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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 23 décembre 1858

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859)

(page 315) (Présidence de M. Orts, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Vermeire procède à l'appel nominal et donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dont la rédaction est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Moor présente ensuite l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Lansens demande que M. le ministre de l'intérieur soit invité à se prononcer sur ses intentions relatives aux réclamations en faveur de la langue flamande. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des cultivateurs de la Hulpe demandent une indemnité pour les ravages faits dans leurs récoltes par le gibier qui se conserve dans la forêt de Soignes. »

« Même demande du sieur Havaux, cultivateur à Rhode-Saint-Genèse. »

- Même renvoi.


« Le sieur Rauson, Bourbert et autres habitants d'une commune non dénommée, prient la Chambre de rejeter le projet de loi de révision du Code pénal. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet.


« Des conseillers communaux et des cultivateurs d'Erembodegem demandent l'établissement d'un droit d'entrée sur le houblon. »

- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.


« Par divers messages, en date du 21 courant, le Sénat informe la Chambre qu'il a adopté le budget des dotations pour l'exercice 1859 ;

« Le projet de loi portant érection de la commune de Vieux-Turnhout ;

« Et le projet de loi ouvrant un crédit supplémentaire au budget des dotations de l’exercice 1858, pour couvrir les dépenses du la Chambre des représentants pendant ledit exercice. »

Projet de loi fixant le contingent de l’armée de l’année 1859

Vote des articles et vote sur l’ensemble

M. de Muelenaere (pour une motion d’ordre). - Messieurs, nous avons le rapport sur le projet de loi fixant le contingent de l'armée. Ce projet doit être voté avant le 1er janvier. Il ne donnera probablement lieu à aucune discussion, ce ne sera qu'un simple vote. Je prie la Chambre de vouloir bien commencer par le projet de loi sur le contingent de l'armée, d'autant plus que M. le ministre des affaires étrangères n'est pas à son banc.

- La Chambre, consultée, décide que l'ordre du jour sera interverti et qu'on commencera par le projet de loi fixant le contingent de l'armée.

Personne ne demandant la parole, la Chambre passe à la discussion des articles.


« Art. 1er. Le contingent de l'armée, pour 1859, est fixé à quatre-vingt mille hommes. »

- Adopté.


« Art. 2. Le contingent de la levée de milice de 1859 est fixé au minimum de dix mille hommes qui sont mis à la disposition du gouvernement. »

- Adopté.


« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le 1er janvier 1859. »

- Adopté.


Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet 64 membres répondent à l'appel. 61 répondent oui. 3 répondent non. En conséquence, le projet de loi est adopté. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu non : MM. Grosfils, David et de Lexhy.

Ont répondu oui : MM. Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tack, Thiéfry, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom,, Vander Donckt, Vander Stichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Renynghe, Vermeire, Vervoort, Verwilghen, Allard, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Breyne, H. de Brouckere, Dechentinnes, De Fré, de Lexhy, Deliége, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Ruddere de Te Lokeren, de Smet, de Terbecq, Dolez, B. Dumortier, H. Dumortier, d'Ursel, A. Goblet, L. Goblet, Godin, Jacquemyns, Julliot, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Lelièvre, Loos, Magherman, Manilius, Mascart, Muller, Notelteirs Orban, Pierre et Orts.

Projet de loi portant le budget du ministère des affaires étrangères de l’exercice 1860

Discussion du tableau des crédits

Chapitre II. Traitement des agents diplomatiques

Article 7

M. J. Lebeau. - Messieurs, j'ai entendu hier, avec une pénible émotion, comme beaucoup d'entre vous probablement, des paroles dont je me garde d'incriminer le but, mais qui m'ont paru avoir un caractère d'imprudence.

Je professe le plus profond respect pour toutes les opinions sincères ; c'est la condition, à mes yeux, des égards que je réclame pour la mienne ; je comprends qu'on soutienne des thèses très diverses, quand même je m'en trouve froissé ; mais ce qui est profondément regrettable, c'est qu'à l'insu peut-être, je voudrais en être convaincu, de ceux qui s'engagent dans cette voie, on fasse entendre trop fréquemment dans cette Chambre des paroles qui, si elles passaient sans examen et sans réfutation, pourraient jeter dans le pays, dans ce pays si calme, si moral, des ferments de discorde et peut-être le germe d'une guerre de classes.

Pour appuyer l'opposition qu'on fait à l'énorme abus qui se résume dans une somme de 45,000 fr., on est venu vous dire hier, peut-être pour la vingtième fois, que la Chambre, que le gouvernement surtout ne se préoccupaient que des intérêts de quelques-uns et sacrifiaient, tout au moins négligeaient les intérêts de la partie la plus nombreuse de la population, les intérêts des petits. Paroles, messieurs, qui, tombées de la tribune nationale, si elles restaient sans contradiction, pourraient jeter dans une partie de notre population, qui, je me hâte de le dire, a heureusement résisté jusqu'ici à de pareilles excitations, pourraient y introduire, je le répète, les éléments d'une lutte sociale.

Et c'est à propos d'une allocation de 45,000 fr. qu'on vient tenir un pareil langage ; alors, messieurs, que vous avez tous présents à la mémoire les efforts constants, assidus, zélés, que le gouvernement et la législature ont faits pour arriver à l'amélioration morale et matérielle des classes les plus nombreuses.

Comment ! messieurs, nous ne faisons rien pour les petits ; nous ne travaillons que pour les grands ! Les grands ! les favorisés, où sont-ils ? C'est là une fantasmagorie, un mythe.

Et c'est le lendemain presque, du jour où la législature a voté successivement, et si rapidement deux millions de francs, destinés tout spécialement à la classe la plus nombreuse de notre pays ; c'est quand on a relevé la situation matérielle et morale de tous les instituteurs primaires ; c'est an moment où tous les efforts généreux se concentrent dans la recherche des meilleurs moyens d'alléger le fardeau de la milice, une des lois pourtant les plus libérales de l'Europe ! c'est dans ce moment qu'on vient, à propos de la chétive somme de 45,000 fr. sur le chiffre entier du budget, soutenir cette inconcevable hyperbole, dont le bon sens du pays a déjà fait justice, que nous sacrifions constamment, systématiquement, les petits aux grands.

Messieurs, j'aurais encore beaucoup à dire sur ce point ; je comprends la nécessité d'abréger et d'épargner les moments de la Chambre à l'époque où nous sommes arrivés, surtout par égard pour le Sénat.

Deux amendements ont été présentés sur le chiffre que nous discutons.

Le premier n'a pas pour résultat une économie, c'est un simple transfert. Si l'amendement de l'honorable M. Vandenpeereboom est voté, le peuple, les petits n'en profiteront pas du tout ; mais les consuls voteront probablement à l'honorable membre des actions de grâce.

Je repousse cet amendement, parce qu'il pèche complétement par sa base. L'honorable M. Vandenpeereboom prend la place de M. le ministre des affaires étrangères. Il ne diminue pas le budget d'un centime, mais il ôte aux agents diplomatiques une somme de 45,000 fr. dont il gratifie le corps consulaire ; signifiant ainsi que lui, M. Vandenpeereboom, si son amendement est adopté, a plus de sollicitude pour le corps consulaire que M. le ministre des affaires étrangères qui en est le chef.

Vous comprenez que la question d'argent est ici fort peu de chose ; l'honorable M. Vandenpeereboom a trop d'intelligence pour ne pas le comprendre ; mais il s'y trouve une question d'honneur et de prérogative qui fait un devoir à M. le ministre des affaires étrangères de résister à l'amendement. C'est plus pour lui qu'une question d'administration, c'est une question de dignité.

Messieurs, on est revenu sur les réductions qui avaient été opérées en 1848 et qui ont à peu près disparu aujourd'hui. Ce phénomène n'est pas nouveau, et l'honorable député de Gand, qui a étudié, j'en suis sûr, autant que moi, si pas mieux que moi, les institutions et l'histoire de l'Angleterre, saura que des événements de la nature de ceux de 1848 se sont produits dans la flegmatique Angleterre, presque à chaque phase de son histoire politique et ont subi les mêmes retours.

Ainsi, comme le rapporte lord Macaulay : sous le règne de Guillaume III, alors qu'une révolution venait de le porter au trône, il y eut un député qui fit cette singulière proposition à la Chambre des communes : réduire tous les traitements du pays, moins celui du speaker et des juges, à 500 liv. st. ; de sorte que le résultat de cet amendement était d'assimiler les traitements des ministres à ceux de certains employés de la chambre des communes.

(page 316) L'amendement fut voté à l'unanimité. Quelques jours après, la réflexion étant arrivée, il fut rapporté à l'unanimité et sans discussion.

Messieurs, on a fait quelque chose de semblable en 1848, et je puis en parler à mon aise, car j'ai voté à peu près contre toutes les propositions d'alors.

Du reste, si je les avais adoptées, je ne serais pas le moins du monde embarrassé pour revenir sur cette décision, attendu que je ne mets pas mon amour-propre au-dessus de mon devoir.

Pour compléter ce travail de réparation, il faut faire quelque chose de plus pour la diplomatie, qui a été particulièrement offerte en holocauste à l'esprit révolutionnaire dont nous ressentions le souffle et qui emportait l'Europe tout entière en 1848.

La Chambre est déjà revenue sur plusieurs de ces dispositions. Elle a bien plus de raisons aujourd'hui pour persister dans ses résolutions et ses réparations. Remarquez qu'aujourd'hui, l'observation en a été faite déjà, la cherté des vivres va croissant, la valeur monétaire va diminuant. Les loyers à Bruxelles et la vie animale ont à peu près doublé de prix depuis 15 ans ; et si vous allez dans d'autres villes, ce phénomène se produit généralement dans les mêmes proportions. Ainsi, le prix des locations est doublé depuis 20 ans à Paris, et, pour rentrer spécialement dans notre sujet, je connais un fonctionnaire de l'Etat, un secrétaire de légation belge, logé à l'extrémité de la capitale où il réside, occupant un appartement convenable mais sans luxe. Cet appartement lui coûte plus de la moitié du traitement qui lui est alloué.

II y a, messieurs, une concurrence qui nous est faite et qui devient de jour en jour plus dangereuse pour l'administration publique. Celle-ci est menacée de s'appauvrir chaque jour si l'on n'y met ordre. Cette nouvelle puissance, qui s'appelle l'industrie, ne lésine jamais quand il s'agit d'enlever même au gouvernement, pour se les attacher, de hautes capacités. C'est, je le répète, une puissance avec laquelle les gouvernements auront à compter de jour en jour davantage. Il est, messieurs, tels directeurs de chemin de fer ou de toute autre grande société industrielle, auprès desquels les traitements de nos ministres descendent parfois au niveau de ceux d'un commis.

Je vois avec regret que deux de nos grands services publics sont incessamment menacés dans cette enceinte, au moins en paroles. Ces deux grands services, sur lesquels repose la nationalité belge tout entière, c'est l'armée, c'est-à-dire le nerf du pays ; c'est la diplomatie, c'est-à-dire l'œil du pays.

Je sais bien qu'instinctivement personne n'aspire à la ruine de ces deux institutions, personne ne veut les affaiblir. Je crois que personne ne proposera de les supprimer. Mais, à force de présenter l'armée et la diplomatie comme deux fardeaux écrasants pour le trésor public, on arriverait, sans le vouloir, à ébranler ces deux colonnes de la nationalité belge.

On parle quelquefois, pour combattre le budget de la guerre et le budget diplomatique, de notre neutralité. Avec la neutralité, à entendre certains optimistes, nous n'avons besoin ni d'armée, ni de diplomatie ; un corps consulaire suffit.

Mais il y a un pays beaucoup plus ancien que la Belgique, qui est neutre aussi. Ce pays, vous l'avez nommé avec moi, c'est la Suisse. Or, la Suisse est loin de traiter la diplomatie avec le sans-façon que quelques-uns d'entre nous y mettent ; la Suisse se garde bien de croire que, grâce à sa neutralité, elle peut congédier son armée et sa diplomatie ; la Suisse considère la diplomatie et l'armée, l'une comme son palladium extérieur, l'autre, comme son boulevard intérieur.

Et tout récemment, vous l'avez vu, quand la Suisse a été menacée par un puissant voisin, est-ce que sa neutralité l'a empêchée, et ce sera son éternel honneur, d'avoir mis 100,000 hommes sous les armes et d'avoir attendu vaillamment les attaques de ce voisin ? Qu'est-il arrivé ? Ce qui arrivera toujours en pareil cas ; car c'est une vérité profonde que cette maxime : Aide-toi ; le ciel t’aidera ; on est venu au secours de la Suisse ; la Suisse a obtenu tout ce qu'elle pouvait obtenir légitimement, et elle a grandi dans l'estime de l'Europe, par la noble attitude qu'elle a prise, par sa diplomatie et par le déploiement de ses forces matérielles.

Messieurs, pour parler maintenant d'un événement presque lilliputien à côté de ce que je viens de rappeler, pensez-vous que si nous n'avions pas eu un détachement de nos troupes à notre frontière du Midi en 1848, le pays n'eût pu être occupé, ne fût-ce que momentanément, par une bande de révolutionnaires ? Je n'ai pas oublié qu'à cette époque, notre armée, qui ne demandait pas mieux que d'être appelée à un engagement plus sérieux, a rempli noblement son devoir et qu'au lendemain de l'effort qu'elle avait fait pour préserver la Belgique de toute agression, pour faire respecter notre territoire, nous tous, nous n'avions pas assez d'éloges pour exalter nos troupes et le rôle qu'elles avaient joué !

Messieurs, je demande pardon à la Chambre de m'être trop arrêté peut-être dans ces considérations générales ; j'arrive à l'objet spécial du débat.

J'ai quelquefois entendu parler de l'avantage qu'il y aurait de substituer chez nous des chargés d'affaires à des ministres plénipotentiaires ; mais cette proposition, je dois le dire, je ne l'ai jamais vu appuyer sérieusement,

Et vous voudrez bien, remarquer, d'ailleurs, que cette manière de se faire représenter serait tout à fait impuissante, dérisoire dans certains pays où le pouvoir réside pour ainsi dire dans une seule personne, de laquelle les chargés d'affaires, d'après les usages diplomatiques, ne peuvent en général approcher.

Messieurs, au fond, personne en fait ne conteste l'utilité de la diplomatie, personne ne votera contre le budget des affaires étrangères ; mais si on accepte généralement comme une impérieuse nécessité le maintien de notre diplomatie, il faut élargir le cercle des personnes aptes à parcourir cette carrière difficile, qui aujourd'hui surtout exige de sérieuses, de vraies et profondes études, sous peine de restreindre le choix du gouvernement dans ce qu'on appelle l'aristocratie. Non que je porte la moindre envie à ce qu'on appelle chez nous l'aristocratie.

Si l'aristocratie offre des capacités hors ligne, je ne suis pas éloigné d'admettre qu'elle soit préférée pour les emplois diplomatiques ; je crois que de grands noms et de grandes fortunes s'harmonisent mieux qu'un nom plébéien avec les usages de la diplomatie européenne.

Mais ces aristocrates d'une capacité hors ligne, qu'on puisse comparer aux sommités de l'Angleterre, il faut les chercher et on ne les trouve pas facilement.

Encore une fois, il en est de la diplomatie comme de l'armée. N'en veut-on pas, qu'on la supprime ; sinon qu'on la paye convenablement. Qu'on réduise les postes, si on croit pouvoir le faire sans dommage pour le pays ; mais que du moins on rétribue ceux que l'on conserve, de manière à n'en pas faire le monopole de la fortune, ou à ne pas humilier devant l'étranger, par des habitudes ultra-puritaines qui les exposeraient au ridicule, sinon à l'impuissance, les titulaires des postes que l'on conserve.

Je le répète, sans un traitement assez élevé, on ne trouvera guère pour les fonctions diplomatiques que des hommes riches Personne, je le crois, parmi ceux-là mêmes qui préconisent le plus l'économie à cet égard, ne consentirait, s'il n'a les moyens et la résolution d'y mettre du sien, à accepter le titre de ministre auprès d'une grande cour.

On sait en effet que la partie purement administrative des fonctions du diplomate n'en est que l'accessoire. Ce qui en fait le caractère pratique et vraiment utile, ce sont les relations privées, les entretiens qu'elles amènent. Observer, recueillir, découvrir mille symptômes, mille incidents, et, grâce à cela, saisir la trace des éventualités qui se préparent, des conflits prêts à s'élever, des dangers dont ils nous menacent, des mesures à prendre pour les prévenir ou les écarter, voilà la vraie mission du diplomate.

Pour lui donc, la vie de bureau est l'exception, la vie de salon la règle. On peut trouver là un texte à épigrammes ; mais il est un peu usé, et n'est plus guère qu'à l'usage des journalistes ou des vaudevillistes attardés.

Ou peut s'étonner, se scandaliser même, d'un ordre de choses qui paraît se rapprocher des mœurs des anciennes cours ; mais il faut qu'un diplomate s’y résigne s'il ne veut dépenser inutilement les fonds que son gouvernement lui alloue.

Un particulier vit à peu près comme il veut ; il n'en est pas ainsi pour le fonctionnaire. Il y a des habitudes de société auxquelles celui-ci ne peut se dérober sans s'exposer à un ridicule qui retomberait toujours quelque peu sur son gouvernement.

Que, par exemple, un chef de mission décline les invitations de ses collègues, celles des ministres du gouvernement près duquel il est accrédité, échappera-t-il toujours à un peu de ridicule ?

Qu'il accepte de ses collègues (je demande pardon de ces détails) des gracieusetés sans les rendre, n'arrivera-t-il pas quelque chose de pis encore pour sa considération, pour son influence ?

Qu'il cherche à se soustraire à une invitation venue de plus haut ; qu'il s'excuse de ne pas se rendre, par exemple, à Compiègne, à Windsor, à Schönbrunn, à Potsdam, parce que le séjour dans ces résidences se concilie mal avec son budget ; croyez-vous qu'il servira toujours aussi bien que ses collègues les intérêts de sa cour ? Croyez-vous d'ailleurs qu'il paraîtra fort agréable à ce diplomate d'être ainsi l'objet des railleries, des épigrammes dont on est si prodigue dans le monde diplomatique ?

Pauvreté n'est pas vice, dit-on. Soit ; je le veux bien, mais c'est à une condition, c'est que la pauvreté reste modeste et ne cherche pas l'occasion de s'étaler. Trouverez-vous d'ailleurs beaucoup d'hommes disposés à braver ce qu'on a quelquefois déclaré être plus à craindre qu'un vice ?

Un fait se présente en ce moment à ma mémoire pour prouver à quel point des relations amicales entre nos agents diplomatiques et des personnages politiques avec lesquels ils n'ont que des rapports de société, peuvent servir nos intérêts.

On se rappelle la discussion qui eut lieu en 1856 à la chambre des communes, à propos du blâme si injustement infligé au gouvernement belge par le Congrès de Paris, à l'occasion de nos journaux.

L'un des plus illustres orateurs de l'Angleterre, M. Gladstone, dans la séance de la chambre des communes du 7 mai 1856, prit chaleureusement notre défense. L'honorable M. Whiteside lui prêta son appui. La précision qu'ils apportèrent dans l'exposé de notre législation, les armes qu'ils y puisèrent pour renverser l'acte d'accusation dressé contre nous en face de l'Europe, ne permettent pas de douter que notre habile ministre à Londres n'eût initié ces honorables membres aux détails de la législation belge et n'ait ajouté ainsi un nouveau service à ceux que nous lui devons déjà

Je suis heureux de trouver ici l'occasion de leur en témoigner à tous ma profonde gratitude.

Croit-on qu'on obtienne de pareils services autrement que par une (page 317) intimité que des relations sociales peuvent seules amener et entretenir ?

Messieurs, un gouvernement qui ne passe pas pour prodigue, le gouvernement des Etats-Unis, qui est protégé contre les agressions de l'Europe par l'Océan, par une marine militaire formidable, par une marine marchande qui en quelques semaines peut être transformée en marine militaire, les Etats-Unis se reposent-ils sur ces garanties pour licencier leur corps diplomatique ?

Ils ont des envoyés dans tous les pays de l'Europe ; ils ont une diplomatie qu'ils rétribuent modestement, mais d'une manière plus généreuse que nous.

Ainsi, les ministres plénipotentiaires américains n'ont que 45,000 fr de traitement ; mais la coutume américaine, à laquelle ressemble fort peu la coutume belge, est celle-ci :

On maintient ce chiffre de 45,000 francs au budget, mais, en réalité il se grossit assez notablement.

Voici comment :

Il est passé en usage que l'envoyé extraordinaire, ministre plénipotentiaire, reçoit pour frais de voyage 45 mille fr. (une année de son traitement).

Or, tous les trois ou quatre ans, si je suis bien informé, il change de résidence, et ces changements de résidence viennent indirectement compenser l'insuffisance du chiffre officiel.

Voilà comment la diplomatie américaine est payée par des républicains.

Du reste, il suffit d'être un gouvernement, fût-on au lendemain d'une révolution, pour comprendre les nécessités de position et d'influence que je viens d'indiquer. On a vu notre gouvernement provisoire les reconnaître dès son installation.

Certes, au lendemain de la révolution de février 1848, les tendances du pouvoir, remis aux mains du gouvernement provisoire de la France, n'étaient pas non plus à la prodigalité en matière de traitements. En ce qui concerne la diplomatie surtout, la république est d'ordinaire peu sympathique.

Or, dans le budget voté en France, en septembre 1848, les petits postes conservés, par exemple, Hanovre, Carlsruhe, Stuttgard, Cassel, varient de 25,000 à 35,000 fr.

Les grands postes varient de 60,000 à 150,000 francs.

Pour une république démocratique, cela n'est déjà pas si mal.

Aussi déjà dès lors, comme cela se voit partout et toujours, des républicains ultra-réformistes se lamentaient sur les résultats d'une révolution qu'il disaient avortée.

II y a partout de ces hommes honnêtes, naïfs, dépourvus d'expérience politique, étrangers à toute notion gouvernementale, qui tombent dans le découragement dès que les rêves candides de leur imagination tardent à se réaliser par leur parti, devenu gouvernement.

En voyant la République de février 1848 repousser le projet d'abolir le cautionnement des journaux ; en la voyant voter les fonds secrets, les subventions aux théâtres, accorder un palais et une grosse indemnité de représentation au président de l'assemblée nationale, maintenir un corps diplomatique nombreux, prononcer l'état de siège, suspendre des journaux, créer un impôt extraordinaire de 40 centimes, faire des procès politiques, beaucoup de démocrates de 1848 s'écriaient que la République trahissait les espérances de ses meilleurs amis.

Attaquant, au sein de l'assemblée, un illustre républicain de la veille, l'homme qui venait de sauver l'ordre et avec l'ordre la République, si elle pouvait être sauvée, ils s'écriaient, en parlant de son frère, à qui leur imagination accordait une confiance qu'il eût sans doute répudiée : « Nous restons avec Godefroid, nous ! »

De son côté, M. Ledru-Rollin qualifiait de banalités nuageuses le programme du ministère Cavaignac, alors que M. Decoux reprochait au gouvernement de l'illustre général d'être sur une pente fatale. (Voir séance du 16 octobre 1848.)

N'est-ce pas ainsi à peu près partout ?

L'expérience, messieurs, la pratique du pouvoir, la responsabilité surtout, voilà ce qui est indispensable à l'homme politique pour diriger sa marche ; voilà ce qui, seul, peut l'initier aux difficultés, aux devoirs du gouvernement et lui faire braver le blâme de ses amis de la veille.

On a très heureusemeut exprimé cette idée en disant qu'un jacobin ministre serait rarement un ministre jacobin.

M. Louis Blanc, dont l'autorité ne paraîtra point suspecte aux libéraux les plus avancés, exprimait à peu près les mêmes idées, après avoir pris part au gouvernement de son pays. « Il est, dit-il, des circonstances où un gouvernement qui ne sait pas résister au peuple trahit le peuple...

« Nous ne serions, ajoute-t-il, que de misérables charlatans, si, trop dociles aux acclamations de la place publique, nous descendions jamais à sacrifier au désir d'être populaires le devoir de servir le peuple selon la justice : gouverner, c'est se dévouer.»

J'adhère, quant à moi, à ces belles paroles, et j'ai toujours tâché d'y conformer ma conduite.

Que de fois n'a-t-on pas vu des hommes, entrés pour la première fois dans un parlement, s'imaginer qu'ils allaient se trouver en face d'une forêt d'abus ? Eclairés peu à peu par l'expérience des affaires, touchant du doigt les difficultés qu'ils n'avaient pas même soupçonnées, on les voit peu à peu se rapprocher de ceux-là mêmes qu'ils accusaient de prodigalité, de mollesse, d'indifférence, quelquefois de palinodie.

Qu'arrive-t-il, après quelques années de pratique parlementaire ? Qu'ils agissent à peu près comme ceux dont ils censuraient la conduite, quittes à recevoir, à leur tour, à peu près aussi les mêmes reproches, parce qu'ils n'essayent pas de bouleverser de fond en comble les rouages du gouvernement et de l'administration, alors qu'il suffit presque toujours d'en modifier l'esprit.

Il semble qu'il en est un peu des hommes parlementaires comme des vins les plus généreux. Si quelques années de bouteille améliorent et mûrissent les uns, quelques années de parlement améliorent et mûrissent les autres, leur enlevant ce qu'ils ont de trop capiteux et développant ainsi toute leur valeur.

Seulement, et moins que personne je dois l'oublier, il faut tâcher, quand on en est arrivé là, d’éviter un autre danger, penser quelquefois à l'heure de la retraite et ne pas attendre qu'un nouveau Gilblas vienne vous signifier que cette heure a sonné.

Je parlais tout à l'heure du budget des affaires étrangères adopté par le gouvernement de février 1848. Les chiffres en sont, il est vrai, inférieurs à ceux de la monarchie de juillet. Aussi, par une réaction naturelle, ont-ils été reportés, sous le nouvel empire, à des chiffres bien plus élevés que ceux d'avant février. Mais les chiffres mêmes de la nouvelle république étaient, ou l'a vu, bien supérieurs, pour des postes analogues, aux allocations qui figuraient au budget belge avant les réductions opérées en 1848.

La république se montrait donc bien plus large que notre monarchie dans la fixation du taux des traitements.

La France est un grand pays, dira-t-on. Nous modeler sur elle, c'est renouveler la fable de la Grenouille et du Bœuf.

L'apologue est peu de mise ici.

En admettant même une différence assez notable dans les dépenses résultant de l'état secondaire de la puissance représentée, il existe pour celle-ci des conditions matérielles auxquelles elle ne peut guère plus se soustraire que les grands Etats.

La cherté toujours croissante de la vie matérielle, dans la capitale où le diplomate d'un Etat secondaire est accrédité, ne pèse-t-elle pas sur lui comme sur le riche ambassadeur d'une grande cour ? Les fournisseurs de tout genre lui tiennent-ils compte, dans leurs factures, de sa qualité de représentant d'un Etat de second ou de troisième ordre ?

Ce n'est donc pas du pays d'où il vient qu'il faut se préoccuper ; c'est de celui où il réside. Tous ses certificats d'origine ne lui vaudront pas le moindre rabais, pas plus à Londres qu'à Vienne, à Paris, qu'à Saint-Pétersbourg.

Si donc je me résigne à voter l'augmentation de quelques traitements diplomatiques, c'est après avoir amélioré le sort de l'armée des fonctionnaires et employés inférieurs ; c'est ensuite parce que je reconnais l'absolue nécessité de ces augmentations, c'est, d'autre part, parce que le chiffre en est relativement minime et ne saurait affecter sensiblement notre situation financière.

Cette situation, après comme avant le vote de ce budget, commandera la sérieuse attention du cabinet ; car il serait peu sage de compter uniquement sur cette remarquable progression dans la fortune publique, sur cet accroissement des recettes, qui en est la conséquence, et dont nous sommes témoins.

Je vois figurer heureusement au banc ministériel des hommes dont le patriotisme n'a point failli devant deux des plus grands devoirs qui soient imposés à un gouvernement : assurer les services publics, procurer une bonne situation financière. « Faites-moi de bonne politique, disait un ministre célèbre à son collègue, je vous ferai de bonnes finances.» « Faites-moi de bonnes finances, lui répondit son interlocuteur, je vous ferai de bonne politique. »

C'est dans la conviction que le ministère actuel, qui a fait ses preuves à cet égard, professe toujours et saura au besoin pratiquer ces salutaires principes, que j'ai voté les budgets précédents et que je vote aujourd'hui celui de M. le ministre des affaires étrangères.

M. Julliot. - Messieurs, la question relative aux besoins de la diplomatie d'un pays est, par sa nature, une question d'Etat, qui peut le mieux être appréciée par le gouvernement lui-même.

Nous ne sommes pas à même de connaître le fort et le faible des questions internationales qui peuvent surgir autour de nous, et à ce point de vue nous devrions nous en rapporter à la prudence et à la perspicacité du gouvernement.

Seulement, nous pouvons émettre quelques principes qui sont vrais dans tous les lieux et tous les temps.

C'est ainsi que, pour ma part, je désire voir occuper notre diplomatie par des hommes qui joignent le prestige d'une brillante position à une haute capacité et à beaucoup d'habileté et je pense que sous le premier de ces rapports notre diplomatie laisse à désirer et qu'elle occupe en partie un rang trop effacé à côté de pays qui ne sont pas plus importants que le nôtre. Cela n'est contesté par personne et le gouvernement lui-même le confirme dans son exposé des motifs.

Il faut donc bien rétribuer nos diplomates ou ne choisir pour ces hautes fonctions que des hommes favorisés par la fortune.

Mais, exiger une diplomatie influente dans les cours étrangères, ne pas vouloir la payer comme les autres nations le font, ou ne pas en (page 318) exiger de fortune personnelle, sont trois idées qui hurlent ensemble, et que je ne puis mettre en paix dans mon esprit.

L'opinion démocratique, elle aussi, doit désirer une diplomatie influente, car elle tient à parler fort haut elle-même ; mais alors qu'elle refuse de la payer convenablement, elle devrait avant tout exiger de la fortune personnelle de la part de nos diplomates. Afin de compléter sa pensée, je lui demanderai si en voulant une diplomatie influente et ne voulant pas la payer, elle ne devrait pas, pour rentrer dans la logique, exiger cinquante mille francs de rente pour être ambassadeur, vingt-cinq mille francs pour être ministre résident et six mille francs pour devenir attaché d'ambassade, car il me semble qu'à cette condition seule elle pourrait atteindre le but qu'elle poursuit, à savoir de grands services et de petits payements.

Ce système d'ailleurs est appliqué au mariage des officiers de l'armée.

Sur ce terrain je pourrais la suivre peut-être, mais ne pas vouloir de gros traitements et ne pas exiger de fortune personnelle, c'est réduire nos missions à un rôle qui n'est pas digne de nous.

Un second principe que j'adopte en diplomatie comme en beaucoup d'autres choses, c'est que je préfère la qualité à la quantité. Je veux des ambassadeurs, des ministres et des consuls, partout où ils sont indispensables ; je n'en veux pas là où ils ne sont pas nécessaires.

Si, un jour, M. le ministre des affaires étrangères voulait déposer sur notre bureau les pièces officielles diplomatiques, qui nous sont venues, dans l'année, des missions de Turquie, de Portugal, du Danemark, du Brésil et de la Suède, je pense que ces cinq portefeuilles seraient assez minces pour me permettre sans me fatiguer le moins du monde, de faire une longue promenade avec toute cette diplomatie sous le bras.

Messieurs, d'après ces principes, vous êtes en droit de supposer que je vais voter tous les suppléments pétitionnés.

Eh bien, je me trouve fatalement arrêté devant la conclusion naturelle de ces principes.

Toutes les dépenses publiques sont en corrélation entre elles devant le trésor de l'Etat. J'approuve que l'Etat paye les dettes qu'il croit avoir envers la diplomatie, à condition qu'il traite tous ses créanciers par le même procédé. Or, c'est ce qu'il ne fait pas, car, par la loi du 20 décembre 1851, l'Etat belge a contracté envers la ville que je représente plus spécialement, une dette qu'il ne paye pas ; aucun ministère ne s'en est occupé, c'est devenu sa dette différée de la Belgique.

En présence de ce traitement exceptionnel, je dois prendre une position exceptionnelle ; aux grands maux, les grands remèdes.

Je me décide donc à voter systématiquement contre toute augmentation de dépense comme contre toute diminution de recette, afin de mettre le trésor à même de faire honneur à ses affaires et de payer ses vieilles dettes avant d'en contracter de nouvelles, et on pourra escompter d'avance mon vote sur toutes les propositions de cette nature pendant toute la session. Cette position est justifiée, elle est franche et commode et je la prends.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Messieurs, je ne m'attendais pas à voir un ancien ministre des affaires étrangères donner hier, en quelque sorte, le signal de l'opposition qui s'est manifestée dans la Chambre contre les faibles augmentations que le gouvernement propose au budget des relations extérieures ; mais j'ai été plus étonné encore quand j'ai vu l'honorable comte de Muelenaere ne tenir aucun compte des considérations élevées sur lesquelles est basé le budget des affaires étrangères en tant que budget politique, et fonder son opposition sur des motifs entièrement étrangers à ce budget.

C'est parce que les secrétaires communaux n'ont pas encore le traitement qu'ils méritent, et parce qu'il est question, au dire de l'honorable comte de Muelenaere, de frapper d'un droit de patente les écoles dentellières de toute espèce que l'honorable membre s'oppose aux modestes augmentations de chiffre que je propose.

Messieurs, les secrétaires communaux sont, je le sais, dans certaines circonstances, des personnages beaucoup plus importants que des ministres à l'étranger.

Je tiens compte moi aussi du sort des secrétaires communaux, et j'en ai tenu compte à une époque où l'on ne pouvait douter que je le fisse d'une manière tout à fait désintéressée.

Lorsque j'avais l'honneur d'occuper les fonctions de gouverneur de la Flandre occidentale, je me suis constamment occupé du sort de ces fonctionnaires, et j'ai fait finalement un travail basé sur la population des communes par suite duquel j'ai fait augmenter le traitement de presque tons les secrétaires communaux

L'honorable M. de Muelenaere, qui m'a précédé dans ce gouvernement et l'a occupé pendant dix-huit ans, n'a pas fait, que je sache, quelque chose de semblable.

L'honorable M. Coomans, aussi, vous disait hier que c'était par égard pour les fonctionnaires inférieurs, qu'il voterait contre les crédits demandés par le gouvernement

Mais n'a-t-il donc rien été fait pour les fonctionnaires inférieurs ?

Les budgets ont été augmentés d'une somme annuelle de 1,500,000 francs, en faveur de cette classe d'employés, et la Chambre a voté 400,000 francs d'augmentation, pour améliorer le sort des instituteurs communaux.

N'est-ce donc rien qu'une somme d'environ deux millions d'augmentation, consacrée à améliorer la position des petits fonctionnaires ? L'honorable M. Coomans nous dit : Vous vous êtes engagés à n'augmenter en rien les traitements des fonctionnaires supérieurs, aussi longtemps que les traitements des petits fonctionnaires ne seront pas augmentés. Où donc est écrit cet engagement ? Je ne l'ai trouvé nulle part. Mais quand ce serait, faudra-t-il attendre, pour rendre justice, pour faire ce que les nécessités du service réclament envers les fonctionnaires supérieurs, que les traitements des petits fonctionnaires soient élevés à quel taux ? Je n'en sais rien. L'honorable M. Coomans voudra-t-il bien me dire quelle sera la limite à laquelle il sera permis au gouvernement de songer à faire ce que l'intérêt de l'Etat lui commande à l'égard de certains fonctionnaires supérieurs ?

Mais j'accepte la thèse de l'honorable M. Coomans ; eh bien, messieurs, je dirai, puisqu'il s'agit de songer à ceux qui ont besoin, que les agents diplomatiques sont de tous nos fonctionnaires les plus pauvres, de tous nos fonctionnaires ceux qui sont dans la position la plus pénible ; et si je ne craignais de faire descendre ce débat jusqu'à des détails mesquins, indignes du pays, je prouverais pièces en main qu'il n'y a pas un seul de nos agents diplomatiques qui puisse exister (notez bien : exister ; mais quand je dis exister, je dis exister d'une manière honorable) s'il n'a pas de fortune personnelle, avec le traitement que lui fait l'Etat.

Il est vrai que l'honorable comte de Muelenaere daigne faire une concession à nos agents diplomatiques, tout en disant qu'ils ont amplement de quoi vivre.

M. de Muelenaere. - Je n'ai pas dit cela.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Le Moniteur malheureusement n'a pas donné votre discours, mais cela se trouve dans un journal qui reproduit ordinairement avec beaucoup de soin nos débats.

J'ai lu que M. le comte de Muelenaere avait dit que tout en reconnaissant qu'ils n'ont pas tout ce qu'ils méritent, ils avaient amplement de quoi vivre.

M. de Muelenaere. - Ce ne sont pas là mes paroles.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Vous avez parlé de vivre.

M. de Muelenaere. - Non, pas du tout.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Soit, je passe outre.

Que l'honorable comte de Muelenaere ait parlé de vivre, ou n'en ait point parlé, je dis qu'il n'y a que deux manières de vivre pour un diplomate comme pour tout le monde, c'est une manière honorable et une qui ne l'est pas.

Vous savez, messieurs, que les traitements diplomatiques ont été fixés dès les premiers jours de notre indépendance nationale. Le premier budget normal, celui qui devait servir de type aux budgets futurs, a été volé en 1832. Je ne crois pas, messieurs, que personne soutienne que le gouvernement et la législature de cette époque fussent prodigues des, deniers publics ; si l'on veut bien se rappeler dans quelle situation se trouvait la Belgique à cette époque, sortant d'une révolution, avec une situation financière des plus pénibles, en proie encore à des complications de tous genres, n'ayant certainement pas un enthousiasme bien vif pour la diplomatie au lendemain d'événements populaires où les airs de faste et de luxe, les airs aristocratiques, pour employer le mot dont se servait hier un honorable membre, n'étaient guère en faveur, à une époque où le désir et le besoin d'économies était tel, que l'on réduisait tous les traitements à l'intérieur.

Eh bien, messieurs, quels sont donc les traitements que le gouvernement est venu proposer à la Chambre ? En voici quelques-uns : On demandait :

Pour la Grande-Bretagne, fr. 89,947

Pour la Prusse, fr. 46,560

Pour l'Autriche, (à titre provisoire parce qu'il ne s'y trouvait alors qu'un agent d'un grade secondaire), fr. 33,362

Pour les Etats-Unis. 29,629

Voilà messieurs, les chiffres que demandait le gouvernement, à une époque je le répète, où l'on était loin d'être prodigue des deniers publies à une époque où l'on n'était pas moins soucieux qu'aujourd'hui des besoins du trésor, des intérêts des contribuables. Et comment, messieurs, le gouvernement d'alors justifiait-il cette demande ? Je vais vous le dire ; les termes valent la peine d'être reproduits.

« Messieurs, la section centrale propose de fortes réductions sur les traitements des agents diplomatiques. » (Je dois dire en passant, messieurs que ces fortes réductions proposées par la section centrale ont été adoptées ; mais que les traitements sont restés néanmoins infiniment supérieurs dans leur ensemble, et en particulier pour les grandes légations, à ceux que nous avons l'honneur de vous proposer). « Je conviens que quelques-uns de ces traitements sont disproportionnés avec les traitements de nos fonctionnaires à l'intérieur, et qu'au premier abord ils peuvent paraître exorbitants à ceux qui n'ont pas l'habitude de vivre à l'étranger, et qui ne connaissent pas les dépenses forcées auxquelles sont soumis les agents diplomatiques. La section centrale pense qu'il est nécessaire de bannir de notre diplomatie un luxe trop onéreux à la nation, et qui ne sied qu'aux grandes puissances. Je partage cette opinion, aussi le gouvernement ne vous propose-t-il pas, à l’instar des grandes puissances, des traitements de 250,000 et de 300,000 francs : il renonce même entièrement aux agents (page 319) diplomatiques du premier ordre, et il ne vous propose d'allouer à ses ministres qu'un traitement inférieur à celui de toutes les autres puissances. Sans doute, l'économie est désirable, et j'en suis aussi sincèrement partisan que les membres de la section centrale ; mais, de deux choses l'une : ou vous devez renoncer aux agents diplomatiques, ou vous devez les mettre à même de vous rendre les services que vous exigez d'eux.

« Si vous avez des agents diplomatiques qui, par leur position, sont hors d'état de se concilier l'influence et la considération dont ils ont besoin pour remplir leur haute mission, la somme que vous allouerez de ce chef est une dépense entièrement perdue, sans aucune utilité pour le pays. Mais, dit la section centrale, la Belgique ne formera plus qu'un Etat du troisième ordre. Ce n'est pas là que gît la difficulté, et le véritable point de la question me semble ne pas avoir été touché par la section centrale. Ce qu'il importe surtout d'apprécier, ce sont les rapports sous lesquels la Belgique a besoin de la diplomatie, et, dans cet examen entre la situation d'un Etat, son voisinage, sa base et son mode d'existence, ses nécessités et ses conditions de bien-être, ses moyens et ses garanties d'indépendance.

« Lorsqu'une nation placée au milieu des grandes puissances de l'Europe occupe un territoire, qui fut toujours pour celle-ci un objet de convoitise, après avoir été souvent une cause de guerre ; lorsque cette nation ne peut exister qu'en se ménageant l'appui des unes contre les autres, et en obtenant de toutes des avantages matériels, sans rompre avec aucune ; lorsque son indépendance et sa prospérité, dépendent de la manière dont ses relations de confiance et d'amitié sont entretenues avec les plus puissants de ses voisins, vous conviendrez, messieurs, que l'activité de ses agents doit l'instruire, en temps utile, de tout ce qui l'intéresse et la menace. Je ne comprends donc pas qu'il puisse paraître rationnel de réduire la diplomatie au-dessous de son utilité réelle et même de sa nécessité, concession de commerce, secours de leurs armes, appui de leur médiation, protection et faveur dans les traités, nous avons beaucoup à demander à nos voisins, et nous pourrions avoir beaucoup à craindre d'eux. »

Voilà, messieurs, comment le gouvernement justifiait, en 1832, les chiffres qu'il demandait à la législature pour les traitements des membres du corps diplomatique. Et savez-vous, messieurs, quel était l'orateur qui s'exprimait dans des termes qui justifient si complétement les propositions que je défends devant vous ? Cet orateur était l'honorable comte de Muelenaere. L'honorable comte de Muelenaere était alors ministre des affaires étrangères ; il était alors homme d'Etat ; aujourd'hui, je regrette de le dire, l'homme d'Etat, l'homme gouvernemental s'est effacé.

Messieurs, les considérations qui en 1832 et pendant les années suivantes dirigeaient le gouvernement, ont fait que de tout temps et dans tous les pays on a jugé nécessaire d'avoir une diplomatie, sinon fastueuse, au moins convenablement rétribuée ; or, ce que tous les autres pays ont fait, ce que l'expérience politique leur a fait juger nécessaire, indispensable, croyez-vous qu'ils l'aient fait à la légère ? Croyez-vous que nous ayons le monopole de l'économie ? Croyez-vous que nous soyons seuls à devoir nous préoccuper d'une bonne situation des finances publiques ? Croyez-vous enfin que nous soyons le seul pays où il y ait à améliorer le sort des fonctionnaires de l'intérieur, à relever les traitements de certains employés mal rétribués ? Non, messieurs, nous n'avons pas seuls ce louable souci des intérêts de tous. Ce qui a existé de tout temps, depuis des siècles, chez toutes les nations a donc sa raison d'être ; et cette raison quelle est-elle ?

Cette raison, messieurs, disons-le nettement, cette raison, c'est la nature humaine. Il faut bien le reconnaître, en dépit des puritains qui se créent un monde imaginaire où la vertu seule a de l'empire, où le talent seul a de la puissance, l'homme en masse est enclin à n'attribuer à celui qui se trouve dans une haute position, à celui qui à l'honneur de représenter son pays, une grande considération, et toute l'influence dont il est désirable qu'il jouisse, que pour autant que sa vie extérieure, que la figure qu'il fait, soient en rapport avec la mission qu'il remplit, avec la position élevée dont il est revêtu. C'est là une vérité pratique, une vérité qu'ont expérimentée tous ceux qui ont vécu à l'extérieur. Et ici je parle des pays en général. Que serait-ce, si je parlais de ceux où la considération accordée à l'homme se mesure sur le faste qu'il déploie, où l'agent étranger qui n'est pas logé d'une certaine manière n'est pas même honoré de la visite des hauts fonctionnaires de l'Etat.

Je suis loin, messieurs, de nier la force et l'empire du talent. Le talent est une force, une force réelle, une force qu'on honore dans tous les pays civilisés, mais c'est une force le plus souvent insuffisante, quand elle n'a pas pour auxiliaire la ressource de la fortune

L'honorable M. Vandenpeereboom nous a rappelé que nous sommes un petit pays. Mon Dieu ! oui, messieurs, nous sommes un petit pays, mais en résulte-t-il que nous soyons dispensés de certaines obligations que les usages et les mœurs réclament de tout agent diplomatique quel que soit l'importance du pays qu'il représente ? J'espère ne pas manquer à la dignité de la Chambre en lui contant une anecdote que me rappellent ces mots de petit pays.

II y avait, messieurs, un ministre de Naples à Londres ; cet envoyé était parti avec l'idée qu'il était suffisamment rétribué ; mais au bout de quelque temps, il écrivait à son ministre des affaires étrangères pour l'informer qu'avec le traitement qui lui était fait, il était dans l'impossibilité de vivre, attendu que son loyer seul absorbait la moitié de ses appointements. Son chef lui répondit par ces mots. « M. le ministre, ayez la bonté de voir quelle petite place occupe sur la carte de l'Europe notre royaume. » Savez-vous quelle fut la réponse ? L'envoyé répondit à son chef : « J'ai l'honneur d'informer Votre Excellence que j'ai fait venir mon propriétaire, je lui ai exhibé la carte de l'Europe, je lui ai fait voir quelle petite place y occupait notre pays ; mais je regrette de devoir faire connaître à Votre Excellence, qu'il n'a été nullement sensible à l'argument. »

Nous sommes petits, messieurs, mais nous ne sommes pas seuls petits, nous sommes petits par l'étendue du territoire ; nous sommes petits par le nombre ; mais nous sommes grands par la richesse, nous sommes grands par l'industrie, nous sommes grands par le commerce, nous sommes grands par les arts, nous sommes grands par toutes les richesses qui constituent la civilisation.

Eh bien, ces richesses morales et matérielles auxquelles nous tenons tant, à quoi les devons-nous ? Nous les devons eu grande partie à notre indépendance, nous les devons aussi en grande partie, à ces institutions généreuses, à ces institutions si fécondes que nous avons pu créer nous-mêmes, et que nous développons librement.

Tout cela ne vaut-il pas la peine d'être préservé ? n'avons-nous pas le devoir de veiller d'un œil vigilant sur tous ces trésors ?

Ne devons-nous pas en soigner la conservation, avec une sollicitude égale à l'amour que nous leur portons ?

Voilà pourquoi, messieurs, nous sommes intéressés, comme tout le monde, à la conservation de ces grands principes de droit public sur lesquels est fondée notre sécurité.

Voilà pourquoi nous devons veiller sans relâche à écarter les dangers et jusqu'aux indices qui pourraient menacer nos droits et nos intérêts ; et voilà pourquoi nous devons avoir une diplomatie, non pas fastueuse, mais une diplomatie forte et convenablement posée, une diplomatie honorée, une diplomatie qui puisse se produire et étaler partout honorablement le drapeau de la Belgique.

Nous devons être modestes, a dit aussi l'honorable M. Vandenpeereboom. Sans doute, messieurs, nous devons être modestes, mais nous ne devons pas être modestes au point d'être ineptes, nous ne devons pas être modestes au point de faire pitié.

L'honorable M. Vandenpeereboom reconnaîtra, j'en suis sûr, que tout modestes que nous devions être, notre diplomatie a, comme toutes les diplomaties, des devoirs à remplir. Ne reconnaîtra-t-il pas aussi qu'un diplomate, à quelque pays qu'il appartienne, puise une grande partie de son action et de sa force dans les relations sociales qu'il entretient avec ceux qui occupent le pouvoir ou qui, par leur position, exercent une certaine influence sur les résolutions des cabinets ? Or comment entretenir ces relations, comment vivre dans ces régions de la politique, dans ces cercles élevés, où souvent naissent et se discutent les idées qui amènent les faits et les événements politiques, lorsque vous n'accordez pas à vos agents les moyens de se produire, lorsque vous les condamnez, par une économie exagérée, à une espèce d'isolement ?

Et ce n'est pas seulement en matière politique qu'il est indispensable, messieurs, de donner aux agents diplomatiques les moyens d'entretenir des rapports nombreux ; cela est souvent bien autrement important au point de vue des affaires commerciales. N'est-il pas vrai que dans beaucoup de pays il se trouve en vigueur des systèmes contraires à celui que nous voudrions voir prévaloir ? Ces systèmes, souvent, s'appuient sur des intérêts puissants, sur des préjugés tenaces, sur une ignorance de fait.

Eh bien, messieurs, n'y a-t-il point intérêt à ce que les agents politiques puissent par des relations intimes, nombreuses, travailler à détruire ces erreurs, à éclairer ces intérêts lorsqu'ils sont contraires aux nôtres, et pour cela ne faut-il pas qu'ils puissent s'adresser à tout ce que l'administration, le commerce, l'industrie comptent de notabilités en position d'exercer quelque influence sur les mesures à prendre ?

Ne croyez pas, messieurs, et ceci répond à une observation faite par l'honorable M. Julliot, qui demande la suppression de quelques légations, sous prétexte que leur bagage diplomatique serait fort léger, que ce soit toujours sur les lieux mêmes où l'on veut agir, que la diplomatie parvient à produire son action ; c'est souvent de loin que l'on agit et souvent de plusieurs côtés à la fois.

Le rôle de la diplomatie, c'est de rechercher et de discerner partout les intérêts qui peuvent s'identifier, se fondre et se servir mutuellement

Messieurs, un homme d'Etat anglais, avec une franchise un peu vive, disait un jour en plein parlement que le meilleur diplomate était celui qui donne les meilleurs dîners.

J'aime mieux une autre définition qui, je crois, appartient à un ancien membre de notre assemblée ; j'aime mieux dire que la diplomatie c'est l'art de se créer des influences, et j'ajouterai qu'il est impossible à un étranger, de quelque rang qu'il soit revêtu, quelque titre qu'il porte, à quelque Etat qu'il appartienne, de se créer des influences s'il n'est pas en mesure de voir beaucoup de monde, de connaître beaucoup de personnes, d'avoir de nombreuses et d'utiles relations.

Que l'honorable M. Vandenpeereboom me permette de lui dire qu'il me serait impossible de croire qu'il ne soit pas disposé à me beaucoup concéder en cette matière ; je ne pourrai jamais admettre que l'honorable membre puisse nier que pour tout homme placé dans une position plus ou moins élevée, il y a des devoirs de convenance à remplir.

(page 320) Mon honorable contradicteur qui est lui-même dans sa vie extérieure un modèle de ces convenances n'est certainement pas de ceux qui pensent que celui qui est revêtu du titre de ministre et qui a l'honneur de représenter son pays, puisse se loger à cinquante francs par mois et aller dîner au cabaret.

Que l'honorable M. Vandenpeereboom se rassure d'ailleurs ; il a fait observer qu'il serait fort peu utile au pays que l'augmentation proposée permît à nos diplomates d'avoir un équipage de plus ; je lui dirai nettement qu'il n'est pas un seul de nos chefs de légation, s'il n'a pas une fortune personnelle, qui puisse aujourd'hui se donner le luxe d'un équipage, et qui pourra se donner cet agrément même avec l'augmentation que nous proposons.

J'ai eu sous les yeux des chiffres qui me permettent d'affirmer cela très positivement.

Messieurs, à l'époque où l'on a fixé pour la première fois les traitements diplomatiques, le gouvernement s'est naturellement entouré de tous les renseignements possibles, et l'un des éléments d'appréciation sur lesquels il a dû se fonder était nécessairement le chiffre des traitements des envoyés des autres puissances.

A cette époque, on a pris particulièrement pour guide les traitements diplomatiques alloués dans un pays voisin qui se trouvait alors en butte aux mêmes embarras, aux mêmes complications politiques que nous, et qui, sous beaucoup d'autres rapports, pouvait nous être, comparé.

Lorsque en 1849 nous avons opéré des réductions sur nos fonctionnaires à l'extérieur, ce gouvernement, à son tour, s'est modelé sur la Belgique. Qu'en est-il arrivé ? C'est que trois postes diplomatiques étant devenus vacants à la fois par suite de décès, ce gouvernement s'est trouvé dans l'impossibilité de les remplir, faute de personnel. Il a fallu qu'il attendît que de jeunes attachés qui n'étaient pas en position d'être chefs de légation, eussent acquis l'expérience nécessaire pour qu'on pût décemment leur confier un de ces postes.

Eh bien, dans ce pays où il y a par conséquent des chances d'avancement très rapides ; dans ce pays où de plus l'attaché, dès le jour de sa nomination, reçoit une indemnité annuelle de 2,000 fr., il s'est présenté seulement deux aspirants aux derniers examens : je ne dis pas que nous soyons menacés de la même disette, mais ce que je puis affirmer, et j'appelle sur ce point l'attention très sérieuse de la Chambre, c'est qu'il est positivement interdit, ainsi que l'a dit tout à l'heure l'honorable M. Lebeau, à tout jeune homme qui n'est pas riche, d'entrer dans la carrière diplomatique en Belgique.

Or, je dis que c'est un malheur ; et j'ajoute que lorsqu'il se trouve des taches pareilles dans nos institutions dont nous vantons sous d'autres rapports avec raison l'esprit démocratique, notre devoir à tous est de chercher à la faire disparaître.

Lors de la discussion du budget des affaires étrangères pour l'exercice 1854, un orateur éminent de la Chambre, parlant au nom du gouvernement, signalait dans ces termes les inconvénients que je viens de citer et qu'il entrevoyait alors :

« Le gouvernement représentatif, disait-il, est le gouvernement des capacités ; pour que les hautes positions sociales soient accessibles à l'homme qui n'a que du mérite personnel, il faut que le gouvernement ajoute aux talents qu'il lui offre les moyens pécuniaires qui lui manquent. Si vous refusez ces moyens à cet homme, vous créez un privilège en faveur de la fortune, vous déclarez admissibles à certains emplois ceux-là seulement qui sont riches, vous faites de l'aristocratie. Le talent est une puissance, la fortune est une puissance aussi, l'un et l'autre pris isolément ont des influences incomplètes ; associez-les et vous aurez ce qui donne une véritable action sur la société. »

Ce sont là, messieurs, des paroles d'un grand sens et qu'on a trop perdues de vue. Or, cette situation, on veut aujourd'hui l'aggraver, en refusant au gouvernement les chiffres qu'il reconnaît indispensables pour que la carrière diplomatique puisse au moins, jusqu'à un certain degré, rester accessible à ceux qui ne jouissent pas d'une fortune considérable.

On a nié, messieurs, que les traitements diplomatiques aient été diminués en 1849, autrement qu'à titre temporaire, et à raison de la situation grave et exceptionnelle dans laquelle nous nous trouvions à cette époque.

Messieurs, j'ai compulsé les Annales parlementaires du temps.

Or, j'y ai trouvé que le gouvernement, à deux reprises différentes, a fait la réserve la plus expresse de l'intention où il était de ne faire de ces réductions qu'une mesure temporaire. Voici les termes dans lesquels l'honorable M. d'Hoffschmidt, alors ministre des affaires étrangères... (interruption) ; voici ses paroles qu'il n'a pas gardées dans son for intérieur, comme l'a dit hier l'honorable M. Coomans....

M. Coomans. - Je l'avais déjà entendu de la bouche de M. le ministre des finances.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'en suis charmé ; ce n'est pas trop qu'on vous le dise deux fois pour répondre à ce que vous avez prétendu hier.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il paraît que vous avez mieux entendu cela que ce qu'a dit l'honorable M. d'Hoffschmidt en 1849.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Voici donc les paroles de l'honorable M. d'Hoffschmidt :

« Nos propositions sont du reste la conséquence de la crise que nous subissons, et à cet égard je n'ai pas besoin de répéter la réserve que j'ai faite dans mon premier discours et qui consiste à dite que dès que la crise aura disparu, le gouvernement sera disposé à faire des propositions à la Chambre, tendantes, soit à rétablir les anciens traitements, soit du moins à élever les traitements de nos agents les plus importants. »

Aussi, messieurs, dès 1852, le gouvernement a rappelé « qu'il n'était jamais entré dans ses intentions de prendre pour base des traitements définitifs le budget de 1849. » Ce sont encore là des paroles textuelles que je cite.

On aurait pu, avec justice et avec raison, revenir à cette époque aux traitements de 1848, et si on ne l'a pas fait, c'est par une extrême réserve, par une réserve que j'ai subie moi-même quand je suis venu vous proposer des augmentations dont on a dit que c'était trop ou trop peu.

Et en effet, messieurs, non seulement le ministre des affaires étrangères de l'époque a fait cette réserve formelle, mais la Chambre a adopté la réserve.

II ne s'est élevé qu'une voix pour protester, une seule, et par contre, plusieurs orateurs ont déclaré qu'ils n'acceptaient pas les réductions faites même en ces termes ; il s'en est trouvé qui ont appelé ces réductions des économies désastreuses ; on a été jusqu'à dire que c'était une désorganisation. C'est dans ces termes qu'ont parlé MM. de Liedekerke, de Pouhon, Lebeau et d'autres encore.

Je le répète, la réserve a été formelle et elle a été acceptée par la Chambre.

On a dit encore que la Belgique étant un Etat secondaire ne devait pas avoir une diplomatie salariée comme celle des grandes puissances. Nous n'avons pas, messieurs, péché de ce côté ; ni nous, ni nos prédécesseurs, n'avons jamais prétendu élever le traitement des membres de notre corps diplomatique au taux de celui des agents des puissances de premier rang ; les chiffres proposés en 1853 et 1854 aussi bien que ceux de 1852 et ceux que nous avons l'honneur de soumettre actuellement à l'approbation de la Chambre sont loin d'être aussi ambitieux. Nous n'avons jamais eu d'autre prétention que de nous rapprocher autant que possible, par le taux de nos traitements, de celui des puissances secondaires, et nous sommes constamment, et jusqu'à l'heure qu'il est, restés au-dessous d'elles sous ce rapport.

Je vais le prouver : voici les traitements que payent quelques puissances qu'on voudra bien reconnaître n'être pas des grandes puissances, ni des puissances plus importantes que la Belgique. A Vienne le Danemark paye 44 mille fr. plus 15 mille fr. de frais de premier établissement ; la Sardaigne paye 55 mille fr. plus 20 mille francs de premier établissement ; la Suède paye 66 mille fr. plus 24 mille fr. de frais de premier établissement ; le Brésil paye 44 mille fr. plus 22 mille fr. de premier établissement, les Etats-Romains 64,550 fr. plus 16,140 fr. de frais de premier établissement. Nous payerons, nous, 58,000 fr.

A Paris, la Grèce accorde à son ministre 61,500 fr. ; les Pays-Bas, 44,440 fr. ; le Portugal, 44,000 fr., plus 22,100 fr. de frais de premier établissement ; la Sardaigne 60,000, plus 20,000 d'indemnité ; la Suède, 96,000, plus 36,000 de frais d'établissement ; Rome, 64,560, plus 16,140 de frais d'établissement. Nous donnerons, nous, 41,000 fr.

A Londres nous demandons pour notre ministre 55,000 ; les Pays-Bas accordent fr. 63,300, le Portugal fr. 98,000, plus 31,600 de frais de premier établissement ; le Danemark 71,000, plus 15,000 fr. ; la Suède 96,000, plus 36,000 ; la Sardaigne 66,000, plus 30,000.

A Berlin le traitement de notre ministre sera de 55,000 fr., le traitement le plus faible parmi les puissances que je viens de nommer, est de 42,000 fr. sans compter de fortes indemnités pour le premier établissement.

A Pétersbourg, les traitements des agents de puissances secondaires à part celui du ministre des Pays-Bas, qui n'a que 2,000 fr. de plus que le ministre belge en tenant compte de l'augmentation proposée, sont de 10,000 à 30,000 fr. plus élevés que celui que nous allouons.

Je pourrais ainsi, messieurs, prendre tour à tour toutes les résidences ; la Chambre verrait que partout, invariablement partout, le ministre belge est moins bien payé que ses collègues des pays du même rang.

Voilà la preuve, je pense, que nous n'avons jamais demandé et que nous ne demandons pas encore des chiffres exagérés. Si nous avions voulu, comme on l'a dit, nous placer follement à la hauteur des grandes puissances par le luxe de notre diplomatie, savez-vous, messieurs, ce qui serait arrivé ? Prenons Madrid, c'est la première résidence qui me tombe sous la main ; nous payons, à notre représentant à Madrid, le septième des appointements de l'ambassadeur français, le septième des appointements du ministre anglais, le cinquième des appointements du ministre d'Autriche. A Vienne, la différence entre le traitement de notre agent et celui de l'Angleterre est de 1 à 5 environ, avec celui de la France, cette différence est à peu près de 1 à 6.

Voilà, messieurs, dans quelle proportion les chiffres pétitionnes par le gouvernement sont avec les traitements des agents des grandes puissances.,

En compulsant les divers documents que j'ai recueillis, il m’est tombé sous la main les chiffres des appointements des agents des diverses classes résidant à Constantinople, savez-vous ce que j'ai remarqué ? C'est que l'agent belge à Constantinople, si l'on tient compte des émoluments, est payé comme un drogman grec, comme un chancelier hollandais, comme un consul sarde, comme un attaché d'Angleterre.

(page 321) Vous voyez, messieurs, qu'en vous demandant de légères augmentations qui ne sont que la compensation des prix d'aujourd'hui avec les prix d'autrefois, nous ne réclamons pas de la Chambre des actes du munificence ; nous demandons une simple réparation ; nous demandons une indemnité pour des sacrifices toujours croissants. Si vous songez que les chiffres actuels, même en y ajoutant l'augmentation demandée, restent, pour les missions les plus importantes au-dessous des chiffres des traitements fixés il y a vingt-cinq ans, si vous songez qu'à cette époque ceux-ci ont été demandés par le gouvernement et accordés par la Chambre, avec la conviction qu'on n'allouait que le nécessaire pour assurer une position convenable à nos agents, n'est-il pas raisonnable de dire que ces chiffres, amoindris qu'ils sont, malgré l'augmentation proposée, ne peuvent être taxés d'exagération, aujourd'hui que le prix de toutes choses, des loyers surtout, a augmenté d'une manière effrayante dans toutes les capitales ?

Voulez-vous des exemples ? Mais nous en avons sous les yeux. N'est-il pas vrai qu'à Bruxelles telle maison qui se louait à peine 5 mille francs il y a 25 ans, se loue aujourd'hui 15 mille francs ? et Bruxelles est une ville ouverte où l'on peut conquérir indéfiniment du terrain sur le voisinage et où l'on en conquiert constamment.

Or, remarquez que la plupart des capitales d'Europe ne sont pas dans ce cas, que beaucoup sont bornées par la mer, par des montagnes, par des rivières ou bien sont étouffées dans une ceinture de fortifications. C'est ce qui fait que, dans quelques-unes de ces villes, les loyers sont à des prix fabuleux. Un de nos principaux agents et en même temps un des hommes les plus distingués de notre corps diplomatique paye, voulez-vous savoir combien, pour un second étage ? Il paye 15,000 francs. Savez-vous ce que paye un autre agent dont le traitement sera de 35,000 fr. ? Dix mille francs, presque le tiers de son traitement ! Et croyez-vous que je vous cite ici des choses extraordinaires ? Non, messieurs, je prends les situations les plus normales.

Ainsi, voulez-vous connaître, par exemple, ce que coûtent certains loyers à Saint-Pétersbourg ? L'ambassade de France paye pour son loyer 60,000 francs ! L'ambassade d'Angleterre 52,000 fr. Viennent après cela des légations de second ordre, l'Espagne, la Suède, la Prusse et quelques autres dont les loyers varient entre 20,000, 27,000 et 30,000 fr.

Or, je vous le demande, messieurs, des agents qui sont soumis à de pareilles obligations peuvent-ils être comparés aux fonctionnaires de l'intérieur quand il s'agit de régler leurs traitements ? Sont-ce là, d'ailleurs, les seules obligations coûteuses, auxquelles ils sont assujettis ? Je le répète, je ne puis pas entrer dans des détails qui seraient au-dessous de la dignité de la Chambre comme aussi au-dessous de la dignité des hommes honorables qui composent notre corps diplomatique ; mais si je pouvais entrer dans ces détails, je n'aurais point de peine à vous prouver que de tous les fonctionnaires, ils sont le moins bien partagés.

L'envoyé d'un gouvernement est, auprès des habitants d'un pays, le représentant de toute sa nation. Si vous ne donnez pas à votre envoyé les moyens de tenir un certain rang, vous humiliez la nation dans sa personne, outre que vous commettez une injustice, en lui refusant ce qui est nécessaire, pour qu'il jouisse de la même considération que s'il occupait des fonctions du même rang, dans le service intérieur. Il y a donc là, tout à la fois, messieurs, une question de dignité et une question d'équité, qu'il ne faut pas perdre de vue ; il ne faut pas, en définitive, ne voir en toutes choses que le côté strictement utile ; les nations comme les particuliers ont leur vie extérieure, elles ont des convenances à garder, des obligations à remplir.

On a parlé des consuls. Mais, messieurs, le gouvernement ne montre-t-il donc pas toute la sollicitude possible pour ce corps respectable ? N'en a-t-il pas donné des preuves constantes, et n'a-t-il pas souvent appelé l'attention de cette Chambre sur les services qu'il rend au pays ? Nous savons, autant que nos honorables contradicteurs, quels sont les devoirs du gouvernement, dans un pays où l'industrie tient une si grande place, et nous saurons les remplir. Mais tout ne peut cependant pas se réduire a des questions d'exportation de fer ou de tissus ; quelque considérables que soient ces intérêts, nous en avons d'autres encore à sauvegarder.

Quand, messieurs, on tient à l'honneur d'avoir une personnalité nationale, il faut savoir supporter les charges qui y sont inhérentes. Il serait sans doute beaucoup plus commode et infiniment plus agréable au gouvernement de venir vous proposer des réductions au lieu de vous demander des augmentations de dépenses. Oh ! je suis persuadé, pour mon compte, que j'y gagnerais beaucoup plus en popularité. Mais il y a des devoirs qu'on ne peut pas oublier, et l'accomplissement de ces devoirs appartient aux Chambres comme il appartient au gouvernement. Eh bien, je dis que quand il s'agit des plus grands intérêts du pays, quand il s'agit à la fois de sauvegarder sa dignité et sa sécurité, le patriotisme belge n'est ni moins éclairé ni moins lié que celui d'aucune autre nation, et je suis certain d'être d'accord avec le sentiment public en disant que de pareils intérêts n'ont pas de prix.

M. le président. - La parole est à M. H. de Brouckere.

M. H. de Brouckere. - Je compte parler dans le même sens que M. le ministre des affaires étrangères et que l'honorable M. Lebeau. Il me semble donc qu'il serait convenable que quelques-uns de nos honorables adversaires voulussent bien prendre la parole. Je suis entièrement aux ordres de la Chambre, mais il me semble qu'il serait fastidieux pour la Chambre d'entendre trois discours de suite dans le même sens.

M. le président. - Le premier orateur inscrit après M. de Brouckere est M. de Muelenaere.

M. H. de Brouckere. - Eh bien, je lui cède volontiers mon rang d'inscription.

M. de Muelenaere. - Messieurs, je n'ai pas l'habitude, dans des questions de cette nature, de me placer sur le terrain des personnalités. C'est un genre de discussion que j'évite toujours avec soin parce qu'il me semble qu'il n'est ni convenable ni de nature à nous éclairer sur le fond même du débat.

L'honorable M. Lebeau et après lui M. le ministre des affaires étrangères ont cherché à donner à cette discussion une importance qu'elle ne comporte réellement pas. Ils ont, me semble-t-il, évoqué des fantômes pour avoir le plaisir de les combattre. M. le ministre des affaires étrangères avait, je dois le dire, montré tant d'insistance pour que son budget fût immédiatement discuté que, dans la séance d'hier, personne ne prenant la parole, je me suis borné à faire quelques observations auxquelles, d'ailleurs, je n'attachais pas, en ce moment-là, une bien grande importance.

Mais, messieurs, voyons jusqu'à quel point sont fondées les critiques adressées à quelques membres de cette assemblée par l'honorable M. Lebeau et par M. le ministre des affaires étrangères.

De quoi s'agit-il ? Est-il question de désorganiser l'administration ? Est-il question d'amoindrir le corps diplomatique du pays ? Est-il question de méconnaître les services qu'il peut avoir rendus ?

Tâchons, messieurs, de simplifier ce débat. Le budget de l'année dernière a été voté par la Chambre tel qu'il vous a été proposé par le gouvernement.

C'est sur la proposition du gouvernement lui-même que vous avez fixé et voté les traitements des membres du corps diplomatique. Cette année-ci, tout d'un coup, ou vient vous proposer une augmentation assez considérable de traitement pour quelques-uns de nos agents diplomatiques.

Dans la séance d'hier, j'ai commencé par vous déclarer que mon intention n'était point d'examiner même les considérations qu'a fait valoir M. le ministre des affaires étrangères et dans l'exposé des motifs et dans les observations qu'il a présentées en section centrale, en faveur de cette augmentation. Et pourquoi, messieurs ? Parce que, à mes yeux, il ne s'agissait pas d'examiner le fond même de la question. J'ai fait simplement remarquer que, dans les circonstances où se trouve actuellement le pays, dans un moment où l'on cherche à introduire encore des améliorations dans plusieurs parties des services publics, il me semblait peu opportun de s'occuper, avant tout, de l'augmentation des traitements des agents du corps diplomatique.

J'ai même été jusqu'à déclarer que plus tard j'étais disposé à prendre la demande en considération, dès que la position du trésor le permettrait.

En effet, messieurs, je vous ai rappelé que l'autre jour, sur la proposition de M. le ministre des finances, nous avions repoussé une mesure qui semblait bonne à tout le monde, uniquement dans l'intérêt du trésor ; qu'on n'avait pas admis la taxe des lettres à dix centimes, parce qu'on avait voulu éviter des embarras au trésor et surtout parce qu'on avait mieux aimé mettre le gouvernement à même d'introduire non seulement dans le service postal, qui intéresse à un très haut point toute la population, mais dans d'autres branches de l'administration publique, les améliorations dont ces services sont susceptibles.

Vous voyez que, dans toutes ces observations, il n'y avait aucune espèce d'hostilité contre le corps diplomatique ? Vous voyez qu'on n'avait nullement l'intention de lui porter le moindre préjudice, mais il est vrai que la proposition du ministre des affaires étrangères nous a semblé entièrement intempestive et inopportune.

Eh bien, je persiste encore dans cette opinion. Je crois que le moment est mal choisi, je crois que l'époque n'est pas favorable pour voter avant tout des améliorations de sort en faveur des agents du corps diplomatique, lorsque vous êtes assiégés chaque jour de réclamations nombreuses qui vous sont adressées par presque tous les petits fonctionnaires de l'Etat.

Je sais fort bien, messieurs, que ces 45,000 fr. ne peuvent pas suffire pour satisfaire à tous les besoins. Mais une somme de 45,000 fr. par an n'est cependant pas à dédaigner. Indépendamment de cela, je crois que les petits fonctionnaires verraient avec plaisir que la Chambre persistât dans l'intention formelle qu'elle a déjà manifestée à une autre époque de s'occuper de leur sort et de l'améliorer progressivement.

Messieurs, je suis loin de nier que la diplomatie ne soit encore une institution utile, je désire que nos diplomates soient convenablement rétribués. Mais ce budget que nous voulons maintenir, que nous voulons encore voter aujourd'hui, ce budget nous a été présenté l'année dernière par le gouvernement.

Le gouvernement, avant de nous le présenter, s'était entouré des renseignements nécessaires ; il connaissait les besoins du corps diplomatique, il avait dû les apprécier et cependant à cette époque le budget que nous lui offrons de voter lui paraissait suffisant.

(page 322) Ce que vous vous demandons, messieurs, c'est de maintenir provisoirement et jusqu'à ce qu'il ait été satisfait à d'autres nécessités bien plus urgentes, le budget précédent, c'est-à dire consacrer, pour l'exercice 1859, les propositions qui vous ont été faites par le gouvernement lui-même il y a un an à peine. Je ne pense pas, messieurs, que le corps diplomatique fût très malheureux de vivre encore pendant quelques années dans la position où il se trouve actuellement, dans la position que les cabinets précédents lui ont faite. Car enfin la Chambre n'a pas réduit les allocations.

La Chambre a voté, le budget tel qu'il a été proposé par le gouvernement.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - L'accroissement du luxe est quelque chose.

M. de Muelenaere. - L'accroissement du luxe ! et à ce propos, on vous a parlé du haut prix des loyers et de la cherté des vivres ; on a beaucoup insisté sur cette considération.

Mais est-ce que cette considération n'existait pas l'année dernière ? Mais au contraire, si je voulais entrer dans des détails, je dirais qu'il y a un an, il y a deux ans, la cherté était beaucoup plus considérable qu'aujourd'hui.

Sauf pour les loyers, la vie dans toute l'Europe est à meilleur compte aujourd'hui qu'en 1855 et 1856. Mais il me répugne d'entrer dans ces misérables détails ; car c'est faire en quelque sorte le ménage des agents diplomatiques, ce qui est au-dessous de nous et d'eux.

Messieurs, je suis très disposé à voter tout ce qui sera nécessaire pour que le corps diplomatique soit dans une position convenable à l'étranger.

Mais la nécessité d'une augmentation ne m'est pas démontrée et pour quelle raison le prédécesseur du ministre actuel ne l’a-t-il pas demandée ?

(erratum, page 329) M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Il a déclaré qu'il demanderait 40,000 francs pour tous les postes de ministre plénipotentiaire qui figurent comme tels au budget avec un chiffre moins élevé.

M. de Muelenaere. - Il est regrettable pour vous qu'il ne l'ait pas fait les années précédentes.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Il faut bien que le moment arrive.

M. de Muelenaere. - Où est donc l'urgence de faire cela dans le moment actuel ? Nous ne savons pas même s'il y a des réclamations. On demande derrière moi qui réclame ces augmentations ?

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Tout le monde.

M. de Muelenaere. - C'est impossible ; mais ce n'est pas une raison suffisante. Car je crois qu’il est peu de fonctionnaires publics qui ne fussent disposés à réclamer des augmentations de traitement, si les Chambres étaient disposées à les accorder.

On vous a parlé du budget de 1832. Messieurs, ce budget vous a été présenté par moi. Il rétribuait convenablement mais sans luxe les agents diplomatiques. Mais ne perdez pas de vue que quelle que soit l'importance de la diplomatie aujourd'hui, cette importance était beaucoup plus considérable en 1831 et en 1832. L'existence du pays, son indépendance, sa constitution, tout dépendait à cette époque de l'activité et de l'habileté de notre diplomatie. Londres et Paris étaient des postes diplomatiques de la plus grande importance pour nous. C'est là qu'on devait décider du sort du pays.

La diplomatie a-t-elle encore la même importance ?

Elle en aura toujours, surtout si les postes diplomatiques sont convenablement remplis, et je me hâte de dire que le personnel du corps diplomatique me semble laisser peu de chose à désirer. La plupart de nos diplomates sont des hommes honorables, formés dans ces fonctions par une longue pratique et qui font preuve de zèle et de dévouement. Mais je ne vois pas qu'il y ait rien de si urgent dans l'augmentation qu'on nous propose.

Nous examinerons cette question avec maturité ; nous la discuterons lorsque nous aurons un peu de temps. Car la Chambre est à la veille de s'ajourner et évidemment des moments pareils sont très mal choisis pour débattre des questions aussi délicates que celle qui se présente aujourd'hui.

Je persiste donc à croire que la Chambre ferait sagement en maintenant le budget de l'exercice précédent et en n'accordant pas, quant à présent, les augmentations qui sont sollicitées.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'aurais pas demandé la parole, si l'honorable comte de Muelenaere n'avait reproduit, dans son discours, des idées sur lesquelles a insisté particulièrement l'honorable M. Coomans dans la séance d'hier.

On fait appel à de mauvais sentiments qui ne devraient pas avoir d'écho dans cette Chambre, contre lesquels la Chambre devrait se hâter de protester. On oppose les petits aux grands. On fait appel à des sentiments de haine et d'envie.

M. Coomans. - A des sentiments de justice.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Non ! non ! à des sentiments de haine et d'envie. Voilà quelles sont les passions que l'on excite ; et ce sont des hommes qui se disent conservateurs qui s'en rendent les organes dans cette Chambre !

M. Dolez. - Ce sont des démolisseurs.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Et encore si l'on était juste en parlant ainsi ! si l'on pouvait dire au gouvernement et à cette Chambre : Vous avez négligé les intérêts des employés inférieurs de l'Etat, et vous vous occupez de ceux qui sont eu haut ! si l'on pouvait dire avec justice à la Chambre et au gouvernement qu'ils ont méconnu leurs devoirs les plus essentiels vis-à-vis des employés inférieurs de l'Etat, peut-être serait-on excusable de faire entendre un langage aussi déplorable.

Mais, messieurs, l'accusation est fausse ; le gouvernement a rempli son devoir, vous avez rempli le vôtre.

Le gouvernement, depuis dix ans, n'a pas cessé d'améliorer le sort des employés inférieurs de l'Etat.

M. Dolez. - Ils le savent bien.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Pour ce qui en est de mon administration, en 1849, le traitement des douaniers était de 640 francs. Au milieu de la crise, entouré d'embarras financiers les plus graves, j'ai porté ce traitement à 700 fr. Ce traitement a été élevé ultérieurement à 800 fr. et enfin pour une catégorie de ces employés, le traitement est aujourd'hui de 900 fr. Le minimum du traitement des receveurs des contributions a été augmenté.

Voilà ce qu'on a fait pour ces agents de l'Etat.

Au milieu de ces mêmes troubles et de ces mêmes difficultés, nous réduisions dans une certaine mesure les traitements d'un assez grand nombre de fonctionnaires supérieurs de l'Etat.

Et puis lorsque des calamités sont venues, lorsque la crise alimentaire a sévi, vous êtes venus en aide aux petits ; lorsque le renchérissement a pris un caractère permanent, qu'avez-vous fait ? Vous avez voté des sommes considérables ; vous avez voté douze à quinze cent mille francs.

M. Coomans. - 1,200,000 francs.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Douze à quinze cent mille francs pour augmenter les traitements de tous les fonctionnaires inférieurs de l'Etat, de ceux qui avaient un traitement inférieur à 1,600 fr.

Voilà ce que vous avez fait. Vous avez rempli votre devoir. Que l'on ne vienne donc pas exciter ici les sentiments d'en bas pour ébranler ce qui est en haut !

Et puis hier, qu'avons-nous fait ? On parle des instituteurs communaux dont les traitements devraient être augmentés. L'avez-vous fait, quand vous étiez en possession du pouvoir ? Nous l'avons fait, nous. Nous avons proposé près d'un demi-million nouveau pour augmenter les traitements des instituteurs communaux et les traitements de certains fonctionnaires de l'enseignement moyen.

Voilà ce que nous avons fait.

Ainsi donc, autant que mes souvenirs me servent, sans donner de chiffres exacts, nous avons voté en peu d'années 2 millions d'augmentation pour les traitements des employés inférieurs de l'Etat de toutes les catégories.

Et l'on vient agiter de détestables sentiments pour faire ajourner, c'est l'honorable comte de Muelenaere qui parle ainsi, pour faire ajourner une dépense de 45,000 francs ! Ce que l'on vous convie à faire est indigne de vous !

M. H. de Brouckere. - Messieurs, la proposition faite par le gouvernement d'augmenter de quelques milliers de francs le chapitre du budget des affaires étrangères qui concerne les agents diplomatiques, avait rencontré hier une opposition à laquelle je ne m'attendais pas. Cette opposition, vous avez pu le remarquer, est partie des divers côtés de la Chambre ; elle a eu, entre autres organes, un honorable membre dont la parole, toujours écoutée, exerce ordinairement une grande influence dans cette assemblée et devait d'autant plus peser sur vos votes, que cet honorable membre, à deux reprises différentes, a été à la tête du département des affaires étrangères. C'est alors, messieurs, que je me suis décidé à demander la parole pour défendre la proposition du gouvernement.

Cette proposition aujourd'hui a été soutenue. avec leur talent ordinaire, par l'honorable M. Lebeau, par M. le ministre des affaires étrangères et par M. le ministre des finances ; elle n'a pas rencontré un seul nouveau contradicteur. L'honorable comte de Muelenaere s'est seul levé pour appuyer de quelques considérations ce qu'il avait dit hier, et voici comment on peut à près résumer son discours :

Je reconnais que les agents diplomatiques ont rendu et rendent encore de très grands services.

Je reconnais que nos agents diplomatiques ne sont pas assez rétribués. Mais pourquoi augmenter leurs appointements plutôt aujourd'hui que nous ne l'avons fait l'année dernière, que nous ne l'avons fait l'année précédente ?

Messieurs, si de semblables raisons avaient cours ici, nous pourrions tous rester chez nous. Nous n'avons rien à faire ici. Si parce que nous n'avons pas fait une chose l'année dernière, nous ne devons pas la faire aujourd'hui et nous ne devons pas la faire l'année prochaine, décrétons une législation qui sera perpétuelle, puis restons chez nous.

Voilà la réponse que j'ai à faire à l'honorable comte de Muelenaere ; car j'ai résumé en peu de mots tout son discours.

Maintenant si la Chambre n'est pas fatiguée, j'ajouterai quelques arguments encore. Si elle se croit suffisamment éclairée, je ne tiens pas à parler.

- Plusieurs membres. - Parlez !

M. H. de Brouckere. - Je serai du reste très concis.

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(page 323) Avant 1848, les appointements des membres du corps diplomatique étaient établis à un taux fort modéré ; à l'époque que je viens de rappeler, se sont présentées des circonstances extraordinaires, des circonstances exceptionnelles.

Nous avons dû, messieurs, décréter des mesures exceptionnelles aussi, extraordinaires aussi. Vous vous le rappellerez tous, une sorte de rumeur s'était élevée dans toutes les parties du pays. On criait partout à l'économie, et tous les membres de la Chambre à cette époque eussent été unanimes pour vouloir réprimer cette rumeur, pour vouloir prouver qu'elle n'était pas fondée ; nous eussions tous été condamnés par l'opinion. Je n'exagère pas, j'en appelle à vos souvenirs à tous.

Qu'a fait le gouvernement alors ? Il a subi une loi à laquelle il n'eût pas été prudent de vouloir se soustraire. Il est venu spontanément proposer des réductions sur les appointements, qu'on appelle les gros appointements. J'en dirai quelques mots tout à l'heure de ces prétendus gros appointements.

La Chambre, en grande majorité, s'est associée à la pensée du gouvernement. J'ai moi-même défendu les propositions qu'il nous a soumises ; je les ai votées comme la grande majorité de la Chambre. Mais, comme la grande majorité de la Chambre aussi, je me suis réservé de revenir en temps opportun, quand les circonstances le permettraient, au moins en partie, sur des réductions qui, permettez-moi de le dire, approchaient du ridicule. Lorsqu'on pense que les ministres plénipotentiaires dans les plus grandes capitales de l'Europe, à Paris, à Vienne, à Berlin, étaient réduits aux modestes appointements de 25,000 francs, je crois que je n'exagère pas en disant que nous étions descendus à un taux qui approchait du ridicule.

En 1852, on est déjà revenu, mais dans des proportions extrêmement réservées, sur ce qui avait été fait en 1848. Aujourd'hui M. le ministre des affaires étrangères nous a soumis une proposition dans le même but, proposition que je qualifie également de très modeste ; en effet elle est très modeste, puisque sur l'ensemble de notre corps diplomatique, il ne s'agit d'augmenter le total des traitements que d'une somme de 45,000 fr.

Eh bien, messieurs, on vous l'a démontré, et je n'insisterai pas sur ce point, quand vous aurez voté ces 45,000 fr., nos agents diplomatiques seront encore dans une position inférieure à celle de la plupart des agents du même degré dans les résidences où ils se trouvent. C'est un fait qui ne saurait être contesté.

Mais, messieurs, on a dit à d'autres époques, on a encore insinué dans cette discussion, que nous pourrions nous passer de tout cet appareil diplomatique, substituer à nos ministres plénipotentiaires des agents subalternes, voire même de simples consuls.

Messieurs, on est bien injuste quand on méconnaît les services que la diplomatie a rendus au pays depuis 28 ans.

Ah ! si vous exigez de la part de nos agents diplomatiques des services signalés, des services qui frappent tous les yeux dans le moment même où ils sont rendus, s'il vous faut de la part de chaque ministre à l'étranger un accroissement de territoire, par exemple, ou d'autres services de ce genre, vous avez raison, la diplomatie n'a rien fait ; notre territoire ne s'est pas accru. Mais veuillez jeter un regard en arrière et vous demander dans quelle position se trouvait la Belgique en 1830, en 1831 et même encore pendant les années suivantes. Dans quelle position se trouvait-elle alors et dans quelle position se trouve-t-elle aujourd'hui ?

Quel est celui qui oserait comparer la Belgique de 1831 et de 1832 à la Belgique de 1858 ? Etions-nous alors, comme nous le sommes aujourd'hui, considérés, estimés à l'étranger ? Notre existence politique était-elle assurée ? Avions-nous les débouchés commerciaux que nous avons aujourd'hui ? Rien de tout cela.

En 1830 et en 1832, nous étions dans une très grande incertitude pour notre avenir ; des inquiétudes nouvelles surgissaient chaque jour ; nous avions tout à créer, nous avions même à assurer notre situation politique que datait de la veille, et vous croyez que nos agents diplomatiques ne sont pour rien dans le changement de position qui s'est opéré pour nous tous ! Je dis, moi, qu'ils y sont pour beaucoup ; je dis qu'ils ont énormément contribué à nous faire connaître et apprécier à l'étranger, à nous faire rendre justice.

Et l'honorable M. de Muelenaere, sous ce rapport, a été beaucoup plus loin que je n'aurais été moi-même, car il a déclaré ouvertement que c'était en quelque sorte à la diplomatie que la Belgique devait le maintien de son indépendance.

Soyons donc justes, et reconnaissons que depuis 28 ans la diplomatie a rendu à la Belgique des services immenses ; que ces services ont été journaliers, incessants ; et ne venons pas mesquiner, comme on semble vouloir le faire, lorsqu'il s'agit de mettre nos diplomates dans une position moins mauvaise, je dis à dessein moins mauvaise que celle dans laquelle ils sont dans ce moment.

Messieurs, à toutes les époques, depuis 1830, on a beaucoup parlé en Belgique de gros appointements ; on a fait sonner bien haut ce qu'on appelait sans doute pour les rendre odieux, l'aristocratie des fonctionnaires.

Eh bien, je donne le défi le plus formel à tout le monde de me citer une seule catégorie de fonctionnaires en Belgique qui jouissent de ce qu'on appelle de gros appointements ?

Seraient-ce par hasard les ministres (je commence par en haut) dont les appointements sont exagérés ? Mais je suis persuadé qu'il n'y a pas un seul membre de cette Chambre, même parmi les plus économes, qui ne trouve que les appointements des ministres sont excessivement modérés. Aucun ministre passé, aucun ministre d'aujourd'hui, n'a demandé que sa position fût améliorée, je crois même que les ministres qui succéderont à ceux qui occupent aujourd'hui le banc ministériel, useront de la même réserve ; mais il restera toujours vrai qu'ils sont très mal salariés.

Sont-ce les gouverneurs qui sont bien payés ? Or, quand nous défaisons du traitement des gouverneurs les dépenses auxquelles ils ne peuvent pas se soustraire et dont on ne leur sait pas le moindre gré, il ne leur reste pas 10,000 francs.

Croyez-vous qu'un gouverneur sans fortune puisse vivre fort à son aise avec des appointements de 10,000 fr., lorsqu'il est à la tête d'une famille ? A coup sûr, voilà encore une classe de fonctionnaires que vous ne pouvez pas ranger dans celle des hommes qui jouissent de gros appointements, si gros appointements il y a en Belgique. Sous le royaume des Pays Bas, les gouverneurs touchaient un traitement de 19,000 fr., qui équivalaient au moins à ce que seraient 30,000 fr. aujourd'hui.

Je passe de l'ordre administratif à l'ordre judiciaire. Dans l'ordre judiciaire je prends pour point de comparaison les gros bonnets ; c'est encore un mot très en usage dans certaines bouches.

Eh bien, les gros bonnets, ce sont les premiers présidents et les procureurs généraux.

Or, le premier président, ainsi que le procureur général de la Cour d'appel de Bruxelles, jouissent chacun d'un traitement de 9,000 fr.

En savez-vous quel traitement était attribué à ces deux hauts fonctionnaires, non pas sous le royaume des Pays-Bas, époque où ils étaient aussi fort convenablement salariés, mais du temps de l'empire : ils touchaient l'un et l'autre 20,000 fr. avant 1814. Je crois que sans exagération je puis traduire aujourd'hui ce traitement en 40,000 fr. ; car alors ces 20,000 fr. à Bruxelles faisaient plus que 40,000 fr. aujourd'hui. Sont-ce là de gros appointements ?

En bien, ce que je viens de dire des fonctionnaires que j'ai cités, vous pouvez l'appliquer à toutes les autres classes de fonctionnaires, vous pouvez le faire si bien que vous avez déjà posé un acte de justice : vous avez reconnu que les conseillers de la cour des comptes qui sont encore des fonctionnaires d'un rang élevé, n'étaient pas suffisamment rétribués ; et vous avez, cette année, augmenté leurs appointements de 1,000 fr. Eh bien, ce que vous avez fait pour les conseillers de la cour des comptes, vous serez amenés à le faire un peu plus tôt un peu plus tard, pour les autres catégories de fonctionnaires supérieurs.

D'un autre côté, je ne serai pas le dernier à appuyer fortement les augmentations de traitement qui nous seront demandées pour les petits fonctionnaires.

On a déjà fait beaucoup pour eux ; mais on n'a pas dit le dernier mot : on doit encore faire beaucoup pour eux. Mais parce qu'on se montre sympathique aux employés inférieurs, est-ce une raison pour n'être pas juste envers les autres fonctionnaires ? Le fait est que tous les fonctionnaires en Belgique sont mal payés.

On vous propose en faveur du corps diplomatique un premier acte de justice ; car ce n'est qu'un acte de justice. Quand l'occasion s'en présentera, il est probable que ce sera dans un temps plus ou moins rapproché, vous serez amenés à augmenter les appointements des autres fonctionnaires grands et petits, aristocrates et démocrates, gros bonnets et petits bonnets.

Messieurs, je crois que la Chambre doit savoir maintenant à quoi s'en tenir sur les exagérations auxquelles on s'est livré à propos de la proposition si modeste et si conciliante faite par le gouvernement. J'ai, avant de terminer, deux mots à dire sur l'amendement de M. Vandenpeereboom.

Cet honorable membre vous a dit : Si vous avez 45 mille fr. à donner, au lieu de les donner aux agents diplomatiques, donnez-les au corps consulaire qui est maltraité par le budget et rend de très grands services.

Ce n'est pas moi qui nierai les services rendus par le corps consulaire, je les ai proclamés dans une occasion très récente, Mais parce que les consuls rendent beaucoup de services, venir dire : Otez les 45 mille fr. que vous voulez attribuer aux diplomates et donnez-les aux consuls, c'est une proposition qu'aucun de nous ne peut admettre.

S'il y a de nouveaux consulats à créer, si ceux qui existent ne sont pas assez rétribués, que le gouvernement vienne faire des propositions, je déclare d'avance que je les admettrai ; mais venir dire en bloc, sans demande de la part du gouvernement : Ajoutons 45,000 fr. pour les consulats, sans savoir ce que l'on en fera, sans s'enquérir si on en a besoin ; cela ne se conçoit pas, je ne puis accepter une pareille proposition.

Si les 45.000 fr. demandés pour les agents diplomatiques ne doivent pas être accordés, qu'on les rejette, chacun est libre de le faire.

M. Vandenpeereboom les demande pour le corps consulaire, M. Julliot les demande pour construire des routes, des canaux, des chemins de fer, que sais-je ? dans sa province ; il ne veut plus qu'on dépense rien de nouveau avant qu'on ait fait pour sa province tout ce qu’il demande ; si tout le monde en disait autant, les services publics seraient singulièrement administrés.

M. Coomans les demande pour les petits fonctionnaires ; M. de Muelenaere (page 324) pour les secrétaires communaux, un autre pour les instituteurs, tout le monde voudra les avoir et je vois le moment où personne ne les aura. Moi, au milieu de ces conflits, je les donne ou plutôt je les laisse au corps diplomatique.

M. E. Vandenpeereboom. - Je dirai quelques mots, puisqu'on vient de faire un reproche à ceux qui ont parlé hier de ce qu'ils se taisent aujourd'hui. Je serai très court. Je n'ai pas à me plaindre de mes contradicteurs ; een ffet, les arguments, qu'ils ont le plus vivement combattus, ne venaient pas de moi.

L'honorable ministre des affaires étrangères a même trouvé, en moi, des qualités que je n'y soupçonnais pas ; aussi, j'hésite à accepter le gracieux compliment qu'il m'a adressé.

Voici donc ma position dans cette question. Dans l'ordre de nos débats, c'est l'amendement de l'honorable M. Coomans qui doit passer le premier, il n'était même pas besoin d'amendement pour cela, on n'avait qu'à voter contre l'article du gouvernement. C'est ce que je me proposais de faire, avant que les honorables MM. de Muelenaere et Coomans aient pris la parole.

On me reproche de n'avoir su me délivrer encore de cette fièvre d'économies, à laquelle, en 1848, personne n'a pu résister, tant cette fièvre était intense.

Je crois, non par entêtement, mais, par suite de mes observations, que tel est encore le sentiment intime du pays ; on parle moins haut qu'en 1848, mais on ne désire pas moins vivement la réduction de certaines, dépenses.

Après tout, je maintiens ce qui existe. On m'a reproché d'avoir parlé d'Etat modeste, si je n'ai pas le bonheur d'être d'accord à cet égard avec M. le ministre des affaires étrangères, je le suis avec un ministre d'un autre pays, qu'on vient de citer et qui disait à son agent, qu'il devait se conduire comme le représentant d'un pays modeste ; et se contenter de la position que lui faisait son gouvernement.

Il semblerait, à entendre nos contradicteurs, que nous voulons innover ! et c'est nous qui sommes conservateurs.

Je suis conservateur d'un ordre de choses qui a existé, sous le ministère de M. H. de Brouckere, sous le ministère de M. Vilain XIIII, et que vous avez soutenu, la première année que vous êtes entrés au pouvoir... (Interruption) de ce qui a existé, du moins, sous les deux ministères qui ont précédé le vote.

L'honorable M. H. de Brouckere, qui trouve aujourd'hui les choses si mauvaises, ne les a pas trouvées ainsi, quand il était au pouvoir. (Interruption.)

Alors, vous n'avez pas proposé, comme ministre, l'augmentation, que vous appuyez aujourd'hui, comme représentant.

On vous l'a dit, cette opposition s'est déjà manifestée, depuis longtemps on vous a montré les difficultés qu'on a rencontrées, dès 1832, pour obtenir un chiffre élevé pour ce genre de dépenses. Ce que je crains, ce n'est pas seulement ce surcroît de 45 mille fr. ; mais c'est de vous voir entrer dans une série d'augmentations de dépenses de même nature ; comme l'a dit M. de Brouckere, vous serez sollicités à augmenter tous les traitements, beaucoup de fonctionnaires se trouvant trop faiblement rétribués.

C'était là un de mes arguments dans la séance d'hier. Vous dites que, dans le corps diplomatique, il n'est pas un agent du gouvernement qui puisse vivre avec ses appointements ; et vous ajoutez qu'il n'est pas un fonctionnaire de l'ordre élevé, dans le pays, qui puisse vivre seulement avec son traitement. Si la position de l'agent extérieur doit être améliorée, pourquoi ne pas délibérer, en même temps, sur ce qu'il y a à faire pour le fonctionnaire de l'intérieur ? Vous vous imaginez toujours que personne n'a de fortune personnelle. Cependant, il est des diplomates, d'origine modeste, qui se sont mariés richement et qui usant de leur fortune personnelle, vivent comme un fonctionnaire riche vit de sa fortune et de son traitement.

Nous voyons des fonctionnaires riches ajouter à leur modeste traitement une partie de leur revenu personnel, parce que, eux aussi, tiennent à vivre convenablement.

Je crains que, en révisant ainsi les traitements par partie, vous fassiez trop pour les uns, trop peu pour les autres. Si vous veniez dans une proposition d'ensemble ayant pour but de donner satisfaction à tous les intérêts, nous dire : Il faut donner autant aux diplomates, autant aux gouverneurs, etc., nous apprécierions la mesure dans son ensemble ; mais aujourd'hui, vous venez avec une mesure pour les diplomates, demain vous voudrez faire une proposition pour les gouverneurs. M. le ministre des affaires étrangères sait par sa propre expérience qu'un gouverneur ne peut pas vivre convenablement, avec son traitement seulement. Eh bien ; pour ma part, je ne désire pas cette augmentation de tous les traitements ; je l'indique comme preuve que, par un travail partiel, vous n’êtes ni justes, ni rationnels.

Pour ce qui est de ma proposition subsidiaire, je vous avoue que je ne m’en suis servi que comme d'un moyen de faire voir l'importance du corps diplomatique inférieur. J'ai voulu montrer que, s'il y avait quelque chose à faire, c'était plutôt en bas qu'en haut qu'il fallait augmenter.

Non pas, comme je l'ai déjà dit, que je veuille en aucune façon amoindrir les mérites de nos agents politiques. Je sais qu'ils ont rendu beaucoup de services et qu'ils continuent à en rendre encore ; mais je dis que, dans l'état commercial et industriel où nous sommes, c'est surtout par l'action de nos agents consulaires que nous devons chercher à donner de l'extension au commerce et à l'industrie. Ce qu'il nous faut, c'est d'étendre et de multiplier nos débouchés lointains.

Il m'est parfaitement indifférent que cette organisation se fasse cette année ou l'année prochaine ; mais je dis (et mon amendement n'a pas d'autre signification) que, s'il y a encore quelque chose à faire pour les agents politiques, à plus forte raison y a-t-il à faire pour nos agents consulaires.

Sans doute ces agents nous sont déjà fort utiles ; ils nous adressent des rapports très consciencieux, très intéressants, et dont le commerce et l'industrie tirent bon profit ; or, combien n'en rendraient-il pas de plus utiles encore, s'ils étaient suffisamment rétribués pour faire les voyages et les recherches nécessaires.

Par leur position les consuls peuvent faire des démarches qui ne conviennent pas à des diplomates haut placés ; ils peuvent établir des relations qui, de la part des agents politiques, ne se concilieraient peut-pas avec les exigences d'une position officielle élevée, et qui, cependant, peuvent nous être d'une bien grande utilité, au point de vue de nos intérêts industriels et commerciaux.

Je recommande donc nos agents consulaires à toute la sollicitude du gouvernement.

En attendant, je voterai contre l'augmentation de 45,000 francs, non pas parce qu'il s'agit précisément de nos agents politiques, mais parce qu'il me semble que des fonctionnaires qui ont pu se maintenir pendant dix ans dans leur position actuelle, pourraient bien y rester quelque temps encore, jusqu'à ce qu'on eût amélioré la position d'autres agents, également recommandâmes, et également dignes de notre sollicitude.

- Plusieurs membres. - Aux voix ! aux voix !

M. Coomans. - Si la Chambre est fatiguée, je renoncerai volontiers à faire les diverses observations que j'avais à présenter en réponse à d'honorables préopinants ; je tiens cependant à répondre deux mots à l'honorable M. Frère-Orban, qui a produit avec force, je dirai même avec violence, un raisonnement faux et des chiffres inexacts. Je me bornerai à ces deux points et je serai excessivement concis.

Le raisonnement faux, pour ne pas dire pis, de M. Frère, c'est de nous attribuer (à nous qui demandons qu'on augmente les traitements des fonctionnaires inférieurs de l'administration, du moins en même temps que ceux des fonctionnaires supérieurs) l'intention d'éveiller un sentiment mauvais chez les premiers en excitant leur jalousie contre les fonctionnaires des rangs supérieurs.

Voilà, messieurs, en quoi consiste le raisonnement faux, faux et injuste de M. le ministre. Je le repousse absolument.

Quant aux chiffres sur lesquels on a essayé de l'appuyer, ils sont tout à fait inexacts. M. le ministre des finances a fait grand bruit des 1,200,000 francs qui ont été votés en deux fois, en faveur des fonctionnaires inférieurs de l'administration. Malgré une interruption de l'honorable H. Dolez, je dois rappeler à la Chambre que ce fait, je l'ai cité moi-même, et que j'en ai même fait hier un argument. J'ai dit hier que deux sections centrales, en votant des subsides en faveur des employés inférieurs de l'administration, s'étaient arrêtées devant des difficultés financières, n'avaient osé faire davantage et avaient exprimé le désir qu'on achevât cette œuvre de réparation aussitôt que l'état de nos finances le permettrait. Mais, messieurs, si l'on voulait inférer des votes auxquels j'ai fait allusion, qu'on a fait assez jusqu'à présent pour les fonctionnaires inférieurs de l'Etat, je devrais protester de toutes mes forces. Car, enfin, ces fonctionnaires étaient au nombre de plus de 13,000, de sorte que ce qu'on a fait pour eux, depuis dix ans, se borne, en moyenne, à un secours individuel de 75 à 76 francs, soit 7 à 8 francs par an ! Dites que vous n'avez pas fait plus, parce que l'état de nos finances ne le permettait pas ; je le veux bien ; mais ne venez pas arguer de cette aumône (on l'a nommée ainsi), contre la proposition que nous faisons, d'attendre, pour augmenter les traitements des agents diplomatiques, que l'on puisse améliorer en même temps la position des fonctionnaires d'un rang inférieur et qui ne sont pas moins dignes de notre sollicitude. Les rapports que j'ai rédigés sont là pour prouver que j'ai reconnu moi-même, à diverses reprises, que la plupart des fonctionnaires, en Belgique, n'étaient pas assez rétribués. Me voilà donc d'accord, à peu près, avec tout le monde.

La section centrale de 1855 l'a également reconnu à l'unanimité, maïs elle a pensé qu'il était possible d'arriver à améliorer toutes les positions au moyen d'une réforme administrative, sans charge nouvelle pour le budget.

Voilà, messieurs, le sentiment qui m'a guidé ; et quand j'ai exprimé l'opinion que je viens de rappeler, et dont je conserve toute la responsabilité, qu'il fallait améliorer la position des fonctionnaires inférieurs de l'Etat avant d'améliorer celle des fonctionnaires supérieurs, je crois avoir émis une pensée toute naturelle, équitable, sensée et prudente, pensée dans laquelle je persiste, et que je maintiendrai en dépit de toutes les contradictions.

- Voix nombreuses. - La clôture !

M. le président. - La discussion est close.

Il y a deux propositions ; celle de M. Coomans qui, sous le nom d'amendement se (page 325) résume cependant en une proposition consistant à adopter le chiffre le moins élevé. Je crois qu'il y sera fait droit en votant d'abord sur le chiffre le plus élevé, comme la Chambre est dans l'usage de le faire. Ensuite, viendrait la proposition de M. E. Vandenpeereboom, si le chiffre le plus élevé n'était pas admis.

M. H. de Brouckere. - Les deux propositions se confondent.

M. le président. - Non, il y a deux chiffres pour l'Autriche, celui de 48,000 fr. et celui de 39,000 fr. Il est dans les usages de la Chambre, de voter d'abord sur le chiffre le plus élevé. Il sera ainsi fait droit à la proposition de M Coomans, qui n'est, au fond, que le rejet du chiffre le plus élevé.

M. Coomans. - Je demande à dire un mot sur la position de la question. Il est vrai qu'il est dans les usages de la Chambre de voter d'abord sur le chiffre le plus élevé ; il y a pour cela des motifs que je n'ai pas besoin de rappeler ici ; mais il est à remarquer que ma proposition est un amendement et que tout amendement à la priorité sur la proposition principale.

- Plusieurs voix. - Non ! non !

M. Coomans. - Pourquoi non ? Je voudrais bien qu'on m'en donnât la raison et qu'on réfutât le règlement de la Chambre. Je ferai remarquer qu'en n'adoptant pas la marche que j'indique, il est tels membres qui pourraient se trouver dans une certaine perplexité, en ce que le rejet du chiffre proposé par le gouvernement leur paraîtrait peut-être un acte trop sévère parce qu'il impliquerait peut-être l'intention de refuser toute espèce de traitement diplomatique.

- Plusieurs voix. - Non ! non !

M. Coomans. - Mais je propose le chiffre de 39,000 fr., et il me semble que c'est celui-là qui doit être mis d'abord aux voix, parce que, je le répète, ma proposition constitue un amendement.

M. H. de Brouckere. - Je ne crois pas que l'honorable M. Coomans puisse insister sur sa proposition, car elle n'est réellement pas soutenable. C'est une règle invariable que, quand il s'agit de chiffres, on commence toujours par le plus élevé et il serait facile de démontrer qu'il ne peut pas en être autrement.

M. E. Vandenpeereboom. - La question est bien simple : Votons d'abord sur le chiffre le plus élevé du premier article de tout le chapitre. Ceux qui veulent la réduction de tous les articles voteront contre le premier. Si le chiffre le plus élevé est admis, toute réduction est rejetée et ma proposition tombe. (Appuyé !)

M. le président. - Je mets donc aux voix le chiffre de 48,000 francs.

- Plusieurs voix. - L'appel nominal !

- Il est procédé au vote par appel nominal sur le chiffre de 48,000 fr., proposé par le gouvernement.

En voici le résultat : 63 membres répondent à l'appel nominal.

37 votent pour le chiffre.

24 votent contre.

4 s'abstiennent.

En conséquence, le chiffre de 48,000 fr. est adopté.

Ont voté l'adoption : MM. Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tesch, Thiéfry, Vander Stichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Allard, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Boe, de Brouckere (Henri), de Lexhy, Deliège, de Moor, de Paul, de Terbecq, Devaux, de Vrière, Dolez, d'Ursel, Frère-Orban, Godin, Jacquemyns, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau (Joseph), Loos, Manilius, Mascart, Muller, Neyt, Orban et Verhaegen.

Ont voté le rejet : MM. Tack, Thienpont, Vandenpeereboom (Ernest), Vander Donckt, Van Renynghe, Verwilghen, Ansiau, Coomans, Coppieters 't Wallant, David, Dechentinnes, De Fré, de Muelenaere, de Naeyer, de Pitteurs-Hiegaerts, de Ruddere de Te Lokeren, Dumortier (Henri), Goblet (Louis), Grosfils, Julliot, Magherman, Notelteirs, Pierre et Pirmez.

Se sont abstenus : MM. de Haerne, de Mérode, de Smedt et Lelièvre.

Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. de Haerne. - Je ne suis pas hostile en principe à la majoration, mais je pense que le moment de la voter n'était pas arrivé, puisque le gouvernement cherche à créer de nouvelles ressources pour le trésor. D'ailleurs j'aurais préféré commencer à appliquer les augmentations à l'objet indiqué par l'honorable M. Vandenpeereboom.

M. de Mérode-Waterloo. - Je me suis abstenu par le même motif.

M. de Smedt. - Je n'ai pas voulu voter contre l'augmentation demandée parce que ces fonctionnaires ne sont pas effectivement, je crois, suffisamment rétribués.

Je n'ai pas voté pour parce que je ne sache pas que jusqu'aujourd'hui il ait manqué pour remplir ces postes importants et honorables des personnes jouissant d'une fortune assez considérable pour les remplir dignement.

M. Lelièvre. - Je me suis abstenu parce que si l'on doit admettre que les traitements actuels des agents diplomatiques sont insuffisants, l'opportunité de décréter les augmentations ne me semble pas démontrée.

Article 8

« Art. 8. Confédération germanique : fr. 35,000. »

- Adopté.

M. Coomans. - Je n'ai pas besoin, je pense, de dire à la Chambre que si nous ne nous opposons pas aux autres augmentations proposées, cela n'implique pas du tout notre assentiment aux chiffres du gouvernement. J'y fais opposition, seulement je reconnais que cette opposition est inutile, et je garde le silence.

Article 9 à 21

« Art. 9. France : fr. 53,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Grande-Bretagne : fr. 65,000. »

- Adopté.


« Art 11. Italie : fr. 59,000$. »

- Adopté.


« Art. 12. Pays-Bas : fr. 45,000. »

- Adopté.


« Art. 13. Prusse : fr. 43,000. »

- Adopté.


« Art . 14. Russie : fr. 65,000. »

- Adopté.


« Art. 15. Brésil : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 16. Danemark, Suède, Villes libres et hanséatiques de Hambourg, Brême, Lubeck : fr. 17,000. »

- Adopté.


« Art. 17. Espagne : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 18 Etats-Unis : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 19. Portugal : fr. 17,000. »

- Adopté.


Art. 20. Turquie : fr. 33.000. »

- Adopté.


« Art 21. Indemnités à quelques secrétaires et attachés de légation ; charge extraordinaire : fr. 14,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Consulats

Article 22

« Art. 22. Traitements des agents consulaires et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 119,500. »

- Adopté.

Chapitre IV. Frais de voyage

Article 23

« Art. 23. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 65,000. »

- Adopté.

Chapitre V. Frais à rembourser aux agents du service extérieur

Articles 24 et 25

« Art. 24. Indemnités pour un drogman, pour un capou-oglan et pour quatorze khavass employés dans diverses résidences en Orient : fr. 10,380. »

- Adopté.


« Art. 25. Frais divers : fr. 67,570. »

- Adopté.

Chapitre VI. Missions extraordinaires, traitements d’inactivité et dépenses imprévues

Article 26

« Art 26. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité et dépenses imprévues, non libellées au budget : fr. 40,000. »

- Adopté.

Chapitre VII. Perception des droits de chancellerie, et bureau de la Librairie à Paris

Articles 27 et 28

« Art. 27. Personnel : fr. 5,240. »

- Adopté.


« Art. 28. Frais divers : fr. 360. »

- Adopté.

Chapitre VIII. Commerce, navigation, pêche

Articles 29 à 33

(page 236) « Art. 29. Ecoles de navigation. Personnel : fr. 17,260. »

- Adopté.


Art. 30. Ecole de navigation. Frais divers : fr. 7,280. »

M. le président. - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose d'augmenter ce chiffre de 800 fr., ce qui le porte à 8,080 fr. et de réduire d'une même somme de 800 fr. l'article 32.

- Le chiffre de 8,080 fr. est adopté.


« Art. 31. Chambres de commerce : fr. 12,000. »

- Adopté.


« Art. 32. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 14,600. »

M. le président. - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose de réduire ce chiffre à 15,800 fr.

- Le chiffre de 13,800 fr. est adopté.

Article 33

« Art. 33. Encouragements de la navigation à vapeur entre les ports belges et les ports étrangers : fr. 60,000. »

M. le président. - La section centrale propose, d'accord avec le gouvernement, de supprimer ce chiffre.

Les articles doivent rester numérotés tels qu'ils sont dans le projet de budget. Seulement au libellé de cet article, il faut ajouter pour mémoire, sans cela l'article. 2 du projet qui laisse à la disposition du gouvernement les bonis réservés sur cet article dans les exercices antérieurs ne pourrait recevoir d'application.

M. Van Iseghem, rapporteur. - La section centrale a entendu seulement supprimer le chiffre, mais non le libellé de l'article.

- Le libellé avec les mots pour mémoire est adopté.

Articles 34 à 36

« Art. 34. a. Service de navigation à vapeur entre Anvers et New-York ; subside accordé en vertu du n°1 de l'article 10 de la convention du 29 mai 1853 : fr. 28,800.

« b. Service de navigation à vapeur entre Anvers et Rio de Janeiro, remboursement des droits de tonnage, de pilotage, de phares et fanaux, spécifiés à l'article 6 de la convention du 25 avril 1854 (peur mémoire).

« c. Service de navigation à vapeur entre Anvers et le Levant, remboursement des droits de tonnage, de pilotage, de phares et fanaux, spécifiés à l'article 9 de la convention du 12 novembre 1855 (crédits non limitatifs) : fr. 20,276.

« Ensemble : fr. 49,076. »

- Adopté.


« Art. 35. Pêche maritime. Personnel : fr. 7 550. »

- Adopté.


« Art. 36. Primes : fr. 92,050. »

- Adopté.

Chapitre IX. Marine

Articles 37 à 39 (pilotage)

« Art. 37. Personnel: fr. 187,690.”

- Adopté.


« Art. 38. Remises à payer au personnel actif du pilotage et aux agents charges de la perception des recettes des divers services de la marine (crédit non limitatif) : fr. 222,468 51. »

- Adopté.


« Art. 39. Payement à faire à l'administration du pilotage néerlandais en vertu des traités existants, du chef du pilotage et de la surveillance commune ; restitution des droits indûment perçus et perte par suite de fluctuations du change sur les sommes à payer à Flessingue (crédit non limitatif) : fr. 13,500. »

- Adopté.

Article 40 (sauvetage)

« Art. 40. Personnel : fr. 14,300. »

Adopté.

Article 41 (marine militaire, paquebots à vapeur, etc.)

« Art. 41. Traitements du personnel des paquebots, des bateaux à vapeur de l'Escaut et d'autres bâtiments de l’Etat, ainsi que du personnel à terre : fr. 236,671 67. »

M. H. Dumortier. - Je prie M. le ministre des affaires étrangères de faire connaître à la Chambre quelles sont les intentions du gouvernement concernant notre marine militaire.

Cette importante question qui a été si diversement appréciée, passe d'un ministère à un autre, et reste depuis trop longtemps sans solution.

Cependant nos deux navires de guerre, le Duc de Brabant et la Louise-Marie coûtent chaque année au pays des sommes considérables, tandis que les services qu'ils ont rendus dans ces derniers temps du moins sont complétement nuls ; ces navires se trouvent depuis plus de deux ans en non-activité dans l'Escaut devant Anvers. J'espère que M le ministre des affaires étrangères jugera utile de donner à ce sujet quelques explications à la Chambre.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - Pendant la session de 1855, des observations ont été présentées par plusieurs honorables membres, sur la marine, sur les proportions qu'on devait donner à cette institution, sur sa situation en ce moment, et à la suite des critiques qui ont été faites, l'honorable ministre des affaires étrangères, comte Vilain XIIII, a nommé une commission mixte composée de membres de la Chambre et d'hommes spéciaux qui ont fait un rapport sur ce qu'il y avait à faire.

Plus tard, d'autres commissions militaires ont été réunies pour examiner la question de la marine au point de vue purement militaire.

Une autre commission encore a siégé et a fait un rapport sur le même objet.

Il y a eu donc, comme vous le voyez, différents travaux sur lesquels le gouvernement, à cause de la difficulté que présente la question, n'a pu encore prendre un parti définitif.

Cependant le gouvernement ne méconnaît pas que la situation de la marine, en ce moment, est dérisoire et qu'elle ne peut continuer. Aussi, je me propose de faire très prochainement un rapport à la Chambre, sur cet objet.

M. H. Dumortier. - Les renseignements fort succincts que vient de nous donner M. le ministre concordent avec les explications non moins laconiques qu'il a transmises à la section centrale. Il résulte de l'ensemble de ces communications que le gouvernement n'a pas l'intention de créer une marine militaire, une marine comptant un certain nombre de bâtiments nouveaux.

Je n'ai aucune peine à croire à la parfaite sincérité de cette déclaration, je suis au contraire persuade que le cabinet ne nous proposera pas d'imposer une pareille dépense au pays et il a d'excellents motifs pour cela. Une marine militaire complète exigerait beaucoup de millions, et quand le ministère viendrait nous proposer de voter ces millions, il recevrait de la Chambre un accueil semblable à celui qu'il a reçu dernièrement lorsqu'il est venu nous demander des millions pour embastiller Anvers.

Aussi, n'est-ce pas ce point-là qui fait principalement l'objet de l'interpellation que j'ai l'honneur d'adresser à M. le ministre des affaires étrangères. J'ai surtout demandé à M. le ministre quelles sont les intentions du gouvernement concernant la marine militaire que nous possédons actuellement.

Nos deux navires de la marine militaire sont dans un état tel qu'ils ne pourraient plus tenir la mer. Afin de pouvoir en parler en parfaite connaissance de cause, j'ai été les visiter il y a quelques jours.

Pour que vous puissiez à votre tour, messieurs, vous faire une idée exacte de l'état de vétusté de ces navires, permettez-moi de citer un seul fait. Le grand mât de l’in d’eux est en si mauvais état, que les officiers n’osaient plus ordonner aux matelots d’y monter. Ce mât vient d’être remplacé, c’est une dépense de plus de deux mille francs et pour ainsi dire en pure perte.

Outre les frais d'entretien, le traitement des officiers et la solde des matelots de ces navires absorbe chaque année, des sommes considérables.

L'honorable M. Van Iseghem, rapporteur de la section centrale, nous a assuré que l'ensemble de toutes ces dépenses s'élève annuellement à plus de cent soixante et dix mille francs.

Puis d'un autre côté, messieurs, voyez quelle est la position de nos officiers de marine qui figurent parmi les jeunes gens les plus distingués sortis de nos écoles spéciales. Quel avancement peuvent-ils jamais espérer ? N'est-ce pas briser leur carrière que de maintenir l'état de choses qui existe actuellement ? Et dire que dans de pareilles circonstances le gouvernement continue à envoyer sur ces navires des aspirants de marine, n'est-ce pas là une dérision ?

M. le ministre déclare qu'il se propose d'utiliser et de compléter les divers éléments dont le gouvernement se dispose aujourd'hui pour le service des forts de l’Escaut, et pour la surveillance des digues.

J'ai consulté les hommes les plus compétents sur la question de savoir jusqu'à quel point le brick le Duc de Brabant et la goélette la Louise Marie, pourraient être utilisés à cette fin, et tous m'ont unanimement répondu qu'ils ne comprennent pas le projet de M. le ministre des affaires étrangères.

Ce service des forts est tellement insignifiant, qu'il se fait actuellement au moyen d'une misérable barque. Il pourrait se faire également au moyen d'un simple fourgon par voie de terre ou encore par les (page 327) bateaux à vapeur qui servent au passage de l'Escaut à la Tête de Flandre, et qui ne sont jamais tous employés en même temps.

Ce service est insignifiant par la raison toute simple, que la garnison des forts de Lillo, de Ste-Marie et de Liefkenshoek est nulle ou à peu près nulle.

Chacun de ces forts renferme à peine une vingtaine d'hommes.

Et c'est pour faire ce simulacre de service, c'est pour remplacer la barque dont je parlais tout à l'heure que M. le ministre veut employer nos deux navires de guerre. Mais si cela a lieu, ou ne verra certes dans aucun pays mettre en pratique de pareilles absurdités.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Vrière). - J'ai déclaré tout à l'heure que je ferai un rapport à la Chambre.

M. H. Dumortier. - On sait ce que valent, dans la plupart des cas, les promesses ministérielles.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Elles1valent bien votre discours.

M. H. Dumortier. - Je ne prétends pas avoir l'éloquence de M. Frère, mais tous ces grands cris et tous ces grands gestes ne m'émeuvent guère et n'ajoutent, pour moi, rien à la valeur d'une argumentation.

M. le ministre entend-il par hasard parler du service des forts tel qu'il devrait être organisé si nous étions en état de guerre ? Mais alors je ferai remarquer que ces forts, celui de Lillo excepté peut-être, se trouvent dans un état de détérioration fort analogue à l'état de délabrement des navires eux-mêmes ; pour une pareille éventualité, ces forts exigeraient de grandes dépenses de restauration.

Le gouvernement se propose-t-il de faire mettre l'Escaut en état de défense ? C'est là encore une question très importante sur laquelle la Chambre serait sans doute charmée d'obtenir quelques éclaircissements.

Mais, nous dit M. le ministre, la surveillance des digues ? En quel sens M. le ministre entend-il parler de la surveillance de digues ?

Je suppose que l'honorable M. de Vrière veut cette surveillance pour empêcher qu'on ne vienne percer les digues et inonder une partie du territoire belge qui s'étend entre Anvers et la frontière hollandaise.

Messieurs, je vous le demande, qui s'aviserait, en état de paix, de venir percer nos digues ? Mais, pourrait-on objecter, nous pouvons nous trouver en état de guerre. Eh bien, je suppose que nous soyons en guerre avec la Hollande par exemple ou avec n'importe quel pays ; je suppose que l'ennemi se porte vers le point du territoire où l'Escaut quitte la Belgique et qu'il entre dans les plans de campagne de l'ennemi de venir percer nos digues. Si cette tentative se fait par voie de terre, l'ennemi rencontrera infailliblement sur sa route notre armée qui saura surveiller les digues beaucoup mieux que nos deux navires.

Si, au contraire, des bâtiments de guerre remontaient le fleuve pour venir percer en Belgique les digues de l'Escaut, pourra-t-on faire sérieusement accroire à un homme raisonnable que c'est avec nos deux vieux navires usés que l'on pourrait les repousser ?

Je crains donc, messieurs, que lorsque M. le ministre vient nous déclarer que c'est au double point de vue du service des forts de 1'Escaut et de la surveillance des digues que la question de notre marine militaire sera examinée, je crains, dis-je, que ce grand problème ne soit mal compris par M. le ministre. Quoi qu'il en soit, M. le ministre veut bien nous promettre d'examiner la question ; je ne veux pas supposer, messieurs, que c'est là un de ces moyens dilatoires pour en ajourner indéfiniment l'étude et pour en léguer la solution à son successeur ; je ne veux pas supposer que c'est là encore une de ces promesses qui ne seront pas suivies d'effet ou de ces fleurs sans fruit comme l'a fort bien dit l'autre jour l'honorable M. De Fré en parlant des travaux du ministère ; je ferai cependant remarquer que d'autres ministres des affaires étrangères ont formellement fait les mêmes promesses et que malgré toutes les promesses ministérielles, cette grande question a été successivement transmise, comme par une espèce de fidéicommis, d'un ministre à un autre et qu'elle est restée ensevelie jusqu'ici dans les limbes du ministère des affaires étrangères.

Il faut une fin à un pareil état de choses, et si à la session prochaine M. le ministre ne vient pas nous proposer une solution satisfaisante de ce problème, j'aurai l'honneur de proposer à la Chambre de nommer elle-même une commission spéciale pour cet objet.

Maintenant, messieurs, il me reste un mot d'explication à demander à l'honorable rapporteur de la section centrale.

Je lis dans le rapport de l'honorable M. Van Iseghem ce qui suit : « La minorité de la section centrale regrette qu'on n'ait pas depuis longtemps organisé une marine militaire et de défense, compatible avec les ressources financières du pays. »

Je dois déclarer à la Chambre qu'en lisant ce passage du travail de notre honorable collègue, mon étonnement a été grand.

J'ai constamment assisté à toutes les discussions qui ont eu lieu à la section centrale sur le projet du budget du département des affaires étrangères, excepté à la lecture du rapport, qui est généralement regardé comme une simple formalité, et j'affirme que pas un seul mot de semblable n'a été prononcé dans tout le cours de ces discussions. J'ai donc tout lieu de croire que ce paragraphe du rapport de l'honorable membre ne peut être que le résultat d'une erreur ou l'expression de son opinion personnelle, ce qui me paraît beaucoup moins grave. Je pense que l'honorable rapporteur jugera utile de donner à cet égard quelques explications à la Chambre.

M. Van Iseghem, rapporteur. - Messieurs, les membres de la section centrale ont été régulièrement convoqués pour la lecture du rapport ; souvent, pendant- cette lecture, ou échange des observations qui sont ensuite consignées dans le rapport L'honorable M. H. Dumortier ne s'est pas rendu à la convocation. Trois membres seulement étaient présents : les honorables MM. Dolez, Lebeau et moi. Il y avait une majorité et une minorité ; je faisais partie de cette dernière ; il n'était sans doute pas irrégulier d'exprimer dans le rapport l'avis énoncé par la minorité sur la question de la marine militaire.

J'ai dit minorité au lieu de dire un membre, ne sachant pas quelle aurait été l'opinion de nos quatre collègues qui étaient absents.

D'ailleurs, si l'honorable M. H. Dumortier avait assisté à la séance, il aurait pu faire ses objections à l'insertion de la phrase, sur laquelle il a cru devoir appeler l'attention de la Chambre.

Pour le moment je ne dirai rien de la marine militaire proprement dite. Nous discuterons cette question si importante plus tard, quand M. le ministre des affaires étrangères nous soumettra le rapport dont il nous a parlé.

M. Dolez. - Messieurs, en ma qualité de président de la section centrale, je veux seulement faire remarquer que le fait énoncé dans le rapport de l'honorable M. Van Iseghem est parfaitement exact ; mais, comme le dit l'honorable M. H. Dumortier, la minorité se composait de l'honorable M. Van Iseghem seul.

- Personne ne demandant plus la parole, l'article 41 est mis aux voix et adopté.

Articles 42 et 43 (marine militaire, paquebots à vapeur, etc.)

« Art. 42. Vivres : fr. 88,600. »

- Adopté.


« Art. 43. Traitements des courriers et agents des paquebots à vapeur, faisant le service entre Ostende et Douvres : fr. 14,710. »

- Adopté.

Article 44 (passage d'eau)

« Art. 44. Personnel : fr. 12,690. »

- Adopté.

Articles 45 et 46 (police maritime)

« Art. 45. Personnel : fr. 30,295. »

- Adopté.


« Art. 46. Primes d'arrestation aux agents, vacations et remises aux experts, commis chargés de la surveillance de rembarquement des émigrants (crédit non limitatif) : fr. 4,000. »

- Adopté.

Articles 47 à 52 (matériel des divers services)

« Art. 47. Traitements des gardiens du matériel : fr. 2,120. »

- Adopté.


« Art. 48. Frais divers : fr. 352,500. »

- Adopté.


« Art. 49. Secours aux veuves et aux marins blessés, médicaments, etc. : fr. 4,060. »

- Adopté.


« Art. 50. Seconde et dernière partie du prix de la construction et de l'armement d'un bateau à vapeur, destiné aux stations du pilotage des bouches de l'Escaut et d'Ostende : fr. 160,060. »

- Adopté.


« Art. 51. Grosses réparations aux bateaux à vapeur Diamant et Rubis ; charge extraordinaire : fr. 60,000. »

- Adopté.


« Art. 52. Somme due à la ville d’Ostende, à titre de loyer, pendant les huit derniers mois de 1853, d'un local pour l'administration du pilotage ; charge extraordinaire : fr. 250. »

- Adopté.

Vote des articles et vote sur l’ensemble

M. le président. - Nous passons aux articles du projet.

« Art. 1er. Le budget du ministère des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1859, à la somme de deux millions six cent vingt-neuf mille cinquante-deux francs dix-huit centimes (fr. 2,629,052 18 c), conformément au tableau ci-annexé. »

- Adopté.


« Art. 2. Les fonds qui, à la clôture de l'exercice 1858, resteront disponibles sur l'article 31, ainsi que sur les sommes reportées des exercices antérieurs, pour être employées à titre d'encouragements de la navigation entre la Belgique et les ports étrangers, pourront être transférés à l'article 33 du budget de 1859. »

- Adopté.


(page 328) Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget.

Il est adopté à l'unanimité des 57 membres qui ont répondu à l'appel. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel : MM. Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tack, Tesch, Thierry, Thienpont, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Stichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Renynghe, Verwilghen, Allard, Coppieters T' Wallant, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Boe, Dechentinnes, De Fré, de Haerne, de Lexhy, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Smet, de Terbecq, Devaux, de Vrière, Dolez, H. Dumortier, d'Ursel, Frère-Orban, L. Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Lelièvre, Loos, Magherman, Manilius, Mascart, Neyt, Notelteirs, Orban, Pierre, Pirmez et Verhaegen.

Projet de loi accordant un crédit provisoire au budget du ministère des affaires étrangères

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, on vient de voter le budget des affaires étrangères, mais comme il n'est pas certain que le Sénat puisse le voter avant le 1er janvier, je demanderai à la Chambre de vouloir bien mettre à la disposition du gouvernement deux douzièmes de ce budget.

J'ai l'honneur à cet effet de présenter à la Chambre un projet de loi ainsi conçu :

« Article unique. Il est ouvert au ministère des affaires étrangères un crédit provisoire de 450 mille francs à valoir sur les dépenses de ce département pour l'exercice 1859. »

M. le président. - Il sera donné acte à M. le ministre des finances de la présentation du projet de loi dont il vient de donner lecture.

- Ce projet sera imprimé et distribué.

Je propose de le renvoyer à la section centrale qui a examiné le budget des affaires étrangères.

- Plusieurs voix : Il faut le voter d'urgence.

Un membre : C'est une fraction du budget que nous venons de voter ; nous pouvons déclarer l'urgence et voter le projet sans autre examen ; j'en fais la proposition.

- Plusieurs voix : Oui ! oui !

M. Vander Donckt. - Je demande la parole. Messieurs, il est dans les habitudes de la Chambre de prendre des vacances pour les fêtes de Noël ? Je propose de nous ajourner après la séance de demain jusqu'au 18 janvier à deux heures.

M. de Baillet-Latour. - Pourquoi pas à partir de ce soir ? Nous n'avons plus rien à l'ordre du jour que des pétitions. (Oui ! oui.')

- La proposition de M. Vander Donckt, modifiée par M. de Baillet, est mise aux voix et adoptée.

Vote de l’article unique

La Chambre décrète ensuite l'urgence et décide qu'il sera passé immédiatement au vote sur le projet présente par M. le ministre des finances.

Il est procédé au vote, par appel nominal, sur ce projet.

Il est adopté à l'unanimité des 58 membres présents ; il sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel : MM. Pirson, Prévinaire, Rogier, Sabatier, Saeyman, Tack, Tesch, Thiéfry, Thienpont, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Stichelen, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Renynghe, Allard, Coppieters t' Wallant, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Boe, Dechentinnes, De Fré, de Haerne, de Lexhy, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Smet, de Terbecq, Devaux, de Vrière, Dolez, H. Dumortier, d'Ursel, Frère-Orban, L. Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Lelièvre, Loos, Magherman, Manilius, Mascart, Muller, Neyt, Notelteirs, Orban, Pierre, Pirmez et Verhaegen.

Nomination de la délégation au roi

M. le président procède au tirage au sort des membres de la députation chargée de complimenter le Roi à l'occasion du jour de l'an. Les membres désignés sont : MM. Orban, E. Vandenpeereboom, C. de Brouckere, Van Leempoel, Thiéfry, Vervoort, Orts, J. Lebeau, Prévinaire, A. Goblet et de Ruddere de Te Lokeren.

- La Chambre s'ajourne au 18 janvier 1859.

La séance est levée à 5 heures et demie.