(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)
(page 133) (Présidence de M. Vervoort, président.)
M. Snoy procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart, et lit le procès-verbal de la séance précédente.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Moor présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.
« Les sieurs Van Langermersch et Steyaert de Bal, président et secrétaire du comité commercial et industriel de Bruges, demandent l'adoption simultanée de l'or et de l'argent comme étalon monétaire. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner la proposition de loi relative à la monnaie d'or.
« Des habitants d'Helchin demandent qu'il soit donné cours légal à la monnaie d'or de France. »
« Même demande d'habitants de Lisseweghe, Westvleteren, Menin, Oostroosebeke, Marckeghem, Yive-Saint-Eloy, Harelbeke, Bavichove, Courtrai, Boesinghe, Zonnebeke, Merckem et Evelghem. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Bruxelles déclarent adhérer à la dernière pétition du cercle commercial et industriel de Gand, concernant la monnaie d'or. »
- Même renvoi.
« Un grand nombre d'industriels, fabricants et commerçants de Bruxelles et de sa banlieue demandent le rétablissement de l'étalon d'or et une monnaie d'or belge de 20, 10 et 5 francs au même titre et au même diamètre que les monnaies d'or française et piémontaise. »
M. Goblet. - Je ne m'oppose nullement, messieurs, à ce que cette pétition, très sérieuse, soit également renvoyée à la section centrale chargée de l'examen de la proposition de M. Dumortier ; mais pour que cette section centrale puisse s'en occuper d'une manière plus approfondie et plus utile, je proposerai de renvoyer la requête à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport. On pourrait envoyer ensuite la pétition et le rapport à la section centrale chargée de l'examen de la proposition de M. Dumortier, qui serait plus à même, de cette façon, d'en apprécier toute l'importance.
- La proposition de M. Goblet est mise aux voix et adoptée.
Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Frédéric-Alexandre Schmitz, fabricant à Bruxelles, né à Elberfeld (Prusse), demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« M. Henri Dumortier, retenu pour affaires de famille, demande un congé de quelques jours. »
- Accordé.
« M. Van Volxem, retenu pour affaires urgentes, demande un congé. »
- Accordé.
Les bureaux des sections pour le mois de décembre ont été constitués ainsi qu'il suit :
Première section
Président : M. Goblet
Vice-président : M. Carlier
Secrétaire : M. Crombez
Rapporteur de pétitions : M. de Boe
Deuxième section
Président : M. Deliége
Vice-président : M. d’Hoffschmidt
Secrétaire : M. de Gottal
Rapporteur de pétitions : M. Hymans
Troisième section
Président : M. Julliot
Vice-président : M. Van Humbeeck
Secrétaire : M. de Florisone
Rapporteur de pétitions : M. Van Dormael
Quatrième section
Président : M. Julliot
Vice-président : M. Laubry
Secrétaire : M. Tack
Rapporteur de pétitions : M. Verwilghen
Cinquième section
Président : M. le Bailly de Tilleghem
Vice-président : M. David
Secrétaire : M. de Montpellier
Rapporteur de pétitions : M. Vander Donckt
Sixième section
Président : M. J. Jouret
Vice-président : M. Muller
Secrétaire : M. de Moor
Rapporteur de pétitions : M. Van Renynghe
M. le président. - Le mandat des membres de la cour des comptes expire le 15 janvier prochain ; je demanderai à la Chambre à quel jour elle veut fixer les élections ?
M. B. Dumortier. - Je proposerai le mardi 18 décembre.
- Cette proposition est adoptée.
M. Guillery dépose le rapport de la section centrale qui a examiné le budget des voies et moyens pour 1861.
- La Chambre ordonne l'impression de ce rapport et la distribution.
M. le président. - La discussion continue sur l'article 127.
M. Jamar. - Messieurs, je ne veux pas prolonger le débat auquel nous nous sommes livrés dans la séance d'hier sur la question du palais des beaux-arts ; il m'est impossible cependant de laisser subsister certaines allégations de M. le ministre de l'intérieur dont lui-même reconnaîtra, je pense, le peu de fondement.
M. le ministre de l'intérieur demandait hier la définition d'un palais des beaux-arts ; ce sera l'honorable M. Rogier lui-même que je chargerai de répondre à M. le ministre de l'intérieur.
Voici ce que l'honorable ministre de l'intérieur disait, dans la séance du 27 août 1859 :
« Reste maintenant la question d'un palais qu'on a appelé le palais des beaux-arts. On n'a jamais déterminé ce qu'on entendait par un palais des beaux-arts. Voici comment je comprends la chose ; dans ce palais on réunirait d'abord tout ce qui concerne les arts proprement dits ; on y joindrait les bibliothèques, les archives, etc., etc. Des études très approfondies ont été faites par M. l'architecte Dumont.
« Nous réservons pour un autre temps, qui sera prochain, la question du palais des beaux-arts, nous croyons que c'est sur l'emplacement du musée actuel qu'il faudra établir ce palais et alors les plans de l'architecte Dumont donneront satisfaction à tout le monde. »
L'honorable M. Rogier ajoutait :
« Nous croyons que nous pourrons, dans le courant de l'année prochaine, donner satisfaction au vœu qui a été exprimé en termes si éloquents et si élevés par la section centrale. Nous avons été frappés des hautes considérations auxquelles la section centrale s'est livrée et nous nous y sommes ralliés de tout cœur ; nous craindrions de rester au-dessous de cette belle page du rapport de la section centrale, si nous voulions, à notre tour, faire ressortir la haute utilité de ce palais auquel la section centrale accorde toutes ses sympathies. »
La Chambre a accueilli avec bonheur l'engagement que prenait M. le ministre de l'intérieur, d'une manière aussi formelle. Elle s'associait à l'admiration sans réserve qu'exprimait l'honorable M. Rogier pour le rapport de la section centrale, et si, sous l'empire des sentiments que ce rapport avait fait naître dans le parlement, la Chambre eût été appelée à se prononcer, le premier crédit proposé par la section centrale pour l'érection d'un palais des beaux-arts, eût été adopté à une majorité très considérable.
Je regrette profondément aujourd'hui, quant à moi, l'ajournement du projet de la section centrale, car l'opinion du gouvernement me semble singulièrement modifiée, et je crains, d'après le langage tenu hier à la séance par l'honorable ministre de l'intérieur, que son intention ne soit pas de comprendre la construction d'un palais des beaux-arts dans le projet de travaux publics qui doit être soumis prochainement à la Chambre.
Il s'est opéré une transformation dans l'esprit de l'honorable M. Rogier, depuis le 27 août 1859, transformation malheureusement bien complète, puisque aujourd'hui il vient nous dire ; « A quoi bon un palais des beaux-arts ? Qu'en ferions-nous ? Ce serait un corps sans âme. »
L'honorable rapporteur de la section centrale disait, lui, bien plus patriotiquement : « Nous avons des joyaux est nous n'avons pas d'écrin »
Ah ! messieurs, je comprends mieux le langage qu'on nous tenait en 1859. Est-ce bien en Belgique, dans ce pays où l'art est une des gloires les plus pures, que M. le ministre de l'intérieur peut venir déclarer qu'un palais des beaux-arts n'a pas de raison d'être, et qu'on peut impunément en ajourner l'exécution ?
Je regrette, pour ma part, que l'enthousiasme intelligent éclairé, du ministre de l'intérieur, de l'ami et du protecteur des beaux-arts, qui ne voulait pas, disait-il, rester au-dessous de cette-belle page du rapport de (page 134) la section centrale, en voulant, à son tour, faire ressortir la haute utilité de ce palais ; je regrette, dis-je, que cet enthousiasme ait fait place aux raisonnements de l'administrateur qui, supputant les dépenses de cette construction, capital et intérêts, déclare que, dans sa pensée, il était préférable d'élever une construction provisoire qui ne coûterait que 40,000 fr. au lieu de 600,000 francs, montant de 3 années d'intérêt du capital consacré à la construction d'un palais des beaux-arts.
J'avoue que, pour ma part, je ne saisis pas bien le calcul de M. le ministre de l'intérieur. Personne, en 1859, n'a songé qu'il fallût élever un palais des beaux-arts, uniquement pour les expositions triennales.
L'honorable M. Rogier le disait lui-même : « On doit réunir dans ce palais tout ce qui concerne les arts ; on y joindra les bibliothèques, les archives, etc., etc.
J'ajoute qu'on ferait très sagement d'y réserver un local pour l'Académie des beaux-arts de Bruxelles, dont les cours se donnent dans un souterrain, ainsi que pour les écoles de gravure, qui se trouvent dans une maison, place du Grand-Sablon.
Messieurs, l'honorable ministre de l'intérieur m'a dit hier : « Ce n'est pas une innovation que de placer le musée moderne dans le palais Ducal ; c'est une disposition législative qui décrète que le palais Ducal sera approprié pour le musée moderne. »
Eh bien, que l'honorable ministre de l'intérieur me permette de le lui dire : il se trompe complètement à cet égard.
Non seulement il ne se souvient plus de l'engagement si formel qu'il a pris devant la Chambre en 1859 ; mais il ne tient aucun compte du rapport de la section centrale qui dit très nettement qu'il s'agit d'une appropriation provisoire et d'un crédit nécessaire pour les dépenses que nécessitera la transition.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'article de la loi est positif.
M. Jamar. - Le rapport de la section centrale, que j'ai sous les yeux, est également très positif.
Au reste, messieurs, il y a l'expérience faite par la dernière exposition qui a indiqué combien ce local est peu convenable pour un musée moderne.
M. le ministre de l'intérieur ne trouve pas concluantes les plainte des artistes, et hier il me demandait si j'avais vu une exposition qui n'eût pas donné lieu à des plaintes ou à des récriminations.
J'avoue volontiers que, dans toutes les expositions, il y a des froissements, des mécontentements ; mais en définitive le publie apprécie très bien la valeur de ces plaintes, la raison d'être de ces mécontentements.
Au palais Ducal, les plaintes ont été nombreuses ; les mécontentements légitimes ; il y a eu beaucoup d'appelés, mais peu d'élus.
En dehors de la grande salle les œuvres exposées dans les salles latérales du premier étage étaient mal éclairées ; elles eussent dû recevoir la lumière par des lanterneaux. Cela a été reconnu par des hommes compétents.
Quant aux encoignures du rez-de-chaussée, je n'en parlerai pas. On avait relégué là des œuvres de grand mérite au grand désespoir de leurs auteurs.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Oh ! c'est de l'exagération.
M. Jamar. - il me semble, du reste, que c'est tirer un parti très convenable du palais Ducal que d'y donner aux Académies des locaux en harmonie avec les besoins et le caractère des corps savants, que d'approprier les salles du premier étage pour des concerts et des cérémonies publiques et d'y mettre le conservatoire de musique dont le local va être exproprié prochainement.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Y installer les élèves du Conservatoire, cela n'est pas possible.
M. Jamar. - C'est une appropriation qui me semble parfaitement convenable.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - On y donnera des concerts, mais on n'y placera pas les classes des élèves.
M. Jamar. - Je persiste à dire que les œuvres des écoles modernes ne pourront être placées d'une manière convenable dans le palais Ducal.
J'avoue que je ne comprends pas qu'on mette dans la salle du Musée un orgue de grande dimension destiné, dans le projet du gouvernement, à permettre aux jeunes organistes de compléter leur instruction. Je dis que ce sera une chose plus ou moins piquante pour les touristes qui visiteront le palais Ducal, d'entendre un organiste répéter vingt fois quelque étude aride pour en perfectionner l'exécution.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Les concerts se donneront dans la grande salle du Musée, tout le monde le sait. C 'est pour cela qu'on y placera l'orgue.
M. Jamar. - Je me bornerai à ces considérations. J'en appelle des allégations de M. le ministre de l'intérieur d'hier aux passages du discours de M. Rogier en 1859 que j'ai fait connaître à la Chambre.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, on n'a fait que répéter aujourd'hui les observations qui avaient été présentées hier et auxquelles je croyais avoir répondu.
On vient de commettre une erreur assez grave en critiquant le placement d'un orgue dans la grande salle du palais Ducal.
M. Jamar. - Je me suis trompé au point de vue de l'orgue.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Cette salle est destinée entre autres aux concerts du Conservatoire et l'orgue qu'on y établit sera un des cléments principaux de ces concerts.
Quant à y installer les classes nombreuses et variées du Conservatoire, il ne faut pas y songer.
Le palais recevra les Académies, le musée moderne ; on y donnera les concerts du Conservatoire ; des distributions de prix et d'autres solennités pourront avoir lieu dans les salles du palais Ducal, qui seront ornées des œuvres de nos artistes modernes.
Voilà les destinations que recevra le palais Ducal et que la loi elle-même lui a assignées.
J'ai cité hier l'article de la loi ; je vais le répéter aujourd'hui :
« Pour travaux d'appropriation du palais Ducal pour les expositions générales des beaux-arts, le musée moderne, les solennités publiques. »
J'y ai joint, messieurs, les deux Académies, qui, par suite de leur déplacement, laisseront disponibles des salons dont nous pourrons faire emploi, soit pour les bibliothèques, soit pour les musées d'industrie et d'histoire naturelle, soit pour les musées anciens.
M. Jamar. - Oui, mais le rapport de la section centrale indique clairement qu'il s'agit d'une appropriation provisoire.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Bien ; mais le rapport de la section centrale ne détruit pas la disposition formelle de la loi qui prescrit la destination à donner au palais Ducal.
Maintenant, messieurs, si mon langage d'aujourd'hui n'est pas entièrement conforme à celui de l'année dernière, c'est que les faits ne se présentent plus non plus sous le même aspect ; les faits eux-mêmes se sont modifiés.
L'emplacement destiné aux bibliothèques et aux divers musées avait été trouvé insuffisant depuis longtemps. C'est l'honorable M. de Decker ou l'honorable M. Piercot qui a pris l'initiative de la nomination d'une commission chargée de rechercher quel serait le moyen de loger convenablement toutes les collections et les Académies.
On a proposé d'abord un plan qui consistait à réunir dans un même local, agrandi, les bibliothèques, les musées, les Académies, les archives et même le Conservatoire royal de musique.
Plus tard, ce projet a été soumis à une nouvelle commission, laquelle n'y a pas donné son adhésion. Cette commission a ouvert un autre avis ; elle a proposé de transporter au palais Ducal le musée moderne et d'y faire ce qu'on a appelé depuis lors un palais des beaux-arts.
Ce plan pour le payement duquel, par parenthèse, des crédits ont été demandés à la législature et sur lequel la législature votera incessamment (je présume), ce plan consistait à démolir le palais Ducal, à le transformer complètement, à y substituer deux pavillons. Eh bien, ce plan je ne pourrais pas, moi, l'adopter. Je crois qu'il faut maintenir le palais Ducal et qu'en le maintenant, on peut lui donner la destination qu'on voulait donner au palais transformé ; c'est-à-dire y établir le musée moderne, y établir, dans de bonnes dispositions, les locaux nécessaires aux expositions et aux Académies.
Par suite du transport, au palais Ducal, du musée moderne et des Académies, nous trouvons, dans les locaux actuels de l'ancienne Cour, des emplacements disponible qui faisaient défaut autrefois, et, par-là, bibliothèques, musées anciens et musées d'industrie et d'histoire naturelle, trouveront un emplacement qu'ils ne possédaient pas à une autre époque.
(page 135) Quant au musée d'antiquités et d'armures , après examen, on s'est demandé s'il ne se trouvait pas mieux placé, sous tous les rapports, à l'ancienne porte de Hal, qui en elle-même un monument ancien et qui, par cela même, est plus en harmonie avec les objets qu'elle renferme qu'aucun autre édifice que nous pourrions ériger. On s'est dit qu'il serait fâcheux de déplacer ce musée et l'on a décidé qu'on ne le transférerait pas dans les locaux de l'ancienne Cour. Restent les archives.
Où faut-il placer ? Faut-il les placer aussi sur l'emplacement qu'on destinait à toutes nos collections ? Voilà la question.
Où placera-t-on les archives ? Fera-t-on, comme dans d'autres pays, un local spécial pour les archives ou bien les placera-t-on sur un terrain commun aux autres collections ? Ne perdons pas de vue qu'on va construire un nouveau palais de justice ; le palais de justice actuel renferme les archives et demandons-nous si, par suite du transfert du palais de justice sur un autre point, on ne trouvera pas dans le palais de justice actuel des locaux suffisants pour nos archives ? Il y aurait là un grand avantage, attendu qu'on n'aurait pas besoin de transporter les archives à une grande distance.
Messieurs, je ne désavoue nullement les sentiments, les sympathies que j'ai manifestés en vue d'un grand monument dédié aux beaux-arts. Je ne retire aucune des paroles que j'ai prononcées.
M. Jamar. - Vous vous êtes engagé à présenter un projet de loi dans le courant de cette année.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je viens de vous expliquer les motifs qui aujourd'hui me font hésiter à présenter ce projet. Je dis que les faits sont entièrement changés, que les besoins constatés alors ont été en partie satisfaits par la destination qu'on donne au palais Ducal.
On parle de pays qui possèdent un palais des beaux-arts. On a cité, je crois, Munich. Eh bien, Munich a un grand nombre de monuments, mais je n'y connais pas de palais des beaux-arts proprement dit.
II y a la glyptothèque où se trouvent les sculptures et la pinacothèque où se trouvent les tableaux, mais la pinacothèque n'est pas un palais proprement dit ; c'est un bâtiment assez simple en lui-même et d'un goût plus ou moins équivoque, avec des peintures murales ; mais il n'y pas à Munich de palais des beaux-arts proprement dit. Je ne sais pas où il en existe, comme je ne sais pas où il existe un palais destiné aux expositions périodiques.
Il y aura, messieurs, des travaux d'appropriation et d'embellissement à faire aux locaux de l'ancienne Cour et je ne renonce pas du tout à présenter à la Chambre une demande de crédit pour approprier ces locaux. Ces locaux ne sont pas à dédaigner, et je tiens que le musée ancien y est bien placé.
La place manquait ; mais nous allons trouver de la place. Des appropriations, des travaux d'embellissement y seront faits ; mais ce ne sera pas un projet entièrement nouveau, des constructions entièrement nouvelles, un palais des beaux-arts entièrement neuf qu'on viendra proposer, parce que, je le répète, je ne vois pas la destination qu'on lui donnerait, aujourd'hui que le palais Ducal va recueillir le musée moderne et les deux Académies qui occupent, dans le palais de l'ancienne Cour, un emplacement qui pourra désormais recevoir une autre destination.
M. E. Vandenpeereboom. - Messieurs, dans la séance d'hier, M. le ministre de l'intérieur a demandé ce que c'était qu'un palais des beaux-arts ; on vient de répondre à M. Rogier par les paroles du ministre lui-même. Il ne faut pas en vouloir à l'honorable ministre pour cette inadvertance ; il a dit et fait tant de bonnes choses, dans sa longue et fructueuse carrière, qu'il peut bien avoir oublié quelque peu de ce qu'il a dit de bien, de ce qu'il a fait d'utile.
On a fait l'historique de la naissance du projet de construction d'un palais des beaux-arts ; mais, en le faisant, on a oublié le premier chapitre de cette histoire ; il est dans le projet de 1858, relatif à la petite enceinte des fortifications d'Anvers.
Après le rejet, du projet de la petite enceinte, est arrivé le projet de la grande enceinte, dont la dépense était double des premières prévisions.
Dans cet ensemble complet de travaux d'utilité publique, il y avait un article, avec ce libellé : « pour appropriation de locaux et constructions nouvelles sur le terrain de l'ancienne Cour, affectée aux archives, musées, etc., 800,000 fr. »
L'objet principal qu'on avait en vue ne fut pas admis ; par conséquent, les appâts, qu'on y avait attachés, vinrent à tomber aussi.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Comme complément.
M. E. Vandenpeereboom. - Soit ; c'était quelque chose d'attrayant, que ces travaux publics, surtout pour moi qui les aime beaucoup.
Dans le deuxième projet, présenté ultérieurement et contenant des travaux plus considérables pour Anvers, il ne fut plus question de ces 800 mille francs : mais on fit figurer un crédit de 325 mille francs, pour appropriation du palais Ducal ; et, en même temps, nous fumes saisis de plans, pour l'appropriation des anciens locaux du musée ; plans tellement considérables, que les devis s'élevaient à 2,500,000 francs.
Ainsi l'utilité d'un palais des beaux-arts était tellement évidente, que le ministre a fait faire ces plans.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ce n'est pas moi qui les ai fait faire.
M. E. Vandenpeereboom. - Mais enfin, quelqu'un les a fait faire ; c'est le département de l'intérieur, je présume.
Enfin, l'utilité d'un palais des beaux-arts était tellement reconnue, qu'on a fait faire un plan dont le devis s'élève à 2,500,000 fr.
Je dois dire que, comme appropriation, la section centrale de 1858-1859 a trouvé ce travail extrêmement remarquable ; et elle l'aurait adopté, si elle n'avait pas eu en vue un autre projet plus vaste, plus grandiose ; si elle n'avait pas pensé qu'au lieu d'un travail d'appropriation, il valait mieux faire une œuvre qui pût marquer dans notre siècle.
Or ce qui a guidé la section centrale, dans cette circonstance, c'est la pensée que nous n'étions pas déjà si riches en monuments modernes ; quand nous voulons construire des églises, nous ne faisons que des chapelles, et nos constructions civiles sont plus modestes encore.
Rappelons-nous ce que faisaient nos pères ; ce que faisaient de simpls administrations communales, des corporations d'artisans. Elles élevaient des monuments superbes, qui font l'admiration des étrangers ; et la Belgique tout entière, en 30 ans, ne pourrait pas faire un bâtiment qui pût rester, comme monument de sa bonne volonté, sinon de sa puissance !
Je vous avoue, messieurs, que je suis économe des deniers publics ; mais je donnerais volontiers une somme assez considérable, tous les ans, pour arriver à quelque chose de moins pauvre que ce que nous avons fait jusqu'à présent.
On a dit que l'église de Laeken coûtera trop ; je pense qu'elle ne coûtera pas trop, si elle répond à sa destination. Ce qui a été critiqué, c'est qu'on n'a pas vu, dès le principe, où l'on allait. Maintenant, si ce monument devait coûter un demi-million de plus pour son achèvement, et qu'il fallût encore un autre demi-million pour orner dignement l'intérieur de ce lieu de sépulture de notre dynastie, si justement aimée, je voterais ces fonds avec le plus grand plaisir.
Aussi, je crois que nous faisons une chose très utile au pays, quand nous savons, comme nation, imiter, même de loin, ce que faisaient nos pères, comme membres de nos fortes corporations, ou comme administrateurs de nos libres communes.
On nous a dit : Si vous faites un palais des beaux-arts, ce sera un corps sans âme ; où y a-t-il des monuments pareils à ceux dont vous parlez ? Je n'ai pas eu le bonheur de voir les monuments de Munich ; mais, d'après ce que j'entends, ces monuments ne sont pas à dédaigner ; on m'a dit qu'ils sont très remarquables, même à l'extérieur.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ils n'ont pas l'apparence da palais.
M. Orts. - Ils sont toujours plus beaux que le palais Ducal.
M. E. Vandenpeereboom. - Voici comment je conçois l'érection d'un palais des beaux-arts.
Je ferais, d'abord, l'extérieur aussi beau que possible, parce que nous sommes très pauvres en bâtiments civils.
Ce que nous avons de plus beau, ce sont les gares de nos chemins de fer. C'est ce que nous avons fait de plus grandiose depuis 1830, en fait de bâtiments civils.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Nous n'achevons rien.
M. E. Vandenpeereboom. - Nous réparons, et nous faisons très bien de réparer ; nous sommes en train d'achever ce que d'autres avaient laissé interrompu. Mais ne pourrait-on pas, en un certain nombre d'années, faire quelque chose qui restât, comme une œuvre da la génération de 1830. Cette génération va bientôt disparaître et si vous voulez faire quelque chose qui soit digne de notre prospérité actuelle, hâtez-vous ! (Interruption.) Je ne sais pas pourquoi on m'interrompt ; cela ne s'adresse pas (page 136) particulièrement à M. le ministre, puisque je l'engage à commencer et que je serais heureux, s'il pouvait finir des travaux qui devraient durer dix ans.
On demande ce que sera ce musée. Je dirai ce que c'est qu'un musée. Dans la ville de Cologne, qui n'est pas une capitale, un simple particulier, un industriel enrichi par son travail et son intelligence, M. Reicharz - nom béni par les amis des beaux-arts, - vient de faire élever un musée complet qui a coûté, je n'oserais pas dire un million, mais pas beaucoup moins.
Ce généreux citoyen vient d'en confier l'ornementation à l'un des principaux artistes de l'Allemagne, Edouard Steinle, et il payera, de ce chef, 40,000 thalers, quelque chose comme 150,000 francs. Voilà ce que fait un particulier dans une ville de province ! et une telle entreprise ne pourrait pas être tentée par un Etat libre et riche, dans sa capitale.
On dit : Quand vous aurez un musée, il faudra le garnir. Messieurs, nous avons déjà un très beau contingent d'œuvres acquises par le gouvernement ; nous avons des statues, enterrées dans une cave, où elles vont se détériorer si vous ne les tirez pas de là ; nous avons des tableaux que vous voulez mettre dans le palais Ducal, où je crains qu'ils ne soient très mal placés. Ils vont gâter la symétrie de notre salle, très habilement appropriée pour des fêtes publiques.
Vous avez déjà un beau noyau d'œuvres remarquables, que vous pourriez placer dans ce que nous appelons un palais des beaux-arts. Ensuite, messieurs, quand il y a un commencement d'exécution d'une œuvre aussi grande, qui excite l'admiration générale, les dons arrivent. Je viens de vous citer un seul industriel de Cologne qui a fait un don merveilleux.
Depuis un demi-siècle, Anvers a reçu deux trésors artistiques ; la collection des tableaux de M. van Ertborn, ancien bourgmestre ; et la belle collection de madame la douairière van den Heekke, née baronne Baudt.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il n'est pas besoin de palais des beaux-arts pour cela.
M. E. Vandenpeereboom. - Quand ce palais existe, quand on y voit de belles choses, on est disposé à en augmenter le nombre. Des personnes, par exemple, qui ne possèdent qu'un seul tableau de mérite, disent souvent : « Ce n'est pas la peine de laisser cela à mes héritiers » et ils le donnent au musée.
Rappelez-vous, messieurs, la dernière exposition. La plus belle partie de l'exposition de statues était commandée par un industriel de Bruxelles, glorieux fils de ses œuvres ; il y en avait à peu près pour 50,000 francs ; et vous croyez que cet industriel habile et heureux ne donnerait pas une œuvre magnifique à un musée établi dans la ville, berceau de sa naissance, berceau aussi de sa fortune ! Mais vous auriez des cadeaux plusieurs fois par an.
Il est certain, messieurs, que le gouvernement a3commencé avec des vues plus larges que celles qu'il a maintenant. Il proposait d'abord 800,000 francs et nous en sommes venus à 500,000 francs. Il est vrai que l'honorable M. Rogier se propose de faire de nouvelles constructions ; mais je crains fort que le palais ne soit gâté par ces constructions nouvelles qui ne seront pas appropriées au local actuel.
J'aimerais mieux ne plus rien faire à ce palais, y mettre le Conservatoire de musique tout entier, y mettre les Académies et, si nous n'avons pas en ce moment les ressources nécessaires, réserver le projet pour faire une fois un travail qui marque dans notre époque. Presque tout ce que nous avons fait depuis 1830 est pauvre et mesquin. Ou parle de l'église de Laeken ; on en vante les merveilles ; mais comparez cette belle chapelle à nos veilles cathédrales !
C'étaient des corporations, c'étaient des communes qui faisaient ces chefs-d'œuvre ; pourquoi une nation entière ne ferait-elle pas quelque chose de vraiment remarquable, en y mettant 3, 5, 8 ans, 10 ans s'il le faut ?
M. le ministre a dit, et je lui en rends grâces, il a dit qu'il est économe, et que c'est à regret qu'il doit imposer silence à ses sympathies pour les beaux-arts. Je le sais. Je sais aussi qu'il a derrière lui M. le ministre des finances, qui est très économe également, jusqu'à ce que vienne un moment où toutes les écluses du trésor s'ouvrent et où le flot d'or se jette sur toutes choses, excepté sur le palais des beaux-arts.
L'honorable ministre de l'intérieur a dit : « Vous avez partout des palais des beaux-arts ; vous pourrez les orner dans chaque ville. »
C'est très vrai, et je loue M. le ministre d'avoir porte à son budget une somme de 30,000 francs pour les peintures murales.
A ce propos, qu'il me permette de lui dire que je crois cette somme suffisante pour commencer, mais qu'elle est susceptible d'être augmentée, et voici comment ;
Je voudrais que l'on appliquât à l'ornementation de nos hôtels de ville et de nos cathédrales ce que l'on fait pour la restauration de ces édifices ; c'est-à-dire que le gouvernement, les provinces et les communes intervinssent, à la fois, dans les dépenses d'ornementation. Si ces dépenses étaient échelonnées sur plusieurs années, il est positif qu'au bout d'un certain temps on verrait des merveilles dans chacune de nos villes.
Là il y a de quoi faire des peintures murales et des peintures sur toile tant qu'on veut ; les locaux sont vastes. L'histoire de chaque localité est féconde en faits mémorables. Si ces événements glorieux étaient retracés par la peinture sur les murailles, à la portée de tous les visiteurs, ce spectacle entretiendrait et fortifierait dans l'âme de chaque citoyen le sentiment de la nationalité et relèverait, à ses yeux, sa propre dignité personnelle.
Je conçois que cela peut se faire ; mais je me permets de dire à M. le ministre de l'intérieur qu'il devrait appeler à son aide, dans de plus vastes proportions que maintenant, le concours des villes et des provinces. Cela ne peut se faire en un jour ; mais on y parviendra par la propagande. Une noble émulation s'établira bientôt ; ce que l'on fait généralement pour la réparation de nos beaux monuments civils et religieux, on le fera pour leur décoration. Et ainsi, notre glorieux passé y revivra tout entier !
Qu'est-ce, pour une grande ville, de porter à son budget 4,000 ou 5,000 fr. pendant 10 ans, par exemple ? Je sais qu'il y a eu un,moment où, pour 100,000 francs, une de nos grandes villes pouvait avoir une œuvre complète, 9 à 10 tableaux peut-être, du plus grand des peintres qui honorent aujourd'hui la Belgique.
Il voulait y consacrer dix années de sa vie et il demandait 10,000 f r. par an.
Si cette œuvre était achevée aujourd'hui, elle attirerait des étrangers de toutes parts. Eh bien, on n'a pas pu s'entendre : on a voulu commander à l'artiste un seul tableau ; et au lieu de 10,000 francs, on a voulu lui donner 20,000 francs pour ce tableau unique. L'artiste a refusé, parce que cette œuvre doit être conçue par un seul esprit et faite par une seule main : ceci prouve que parfois, en devinant un artiste, on peut acquérir des œuvres d'une valeur inappréciable.
Chaque fois que le gouvernement agrandit sa mission, chaque fois le talent s'élève aussi. A chaque exposition, on voit des artistes se mettre, d'une manière inespérée, à la hauteur de l'œuvre qui leur a été commandée.
Je dirai donc à M. le ministre de l'intérieur : Encouragez cette œuvre communale qui consiste à inscrire l'histoire de notre glorieux passé sur les murailles de ces beaux monuments que nos pères nous ont légués.
Si le temps me le permettait, je vous montrerais les beaux-arts ouvrant des carrières fructueuses et glorieuses surtout à des jeunes gens, fils de leurs œuvres, je vous prouverais que les beaux-arts fournissent une large part à la richesse nationale, à ne les envisager qu'au point de vue matériel.
Messieurs, je ne veux pas revenir sur le projet d'un palais des beaux-arts. Je crois que le moment n'est pas opportun. Rien n'est changé à ce qui a été fait. Seulement, si l’honorable ministre de l'intérieur veut bien recevoir un conseil de ma part, je l'engage à ne pas trop dépenser au palais actuel, à ne pas faire d'annexes qui, au lieu d'améliorer le local, ne serviraient qu'a le défigurer.
Qu'il modifie, si c'est possible, la disposition de quelques salles à l'intérieur, je le conçois ; mais l'addition d'annexés ferait un effet très désagréable à l'extérieur, et nuirait extrêmement à la destination de l'édifice.
En terminant, je prends acte de la déclaration qu'a faite M. le ministre de l'intérieur, à savoir qu'il n'a pas renoncé à l'idée d'une construction plus grandiose et plus digne de ce que nous sommes en état de faire, lorsque notre état financier, qui s'améliore chaque jour, nous permettra de nous imposer ces dépenses. Son patriotisme éprouvé, son goût éclairé, l'intérêt qu'il a toujours manifesté aux artistes, tout me dit que je ne serai pas trompé dans mon attente.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, ce n'est pas à un adversaire que je réponds ; je partage entièrement tous les sentiments de l'honorable membre ; je ne les exprime pas en termes aussi éloquents que lui, mais je m'associe entièrement à ses vues.
(page 137) (page 5 de 6) Il y a plus : je m'efforce de mettre mes actes en rapport avec mes sentiments. Nous différons seulement sur un point. Faut-il construire dès maintenant ce qu'on appelle un palais des beaux-arts destiné à recevoir toutes nos collections ?
Je crois que, dans les circonstances actuelles, ce palais n'a pas un caractère d'urgence. Mais je ne renonce pas à l'idée d'une construction grandiose ; je ne renonce pas non plus à approprier, dans de bonnes conditions, les locaux actuels du palais Ducal et de l'ancienne Cour.
On parle de la pénurie de monuments. Messieurs, il ne faut pas être injuste envers son époque : il n'est pas exact de dire que nous n'avons rien fait...
M. E. Vandenpeereboom. - Rien d'aussi beau que dans le passé.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Où fait-on d'aussi belles choses que dans le passé ? Je puis sans doute, sans offenser qui que ce soit, demander : où sont les Rubens, les Michel-Ange, les Raphaël ?
Mais, je le demande, où est le pays qui a consacré des sommes relativement aussi considérables que la Belgique à restaurer le passé ? où est le pays qui, eu égard à ses ressources, a fait d'aussi grands sacrifices pour la restauration de ses anciennes églises et de ses anciens hôtels de villes ? Je crois que depuis 1833, époque où j'ai eu la bonne fortune de proposer le premier subside pour l'église de Sainte-Gudule, l'Etat a consacré plus de 700,000 fr. à la restauration de ce monument, et si l'on tient compte des subsides accordés par la province et jpr la commune, la somme qu'on a consacrée à restaurer une seule église doit s'élever à 1,200,000 francs !
Il serait trop long de rappeler tout ce qui a été dépensé pour la restauration de nos églises et de nos hôtels de ville ; mais le pays est témoin et témoin très fier de la restauration de tous ces monuments.
Dans la mesure de nos forces et du génie moderne, nous élevons d'ailleurs des monuments qui ne sont pas à dédaigner. On a parlé de l'église de Laeken ; eh bien, cette église sera un véritable monument qui sera ouvert, je l'espère, à nos peintres et à nos sculpteurs.
Il est une autre église qui est aussi un véritable monument et à laquelle je voudrais voir consacrer 200,000 francs par an.
Cette église fait honneur à l'architecte qui malheureusement l'a commencée sans pouvoir la finir. Je parle de l'église de Sainte-Marie, à Schaerbeek. Là, nos artistes pourraient encore être utilement et honorablement occupés. Je voudrais voir cette église achevée. Il y a trop longtemps que les travaux durent.
Ce monument doit s'achever. Si M. le ministre de la justice venait proposer un crédit spécial pour l'achèvement de l'église de Sainte-Marie, je crois que ce crédit serait favorablement accueilli par la Chambre et parfaitement défendu par l'honorable rapporteur de la section centrale de l'année dernière.
Messieurs, nous avons élevé une colonne au Congrès. Ce monument, qui a coûté des sommes considérables. Il fera époque dans l'histoire du pays.
Indépendamment des monuments d'architecture, notre pays est parsemé de toute espèce de monuments créés par l'initiative ou avec le concours de l'Etat. Des statues ont été élevées dans beaucoup de nos villes ; d'autres statues en grand nombre sont décrétées. Nous avons élevé des statues, à Bruxelles, à Anvers, à Bruges, à Liège, à Alost, à Mons, à Malines, à Damme. D'ici à quelques années nous aurons de plus à Bruxelles d'Egmont et de Hornes, à Gand nous aurons Van Ar-evelde ; à Liège Charlemagne, à Tongres Ambiorix ; à Anvers, Boduognat ; à Bruges, Memling, à Tournai Marie de Lalaing, à Mons Baudouin de Constantinople ; à Maeseyck, les frères Van Eyck.
- Un membre. - Et Agneessens à Bruxelles.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je cite en ce moment ce qui est décidé. Le monument de d'Egmont et de Hornes est décidé.
Tous ces monuments viendront d'ici à quelques années apporter de nouveaux ornements et une nouvelle physionomie au pays.
Du reste, en ce qui concerne spécialement l'architecture, nous sommes loin d'être dépourvus de travaux, nous avons le palais de Liège, le palais de justice, à Bruxelles, et le nouveau palais royal pour lequel un crédit de 1,800,000 francs est déjà voté.
Nous entrons également dans les vues de l'honorable membre en cherchant à orner nos monuments anciens et modernes de peintures murales.
C'est ainsi qu'un accord se fait avec la ville de Gand pour orner de peintures de ce genre le beau monument de l'université.
Nous sommes aussi en négociation avec Anvers pour des peintures murales à l'hôtel de ville et au musée de cette ville.
Dans plusieurs églises on exécute ou l'on prépare des peintures murales.
L'honorable membre veut que tout cela se fasse avec le concours des provinces et des communes. C'est aussi mon opinion ; mais voici la difficulté : c'est que les provinces et les communes ne concourent souvent dans des proportions suffisantes, et l'initiative du gouvernement se trouve arrêtée par l'obstacle qu'il rencontre, non pas dans le mauvais vouloir des provinces ou des communes, mais dans leur situation financière qui ne leur permet pas d'accorder au gouvernement le concours efficace dont il aurait besoin.
En dépit de ces difficultés locales, le gouvernement obtient cependant des résultats pour un assez grand nombre de monuments civils et religieux.
Je citerai encore parmi les travaux publics qui ont un caractère monumental ce qui sera fait à la porte de Hal.
Des devis et des plans ont été dressés pour approprier la porte de Hal à sa destination et faire de cette partie de la ville un des points les plus pittoresques de la capitale. Le plan sera probablement soumis incessamment à la Chambre, et je ne doute pas que l'honorable représentant auquel je réponds ne s'empresse de donner son adhésion à la proposition qui sera faite.
Quant au particulier de Cologne dont on a parlé tout à l'heure, je n'ai qu'un vœu à faire, c'est que l'exemple de cet excellent patriote de Cologne se propage dans le pays.
Les libéralités des donateurs belges seront toujours parfaitement accueillies par le pays et par le gouvernement.
- La discussion est close.
M. le président. - Je mets aux voix l'article 127 avec l'addition du paragraphe suivant proposé par le gouvernement : « Frais d'entretien du palais de la rue Ducale, frais de surveillance du musée moderne à établir audit palais ; frais relatifs au jardin (salaire du jardinier et entretien du jardin), chauffage des locaux habités par le concierge 4,090 fr. ensemble aux charges ordinaires 8,680 fr. »
- L'article est adopté.
M. le président. - Il y a lieu de revenir en ce moment sur l'article 3. M. le ministre de l'intérieur a proposé une diminution de 1,500 francs sur le chiffre de cet article.
Je propose à la Chambre de voter cette diminution, ce qui réduirait le crédit de 45,960 francs à 44,460 francs, et en même temps la suppression des mots : « loyer d'une succursale de l'hôtel des bureaux. »
- L'article ainsi amendé est adopté.
M. le président. - A quel jour la Chambre veut-elle fixer le second vote ?
- Plusieurs voix. - A demain ! à demain !
M. Rodenbach. - Le règlement exige un jour d'intervalle.
M. le président. - Oui, mais la Chambre est toujours libre d'eu décider autrement.
- La Chambre, consultée, fixe à demain le vote définitif du budget de l'intérieur.
Il est procédé au vote par scrutin secret sur la demande de grande naturalisation du sieur Jean-GIaudot Biver.
Nombre de votants, 70.
Majorité absolue, 36.
Boules blanches, 58.
Boules noires, 12.
En conséquenec, la demande du sieur Jean-Glaudot Biver est prise en considération.
Il est procédé au vote sur la demande de grande naturalisation du sieur Biver, Nicolas.
Nombre de votants, 66.
Majorité absolue, 34.
Boules blanches, 60.
Boules noires, 6.
En conséquence, la demande du sieur Biver, Nicolas, est prise en considération.
Il est procédé au vote sur la demande de grande naturalisation du sieur Biver, Henri.
Nombre de votants, 64.
Majorité absolue, 33.
Boules blanches, 60.
Boules noires, 4.
(page 138) En conséquence, la demande du sieur Biver, Henri, est prise en considération.
Ces diverses résolutions de la Chambre seront transmises au Sénat.
M. le président. - L'ordre du jour appelle maintenant la lecture de rapports sur des pétitions.
M. Allard. - L'heure me semble un peu avancée pour aborder cet objet qui nous prendrait beaucoup de temps. Si la Chambre n'y voyait pas d'inconvénients, je lui proposerais de l'ajourner et de procéder à la discussion et au vote du projet de loi, également à l'ordre du jour, tendant à ouvrir, au budget des dotations de l'exercice 1860, un crédit supplémentaire pour couvrir l'insuffisance de l'allocation votée pour le service de la Chambre.
- Cette proposition est adoptée.
La discussion générale est ouverte. Personne ne demandant la parole, la Chambre passe au vote des articles.
« Art. 1er. Il est ouvert à l'article unique du chapitre III du budget des dotations pour l'exercice 1860, un crédit supplémentaire de 78,912 fr. 37 c. destiné à couvrir les dépenses de la Chambra pendant ledit exercice. »
- Adopté.
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »
- Adopté.
Il est procédé à l'appel nominal ; le projet de loi est adopté à l'unanimité des 66 membres présents. Il sera transmis au Sénat.
Ont voté pour le projet de loi : MM. de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Breyne, de Bronckart, Dechamps, Dechentinnes, de Florisone, De Fré, de Gottal, de Haerne, de Liedekerke, Deliége, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Paul, de Portemont, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, Devaux, B. Dumortier, Frère-Orban, Grandgagnage, Grosfils, Guillery, Hymans, Jamar, Janssens, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Loos, Moncheur, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Neyt, Nothomb, Orban, Orts, Pierre, A. Pirson, V. Pirson, Prévinaire, Rogier, Saeyman, Savart, Snoy, Tack, Tesch, Thibaut, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Dormael, Van Humbeeck, Van Iseghem, Verwilghen, Wasseige, Allard, Crombez, Dautrebande, David et Vervoort.
- La séance est levée à quatre heures et demie.