(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859
(page 691) (Présidence de M. Verhaegen.)
M. de Boe procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Moor donne lecture du procès-verbal de la séance du l mars.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Boe présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.
« Le sieur Auguste-Jean-Baptiste Kuhn, né à Florenville, demande à recouvrer la qualité de Belge qu'il a perdue en prenant du service militaire à l'étranger. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« Des habitants d'Aiseau prient la Chambre de rejeter la demande ayant pour objet la division du canton de Charleroi en deux justices de paix. »
« Même demande d'habitants de Pont-de-Loup, Gilly, Bouffioulx, Presles, Gougnies, Gerpinnes, Joncret, Villers-Potterie, Acoz. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Deladrière, ancien militaire, demande une pension ou un subside. »
- Même renvoi.
« Le sieur Corbusier, secrétaire du parquet du tribunal de première instance de Huy, demande une augmentation de traitement. »
- Même renvoi.
M. Lelièvre. - Cette pétition est urgente. Je demande qu'elle soit renvoyée à la commission qui sera invitée à faire uu prompt rapport.
- Cette proposition est adoptée.
« Des habitants de Meetkerke demandent l'établissement d'un pont tournant sur le canal d'Ostende à Bruges, pour relier les deux parties de Varssenaere. »
« Même demande de membres du conseil communal et d'habitants de Snelleghem. »
- Même renvoi.
« Le sieur Hendrickx, journalier à Berloz, milicien de la levée de 1855, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir l'autorisation de contracter mariage. »
- Même renvoi.
« Les sieurs Blondel, Delvaux et autres membres du barreau d'Anvers, prient la Chambre de s'occuper le plus tôt possible de la réorganisation des tribunaux de commerce. »
- Même renvoi.
« Le sieur de Molinari présente des observations contre les articles du Code pénal, relatifs aux conditions des maîtres et des ouvriers et à l'embauchage de ces derniers. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
« Des détenus pour dettes prient la Chambre d'adopter les amendements du Sénat au projet de loi sur la contrainte par corps. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion de ces amendements.
« Le sieur Dubois, ancien examinateur permanent à l'école militaire, se plaint de ce qu'il n'a pas été donné suite à sa demande ayant pour objet la révision de sa pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Musch se plaint de ce que l'administration communale de Bruxelles n'établit pas des écoles primaires dans la partie des communes de Saint-Josse-ten-Noode et d'Etterbeek qui a été annexée a la capitale. »
- Même renvoi.
« Le sieur Félix présente de nouvelles considérations pour obtenir une indemnité à raison du tort qui lui a été occasionné par suite de la détention dont il a été l'objet. »
- Même renvoi.
« Par dépêche du 3 mars, M. le ministre de la justice transmet à la Chambre-, avec les pièces de l'instruction, deux demandes de naturalisation ordinaire.
- Renvoi à la commission de naturalisation.
« M. Nélis, retenu par une indisposition et MM. Moncheur et de Liedekerke, forcé de s'absenter, demandent un congé de quelques jours. »
- Ces congés sont accordés.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - D'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer les projets de loi suivants :
Les budgets des affaires étrangères, de l'intérieur, des finances, des recettes et dépenses pour ordre, des remboursements, des travaux publics, et des voies et moyens pour l'exercice 1860.
Un projet de lot allouant au département des travaux publics divers crédits supplémentaires destinés, les premiers à solder quelques créances arriérées se rapportant à des exercices clos, les autres à couvrir les insuffisances que présentent certaines allocations des budgets de 1858 et 1859.
- Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation de ces projets de loi ; la Chambre en ordonne l'impression et la distribution et les renvoie à l'examen des sections.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai l'honneur de déposer un projet de loi relatif à la nouvelle répartition des membres de la Chambre et du Sénat.
- Il est donné acte à M. le ministre de l'intérieur de la présentation de ce projet de loi, qui sera imprimé et distribué.
La Chambre le renvoie à l'examen des sections.
M. le président. - La Chambre a à apprécier quatre amendements qui ont été apportés par le Sénat au projet de loi. La commission qui a examiné ces amendements conclut à l'adoption. Le gouvernement est-il d'accord avec la commission ?
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Oui, M. le président.
M. le président. - Le premier amendement a été apporté à l'article premier.
« Art. 1er. La contrainte par corps a lieu en matière de commerce :
« 1° Contre tous commerçants pour dettes de commerce, même envers des non-commerçants ;
« 2° Contre toutes personnes qui ont signé des lettres de change comme tireurs, accepteurs ou endosseurs, ou qui les ont garanties par un aval ;
« Toutefois, les non-commerçants ne sont pas soumis à la contrainte par corps, lorsque les effets de change qu'ils ont signés ou garantis sont réputés simples promesses aux termes de l'article 112 du Code de commerce.
« 3° Contre toutes personnes pour l'exécution des engagements relatifs au commerce et à la pêche maritimes. »
- Cet article est adopté.
« Art. 4. La contrainte par corps pourra être prononcée :
« 1° Pour délaissement d'immeubles et restitution des fruits indûment perçus par le détenteur ;
« 2° Contre les notaires et autres dépositaires en cas de refus de délivrer expédition ou copie aux parties intéressées en nom direct, héritiers ou ayants droit ;
« 3° Pour dommages-intérêts, restitutions et frais, lorsqu'ils sont le résultat de faits prévus par la loi pénale et dans tous les cas de dol, de fraude ou de violence ;
« 4° Pour reliquat de comptes de tutelle, de curatelle ou de toute administration confiée par justice et pour toute restitution à faire par suite desdits comptes ;
« 5° Contre le fol enchérisseur, après saisie d'immeubles ou de rentes constituées sur particuliers, pour le payement de la différence de son prix d'avec celui de la revente ;
« 6° Dans les cas de surenchère prévus par les articles 115 de la loi du 16 décembre 1851 et 565 du Code de commerce, conformément à l'article 101 de la loi du 15 août 1854 ;
« 7° Contre le comptable qui, après l'expiration du délai fixé par le jugement, sera en défaut de présenter et d'affirmer son compte ;
« 8° Contre ceux qui auront de mauvaise foi dénié en justice leur écriture ou leur signature ;
« 9° Contre le détenteur, non fonctionnaire public, d'une pièce de comparaison nécessaire dans une instance en vérification d'écriture ou d'une pièce arguée de faux, pour l'apport de ces pièces ordonné par le juge ;
« 10° Contre les experts en cas de retard ou de refus de déposer leur rapport. »
(page 692) M. Lelièvre. - Je pense qu'il ne peut y avoir la moindre difficulté à adopter les amendements admis par le Sénat, parce qu'ils laissent subsister toutes les dispositions principales du projet et qu'ils n'ont introduit dans la loi que des modifications peu importantes.
C'est ainsi qu'en ce qui concerne les lettres de change, le Sénat a maintenu purement et simplement les prescriptions du Code de commerce qui nous régit.
Quant à la surenchère en matière d'aliénation volontaire, il me paraît évident qu'aux termes de l'article 4 n°6 du projet, la contrainte par corps ne pourra être prononcée qu'en cas de folle enchère, conformément aux articles 79 et loi de la loi du 15 août 1854.
Lorsqu'il ne s'agit que de l'exécution des obligations du surenchérisseur, il n'existe pas des motifs suffisants pour introduire à son égard le mode rigoureux de la contrainte par corps, puisque son engagement est garanti par une caution.
Mais s'il a apporté une grave perturbation dans les intérêts des tiers par suite de la folle enchère, on conçoit alors l'application de l'article 79 de la loi du 15 août 1854 même en matière d'aliénation volontaire, et il est rationnel en ce cas d'admettre la contrainte par corps, pour assurer la réparation du préjudice causé par le fait du surenchérisseur.
C'est en ce sens que je comprends la portée de la disposition adoptée par le Sénat qui du reste n'innove en rien le régime consacré par la loi du 15 août 1854.
Du reste il est évident à mon avis qu'aucun article de cette disposition législative ne prononce la contrainte par corps en matière de vente volontaire que quand il s'agit de folie enchère.
Je pense d'ailleurs, que dans le cas de l'article 45 du projet, c'est devant le tribunal civil que le débiteur devra se pourvoir contre le ministre des finances qui représente l'Etat.
C’est le mode de procéder qui me paraît découler de la disposition dont il s'agit, à laquelle le Sénat a apporté une légère modification.
Pour le surplus, je considère le projet de loi comme réalisant des améliorations notables.
J'espère que dans quelques années une réforme plus radicale pourra être admise dans l'intérêt de la liberté individuelle.
Entre-temps, le projet de loi doit être considéré comme un véritable progrès, et je n'hésité pas à lui donner mon approbation.
- L'article 4 est mis aux voix et adopté.
« Art. 38. Dans les cas prévus par les articles 35 et 37, le débiteur ne pourra plus être détenu ou arrêté pour dettes contractées antérieurement à son arrestation et échues trois mois avant son élargissement. »
- Adopté.
« Art. 45. Les condamnations à l'amende et aux frais envers l'Etat, prononcées en matière criminelle, correctionnelle et de simple police, sous l'empire de la loi ancienne, pourront être exécutées par la voie de la contrainte par corps.
« Le débiteur se pourvoira devant le tribunal de première instance de son domicile à l'effet d'en faire déterminer la durée, dans les limites fixées par l'article 58 du Code pénal rendu obligatoire par la présente loi. »
- Adopté.
La série des amendements introduits par le Sénat dans le projet de loi est épuisée.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.
Le projet est adopté à l'unanimité des 69 membres présents. Il sera soumis à la sanction royale.
Ont répondu à l'appel nominal : MM. d'Ursel, Frère-Orban, Albert Goblet, Louis Goblet, Grosfils, J. Jouret, M. Jouret, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Ch. Lebeau, J. Lebeau, Lelièvre, Loos, Magherman, Malou, Manilius, Mascart, Moreau, Muller, Neyt, Orban, Orts, Pirmez, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tack, Tesch, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Leempoel, Van Overloop, Vervoort, Allard, Ansiau, Coppieters 't Wallant, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Breyne, de Bronckart, H. de Brouckere, Dechentinnes, de Decker, De Fré, de Haerne, Deliége, de Luesemans, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, Dolez, H. Dumortier et Verhaegen.
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion des titres VII et VIII du livre II du Code pénal.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Le texte comparé du titre VII du projet du gouvernement et des amendements proposés par la commission n'a été distribué qu'hier au soir ; il ne m'a pas encore été possible de l'examiner. Je suis dès lors dans la nécessité de demander à la Chambre de fixer cette discussion à un autre jour. J'aurais à conférer avec les membres de la commission qui a préparé le projet de loi, et très probablement avec la commission de la Chambre. Je demande en conséquence que cet objet soit mis à l'ordre du jour de mardi prochain.
M. le président. - Dans ce cas nous n'avons rien à l'ordre du jour.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'aurais voulu prévenir cet inconvénient ; mais la Chambre comprendra que la distribution du rapport de la commission est trop récente pour que j'aie pu déjà me rendre raison des amendements introduits par la commission dans les titres VII et VIII qui sont en corrélation intime.
Il ne s'agit pas d'aller vite, mais d'aller bien et de faire une œuvre convenable, irréprochable dans les limites du possible. Nous ne pouvons pas aborder cet objet aujourd'hui.
M. de Luesemans. - Il avait été entendu que les articles correspondants du Code pénal actuel auraient été imprimés en regard du projet qui nous est soumis. L'honorable M. Lelièvre n'était probablement pas présent quand cette décision a été prise, car son rapport n'en a pas tenu compte.
On pourrait utiliser le temps qui va s'écouler d'ici à l'ouverture de la discussion pour faire uu travail supplémentaire comprenant les articles du Code pénal correspondants à ceux contenus dans les titres VII et VIII dont nous aurons à nous occuper.
M. Lelièvre. - Je m'occuperai avec plaisir du travail que désire l'honorable M. de Luesemans en ce qui concerne le titre VIII. Quant au titre VII, le rapport était imprimé et distribué longtemps avant que la Chambre eût pris la résolution dont parle notre collègue. Cette décision n'est donc applicable qu'aux rapports à faire ultérieurement.
M. le président. - Quand M. le ministre aura examiné les rapports, peut-être jugera-t-il qu'on peut en aborder la discussion avant l'époque qu'il a indiquée.
Prise en considération de demandes en naturalisation
M. le président. - Nous passons aux autres objets à l'ordre du jour. Il va être d'abord procédé au vote sur la prise en considération de demandes en naturalisations dont la commission propose le rejet.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre des votants, 58.
Majorité absolue, 30.
Les sieurs Louis-Victor-Doctrovée le Provost, né à Caen (France), le 10 mars 1818, domicilié à Saint-Josse-ten-Noode, a obtenu 5 suffrages.
Jean-Pierre Drytte, né à Voerendael (partie cédée du Limbourg), en 1788, ancien cantonnier, domicilié à Soit (Limbourg), 6 suffrages.
Etienne-François Charvet, né à la Clayette (France), le 7 vendémiaire an VIII, sous-officier au 2èm régiment de lanciers, 6 suffrages.
Pierre Wagner, né à Berg (grand-duché de Limbourg), le 20 juillet 1835, caporal au premier régiment de ligne, 7 suffrages.
Théodore Niessen, né à Weert (partie cédée du Limbourg), le 30 décembre 1817, boucher, domicilié à Bruxelles, 7 suffrages.
Joseph Dorn, né dans le grand-duché de Luxembourg, journalier, domicilié à Ixelles, 7 suffrages.
Godefroid Verbruggen, né à Heythuysen (partie cédée du Limbourg), le 7 mars 1821, employé à la station du chemin de fer, domicilié à Malines, 7 suffrages.
Jean-Gaspard Dautzenberg, né à Wilré (partie cédée du Limbourg), le 12 avril 1811, domicilié à Saint-Josse-ten-Noode, 7 suffrages.
Les pétitionnaires n'ayant pas réuni la majorité des suffrages, leurs demandes ne sont pas prises en considération.
M. le président. - Messieurs, divers projets de loi très importants nous ont été présentés au début de la séance ; plusieurs d'entre eux et notamment le projet de loi présenté par M. le ministre de l'intérieur pourraient être distribués ce soir.
Les sections seront convoquées pour les examiner demain. Il y a aussi des sections centrales qui ont à s'occuper du projet de loi relatif à la révision cadastrale, du projet de loi relatif aux warrants et de divers autres projets.
Je vous propose en conséquence, messieurs, de n’avoir séance demain qu'à 3 heures, de maintenir à l'ordre du jour les objets qui figurent encore à celui d'aujourd'hui, et d'ajourner à demain la décision à prendre au sujet de la discussion du projet de Code pénal.
M. H. Dumortier. - Ce qui reste à notre ordre du jour d'aujourd'hui est si peu important, que je ne vois pas trop la nécessité d'avoir une séance demain.
M. le président. - Les sections devant se réunir demain, il n'y a aucun inconvénient à ce que nous nous réunissions en séance publique.
M. H. Dumortier. - Je ne m'y oppose pas.
M. le président. - Les sections seront convoquées pour midi et (page 693) les sections centrales immédiatement après pour qu'elles puissent terminer leur besogne et nous la soumettre en séance publique. Je fais appel à la bonne volonté de tous les membres de la Chambre.
- La proposition de M. le président est adoptée. La Chambre se réunira à 3 heures et l'ordre du jour comprendra les objets qui figurent encore à celui d'aujourd'hui.
M. le président. - J'ai une autre proposition à faire au sujet de' l'ordre de nos travaux.
Les budgets des dotations et de la dette publique avaient été renvoyés, en février, à l'examen des sections ; le projet de loi qui vient d'être déposé par M. le ministre de l'intérieur sur la nouvelle répartition des représentants et des sénateurs est renvoyée aux sections de mars.
Il faudrait donc convoquer demain la section de février pour deux objets de peu d'importance et celle de mars pour les projets déposés aujourd'hui. Je propose donc de retirer aux sections de février les deux budgets dont je viens de parler et de les renvoyer à l'examen des sections de mars, de manière à n'avoir à convoquer que celles-ci pour tous les projets dont la Chambre est saisie.
- Cette proposition est adoptée.
La séance est levée à 3 h. 3/4.