d'un million de francs, ils pourraient se retirer et rentrer dans leur cautionnement., Mon honorable prédécesseur, M. Partoes, répond, le 12 juin 1858, à cette singulière proposition de MM. Lonhienne par la dépêche suivante ;

« Par lettre du 21 avril dernier, vous demandez la concession provisoire d'un chemin de fer de Liège à Givet, à la condition que cette concession serait considérée comme non avenue, dans le cas où l'augmentation des dépenses de construction résultant des modifications que l'établissement du canal de l'Ourthe rendrait nécessaires dépasserait d'un million de francs vos prévisions,

« Votre proposition est inadmissible. Le gouvernement ne peut accorder une concession sur les bases d'une convention qui n'engagerait définitivement que lui seul. »

Il est évident que cette réponse...

M. Thibaut. - Et la suite de la même dépêche que j'ai citée.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - La suite répond à une opinion évidemment erronée émise par MM. Lonhienne sur la portée de la loi du 28 mai 1856, en ce qui concerne le versement du cautionnement.

M. Thibaut. - Je veux parler de la phrase relative à la priorité.

(page 1830) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - En effet, j'avais tort d'omettre ce point important. Eh bien, voici ce que M. Partoes ajoutait de sa main au bas de la dépêche :

« Toutefois, messieurs, je crois devoir constater ici que, nonobstant le titre à la priorité dont je viens de parler, j'entends me réserver le droit de traiter de la concession du chemin de fer de Liège à Givet par la vallée de l'Ourthe, s'il m'était fait des offres de nature à être accueillies. s

C'est-à-dire que si même MM. Lonhienne avaient maintenu leur demande telle qu'ils l'avaient formulée à l'origine comme demande de concession pure et simple, l'honorable M. Partoes déclarait que nonobstant il se regardait comme en droit de concéder la ligne dans les mêmes termes à autrui. Est-ce assez clairement professer la véritable théorie du droit du gouvernement en matière de concession ? Est-ce assez nettement revendiquer ce droit ?

La dépêche ministérielle est donc du 12 juin 1858.

La lettre suivante que je rencontre émane de MM. Lonhienne ; elle est du 19 mars 1861.

Il s'écoule donc trois ans, pendant lesquels ils ne font pas de démarches, ils ne déposent pas de cautionnement, ne font aucune justification de la possession du capital. Ils écrivent à cette date :

« Nous remarquons que le projet de loi déposé dans la séance de la Chambre des représentants du 14 de ce mois, pour l'exécution de plusieurs travaux importants, comprend des chemins de fer à concéder avec ou sans garantie de minimum d'intérêt.

« Nous vous prions de bien vouloir y ajouter le chemin de fer do Liège par la vallée de l'Ourthe et par Marche, à la station d Aye, du chemin de fer de Luxembourg, avec prolongement vers Givet. »

Puis ils s'occupent de diverses questions de détail et terminent par ce passage qui est une première insinuation pour l'obtention d'une garantie d'intérêt, sans élever formellement cette prétention :

« Si le gouvernement accordait un minimum d'intérêt, il faciliterait beaucoup le succès de l'entreprise. Ce ne serait là qu'une garantie morale, etc. »

Ainsi, en 1861, on reproduit la demande en concession, mais nous voyons poindre la transformation que cette demande va subir.

Le 8 avril 1861, quelques jours après donc, je réponds à MM. Lonhienne :

« Par lettre du 19 mars dernier, vous demandez que le gouvernement ajoute au projet de loi relatif à l'exécution de travaux d'utilité publique présenté dans la séance de la Chambre des représentants du 13 mars dernier, une disposition tendante à autoriser la concession d'un chemin de fer par la vallée de l'Ourthe, concession sollicitée par vous.

« J'ai l'honneur, messieurs, de vous informer qu'il ne peut être satisfait à cette demande. Le gouvernement ne peut, lorsqu'il s'agit d'une entreprise aussi importante, saisir la législature d'un projet de loi que pour autant qu'il existe une convention conclue ou des engagements assez sérieux pour pouvoir assurer l'exécution de la loi.

« Tel n'est pas le cas ici : depuis plus de trois ans vous connaissez les intentions du gouvernement en ce qui concerne vos propositions, et la dernière lettre que mon département vous a adressée, sous la date du 12 juin 1858, lettre dont une copie a été envoyée à M. le gouverneur de la province de Liège, et qui a été reproduite par lui dans l'Exposé de la situation administrative de la province, publié en 1859, est restée sans réponse. »

Il est donc avéré que pendant trois ans, MM. Lonhienne connaissant les intentions du gouvernement au sujet de leurs propositions, MM. Lonhienne sachant qu'ils peuvent à leur gré signer du jour au lendemain un contrat de concession, ne bougent pas. Cette longue abstention de leur part est-elle assez concluante ?

Le 1er mai 1861 MM. Lonhienne donnent enfin signe de vie. Ils écrivent au ministre des travaux publics : « Nous avons l’honneur de vous faire connaître que nous sommes prêts à verser le cautionnement de cent mille francs, en prenant l'engagement d'établir la première section du chemin de fer de Liége à Givet par la vallée de l'Ourthe et Marche, s'étendant depuis le chemin de fer de l'Etat à Angleur jusque la ligne du Luxembourg.

« La seconde section d'Aye à Givet serait exécutée si, dans les dix ans. le gouvernement français concédait et faisait exécuter une ligue de Givet jusqu'à la frontière belge, à la rencontre do notre ligne.

« Nous demandons en outre la préférence à titre d'extension pour la ligne de l'Emblève.

« Pour faciliter la construction de la première section de ce grand travail d'utilité publique, si ardemment réclamé par une partie notable du pays, nous demandons une garantie d'un minimum d'intérêt de huit cent mille francs et le libre parcours sur la ligne de l'Etat de Liège à Angleur. »

De quelle date, messieurs, est donc bien positivement la demande des MM. Lonhienne, sur laquelle il s'agit de statuer ? Est-elle de 1855 ou de 1S36 ? Elle est du 1" mai 1861. Les frères Lonhienne ont réellement pris date le 1er mai 1861, pas un jour avant.

Leur ancienne demande, celle de 1855 ou 1856, ils l'ont volontairement abandonnée, ou plutôt cette ancienne demande n'a jamais existé ; elle n'a jamais été sérieuse et je vais vous le prouver. Lorsque après trois années d'inaction, à partir de 1858, il leur a été demandé compte de cette inaction, ils se sont rejetés sur la dureté des temps. J'admets cette dureté des temps ; j'ai été à même de la constater ; j'ai su combien certaines entreprises et notamment les entreprises de chemins de fer étaient difficiles à cette époque.

Mais depuis lors, cette dureté des temps a-t-elle continué ? Aujourd'hui peut-on dire qu'il y a encore dureté des temps quant aux concessions de chemins de fer ? Mais sur les 625 kilomètres de chemins de fer à construire par l'industrie privée dont il s'agit dans le projet, combien en accordez-vous avec garantie de minimum d'intérêt ? 125 ; et les 500 autres se font sur le crédit public sans aucune intervention du gouvernement.

Eh bien, pourquoi aujourd'hui les frères Lonhienne ne reproduisent-ils pas leur demande de concession du chemin de fer de l'Ourthe, aux conditions ordinaires ? Cette objection qu'ils faisaient de 1858 à 1861 n'existe plus. Pourquoi ne se représentent-ils pas comme demandeurs à ces conditions ordinaires ? Parce qu'ils ont constaté que cette ligne de l'Ourthe offre de telles difficultés de construction que l'on ne peut l'exécuter qu'à l'aide de certaines faveurs gouvernementales. C'est pourquoi, après avoir fait une demande en 1855 ou 1856, ils en ont fait une seconde en 1861, essentiellement différente de la première.

Je le répète donc, c'est un fait incontestable, la demande des frères Lonhienne date de 1861.

Une fois cette dernière demande, la vraie, connue, que s'est-il passé ? Aussitôt, et il fallait s'y attendre, c'était inévitable, la compagnie du Luxembourg s'est posée comme concurrente de MM. Lonhienne.

De son côté, une des premières maisons de banque de Bruxelles s'est mise sur les rangs. Et le département des travaux publics s'est trouvé en quelques jours en présence de trois demandes reposant exactement sur les mêmes bases, offrant exactement les mêmes conditions, à savoir la construction de la ligne de l'Ourthe jusqu'à la rencontre de la ligne du Luxembourg, avec garantie d'un minimum d'intérêt de huit cent mille francs.

Avais-je raison de dire que les frères Lonhienne n'ont pas la priorité ? Cela me paraît démontré à la dernière évidence.

Si même ils avaient la priorité, conformément au droit du gouvernement si fermement revendiqué par l'honorable M. Partoes, encore le gouvernement n'en serait-il pas moins libre d'octroyer la concession à un tiers ; mais ils n'ont pas cette priorité de fait, et il n'y a par conséquent pas même de question d'équité ni de question d'indemnité qui s'élève ici. (Interruption.)

Ce peut ne pas être votre avis, M. Thibaut, mais je ne me soumets pas à votre appréciation dans cette affaire, je n'accepte que l'appréciation de la Chambre, c'est la Chambre seule qui est juge entre nous.

Cela étant, messieurs, et pour pousser le débat jusqu'au bout, je me mets maintenant dans l'hypothèse la plus favorable à MM. Lonhienne, dans celle où ils se sont placés à tort ; j'admets par supposition qu'ils soient antérieurs en date.

Or, messieurs, dans cette hypothèse. Mil. Lonhienne eux-mêmes, tant la chose est claire, ont soin de mettre en relief dans leur brochure que la décision finale du gouvernement entre les divers compétiteurs en présence, ne devrait cependant s'inspirer, indépendamment de toute question de priorité, ne devrait cependant s'inspirer que de l'intérêt public.

Si l'intérêt public, si l'intérêt du trésor qui est une forme de l'intérêt public, était en cause, le gouvernement serait libre ; voilà ce que concèdent, ce que doivent concéder MM. Lonhienne.

Eh bien, messieurs, après avoir établi d'une manière que je considère comme irréfutable que MM. Lonhienne n'ont pas la priorité, voyons ce que demandait, en tout état de cause, l'intérêt public, l'intérêt du trésor.

- Plusieurs membres. - A demain !

- La séance est levée à 5 heures.