(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)
(page 9) (Présidence de M. Vervoort.)
M. de Florisone, secrétaire, procède à l'appel nominal à deux heures et demie ; il donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
M. de Boe, secrétaire, présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Messieurs Mouste, Rossignol et autres membres fondateurs du Cercle des Frères d'armes belges, demandent une loi qui les autorise à se constituer en corps de carabiniers volontaires. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Saleme, facteur rural à Warneton, demande une augmentation de traitement ou un subside. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics.
« Le sieur Martin, ancien sous-officier de volontaires, demande la croix de Fer et une pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Hubert Sauvenier, marchand tailleur à Hasselt, né à Maestricht, demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Le conseil communal d'Aerschot demande que le concessionnaire d'un chemin de fer de Louvain à Herenthals soit obligé de faire passer cette ligne par Aerschot et d'établir dans cette ville la bifurcation d'une section sur Diest. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des habitants d'Ooteghem demandent qu'il soit donné cours légal à la monnaie d'or de France. »
« Même demande d'habitants de Clercken, Bossuyt, Oostcamp, Tieghem, Wervicq, Ingelmunster et Wercken. » ^
- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner la proposition de loi relative à la monnaie d'or.
« M. Neyt, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé. »
- Accordé.
M. de Boe dépose le rapport fait, au nom de la section centrale, sur le projet de loi relatif aux warrants.
- Impression et distribution.
M. J. Jouret dépose le rapport de la commission de comptabilité sur une demande de crédit supplémentaire pour couvrir les dépenses de la Chambre pour 1860.
- Impression et distribution.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai déposé sur le bureau de la Chambre un projet de loi relatif à l'organisation d'un conseil de prud'hommes à Bruxelles.
Je pense qu'on n'a pas encore décidé du renvoi de ce projet ; j'en demande le renvoi à une commission.
- La Chambre adopte cette proposition et charge le bureau de la nomination de la commission.
M. le président. - Nous sommes arrivés à l'article 48, « tir national ».
MM. Orts, De Fré et Van Humbeeck ont déposé un amendement qui constituerait un article 48bis. Cet amendement a été renvoyé à l'examen de la section centrale ; celle-ci s'est réunie, mais elle n'a pas terminé son travail ; son rapport ne pourra être déposé qu'à la séance de demain. Je vous propose donc de continuer la discussion de l'article 48, sauf à tenir en suspens l'article nouveau dont je viens de parler.
- Adopté.
M. De Fré. - Je n'assistais pas hier à la séance lorsque l'honorable M. Allard a fait une motion d'ordre.
L'honorable M. Allard a demandé l'impression du rapport de la commission qui a été nommée par M. le ministre de l'intérieur à l'effet de juger quel est le mérite de M. Fafchamps comme inventeur de la machine d'exhaure à traction directe.
La Chambre se rappelle qu'il y a eu un rapport de la commission des pétitions sur le mérite des prétentions de M. Fafchamps. M. Fafchamps s'était adressé à la Chambre à l'effet d'obtenir une récompense nationale ; mais M. Letoret, de son côté, soutenait que M. Fafchamps n'était pas l'auteur de la machine dont il s'agit ; mais que c'était lui qui en était l'inventeur.
J'ai été chargé par la commission des pétitions de faire un rapport. Ce rapport a été suivi d'une discussion.
Hier, l'honorable M. Allard, en demandant l'impression du travail de la commission nouvellement nommée par M. le ministre de l'intérieur, a dit ceci :
« Un rapport a été fait par l'honorable M. De Fré, et il faut avouer que, dans ce rapport, un autre honorable citoyen, qui a propagé aussi une machine à traction directe, a été plus ou moins maltraité. »
Je ne crois pas que la pensée de l'honorable M. Allard ait été bien rendue par ces mots. Le rapport auquel il fait allusion n'a pas le moins du monde maltraité M. Letoret, car il s'agit ici de M. Letoret. Le rapport a eu pour but de mettre en lumière le travail de deux commissions qui ont attribué, non à M. Letoret, mais à M. Fafchamps l'invention de la machine à traction directe.
Dans ce rapport que je viens de relire, il n'y a rien de désobligeant pour le sieur Letoret, et la conclusion qui lui est défavorable est puisée non pas dans la conscience ou l'intelligence du rapporteur, mais dans les documents officiels qui ont servi de base au rapport.
Je dois ajouter que M. Letoret a mieux apprécié le travail de la commission des pétitions ; il est venu nous voir ; il n'a pas trouvé qu'il fût maltraité. Tout ce que la commission des pétitions a décidé, nous a-t-il dit, est parfaitement juste eu égard aux pièces que la commission avait sous les yeux. Je rends hommage à la loyauté qu'elle a apportée dans cette affaire, je n'ai en aucune façon à me plaindre d'elle ; mais j'espère qu'en ce qui me concerne la vérité se fera jour plus tard.
Je prie l'honorable M. Allard de vouloir bien déclarer que les mots qui se trouvent consignés aux Annales parlementaires n'impliquent pas de sa part un blâme à l'adresse du rapporteur.
M. Allard. - Messieurs, hier en parcourant les Annales parlementaires je me suis aperçu que la veille on avait donné l'analyse d'une dépêche adressée par M. le ministre de l'intérieur relative à l'inventeur de la machine d'exhaure à traction directe ; je suis rentré dans la salle au moment où la séance allait être levée, et immédiatement j'ai demandé la parole pour faire la motion d'ordre dont vient de parler l'honorable M. De Fré ; il m'avait donc, on le conçoit, été impossible de revoir la discussion qui avait eu lieu, à la suite du rapport de l'honorable membre.
Il n'est pas entré dans ma pensée de jeter un blâme quelconque sur ce rapport, mais chacun se souvient que pendant la discussion de ce rapport qui a eu lieu au sein de la Chambre et ensuite dans les journaux, M. Letoret a été malmené. J'ai donc cru que dans l'intérêt de la vérité il était nécessaire d'ordonner l'impression des pièces parce qu'il me paraissait utile de savoir enfin qui était en réalité l'inventeur de la machine à traction directe, et si, oui ou non, M. Fafchamps a droit à une récompense nationale.
Je pense que mon honorable ami M. De Fré sera satisfait de cette explication.
M. le président. - L'incident est clos.
M. le président. - La Chambre en était restée hier à l'article 48.
« Art. 48. Tir national : fr. 25,000. »
- Adopté.
(page 90) Plusieurs voix. - Il y a un amendement.
M. le président. - L'amendement est réserve, le travail de la section centrale n'est pas terminé.
« Art. 49. Médailles ou récompenses pécuniaires pour actes de dévouement, de courage et d'humanité ; impression et calligraphie des diplômes, frais de distribution, etc. : fr. 8,000. »
- Adopté.
« Art. 50. Pensions de 250 francs en faveur des légionnaires, des décorés de la croix de Fer et des blessés de septembre peu favorisés de la fortune ; subsides à leurs veuves ou orphelins ; charge extraordinaire : fr. 200,000. »
M. le président. - M. le ministre de l'intérieur a proposé à cet article un paragraphe additionnel ainsi conçu :
« La somme qui, par suite des décès survenant parmi les pensionnés, deviendra pour chaque exercice sans emploi, sur le crédit de 200,000 francs, sera affectée :
« 1° A desservir de nouvelles pensions ;
« 2° A portera 125 francs les pensions des veuves ;
« 3° A augmenter les pensions des décorés de la croix de Fer et des blessés de septembre non décorés, jusqu'à ce qu'elles atteignent le chiffre maximum de 1,200 francs ;
« 4° A augmenter les pensions des veuves de décorés de la croix de Fer, proportionnellement à l'augmentation qui sera accordée aux décorés et blessés, jusqu'au chiffre maximum de 400 francs. »
La section centrale a proposé d'ajouter au dernier article, après les mots : « décorés de la croix de Fer », ceux-ci « et de blessés de septembre. »
Le gouvernement s'est rallié à cet amendement.
Le 4° se trouve conçu comme suit :
« 4° A augmenter les pensions des veuves de décorés de la croix de Fer et de blessés de septembre proportionnellement à l'augmentation qui sera accordée aux décorés et blessés jusqu'au chiffre maximum de 400 francs. »
M. Rodenbach. - Messieurs, l'honorable ministre a été heureusement inspiré quand il a ajouté ce paragraphe à l'article. Cela prouve en faveur de sa sollicitude à l'égard d'hommes qui, au prix de leur sang, ont contribué à fonder notre nationalité, et je remercie vivement M. le ministre de cette généreuse et noble pensée.
200,000 fr. sont répartis entre les blessés de septembre, les braves décorés de la croix de Fer et leurs veuves. Qu'on ajoute donc encore notamment à la pension des décorés de la croix de Fer la somme provenant des pensions devenues vacantes, de manière à lui faire atteindre plus tard un maximum de 1,200 fr., cette mesure qu'on pouvait attendre de la généreuse sollicitude de M. le ministre de l'intérieur, sera accueillie avec faveur par la Chambre, avec gratitude et transport par tout le pays.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si la nouvelle rédaction que j'ai proposée n'est pas combattue, je n'ai rien à dire pour la défendre. Je crois que le but qui a dirigé le gouvernement est compris par la Chambre. Nous voulons maintenir au budget comme dotation le crédit de 200,000 fr. et faire en sorte que ce crédit profite successivement à tous ceux qui ont rendu des services et dont les services ont pu être constatés ; ce sont les décorés elles blessés.
Le fonds de 200,000 fr. profitera successivement à tous les décorés et blessés. Seulement on peut déjà entrevoir l'époque où cette dotation se réduira de beaucoup et disparaîtra entièrement, puisque chaque jour entraîne malheureusement des décès des hommes de cette époque.
Il y a une addition proposée par la section centrale à laquelle je me rallie entièrement. Il s'agit d'assimiler les veuves des blessés aux veuves des décorés. Or, nous avons assimilé les blessés, non décorés de la croix de Fer aux décorés eux-mêmes, et il est juste que leurs veuves soient aussi assimilées aux veuves des décorés.
Je crois que d'ici à quelques années, la position de beaucoup d'hommes de 1830 et de beaucoup de veuves sera grandement améliorée et qu'on pourra successivement admettre à la pension des hommes qui, sans jouir d'une grande aisance, cependant ne seraient pas dans une position gênée.
M. Coomans. - Je désirerais obtenir un éclaircissement. Entre-t-il dans l'intention du gouvernement d'appliquer toujours dans son entier la somme de 200,000 fr. dont il s'agit ?
M. de Brouckere. - C'est un maximum.
M. Coomans. - C'est un maximum ; mais y a-t-il obligation pour le gouvernement de dépenser cette somme chaque année ?
M. de Brouckere. - Mais non !
M. Coomans. - Je ferai observer que c'est l'honorable M. Rogier que j'interroge et qu'il fait un geste tout opposé à la parole de l'honorable M. de Brouckere. J'applaudis à la pensée dont on entretient la Chambre, mais je désire savoir s'il est dans l'intention du gouvernement de dépenser chaque année intégralement la somme dont on autorise la dépense.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Oui.
M. Coomans. - L'honorable ministre me fait un signe d'assentiment. C'est donc une réponse claire donnée à ma demande qui est devenue claire aussi. Là-dessus je ferai observer qu'il pourrait venir un moment où les décorés et les blessés de septembre deviendraient riches, leur nombre, ce que je ne désire pas du tout, venant à diminuer considérablement.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il y a un maximum de 1,200 fr.
M. Coomans. - Ainsi il entre aussi dans la pensée du gouvernement d'appliquer cette somme de façon qu'a un certain jour donné, tous les décorés et blessés de septembre auront 1,200 fr. de rente, donnée à ces décorés. Je trouve, que c'est beaucoup.
M. Rodenbach. - Ce n'est pas trop.
M. Coomans. - Ce n'est pas beaucoup pour plusieurs ; mais c'est beaucoup pour tous.
Entendons-nous bien, messieurs, vous ne vous méprendrez pas sur ma pensée. Je dis qu'il y a parmi ces compatriotes beaucoup d'hommes qui méritent la pension de 1,200 fr., mais je n'admets pas que tous la méritent, eu égard àlia justice distributive, que nous devons respecter.
Je voudrais que le gouvernement fût investi du droit de juger en définitive s'il est convenable, s'il est équitable de donner à tous indistinctement les 1,200 francs, lorsque la situation des fonds le permettra.
Quant à moi, je doute que cela soit juste, et j'appelle sur ce point l'attention de M. le ministre.
Evidemment, messieurs, nous ne pouvons pas admettre que tous les participants au fonds y aient les mêmes titres ; il faudrait qu'il y eût une certaine limite et certaines règles, qu'il est difficile à la Chambre de fixer, mais que le gouvernement pourrait s'imposer.
M. de Brouckere. - Je voulais faire observer, messieurs, que l'interpellation de l'honorable préopinant était complètement inutile, à mon avis, car le projet du ministre y a répondu d'avance. L'honorable préopinant demande : « Est-ce que le gouvernement entend répartir la somme de 200,000 fr. entre les décorés et les blessés, quelque petit que soit leur nombre ? » Or, il y a un maximum dans l'amendement même ; il y est dit que chaque décoré ou blessé ne touchera jamais au-delà de ce maximum. Quant à moi, je déclare que j'approuve complètement l'amendement ; je trouve qu'il est parfaitement sage, parfaitement juste que, plus un décoré ou un blessé de septembre est avancé en âge, plus on lui donne des moyens d'existence suffisants.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, le fonds destiné aux blessés de septembre a toujours été administré d'une manière spéciale, je dirai d'une manière toute paternelle ; il continuera d'être administré de la même façon.
La Chambre paraît unanime pour maintenir comme dotation le chiffre de 200,000 fr. ; le gouvernement continuera à les distribuer en prenant en considération les titres et les besoins des décorés et des blessés.
Il admettra d'abord à la pension de 250 francs tous ceux qui lui paraîtront avoir des titres spéciaux à cette pension, et le gouvernement se propose d'aller assez loin dans cette catégorie de titulaires.
(page 91) Déjà un certain nombre d'hommes de la révolution jouissent de la pension de 250 fr., qui ne sont pas, je dois le dire, dans un état de grande gêne. Ensuite, messieurs, quand on aura épuisé cette série de titulaires à 250 fr., comme les décès vont toujours croissant, on augmentera la pension de 50 ou de 100 francs la première année, et successivement jusqu'à 1,200 fr., au maximum. Mais le nombre de pensionnaires à 1,200 fr. ne sera jamais considérable et ces pensionnaires ne jouiront pas longtemps de leur pension.
Nous procéderons de la même manière pour les veuves qui reçoivent aujourd'hui une misérable somme ; nous augmenterons aussi la pension des veuves jusqu'à concurrence de 400 fr.
Il viendra un temps où beaucoup d'hommes de la révolution jouiront de la pension...
M. Rodenbach. - Tant mieux !
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne vois pas pourquoi tous les décorés de la croix de Fer ne pourraient pas être admis à la pension avec le temps.
Quant à moi, je déclare dès maintenant que je ne refuserai la pension à aucun des décorés qui la demanderont.
M. Rodenbach. - Très bien !
M. Coomans. - Je désirerais savoir si, lorsque l'état du crédit le permettra, M. le ministre de l'intérieur accordera indistinctement 1,200 fr. de pension à tous les décorés et blessés qui la demanderont, ainsi que le texte de la loi y autorise le gouvernement.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Le gouvernement donnera toujours la préférence à ceux qui se trouveront dans le besoin.
M. Coomans. - Je suppose que M. le ministre de l'intérieur ait assez de fonds pour pensionner tous les décorés ; accordera-t-il 1,200 fr. à chacun indistinctement ? Je ne puis pas admettre cela. Nous avons de nombreux anciens fonctionnaires, civils et militaires, très méritants et pauvres, qui ne jouissent que d'une pension de 300 fr.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il est très probable que le ministère actuel n'aura pas à faire cette distribution ; mais, dans ma pensée, quand l'état du crédit le permettra, tous les décorés de la croix de Fer, qui en feront la demande, pourront jouir de la pension de 1,200 fr. Il n'y a pas seulement des décorés pour avoir versé leur sang dans les combats de la révolution ; mais il y a encore des décorés, et parmi eux d'anciens membres du Congrès, qui ont obtenu la croix de Fer pour avoir pris part aux luttes politiques de la révolution. Ceux-là méritent aussi une récompense ; et s'ils demandent la pension de 1,200 francs, dans, ma pensée, ils pourront l'obtenir dès que la situation du fonds de la dotation le permettra.
- Personne ne demandant plus la parole, l'article 50, avec le paragraphe additionnel proposé par le gouvernement et accueilli par la section centrale, est mis aux voix et adopté.
« Art. 51. Subside au fonds spécial des blessés de septembre et à leurs familles ; charge extraordinaire : fr. 22,000. »
- Adopté.
« Art. 52. Indemnité pour bestiaux abattus : fr. 150,000. »
M. De Lexhy. - Messieurs, on a reconnu depuis longtemps la nécessité de refondre la législation rurale. En effet, le Code rural de 1791, quoique élaboré à une époque où la féodalité avait cessé d'exister, a conservé néanmoins certaines traces du moyen âge.
Cette législation n'est plus en harmonie avec les besoins de la société actuelle. La nécessité d'une réforme est reconnue, non seulement en Belgique, mais en France. Le conseil d'Etat de ce dernier pays s'occupe actuellement de la révision de cette importante législation.
Une commission, chargée de préparer un projet de réforme, a été nommée en Belgique il y a quelques années, si je ne me trompe, par l'honorable M. de Decker. Depuis lors nous n'avons rien appris de ce qu'a fait cette commission. Je désirerais savoir si la commission a fonctionné et si elle a produit quelque chose. Je crains fort que l'institution d'une commission pour élaborer un projet semblable ne soit tout bonnement un décret de mort porté contre cette importante réforme.
Messieurs, il est un autre pointsur lequel je désire attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur et de la Chambre ; je veux parler de la loi du 18 janvier 1850, relative aux vices rédhibitoires des animaux domestiques.
Le but principal de cette loi a été de protéger les acheteurs, et il faut bien le reconnaître : la loi a tourné contre les vendeurs, c'est-à-dire contre les cultivateurs.
Il est surtout une disposition de cette loi (article 3) qui a ouvert la porte à de graves abus, abus dont les agriculteurs ont été les victimes. Cette disposition règle la compétence, la juridiction qui est appelée à trancher les différends, les litiges qui s'élèvent à propos des transactions ayant pour objet des animaux domestiques.
Cette disposition porte que le juge compétent est celui du lieu où l'animal se trouve.
Il en résulte de très graves abus. Il faudrait entrer dans de très longs détails pour faire apprécier le degré de fraude, d'escroquerie même, auquel on est arrivé.
Comme la question n'est pas connue encore, je réserve ces détails pour un temps plus opportun, mais le remède que je demande aux abus graves que je signale, c'est de changer la juridiction, d'établir la compétence du juge de l'endroit où la livraison de l'animal a eu lieu ou bien du domicile du vendeur.
Je crois qu'à l'aide de cette modification dans la loi de 1850 on arriverait à abolir un abus grave et à faire cesser des plaintes très légitimes et très fondées qui s'élèvent de toutes parts dans les arrondissements où l'on s'occupe spécialement de l'élève des chevaux de trait.
J'appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur ces observations et, s'il le désire, je lui communiquerai officieusement les données qui pourraient le mettre à même de réviser les dispositions de la loi de 1850, et pour le cas où il le jugerait convenable, je pourrais saisir la Chambre d'un projet de loi à cet égard.
Il est nécessaire de mettre un terme à l'exploitation systématique dont les cultivateurs sont victimes de la part des marchands étrangers. Il nous faut une réforme efficace, qui assure une protection égale pour le vendeur et l'acheteur, et qui restitue à nos transactions commerciales la sécurité dont elles ont besoin et que la loi actuelle leur a enlevée. Nos intérêts aussi bien que l'équité exigent cette modification à la loi du 18 janvier 1850.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je recevrai avec grand plaisir les renseignements que l'honorable préopinant veut bien m'offrir.
Quant à revenir immédiatement sur la loi relative aux vices rédhibitoires, il me semble que cette loi est encore trop récente pour que nous songions à la réformer.
Nous avons encore beaucoup de lois nouvelles à faire, et si nous allions nous occuper de refaire auparavant des lois dont l'existence ne remonte qu'à une dizaine d'années, nous n'en finirions jamais.
Il me semble qu'une loi doit avoir une certaine durée avant qu'on puisse songer à y introduire des modifications.
En ce qui touche le Code rural, je pense que mon honorable collègue de la justice s'en occupe. Il est toutefois un titre ou un chapitre important de ce Code qui concerne particulièrement le département de l'intérieur, celui relatif aux cours d'eau. Ce projet est terminé.
Je crois aussi que mon collègue de la justice est fort avancé dans ses travaux, mais il me serait impossible de dire dans quelle situation se trouve le projet de loi sur le Code rural. Quand M. le ministre de la justice sera ici, il pourra le dire à la Chambre.
M. De Lexhy. - Je remercie l'honorable ministre des renseignements qu'il vient de nous donner relativement au degré d'avancement des travaux du projet de révision de la législation rurale, et il ne me reste qu'à l'engager à stimuler le zèle de la commission, afin que nous puissions bientôt jouir des bienfaits d'une législation sage et rationnelle.
Je regrette de devoir déclarer que la réponse du ministre, quant aux modifications que je voudrais apporter à la loi du 18 janvier 1850, ne me satisfait aucunement. De ce que cette loi soit récente, ce n'est pas une raison pour la maintenir en vigueur, si l'on démontre à l’évidence qu'elle engendre des abus intolérables. Si je parviens à prouver les fraudes et les escroqueries dont les cultivateurs sont souvent victimes, il n'y aura pas un seul bon motif à alléguer pour laisser subsiste r la loi en question.
J'espère encore que M. le ministre voudra entreprendre cette révision partielle de laloi en question, dans l'intérêt des cultivateurs et que je ne serai pas forcé d'user de mon initiative pour arriver à la répression d'abus dont nous sommes victimes.
(page 92) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai pas parlé d'attendre de longues années.
M. De Lexhy. - Peu importe ; réprimons les abus.
- L'article 52 est adopté.
« Art. 53. Service vétérinaire : fr. 50,000. »
- Adopté.
« Art. 54. Traitements et indemnités du personnel du haras : fr. 39,150. »
- Adopté.
« Art. 55. Traitements et indemnités de disponibilité ; charge extraordinaire : fr. 1,600. »
- Adopté.
« Art. 56. Matériel du haras, frais de voyage du personnel et achat d'étalons : fr. 102,000. »
- Adopté.
« Art. 57. Amélioration de la race chevaline indigène ; exécution des règlements provinciaux sur la matière ; exécution des règlements provinciaux pour l'amélioration de la race bovine ; amélioration des espèces bovine, ovine et porcine : fr. 93,500. »
- Adopté.
« Art. 58. Conseil supérieur et commissions provinciales d'agriculture ; subsides pour concours et expositions ; encouragements aux sociétés et aux comices agricoles ; achats d'instruments aratoires nouveaux, destinés à servir de modèles ou à être distribués aux commissions d'agriculture, aux comices et sociétés agricoles ; achat de graines nouvelles à répartir par l'intermédiaire des commissions d'agriculture ; dépenses diverses : fr. 108,700. »
- Adopté.
« Art. 59. Enseignement professionnel de l'agriculture et de l'horticulture ; traitements de disponibilité : fr. 72,000.
« Charge extraordinaire : fr. 3,000. »
- Adopté.
M. H. Dumortier. - A l'occasion de 1a discussion du budget de l'intérieur, il ne sera peut-être pas inutile de dire quelques mots d'un genre d'institutions qui, sous des apparences très modestes, sont cependant, quand elles sont sérieusement entendues et pratiquées, sont destinées à rendre de très grands services à l'agriculture ; je veux parler des comices agricoles.
Il est remarquable, messieurs, que, dans certaines localités du pays, ces institutions, il faut bien le dire, ne rendent pas tous les services qu'on est en droit d'en attendre. Dans un pays de petite culture comme le nôtre, où les cultivateurs ne sont souvent pas à même de se livrer à des expériences quelquefois dispendieuses, il est nécessaire qu'ils se tiennent constamment au courant des progrès qui se font dans d'autres pays, et notamment en Angleterre,
Aujourd'hui, si l'agriculture veut rester au niveau des progrès que font les autres branches du travail national et notamment le commerce et l'industrie, il faut qu'elle sache au besoin hâter le pas, d'autant plus qu'à cause de l'isolement où elles se trouvent, le progrès pénètre moins rapidement dans les populations agricoles que dans celles qui se livrent au commerce et à l'industrie. Eh bien, les comices agricoles, ces intermédiaires entre la grande et la petite culture, sont destinés à répandre plus rapidement les progrès, jusque dans les villages les plus isolés.
Ce sont, si je puis m'exprimer ainsi, des foyers où vient se concentrer tout ce qui est expérience et progrès, tout ce qui a été reconnu avantageux dans d'autres pays, pour le refléter sur toutes les parties du territoire.
Il faut bien le dire, les comices agricoles ne sont pas, en général, pris assez au sérieux. Cela est d'autant plus étonnant que jamais les intérêts de l'agriculture ne seront mieux défendus que, lorsqu'elle se chargera de les défendre.
Toutes les branches du travail national ont une représentation spéciale ; le commerce et l'industrie sont représentés par les chambres de commerce ; les professions libérales, les sciences et les arts, ont également leur représentation particulière au sein des académies, etc. ; et c'est au sein de leurs représentations que viennent surgir toutes les questions dignes de fixer l'attention du gouvernement et dans lesquelles le gouvernement puise les éléments de mesures reconnues utiles et nécessaires qu'il vient ensuite soumettre aux délibérations des Chambres.
Si l'agriculture veut que le gouvernement et les Chambres s'occupent avec la sollicitude constante qu'elle mérite, de tous les objets qui la concernent, il faut qu'elle élabore elle-même toutes les questions dont elle désire la solution ; il faut, en un mot, qu'elle sache saisir la main qu'on lui tend.
Le moyen qui devrait être mis en pratique pour faire sortir un certain nombre de comices de la torpeur dans laquelle ils végètent, serait, selon moi, de donner une plus grande publicité à leurs travaux.
Les questions du plus haut intérêt sont discutées dans les comices agricoles ; mais souvent ce travail ne recevant guère de publicité, les cultivateurs s'imaginent que ces institutions n'existent en quelque sorte que pour la forme et qu'elles ne s'occupent pas de choses très importantes.
Le gouvernement a cru, depuis quelque temps, qu'il pourrait contribuer également à donner une impulsion plus vive au développement nouveau du travail des comices, en créant une espèce de fédération entre les divers comices d'une même province.
Au premier abord, ce moyen paraît devoir produire de bons résultats.
Cependant, messieurs, dans la province à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir, les comices se sont généralement prononcés contre cette centralisation. A une ou deux exceptions près, ils ont préféré conserver leur indépendance pour proposer les mesures qu'ils croiraient utiles dans l'intérêt de l'agriculture. Cependant le département de l'intérieur a de nouveau vivement insisté pour que cette centralisation fût organisée.
Je me permettrai de soumettre à M. le ministre de l'intérieur cette réflexion que tant vaut le bureau d'un comice, tant vaut le comice lui-même.
Si le bureau est composé d'hommes zélés, le comice fera des travaux ; si, au contraire, le bureau est composé de personnes qui n'acceptent leur mandat que pour la forme, le comice végétera. Or, voici ce qu'il y a à craindre : c'est que si l'on décrète cette centralisation contrairement même à l'avis des comices, les bureaux des comices ne continueront plus à s'occuper désormais avec la même sollicitude des intérêts leur sont confiés, ils croiront perdre leur indépendance en se fondant dans la fédération provinciale.
A tort ou à raison beaucoup de ces comices s'imaginent que, du moment qu'ils ne feront plus qu'une section de cette fédération dont le centre est placé au gouvernement provincial, ils n'auront plus aucune liberté d'action. Si un comice trouve utile d'organiser cette année un concours, une exposition qu'il juge utile, Je gouvernement provincial pourra l'en empêcher sous prétexte que ces mesures sont inopportunes en se réservant la faculté de faire organiser ces concours, ces expositions, un peu selon son bon plaisir.
Voilà ce qui a engagé beaucoup de comices de la Flandre occidentale à ne pas se rallier à la proposition de M. le ministre de l'intérieur. Je ne dis pas que toutes ces raisons soient également fondées. Le seul motif qui m'a engagé à prendre la parole, c'est d'inviter M. le ministre, avant de décréter cette fédération, à y réfléchir très mûrement, et à ne pas l'imposer aux provinces dont les comices se seraient déclarés, à l'unanimité ou à peu près, contre ce genre d'organisation.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Les comices agricoles dans leur organisation primitive ont été considérés dans beaucoup de localités comme incapables d'atteindre le but pour lequel ils avaient été institués ; un assez grand nombre de petits comices ne réunissaient pas assez de membres, par suite assez de ressources financières, pour donner une extension suffisante à leurs expositions et offrir des prix assez importants pour attirer les exposants.
Dans Jl province de Liège on a senti tout d'abord la nécessité de fortifier l'action des comices en les confédérant, en les associant ; de cette manière chaque comice associé a trouvé dans la confédération la force qui lui manquait quand il était réduit à ses seules ressources, quand il était isolé.
Voilà ce qui s'est passé dans la province de Liège, c'est cette province qui a servi de type pour les autres. Les comices y forment une association générale où ils sont représentés par des délégués.
Cette association générale désigne chaque année les comices qui feront des expositions et leur alloue une somme destinée à couvrir les frais de l'exposition ; tous les comices ne font pas des expositions tous les ans, mais ils sont à tour de rôle appelés à organiser une exposition sous la direction de l'association générale.
On a trouvé dans la province de Liège que cette organisation donnait les meilleurs résultats ; on n'a pas tardé à l'étendre à d'autres provinces.
(page 93) Dans certaines localités on a rencontré de la résistance ; il est à remarquer que cette opposition ne s'est pas produite dans des ressorts pauvres, mais dans des ressorts riches ou les comices se sont trouvés assez puissants pour faire eux-mêmes leurs affaires. Ils ont dit : Nous sommes en mesure de faire des expositions complètes, nous n'avons pas besoin de nous fortifier par notre réunion à d'autres comices, nous voulons rester indépendants. On les a laissés libres de ne pas s'associer.
Le gouvernement tend à étendre l'organisation qui a réussi dans la province de Liège ; il pousse les comices à s'associer, pour que leur action soit plus puissante.
Dans la province de la Flandre occidentale deux comices, celui de Waereghem et celui d'Ypres ont refusé de s'assurer, c'est ce dernier peut-être qui a déterminé le discours de l'honorable membre.
Je ne sais pas si celui d'Ypres a persisté à vouloir rester indépendant, il est riche, il pourra se passer des subsides de l'Etat.
Le gouvernement continuera à accorder des subsides aux comices qui s'associeront, parce qu'il croit qu'il y a grand avantage à ce que les comices s'associent. En agriculture comme pour beaucoup d'autres intérêts, l'association rend de grands services, et ses avantages commencent à être compris non seulement par les agriculteurs, mais par les horticulteurs.
Nous avons vu se former une grande confédération des horticulteurs, et quant à nous, nous pousserons autant que possible à l'association plutôt qu'à l'isolement.
M. H. Dumortier. - Je ne reviendrai pas sur les observations que j'ai présentées ; je n'ai demandé la parole que pour rectifier un fait. M. le ministre a dit qu'il n'y a qu'un seul comice de la Flandre occidentale qui avait voulu conserver son indépendance ; M. le ministre est dans l'erreur ; dans la dernière réunion qui a eu lieu au gouvernement provincial, tous les comices, à l'exception de ceux de Bruges et de Thielt, se sont prononcés contre le mode d'organisation proposé.
Je ne nie pas la grande puissance de l'association dans toutes les branches de l'activité sociale ; mais c'est là une puissance dont l'utilité dépend de l'usage qu'on en fait.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne force la main à aucun.
M. H. Dumortier. - n a dit que si dans les comices on ne consentait pas à s'associer, le ministre décréterait très probablement lui-même cette organisation. Je suis loin de la critiquer d'une manière absolue, mais il ne faut pas l'imposer. En supposant que des comices ne disposent pas chaque année d'assez de moyens financiers pour organiser des expositions et y attirer un concours considérable de cultivateurs par les primes offertes, il n'est pas besoin, pour cela, de recourir à cette fédération ; quand nous pourrons faire les frais d'une exposition et disposer de récompenses suffisantes, nous l'organiserons ; les comices comprennent fort bien que si, chaque année, on organisait des expositions, des concours, on finirait bientôt par user ce mode de propagande et d'émulation. Nous sommes obligés, par la force des choses, d'alterner, de laisser écouler un ou deux ans après un concours avant d'en organiser un autre.
Si un comice, au moyen des cotisations que s'imposent ses membres, et des subsides qu'ils auront réunis pendant cet intervalle, peut offrir des récompenses de quelque valeur, il attirera des concurrents, et le but que se propose le ministre sera atteint, sans avoir besoin pour cela de confédération.
L'honorable ministre a dit que ce système de fédération avait son origine dans la province de Liège. Je ne conteste pas qu'il se fasse de très bonnes choses dans cette province en fai't d'agriculture comme en fait d'industrie, et en d'autres choses. Mais je ne crois pas qu'en cette matière les exemples pour la Flandre doivent venir de la province de Liège.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Le système a été adopté généralement dans tout le pays.
M. A. Vandenpeereboom. - On ne peut nier que le principe de l'association ne soit une excellente chose. Mais les meilleurs principes ne peuvent pas, ne doivent pas toujours être appliqués . Aux meilleures règles il est quelquefois des exemptions.
Je crois qu'en matière d'agriculture il ne faut pas adopter de principe absolu et qu'il ne faut pas pousser trop rigoureusement les comices à entrer dans la fédération que le gouvernement paraît affectionner beaucoup. Je crois qu'en fait de comices comme en toute chose, il faut laisser une certaine liberté et une certaine action, si je puis parler ainsi, individuelle.
Ainsi on a parlé du comice d'Ypres. Dans cet arrondissement existe une société d'agriculture qui tient lieu de comice. Cette société marche parfaitement bien. Elle compte un nombre de membres considérables, des agriculteurs et de véritables agriculteurs, qui viennent de la campagne assister aux conférences de cette association agricole.
Cette association agricole, et c'est peut-être la seule en Flandre, a un bulletin qui se distribue dans les communes rurales aux cultivateurs et qui est imprimé dans les deux langues.
Cette association a des expositions.
En un mot, c'est une des associations qui marchent le mieux, sinon dans tout le pays, au moins dans la province de la Flandre occidentale.
Je vous le demande, pourquoi, dans une pareille situation, faudrait-il pousser ces associations qui marchent très régulièrement, pourquoi faudrait-il les forcer en quelque sorte à se fondre dans un grand tout qui jusqu'ici a très peu de cohérence et ne marche pas du tout. Car les fédérations qu'on a cherché à faire jusqu'ici, dans notre province au moins, ont eu extrêmement peu de résultat, tandis que nous avons quelques comices, quelques associations agricoles qui répondent à tous les besoins.
Il me semble que parce que ces sociétés marchent bien et régulièrement, ce n'est pas une raison pour les déshériter et leur retirer des subsides. Ils marchent bien, d'abord parce qu'il y a une direction intelligente qui préside à leurs travaux et ensuite parce qu'ils comptant un grand nombre de membres. Mais ils marchent bien aussi, parce que par suite des subsides que le gouvernement donne à ces associations comme aux autres comices, elles trouvent des ressources suffisantes pour faire face à leurs utiles dépenses.
Je crois donc qu'il ne faut pas pousser dans la fédération des associations qui sont prospères, et que d'un autre côté, parce qu'elles marchent bien, il n'y a pas lieu de les priver des moyens qui leur permettent de marcher mieux que d'autres.
M. Van Overloop. - Je ne sais pas si le système de fédération vaut mieux que le système actuel, mais ce que je sais, c’est que M. le ministre de l'intérieur est complètement dans l'erreur lorsqu'il avance qu'on laisse aux comices agricoles la liberté de vivre dans l'état de séparation. D’après ce qui s'est passé dans la Flandre orientale, je puis faire connaître à M. le ministre en quoi il se trompe.
Un comice de la Flandre orientale avait décidé formellement de ne pas faire partie de la fédération. Ce comice avait délégué deux membres à la réunion qui devait avoir lieu dans la capitale de la province. Ces deux membres étaient chargés de soutenir la nécessité de maintenir l'existence individuelle, en dehors de la fédération, de ce comice.
Qu'a fait l'administration supérieure de la province ? En vertu d'un droit qu'elle s'était réservé, elle a nommé, dans ce même comice agricole, trois membres pris dans la minorité, c'est-à-dire parmi les partisans de l'idée gouvernementale, de l'idée de la fédération, de sorte que lorsqu'on est arrivé au vote, il s'est trouvé cinq membres de ce comice pour y prendre part, qu'il y a eu 3 voix contre 2 en faveur du projet du gouvernement, et qu'on a dit qu'un comice hostile au projet de fédération s'était au contraire rallié à ce projet.
Voilà donc un comice qui, dans une réunion spéciale, examine la question de savoir s'il convient d'admettre le système fédératif, ou s'il convient de rester à l'état non fédéré, qui se prononce contre le système de fédération et qui passe pour en avoir été partisan. (Interruption.)
On me dit qu'avec ce système, ce comice a été annexé malgré lui. Je trouve l'idée assez juste.
Je le répète, je ne me prononce ni contre le système fédératif ni contre le système de séparation, quoique en principe je crois que les petites associations valent mieux que les grandes : on est beaucoup plus énergique dans les petites sociétés que dans les grandes. Mais la conséquence de ce qui s'est passé pour le comice dont je parle, c'est que plusieurs cultivateurs intelligents qui faisaient partie du comice tel qu'il était organisé, ont donné leur démission et ne font plus partie du comice. Eh bien, c'est là une conséquence regrettable.
Je crois avec l'honorable M. A. Vandenpeereboom qu'aucun système n'est bon d'une manière absolue. Tout cela dépend des circonstances. Il faut laisser la plus grande somme de liberté possible aux localités. On réalisera ainsi des effets qu'on n'obtiendrait pas en parlant de principes absolus.
Je n'ai pris la parole que pour faire connaître à M. le ministre de l'intérieur un fait qui, j'en suis à certain, n'était pas à sa connaissance et (page 94) qu'il ne doit pas approuver, puisqu'il vient de dire que les comices qui voulaient rester libres et indépendants le pouvaient.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je tiens à constater que la plus grande liberté règne dans les relations des comices avec le gouvernement. Ce sont des associations libres qui n'ont de liens avec le gouvernement que par les subsides qu'elles demandent.
Maintenant le gouvernement a cru qu'il serait utile que les comices isolés, impuissants, trouvassent la force que leur manque dans l'association, et presque partout, dans le pays, les comices ont trouvé utile de s'associer, sans abdiquer leur indépendance, ils conservent pour cela leur indépendance, leur action propre ; mais ils se réunissent pour former une direction centrale ; ils trouvent plus de puissance, plus de force dans l'association.
On n'a pas forcé le comice d'Ypres à s'associer. Celui-là est puissant. Il n'a pas besoin du concours des autres comices. Il n'a pas besoin, semble-tijl, d'une espèce de patronage supérieur.
M. H. Dumortier. - Recevra-t-il encore des subsides du gouvernement ?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - On vient de vous dire qu'il était très riche, très puissant, dès lors je pense qu'il n'est pas nécessaire de lui donner un subside ; mais il faut venir en aide aux comices des petites localités qui n'ont pas cette puissance du comice de la ville d'Ypres.
Au moyen de l'association des comices, on parvient à fonder de grandes fédérations qui peuvent réaliser ce qui est impossible à de petits comices isolés.
Ce n'est pas seulement le comice d'Ypres qui possède des journaux ; nous avons un grand nombre de journaux publiés par des comices réunis.
Ainsi, messieurs, nous ne forçons pas les comices à s'associer, mais il va de soi que quand un comice est assez puissant pour vivre de sa propre vie, il n'a plus autant besoin de l'aide du gouvernement
Toutefois la société d'Ypres n'a pas eu à se plaindre sous ce rapport ; car même après avoir refusé de se fédérer, elle a encore reçu des subsides.
M. A. Vandenpeereboom. - Je suis parfaitement d'accord avec M. le ministre de l'intérieur, lorsqu'il dit que l'association agricole d'Ypres marche parfaitement et rend de grands services, mais je ne suis plus d'accord avec l'honorable ministre lorsqu'il dit que cette association jouit d'une prospérité telle, qu'elle n'a plus besoin de subsides de l'Etat.
J'ai dit que si l'association de l'arrondissement d'Ypres est prospère c'est pour deux motifs ; d'abord l'intelligence des personnes qui la dirigent, ensuite le concours bienveillant de l'Etat.
Ces deux causes réunies permettent à l'association de remplir son but et de progresser, mais si l'une d'elles disparaissait, l'association serait entravée dans son action. En retirant le subside du gouvernement M. le ministre pratiquerait une espèce d'annexion indirecte par famine, annexion qui serait tout aussi injuste que celle par la force.
Je prie donc M. le ministre de l'intérieur de continuer à l'association non pas de la ville, mais de l'arrondissement d'Ypres, les preuves de bienveillance qu'il lui a données jusqu'ici et alors je puis assurer que cette association continuera à rendre à l'agriculture les services qu'elle a droit d'attendre d'elle.
-- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art 59. Enseignement professionnel de l'agriculture et de l'horticulture ; traitements de disponibilité. Charge ordinaire, 72,000 fr.
« Charge extraordinaire : fr. 3,000. »
M. le président. - M. le ministre de l'intérieur a annoncé que dans le but de ne pas retarder la discussion du budget, il soumettrait à la section centrale quelques modifications qu'il désirait proposer. M. le ministre a soumis aujourd'hui ces modifications à la section centrale ; toutes ont été approuvées ; il sera fait rapport demain sur les points qui présentent quelque importance ; quant aux autres, je me propose de les indiquer à mesure que nous arriverons aux articles auxquels ils se rapportent.
Ainsi, messieurs, le gouvernement propose de porter le chiffre de 72,000 fr. de l'article 59 à 98,000 fr. L'augmentation est proposée en exécution de la loi relative à l'enseignement agricole.
- L'article est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 98,000 fr.
« Art. 60. Service des défrichements en Campine, charge extraordinaire : fr. 25,100. »
- Adopté.
« Art. 61. Mesures relatives aux défrichements, dépenses et indemnités nécessitées par le contrôle établi pour assurer l'exécution de la loi du 25 mars 1847, charge extraordinaire : fr. 60,000. »
- Adopté.
« Art. 62. Personnel enseignant, administratif, et gens de service de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat : fr. 60,800. »
- Adopté.
« Art. 63. Matériel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat ; travaux d'entretien, de réparation, de construction ; jury vétérinaire : fr. 56,700.
« Charge extraordinaire : fr. 12,500. »
- Adopté.
« Art. 64. Subside à la société d'Horticulture de Bruxelles : fr. 24,000. »
M. Coomans. - Messieurs, depuis nombre d'années, on a révoqué en doute, sur divers bancs de cette Chambre, l'utilité de maintenir ce subside, assez élevé ; le gouvernement a toujours répondu qu'il était engagé envers la société d'Horticulture.
Je désirerais savoir quand on compte laisser expirer cet engagement, et j'espère que le gouvernement ne le renouvellera pas sans l'assentiment préalable des Chambres. Il nous semble, messieurs, qu'à propos du renouvellement du subside, on pourrait engager la société d'Horticulture à rendre plus de services au public qu'elle ne le fait maintenant.
Le subside est assez élevé, 2,000 francs par mois pour mettre le jardina la disposition du public, trois jours par semaine, quelques heures seulement, à la disposition d'un public très peu nombreux.
Je ne repousse pas en principe un subside alloué à la société d'Horticulture, mais je voudrais que le jardin fût rendu plus accessible au public. Que l'on y pratique au moins une deuxième porte. Depuis qu'on a supprimé les remparts de l'octroi, il serait facile de pratiquer une ou deux ouvertures nouvelles.
Je n'ai jamais été de ceux qui repoussaient absolument le subside, mais je ne pourrais pas en voter le renouvellement on dehors des conditions que je viens d'indiquer.
Ce que je demande aujourd'hui, messieurs, je l'ai demandé depuis plusieurs années.
M. Dolez. - C'est dans le rapport de la section centrale.
M. Coomans. - Oui, le contrat y est. Je me borne donc à recommander les améliorations dont je viens d'entretenir sommairement la Chambre.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art. 65. Encouragements pour l'amélioration de la voirie vicinale et indemnités aux commissaires voyers : fr. 695,000. »
La section centrale propose de porter ce crédit à un million et de libeller l'article comme suit :
« a. Encouragements divers pour l'amélioration de la voirie vicinale : fr. 980,000. »
« b. Indemnités aux commissaires voyers : fr. 20,000. »
M. le président. - M. le ministre se rallie-t-il à la proposition de la section centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - M. le président, je dois maintenir les propositions du gouvernement.
Messieurs, lorsque les Chambres, qui sont chargées d'examiner les budgets, de les contrôler, de les réduire, plutôt que de les accroître, prennent l'initiative des dépenses, les rôles sont en quelque sorte intervertis. Il est difficile à un chef d'administration de combattre les augmentations de crédit proposées à son budget, surtout lorsque le crédit porte sur une branche du service qui a toutes les sympathies du gouvernement. Mais, messieurs, le but que poursuit la section centrale ne peut-il pas être atteint par un moyen autre que l'augmentation permanente du crédit au budget de l'intérieur ? Il a été fait plusieurs fois usage d'un autre procédé.
Depuis 1841, époque à laquelle on a proposé pour la première fois au budget un crédit de 100,000 fr. pour la voirie vicinale, le chiffre s'est successivement accru, et aujourd'hui le crédit normal porté dans le budget est de 700,000 fr.
(page 95) Indépendamment de ce chiffre assez considérable, la Chambre a voté à diverses époques, des crédits extraordinaires, tantôt d'un million, tantôt de deux millions, de telle sorte que, depuis 1841, l'Etat a dépensé 12 millions.
Or, les dépenses faites par l'Etat pour la voirie vicinale doivent, au point de vue de la dépense totale, être multipliées par35 ou 4 ; ainsi, 12 millions, alloués par l'Etat, supposent une dépense totale de près de 40 millions consacrés à la voirie vicinale.
Aussi nous pouvons constater les progrès véritablement étonnants qu'a faits cette branche d'administration depuis un certain nombre d'années.
Ce n'est pas aller trop loin que de dire que nous avons approprié ou construit près de 2,000 lieues de chemins vicinaux.
Il reste encore beaucoup à construire. On achève en ce moment une carte générale du pays au point de vue de la voirie vicinale ; et on est étonné des dépenses considérables qui doivent encore être faites. Cependant, si nous continuons à marcher du même pas, si l'Etat consacre encore à cet objet, chaque année, 1,000,000 ou 1,200,000 fr., ce qui me représente une dépense générale de 4 millions, nous aurons, avant quinze ans, complété le réseau de notre voirie vicinale, et, sous ce rapport, la Belgique sera un pays modèle.
Messieurs, nous ne pouvons avoir la prétention de faire tout à la fois. Nous allons d'un pas assez rapide. Il faut tenir compte aussi de cette circonstance, qu'avant que le gouvernement fasse application des crédits du budget, il faut que les particuliers, les communes et les provinces puissent aussi se mettre en mesure de couvrir leur part de dépenses qui leur incombe. Or, si l'allocation du gouvernement était tout à coup très élevée, voici ce qui arriverait : ou les communes ne pourraient pas suivre ce mouvement progressif, aller aussi vite que le gouvernement ; ou bien, elles s'abstiendraient de contribuer dans les frais, et le budget de l'Etat supposerait des dépenses qui, en bonne justice, incombent d'abord aux communes.
Messieurs, pour éviter cet inconvénient, je crois qu'il serait plus prudent de suivre la marche que nous avons suivie jusqu'ici. Nous épuisons les allocations du budget, et tous les 2 ou 3 ans, nous venons demander des crédits extraordinaires d'un million ou de 2 millions, pour faire face aux besoins extraordinaires.
Le résultat est absolument le même. Mais au moins nous marchons d'un pas plus sûr, nous voyons mieux ce que nous faisons.
Il y a une observation à faire encore. Depuis quelques années, lorsque nous proposons des crédits extraordinaires pour la voirie vicinale, nous y joignons la demande d'un crédit extraordinaire pour les travaux d'assainissement. Ces travaux ont autant d'importance que ceux de la voirie vicinale, et chaque année, les communes comprennent de plus en plus la haute importance des travaux d'assainissement.
Si nous portons au budget de l'Etat un million exclusivement consacré à la voirie vicinale, nous mettons en quelque sorte l'administration dans l'impossibilité de rien demander pour les travaux d'assainissement. Si, au contraire on continue ce qui est devenu une sorte d'habitude, de demander, à certaines époques, des crédits extraordinaires pour la voirie vicinale et pour les travaux d'assainissement, je crois que nous sommes plus assurés d'obtenir des Chambres les crédits relatifs aux travaux d'assainissement et auxquels nous devons attacher beaucoup d'importance.
Qu'on soit certain ; le gouvernement ne sera pas en retard de faire ce qui doit être fait pour la voirie vicinale ; nous attachons le plus grand prix à développer tous nos travaux de voirie vicinale et sous ce rapport aucun ministère ne sera jamais négligent.
Il est très probable que dans le courant de cette session nous viendrons demander des crédits extraordinaires pour la voirie vicinale et pour les travaux d'assainissement.
Je demande qu'à la suite de ces explications, la section centrale n'insiste pas pour porter tout d'un coup à un million le chiffre proposé par le gouvernement.
M. d'Hoffschmidt. - Messieurs, l'honorable rapporteur de la section centrale qui siège pics de moi est atteint, en ce moment, d'une extinction de voix qui l'empêche de prendre la parole dans cette discussion. Il m'a donc engagé à faire valoir quelques considérations en faveur de la proposition de la section centrale. Ces considérations sont d'ailleurs parfaitement développées dans le rapport que vous avez sous les yeux.
M. le ministre de l'intérieur a admis l'utilité de l'augmentation du chiffre ; cela résulte de la réponse qu'il a faite à la section centrale.
L'honorable ministre n'est en dissentiment avec la section centrale que sur ce point : c'est qu'il préfère obtenir de la Chambre des crédits extraordinaires pour la voirie vicinale, à voir le chiffre fixé définitivement à 1 million dans le budget même.
Messieurs, il y a cependant des considérations qui ont été présentées par l'honorable rapporteur et la section centrale, et qui militent en faveur de l'augmentation du chiffre jusqu'à concurrence d'un million.
Si ce chiffre est adopté, les communes et l'administration supérieure elle-même sauront parfaitement ce dont elles peuvent disposer chaque année ; des mesures d'ensemble seront prises en conséquence, et l'on pourra ainsi marcher d'une manière beaucoup plus efficace et plus régulière que si l'on restait incertain sur les crédits extraordinaires.
En effet, si les augmentations de crédit que l'administration de l'intérieur trouve utiles pour les chemins vicinaux ne sont votées que de temps en temps, cet ensemble de mesures ne pourrait pas été pris.
Maintenant une dotation d'un million de francs pour un intérêt aussi grand que celui des chemins vicinaux est-elle exagérée ?
A la vérité, ce n'est pas le rôle de la Chambre d'augmenter les crédits proposés par le gouvernement, mais la proposition de porter ce crédit à un million a déjà été présentée bien des fois.
Nous pourrions d'autant mieux augmenter le crédit demandé pour cet objet que, dans un avenir peu éloigné, l'Etat sera arrivé au terme des grands sacrifices qu'il a faits jusqu'ici pour l'exécution d'un grand réseau de voies de communication.
Ainsi pour le chemin de fer de l'Etat on se trouve à peu près à la fin des dépenses à faire pour compléter ce grand travail.
Je ne pense pas que le département des travaux publics ait encore de fortes dépenses à proposer pour le chemin de fer de l'Etat, si ce n'est pour l'augmentation du matériel ; mais l'accroissement du matériel est un signe de prospérité pour le chemin de fer.
Il en est de même pour les canaux. Je crois que quand on aura terminé le travail nécessaire encore pour l'amélioration de la navigation de la Meuse, il restera très peu d'ouvrages de canalisation à exécuter.
Pour les routes ordinaires, il semble aussi que l'on soit bien près du terme des grandes dépenses à faire à cet égard. Nous avons dépensé près de 400 millions pour travaux d'utilité publique et c'est un titre de gloire pour le pays. Je crois que de chef il n'y aura plus de sommes bien importantes à voter.
Ce n'est pas que j'entende dire qu'il n'y ait plus rien à faire, car il restera toujours des travaux complémentaires à exécuter ; mais les grosses dépenses sont faites pour le chemin de fer de l'Etat, il en est de même pour les canaux et pour les routes ordinaires.
Dès lors une somme un peu plus considérable pourrait être allouée aux chemins vicinaux.
L'intérêt de l'agriculture le réclame. Je m'empresse de reconnaître que M. le ministre de l'intérieur y met un zèle auquel chacun rendra justice.
Messieurs, ce n'est pas seulement la section centrale qui a réclamé une augmentation du chiffre destiné aux chemins vicinaux. Le conseil supérieur d'agriculture a émis un vœu analogue et la plupart des comités agricoles dont on a parlé tout à l'heure sont du même avis.
Il ne s'agit, du reste, que de décider si l'on doit porter définitivement le crédit à 2 millions, ou s'il faut plutôt adopter le système proposé tout à l'heure par M. le ministre de l'intérieur, d'avoir recours quelquefois à des crédits extraordinaires. Je crois que telle est, en résumé, la question qui est en ce moment soumise à la Chambre.
M. De Lexhy. - Messieurs, je viens appuyer de toutes mes forces la proposition de la section centrale consistant à porter la dotation de la voirie vicinale, de 700 mille francs à un million.
Les bonnes écoles et les bons chemins sont les deux sources fécondes, les deux causes du bien-être moral et matériel dans les campagnes.
Cette grande pensée a été non seulement comprise mais largement exécutée par l'honorable M. Rogier, à qui les campagnes sont redevables de si grandes et si utiles institutions. C'est parce que cet homme d'Etat, l'un des auteurs de la loi sur la voirie vicinale, a mis à exécution cette grande pensée, que je viens faire un nouvel appel à ses sympathies pour les campagnes, et que j'ai l'espoir fondé que l'on ne fera pas un vain appel à ses sentiments généreux. J'ai la conviction que M. le ministre, malgré les déclarations qu'il vient de faire, en acquit de son devoir de ministre, ne sera pas hostile systématiquement à la proposition de la section centrale.
Au fond la section centrale et le ministre me paraissent être d'accord. En effet, que l'on n'accorde qu'un crédit fixe de 700 mille francs et (page 96) en y ajoutant périodiquement des crédits extraordinaires parfois considérables pour arriver à une moyenne d'un million par année, ou bien que l'on accorde un crédit fixe d'un million, c'est tout à fait la même chose : le chiffre est le même ; mais les résultats ne sont pas les mêmes, et c'est en quoi la divergence d'opinion apparaît. M. le ministre prétend qu'il est préférable de maintenir le crédit de 700 mille francs sauf à y ajouter des crédits extraordinaires qui représentent, en somme la différence entre le crédit actuel et le crédit de la section centrale'. Cette dernière est d'un avis contraire, et je pense qu'elle est dans la vérité.
Le mode proposé par la section centrale produirait des résultats plus certains, plus palpables et plus réels. En effet, lorsque la dotation de la voirie vicinale sera fixée, les communes et les provinces sauront à quoi s'en tenir et régleront leurs budgets en conséquence. Elles auront soin d'augmenter le contingent destiné à ce service public, afin d'accroître leur part dans l'accroissement de la dotation.
Qu'arrive-t-il quand un crédit extraordinaire est accordé ? C'est que ni les communes, ni les provinces ne font le moindre sacrifice, de leur côté, pour participer à ce bienfait, tandis que, dans l'hypothèse contraire, elles s'imposent des charges permanentes équivalentes, dans l'intérêt de l'amélioration de la voirie.
Voilà pourquoi le système de la section centrale est préférable à celui du ministre.de l'intérieur.
Je n'insisterai pas davantage sur un point qui me paraît parfaitement clair.
M. le ministre a exprimé une crainte, c'est que si l'on portait au budget un crédit fixe d'un million, les communes ne voulussent plus solliciter de subsides, de peur de devoir participer aux dépenses dans une proportion trop considérable. C'est là une crainte chimérique. Les communes appréciant les bienfaits des subsides considérables qui leur seront départis, s'empresseront de s'imposer des charges plus lourdes, afin de pouvoir participer aux subsides, dans une proportion plus large. Les communes rurales possèdent trop bien l'intelligence de leurs intérêts, pour ne pas savoir que, pour obtenir beaucoup, il faut donner beaucoup. Mais alors même qu'elles ne le feraient pas, pourquoi le gouvernement, pour venir en aide aux localités dont les finances sont mauvaises, pourquoi, dis-je, le gouvernement ne changerait-il point la proportion de son intervention dans la dépense totale ?
Quel mal y aurait-il à ce que la proportion actuelle fût changée ? Quant à moi, je n'y vois aucun inconvénient : car la proportion actuelle n'est pas quelque chose de sacré et d'immuable.
Nous trouvant d'accord sur le fond et ne différant d'opinion que sur le mode d'octroi des subsides, soit à titre de crédit définitif, soit de crédit définitif et de crédit extraordinaire, je crois que l'honorable ministre de l'intérieur voudra donner aux campagnes une nouvelle preuve de sa constante sollicitude pour leurs intérêts, en se ralliant à la proposition de la section centrale. J'espère également que la Chambre voudra contribuer à donner une impulsion plus vigoureuse à une des sources de la richesse dans les campagnes et partant de la richesse nationale. Si l'augmentation du crédit de la voirie vicinale exige la création de ressources nouvelles, on nous trouvera disposés à voter des ressources, dans la mesure de l'augmentation de crédit qui nous sera accordée.
M. H. Dumortier. - Je désire présenter une simple observation qui ne porte pas tant sur l'importance du crédit que sur le mode de répartition.
Je serai toujours disposé à voter des subsides dans des bornes raisonnables et les plus élevés possibles en faveur de l'agriculture, mais le tout n'est pas de voter les subsides, il faut tenir à ce qu'ils soient répartis d'une manière juste, équitable, impartiale.
Je ne veux pas ici faire de récriminations, dire que telle commune a été exclue tandis que telle autre, qui avait moins de droits, a été admise au partage ; je veux simplement constater que la répartition de ces subsides se fait ordinairement et exclusivement sur la proposition des députations permanentes.
Il serait, je le reconnais, impossible à M. le ministre de l'intérieur de juger des besoins des localités, de son cabinet, cela va sans dire ; mais si les députations se trouvent plus près des localités où les besoins de subsides se font sentir, elles se trouvent aussi plus près de certaines influences, de certains mobiles qui agissent en cette matière et auxquels elles ne peuvent pas toujours se soustraire, comme le ferait le département de l'intérieur.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Vous avez passé par-là.
M. H. Dumortier. - C'est pour cela que j'en parle en connaissance de cause.
Je dis donc qu'il ne peut pas être question de substituer ici l'action du département de l'intérieur à l'action des députations permanentes. J'exprime simplement le désir que cette action des députations permanentes ne soit pas tellement prépondérante que, si l'on n'a pas la chance, pour un motif ou pour un autre, d'obtenir la faveur d'être inscrit sur le tableau des élus, on ne soit cependant pas exclu à perpétuité de toute faveur. Si ce système pouvait prévaloir, ce serait une véritable abdication de la part du département de l'intérieur.
M. Rodenbach. - J'ai de tout temps appuyé les allocations qui ont été demandées pour les chemins vicinaux ; j'ajoute que, si l'on voulait encore augmenter ces allocations, j'y donnerais volontiers mon assentiment. M. le ministre de l'intérieur nous a dit que, depuis notre révolution, on a construit près de deux mille lieues de chemins vicinaux eu Belgique.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Depuis 1841.
M. Rodenbach. - C'est encore mieux ; et je ne pense pas qu'il y ait un seul pays en Europe où l'on soit parvenu à un pareil résultat. Cela fait honneur à notre pays, car on n'a pas autant fait pour la voirie en cinq siècles que pendant ces 20 dernières années.
Mais je ne puis nullement partager l'opinion de l'honorable député de Bastogne qui a dit que tout était fait pour les cours d'eau et qu'il n'y avait plus guère que la Meuse à laquelle il restât des travaux à faire.
Je suis d'avis, moi, et je crois que cet avis est partagé par une foule de membres de cette assemblée, qu'il y a beaucoup à faire encore pour nos cours d'eau.
Dois-je parler de la Lys, de l'Yperlée, la Mandel, dont je sais, de science certaine, que l'on s'occupe sérieusement ?
Je pourrais en citer une vingtaine qui réclament encore des travaux.
Je me borne à y faire allusion pour ne pas laisser sans réponse l'observation de l'honorable préopinant.
M. Muller. - L'honorable représentant de Courtrai, dans les observations qu'il a présentées à la Chambre, a pu répandre une sorte de défiance sur l'impartialité dont ne doivent pas se départir les députations permanentes à l'occasion des propositions qu'elles sont appelées à faire au gouvernement pour la voirie vicinale. Je suis cependant bien convaincu qu'il n'y a pas lieu de dire ici : Experto crede Roberto, et que, lorsqu'il remplissait les fonctions de membre de l'un de ces collèges, pénétré de l'importance de la mission qu'il avait à accomplir, il ne votait que pour des propositions de subsides qu'il jugeait comme ses collègues, être bien fondées et parfaitement équitables.
Ceci dit, je me permettrai de faire remarquer qu'il y a une garantie sérieuse contre un esprit de partialité qui se ferait jour dans les actes des députations : c'est que, tous les ans, elles ont à en rendre compte, à en subir la critique et à les défendre, au besoin, devant les conseils provinciaux. Si un de ces collèges, par parti pris, soit par influence politique, soit par faveur ou dédain pour telle localité, accueillait des demandes non justifiées, ou écartait des réclamations légitimes, des voix s'élèveraient avec raison pour s'en plaindre, pour lui reprocher d'avoir manqué à ses devoirs d'impartialité.
Pas plus que l'honorable M. Henri Dumortier, je n'entends pas que les propositions des députations permanentes doivent toujours lier le gouvernement, mais je dis, dans le but d'effacer l'impression fâcheuse que pourraient laisser ses paroles, que leurs propositions sont, en général, fondées sur l'équité, sur l'étude consciencieuse des besoins des différentes localités d'une province.
Que voudrait-on, au surplus, substituer à ces propositions des députations permanentes ?
On prémunit le gouvernement contre telle influence qui pourrait agir sur ces collèges ; mais en subira-t-il moins, et aura-t-il plus de garanties de responsabilité de la part d'autres autorités, ou plutôt de personnes qui lui feront des recommandations ?
Les propositions faites au gouvernement par les députations permanentes méritent donc sa confiance sans que je prétende qu'il ne doit, dans aucun cas, s'en écarter.
M. H. Dumortier. - Nous sommes donc d'accord.
M. Muller. - Sans doute, sur ce point ; mais ce que j'ai entendu avec peine, c'est qu'il soit sorti de la bouche d'un ancien membre d'une députation permanente des paroles de nature à jeter quelque suspicion sur la manière dont ces collèges procèdent à la répartition des subsides de la voirie vicinale.
M. H. Dumortier. - Je demande la parole.
(page 97) M. Muller. - Vous devez savoir combien est difficile et pénible la tâche consistant à distribuer d'une manière équitable des allocations entre les différents arrondissements, cantons et communes d'une province.
Ayant demandé la parole à propos du chiffre du budget en discussion, je me permettrai d'attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur un objet qui me paraît assez important. On l'a dit, la voirie vicinale, lorsqu'elle est en bon état, est une source de prospérité, d'accroissement de valeur, non seulement pour les campagnes, mais pour tout le pays.
Mais ce n'est pas tout de la créer et de l'étendre, de multiplier ses bienfaits, il faut aussi la maintenir en état convenable d'entretien, et garantir son avenir.
Or, messieurs, si je ne me trompe, d'après l'expérience acquise, la législation actuelle est vicieuse, et offre des lacunes qu'il importerait de combler.
Je m'explique : aujourd'hui, la situation bonne ou mauvaise des chemins de grande communication traversant plusieurs communes dépend du zèle ou de la négligence des administrateurs de ces communes. Avant de pouvoir faire procéder d'office à des réparations reconnues urgentes et qui, faites à temps, ne coûteraient que peu de chose, la députation doit recourir à une procédure administrative trop longue, qui occasionne des retards pendant lesquels les défectuosités des chemins s'accroissent eu mime temps que la dépense qu'elles exigent, lorsque, enfin, on est parvenu à se mettre d'accord, ou à vaincre, d'autorité, le mauvais vouloir et l'incurie d'une commune.
Je me demande, messieurs, et je soumets cette idée aux gouvernements ? N'y aurait-il pas lieu à introduire une réforme sur ces points pour empêcher une détérioration préjudiciable de la grande voirie de vicinalité ? L'entretien des chemins vicinaux importants ne devrait-il pas être concentré dans les mains d'une même autorité ? Cette question, je la pose, abstraction faite du point de savoir si les charges de cet entretien continueront à incomber, comme aujourd'hui, aux communes.
M. Vander Donckt. - Je me joins à mon honorable collègue M. H. Dumortier pour appeler l'attention sérieuse de M. le ministre de l'intérieur sur la manière dont procèdent, en matière de répartition, les députations permanentes.
Il n'entre nullement dans mes intentions de vouloir incriminer ces corps respectables, ou jeter la moindre défiance sur leur administration, mais je dis qu'il y a quelque chose à faire. L'observation de l'honorable M. H. Dumortier mérite un examen sérieux.
Ce n'est pas seulement dans la répartition et dans les tableaux que forment ces députations, mais il y a des principes appliqués d'une manière différente par ces corps, dans les différentes provinces. Ainsi dans la Flandre orientale on fait grande difficulté à déclarer un chemin vicinal, chemin de grande communication sur l'avis de l'ingénieur en chef de cette province, qui a été jusqu'ici constamment contraire à cette manière de voir, tandis qu'il n'en est pas de même dans les autres provinces ; ce qui a causé un grand préjudice à la province de la Flandre orientale et dont les autres provinces ont largement profité.
C'est un des motifs pour lesquels je ne voterai pas l'augmentation sollicitée par la section centrale.
Evidemment il n'y a pas eu jusqu'ici d'égalité dans la répartition des fonds destinés à la voirie vicinale. Un autre motif encore c'est que je ne veux pas qu'on entraîne à des dépenses au-dessus de leur force beaucoup de communes très pauvres qui n'ont pas le moyen non seulement de construire des chemins pavés, mais, quand ils sont faits, de les entretenir en bon état de viabilité.
Je comprends que jusqu'à certain point il faut encourager les communes à marcher dans la voie du progrès, mais d'une manière modérée.
Il me semble que la somme portée aujourd'hui au budget de l'intérieur est suffisante pour quelques années encore, sans que nous allions dépasser les ressources des petites communes, les pousser à demander des subsides pour faire des travaux que leurs moyens ne leur permettent pas d'exécuter.
Voilà pourquoi je crois qu'il est sage de se borner au chiffre proposé par le gouvernement, auquel on devrait laisser l'initiative en pareille circonstance, et de ne pas adopter à la légère l'augmentation considérable proposée par la section centrale.
J'ai dit.
M. H. Dumortier. - Je ne demande la parole que pour répondre un mot à l'honorable M. Muller, qui a fait dégénérer la question que j'ai soulevée en une espèce de question personnelle.
M. Muller. - En aucune façon.
M. H. Dumortier. - Vous avez demandé si c'était ainsi que je faisais les répartitions quand j'étais membre de la députation permanente.
M. Muller. - J'ai dit que j'étais convaincu que ce n'était pas ainsi que vous opériez les répartitions.
M. H. Dumortier. - J'attache plus d'importance au fond d'une pensée qu'à la formule dont on se sert pour l'exprimer.
Un homme aussi au courant de ces sortes de matières que l'honorable M. Muller ne devrait pas ainsi détourner la question ; si, chaque fois qu'on soulève une question où les députations permanentes sont en jeu, on vient dire : Vous avez été membre d'une députation permanente, et est-ce ainsi que vous agissiez ? nous perdrons beaucoup de temps et la discussion finira par ne plus être digne de la Chambre.
Je dis qu'une députation permanente, alors même qu'elle serait composée d'hommes aussi intelligents que M. Muller, peut se tromper, peut être induite en erreur ; on n'a même pas été sans voir des députations céder à certaines influences. Mon intention n'est pas de jeter de la défiance ou un blâme général sur les députations, mais il doit être permis de s'expliquer sur la jurisprudence de ces collèges comme sur celle des autres corps.
Au reste, l'espèce de mercuriale que l'honorable membre m'a adressée n'a pas grande importance, car au fond nous reconnaissons l'un et l'autre qu'il est impossible que le ministre de l'intérieur se substitue aux députations pour faire la répartition dont il s'agit ; il n'a pas assez connaissance des besoins des localités.
Mais il ne faut pas non plus que les propositions des députations excluent absolument toute demande en obtention d'un subside quand le fondement de cette demande est suffisamment constaté.
- La discussion est close.
M. le président. - Je mets aux voix le chiffre d'un million proposé par la section centrale.
- Plusieurs voix. - L'appel nominal ! l'appel nominal !
M. le président. - Il va être procédé à cette opération.
En voici le résultat :
84 membres répondent à l'appel.
70 membres répondent oui.
13 membres répondent non.
1 membre (M. Rogier) s'est abstenu.
En conséquence, la Chambre adopte la proposition de la section centrale.
Ont répondu oui : MM. Desmaisières, de Terbecq, de Theux, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, B. Dumortier, H. Dumortier, d'Ursel, Frison, Grandgagnage, Guillery, Hymans, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, Magherman, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, A. Pirson, V. Pirson, Rodenbach, Royer de Behr, Saeyman, Tack, Thibaut, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Van Dormael, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Overloop, Van Renynghe, Van Volxem, Wasseige, Ansiau, Beeckman, Coomans, David, de Bast, de Boe, de Bronckart, de Brouckere, Dechentinnes, de Florisone, De Fré, de Gottal, de Haerne, De Lexhy, de Liedekerke, Deliége, de Mérode-Westerloo, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Ridder, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren et Vervoort.
Ont répondu non : MM. Frère-Orban, Grosfils, Janssens, Loos, Manilius, Moreau, Orts, Pirmez, Tesch, Vander Donckt, Vanderstichelen, Verwilghen et Allard.
M. le président. - Le membre qui s'est abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je m'en réfère au discours que j'ai prononcé.
« Art. 66. Inspection des chemins vicinaux, des cours d'eau et de l'agriculture ; service du drainage : fr. 13,000.
« Charge extraordinaire : fr. 9,700. »
- Adopté.
« Art. 67. Frais du conseil supérieur de l'industrie (page 98) et du commerce ; traitement de l'inspecteur pour les affaires d'industrie et du secrétaire du conseil : fr. 12,000. »
- Adopté.
« Art. 68. Enseignement industriel : fr. 74,000. »
M. le président. - Ici il y a des modifications proposées par M. le ministre de l'intérieur. Il propose d'abord une augmentation de 6,000 fr. par transfert de l'article 70, subside aux ateliers d'apprentissage, à l'article 68 dont nous nous occupons
M. le ministre propose un second transfert de 6,000 fr. de l'article 93 relatif à l'enseignement moyen, à l'article 68.
Enfin M. le ministre propose une augmentation de 3,000 fr. pour l'école des mines de Mons.
En conséquence le gouvernement propose de porter l'article 68 à 89,000 francs.
La section centrale a adhéré à ces diverses propositions, dont l'une a reçu pour appui la communication de M. le ministre de l'intérieur, qui a été distribuée aux membres de la Chambre, il y a quelques jours.
M. Coomans. - La section centrale a-t-elle adhéré purement et simplement, ou a-t-elle cru convenable de nous présenter un rapport ?
M. le président. - Si la Chambre désire un rapport, il pourra être présenté demain.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - La Chambre peut remettre à demain ; mais l'explication est très facile à comprendre.
L'article 68, enseignement industriel, est augmenté de 15,000 fr., mais de ces 15,000 fr., 12,000 ne sont que des transferts. Ainsi on transfère 6,000 fr. de l'article 70, ateliers d'apprentissage, à l'article 68. On diminue donc de cette somme le crédit pour les ateliers d'apprentissage.
L'école des mines de Mons figure parmi les établissements subsidiés comme établissement d'enseignement moyen. Or, c'est un établissement purement industriel et nous le reportons dans l'enseignement industriel avec le subside qui lui est alloué à l'article 92, en diminuant cet article de 6,000 fr.
La seule augmentation consiste en une somme de 3,000 fr. destinée à l'école des mines du Hainaut. C'est à la Chambre à décider si elle veut, pour cette augmentation, un rapport spécial, et si elle ne peut s'en référer à l'adhésion donnée par la section centrale aux propositions du gouvernement.
M. Tack. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.
Dans une de nos dernières séances, M. le ministre a déposé divers documents concernant les ateliers d'apprentissage et entre autres le procès-verbal de l'enquête qui a été faite dans différentes provinces pour trancher d'une manière définitive toutes les questions qui se rattachent à ces établissements ; en outre les avis des autorités locales qui ont été consultées sur la matière ; les avis des commissions d'inspection des ateliers d'apprentissage, plus l'avis des inspecteurs de ces ateliers et un projet d'organisation de ces établissements.
La Chambre a ordonné l'impression de ces divers documents, jusqu'à présent ils n'ont pas été distribués. Il y en a de très importants. Les autorités qui ont émis leur avis sur la matière sont en général d'accord qu'il faut maintenir les ateliers d'apprentissage. Je pense que cette question doit être examinée. Il serait bon qu'avant de l'aborder, nous eussions communication de ces documents où nous pourrions puiser des lumières pour la décision que nous aurons à prendre.
Je voudrais donc savoir si cette impression a eu lieu, si ces documents pourront nous être immédiatement distribués ; en cas de négative, je propose de réserver les article 68 et 70 jusqu'à la fin du budget.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'article 70 seul concerne les ateliers.
M. Tack. - Les deux articles se lient, puisque le transfert se fait au détriment du subside pour les ateliers d'apprentissage !
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il peut se faire en toute hypothèse.
M. Tack. - En tout cas, je demande que l'article 70 soit réservé jusqu'à la fin du budget. Si, dans l'intervalle, nous obtenions communication des documents, nous pourrons discuter en pleine connaissance de cause.
- La proposition de M. Tack est adoptée.
M. Coomans. - Je n'ai pas voulu improviser un blâme sur la proposition du gouvernement. J'ai seulement voulu dire que puisque la Chambre avait jugé utile de renvoyer ces propositions à la section centrale, il était convenable de notre part d'attendre le rapport de cette section.
Loin de vouloir blâmer les transferts proposés par l'honorable ministre, il y en a un que je trouve trop faible.
Le gouvernement se borne à proposer une diminution de 6,000 fr. sur le subside pour les ateliers d'apprentissage. Pour ma part, je verrais avec plaisir la suppression entière de ce subside. Ainsi, je ne blâme pas la proposition de l'honorable ministre ; mais comme il n'y a pas péril en la demeure, il me semble convenable que nous honorions la section centrale et que nous nous honorions nous-mêmes en attendant la présentation du rapport que nous l'avons priée de nous faire.
M. le président. - Le but de la section centrale a été de ne pas retarder la discussion des articles. Mais si la Chambre désire un rapport, nous tiendrons l'article en réserve,
M. Dolez. - Il est vrai qu'il a eu renvoi à la section centrale ; mais il n'y a pas eu décision qu'on réclamerait un rapport spécial de cette section.
La section centrale adopte ; voilà déjà un rapport. Y a-t-il maintenant une complication qui demande un rapport développé ? Alors je conçois le vœu émis par l'honorable M. Coomans. Mais si les quelques mots prononcés par M. le ministre de l'intérieur sont de nature à faire comprendre la question bien simple qui est soumise à la Chambre, à quoi bon réunir de nouveau la section centrale ? à quoi bon ajourner à demain une décision que nous sommes tous à même de prendre aujourd'hui ?
Ce que disait l'honorable M. Coomans est vrai en principe quand il s'agit de questions compliquées. Mais je crois que dans l'espèce il est superflu de demander à la section centrale son rapport, car nous savons qu'elle a adopté la proposition de M. le ministre de l'intérieur. Je crois qu'eu égard à sa simplicité, cela doit suffire à tous. .
Je demande donc qu'il soit passé outre au vote.
- La Chambre décide qu'il sera passé outre au vote.
L'article est mis aux voix et adopté tel qu'il est modifié par la proposition du gouvernement, approuvée par la section centrale.
« Art. 69. Achat de modèles et de métiers perfectionnés ; voyages et missions ; publications utiles ; récompenses pour des procédés nouveaux et pour ouvrages technologiques ou d'économie industrielle ; subsides en faveur d'industries nouvelles ; caisses de prévoyance : fr. 15,450. »
- Adopté.
M. le président. - L'article 70 est réservé.
« Art. 71. Indemnités des greffiers de conseils de prud'homme : fr. 12,000. »
M. le président. - Par suite de l'établissement d'un conseil de prud'hommes à Bruxelles, le gouvernement a proposé une augmentation de 1,500 francs, ce qui porte le crédit à 13,500 francs. »
La section centrale adopte cette proposition.
- Le chiffre de 15,500 francs est mis aux voix et adopté.
« Art. 72. Frais de rédaction et de publication du Recueil officiel des brevets : fr. 7,000. »
- Adopté.
« Art. 73. Musée de l'industrie. Traitement du personnel : fr. 18,338. »
- Adopté.
« Art. 74. Musée de l’industrie. Matériel et frais divers : fr. 10,252. »
- Adopté.
« Art. 75. Traitement des vérificateurs : fr. 53,400. »
- Adopté.
« Art. 76. Frais de bureau et de tournées : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 77. Matériel : fr. 2,000. »
- Adopté.
M. le président. - Le bureau a composé comme suit la commission chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'établissement d'un conseil de prud'hommes à Bruxelles : MM. Muller, de Rongé, Jamar, Nothomb, Tack, David et de Naeyer.
M. J. Jouret vient de déposer le rapport sur un projet de crédit au budget de la Chambre. Cet objet sera porté à l'ordre du jour.
- La séance est levée à 4 heures trois quarts.