(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859)
(page 881) (Présidence de M. Verhaegen.)
M. de Boe fait l'appel nominal à 3 heures et un quart.
M. de Moor lit le procès-verbal de la séance précédente.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Boe présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Les membres du conseil communal d'Achel demandent la construction d'une route en gravier de Brée à Lille-Saint Hubert. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des habitants de Gulleghem demandent une loi qui supprime les dépôts de mendicité et les remplace par des établissements agricoles. »
M. H. Dumortier. - Je proposerai le renvoi de cette requête à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.
- Adopté.
« Des habitants de Saint-Servais prient la Chambre d'introduite dans les élections à tous les degrés le vote par lettre alphabétique. »
« Même demande d'habitante de Profondeville. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi concernant une nouvelle répartition des représentants et des sénateurs.
M. Lelièvre dépose un rapport sur une demande de grande naturalisation.
M. de Bronckart dépose le rapport sur la demande en grande naturalisation du sieur Bisschofsheim et un rapport sur une demande en naturalisation ordinaire.
M. Savart dépose trois rapports sur autant de demandes en naturalisation ordinaire.
M. de Boe dépose un rapport sur une demande en naturalisation ordinaire.
- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports et les met à la suite de l'ordre du jour.
M. Van Iseghem dépose le rapport de la section centrale sur le budget des non-valeurs et remboursements.
Ce rapport sera imprimé et distribué et figurera à la suite de l'ordre du jour de demain.
M. Lelièvre. - Le gouvernement des Pays-Bas avait accordé, avant 1830, des traitements d'attente, de non-activité et de réforme à plusieurs fonctionnaires publics dont les emplois avaient été supprimés.
Depuis la révolution de 1830, quelques-uns de ces fonctionnaires réclament le payement de ces traitements.
Le gouvernement belge n'ayant pas acquiescé à leur demande, des actions judiciaires lui furent intentées par les intéressés et elles furent accueillies par divers jugements et arrêts qui ont acquis l'autorité de la chose jugée. Une décision émanée de la cour de cassation maintint un arrêt de la cour de Bruxelles qui avait donné gain de cause aux héritiers du sieur Coupez, ancien receveur particulier à Binche.
Le 13 mai 1854, M. Liedts, alors chargé du département des finances, déposa un projet de loi dans le sens de la proposition soumise actuellement à la Chambre.
Elle reçut l'approbation de la majorité des sections, et le 17 janvier 1856 j'eus l'honneur de déposer, au nom de la section centrale, un rapport qui concluait à l'adoption du projet. La clôture de la session de 1856-1857 empêcha une discussion que nous avons sollicitée à diverses reprises, de concert avec plusieurs de nos honorables collègues.
Enfin, par suite de la dissolution prononcée en novembre 1857, la Chambre ayant été définitivement dessaisie du projet, nous venons reproduire la proposition qui dès 18à5 a été formulée par le gouvernement.
Peu de mots suffiront pour en démontrer le fondement.
Des condamnations judiciaires en dernier ressort sont intervenues contre le gouvernement du chef des causes énoncées au projet. Nous pensons que la légitimité de la dette ne peut plus être remise en question et que le pouvoir législatif n'est appelé qu'à décréter les mesures d'exécution qui, concernant les intérêts du trésor public, ne peuvent pas être soumises aux tribunaux.
La division des pouvoirs est la base de nos institutions et tient à l'essence du gouvernement représentatif.
En conséquence, ce qui a été décidé par le pouvoir judiciaire, dans les limites de sa compétence, doit être tenu pour une vérité irrécusable et ne peut être infirmé par aucun autre pouvoir.
Or, il est impossible de contester la compétence de l'autorité judiciaire pour juger si les dettes dont il s'agit sont légitimement réclamées par les intéressés.
Ne perdons pas de vue d'abord que l'autorité judiciaire, qui est appelée à statuer sur sa compétence, l'a nécessairement reconnue puisqu'elle a statué au fond sur le mérite des contestations qui lui étaient soumises.
Cette compétence a d'ailleurs été formellement décrétée par un arrêt de la cour de cassation du 30 avril 1842 (Jurisprudence, XIXème siècle, première partie, pages 270-277). Du reste, quel était l'objet du débat ?
Il s'agissait de savoir si tel particulier avait droit à une créance pécuniaire à charge de l'Etat. Or une créance forme bien un droit civil, et par conséquent c'était aux tribunaux à décider si elle avait une existence légale, conformément à l'article 92 de la Constitution.
La question de savoir si l'Etat était ou non débiteur d'une somme quelconque se rattache même au droit de propriété, puisqu'une créance, si elle existe, constitue, pour celui à qui elle est due, une propriété inannulable. Il est donc évidentt que les tribunaux seuls sont appelés à en reconnaître l'existence.
Ne perdons pas de vue d'ailleurs qu'il s'agit ici de traitements réclamés par d'anciens fonctionnaires publics.
Or entre eux et l'Etat qui avait employé leurs services, il était intervenu un véritable contrat de droit civil dont les effets devaient être appréciés par la justice appelée, aux termes de l'article 92 de la Constitution, à régler tout ce qui concerne les intérêts civils.
Le contrat qui intervient entre le gouvernement et les fonctionnaires est le contrat de louage ou, si l'on veut, celui du mandat salarié. Or les obligations qui résultent d'un contrat sont bien du ressort des tribunaux ordinaires.
Ce qui du reste ne permet aucun doute à cet égard, c'est que bien certainement le gouvernement assigné en payement des sommes dont il s'agit n'aurait pu décliner la compétence des tribunaux, il n'aurait même pu raisonnablement prétendre que les demandeurs eussent dû s'adresser à une autre autorité légale. Dès lors la compétence de la juridiction civile étant incontestable et ayant du reste été reconnue par des arrêts passés en force de chose jugée, le pouvoir légal a prononcé en dernier ressort et il n'est plus possible de se soustraire à l'autorité de la loi qui a statué souverainement.
Il s'agissait, du reste, d'une créance fondée sur l'article 17 de l'arrêté-loi du 14 septembre 1814, dont la disposition avait été confirmée par la loi du 5 juin 1824.
C'était en vertu de ces actes législatifs que des arrêtés du roi Guillaume avaient accordé les traitements dont il s'agit.
Les intéressés ont eu dès lors une créance régulière à charge de l'Etat, et du moment que cette créance était entrée dans leur patrimoine, elle constituait pour eux un droit qui ne pouvait leur être contesté.
Tout débat d'ailleurs à cet égard serait du ressort de l'autorité appelée à statuer sur les intérêts civils, puisqu'il est certain qu'une réclamation pécuniaire constitue un droit civil, et cela est d'autant plus incontestable qu'il s'agit de régler les obligations nées d'un contrat entre le gouvernement et le fonctionnaire qui a consacré ses services aux intérêts de l'Etat.
La compétence du pouvoir judiciaire ne pouvant être sérieusement contestée, nous croyons avoir démontré que les décisions émanées de l'autorité légitime ne sauraient être annulées par le pouvoir législatif sans un abus de pouvoirs qui jamais, nous en avons la conviction, n'émanera de la Chambre.
Le meilleur usage que nous puissions faire de nos prérogatives, c'est, avant tout, de respecter celles d'autrui. La confusion des pouvoirs produit l'anarchie et le désordre. Le règne de la loi, c'est le régime où tous les pouvoirs de l'Etat respectent scrupuleusement les limites qui les séparent et certes l'autorité qui fait la loi ne saurait penser à la violer.
C'est au nom des principes conservateurs de la société et de tout gouvernement libre que nous demandons qu'on respecte les décisions de la justice, et ce n'est pas la Chambre actuelle qui méconnaîtra jamais une maxime formant la base des sociétés civilisées.
La question de compétence du pouvoir judiciaire relativement à l'objet dont nous nous occupons a été soumise à la Cour de cassation de Belgique et celle-ci s'est prononcée dans le sens de la compétence des tribunaux sur les conclusions conformes de M. le procureur général Leclercq, par arrêt du 30 avril 1842 (Jurisprudene du XIXème siècle, 1842, première partie, pages 270-277).
Voici l'arrêt :
« La cour, sur le premier moyen de cassation tiré de la prétendue fausse application de l'article 92 de la Constitution belge, de la violation de la loi du 24 août 1790, littera 2, article 13 et de celle du 16 fructidor an III, en ce que le pouvoir judiciaire aurait été incompétent pour connaître de la cause.
« Attendu que par arrêté du 3 janvier 1827 l'ancien roi des Pays-Bas a accordé à l'auteur des défendeurs, agent du caissier général du royaume, (page 882) une gratification de 500 fl. des Pays-Bas et ce pour l'année 1827 et tes années suivantes et aussi longtemps que le qualifié resterait dans la même position ;
« Attendu que l'arrêt allégué constate en fait que la position dudit auteur des défendeurs, rappelée en l'arrêté du 5 janvier précité, n'a pas changé jusqu'à son décès ;
« Attendu en outre que la qualification dont il s'agit n'a été révoquée par aucune disposition légale ;
« Attendu que la demande formée par les défendeurs tendait à obtenir le payement des termes échus de la gratification accordée à leur auteur que cette demande, basée sur un arrêté porté non dans un intérêt général et pour l'administration de l'Etat, mais dans l'intérêt purement individuel et privé de l'auteur des défendeurs et de quelques autres fonctionnaires que l'ancien roi des Pays-Bas a voulu indemniser du préjudice que leur faisait éprouver la suppression de leurs emplois, avait évidemment pour objet des droits civils et par conséquent était exclusivement du ressort des tribunaux aux termes de l'article 92 de la Constitution.
« Attendu que si le pouvoir judiciaire ne peut intervenir dans les questions qui ont trait à des pensions ou gratifications à accorder et leur liquidation, comme étant, d'après l'arrêté du 14 septembre 1814, du domaine exclusif du gouvernement, ce pouvoir est évidemment compétent, lorsque, comme dans l'espèce, il s’agit de réclamer les termes échus d'une gratification accordée à titre de traitement supplémentaire et conformément à la loi, puisque les termes échus forment alors pour le titulaire des droits individuels qui lui sont acquis et constituent ainsi de son chef de véritables droits civils, placés sous la garantie des tribunaux ; que l'arrêt attaqué n'a donc porté aucune atteinte aux lois des 24 août 1790 et 16 fructidor de l'an III sur l'indépendance du pouvoir administratif et judiciaire et a fait au contraire, la plus juste application à la cause de l'article 92 de la Constitution.
« Sur les 2ème et 4ème moyens de cassation tirés de la prétendue violation de l'article 114 de la Constitution belge et de la fausse application et violation de l'arrêté du 14 septembre 1814 et nommément de son article 17, en ce que depuis la promulgation de la Constitution belge qui ne permet d'accorder aucune pension ou gratification à charge du trésor public qu'en vertu d'une loi, l'arrêté de l'ancien roi des Pays-Bas du 5 janvier 1827 aurait perdu toute autorité et devrait être considéré comme non advenu, et d'autre part en ce que l’auteur des défendeurs ne réunit pas les conditions voulues par l'arrêté du 14 septembre 1814 pour pouvoir être admis à la pension :
« Attendu que l'arrêté du 3 janvier 1827 a été porté dans les limites des pouvoirs accordés au chef du gouvernement par la loi fondamentale alors en vigueur et conformément aux dispositions de l'arrêté-loi du 14 septembre 1814 ; que l'article 114 de la Constitution belge, qui ne dispose que pour l'avenir, n'a pu avoir pour effet d'annuler les actes légalement faits par l'ancien gouvernement dans le cercle de ses attributions ;
« Attendu que l'arrêté-loi du 14 septembre 18)4 qui détermine les conditions requises pour pouvoir être admis à la pension, a néanmoins, par son article 17, permis au gouvernement de dévier de ces règles et d'accorder de sa pleine autorité des marques de bienveillance, même à des personnes qui ne réuniraient pas toutes les conditions exigées par ledit arrêté ; que l'arrêt attaqué n'a donc pu contrevenir ni à l'article 114 de la Constitution belge, ni à l'arrêté du 14 septembre 1814. »
Le jugement de première instance, en date du 22 juin 183i, et l'arrêt confirmatif de la cour de Bruxelles du 6 mars 1841, rendus dans cette affaire, sont également décisifs.
Voici le jugement :
« Vu l'arrêté-loi du 14 septembre 1814 et la loi du 5 janvier 1824 ;
« Attendu qu'au 3 janvier 1827, date de l'arrêté qui a accordé au sieur Coupez, pour l'année 1827 et les années suivantes, aussi longtemps qu'il resterait dans sa position, une gratification de 500 florins, le roi puisait dans les lois alors existantes la faculté d'accorder de semblables gratifications attendu que quelle que soit la différence qui existe entre les pensions proprement dites et ce qu'on appelait toelagen, le fonctionnaire à qui une gratification ou supplément de traitement avait été légalement octroyé, trouvait dans l'arrêté porté en sa faveur un titre pour en réclamer le bénéfice ;
« Attendu que s'il est vrai que ces gratifications n'étaient que temporaires, sujettes à révocation de la part du souverain, on ne peut méconnaître qu'aussi longtemps qu'elles n'avaient pas été rapportées par une volonté contraire constitutionnellement exprimée, elles continueraient à subsister et à produire pour le titulaire tous les avantages qu'ils avaient pour objet ;
« Attendu que si l'on peut dire que ce droit n'est pas acquis pour toute la vie, il l'est au moins pour le passé et jusqu'à révocation formelle de l'arrêté constitutif. »
Cette décision a été confirmée par un arrêt ainsi conçu :
« Attendu que, par arrêté du 5 janvier 1827, le roi des Pays-Bas a accordé à Coupez, agent du caissier général du royaume, auteur des intimés, une gratification de 500 fl., monnaie d’alors et ce pour l’année 1827, et les années suivantes, et aussi longtemps que le gratifié resterait dans sa position actuelle ; que pour ce faire ledit chef du gouvernement a fait usage d'un droit puisé dans diverses dispositions et notamment dans l'article 7 de l'arrêté du 14 septembre 1814, émané d'un pouvoir souverain et ayant ainsi force de loi.
« Attendu que la position dudit Coupez, rappelée en l'arrêté du 3 janvier, n'a point chargé jusqu'à son décès ; que par conséquent la gratification lui a été acquise jusqu'à cette époque ; qu’au surplus elle n'a été révoquée par aucune disposition légale ; que dès lors l'appelant ne peut se refuser à payer aux intimés les sommes par eux mises en conclusion. »
L'arrêt de la cour de Bruxelles du 11 août 1845 (Jurisprudence du XIXème siècle, 1845, partie 2 pages 467 à 471) n'est pas moins remarquable, il porte :
« Attendu que par arrêté royal du 3 janvier 1827, il a ét accordé à l'appelant une gratification dite toelagen et cela non pas comme une faveur personnelle, mais pour l'indemniser de la perte de la place de receveur supprimée par suite de mesures générales d'administration publique.
« Attendu que l'arrêté-loi du 14 septembre 1814, et la loi du 5 juin 1824 donnaient au Roi le droit d'accorder cette gratification, droit reconnu par les Chambres législatives d'alors et non aboli par la loi fondamentale qui ne dit mot des pensions ;
« Que bien que ces dispositions ne parlent pas nominativement des toelagen, elles ne les comprennent pas moins virtuellement.
Qu'en effet, l'article 17 de la première, permettant an Roi de dispenser indistinctement des conditions requises par les articles précédents pour une pension ordinaire, lui permet d'accorder des pensions extraordinaires, telles que celle dont il s'agit ; que le préjudice résultant de la suppression d'une place cautionnée est certes une des causes qui, aux termes de cet article, peuvent provoquer la bienveillance du Roi, et qu'enfin les toelagen doivent évidemment être rangés parmi les dépenses dont parle l'article premier de la seconde, les dépenses s'éteignant successivement et provenant d'économie, suppression de places, etc., que du reste la partie intimée le reconnaît elle-même indirectement en appliquant aux toelagen, l'article 21 du traité du 19 avril 1839, quoiqu'il n'en parle pas non plus nominativement ;
« Attendu que la validité des toelagen accordés en vertu de ces dispositions, et nullement en vertu de l'article. 61 de la loi fondamentale n'est subordonnée à l'approbation des Chambres ni par une disposition légale ni par la nature des choses ; que le contraire même résulte de la loi du 5 juin 1824, et que les articles de la loi fondamentale et de la Constitution invoqués par l'intimé sont sans application dans l'espèce ;
« Attendu qu'aucune loi n'a d'une manière expresse révoqué l'arrêté du 5 janvier 1 827 ni dispensé la Belgique de payer la gratification qu'il accorde à l'appelant ;
« Attendu qu'où ne peut inférer de révocation ou de décharge ni du fait même de la révolution, puisque la gratification dont il s'agit a sa source dans une mesure d'administration intérieure, et fait ainsi partie des dettes qui, d'après les principes du droit et la jurisprudence survivent à une révolution et passent au gouvernement nouveau, comme l'a aussi entendu celui de la Belgique en portant une somme au budget pour les toelagen et comme l'ont sanctionnés les traités de 1838 et 1839 article 21 et 22, ni de l'allocation de 30,000 fl., puisqu'indépendamment de ce que les lois ne se font pas d'une manière indirecte, cette allocation a été votée sans préjuger les droits des titulaires et qu'on pourrait plutôt en induire une reconnaissance de la dette ; ni enfin de l'article 13 du traité du 19 avril 1839, puisque d'après une jurisprudence uniforme et d'après le rapport sur le traité du 5 novembre 1842, article 64, il n'y est question que des dettes inscrites ou à inscrire sur le grand-livre et nullement de celles dont il s'agit ici, qui font aussi l'objet d'un article séparé ;
« Attendu que c'est également en vain qu'on invoque l'article 21 du traité de 1839 et la disposition finale de l'article 68 du traité de 1842 pour décharger la Belgique, d'autant que les arguments qu'on en tire conduiraient à prouver que la Belgique et la Hollande pourraient, en vertu de ces articles, se renvoyer le titulaire qui réclamerait les annuités postérieures au 19 avril 1839, et refuser de lui payer les annuités postérieures par le motif qu'elles ne payaient pas auparavant, conséquences qui blessent le droit, l'équité et le bon sens ; qu'au contraire il résulte de la combinaison de ces deux articles, explicatifs l'un de l'autre, que les pensions sont dues pour le passé comme pour le futur, et que la charge en incombe à la Belgique, quant aux titulaires nés sur son territoire ; qu'en effet les dispositions de ces articles sont des lois déclaratives de droits privés ; que par la force même de la déclaration, ces lois agissent sur le passé, quoiqu'elles ne parlent que de l'avenir ; qu'aussi ces articles se servent des mots rester, demeurer qui indiquent une continuation, que le mot soldait du second de ces articles, est évidemment synonyme de devait, et employé dans la supposition équitable que celui qui devait a payé, de sorte que l'article établit une corrélation entre le futur et le passé ; que le traité du 15 novembre 1831, accepté par la Belgique, mettait déjà à la charge de celle-ci les pensions, etc. dues à des Belges ; que finalement il est rationnel que chacun des deux pays, paye ses régnicoles et par conséquent que la Belgique qui a payé l'appelant en 1830 et 1840, paye pendant les années intermédiaires.
« Attendu que la gratification a été accordée à l'appelant pour tout le temps qu'il resterait dans la position qu'il avait en 1828, et que cette position a duré jusqu'à ce jour :
« Attendu que l'intime n'a pas contesté le montant des sommes (page 883) réclamées, soit quant à la hauteur du chiffre desdites sommes, soit quant à leurs échéances ;
« Par ces motifs, M. Faider, avocat général, entendu et de son avis, met le jugement dont est appel au néant, émendant, condamne l'intimé à payer, etc. »
M. de Renesse. - Messieurs, pour motiver mon opposition à la prise en considération du projet de loi proposé par notre honorable collègue M. Lelièvre, je crois devoir présenter à la Chambre quelques considérations sur la question des traitements d'attente et des traitements supplémentaires si souvent débattue devant les chambres législatives depuis notre régénération politique.
Depuis 1832, que j'ai l'honneur de siéger dans cette enceinte, j’ai assisté à toutes les différentes discussions qui ont été soulevées à cet égard, et toujours j'ai voté avec la majorité de la Chambre contre l'allocation de la totalité des crédits demandés au budget de la dette publique, par les différents ministres des finances qui se sont succédé jusqu'en 1840, pour faire face au payement de l'intégrité de ces traitements d'attente, de secours annuels et des traitements supplémentaires.
Pour faire apprécier à la Chambre et surtout à beaucoup de nos honorables collègues qui n'ont pas assisté aux discussions antérieures sur cette affaire si contestée, il peut être utile d'en faire un court résumé.
Toujours la majorité de la Chambre a considéré, avec une conviction intime, que ces sortes de traitements dus, en grande partie, aux faveurs et à la bienveillance particulière du roi Guillaume Ier, ne pouvaient former pour les titulaires un droit incontestable, positif et irrévocable, qui aurait pu s’assimiler à des pensions réelles, à de véritables droits civils, auxquels il eût été impossible de toucher, ni de rien changer ; il a été, en effet, constaté pendant les différentes discussions devant les Chambres, que plusieurs des honorables membres de la Chambre qui appuient le payement de la totalité de ces traitements, ont cependant dû convenir, « que si l'on ne pouvait toucher aux pensions, il n'en était pas de même pour les traitements d'attente etc. qui avaient été accordés par le roi des Pays-Bas, comme des marques particulières de bienveillance. »
S'il a été établi que ces traitements ne donnaient pas lieu à des droits civils réels, il dépendait donc de la représentation nationale de réduire, de révoquer ou de n'accorder qu'une certaine partie de ces traitements comme un subside volontaire aux plus nécessiteux : ce qui a toujours eu lieu depuis 1831, jusqu'au moment où le traité du 19 avril 1839, a mis à la charge de la Belgique les pensions et les traitements d'attente, etc., pour l'avenir, et seulement à tous les titulaires qui y ont droit.
Il e>t de notoriété publique que ces sortes de faveurs pécuniaires accordées à charge du trésor de l'État par le précédent gouvernement, non seulement à certains fonctionnaires, mais encore à d'autres personnes étrangères aux fonctions publiques, avaient donné lieu à de vives réclamations ; aussi, le roi Guillaume Ier, pour en dégrever le budget, avait, par une loi du 5 juin 1824, porté lesdits traitements personnels, temporaires ou de non-activité, ainsi que certaines pensions, à la charge du syndicat d'amortissement, que l'on nommait, à juste titre, le syndicat d'engloutissement, puisqu'il n'y avait que les initiés de cette institution financière tout occulte qui semblaient seuls y voir clair.
Le gouvernement provisoire de Belgique prit, sous la date du 27 décembre 1830, un arrêté pour ordonner la révision de toutes les pensions ordinaires et extraordinaires, les gratifications annuelles, traitements de non-activité ou d'attente, se montant à des sommes assez considérables, afin que le trésor pût être affranchie de toutes les charges qui, ne seraient pas fondées ou sur des droits acquis, ou sur des services rendus à la patrie, ou sur des considérations de stricte équités.
Au Congrès national, l'on était si imbu de l'idée et de la nécessité d'introduire des économies dans ces sortes de dépenses, et d'abolir les nombreux actes de l'ancien gouvernement, qu'il prescrivit par l'article 114 de la Constitution, qu'aucune gratification à la charge du trésor public ne pouvait être accordée qu'en vertu d'une loi, et par l'article 139 il ordonnait formellement la révision de la liste des pensions.
Si donc, par la Constitution, les Chambres législatives avaient le pouvoir et le devoir de faire la révision de la liste des pensions même, à plus forte raison l'on ne peut leur contester la faculté et la compétence de changer et de retirer pareillement les traitements d'attente et autres dus à des marques particulières de la bienveillance du roi Guillaume Ier ; sous l'administration hollandaise, l'on ne considérait, d'ailleurs, pas ces traitements d'attente comme donnant des droits civils réels, assimilés à de véritables pensions, que l'on n'aurait pu changer ou retirer, puisque le roi Guillaume lui-même avait cru devoir retirer le traitement d'attente dont jouissait feu M. le baron de Stassart en sa qualité d'ancien fonctionnaire. Alors personne, que je sache, n'a contesté ce droit au gouvernement hollandais de pouvoir retirer les traitements provisoires accordés par lui, parfois, par pure bienveillance.
D'après la Constitution, les Chambres votent chaque année les recettes et les dépenses de l'Etat ; il est donc de leur devoir de les contrôler, et surtout, pour les dépenses, de repousser celles qui ne seraient pas légalement fondées, et certes, sous ce rapport, l'on ne pourra contester avec fondement que les Chambres législatives ne soit pas omnipotentes ; car, dans l’exercice de leurs attributions constitutionnelles, elles doivent avoir toute la liberté de leurs votes ; elles ne doivent subir la contrainte d'aucun autre pouvoir quelconque ; il faut que chacun reste dans ses attributions légales, et alors il n'y aura pas de conflits à craindre qui sont certes regrettables entre deux pouvoirs également respectables.
Pour corroborer l'opinion que j'ai toujours défendue dans l'appréciation de la question des traitements d'attente, et autres, je me permettrai de citer quelques lignes d'un discours prononcé, en novembre 1845, par l'honorable M. Fallon, ancien vice-président de la Chambre, l'un des négociateurs belges, près du gouvernement hollandais, pour le traité financier du 5 novembre 1842, et qui, par conséquent, devait parfaitement connaître tout ce qui avait rapport aux traitements d'attente ou supplémentaires, s'exprimait ainsi : « Lors donc qu'une demande de crédit à la charge du trésor public est appuyée sur un acte judiciaire, sur un arrêt passé en force de chose jugée, on ne peut ravaler le pouvoir de haute administration, dont le pouvoir législatif est investi, au simple rôle de l'examen matériel de la condamnation ; on ne conçoit pas un droit d'examen renfermé dans semblables limites.
« La Chambre a incontestablement le droit, non seulement d'examiner le chiffre de la condamnation ; mais quel en a été le sujet : c'est-à-dire si la condamnation entrait ou n'entrait pas dans les attributions judiciaires.
« Je ne puis admettre qu'un fait que l'arrêté-loi du 24 septembre 1814 qualifie de marques particulières de notre bienveillance puisse engendrer un droit civil, et encore moins un droit irrévocable.
« C'est là, disait I’honorable M. Fallon, un fait politique qui ressortit évidemment au droit politique, assujetti, par conséquent, à toutes les fluctuations politiques, à toute mutation de souveraineté, à tout nouveau régime politique. »
Dans la même séance, M. Fallon continuait ainsi son discours :
« C'est parce que je pensais que le gouvernement belge n'était nullement lié par l'article 21 du traité du 19 avril 1839, envers les anciens titulaires des traitements d'attente et des suppléments de traitement, que je suis parvenu, dans les conférences, entre commissaires belges et néerlandais, à obtenir une modification essentielle à l'article 21, modification à laquelle on n'a pas fait assez d'attention dans les débats qui viennent d'avoir lieu. »
Eh bien, qu'est-il arrivé à la suite de la discussion de la note présentée ? Il est arrivé que. en ce qui concerne les traitements d'attente, l'article du traité de 1839 fut modifié de manière à laisser le gouvernement belge libre de prendre à l'égard de ces traitements telle mesure qu'il jugerait convenable ; il n'est plus dit à l'article 68 du traité du 5 novembre 1842, que ces traitements seront acquittés à l'avenir à ceux qui y ont droit conformément aux règlements, avant le 1er novembre 1850 ; il est dit que ces traitements restent à la charge du pays qui les soldait au 19 avril 1839, en demeurant toutefois assujettis aux luis et aux règles de ce pays.
M. Fallon disait, en outre : « C'est un ménage tout politique puisqu’il ressort de l'acte le plus politique que l'on puisse concevoir : un traité international.
« C'est un ménage de haute administration qui entre essentiellement dans les attributions des Chambres, que l'on veut mettre au régime du droit privé, pour le livrer à l'arbitrage du pouvoir judiciaire ; je ne puis admettre un semblable système. »
L'honorable collègue et ami M. B. Dumortier, membre de la section centrale, chargé en 1856 de l'examen d'un projet de loi relatif à la liquidation des arriérés de traitements d'attente et de traitements supplémentaires, présenté le 15 mai 1854, par le ministre des finances d'alors, ['honorable M Liedts, a joint un rapport de la section centrale, en date du 17 janvier 1856, un exposé des motifs de rejet de la minorité de la section centrale ; cet exposé est un traité clair, précis et fidèle, et contient l'historique des longues discussions, si souvent soulevées devan la législature, sur cette question toujours renaissante des traitements d'attente, etc. Ce résumé général, si indispensable pour pouvoir apprécier toute la portée du vote que la Chambre aura à émettre, si la proposition de loi était prise en considération, permettra aux honorables représentants qui ne siégeaient pas encore dans cette enceinte en 1845, et lorsque cette question a été discutée pour la dernière fois, de pouvoir prendre une connaissance exacte de cette affaire qui est d'une certaine importance pour les finances de l'Etat.
Aussi j'ose espérer que la majorité de la Chambre maintiendra les deux décisions antérieures de la législature, depuis 1851, en repoussant la prise en considération du projet de loi présenté par l'honorable M. Lelièvre.
Si la Chambre veut que sa prérogative soit respectée, que sa liberté d'action, dans ses votes surtout pour le contrôle des dépenses de l'Etat, reste entière et indépendante, libre de toute contrainte, il faut qu'elle sache aussi respecter et maintenir la chose jugée par la législature, par des décisions formelles, après mûres réflexions et discussions.
D'après ces considérations, je voterai contre la prise en considération du projet de loi destiné à la liquidation d'arriérés de traitements d'attente et de traitements supplémentaires.
M. Lelièvre. - Il ne s'agit aujourd'hui de statuer que sur la question de savoir s'il y a lieu de prendre ma proposition en considération, (page 884) c'est-à-dire s'il y a lieu à l'examiner ; le moment n'est pas venu de discuter le fondement duprojet, mas uniquement de savoir s'il est assez sérieux pour être renvoyé aux sections.
Or, la question ainsi posée ne peut faire naître le moindre doute.
En effet il suffit de faire remarquer que ma proposition n'est que la reproduction d'un projet de loi présenté le 15 mai 1354 par le ministère de M. de Brouckere.
L'honorable M. Liedts, alors chargé du département des finances, après avoir pris l'avis d'une commission spéciale, n'hésita pas à s'adresser aux chambre législatives pour être autorisé à solder le montant des condamnations prononcées contre le gouvernement.
Ce projet reçut l'assentiment de la majorité des sections, et la section centrale elle-même a une grande majorité, s'y rallia également.
Eh bien, est-il possible de ne pas considérer comme digne d'examen une proposition qui a en sa faveur des autorités aussi irréfragables ?
Ce n'est pas tout, les créances dont je réclame le payement sont appuyées sur des jugements et arrêts passés en force de chose jugée. La cour de cassation a maintenu les décisions rendues en faveur des intéressés. Eh bien, est-ce que de pareilles autorités ne sont pas assez puissantes pour qu'on examine une proposition qui a pour elle des arrêts les plus formels et contre lesquels aucun recours n'est plus possible ?
Mais, dit-on, la Chambre s'est prononcée plusieurs fois contre le principe de la proposition.
Le fait est inexact, voici comment cette assertion est réfutée dans l'exposé des motifs qui a accompagné le projet de 1854.
« La discussion du projet de loi eut lieu dans les séances des 25, 26, 27 et 29 novembre 1845, et trois votes furent émis.
« Le ministre des finances ayant présenté un amendement qui réduisait le crédit à 6,300 francs, montant des condamnations prononcées, en dernier ressort, contre l'Etat au profit de l'un des intéressés, cet amendement fut rejeté par 39 voix contre 20 et 8 abstentions.
« La section centrale avait substitué au projet du gouvernement une proposition portant que les créances dont on réclamait le payement n'étaient point à la charge de la Belgique. Cette proposition fut adoptée par 30 voix contre 25 et 11 abstentions. Dans la séance du 29, la Chambre procéda au second vote et la proposition de la section centrale fut cette fois rejetée.
« Il résulte de cet exposé qu'il y eut à la fois rejet du crédit sollicité par le gouvernement et de la proposition qui avait pour but de déclarer non fondées les prétentions élevées à charge du trésor par les intéressés, ce qui semble, comme le disait l'un des or-tours, emporter la mise à néant de toutes les propositions faites, en laissant le terrain intact. L'on voit donc qu'il y eut deux votes contradictoires qui ne permettent pas d'invoquer les décisions rendues. En effet si la Chambre n'a pas voulu allouer les fonds demandés, d'un autre côté elle a rejeté la proposition ayant pour objet de déclarer que les créances dont il s'agit n'étaient pas à la charge de la Belgique.
II est donc vrai de dire qu'en réalité aucune décision définitive sur la question formant I'objet du débat n'a été émise par la Chambre en 1845, et que sous ce rapport encore la difficulté qui se présente n’a pas reçu de solution.
Toute proposition sérieuse doit être prise en considération, et celle que je soumets en ce moment a pour elle des précédents émanés des deux ministères qui ont occupé le pouvoir avant celui qui se trouve en exercice.
En réalité, nous ne voulons que provoquer la discussion qui aurait eu lieu en 1857 sans la dissolution de la Chambre, et certes il me paraît impossible de refuser d'examiner une question qui mérite d'être éclaircie et qui se rattache à d'importants intérêts, il s'agit de savoir si les décisions de la justice doivent recevoir leur exécution, et c'est là un objet trop grave pour ne pas appeler toute l'attention de la législature
M. B. Dumortier. - Messieurs, il vous semblera sans doute, comme à moi, que l'initiative de propositions de dépenses aussi considérables que celles dont l’honorable M. Lelièvre vient de nous entretenir, devrait venir du gouvernement, mais non pas d'un membre de la Chambre. Ces dépenses qui s'attachent à toute une série d'actes administratifs sont bien plus de la compétence de l'initiative du ministère que de l'initiative de chacun de nous. Je reconnais que l'honorable membre a le droit de faire sa proposition ; mais il est libre à nous d'apprécier si en la faisant il use convenablement de son droit. Je dois donc dire que ce n'est pas sans surprise que j'ai vu l'honorable membre qui vient de se rasseoir nous proposer une dépense de plusieurs centaines de mille francs, dépense qui, si les prémisses qu'il a posées tout à l'heure étaient prises au sérieux et adoptées par la Chambre, s'élèverait d'un million et demi à 2 millions. J'aurai tout à l'heure l'honneur de le démontrer.
Je ne compte pas, messieurs, m'opposer à la prise en considération, et voici pourquoi : II n'y a dans cette assemblée qu'un très petit nombre de membres qui ont assisté à tous les débats, si nombreux, auxquels la matière a donné lieu dans cette enceinte. Les quatre cinquièmes environ de cette assemblée ne connaissant pas ces débats, ne connaissant pas les précédents de cette affaire, pourraient fort bien être sujets à émettre un vote sans connaissance de cause. La question, à mes yeux, est d'une telle importance, d'une telle gravité, que toute la Chambre doit peser mûrement les conséquences du vote qu'elle aura à émettre sur la proposition de l'honorable M. Lelièvre.
En effet, messieurs, de quoi s'agit-il dans cette proposition ? Il s'agit d'une question de prérogatives parlementaires, d'une de ces questions sur lesquelles nous sommes tous d'accord, sur lesquelles il n'y a plus ni de droite ni de gauche, sur lesquelles il n'y a plu sici que des députés qui doivent chercher à conserver intactes et à transmettre à leurs successeurs les prérogatives qu'ils ont reçues du Congrès national.
Quels sont les précédents ? Le roi Guillaume avait créé des traitements d'attente. Ces traitements d'attente comprenaient trois catégories de dépenses complétement distinctes.
Il y avait d'abord les véritables traitements d'attente, accordés à d'anciens fonctionnaires qui, étant momentanément en inactivité, jouissaient d'une indemnité, en attendant qu'ils fussent replacés. Mais remarquez-Ie, le chiffre de ces indemnités ne formait pas la cinquième partie de ce qu'on entendait d'une manière générale par traitements d'attente.
Il y avait en second lieu des charités, des largesses que d'autres souverains font sur leurs cassettes, mais que le roi Guillaume jugeait bon de faire sur le trésor public ; il y avait des jaarlijksche onderstande (secours annuels) payés sur les fonds de l'Etat.
Or, je le demande, comment la Belgique pourrait-elle être liée à acquitter les largesses après 1830, alors que le roi Guillaume lui-même pouvait les retirer ?
Ainsi que l'a dit mon honorable ami, M. de Renesse, le roi Guillaume pouvait supprimer et il a supprimé, en effet, des traitements d'attente. Plusieurs d'entre nous se rappelleront que l'honorable baron de Stassart, membre de l'opposition dans l'assemblée des états généraux, s'est vu privé par le roi Guillaume du traitement d'attente dont il jouissait. Ce qui prouve que le roi Guillaume lui-même ne regardait pas ces traitements d'attente comme un droit acquis pour les personnes qui les recevaient, mais comme une faveur qu'il leur accordait.
Puis venait la troisième catégorie ; c'est celle-là dont s'occupe l'honorable M. Lelièvre dans sa proposition de loi ; or, c'est de toutes les catégories celle qui a le moins de droit de réclamer.
Il s'agit d'anciens receveurs généraux et particuliers qui virent leur traitement réduit dans une certaine proportion, lorsque le roi Guillaume créa la Société Générale caissière de l'Etat. A raison de cette diminution, le roi Guillaume leur accorda un supplément de traitement. Remarquez-les messieurs, ce sont ces suppléments de traitement, les toelagen, comme on les appelait, dont s'occupe exclusivement la proposition de loi de l'honorable M. Lelièvre.
Or, qu'est-ce qu'un supplément de traitement ? Un supplément de traitement doit suivre la condition du traitement lui-même. Si la Chambre a le droit de réduire les traitements, elle a certainement bien le droit de réduire les suppléments de traitement.
Eh bien, c'est ce qu'elle a fait. La Chambre usant de son droit constitutionnel de voter les dépenses, a supprimé ces suppléments de traitement.
Les traitements d'attente dont il s'agit en ce moment constituaient un des abus du gouvernement précédent. Ils étaient considérés comme un grief. Ainsi, au Congrès national, l'honorable M. Ch. de Brouckere, alors ministre des finances, s’est-il exprimé dans les termes suivant : (L'orateur donne lecture de ce passage.)
Voilà comment on qualifiait alors ces traitements d'attenté ; voilà ce que voulait faire M. le ministre des finances de cette époque, notre excellent et digne collègue l'honorable M. Ch.de Brouckere, qui a laissé de si grands souvenirs dans l'administration du pays. Eh bien, cette phrase de l'honorable membre a été la ligne de conduite que la Chambre a suivie pendant douze ans, sans en dévier une seule fois.
Voyons les faits : Quand nous eûmes à faire le budget de 1831, le chiffre des traitements d'attente avait été porté par M. Coghen, alors ministre des finances ; c'est l'honorable M. de Theux qui fit le rapport sur le budget ; dans son rapport, il proposa de donner 30,000 florins pour les plus nécessiteux, eu égard à leur position, sans reconnaître le droit que les porteurs de wachtgelden, toelagen, etc., pouvaient avoir à la continuation de ces pensions ou indemnités. Mon honorable collègue s'exprimait en ces termes : (L'orateur donne lecture de ce passage.)
Vous voyez que la commission chargée d'examiner ce budget ne reconnaissait pas la légalité des traitements d'attente.
L'année suivante, la Chambre fit le budget de 1832 ; une grande discussion s'ouvrit ; ce fut M. Bourgeois, depuis conseiller à la cour de cassation, excellent jurisconsulte, qui démontra que le pays ne devait pas les traitements réclamés.
La Chambre confirma le vote émis précédemment pour les plus nécessiteux.
En 1833, nouveau crédit demandé, nouveau vote pour le rejeter, et le Sénat déclara que la Chambre avait bien fait de rejeter les traitements d'attente.
En 1834, c'était aux premières années de la révolution ; la révolution s'était faite au cri : Gouvernement à bon marché ! Tous les traitements des fonctionnaires avaient été réduits. D'après les principes posés par M. Lelièvre, tous ces fonctionnaires pourraient venir réclamer en justice les arriérés des traitements réduits par la Chambre.
Que fit la Chambre à cette époque pour égaliser les positions ? Tandis qu'elle diminuait tons les traitements des fonctionnaires de l'ordre administratif et judiciaire et de l'armée, des magistrats et des ambassadeurs, (page 885) elle déclarait que par ce moyen il y avait indemnité accordée aux porteurs de toelagen.
Elle voulait supprimer ces sinécures, comme disait l'honorable M. Ch. de Brouckere, elle réduisait les autres traitements.
En 1831, 1832, 1833,1834, 1835, 1836, 1837, 1838 et 1839, c'est-à-dire pendant neuf ans consécutifs, la Chambre a voté presque toujours par appel nominal le rejet des traitements d'attente.
C'est alors que, non pas les porteurs de traitements d'attente, ceux-là ne réclamaient pas ; non pas les porteurs de secours annuels, ceux-là ne réclamaient pas non plus ; mais les gros financiers, toujours très âpres à la curée, ont réclamé des traitements d'attente ; le sieur Coupez, mort depuis à Binche, a fait un petit procès pour faire déclarer que la Belgique est redevable des traitements d'attente.
La question a été jugée en cassation et elle est passée en force de chose jugée. C'est en cet état que la question est arrivée à la Chambre en 1843 ou 1844.
Le ministre d’alors est venu dire à la Chambre : II y a un jugement passé en force de chose jugée et je vous présente un projet de crédit qui s'élevait, je crois, à un million environ.
La Chambre a examiné ce projet. L'honorable M. Savart, père, en a fait le rapport ; la section centrale, remarquez-le bien, comprenait plusieurs magistrats et des magistrats éminents ; eh bien, la section centrale est venue déclarer que cette question n'était pas de la compétence des tribunaux ; que la formation des budgets n'é ait pas de la compétence des tribunaux mais de la compétence de la législature ; que la Chambre devait donc faire respecter sa prérogative ; qu'à neuf reprises différentes elle avait rejeté ce crédit et qu'elle ne pouvait pas admettre un jugement qui pouvait se formuler en peu de mots : « Vu que la Chambre a écarté pendant 9 ans le payement de traitements d'attente, la cour condamne la Chambre à le voter. »
Si cela pouvait être, messieurs, ce serait évidemment une perturbation dans les pouvoirs ; il n'y aurait plus de pouvoirs. La question est de savoir lequel des deux pouvoirs a empiété sur le domaine de l'autre ; si c'est le pouvoir législatif qui a envahi le pouvoir judiciaire ou celui-ci le pouvoir législatif. Voilà où est la question.
Eh bien, la Chambre, par son vote, a décidé qu'elle ne pouvait pas se soumettre, sans examen, à la décision de l'ordre judiciaire, alors que le pouvoir judiciaire n'avait fait autre chose que traiter une question qui est exclusivement de la compétence de la législature. C'est là une question de compétence pure, et c'est ce qui faisait prononcer par l'honorable M. Dubus, un des plus profonds jurisconsultes de la Chambre d'alors et du pays, cette phrase que j'ai eu souvent l'occasion de citer : « Si les tribunaux sont juges de leur compétence, la Chambre, de son côté, est juge de sa compétence ; la Chambre n'a pas de lois à recevoir de l'ordre judiciaire.»
Voilà, messieurs, les véritables maximes. Les tribunaux sont juges de leur compétence, dit l'honorable M. Lelièvre, la cour de cassation s'est déclarée compétente.
Qu'est-ce que cela prouve ? Cela prouve qu'elle a jugé pour elle ; mais est ce que la déclaration de compétence d'un pouvoir lie un autre pouvoir ? Le pouvoir législatif n'est certes pas moins respectable que le pouvoir judiciaire ; je dirai même que, dans la hiérarchie sociale, le pouvoir législatif est placé au-dessus du pouvoir judiciaire ; par conséquent une décision du pouvoir judiciaire ne peut en aucune façon lier le pouvoir législatif. Chaque pouvoir doit avoir le droit d'examiner sa compétence ; hors de là, il n'y aurait que confusion, et ce serait celui qui parlerait le dernier qui anéantirait l'exercice des autres pouvoirs.
La Chambre a donc examiné cette question. Beaucoup d'orateurs ont pris part à la discussion et l'honorable comte de Renesse vous a cité tout à l'heure le discours de l'honorable M. Fallon. Après avoir démontré que la Chambre devait tenir à ses prérogatives, que ses prérogatives é aient une chose sacrée, qu'elle ne pouvait les abdiquer en aucun cas, M. Fallon, qui avait négocié le second traité à La Haye, est venu démontrer de la manière la plus évidente que la Chambre ne devait pas un centime aux possessions de traitements d'attente. Maintenant qu'a fait la Chambre ? Elle a purement et simplement rejeté la proposition qui lui était faite.
L'honorable membre qui vient de parler croit voir dans les votes de la Chambre des décisions contradictoires. Messieurs, il n'y a rien eu de contradictoire dans les votes de la Chambre. La Chambre en écartant au second vote la motion de la section centrale qui déclarait que la somme n'était pas due, n'a point émis un vote contradictoire. Ce que la Chambre a fait, c'est qu'elle a proclamé sa compétence et l'incompétence des tribunaux. Si la Chambre avait émis un vote contradictoire, ce n'est point le rejet mais l'ajournement qu'elle eût prononcé.
La Chambre, en déclarant qu'elle ne voulait pas voter un seul centime pour faire face aux exigences qu'elle avait repoussées pendant neuf ans a proclamé sa compétence. Et savez-vous ce que disait l'honorable M. Delfosse, encore un de ces membres que nous regrettons de ne plus voir parmi nous ? L'honorable M. Delfosse, à cette occasion, disait ces paroles très mémorables :
» Si les tribunaux avaient agi en dehors des limites de leur compétence, s'ils eu avaient dépassé les pouvoirs, notre devoir serait de ne tenir aucun compte de leur décision dans les résolutions que nous (page 885) aurions à prendre. En refusant dans ce cas d'exécuter la décision du pouvoir judiciaire, nous ne porterions pas atteinte à l'indépendance de ce pouvoir ; nous nous bornerions à faire respecter la nôtre. »
Eh bien, messieurs, voilà ce qui s'est fait ; la Chambre a fait respecter son pouvoir, puisque le droit de voter les budgets, le droit de voter les dépenses de l'Etat n'incombe pas aux tribunaux mais incombe au pouvoir parlementaire. La Chambre a fait respecter son pouvoir, et c'est ce pouvoir que la Chambre a fait respecter que la proposition de l'honorable membre viendrait froisser, si elle pouvait être adoptée par cette assemblée.
Mais, dit l'honorable membre, il y a chose jugée.
Eh bien, messieurs, veuillez remarquer ceci : c'est que l'honorable membre, dans sa proposition, ne respecte pas plus la chose jugée que nous ; sa proposition est la violation de la chose jugée. Car le pouvoir judiciaire a condamné les Chambres à voter une loi allouant l'intégralité des traitements d'attente, plus les intérêts à partir d'une époque déterminée. L'honorable membre demande-t-il l'exécution de cet arrêt ? Pas du tout. D'abord il supprime tous les intérêts ; donc il viole l'arrêt sur ce point. En second lieu, il établit un décompte sur les traitements : seconde violation de l'arrêt.
L'honorable membre ne respecte donc pas plus que nous la chose jugée ; il la viole. Si l'honorable membre part de ce principe, il faut, pour être conséquent avec lui-même, qu'il présente purement et simplement l'exécution des arrêts. Mais quand il vient ainsi proposer la violation de la chose jugée, et cela pour le seul et unique résultat d'anéantir la prérogative parlementaire et proclamer que nous ne sommes pas compétents pour faire le budget, je dis que le vote d'une pareille proportion serait une calamité.
Je ne viens pas m'opposer à la prise en considération et j'engagerai mon honorable collègue M. de Renesse à en agir de même. Il vaut mieux que la Chambre soit bien éclairée sur ces faits.
La question est tellement importante, que la Chambre ne peut pas s'entourer de trop de lumières.
Messieurs, une chose à laquelle nous ne devons jamais céder, c'est à ce qui peut porter atteinte à notre prérogative. Notre prérogative, c'est notre force, c'est notre vie, c'est notre existence. Conservons toujours la prérogative parlementaire intacte pour la transmettre à nos successeurs, afin que toujours les Chambres conservent cette vitalité, cette force, cette énergie qu'elles doivent avoir dans toutes les circonstances. Que si, au contraire, vous veniez porter atteinte à votre prérogative, plus tard vos successeurs pourraient maudire votre décision qui serait l'avilissement du pouvoir parlementaire, pouvoir si important dans ce pays, si important dans les circonstances où nous vivons.
- La prise en considération est mise aux voix et prononcée.
La proposition est renvoyée à l'examen des sections.
M. le président. - Voici une proposition qui a été déposée par M. Orts :
« Je propose à la Chambre de décider qu'après l'adoption du projet de loi présenté par la section centrale, les articles 1 et 4 formeront un premier projet de loi et les articles 2 et 3 un deuxième, qui sera séparément transmis au Sénat. »
M. Orts. - Messieurs, ma proposition est une réponse à la proposition de disjonction faite dans la séance d'hier par l'honorable M. H. de Brouckere : rien de plus.
La disjonction, c'est la proposition faite à la Chambre de voter sur le projet primitif du gouvernement d'abord, et ensuite sur les articles additionnels proposés par la section centrale. Cette disjonction, je ne puis l'admettre qu'avec une garantie formelle, garantie que je ne trouve que dans ma proposition
Dans le système de l'honorable M. de Brouckere, voici ce qui peut arriver et ce que je veux rendre impossible : Le projet une fois divisé, entre le vote de ses deux parties, il peut se produire des faits qui empêchent la Chambre de se prononcer sur le mérite des propositions de la section centrale, c'est-à-dire sur la nécessité d'introduire dans la loi électorale une réforme qui consiste à former de tous les électeurs de chaque arrondissement une seule liste et à faire procéder au vote d'après l'ordre alphabétique.
Si la proposition de l'honorable M. de Brouckere avait été accompagnée d'une déclaration que d'après lui les deux articles du gouvernement votés, la Chambre devait se prononcer immédiatement, sans désemparer, sans s'occuper d'autres objets sur les propositions de la section centrale, si la disjonction avait été ainsi proposée, je ne m'y serais point opposé. Je comprends très bien que l'on puisse être partisan de la disjonction en vue de soumettre au Sénat les deux questions séparément, afin que le Sénat ne considère pas l'une des propositions comme indissolublement liée à l'autre et ne les condamne pas toutes deux parce que l'une d'elles seulement n'aurait pas son approbation.
Ma proposition est une transaction.
J'ai voulu donner satisfaction aux partisans de la disjonction et en même temps à ceux qui ne veulent pas que la Chambre soit par la (page 886) disjonction empêchée de se prononcer immédiatement sur les propositions de la section centrale.
Je donne des garanties à ceux qui craignent que la liberté d'appréciation du Sénat ne soit diminuée, en acceptant la disjonction au Sénat, et je donne des garanties à ceux qui désirent la prompte discussion des propositions de la section centrale, en repoussant la disjonction à la Chambre.
Je crois donc que ma proposition doit concilier tons les intérêts, doit concilier toutes les opinions, sauf bien entendu celle qui dans aucune circonstance ne veut des propositions de la section centrale.
Je viens, messieurs, de vous faire connaître mon but. Si ce but pouvait être atteint par une autre proposition que la mienne, je serais tout disposé à me rallier à celle qui aurait davantage l'appui de mes amis politiques. Je ne mêle à l'adoption de ma proposition aucune prétention d'auteur, aucun amour-propre.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je pense que nous sommes bien près de nous entendre sur la question qui est soulevée : nous regardons comme utile de diviser le projet de loi de la section centrale et de diviser la discussion. Le gouvernement tient d'abord à ce que le projet qu'il a présenté soit discuté et voté, afin d'arriver en toute hypothèse assez à temps au Sénat pour recevoir son application aux élections prochaines du mois de juin. Voilà pourquoi il tient à la discussion et au vote séparés du projet primitif. L'autre projet de loi, messieurs, ainsi que l'indique la section centrale, peut faire l'objet d'une discussion et d'un vote à part, à la suite du projet du gouvernement. Voici comment s'exprime à cet égard le rapport :
« La section centrale vous propose d'adopter les dispositions suivantes, qu'elle ajoute comme amendements à une partie de la loi électorale maintenant soumise à votre examen, à moins toutefois que vous ne jugiez qu'il ne soit préférable ou plus opportun de disjoindre ces articles du projet de loi pour en faire l'objet d'une discussion et d'un vote séparément. »
Eh bien, messieurs, cette idée émise par la section centrale nous semble acceptable. Nous croyons que la Chambre fera bien, sans renoncer aux propositions dont la section centrale a pris l'initiative, de discuter et de voter séparément le projet primitif du gouvernement.
Nous ne ferons, messieurs, quant à nous aucune objection à ce que la discussion et le vote de la deuxième partie du projet de loi suive immédiatement la discussion et le vote du projet de loi principal. Ce n'est pas de notre part que viendra la moindre opposition à ce que cette marche soit suivie, mais je demande à la Chambre de vouloir bien discuter et voter d’abord les propositions du gouvernement.
Je dépose, messieurs, sur le bureau un tableau demandé hier par l'honorable M. de Decker. Ce tableau est un peu long. Je ne sais pas si la Chambre en désire l'impression.
- Plusieurs membres. - Oui ! oui !
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'honorable M. de Theux a demandé d'autres documents, ces documents ont été à plusieurs reprises imprimés et distribués à la Chambre et il paraît qu'ils ont échappé à l'attention de l’honorable membre. Je ne lui en fais pas de reproche car je sais que d'ordinaire l'attention ne se porte pas sur des tableaux renfermant un grand nombre de colonnes et de chiffres ; je souhaite, si l'on ordonne l'impression du tableau actuel qu'il n'ait pas le sort de ceux dont je viens de parler.
Voici, messieurs, l'indication des documents déjà imprimés et distribués aux membres de la Chambre.
Depuis 1841, l'administration publie régulièrement la statistique électorale par arrondissement. Pour les époques antérieures, il n'existe que les résultats des élections au Congrès (titre III, pages 6 et suivantes de l’Exposé général de la situation du royaume pour la période décennale de 1841 à 1850), et ceux des élections à la Chambre et au Sénat en 1839, par province seulement (pages 6 et 7 du rapport décennal de 1831 à 1840).
Les résultats des élections aux deux Chambres demandé par M. de Theux, ont été publiés savoir :
Années 1841, 1843, 1845, 1847, 1848 et 1850 dans le Rapport décennal, titre III, pages 27 à 41 ;
Année 1851, renouvellement intégral du Sénat, pages 170 à 175 du tome 1er des Documents statistiques ;
Années 1852, 1854, 1855, 1856 et 1857, pages 78 à 83 du tome II des Documents.
On a également publié et distribués la Chambre le tableau de la population des communes au 31 décembre 1856 et au 31 décembre 1857. Je n'ai pas d'autres documents à indiquer.
Si la Chambre juge utile d'ordonner l'impression du tableau que je viens de déposer, je n'y fais pas d'obstacle ; mais cette mesure ne doit pas retarder la discussion ; on peut consulter le tableau que j'ai déposé sur le bureau.
M. de Theux. - Messieurs, je crois que ce document doit être imprimé, pour que chaque membre de la Chambre puisse l'avoir sous les yeux pendant la discussion.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Quelle conséquence veut-on en tirer de là ?
M. de Theux. - Des personnes croient que le tableau de répartition n'est pas exact ; c'est pour ce motif qu'on veut pouvoir l'examiner ; et on ne peut se livrer utilement à cet examen, qu'en ayant le tableau sous les yeux.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ni les sections ni la section centrale n'on> demandé ces renseignements.
M. de Theux. - L'honorable M. de Decker les a réclamés.
Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur si, outre les renseignements statistiques relatifs aux élections générales, il ne pourrait pas nous fournir les mêmes renseignements statistiques pour les élections partielles. Il y a presque tous les ans des élections. Il serait très intéressant d'avoir les renseignements statistiques relatifs à ces élections. C'est un petit travail à faire dans les bureaux.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, j’ai demandé au bureau de la statistique tous les renseignements que nous possédons sur les résultats des élections. On m'a donné pour réponse la note que j'ai communiquée à la Chambre. Je n'ai pas d'autres documents.
Je dois dire qu'eu fait de statistique, on ne peut pas reprocher au gouvernement belge d'être avare, je crois que le reproche contraire pourrait lui être adressé : nous avons des montagnes de documents statistiques. Seulement on n'y voit pas souvent creuser.
C'est peut-être un mal, mais c'est le sort de tous les documents trop développés. Dans tous les cas, les indications que j'ai données sont complètes.
Si l'honorable M. de Theux veut préciser encore certains renseignements, l'administration fera de nouvelles recherches, mais pour le moment elle ne peut fournir autre chose ; et ce qu'elle a fourni est déjà très considérable.
M. Coomans. - Messieurs, je suis du petit nombre de ceux qui fouillent de temps en temps dans les montagnes de documents statistiques dont vient de parler M. le ministre de l'intérieur ; mais je n'ai trouvé dans aucun des recoins de ces montagnes les renseignements qui ont été demandés, je pense, hier par l'honorable M. de Theux : il s'agit de connaître le nombre d'élections qui ont eu lieu en Belgique depuis 1830 en dehors et en dedans. Je voudrais que M. le ministre de l'intérieur…
- Des voix. - Demandez cela au greffe.
M. Coomans. - Laissez-moi m'expliquer. Je ne veux pas demander une chose oiseuse, voici le but que j'ai en vue :
Je voudrais que je pusse voir et que mes honorables collègues pussent voir aussi combien il y a eu d'élections dans chaque arrondissement depuis 1830.
- Un membre. - Tout le monde le sait.
M. Coomans. - Moi, je ne le sais pas.
M. de Moor. - Demandez-le au greffier.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous le savez, puisque vous avez la Constitution.
M. Coomans. - L'observation de M. le ministre des finances prouve qu'il ne me comprend pas.
J'ai lu la Constitution, et je sais que d'après la Constitution il y a des élections tous les quatre ans ; mais ce n'est pas ce que nous demandons ; nous désirons savoir combien il y a eu d'élections dans chaque arrondissement.
Chaque fois que j'ai demandé ici qu'on procurât aux électeurs de plus grandes facilités pour émettre leur vote, « à quoi bon ? me répondait-on ; les électeurs n'ont qu'à se déplacer tous les quatre ans. » C'est à cette réponse que je voudrais répliquer par des chiffres ; je voudrais établir que dans un grand nombre d'arrondissements, il n'y a pas eu d'élections tous les quatre ans, mais tous les deux ans et même tous les ans.
Je sais qu'on veut me renvoyer au greffe. Mais j'aurais là des paperasses qui ne sont pas toujours agréables à manier et dans lesquelles il est difficile de faire des recherches. Peut-êtte les résultats de ces recherches, si je les produisais, ne paraîtraient-ils pas aussi officiels que s'ils étaient certifiés par le département de l'intérieur.
Maintenant la Chambre préfère-t-elle charger son bureau de ce travail ? Je ne m'y oppose pas. Je demande une chose bien simple, et il serait étonnant qu'on ne nous fournît pas ces renseignements, je demande l'indication du nombre d’élections qui ont eu lieu en Belgique Je ne demande même pas qu'on y joigne le nombre d'électeurs ; je me borne à demander le nombre d'élections par arrondissement. Ainsi je pense qu'il y a eu une trentaine d'élections dans l'arrondissement de Bruxelles, par exemple.
M. Ch. de Brouckere. - Messieurs, les documents que demande l'honorable préopinant peuvent être fort utiles dans un certain ordre d'idées ; niais ces renseignements n'ont aucune connexité avec le projet de loi qui statuerait simplement sur l'augmentation du nombre des représentants et des sénateurs.
Je ne puis pas me rallier à la proposition de l'honorable M. Orts ; je crois qu'il est contraire à tous les précédents, contraire même e à l'ordre des assemblées délibérantes, de discuter simultanément deux projets et puis, après qu'on les aurait discutés, de décider qu'on coupera le résultat en deux.
(page 887) Il me semble que nous pouvons arriver au même but d'une manière beaucoup plus raisonnable.
Que la Chambre décide que dans son ordre du jour figureront, à la suite l'un de l'autre, les deux projets, l'un qui a pour but d'augmenter le nombre des sénateurs et des représentants, et l'autre qui est relatif à la manière de voter. Si la majorité de la Chambre décide que les deux projets se suivront immédiatement l'un après l'autre dans son ordre du jour, qu'ils seront discutés sans désemparer, il n'y a aucun force au monde qui puisse venir à l’encontre de ce que la Chambre aura décidé.
M. Moreau, rapporteur. - Messieurs, vous le savez, la section centrale a laissé à la Chambre le soin de décider si son amendement serait disjoint du projet primitif. Pour le cas où la Chambre adoptant l'opinion qui vient d'être exprimée par l'honorable M. Ch. de Brouckere, on serait disposé à discuter, immédiatement après le projet primitif, la proposition faite par la section centrale, je ne crois pas que la section centrale fasse de l'opposition à ce mode de procéder. Elle a entendu la disjonction dans ce sens, mais à la condition que la proposition de la section centrale viendrait immédiatement après le projet primitif du gouvernement.
M. Orts. - Messieurs, j'ai annoncé moi-même qu'en faisant ma motion, je n'avais d'autre but que celui qui vient d'être indiqué par l'honorable M. Ch. de Brouckere. Comme je ne tiens pas à voir triompher mon moyen plutôt que l'autre, du moment où le but est atteint, je serai satisfait si la Chambre décide dès aujourd'hui que les deux propositions seront disjointes et qu'elle discutera immédiatement et sans désemparer les deux projets l'un après l'autre, comme le disait l'honorable M. Ch. de Brouckere, dont je reproduis les paroles.
Du reste, ma proposition n'est pas autant en dehors des précédents parlementaires que paraît le croire l'honorable membre. La Chambre a pris plus d'une fois des décisions conformes à ma proposition. Je citerai notamment le Code pénal, dont il a été convenu que tous les articles seraient votés, sauf à découper ensuite cet immense projet en autant de petites lois spéciales que la Chambre le jugerait convenir.
Je modifie ma proposition en ce sens que les deux projets seront disjoints et qu'il sera passé à la discussion du deuxième projet après le vote du premier, sans désemparer, sans interruption.
M. Vermeire. - Messieurs, l'on propose de faire deux projets distincts, l'un qui concerne l'augmentation du nombre des représentants et des sénateurs, l'autre qui a rapport à certaines modifications de la loi électorale.
Il est donc bien entendu que la discussion portera sur un deuxième projet de loi immédiatement après le vote de celui qui a été présenté par le gouvernement
Je suis donc autorisé à croire que cette manière d'introduire des projets de loi à la Chambre n'est point conforme au règlement, attendu que toute proposition de loi doit être faite ou par le gouvernement ou par un membre de la législature, usant de son droit d'initiative. En ce dernier cas, le projet de loi doit être soumis aux formalités prescrites par le règlement.
Je désirerais que cette question fût éclaircie avant d'aborder le fond de la discussion.
M. Ch. de Brouckere. - La section centrale n'a fait que formuler le vœu de toutes les sections ; toutes ont examiné la proposition puisque les dispositions formulées dans le rapport sans le résultat du vœu des sections.
La section centrale propose un seul projet, nous demandons par amendement, qu'on le divise en deux projets distincts.
Il n'y a dans ce fait qu'une chose fort simple et qui ne demande aucun nouvel examen. Ne faisons pas de la tactique ; abordons la discussion de bonne foi.
M. Allard. - Et carrément !
M. E. Vandenpeereboom. - Je ne pense pas qu'on continue à contester à la section centrale le droit d'amender le projet qui lui était soumis. Ce projet était une modification ou amendement à la loi électorale ; nous l'avons sous-amendé ; nous avons usé d'un droit et nous l'avons fait en exécution d'une mission que nous avions reçue de toutes les sections.
Ii y a des précédents ; je pourrais en citer cent, et pour ne pas sortir de l'objet qui nous occupe, je dirai qu'en 1842, le gouvernement ayant présenté quelques modifications à la loi communale, l'honorable M. de Theux a introduit le fractionnement ; la Chambre a été saisie de cette proposition par un simple membre, cela n'a pas empêché de voter la loi avec cette modification. Cependant le fractionnement, pour me servir de l'expression de M. Henri de Brouckere, n'avait aucune affinité avec l'objet présenté par le gouvernement.
En 1843, un an après, à l'occasion d'un projet de loi présenté par le gouvernement pour réprimer les fraudes électorales, l'honorable M. Malou a proposé l'élection simultanée des sénateurs et des représentants et le papier électoral. Voilà encore une modification qui a été introduite par la section centrale ; on n'est pas venu lui contester à cette époque le droit de sous-amender un amendement proposé par le gouvernement à la loi électorale.
Je n'insiste pas sur ce point ; mon soutènement est tellement clair, que je ne comprends pas qu'on élève même un doute à cet égard. J'attendrai, pour en dire davantage, qu'on fasse d'autres objections. Nous n'avons fait qu'user d'un droit en nous conformant au vœu de toutes les sections. Je me fie sans hésitation à la décision que la Chambre prendra sur le droit positif qu'avait la section centrale de formuler les sous-amendements qu'elle a produits.
M. H. Dumortier. - J'ai demandé la parole quand j'ai entendu plusieurs honorables membres insister sur cette considération que toutes les sections se sont prononcées dans le sens de la proposition faite par la section centrale. Vous n'ignorez pas, messieurs, comment cette proposition a été soulevée incidemment dans les sections à l'occasion du projet de loi du gouvernement sur l'augmentation du nombre dos représentants et des sénateurs.
Ce projet nous avait été communiqué, à une heure déjà avancée de la soirée, la veille du jour où il figurait à l'ordre du jour des sections. Personne de nous ne savait qu'on serait venu à l'improviste faire une proposition de cette importance dans les sections et il serait vraiment assez intéressant de constater d'après les procès-verbaux des sections le nombre des membres de la droite qui ont pris part à ces délibérations.
J'ai messieurs, une autre remarque à faire :
Je crois qu'il n'est pas exact de dire que toutes les sections se sont prononcées dans le sens de la proposition faite par la section centrale. Je sais qu'il y a des sections qui se sont bornées à exprimer le simple vœu que le gouvernement examinât la question relative au vote par ordre alphabétique. Les allégations des honorables membres qui viennent de prendre la parole renferment donc une inexactitude et une exagération manifeste.
M. Vermeire. - J'ai demandé la parole pour faire remarquer qu'en présentant tout à l'heure mon observation, je n'ai pas voulu faire de la tactique parlementaire, comme semble l'insinuer l'honorable M. Ch. de Brouckere.
Je dois faire remarquer que la Constitution prescrit que le nombre des représentants et des sénateurs sera proportionné à celui de la population ; que c'est d'une loi de répartition que le gouvernement a saisi la Chambre ; que la proposition de la section centrale tend, au contraire, à modifier les dispositions de la loi électorale ; que, conséquemment, la section présente un nouveau projet de loi n'ayant aucune connexité avec celui du gouvernement puisqu'il a pour objet de faire disparaître et de remplacer par d'autres dispositions certaines prescriptions de la loi électorale, lesquelles, étant introduites sous forme de nouveau projet de loi, devraient être, au préalable, soumises aux formalités prescrites par Je règlement de la Chambre.
M. de Theux. - Je n'avais pas demandé la parole, mais puisque M. le président me la donne, j'en userai pour faire une observation. Il est de toute exactitude que le projet de loi nous a été présenté dans une séance de rentrée qui avait suivi une petite vacance, j'ai été étonné de recevoir ce projet imprimé le soir même.
- Un membre. - Le gouvernement l'avait fait imprimer.
M. de Theux. - Je ne m'en plains pas, mais ce qu'il y a de singulier, c'est qu'un projet aussi important ait été mis à l'ordre du jour des sections le lendemain de sa présentation. Cela explique pourquoi beaucoup de membres ont fait défaut dans les sections. Qu'il y ait eu unanimité pour proposer la modification dont il s'agit, cela se conçoit, on s'y est rendu d'un côté et de l'autre on n'y est pas allé.
Au-si sommes-nous restés en dehors de toute participation, de toute connaissance du travail de la section centrale jusqu'au jour où l'honorable rapporteur a donné lecture de ses conclusions ; cela a donc été pour nous un objet de surprise.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne pense pas que l'honorable député de Hasselt ait voulu insinuer qu'on ait cherché à introduire ce projet comme par surprise. Le projet a été imprimé pendant la vacance pour faire gagner du temps à la Chambre. Ce n'est pas nous qui avons réglé l’ordre du jour des sections. Les membres devaient être attentifs à cet important projet de loi et ne pas le laisser passer inaperçu dans les sections.
Le tort, si tort il y a, c'est aux membres qui ne se sont pas rendus dans leurs sections respectives qu'il faudrait l'imputer. Je ne sais pas quelle conséquence l'honorable membre voudrait tirer de ce que ce projet aurait été imprimé pendant les vacances et distribué à la rentrée immédiatement après sa présentation.
Ma s ce que je pourrais reprocher à l'honorable M. de Theux, c'est de n'avoir pas été en section pour y discuter un projet de cette importance.
M. de Theux. - Je n'ai nullement eu l'intention de blâmer M. le ministre de l'intérieur d'avoir fait imprimer le projet de loi pendant nos dernières vacances ; il m'importe peu que ce projet ait été imprimé avant ou après sa présentation, mais j'aurais désiré que les sections ne fussent convoquées que dans les termes du règlement, c'est-à-dire après un délai moral suffisant pour examiner ce projet.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Cela ne me regarde pas.
M. de Theux. - On ne peut pas justifier la mise à l'ordre du jour des sections d'un projet de cette importance le lendemain de sa distribution. Quant à moi.je le déclare bien sincèrement, je n'ai pas eu le (page 888) temps nécessaire pour me préparer à une discussion sérieuse en section.
M. le président. - Je viens de faire prendre au greffe des renseignements sur le jour de la présentation et de la distribution, afin de pouvoir vérifier les faits.
M. Muller. - Je dois faire remarquer à la Chambre que les critiques que l'on fait en moment arrivent un peu tard. Ces critiques, personne ne les avait formulées jusqu'à présent, ni dans les sections, ai même dans de simples conversations particulières ; et il n'est pas du tout exact de dire que la droite se soit abstenue, d'une manière complète, dans les sections. La droite a fait ce qu'elle a toujours fait : elle a été représentée dans les sections par quelques-uns de ses membres, et ceux qui ne s'y sont pas rendus n'ont évidemment à faire de reproche, ni au gouvernement, ni au président de la Chambre de ce qu'on n'aurait pas pu examiner avec maturité ce projet dans les sections. Nous avons tous été appelés à examiner ce projet, et M. le ministre de l'intérieur l'avait même formellement annoncé à la Chambre avant la séparation. Si l'on a hâté l'examen du projet en sections ce n'a été évidemment que pour que nos travaux ne fussent pas interrompus.
M. Orts. - Je dois faire une remarque à la Chambre, car je tiens beaucoup à ce que l'origine du projet reste aussi pure que son principe. Je ne comprends pas qu'on se plaigne d'une précipitation prétendue de l'examen en sections, en supposant même que le fait soit complétement exact, ce que je n'ai pas pu vérifier. En effet, si quelqu'un avait à se plaindre de ce qu'on ait mis le projet de loi en discussion dans les sections avant l'expiration du délai fixé par le règlement, c'est en sections que l'observation eût dû en être faite ; c'est là qu'on eût dû faire un rappel au règlement, car, s'il plaît aux sections d'examiner un projet de loi avant l'expiration du délai fixé par le règlement, elles ont parfaitement le droit de l'examiner.
Je constate qu'en sections aucune membre de la droite présent n'a invoqué le règlement pour demander une remise.
Je m'étonne d'autant plus des plaintes que nous entendons aujourd'hui, après le silence des sections et l'absence de tout rappel au règlement, que, dans une circonstance récente et à propos d'un projet de loi qui n'avait aucun caractère politique, je veux parler du projet de loi relatif à la police médicale, l'honorable M. Van Overloop a présenté une observation sur la précipitation que, selon lui, on avait mise à l'examen de ce projet en sections ; et l'honorable M. Muller lui-même s'est refusé à examiner ce projet parce qu'il avait été soumis aux délibérations des sections avant l'expiration du délai fixé par le règlement.
Le fait n'est donc pas nouveau, et les membres qui ont assisté à la discussion en sections pouvaient fort bien présenter là leurs observations.
M. H. Dumortier. - C'est ce que nous faisons.
M. Orts. - Oui ; mais c'est dans votre section que vous eussiez dû le faire. La Chambre ne peut pas, après que le projet a été examiné en sections, décider si elles en ont été saisies trop tôt ou trop tard.
M. H. Dumortier. - J'ai moi-même fait une motion d'ordre à la Chambre pour me plaindre de cette manière d'agir et pour demander que le règlement fût dorénavant exécuté. J’ai fait remarquer que le projet de loi sur la police médicale et plusieurs autres avaient été mis à l'ordre du jour dans les sections sans que nous ayons eu le temps nécessaire pour les examiner.
Qu'on ne vienne donc pas dire que c'est aujourd'hui la première fois que nous nous plaignons de manière dont le projet de loi sur l'augmentation des membres de la Chambre et du Sénat ainsi que la question relative au vote par ordre alphabétique ont été examinées par les sections.
M. le président. - La parole est à M. le ministre des finances.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je vérifie précisément le fait que je voulais signaler à la Chambre.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Mais je ne sais réellement pas sur quoi on discute ; c'est une véritable chicane.
- Plusieurs membres. - Aux voix ! aux voix !
M. le président. - Voici la proposition telle que l'a modifiée l'honorable M. Orts :
« Je propose à la Chambre de disjoindre du projet du gouvernement le projet de la section centrale et de décider qu'elle discutera et votera les deux projets successivement et sans désemparer. »
Je mets cette proposition aux voix. (Interruption.)
M. J. Lebeau. - Je demande la parole.
M. le président. - Sur la position de la question ?
M. J. Lebeau. - Mais oui, il paraît que les mots « sans désemparer » effrayent quelques membres qui les interprètent en ce sens que nous resterions en permanence pour discuter les deux projets. (Oh ! oh !)
M. le président. - M. Orts consent à remplacer les mots « sans désemparer » par ceux-ci : « sans interruption ».
- La proposition de M. Orts, ainsi modifiée, est mise aux voix et adoptée.
M. le président. - Ainsi, ces deux propositions figureront à l'ordre du jour de demain, indépendamment des autres objets qui ont été déjà classés.
- La séance est levée à 5 heures.