(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1859-1860)
(page 775) (Présidence de M. Orts.)
M. de Boe procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart, et donne lecture du procès-verbal de la séance du 18 février.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Boe présente l’analyse des pétitions suivantes.
« Le conseil communal de Bouffioulx demande que le gouvernement accorde la concession du chemin de fer de Morialmé à Givet. »
« Même demande du conseil communal de Goegnies. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Plusieurs bourgmestres du canton de Florennes prient la Chambre d'accorder à- a société des chemins de fer de l'Est belge la concession du prolongement du chemin de fer de Châtelineau à Givet. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Beaumont demandent la construction d'un chemin de fer soit de Peissant à Beaumont ; de Walcourt à Erquelinnes par Beaumont, de Thuin à Beaumont et Momignies ou Chimay, soit d'Erquelinnes à Beaumont et Chimay. »
- Même renvoi.
« Le sieur Ronsman, ancien soldat, demande une augmentation de pension. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal de Noville-les-Bois présente des observations contre la demande qui a pour objet le retrait de la loi du 2 août 1856 autorisant la sortie de certains minerais. »
« Mêmes observations de l'administration communale de Waret-la-Chaussée et des conseils communaux de Tillier, Hanret, Cortil-Noirmont. »
- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.
« Des habitants de Termonde demandent l'abrogation des articles 414, 415 et 416 du Code pénal. »
« Même demande d'habitants de Gand et de Bruxelles. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du titre IV, livre II du Code pénal.
« Le sieur Lahoussée, imprimeur-typographe à Charleroi, garde civique depuis 1830, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la médaille commémorative instituée à l'occasion du 25ème anniversaire de l’inauguration du Roi. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Nicolas-Joseph Comouth, garde-frein à la station du chemin de fer du Nord à Liège, né à Eupen (Prusse), demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« Le sieur Jean-Louis Canaux, demeurant à Brully, né à Gued'hossus (France), demande la naturalisation ordinaire avec exemption du droit d'enregistrement. »
- Même renvoi.
« Le sieur Desreumaux réclame l'intervention de la Chambre pour que son fils Louis-Augustin-Joseph, incorporé au 4ème régiment d'artillerie soit libéré du service militaire. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal d'Herstal demande que le chemin de fer liégeois-limbourgeois passe par Herstal et qu'il y ait une station dans cette commune. »
- Même renvoi.
« Le sieur Libert, ancien brigadier des douanes, demande la révision de sa pension. »
- Même renvoi.
« Des officiers retraités demandent une loi qui les exempte de la retenue d’un pour cent faite par l’Etat sur le montant de leurs pensions. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Larivel présente des observations sur le projet de loi qui appelle une modification à la lot monétaire, en ce qui concerne les monnaies d'appoint. »
- Même renvoi.
« Le sieur de Walkeneer, candidat notaire à Ixelles, présente des observations sur le projet de loi qui supprime le droit d'enregistrement sur les ventes publiques de marchandises réputées telles dans le commerce. »
- Renvoi à la section centrale du projet de loi.
« Le sieur Carll, blessé de septembre, demande la pension de 250 fr. dont jouissent des combattants de 1830. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Schildvriend demande l'exécution des mesures promises en faveur de la langue flamande. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Rance demandent la construction d'un chemin de fer de Beissant à Beaumont, Rance et Momignies, ou de Thuin à Beaumont, Rance et Momignies. »
- Même renvoi.
« Des habitants de Hulste demandent que le receveur de l'Etat soit autorisé à recevoir, en monnaie d'or, le montant de leurs contributions. »
- Même renvoi.
« Le sieur Houze, demande des modifications à l’article 12 du projet de loi relatif à la police et à la discipline médicales. »
- Renvoi à la section centrale du projet de loi.
« Des commerçants et habitants de St-Ghislain demandent qu'il soit donné cour.s légal à la monnaie d'or de France. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Par 10 messages en date des 17, 18, 2l, 23 et 24 février le Sénat informe la Chambre qu'il a adopté les projets de loi :
« Approuvant la convention conclue avec la Sardaigne pour la garantie réciproque de la propriété des œuvres artistiques et littéraires ;
« Qui alloue au département des travaux publics un crédit de l,28,253 fr. 33 c. :
« Contenant le budget des affaires étrangères pour l'exercice 1860 ;
« Qui rend les dispositions du décret du 13 août 1810 applicables aux objets oubliés dans les stations des chemins de fer ou non réclamés dans le délai déterminé ;
« Qui porte révision des états de classifications des communes ;
« Modifiant la délimitation entre les communes d'Andrimont et de Dison (province de Liège) ;
« Contenant le budget de l'intérieur pour 1860 ;
« Contenant le budget des travaux publics pour 1860 ;
« Et établissant une nouvelle répartition des conseillers provinciaux. »
- Pris pour notification.
« Par 21 messages, en date du 21 février, le Sénat informe la Chambre qu'il a pris en considération autant de demandes en naturalisation. »
- Pris pour notification.
« Par 4 messages, en date du 21 février, le Sénat informe la Chambre qu'il a rejeté les demandes de naturalisation ordinaire des sieurs Jean-Frédéric Lieder. Servais Debaer, Guillaume Vandoren et Jean-Bernard Imminck.
« El la demande de grande naturalisation du sieur Victor Meuleman. »
- Pris pour notification.
« Par messages, en date du 18 février, le Sénat informe la Chambre qu'il a pris en considération les demandes de grande naturalisation des sieurs Georges-Louis Raymond de Grand Ry et Jean-Hubert Nélissen. »
- Pris pour information.
« Il est fait hommage à la Chambre :
« 1° Par M. le ministre de l'intérieur, de 118 exemplaires du tome XII du Bulletin du conseil supérieur d'agriculture ;
« 2° Par la société archéologique d'Arlon, d'un exemplaire du 5ème cahier du tome IV des Annales de la société.
« 3° Par le sieur Prosper Staes, avocat à la cour d'appel de Bruxelles, de 117 exemplaires du discours sir le droit de défense en matière criminelle, qu'il a prononcé à la séance solennelle de rentrée de la conférence du jeune barreau ;
« 4° Par la direction de la Société Générale pour favoriser l'industrie nationale, de 116 exemplaires du compte rendu des opérations de cet établissement pendant l'année 1859 ;
« 5° Par le sieur Rigouts, de quelques exemplaires d’un ouvrage de feu le sieur Pypers, intitulé : Considérations sur la législation pharmaceutique belge. »
- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.
« M. de Montpellier, obligé de s'absenter, MM. le Bailly de Tilleghem et Coppieters ‘t Wallant, retenus chez eux par une indisposition, demandent une congé de quelques jours. »
- Ces congés sont accordés.
M. Rodenbach (pour une motion d’ordre). - Parmi les pétitions qui viennent d'être analysées, il en est qui sont relatives à la monnaie d'or. Ces pétitions ont été renvoyées à la commission des pétitions. Je crois qu'il serait infiniment préférable et plus rationnel de les renvoyer à la section centrale qui est chargée d'examiner le projet de loi relatif à la monnaie de billon.
M. le président. - La section centrale dont il s'agit n'a pas à s'occuper de la monnaie d'or.
M. Rodenbach. - Il s'agit du système monétaire, vous comprenez que lorsqu'on s’occupera de la question de la monnaie de billon, il sera question du système monétaire tout entier. Il me semble donc qu'il serait plus rationnel de renvoyer la pétition à la section centrale. Si la (page 776) Chambre n'était pas de cet avis, je demanderais alors un prompt rapport.
M. le président. - Ainsi M. Rodenbach modifie sa proposition et demande de la part de la commission des pétitions un prompt rapport.
M. B. Dumortier. - Les pétitions dont il s'agit se rapportent évidemment à la loi monétaire ; par conséquent c'est à la section centrale chargée d'examiner une loi monétaire qu'il faut renvoyer les pétitions.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Au fond il est assez indifférent que le renvoi soit ordonné soit à la commission des pétitions, soit à toute autre qui aurait à faire un rapport ; seulement je ne puis pas admettre l'opinion qui vient d'être émise par l’honorable M. Dumortier, qu'une section centrale chargée d'examiner un projet de loi relatif à la monnaie de billon, ait à s'occuper de la monnaie d'or ou de la monnaie d'argent. Il est évident que cette section centrale ne pourrait pas faire, de la question de l'or, un amendement à un projet relatif à la monnaie de billon. Cette question trouvera sa place, lorsque l'honorable M. Dumortier aura déposé le projet de loi qu'il nous a annoncé relativement à la monnaie d'or et à la monnaie d'argent.
M. B. Dumortier. - Je ne comprends pas comment il pourrait se faire qu'une section centrale, chargée d'examiner un projet monétaire, n'aurait pas le droit d'introduire un amendement relatif à une partie du système monétaire. Au reste la section centrale fera ce que dans sa sagesse elle croira convenable. Si la Chambre veut adopter un amendement, en cas qu'il y en ait un présenté, elle le fera ; si elle croit devoir repousser un amendement, elle en sera libre. Mais soyez convaincu que vous ne pourriez empêcher la section centrale de présenter un amendement si elle le croit utile.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Si ! si !
M. B. Dumortier. - C'est ce qu'elle examinera. Mais la section centrale est une section indépendante ; elle est en dehors de l'action ministérielle et elle fera en pareil cas ce que son devoir lui prescrit.
Du reste qu'un membre introduise la question par voie de proposition de loi ou que la section centrale l'introduise par voie d'amendement, c'en toujours au fond la même chose.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Du tout.
M. B. Dumortier. - On ne contestera pas à la section centrale le droit d'introduire des amendements.
Je crois que l'honorable ministre le contesterait d'autant n'a pas trouvé mauvais l'an dernier que la section centrale chargée d’examiner le projet de loi sur la répartition du nombre des représentants et des sénateurs, introduisît dans ce projet de loi une disposition ayant pour objet de modifier la loi électorale dans son essence, au moyen de ce qu'on a appelé l'ordre alphabétique.
Je dis que la section centrale ne peut pas être vinculée dans son action par M. le ministre. Si la section centrale juge à propos de présenter un amendement, elle sera dans son droit, et si M. le ministre juge convenable de combattre cet amendement, il sera également dans son droit ; mais qu'il me permette de le lui dire avec toute la convenance que je dois à sa personne, il n'a pas d'ordres à donner à la section centrale.
La pétition de Saint-Ghislain est adressée à la Chambre évidemment dans le but de lui demander qu'elle veuille bien s'occuper de la monnaie d'or lorsqu'elle discutera la loi sur la monnaie de billon.
Il me semble donc qu'il est convenable de faire ce qu'on fait toujours en pareille circonstance, c'est-à-dire de renvoyer la pétition à la commission qui est chargée de s'occuper de l'objet auquel la pétition se rapporte.
Cette pétition, messieurs, est signée par les banquiers, par les négociants, par tout ce qu'il y a de plus honorable à Saint-Ghislain ; une pareille pétition mérite bien de fixer l'attention de l'assemblée.
M. H. de Brouckere. - Je ne crois pas que la Chambre puisse renvoyer la question dont on s'occupe à la commission chargée d'examiner le projet de loi sur la monnaie de billion ; la raison en est toute simple : les membres de la section centrale n'ont été délégués par les sections que pour s'occuper des questions relatives à la monnaie de billon ; ils n'ont donc pas qualité pour s'occuper des questions relatives à la monnaie d'or.
L'honorable M. Dumortier dit que la section centrale peut introduire dans le projet du gouvernement tous les amendements que bon lui semble ; cela est incontestable, mais formuler un projet de loi sur la monnaie d'or, ce n'est pas du tout introduire un amendement dans le projet de loi sur la monnaie de billion. Ce sont là deux objets complètement différents.
D'ailleurs, messieurs la question de l'or est beaucoup trop importante pour que la section centrale s'en occupe sans que cette question ait passé par les sections.
Je crois donc, messieurs, qu'il faut suivre la marche ordinaire et renvoyer la requête à la commission des pétitions, sauf, si on le veut, à demander un prompt rapport, afin que ce rapport puisse faire l'objet d'une discussion, si cela convient à l'honorable membre qui vient de prendre la parole.
M. B. Dumortier. - Il est vraiment étrange que, dans une question qui préoccupe si vivement l'opinion publique, une question à laquelle tant de nos électeurs attachent une si haute importance, que dans une pareille question l'on vienne toujours nous opposer une fin de non-recevoir.
On a demandé tout à l'heure et on demandera encore un prompt rapport, puis en discutant les conclusions, on y donnera tel ou tel sens de manière à obtenir ainsi par voie indirecte la décision qu'on désire ; eh bien, messieurs, ce sont là des moyens peu digues d'un parlement ! La question qui nous occupe doit être envisagée en elle-même, elle doit être décidée au fond. Vous y donnerez telle solution que vous jugerez convenable, mais au moins, messieurs, vous ne l'écarterez point par une fin de non-recevoir.
J'ai eu l'honneur d'annoncer à l'assemblée que lorsque le gouvernement présenterait son projet de loi sur la monnaie de billon, je proposerais un amendement pour la monnaie d’or ; M. le ministre l'a rappelé tout à l'heure. (Interruption.) Je n'ai pas dit : un projet de loi. Du reste amendement ou projet de loi, peu importe, je proposerai une mesure et vous l'accepterez ou vous la repousserez, mais vous ne repousserez pas par une fin de non-recevoir une question si importante pour tout le commerce de la Belgique, non seulement pour le commerce, mais pour tous les industriels et pour tous les habitants du pays. Ayez donc le courage d'attaquer la proposition au fond ; mais ne venez pas avec des fins de non-recevoir ; car les fins de non-recevoir sont toujours un moyen peu convenable dans une matière qui préoccupe si vivement l'opinion publique ; ce sont des moyens de procédure qui ne sont pas dignes assemblée législative.
Je dis donc que la section centrale aura à s'occuper de cette question. L'honorable M. H. de Brouckere reconnaît que la section centrale pourrait s'en occuper ; mais l'honorable membre dit : « Les sections ne s'en sont pas occupées. » L'honorable M. de Brouckere se trompe : une des sections s'en est occupée.
Au reste, il est évident que lorsqu'on traite une question de monnaie, tout le système monétaire se rattache à cette question de monnaie. Je dis que, dans le cas actuel, la Chambre ne peut que renvoyer la pétition à la section centrale saisie de l'examen du projet de loi relatif à la monnaie de billon. La pétition de Saint-Ghislain est une pétition très sérieuse ; elle est signée par tout ce qu'il y a d'industriels honorables dans cette ville ; je ne pense pas qu'on puisse écarter une pétition de ce genre par des fins de non-recevoir.
D'ailleurs, cette pétition n'est pas la seule que la Chambre ail reçue ; il en a été adressé par quantités considérables à l'assemblée ; il serait nécessaire de faire le relevé de toutes les pétitions, afin de constater ce que le pays veut en cette matière.
Je prie mes honorables contradicteurs de vouloir bien m'indiquer le moyen qu'ils croient le plus efficace pour engager la question au fond et pour amener un vote.
- Des membres. - Présentez un projet de loi.
M. B. Dumortier. - Je déposerai un projet de loi, si la section centrale ne juge pas à propos de présenter un article additionnel ; comme je suis membre de cette section centrale, je soumettrai une disposition dans ce sens à cette section.
Messieurs, beaucoup de membres de la Chambre ne se font pas une idée réelle de la situation de toutes les localités riveraines de la France. Dans toutes ces localités, il n'existe plus de monnaie d'argent. Savez-vous que dans ces localités, les cultivateurs, par exemple, sont obligés de ramasser les pièces une à une pour payer les contributions ? Comment peut-on laisser le pays dans une situation pareille ? Quand on est en présence d'une situation aussi déplorable, elle mérite certes d'être examinée à fond ; je repousse donc toutes les fins de non-recevoir, et je supplie la Chambre d'indiquer un moyen de discuter la question à fond.
M. Pirmez. - Messieurs, je dois relever une assertion de l'honorable M. B. Dumortier. Jamais la Chambre ne s'est refusée à discuter à fond la question dont il s'agit ; elle s'est prononcée à cet égard en février 1858, et une seconde fois en septembre 1859.
En novembre ou en décembre dernier, elle s'est derechef occupée de la question, à l'occasion de nouvelles pétitions qui lui avaient été adressées. A cette dernière époque, une proposition a été faite, pour que l'opinion de la Chambre fût connue. Un membre s'est opposé à ce que cette proposition eût une signification, a refusé de discuter la question et après avoir émis quelques observations, a déclaré se rallier à une proposition qui impliquait le rejet de l'admission de l'or français.
Ce membre était M. Dumortier.
M. B. Dumortier. - Qui a combattu une fin de non-recevoir.
M. Pirmez. - Quand la Chambre est saisie d'une pétition, quel moyen a-t-elle d'émettre son avis sur l'objet de cette pétition ? Si elle accueille la demande, c'est de renvoyer la pétition au ministre que la chose concerne ; si elle la rejette, de passer à l’ordre du jour ou d'ordonner le dépôt au bureau des renseignements s'il est bien reconnu par la discussion que ce dépôt a une signification égale à celle d'un ordre du jour, qu'il est un ordre du jour poli. C'est ce que la Chambre a fait trois fois de suite. M. Dumortier s'est rallié à cette proposition pour que la décision de la Chambre n'eût pas de portée. Il a été constaté que, malgré cette adhésion de tactique, la décision de la Chambre avait toujours la signification qu'elle devait avoir.
Pourquoi M. B. Dumortier, qui a annoncé un projet qui ne vient pas, insiste-t-il pour faire renvoyer cette question à une section centrale chargée de s'occuper d'un tout autre objet que du cous de la monnaie d'or française ? Je crois que son motif est celui-ci :
(page 777) C'est qu'il espère, à tort selon moi, que la section centrale, telle qu'elle est composée et dont il fait partie, pourrait se rallier à son opinion sur la question.
Or son opinion, écartée tant de fois par la Chambre, viendrait cette fois avec une autorité qu'elle n'obtiendrait peut-être jamais par les voies ordinaires.
Quand la Chambre a examiné une question dans toutes les sections, elle envoie des rapporteurs qui représentent l'opinion des sections, et par conséquent l'opinion de la Chambre. C'est ainsi que dans presque tous les cas la section centrale représente l'opinion de la Chambre.
Si l'on pouvait en saisissant d'une proposition quelconque, une section centrale formée pour un autre objet, introduire devant la Chambre cette proposition comme revêtue de l'autorité de la section centrale, comme ayant victorieusement subi l'épreuve des sections, toute l'organisation de la procédure de la Chambre serait faussée.
C'est la cependant le but que se propose l'honorable membre ; je pense qu'il suffit de le signaler pour que si proposition soit écartée par la Chambre.
M. B. Dumortier. - Je n'aime pas à accuser mes collègues d'user de tactique, j'aime encore moins à être accusé de le faire, surtout quand je me borne à répondre à ce que je suis en droit d'appeler de la tactique.
En quoi consiste la tactique ? Dans l'emploi de petits moyens pour empêcher la solution d'une grande question.
L'honorable membre auquel je réponds est celui qui s'est servi de tactique pour empêcher la Chambre de donner une solution à la question.
Quand des pétitions sont adressées à la Chambre, la Chambre a trois choses à faire : passer à l'or re du jour ; ordonner le dépôt au bureau des renseignements ou le renvoi au ministre. L'honorable membre présente un de ces trois moyens, mais en lui donnant une signification qui emporte la portée d'un vote législatif ; c'est là de la tactique, un moyen de procédure.
Quand on m'accuse d'en user, je renvoie l'accusation à celui qui me l'adresse en prouvant que c'est à lui qu'elle revient.
Si la Chambre trouve qu'une pétition n'a pas de valeur, elle passe à l'ordre du jour, si elle est d'avis qu'elle mérite d'être examinée, elle ordonne le dépôt au bureau des renseignements ; s'il existe un grief dont il faut avoir le redressement, elle ordonne le renvoi avec ou sans demande d'explications.
Dans tous les cas la Chambre ne fait qu'émettre un vote sur l'objet d'une pétition.
Mais donner à la discussion d'une pétition une portée législative, la portée qu'une loi sera faite ou ne sera pas faite, c'est ce qui n'a jamais eu lieu, dans cette enceinte, c'est ce qui est contraire à tous les précédents de notre assemblée, ce qui est contraire à notre règlement, et c'est ce que je qualifie du nom de tactique, puisque ce mot m'a été envoyé.
L'honorable membre dit ensuite que mon opinion a été plusieurs fois écartée. Je n'admets pas qu'une opinion ait été écartée, quand on emploie des moyens pareils. Une opinion sera écartée lorsque la Chambre aura émis un vote sur le fond, lorsqu'elle aura voté formellement le maintien du système actuel. Une opinion en matière de loi ne s'écarte pas par un vote sur une pétition.
L'opinion dont j’ai l'honneur d'être l'organe n'est d'ailleurs pas isolée dans le pays. Rappelez-vous la masse de pétitions que nous avons déjà reçues. Je crois ne pas exagérer le chiffre en disant à l'assemblée que déjà plus de 40,000 pétitionnaires ont réclamé pour qu'on donnât le cours légal à la monnaie d'or. Eh bien, quand un mouvement pareil se fait dans le pays sans impulsion, quand tous les districts, depuis Virton à l'extrême frontière d'Allemagne jusqu'à Furnes, viennent réclamer spontanément dans cette Chambre contre ce qu'ils regardent comme un abus, comme un mal dans leurs intérêts, ce n'est pas par une fin de non-recevoir qu'on résout de pareilles questions. C'est en les abordant franchement, en ayant une discussion approfondie et en émettant un vote affirmatif ou négatif.
Mais ce n'est pas eu donnant telle ou telle portée au dépôt d'une pétition au bureau des renseignements ou à son renvoi à un ministre ; et puisqu'on parle de tactique, je crois que c'est par tactique et pour empêcher la présentation d'un projet de loi que l'honorable membre nous oppose un pareil système. Si je présente un projet de loi, vous viendrez dire que la majorité s'est prononcée, qu'elle a repoussé implicitement ce projet et qu'il n'y a pas lieu de l'examiner. Je dis que ce sont là de petits moyens, des moyens de procédure, et qu'une question qui agite nos populations d'une manière semblable mérite d'être examinée au fond. Eh bien, je demande à mes honorables contradicteurs de m’indiquer le moyen d'amener l'examen de la question au fond et sa solution non par des fins de non-recevoir, mais par un vote sur la question elle-même. ♦
- Plusieurs membres. - Présentez un projet de loi.
M. B. Dumortier. - J'ai déjà dit que je présenterais un article additionnel à la loi sur la monnaie de billion, à moins que la section centrale n'en présente un. Je ne sais ce que fera la section centrale. L'honorable préopinant est, comme moi, membre de la section centrale.
Si la question est soulevée dans la section centrale, nous l'examinerons et il y aura un rapport sur la question.
Mais je maintiens qu'une question de cette importance, qui agite autant le pays, ne doit pas être résolue par des fins de non-recevoir, que ces moyens sont usités, que pour l’honneur de nos commettants, pour l'honneur des citoyens qui pétitionnent sur cette question, nous devons la traiter au fond et l'examiner dans tous sas détails.
La Chambre fera ce qu'elle voudra, je me soumets d'avance à sa décision. Mais je demande que la Chambre examine la question au fond et non sur des fins de non-recevoir.
M. H. de Brouckere. - L'honorable M. B. Dumortier est mécontent de ce que l’honorable M. Pirmez lui a reproché d'user de tactique. Mais il a oublié que la première fois qu'il a pris la parole, il a, selon sa coutume d'ailleurs, reproché à ses adversaires d’user de petits moyens, de poser des questions dilatoires, de n'avoir pas le courage de leur opinion. Je demande si les reproches de l'honorable M. Dumortier n'autorisaient pas 1 s observations qu'a faites l'honorable M. Pirmez.
L'honorable M. Dumortier nous dit qu'il y a une section qui a examiné la question de l'or. Cette section, c'est celle de l'honorable M. Dumortier Or, voici ce qui s’est passé. Il y avait quatre membres présents. Deux étaient d'un avis sur la question, les deux autres étaient d'un autre avis, de manière que la question est restée sans solution, et si l'honorable M. Dumortier a été nommé membre de la section centrale, c'est par le bénéfice de l'âge.
Voilà comment les sections se sont occupées de la question de la monnaie d'or.
Messieurs, nous ne cherchons pas du tout à écarter un examen approfondi des questions concernant la monnaie d'or. Mais nous voulons que ces questions arrivent à la Chambre d'une manière régulière. Eh bon, il n'y a qu'une seule manière régulière de nous soumettre la question, c'est de nous présenter un projet de loi.
L'honorable H. Dumortier dit : Si la section centrale ne fait pas de proposition, je présenterai un article additionnel. Eh bien, je ne veux pas que l'honorable membre soit pris au dépourvu, je ne crois pas me tromper en lui disant que s'il propose un article additionnel, cet article sera renvoyé à l'examen des sections.
Pour prouver à l'honorable M. Dumortier combien je désire voir arriver le moment où la question de l'or sera définitivement tranchée je le convie à déposer son projet de loi dès demain. Je m’engage à voter pour la prise en considération de ce projet de loi et pour son renvoi en section. Lorsque ce projet de loi aura été examiné en section, qu'une section centrale aura été constituée spécialement pour l'examen des questions relatives à l'or, la chambre sera bien et dûment saisie de la question et elle l'examinera au fond. Mais j'en préviens l'honorable M. Dumortier, ce ne sera ni par le renvoi de pétition à la section centrale, ni par la présentation d'un article additionnel à la loi sur la monnaie de billon, que la question sera résolue par la Chambre.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai cru devoir faire, en réponse à la demande de l'honorable M. Dumortier, une observation dans l'intérêt du règlement de la Chambre, et je dirai même pour que la Constitution soit respectée. L'honorable M. Dumortier voulait obtenir le renvoi de pétitions relatives à l'or à la section centrale qui est chargée de l'examen d'un projet de loi relatif à la monnaie de billon, en soutenant que cette section centrale pouvait par amendement introduire dans le même projet une disposition relative à la monnaie d'or. Or, si la Constitution donne aux membres de la Chambre le droit d'amender les projets de loi présentés par le gouvernement, elle ne leur donne pas la faculté de substituer un projet à un autre projet.
La Chambre a le droit d'amender. Par conséquent la Chambre, saisie d'un projet de loi ayant pour objet la monnaie de billon, peut faire à ce projet des amendements relatifs à la monnaie de billon. Mais la Chambre ne peut pas introduire, à la place d'un projet de loi sur la monnaie de billon, un projet de loi relatif à la monnaie d'or ou à la monnaie d'argent.
Ensuite le règlement de la Chambre exige que, pour les propositions à faire, on suive certaines formes qui sont la garantie des minorités, qui sont la garantie d'un examen sage et prudent des propositions qui doivent devenir des lois. Le règlement de la Chambre, qui nous domine tous, exige qu'une proposition m soit d'abord communiquée aux sections pour savoir si elles en autoriseront la lecture. C'est seulement lorsque la lecture en a été autorisée et que la prise en considération a été prononcée, qu'a lieu l'examen en sections et qu'un rapport est fait par une section centrale.
Voilà la marche qui est tracé par le règlement. L'honorable M. Dumortier veut se soustraire à toutes ces formes. Il veut, faisant partie de la section centrale qui examine le projet de loi relatif à la monnaie de billon, pouvoir introduire un amendement à ce projet et faire émettre par cette section centrale une opinion qu'il ne croit pas devoir lui-même formuler en projet. Car enfin qu'est-ce qui arrête l’honorable M. Dumortier ? Qui l'empêche de formuler une proposition de loi ? Lui qui reproche à ses adversaires d'user de tactique, d'employer des moyens dilatoires, pourquoi ne formule- t-il pas en quatre lignes un projet de loi ? Il demandera à la Chambre le droit d'en faire la lecture. L'examen en aura lieu et tout sera dit. Il perdra beaucoup moins de temps que dans les débats qu'il soulève à propos d'une pétition qui n'a pas même (page 778) été examinée par la Chambre, que celle-ci ne connaît pas et qu'elle renverrait, à une section centrale chargée de l'examen d'une question toute différente.
M. B. Dumortier. - Je me félicite de ce débat, parce qu’en définitive, je veux arriver à une solution de la question, c'est à-dire à un vote sur la question au fond.
M. le ministre des finances nous dit que la section centrale ne peut pas présenter un amendement sur ce point. Je ne partage pas cette opinion. Je crois que le cabinet n'a pas professé cette opinion, lorsque la section centrale, chargée de l'examen du projet de loi relatif à l'augmentation du nombre des députés et des sénateurs, est venue présenter un amendement sur une toute autre matière, sur la question du vote par ordre alphabétique. Je ne pense pas que l'honorable ministre ait soutenu alors la thèse qu'il défend aujourd'hui.
Mais enfin, je fais bon marché de ce soutènement. Comme je vois qu'on pourrait encore m'opposer un moyen dilatoire, je préfère employer le moyen que m'indique M. le ministre. Comme j'ai eu l'honneur de le dire, ce que je demande, c'est qu'on m'indique le mode à suivre pour arriver à une discussion sur le fond. Vous me dites de présenter un projet de loi. J'accepte votre système.
Cependant je dois repousser un petit reproche que m'a adressé l'honorable M. Pirmez. Cet honorable membre me dit : Voilà longtemps que vous annoncez que vous présenterez un projet de loi et vous ne le présentez pas. Je prie la Chambre de se rappeler que j’ai annoncé que je présenterais un amendement ou un projet de loi, lorsque nous serions saisis du projet indiqué par l’honorable M. Frère et relatif à la monnaie de billon. J'ai annoncé que j'engagerai la discussion à l'occasion de ce projet de loi, et à cette époque nul d'entre vous n'a fait d'objection. On en fait maintenant, soit. Vous préférez un projet de loi ; j'en présenterai un. Mais je dis que la discussion actuelle n'aura pas été infructueuse puisqu'elle aboutira à un vote sur le fond de la question.
- Le renvoi des pétitions concernant le monnaie d'or à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, et ordonné.
M. Rodenbach (pour une motion d’ordre). - Si je suis bien instruit il serait question, en Angleterre, de modifier le tarif de douane sur plusieurs article que la Belgique exporte dans les trois royaumes ; il serait entre autres question d'augmenter le tarif sur la chicorée en fèves. Ce point est de la plus haute importance au point de vue des intérêts agricoles, industriels et commerciaux de l'arrondissement de Roulers et concerne aussi la province de Hainaut, notamment Lessines et ses environs.
Je ne doute pas que M. le ministre n'ait connaissance des augmentations que l'on projette, et je désire savoir si le gouvernement a fait de sérieuses démarches pour sauvegarder ces intérêts beaucoup plus considérables qu'on ne pourrait se l’imaginer.
Si mes renseignements sont exacts et si le tarif sur la chicorée se montait à 15 fr. les 100 kil., cela ferait un tort réel là où la culture de cette racine a pris une grande extension, car il est à ma connaissance qu'un seul fabricant d'Ardoye, lez-Roulers, a expédié depuis peu pour au moins 400,000 fr. de ce produit en Angleterre.
Ou peut avancer que le port de Bruges s'est amélioré par l’exportation de la chicorée, M. le ministre doit en être informé, et si la mesure était adoptée en Angleterre ce port s'en ressentirait fortement. Récemment encore quatre bâtiments chargés exclusivement de chicorée sont partis pour l'Angleterre.
Les vaisseaux qui partent de Bruges ne reviennent pas vides, il en résulte des relations suivies entre le port de Bruges et l'Angleterre.
Pour éviter le coup qui menace le port de Bruges, nous espérons que le gouvernement fera de vives et pressantes démarches près du cabinet anglais.
J'aime à croire que le gouvernement anglais qui, dans le traité de Paris, a prouvé qu'il veut sérieusement la liberté du commerce, le free-trade, n'en agira pas ainsi avec la Belgique, car si tous nos voisins persistent à prendre des mesures contre nous, notre commerce d'exportation en pâtira.
Je ne serais pas fâché non plus de savoir à quel point en sont les négociations avec la France, d'autant plus que notre traité avec ce pays expire le 30 juin Ces négociation intéressent notre industrie toilière et nos filatures, et j'espère bien que M, le ministre ne se contentera pas de venir nous dire qu'il ne sait rien et ne peut rien ; il faut qu'on sache que le pays se préoccupe de la situation qui est faite à nos industries par suite du traité conclu entre la France et l'Angleterre.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - L'honorable M. Rodenbach est, en effet, bien renseigné à l'égard des modifications qui vont être introduites dans le tarif des douanes en Angleterre ; tous les journaux ont fait connaître ces modifications qui ne sont plus ignorées de personne. Il est également bien inspiré lorsqu'il pense, et je l'en remercie, que le gouvernement n'a pas manqué à son devoir en faisant parvenir des observations au gouvernement anglais au sujet de la majoration des droits de douane sur la chicorée. Aussitôt que j'ai eu connaissance de ce projet, j'ai chargé notre ministre à Londres d'appeler l'attention du gouvernement britannique sur le préjudice que cette mesure apporterait aux échanges entre les deux pays.
Je dirai, du reste, et l'honorable membre sait peut-être également que la position de notre commerce de chicorée, si le projet dont s'agit était définitivement adopté, ne serait pas changée au point de vue de la concurrence ; on veut en même temps établir un droit d'accise sur la chicorée de production anglaise équivalent au droit d'entrée dont est frappée la chicorée étrangère. La situation ne sera donc modifiée que quant à la consommation. Je sais que sous ce rapport même la chose est importante ; aussi le gouvernement n'est pas resté indifférent.
Quant à l'observation de l'honorable membre portant sur le silence que garderait le gouvernement au sujet des modifications apportées au régime économique dans un autre pays, la Chambre comprendra que dans une matière aussi délicate le gouvernement doit rester juge de l'opportunité de donner de la publicité à ses actes ou à ses projets.
La gouvernement, messieurs, a une grave responsabilité dans ces circonstances et la Chambre peut être convaincue qu'il ne prendra aucune résolution sans être parfaitement renseigné sur tous les intérêts belges engagés dans cette grave question ; il poursuit cette étude avec tout le soin que comporte une si vaste matière, et ce n'est qu'après mûre réflexion qu'il prendra le parti qu'il jugera le plus favorable aux intérêts généraux du pays.
M. le président. - Je demanderai à M. le ministre s'il se rallie à l'amendement de la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Non, M. le président.
M. J. Lebeau. - Messieurs, je ne prends pas la parole pour appuyer la proposition du gouvernement ; je pense qu'elle est d'avance accueillie, sinon par l'unanimité, au moins par une grande majorité de la Chambre. Je n'ai demandé la parole, et j'en userai avec sobriété, que parce que j'éprouve le besoin, avant d'adopter le projet de loi, d'adresser mes remercîments au ministère pour avoir saisi l’occasion la plus opportune et la plus convenable de faire disparaître de notre législation la trace des dissentiments qui ont existé autrefois entre nos anciens frères du Nord et nous.
Si, messieurs, les circonstances ont pu légitimer pendant quelque temps la formule de serment que le projet de loi tend à faire disparaître dans l’état actuel de nos relations avec la Hollande, le maintien de cette formule serait, sinon une injure, tout ou moins un blessant anachronisme.
Chacun de nous, messieurs, a pu apprécier combien sont étroites et avantageuses nos relations politiques et commerciales avec les Pays-Bas, courir en toute trace de nos anciens dissentiments a disparu. Il suffit, pour s’en convaincre, d'avoir eu l'occasion de mettre le pied sur le sol de l'hospitalière Néerlande. Une solidarité politique paraît destinée à devenir de plus en plus étroite entre les deux pays.
Comment en serait-il autrement entre nous et ce peuple, devenu si illustre dans l'histoire, ne fût-ce que pour avoir donné naissance au Taciturne, ce grand promoteur de la liberté de conscience, que nous avons inscrite, après lui, dans notre glorieuse Constitution ? N'est-ce pas ce même pays qui a donné à l'Angleterre le fondateur de la liberté politique et du gouvernement parlementaire, et qui a enseigné la liberté politique à toute l'Europe ?
Je remercie donc encore une fois le ministère d'avoir proposé d'effacer la dernière trace de nos dissentiments avec la Hollande, et je fais des vœux pour que nous voyions se resserrer de jour en jour davantage les liens politiques et commerciaux qui unissent déjà si heureusement les deux pays.
« Art. 1er. Les conseillers provinciaux, les membres de la députation permanente, les conseillers communaux, les bourgmestres et les échevins, avant d'entrer en fonction, prêtent le serment suivant :
« Je jure fidélité au Roi, obéissance à la Constitution et aux lois du peuple belge. »
- Adopté.
« Art. 2. Ce serment sera prêté, en séance publique, par les conseillers provinciaux entre les mains du président du conseil provincial ; par les conseillers communaux et par les échevins entre les mains du bourgmestre ou de celui qui le remplace.
« Les membres de la députation permanente et les bourgmestres prêtent serinent entre les mains du gouverneur ou de son délègue.
« Les fonctionnaires désignés ci-dessus qui, après avoir reçu deux convocations consécutives à l'effet de prêter serment, s'abstiennent, sans motifs légitimes, de remplir cette formatée, sont considérés comme démissionnaires. »
La section centrale propose d'ajouter à cet article :
« Dans ce cas, le gouvernement ne pourra pourvoir au remplacement des bourgmestres et des échevins que sur l'avis conforme et motivé de la députation permanente. »
(page 779) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la section centrale avait soumis officieusement au gouvernement divers amendements qu’elle se proposait d’introduire dans le projet de loi. Ces amendements ont été l’objet de diverses observations de la part de l’administration, observations qui ont été acceptées comme fondées par la section centrale ; et, en définitive, la section centrale s’est bornée à l’introduction d’un seul amendement. Je regrette ne pas pouvoir me rallier à cet amendement ; j’aurais désiré donner cette preuve d’esprit de conciliation à la section centrale ; mais il m’est impossible d’accepter la modification qu’elle propose. Je vais en donner quelques raisons.
En fait, la question ne présente pas la moindre gravité. Il s’agir de résoudre une difficulté qui se présente peut-être une fois tous les 10 ou tous les 15 ans. Depuis 1830, nous avons vu dans deux ou trois communes certains hommes d'un esprit capricieux ou opiniâtre se refuser à prêter serment, après avoir été investis d'un mandat. Le gouvernement s’est trouvé impuissant devant cette résistance. Il est arrivé qu'un conseil communal est resté incomplet pendant plusieurs années par l'effet du refus de serment d'un conseiller.
Il est aussi arrivé qu'un bourgmestre nommé par le Roi, sans décliner le mandat, s'est refusé à prêter serment. Le projet de loi déclare un tel fonctionnaire démissionnaire. La section centrale exige, pour qu'il le soit, l'avis conforme de la députation.
Le projet de loi actuel pourvoit à ce fait qui.je le répète, se présente fort rarement. A l'avenir, le conseiller qui n'aura pas prêté serment sera réputé démissionnaire, après qu'il aura été convoqué deux fois pour prêter ce serment.
Le fait d'un bourgmestre ou d'un échevin qui, ayant reçu un mandat du Roi, se refusait à prêter serment, est encore plus rare ; mais cela s'est vu. Eh bien, que demande le gouvernement ? Que cet individu soit aussi réputé démissionnaire, non de ses fonctions de bourgmestre ou d'’échevins, car il ne l’est pas encore ; mais au moins que le gouvernement ait le droit de lui retirer le mandat qui lui a été offert.
En effet, quand le Roi fait une nomination d'un bourgmestre ou d'un échevin, c'est une offre qu'il fait en quelque sorte au titulaire ; c'est un contrat qui n'est complet que par l'acceptation du titulaire ; cette acceptation se formule par la prestation du serment. Le titulaire se refuse à prêter le serment. Qu'est-ce que le gouvernement a à faire ? C'est d'en nommer un autre. Voilà la théorie que le projet de loi a pour objet de consacrer d'une manière définitive.
En fait, je le répète, 1a question n'a pas d'importance, car il est presque sans exemple qu'un bourgmestre ou un échevin refuse de prêter serment. Cependant il faut être armé contre cette éventualité. La section centrale encouragerait cette sorte de caprice de la part d'un fonctionnaire qui pourrait s'appuyer sur la connivence d'une députation permanente hostile au gouvernement, pour se refuser à prêter serment ; la députation pourrait lui dire : « Vous avez raison ; nous ne donnons pas d'avis conforme, » Et le gouvernement se trouverait dans cette situation : il aurait nommé un individu ; cet individu refuserait de prêter serment ; et le gouvernement ne pourrait pas en nommer un autre !
Je ne pense pas que la section centrale puisse insister sur cette garantie offerte à un individu qui ne la mérita pas. Il veut ou il ne veut pas être bourgmestre. S’il ne le veut pas, qu'il le déclare ; mais qu'il n'aille pas chercher un refuge dans le soin de la députation permanente ; s'il veut être bourgmestre, qu'il prête serment.
Voilà les motifs qui m'engagent à ne pas me rallier à l'amendement de la section centrale.
Messieurs, cette garantie spéciale qu'on cherche pour les bourgmestres et les échevins, on oublie de la réclamer pour des fonctionnaires beaucoup plus importants, pour les membres de la députation permanente. Le membre de la députation, nommé par le conseil provincial, prête serment comme conseiller ; il doit prêter un second serment comme membre de la députation ; si, après deux convocations, il ne le prête pas, il est réputé démissionnaire.
Un membre de la députation qui s'absente pendant un mois, sans congé de la députation, est réputé démissionnaire, sans avoir recours, soit au conseil provincial, soit à l’autorité supérieure. Et cependant, il est investi d’un mandat complet et définitif, et le bourgmestre ou l’échevin qui a été nommé par le Roi et qui n’accepte pas, n’a pas même la qualité de bourgmestre ou d’échevin ; il n’est pas démissionnaire, attendu qu’il n’est pas encore entré en fonctions ; il entre en fonctions lorsqu’il prête serment.
Il a prêté serment ; le voilà en fonctions ; le Roi peut le démissionner pour négligence grave ou pour inconduite notoire, sans devoir demander l’avis de personne ; il peut le démissionner quand il a un mandat complet et définitif ; et il ne pourra pas lui retirer l’ordre de mandat qui lui est faite, sans l’avis conforme de la députation ! Cela n’est pas soutenable.
Je le répète, je ne puis pas me rallier à l’amendement de la section centrale.
M. Wasseige, rapporteur. Messieurs, la section centrale avait émis quelques doutes sur la question de savoir quelles seraient les autorités appelées à préciser la légitimité des motifs qui empêcheraient un des fonctionnaires compris dans le projet de loi en discussion, de se rendre aux deux convocations successives qu’il recevrait, à l’effet de prêter serment ; elle avait, dis-je, des doutes sur les autorités qui auraient à prononcer ce jugement.
La section centrale a soumis ses doutes au gouvernement, et elle en a reçu des explications qui l'ont satisfaite sur presque tous les points. Il résulte en effet de ces explications que les règles ordinaires, en matière de démissions, que toutes les garanties contenues dans les lois organiques, s'appliquent également à cette démission tacite créée par le projet de loi.
C'est ainsi, notamment, que quant à la démission du conseiller communal qui, sans motif légitime, s'abstient de se rendre à deux convocations successives pour prêter le serment exigé par la loi, il y a appel devant la députation permanente comme pour toute autre démission qu'on pourrait lui attribuer. La section centrale a trouvé dans ces règles ordinaires, toutes les garanties suffisantes ; elle n'a plus eu qu'un doute, c'est pour la question des bourgmestres et échevins.
M. le ministre n'a pas bien compte les appréhensions de la section centrale à cet égard. Il s'est placé dans cette hypothèse qu'un bourgmestre ou un échevin refuserait systématiquement et avec persistance à se soumettre à l'accomplissement d'une formalité essentielle pour pouvoir exercer le mandat qui lui a été conféré ; dans ce cas, le gouvernement devrait pouvoir remplacer le fonctionnaire récalcitrant ; il n'y aurait là que l'existence d'un fait matériel facile à constater, et ne prêtant nullement à l’interprétation.
Mais c'est précisément pour le cas opposé que la section centrale a désiré avoir des garanties ; c'est pour le cas où le fonctionnaire en retard de se présenter croirait avoir des motifs légitimes à faire valoir et serait disposé à se présenter à une troisième convocation pour y prêter le serment nécessaire à l'exercice de son mandat.
D'après le projet du gouvernement, le gouverneur, le ministre seul serait juge de la légitimité des motifs que pourrait avoir eus le bourgmestre ou l'échevin de ne pas se présenter d'abord.
La section centrale a pensé que ces fonctionnaires procédant et de l'élection et du choix du gouvernement devaient avoir la garantie de voir apprécier leurs motifs par un corps électif ; elle a voulu que le système qui existe dans la loi communale pour les cas de démission ou par révocation s’appliquât également à celle prévue par la loi actuelle.
Sous l'empire de la loi de 1836, le gouvernement ne pouvait ni révoquer ni suspendre les bourgmestres et les échevins sans l'avis conforme et motivé de la députation permanente du conseil provincial ; en 1842 quand le gouvernement reçut de la loi nouvelle l'autorisation de nommer les bourgmestres en dehors du conseil, il sollicita et obtint le droit de ne plus être astreint à demander l'avis des députations permanentes pour la révocation des bourgmestres.
Mais ce ne fut qu'après de longues discussions et malgré une vive opposition que ce pouvoir lui fut accordé.
Une des raisons qui décidèrent la majorité à admettre ce changement à la loi communale, c'est qu'il eût été singulier que, pouvant choisir le bourgmestre en dehors du conseil, le gouvernement eût été obligé de se soumettre à l'avis conforme d'un corps électif pour prononcer la révocation ou la suspension du fonctionnaire nommé sans l'élection et malgré l'élection.
Voilà une des raisons qui ont décidé la Chambre à permettre au gouvernement de suspendre ou de révoquer les bourgmestres sans l'avis conforme de la députation. On n'a pas voulu faire deux catégories ; et voilà pourquoi la loi a été étendue également aux bourgmestres nommés dans le sein du conseil communal.
Des raisons d'ordre public ont encore figuré parmi les motifs qui ont déterminé la Chambre ; on a dit : Le bourgmestre est chargé de la police, il doit maintenir l'ordre ; si, dans des circonstances graves, le bourgmestre qui est l'agent immédiat du gouvernement refusait de faire son devoir, le gouvernement doit pouvoir le remplacer immédiatement, sous peine de compromettre l'ordre et la tranquillité publique.
Voilà les principaux motifs qui ont engagé la Chambre à accorder au gouvernement le pouvoir qu'il réclamait, cela ressort à l'évidence des discussions qui eurent lieu à cette époque. Mais pour ces cas de révocation, il y avait un correctif qui n'existe pas ici, c'est que la révocation ne peut être prononcée que pour inconduite notoire ou négligence grave ; l’inconduite notoire suppose des faits qui ont eu un grand retentissement, qui sont pour ainsi dire de notoriété publique, et l’arbitraire ou l’injustice ne peuvent guère se présumer.
Mais ici il n'en est pas ainsi, il s'agit tout simplement d'apprécier la légitimité des motifs qui ont pu empêcher un fonctionnaire, d'ailleurs capable et dévoué, de se présenter à une première et à une seconde convocation : des affaires urgentes, une indisposition, une absence, que sais-je ! et dans ce cas, l'arbitraire, l'erreur même du gouvernement pourrait être à craindre si on ne demandait pas l'avis conforme des députations.
Quant aux échevins la question est plus claire ; la loi a toujours maintenu cette obligation de l'avis conforma de la députation. Elle est encore inscrite dans l'article 56 de la loi communale pour la suspension on la révocation de ces fonctionnaires, pourquoi en serait-il autrement pour le cas qui nous occupe ?
Quand j'ai soumis au gouvernement l'amendement de la section contrôle, il a reconnu qu'il y avait quelque chose à faire et il a consenti à l'introduction d'un paragraphe ainsi conçu : « Le remplacement des bourgmestres (page 780) et des échevins ne sera prononcé qu'après avoir entendu la députation permanente."
Vous le voyez, le gouvernement consentait à consulter 1es députations, il trouvait qu'il n'y avait pas urgence d'opérer le remplacement, qu'il n'y avait pas péril en la demeure. Mais il ne voulait pas être astreint à l'avis conforme et motivé. J'ai dit que, pour les échevins, cette obligation existe encore dans la loi. J'ai expliqué pourquoi on l'avait supprimée pour les bourgmestres quand il s'agit de révocation pour inconduite notoire ou de négligence grave. Je ne vois donc aucune raison pour changer ici le système de la loi communale.
Quant à astreindre le gouvernement à demander l'avis de la députation sans l'obliger à le suivre, dans une question de franchise communale, cela ne me paraît ni logique, ni exécutable. J'aurais compris que le gouvernement eût refusé complètement les garanties que nous réclamions, c'est un système ; mais du moment qu'il est entré dans la voie de la conciliation, qu'il consent à prendre l'avis de la députation, il n'est pas possible que, malgré l'avis contraire, il puisse passer outre et déclarer le bourgmestre démissionnaire alors que la députation permanente aurait déclaré légitimes les motifs allégués par ce fonctionnaire pour justifier son retard à prêter serment.
Du moment que le gouvernement consent à prendre l'avis de la députation, il ne peut pas se dispenser de se conformer à l'avis motivé de ce collège.
M. le ministre vous a dit que le membre de la députation serait destitué, dans le même cas ; cela est vrai, mais il sera destitué par ses pairs ; c'est la députation qui appréciera si les motifs présentés par lui sont ou ne sont pas légitimes ; là il n'y a pas d'arbitraire possible, il sera jugé par ses pairs et il le sera une seconde fois par le conseil ; car c'est le conseil provincial seul, sans l'intervention du gouvernement, qui devra pourvoir à son remplacement ; il appréciera en degré d'appel la légitimité de ses motifs ; s'il trouve qu'ils ont été mal appréciés, il sera libre de renommer le même conseiller membre de la députation permanente. Là te trouvent des garanties que ne présentait pas pour les bourgmestres et les échevins le projet de loi que nous discutons, c'est pourquoi nous avons cherché à les y introduire et nous espérons que vous les y maintiendrez.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je pense qu'il y a confusion dans les idées de l'honorable membre. Le gouvernement n'enlève aucun titre à l'élu. Le gouvernement désigne un conseiller communal pour en faire un bourgmestre ou un échevin. Le bourgmestre on l'échevin nommé par le gouvernement n'accepte pas, ne veut pas prêter le serment, ne veut pas accomplir cette condition essentielle. Eh bien, le gouvernement retire son offre et l'individu reste conseiller communal. On ne lui enlève nullement son titre électif.
Qu'est-ce qui peut provoquer cette défiance vis-à-vis du gouvernement ? Il s'agit d'un individu qui est investi de la confiance du gouvernement, puisque celui-ci le nomme. Quinze jours se passent, l'individu, investi de cette marque de confiance refuse de prêter le serment. Quel intérêt le gouvernement aurait-il à lui chercher chicane, à recourir à des moyens illégitimes, à lui faire une mauvaise querelle pour faire en sorte qu'il ne soit pas bourgmestre ? Ce serait une inconséquence singulière la part du gouvernement. Au moment où il vient d’investir le conseiller de sa confiance, il chercherait à lui ravir cette marque de confiance quinze jours après la lui avoir donnée ? Cela ne soutient pas une discussion sérieuse. Le gouvernement sera le meilleur juge des motifs apportés à l'appui de ce refus de serment de la part d'un conseiller communal. Si celui-ci est malade, s'il est à l'étranger, le gouvernement attendra sa guérison ou sou retour.
Le gouvernement, je le répète sera le meilleur juge des motifs, le juge le plus indulgent. On ne peut pas supposer que le gouvernement traitera son favori avec défaveur.
Du reste, messieurs, le droit du gouvernement me paraît tellement clair, que pour ma part je ne verrais pas d’inconvénient à retirer de l'article la disposition qui concerne le bourgmestre et les échevins, car je ne veux pas qu'on puisse mettre un seul instant en doute le droit du gouvernement de retirer son mandat au conseiller communal qui refuse de prêter serment. Ainsi, si l'on voulait retrancher cette partie de la disposition, je n'y verrais pas d'inconvénient.
- Un membre. - Il y aurait une lacune.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je crois que le droit du gouvernement à cet égard est absolu.
M. Rodenbach. - Il peut destituer pour négligence grave.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il ne s'agit pas ici de destitution. Le gouvernement peut destituer un bourgmestre pour négligence grave. Mais le bourgmestre qui n'accepte pas son mandat, n'est pas destitué ; il n'est pas frappé de démission, attendu qu'il n'est pas entré en fonctions ; il n'a pas rempli les conditions voulues ; il n'y a donc pas de contrat entre lui et le gouvernement. Le gouvernement lui fait une offre ; il ne l'accepta pas. Le gouvernement fait l'offre à un autre et voilà tout. La députation permanente n'a pas ici à intervenir.
S'il s'agissait d'enlever un mandat à un élu l'affaire serait beaucoup plus grave. Voilà tout.
S’il s'agit de le dépouiller d'un mandat électif, la loi lui réserve le recours à la députation permanente qui peut juger de la légitimité des motifs. Mais encore une fois, dans le cas qui nous occupe, on n'enlève rien à l'individu qui ne prête pas serment comme bourgmestre ou échevin. Il n'a pas à se plaindre si, n'acceptant pas l'offre qui lui a été faite, on la retire.
M. Wasseige, rapporteur. - Je dois répéter que l'argumentation de M. le ministre de l'intérieur est basée sur une confusion. C'est en confondant le refus persistant de prêter serment avec le simple retard dans l'accomplissement de cette formalité essentielle, qu'il combat l'amendement de la section centrale, or c'est là une erreur capitale.
M. le ministre nous dit : L'individu ne veut pas accepter l'offre qui lui est faite ; il refuse de prêter serment. Pourquoi voulez-vous que le gouvernement soit obligé de prendre l'avis d'une députation permanente pour le remplacer ? Mais c'est précisément pour le cas contraire que la section centrale désire l'intervention de la députation permanente ; c'est pour le cas où l'élu accepte le mandat et veut prêter serment, mais où il prétend avoir eu des motifs suffisants pour ne pas se rendre aux deux convocations successives qui lui ont été faites ; vous voulez, vous gouvernement, apprécier seul ces motifs ; vous dites qu'ils ne sont pas légitimes et vous déclarez démissionnaire un fonctionnaire qui veut accepter le mandat que vous lui avez confié, et que vous voulez lui retirer.
Si le bourgmestre ou l'échevin nommé, dit M. le ministre, persiste à ne pas vouloir prêter serment, le gouvernement retire l'offre qu'il lui a faite.
Mais ce n'est pas le cas. La section centrale vous dit : il s'agit du cas où l'individu se déclare prêt à accepter l'offre du gouvernement, mais où il prétend n'avoir pu le faire dans les délais indiqués par la loi ; c'est alors que nous désirons que la légitimité des motifs qui l'ont empêché de se rendre aux deux convocations successives, ne soit pas laissée à l'appréciation arbitraire et exclusive du gouvernement.
La section centrale désire que cette appréciation soit faite d'abord par un corps électif, attendu que le mandat de bourgmestre réunit les deux éléments : l'élection et le choix du gouvernement. La section centrale dit que cette manière de voir rendre dans l'esprit de la loi de 1836 qui exige que, pour la révocation et le remplacement d'un échevin, il y ait un avis motivé et conforme de la députation permanente. Elle est d'avis qu'il n'y a pas de motifs pour ne pas placer le bourgmestre dans la même position que les échevins, pour le cas qui nous occupe.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il s'agit des échevins entrés eu fonctions.
M. Wasseige. - On dit : Qu'est-ce que le gouvernement a fait pour provoquer cette grande défiance ? Mais je dirai : Qu'est-ce que les députations permanentes ont fait pour provoquer cette grande défiance ? Je puis donc rétorquer l'argument ; il ne signifie rien.
M. le ministre dit qu'il consentirait au retranchement de la partie de la disposition qui concerne le bourgmestre et les échevins, tellement il est persuadé que les droits du gouvernement ne peuvent être mis en doute. Mais si ce retranchement avait lieu, il y aurait une lacune dans la loi. On ne saurait plus quand on peut déclarer un bourgmestre ou un échevin démissionnaire pour refus de serment. Nous retomberions dans les inconvénients que la loi veut prévoir. La loi perdrait son caractère de généralité ; autant vaudrait ne rien faire du tout que de créer des catégories diverses. Si le gouvernement ne croit pas avoir besoin du droit qu'il réclame, qu'il y renonce pour tous, ou qu'il le maintienne pour tous.
Mais telle n'était pas l'opinion du gouvernement lorsqu'il a présenté la loi ; cela ressort à l'évidence de sou exposé des motifs, et je m'étonne réellement de la facilité avec laquelle il paraît changer d'opinion dans une matière aussi délicate.
Ainsi je crois que, dans l'intérêt d'une bonne législation, il faut laisser la loi aussi complète qu'elle nous a été présentée ; mais qu'il faut aussi la mettre en harmonie avec la loi communale, et demander, dans le cas qui nous occupe, l'avis conforme de la députation permanente.
Je le répète une dernière fois, le gouvernement a trouvé qu'il y avait quelque chose à faire ; il s'est déclaré prêt à accepter un amendement en vertu duquel on prendrait l'avis de la députation permanente. Nous ne sommes en désaccord que sur le point de savoir s'il faudra l'avis conforme.
Eh bien, nous désirons que ce soit la députation permanente qui juge des motifs qui sont bien mieux appréciables sur les lieux, qu'à Bruxelles au ministère de l'intérieur. Nous voulons qu'un ministre ne puisse pas déclarer démissionnaire un bourgmestre qu'une députation permanente aura reconnu avoir donné des motifs légitimes de son refus de serment.
Je déclare donc maintenir l'amendement de la section centrale.
M. Goblet. - Je suis tout disposé à voter l'amendement de la section centrale, parce que je pense que le gouvernement n'a aucune raison de s'effrayer de l'avis conforme d'une députation permanente et que cet avis conforme est toujours une garantie pour celui qu'on veut considérer comme démissionnaire.
Mais je crois que la rédaction de l'amendement de la section centrale laisse à désirer au point de vue de la loi communale et du pouvoir qui doit rester au gouvernement. Ainsi il dit ; « Dans ce cas, le gouvernement ne pourra pourvoir au remplacement des bourgmestres et des échevins que sur l'avis conforme et motivé de la députation permanente. »
(page 781) Je crois qu'il faudrait substituer aux mots « pourvoir au remplacement », une autre expression qui ne ferait pas intervenir en quelque sorte la députation permanente dans la nomination du bourgmestre ou de l'échevin. On pourrait dire : « Dans ce cas le gouvernement ne pourra considérer le titulaire comme démissionnaire que sur l'avis conforme de. »
Si l'amendement était modifié en ce sens, la Chambre pourrait le voter sans inquiétude aucune donner ainsi, comme le désire la section centrale, au démissionnaire on plutôt à celui qui, étant nommé, n'a pas prêté serment, certain recours contre l'arbitraire du pouvoir, que l'on peut toujours admettre comme possible.
M. Dolez. - Je ne puis admettre l’amendement de de la section centrale.
On demande que l'on ne puisse considérer, non pas comme démissionnaire, car l'expression me paraît impropre, nuis comme non acceptant, le bourgmestre ou l'échevin qui ne prête pas serment, que sur l'avis conforme de la députation permanente. Mais je suppose le cas où une députation permanente dise qu’il n'y a pas lieu de considérer un bourgmestre ou un échevin comme non acceptant, bien qu'il ne prête pas serment. Où en êtes-vous ? Vous arrivez à rendre vaine la disposition de la loi qui astreint ces fonctionnaires à la prestation du serment. Vous ne pouvez vouloir une pareille inconséquence.
Il me paraît donc essentiellement logique, et d'ailleurs à l'abri de toute espèce de doute, d'adopter la proposition du gouvernement. Le gouvernement présente un titre de bourgmestre ou à la condition que ce titre sera accepté par la prestation du serment. On ne l’accepte pas ; il n’y a rien de fait.
Je sais que l’honorable M. Wasseige nous répond : Sans contredit, s'il n'y a pas acceptation le principe est incontestable. Mais ce que je veux, ajoute honorable membre, c'est qu'il y ait un corps délibérant sur la légitimité des motifs d'un retard dans la prestation du serment.
Mais c oyez-vous donc que le gouvernement n'accueillera pas ces motifs lorsqu'ils seront fondés ? Quel intérêt aurait-il à agir autrement ? Il s'agit d'un fonctionnaire qu'il vient de nommer. C'est lui qui a conféré à l'élu le titre de bourgmestre ou d'échevin, et vous voudriez qu'immédiatement après, il recourût à un expédient pour le lui retirer !
Il est clair que si le législateur doit se montrer défiant vis-à-vis du gouvernement, ce n'est pas lorsque celui-ci n'a nul intérêt à poser l'acte qui provoquerait la défiance. Je crois donc que la discussion n'est pas sérieuse, qu'il n'y a nul intérêt engagé dans ce débat et que les principes demandent que l'on adopte purement et simplement la proposition du gouvernement.
- La discussion est close.
L'amendement de la section centrale est mis aux voix ; il n'est pas adopté.
M. Dolez. - Je crois qu'il faut changer la fin du dernier paragraphe de l'article et qu'au lieu des mots : « sont considérés comme démissionnaires », il faut dire : « sont considérés comme non acceptants. »
Le titre n'existe pis lorsqu'il n'y a pas prestation de serment, et dès lors il n'y a pas démission.
M. Wasseige. - Je crois que le mot « démissionnaire » peut être maintenu. C'est un mot beaucoup plus administratif que le terme « non acceptant », qui, je crois, n'a jamais figuré dans une loi. Le refus de serment est une sorte de démission ; c'est une démission tacite.
Mais j'ai une autre observation à faire. L'amendement de la section centrale a été rejeté. Mais ce vote n'entraîne pas le rejet de l'amendement auquel a consenti le gouvernement et je pense que cet amendement doit être mis aux voix. Il est ainsi conçu : « Le remplacement du bourgmestre ou de l’échevin ne sera prononcé qu'après avoir entendu la députation permanente. »
Si nous n'avons pas obtenu une garantie aussi complète que nous l'eussions désiré, ce n'est pas un motif pour que nous renoncions toute espèce de garantie. Je ne crois pas d'ailleurs que le gouvernement qui a consenti à cet amendement voie quelque inconvénient à ce qu’il soit inséré dans la loi : ce changement de manière de voir, à si peu d'intervalle, ne s'expliquerait vraiment pas.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Voici comment les choses se sont passées. L'honorable M. Wasseige est venu dans mon cabinet, il a conféré avec un des employés, qui lui a tenu une note officieuse. Je ne désavoue pas cette note ; mais elle n'avait pas de caractère officiel. J'ai dit que par esprit de conciliation, si l'on voulait prendre l'avis de la députation permanents je ne m'y opposerais pas. Mais je me suis opposé d'une manière absolue à l’avis conforme.
Le mot « démissionnaires », ainsi que l'a fait observer l'honorable M. Dolez, n’est pas complètement exact. Car le conseiller qui a reçu une offre de nomination aux fonctions de bourgmestre ou d'échevin et qui n’a pas accepté, qui n'a pas prêté serment, ne peut être qualifié de démissionnaire. L’expression proposée par l'honorable M. Dolez serait plus juste. On pourrait dire : « seront considérés comme n'acceptant pas leurs fonctions. »
M. Wasseige, rapporteur. - Je dois répondre immédiatement à M. le ministre, que la note qui m'a été remise par un de ses employés supérieurs du ministère de l'intérieur comme émanant du gouvernement lui-même était tellement peu confidentielle, qu'il avait été convenu avec lui qu'elle serait insérée textuellement dans le rapport pour faire connaître la manière de voir du gouvernement sur l'interprétation de la loi.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai pas parlé de confidence.
M. Wasseige. - Vous avez parlé d'une note purement officieuse et je tenais à faire connaître que je n'avais pas commis la moindre indiscrétion en donnant de la publicité à cette note.
Je demande de nouveau si M. le ministre s'oppose aujourd'hui à ce qu'on insère dans la loi le paragraphe auquel le gouvernement avait consenti d'abord.
Quant au mot « démissionnaires », je persiste à croire qu'il doit être maintenu.
Il y a eu une nomination qui n'a pas été acceptée, il y a eu un mandat conféré ; on ne dit pas d'ailleurs dans la loi : « seront démissionnaires », on dit : « seront considérés comme démissionnaires, » Je crois que c'est l'expression propre, l'expression la plus usitée et la plus convenable.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai pas accusé l'honorable rapporteur d'indiscrétion ; je n'ai pas dit que la note fût confidentielle ; j'ai dit qu'elle était officieuse. Pour que cette note pût avoir un caractère officiel, ii aurait fallu procéder comme on le fait ordinairement : M. le président ou M. le rapporteur de la section centrale écrit au ministre et le ministre répond par lettre signée, voilà les rapports officiels. Mais quelquefois le rapporteur vient trouver le chef de service et reçoit des explications : alors des notes sont remises de la main à la main, ces notes n'ont pas de caractère officiel ; c'est ainsi que les choses se sont passées. Je ne désavoue pas la note qui a été insérée dans le rapport et je n'accuse pas M. Wasseige d'avoir commis une indiscrétion en la publiant ; je dis seulement qu'on ne doit pas en tirer parti contre le gouvernement ; si la note avait eu un caractère officiel, il y a peut-être certains passages que je n'aurais pas conservés.
M. le président. - On a proposé de dire « non acceptant » au lieu de « démissionnaires. »
M. de Theux. - Je crois messieurs, qu'il vaut mieux maintenir le terme « démissionnaires ».
L'arrêté royal de nomination a conféré au fonctionnaire un titre qui est irrévocable à moins que le fonctionnaire ne donne lieu à la révocation aux termes de la loi. (Interruption.)
L'emploi est conféré : s'il n'était pas conféré, vous n'auriez pas besoin d'une loi pour pouvoir le retirer.
M. Dolez. - J'ai demandé un changement de rédaction parce qu'il me semble qu'on ne peut donner sa démission que de fonctions dont on est définitivement investi ; mais puisqu'on tient au mot « démissionnaires » et que le sens de cette expression a été suffisamment expliqué, je n'insiste pas.
M. le président. - M. Wasseige a proposé d'ajouter à l'article la disposition indiquée dans la note que reproduit le rapport et qui est ainsi conçue :
« Le remplacement des bourgmestres et des échevins ne sera prononcé qu'après avoir entendu la députation permanente. »
Je mets cet amendement aux voix.
- L'amendement n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté tel qu'il a été proposé par le gouvernement.
« Art. 3. Les articles 48 et 103 de la loi provinciale et l'article 61 de la loi communale sont abrogés.
- Adopté.
Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet, qui est adopté à l'unanimité des 83 membres présents.
Ce sont : MM. de Mérode-Westerloo, de Paul, de Renesse, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Smedt, de Terbecq, de Theux, de Vrière, d'Hoffschmidt, Dolez, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frère-Orban, Goblet, Grandgagnage, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Koeler, Landeloos, Lange, Laubry, Ch. Lebeau, J. Lebeau, Loos, Magherman, Manilius, Mercier, Moncheur, Moreau, Muller, Nélis, Neyt, Nothomb, Orban, Pierre, Pirmez, Rodenbach, Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Saeyman, Savart, Snoy, Tack, Tesch, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Dormael, Van Iseghem, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Renynghe, Van Volxem, Vervoort, Vilain XIIII, Wasseige, Ansiau, Beeckman, Carlier, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bast, C. de Brouckere, H. de Brouckere, Dechentinnes, De Fré, de Gottal, De Lexhy, de Liedekerke, Deliége, de Man d'Attenrode et Orts.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition, datée de Malines, le 7 novembre 1859, le sieur (page 782 Bruyninckx demande que le gouvernement se prononce sur l'offre qu'il lui a faite de lui céder ses collections de dessins et de gravures, à dire d'experts.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 8 novembre 1859, le sieur Masquelin propose de rétablir, pour les membres des deux Chambres, le serment exigé par l'article 84 de la loi fondamentale du 24 août 1815.
Votre commission vous propose, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Laeken, le 7 novembre 1859, le sieur Greef réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir un extrait d'un jugement qui le concerne.
Comme l'objet de cette pétition est de la compétence des tribunaux, votre commission vous propose, messieurs, l'ordre de jour.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition, datée d'Arquennes, le 30 septembre 1859, le sieur Fontigny demande que son fils Léopold-Nicolas, soldat au 9ème régiment de ligne, lui soit renvoyé avec un congé définitif ou temporaire.
A l'appui de sa demande, il allègue que, à cause de ses infirmités et de son âge avancé, il a besoin de ce fils pour le soutien de sa famille.
Votre commission, sans rien préjuger, vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Berthem en octobre 1859, la veuve du sieur Brauckaer, ancien commissaire voyer et secrétaire communal, demande un secours.
La pétitionnaire, à cause de son âge très avancé, sollicite un secours plus élevé que ceux qu'elle a obtenus jusqu'à présent.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Flaches, le 29 août 1859, des habitants de Flaches demandent que ce hameau de la commune de Gerpinnes soit doté d'une école communale, d'une église et qu'il ait un scrutin séparé dans ses élections communales. »
A l'appui de leur demande, les pétitionnaires allèguent que ce hameau renferme une population de 450 habitants, qu'il est distant d'une bonne demi-lieue du centre de la commune et qu'il n'a pour tout établissement d'instruction qu'une école gardienne.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à MM. les ministres de l'intérieur et de la justice.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Ledeberg, lez-Gand, le 15 août 1859, le sieur Willems, ancien garde champêtre de cette commune, demande une pension.
Il se plaint de la disgrâce qu'il a encourue après 32 ans de bons services.
Votre commission vous propose, messieurs, sans rien préjuger, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition de St-Gilles lez-Termonde, le 15 août 1859, la nommée de Gieter réclame l’intervention de la Chambre pour obtenir de son lieu de domicile de secours dis moyens de subsistance, ou pour être admise dans un hospice de vieillards ou d'incurables.
Comme l'objet de cette demande est du ressort des administrations communales et provinciales, votre commission vous propose, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Saint-Laurent, le 20 août 1859, le sieur Van Damme, porteur de contraintes dans cette commune, demande que sa position soit améliorée.
Même demande des sieurs de Bruyckere, Bruggeman, Lammy et Buyck.
Comme ces fonctionnaires ne sont pas nommés par l'Etat, votre commission vous propose, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition sans date, des meuniers dans la Flandre occidentale demandent la réduction du droit de patente auquel ils sont assujettis.
Même demande du sieur de Stoop.
Ils allèguent à l'appui de leur demande, la concurrence ruineuse qui leur est faite par les moulins à vapeur.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des finances.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétitions sans date, des habitants de Bruxelles et de Termonde présentent des observations contre les articles du Code pénal relatifs aux coalitions.
Les pétitionnaires font remarquer d'abord que ces articles établissent une distinction entre le maître et l'ouvrier, contradictoirement à la Constitution qui proclame l'égalité de tous les Belges.
Ils croient qu'il suffira d'avoir appelé votre attention sur une injustice aussi criante pour que ces stipulations partiales disparaissent de notre législation et pour que la loi, si son existence est jugée nécessaire, atteigne au moins dans les mêmes limites les maîtres et les ouvriers. Ce n'est pas à la fortune, disent-ils, que se mesure la culpabilité, et, ajoutent-ils, encore qu'il en fût ainsi, serait-il raisonnable de se montrer le plus rigoureux contre le travailleur déshérité ?
Ils demandent s'il importe de conserver dans le Code la loi sur la coalition, ou plutôt si cette loi a sa raison d'être. La Constitution permettant aux Belges de se réunir, de s'associer, d'ériger des sociétés, de faire des conventions, et la coalition, disent-ils, n'étant qu'une entente, une espèce d'accord verbal entre plusieurs personnes qui s'engagent à observer une certaine marche dans le but de faire hausser ou baisser le salaire, de diminuer ou d'augmenter les heures de travail, etc., ils ne conçoivent pas qu'il y ait dans les faits de ce genre quelque chose de répréhensible. Ils pensent que chacun est maître d'accorder ou de réclamer pour telle espèce de travail le prix qui lui convient, si le système de liberté qui est la base de notre édifice constitutionnel, n'est pas une lettre morte.
Après quelques autres observations à l'appui de leur demanda, ils finissent en disant que, à quelque point de vue qu'on se place, le bon sens, la justice et d'ailleurs la Constitution condamnent la loi des coalitions.
Messieurs, votre commission vous propose le renvoi de cette pétition à votre commission du Code pénal.
M. le président. - La commission ayant terminé son travail, je crois qu'il faudrait ordonner le dépôt sur le bureau pendant la discussion du Code pénal.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Oui, M, le président.
- Le dépôt sur le bureau est mis aux voix et adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 12 novembre 1859, le sieur Lafont, ouvrier ciseleur en ladite ville, demande que la loi électorale déclare électeur tout individu sachant lire et écrire.
Votre commission croit que la Chambre n'est pas disposée, pour le moment, à provoquer une pareille reforme, et, par conséquent, vous propose, messieurs, le dépôt au bureau des renseignements.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par différentes retirions datées du mois d'août, le conseil communal de Sivry, des habitants de Beaumont, les conseils communaux de Rance et de Thuin, des habitants de Sivry, des habitants de Piéton, le conseil communal de Courcelles, les membres du conseil communal de la même commune, et le conseil communal de Renlies, prient la Chambre d'accorder à la compagnie Derval la concession d'un chemin de fer de Manage à Momignies.
Les pétitionnaires font valoir des considérations qui méritent d'attirer l'attention du gouvernement, et, par conséquent, votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des travaux publics.
(page 783) M. Van Leempoel. - Une partie de la riche vallée agricole, intitulée le pays de Liège, dans l'arrondissement de Thuin, le canton de Beaumont, privé de voies navigables, de chemins de fer, entouré de montagnes les plus roides et, dans les mauvais temps, les moins praticables pour le transport, demande le chemin de fer de Luttre à Momignies ; le bourg industriel de Jivry où il y a des peignages, des filatures et des lissages de laine, fait le même vœu. Les scieries et polissages de marbre de Grandrieu, Leugnies, le bourg de Rance, dont les ateliers de marbre sont si renommés et le commerce de bois si étendu, réclament cette voie de communication ; la commune de ²Froidchapelle si importante et dont les constructions nouvelles se multiplient à l'infini, attendent un si heureux résultat pour leurs intérêts et leur commerce de bois, que j'ai l'honneur de demander le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des travaux publics en les recommandant avec les plus vives instances pour arriver à une solution favorable.
(page 782) M. de Paul. - Je m'associe à mon honorable collègue M. Van Leempoel pour appeler l'attention du gouvernement sur la haute utilité du chemin de fer projeté entre Manage et Momignies, qui fait l'objet des pétitions dont la Chambre est saisie. Les observations présentées par mon honorable ami suffisent sans doute pour que le gouvernement comprenne toute cette utilité. Je n'ajouterai qu'un mot. Ce chemin de fer, d'une exécution facile et peu coûteuse, n'est que le prolongement naturel et nécessaire de la grande ligne, aujourd'hui en construction, de Paris à la frontière belge par Soissons, Laon, Vervins, etc.
Non seulement ce chemin de fer doit tirer de l'isolement dans lequel se trouvent les nombreuses localités qui réclament aujourd'hui, mais il doit aussi avoir pour résultat de mettre les bassins de Charleroi et du Centre en communication directe avec un grand nombre de marchés de l'Est de la France, spécialement avec ceux du département de l'Aisne et avec l'extrémité est du département du Nord, où l'industrie a fait de grands progrès depuis quelques années, progrès qui ne peuvent que croître à raison de l'abaissement du prix du charbon dans ces localités.
D'un autre côté, ce chemin de fer doit permettre à nos bassins houillers de s'approvisionner de bois dans les nombreuses forêts du département de l'Aisne et de la sous-préfecture d'Avesnes.
En outre il présentera, pour la plus grande partie de la Belgique, la ligne la plus directe et la plus courte vers Paris. Ainsi par cette voie, quand elle sera achevée, la ville de Bruxelles sera rapprochée de 25 kilomètres au moins de Pans.
Messieurs, ce n’est pas le moment de développer les motifs que nous avons à faire valoir en faveur de cette demande de concession. L’utilité de cette ligne est tellement évidente, que je suis convaincu que le gouvernement fera tout ce qui dépendra de lui pour que cette demande aboutisse à un résultat prompt et avantageux.
Quand l'occasion s'en présentera, je développerai les motifs qui militent en faveur de la demande.
- Personne ne réclamant plus la parole, le renvoi des pétitions à M. le ministre des travaux publics est prononcé.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Lille, le 5 octobre 1859, la dame Lahouque demande que la loi du 18 décembre 1857 soit rendue applicable feux veuves remariées avant cette époque.
(page 783) Comme la loi ne peut avoir un effet rétroactif, votre commission vous propose, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée de Denderleeuw, le 4 avril 1859, des habitants de cette commune demandent que dans la partie flamande de notre pays l'on fasse usage de la langue flamande dans les actes publics, que le gouvernement ne nomme, dans cette partie du royaume, que des employés connaissant cette langue et que, par conséquent, il soit donne suite aux propositions de la commission pour la langue flamande.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée d'Anvers, le 22 avril 1859, la veuve Bollinckx demande une loi qui accorde une demi-pension aux veuves pensionnées d'officiers lorsqu'elles se remarient.
Depuis que ce feuilleton a été distribué aux membres de cette Chambre, une autre pétition, sans date, de veuves d'officiers, m'a été remise, demandant la même faveur.
Les pétitionnaires pensent que la loi qui accorde une demi-pension aux veuves sans enfant ressortissant aux caisses civiles, devrait, pour les mêmes motifs, être applicable aux veuves d'officiers pensionnées sans enfant.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à MM. les ministres des finances et de la guerre.
- Adopté.
M. Van Renynghe, rapporteur. - Par pétition datée d'Arlon, le 16 novembre 1859, le sieur Ney, cultivateur à Arlon, se plaint d'une décision du conseil de milice par suite de laquelle son fils est appelé au service.
Le pétitionnaire allègue que le substituant de son fils, exempté du service par la présence au corps de son frère, a été appelé sous les drapeaux, et que, par conséquent, son fils a été incorporé.
Sa réclamation est appuyée par différentes pièces qui méritent d'être examinées.
Votre commission vous propose, messieurs, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
La séance est levée à 4 heures 3/4.