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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 4 février 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. Delehaye.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 651) M. Crombez procède à l'appel nominal à 1 heure et quart, et donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

Il présente l'analyse des pièces suivantes.

« Le sieur Deblauwe demande que les clercs de notaires qui peuvent justifier actuellement de 8 à 10 ans de stage soient dispensés de fournir la preuve d'avoir fait leurs humanités. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les jurys d'examen.


« Les membres de l'administration communale et des habitants de Deftinge demandent que la juridiction de tous les notaires s'étende à leur arrondissement judiciaire. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les juges de paix de l'arrondissement de Dinant demandent que les juges de paix soient assimilés, quant au traitement, aux juges de première instance. »

- Renvoi à la commission du projet de loi sur l'organisation judiciaire.

M. Thibaut. - A l'exemple d'honorables collègues, j'appelle sur cette pétition l'attention de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« Des gardes forestiers de la commune de Nismes prient la Chambre d'améliorer leur position. »

- Renvoi à la section centrale du projet de loi concernant un crédit pour augmenter les traitements des employés inférieurs de l'Etat.


« Des habitants de Warneton appellent l'attention de la Chambre sur la position que font à l'agriculture les droits sur les houilles et sur les fontes. »

« Mêmes observations d'habitants de Rossignol, Moersel, Hautain, Jamagne, Maeseyck, Brages et Wellin. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi portant révision du tarif des douanes.


« Des étudiants à l'université de Liège demandent qu'il leur soit permis de se présenter aux examens de la session de Pâques de cette année. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les jurys d'examen.

M. Lelièvre. - J'appuie la pétition, et j'espère qu'il y sera fait droit par l'insertion dans la loi d'une disposition transitoire.

Projet de loi sur les jurys d’examen universitaire

Discussion des articles

Titre premier. Des grades académiques et des jurys d'examen

Chapitre II. Des examens
Article 21

M. le président. - La parole est à M. de Theux, rapporteur de la section centrale.

M. de Theux. -Voici la rédaction que la section centrale a adoptée quant à la durée des examens :

« L'examen oral dure une heure pour un seul récipiendaire pour tous les grades de la faculté de droit, pour la candidature eu sciences naturelles et pour le grade de candidat notaire (la rédaction des actes non comprise).

« Les autres examens durent une heure et demie pour un seul récipiendaire, à l'exception de ceux de doctorat eu philosophie et lettres et en sciences dont la durée est de deux heures.

« S'il y a deux ou trois récipiendaires, l'examen dure trois heures.

« Le gouvernement détermine, en outre, le temps nécessaire aux épreuves pratiques prescrites par la loi et à la rédaction des actes pour les candidats notaires.

« La durée et la forme des épreuves préparatoires prévues par la présente loi, sont fixées par le gouvernement. »

M. le président. - M. le ministre adopte-t-il cette rédaction ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je demande à pouvoir l'examiner. J'avais aussi préparé une rédaction.

M. le président. - La rédaction proposée par la section centrale sera imprimée et distribuée. La Chambre pourra s'en occuper demain.

M. Delfosse. - M. le ministre de l'intérieur vient de dire qu'il avait aussi préparé une rédaction. Je demande qu'elle sou aussi imprimée pour que nous puissions comparer les deux rédactions.

M. le président. - La rédaction de la section centrale sera communiquée à M. le ministre. S'il ne l'admet pas, on pourra imprimer en même temps la proposition de la section centrale et celle du gouvernement.

Chapitre III. Des jurys d’examen
Article 28bis

M. le président. - La discussion continue sur l'article 28bis.

M. de Theux a proposé l'amendement suivant :

« Ajouter au paragraphe premier :

« Celui d'introduction historique au cours de droit civil, avec l'exposé des principes généraux du Code civil, comprend 3 heures par semaine, pendant l'année scolaire.

« Au paragraphe 6, deuxième partie, remplacer les mots : qui seront nécessaires par ceux-ci : qu'il jugera nécessaires. »

M. Verhaegen a proposé l'amendement suivant : « Rédiger le paragraphe premier comme il suit :

« Les certificats dont il est fait mention dans la présente loi, etc. »

M. Wasseige. - Messieurs, d'après l’amendement de l’honorable M. Verhaegen et les explications qui ont été données par l’honorable M. de Theux, rapporteur de la section centrale, il est bien entendu que l'article 28 bis concerne tous les certificats,, aussi bien ceux qui ont pour objet de constater que le récipiendaire a fait des études moyennes complètes, que le certificat de fréquentation, de certains cours universitaires qui cessent de faire partie des examens. Mais lorsque l'article 28bis a été rédigé, il y avait un jury central unique ; devant ce jury central devaient se présenter les récipiendaires qui ne pouvaient produite le certificat constatant qu'ils avaient fait des études moyennes complètes ; ce jury central est maintenant remplacé par des jurys combinés.

Je désirerais savoir ce qu'il en sera des élèves dont je viens de parler. (page 652) Devront-ils se présenter devant le jury central actuellement maintenu ? Y aura-t-il un jury, central spécial pour ces élèves ? Ce jury sera-t-il composé comme il l’était dans le premier projet du gouvernement et de la section centrale ? Ou bien ce jury sera-t-il semblable à celui qui fonctionne actuellement pour ce genre d'épreuves ?

Quant aux certificats, ils ne sont pas admis de plano, il faut qu'ils soient appréciés. Je demanderai également par quel jury les certificats constatant qu'on a fait des études moyennes complètes, seront appréciés.

Je crois que des explications catégoriques sont indispensables pour faire bien comprendre la portée de l'article, puisqu'il ne contient pas de dispositions formelles sur ces objets.

M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, depuis l'abolition du grade d'élève universitaire, il n'y a plus qu'un jury central et deux jurys combinés. Sous l'empire de ces dispositions, les récipiendaires pouvaient se présenter à leur choix, soit devant l'un des jurys combinés, soit devant le jury central ; eh bien, il continuera d'en être de même, si le gouvernement se borne à maintenir les jurys qui fonctionnent depuis l'abolition du grade d'élève universitaire ; si, au contraire, le gouvernement use de la faculté que la loi lui accorde d'établir un jury central pour l'épreuve préparatoire, c'est devant ce jury que les élèves dont a parlé l’honorable M. Wasseige auront à comparaître.

M. le président. - La section centrale s'est occupée de l'examen de l'amendement de M. Verhaegen ; elle s'est ralliée à cet amendement.

M. Verhaegen. - Messieurs, si j'ai bien compris, nous sommes d'accord sur ce qui faisait l'objet de mon amendement. La section centrale admet que la disposition s'applique à tous les certificats dont il est question dans la loi. Il y aura donc lieu à changer la rédaction, ainsi que je le demande par mon amendement, en disant: « les certificats dont il est fait mention dans la présente loi. »

Restent maintenant les autres observations que j'ai eu l'honneur de soumettre à la Chambre et sur lesquelles je désire encore fixer pendant quelques instants l'attention de mes honorables collègues.

La détermination de la durée obligatoire des cours ne me semble pas admissible ; elle contrarie évidemment la liberté d'enseignement telle que vous l'entendez, et on aura beau venir me dire que mes observations se rattachent à des cas extraordinaires, et de minimis non curat prœtor, je dis, moi, que tout au contraire, il s'agit ici d'un objet principal et non pas d'un objet accessoire.

Il s'agit de savoir si les études privées sont mises sur la même ligne que les études que l'on fait soit dans les universités de l'Etat, soit dans les universités libres. Eh bien, messieurs, il est impossible d'exécuter la disposition comme on vous la présente, sans froisser la liberté d'enseignement.

Un particulier qui n'aura aucune qualité officielle aura donné des cours d'humanités, il les aura donnés à sa manière, comme il l'entend ; nous n'avons pas à nous enquérir de sa méthode, à lui demander comment il a fait passer dans l'intelligence de son élève les principes qui font l'objet de son enseignement ; nous ne pouvons pas agir ainsi, parce que l'article 7, que nous avons voté y forme obstacle.

Il serait d'ailleurs assez difficile, pour ne pas dire plus, qu'un père ou un frère viennent déclarer dans un certificat : Mon fils, mon frère a suivi un cours que je lui ai donné ; ce cours s'est composé d'autant d'heures. Cela ne suffirait même pas, car il faut joindre au certificat un programme. Je ne suis comment il serait possible d'exécuter cette disposition à l’enseignement prive proprement dit. Qu'on ne me réponde pas par cet axiome : De minimis non curat prœtor. Car c'est une question principale que celle qui touche à la liberté d'enseignement. Si à des objections sérieuses, on répond de cette manière quand on est embarrassé, je ne pense pas que la Chambre puisse se contenter de cela.

Il ne s'agit pas seulement de cet enseignement privé que peut donner un père, un frère, un tuteur, un ami, un protecteur à un jeune homme ; il s'agit aussi de l'enseignement donné par nos universités libres.

Avez-vous le droit avec le principe de la liberté d'enseignement, alors que l'on proclame bien haut qu'on ne peut pas reconnaître officiellement ces établissements, avez-vous, dis-je, le droit de régler le programme, le nombre d'heures dont doit se composer un cours de ces universités, de vous ingérer dans la méthode des professeurs ?

Un professeur donne un cours en autant d'heures, tandis que tel autre professeur donne le même cours en un nombre d'heures double ou triple et n'obtient pas le même résultat. C'est là évidemment vous occuper de la méthode du professeur, il n'est pas permis d'agir ainsi ; il me semble qu'il y a contradiction entre cette idée, émise surtout par mes amis, que les établissements libres ne peuvent pas être reconnus officiellement dans la loi ; vous ne pouvez pas leur opposer une obligation quelconque de donner leurs cours de telle manière, d'avoir un programme connue on l'entendra, cela est contraire à la liberté d'enseignement.

J'ai l’honneur de fixer l'attention de la Chambre sur ce point.

Quant au paragraphe 3, il me semble parfaitement inutile. Il a pour premier inconvénient d'établir une classification des certificats d'après leur origine, ce qui est condamné par l'article 7, déjà voté. « S'il s'agit d'un cours donné dans un établissement d'instruction supérieure ou moyenne, le certificat sera visé par le chef de l'établissement. » Ainsi ce paragraphe a l'inconvénient d'introduire dans la loi des établissements qu'on n'a pas voulu y admettre quand il s'est agi de constituer le jury ; on a dit alors : Vous ne pouvez pas nommer ces établissements dans la loi parce que ce serait leur donner une existence légale. L'honorable rapporteur de la section centrale doit se le rappeler. Maintenant, ces établissements qu'on n'a pas voulu reconnaître légalement en les mentionnant dans la loi, quand il s'agissait de la constitution du jury, on vient leur donner des attributions en faisant viser les certificats par les chefs de ces établissements.

La chose ne me paraît pas possible. La loi ne connaît pas d'établissements ni de chefs d'établissements privés ; elle ne connaît que des individualités. Faire viser les certificats par les chefs d'établissements,, ce serait reconnaître implicitement les établissements, et vous ne l'avez pas voulu.

Le paragraphe 6 porte :

« Dans tous les cas, le récipiendaire peut remplacer la preuve de fréquentation d'un cours par un examen sommaire sur la même matière, sauf à en donner avis préalable au gouvernement dans le délai qui sera ultérieurement fixé. »

Je demanderai quand et par qui ce délai sera fixé.

M. de Theux, rapporteur. - Par le gouvernement.

M. Verhaegen. - Il faudrait le dire. Ce sera donc par le gouvernement ; mais quand ? Ne serait il pas convenable de dire, par exemple : « en prenant son inscription » ? Il faut bien que l'on sache à quoi s'en tenir.

Le paragraphe 7 et dernier me semble également inutile. Dans tous les cas, la durée qu'il détermine est aussi longue que celle qui est accordée à certaines matières d'examen. Pour le doctorat en philosophie, par exemple, chaque matière n'a que 10 minutes et d'après ce dernier paragraphe on donne 10 minutes à l'examen sommaire. Il me semble que c'est encore là une contradiction et qu'il faudrait chercher à coordonner le système.

Si on faisait droit à ces diverses observations on pourrait rédiger l'article 28 bis de la manière suivante :

» Les certificats dont il est fait mention dans la présente loi indiquent les noms, prénoms, demeure et qualités de ceux qui les délivrent ; ils sont soumis à la légalisation de l'autorité locale.

« Les certificats sont accompagnés du programme des leçons dont la fréquentation est attestée.

« Si les certificats ne sont pas en règle, ou ne paraissent pas présenter un caractère suffisant de sincérité, le jury ajourne l'examen, à moins que le récipiendaire ne se soumette à subir immédiatement un examen sommaire sur chaque matière dont la fréquentation n'a pas été établie.

« Dans tous les cas, le récipiendaire peut remplacer la preuve de fréquentation d'un cours par un examen sommaire sur la même matière, sauf à en donner avis au gouvernement, en prenant son inscription. Le gouvernement organisera pour ces examens les jurys qui seront nécessaires, en se conformant aux règles établies par la présente loi. »

M. de Theux, rapporteur. - L'honorable préopinant semble trouver une espèce d'inconstitutionnalité dans ce que le premier paragraphe de l'article 28bis détermine la durée minimum des cours à certificats. Pour moi, messieurs, je n'en ai pas vu. En effet, de quoi est-il question ? C'est d'accorder aux établissements dont il s'agit une faculté dont ils peuvent user ou ne pas user. Les établissements qui ne voudront pas délivrer de certificats sont libres de ne pas en délivrer, et dans ce cas ils n'ont rien à faire avec l'article 28 bis ; mais alors les élèves de ces établissements subiront un examen complet sur toutes les parties de l'enseignement. Nous n'imposons donc rien aux établissements, mais nous leur accordons une faculté dont je crois qu'ils s'empresseront de profiter.

M. Verhaegen. - Ils ne sont pas sur la même ligne que les autres.

M. de Theux. - Ils sont tous sur la même ligue. Remarquez bien, messieurs, que nous n'imposons aucune charge à un établissement quelconque, car ce que nous disons dans la loi est. précisément ce qui se pratique dans tous les établissements.

Nous avons pris pour base le minimum de la durée des cours. D'ailleurs, le professeur est libre de répartir ses leçons comme il le trouve convenable.

Nous ne lui demandons qu'un nombre d'heures déterminé pour chaque cours. Sans cette garantie, nous ne pourrions pas admettre le système des certificats, car il suffirait de donner, par exemple, une seule leçon pour un cours, et de dire que l'élève a fréquenté le cours pendant cette heure. Ce serait une dérision que le législateur ne peut pas admettre.

L'honorable membre trouve qu'il y a une différence entre les certificats à donner par les établissements publics et les certificats à donner par des professeurs tout à fait privés, par exemple, par un père de famille ou par un professeur qui n'a qu'un élève.

Eh bien, ce professeur n'a certainement pas de programme comme établissement public, mais rien ne l'empêche de certifier qu'il enseigne telle partie de la science et pendant autant d'heures. C'est une déclaration de véracité qu'on lui demande, et s'il donne une déclaration fausse, ce qui peut être assez facilement arbitré, on ne tiendra pas compte de ces certificats. C'est pour cela qu'on a dû laisser une grande liberté d'appréciation, au jury.

(page 653) On dit que c'est reconnaître officiellement l'existence des établissements libres que d'admettre les certificats délivrés par les professeurs et visés par les chefs de ces établissements.

Il n'y a pas plus de reconnaissance là-dedans que dans la proposition de M. de Brouckere, sous-amendée par M. Devaux, que nous avons votée dernièrement. C'est un fait : ces établissements existent. Restera à voir si ceux qui ont signé y sont l'un professeur et l'autre chef. Il n'y a là aucune espèce de reconnaissance.

Maintenant qu'il soit utile de faire contrôler les certificats donnés par le professeur d'un établissement, par le chef même de l'établissement, cela est incontestable. Ce certificat ainsi donné aura par lui-même une sorte de caractère d'authenticité que le jury probablement ne méconnaîtra dans aucune circonstance. Quant aux professeurs tout à fait privés, il est certain que là où il n'y a pas de supérieur, de chef d'établissement, les investigations du jury pourront être plus sérieuses, à moins que ce ne soit une personne parfaitement connue, d'un caractère honorable, dont le certificat s'accepte sans difficulté. Je pense donc qu'il n'y a pas d'objection sérieuse contre la proposition de la section centrale.

M. Lelièvre. - Messieurs, je me permettrai quelques observations en réponse à celles de l'honorable M. Verhaegen.

Il est impossible d'entrer dans tous les détails du système que consacre l'article en discussion.

Il faut nécessairement abandonner à l'exécution les diverses circonstances qui peuvent se présenter, circonstances que le jury appréciera, comme un juge décide une question de fait. Remarquez que, quand il s'agit d'études privées, nous admettons les certificats délivrés par les simples particuliers ; mais naturellement le jury devra examiner quelle confiance mérite le document produit et notamment si la personne qui l'a délivré était à même de donner les cours sur lesquels portent les certificats. Ce sont là des appréciations de fait qui varient selon les circonstances et dont la loi ne peut s'occuper.

Je ne pense pas, du reste, que l'article en discussion porte atteinte à la liberté de l'enseignement. Nous n'imposons aucun programme à qui que ce soit. Ce n'est qu'au point de vue des certificats qui doivent être produits par l'élève que nous exigeons qu'il soit justifié que les cours ont en telle et telle étendue. Du reste, nous ne portons pas davantage atteinte à la liberté de l'élève qui, au lieu de produire des certificats, est libre de subir un examen sur les matières à l'égard desquelles il ne trouve pas convenable de faire quelque justification.

Du reste, la rédaction de l'article 28 bis ne légalise en aucune manière les institutions libres, puisque nous n'assimilons les chefs et les professeurs de ces établissements qu'à des personnes privées ; les certificats délivrés par eux n'ont pas une autorité plus grande que semblables documents émanés de particuliers que notre article place sur la même ligne de faveur.

La disposition dont nous nous occupons n'a rien de commun avec la rédaction de l'amendement de M. de La Coste que nous avons combattue. Là il s'agissait réellement d'accorder de par la loi aux établissements libres le droit d'être représentés dans le jury d'examen.

En ce qui concerne le paragraphe 5 de l'article en discussion, je dois faire remarquer qu'il est impossible de fixer l'époque à laquelle le jury doit ajourner l'examen. Si des certificats ne sont pas produits, l'élève est ajourné jusqu'à la production de pièces régulières, à moins qu'il ne se déclare prêt à subir l'examen sur les matières à l'égard desquelles le certificat devait être produit. L'ajournement est donc indéfini jusqu'à ce que l'élève satisfasse à la loi.

Je pense que notre disposition satisfait à toutes les exigences et qu'elle est la conséquence nécessaire du système des certificats qui a été admis par la Chambre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, j'avais demandé dans la séance d'hier si l'article 28bis s'applique également aux certificats qui doivent remplacer l'ancien examen pour le grade d'élève universitaire.

On m'a répondu que oui, et, pour rendre la chose plus claire, l'honorable M. Verhaegen a proposé de rédiger la premier paragraphe comme suit :

« Les certificats dont il est fait mention dans la présente loi. »

Messieurs, il me semble que la même disposition ne saurait s'appliquer aux deux espèces de certificats.

Le certificat que l'on exige pour remplacer l'examen d'élève universitaire est un certificat général portant sur l'ensemble des études d'humanités, la rhétorique comprise. C'est un certificat qui prouve que l'élève a achevé ses humanités. Au contraire, le certificat que l'on doit produire pour remplacer l'examen de matières universitaires porte seulement sur telle ou telle matière déterminée.

Il y a donc là une différence essentielle. Cette différence se fait mieux sentir encore lorsqu'il s'agit de voir par quoi il faut remplacer les certificats, lorsqu'ils ne sont pas jugés suffisants. Ainsi, d'après la disposition qu'on nous propose de voter, quand le certificat pour les matières universitaires ne sera pas trouvé en règle, il faudra que l'élève subisse un examen sommaire sur ces matières.

Mais il n'y a pas lieu d'imposer un examen sommaire pour l'élève terminant son cours d'humanités dont le certificat n'est pas trouvé en règle : pour lui, il y a toute une épreuve préparatoire à subir.

La disposition actuelle, telle qu'elle est rédigée, ne peut donc s'appliquer aux deux genres de certificats. C'est pour ce motif que j'avais proposé d'ajouter une disposition finale, pour dire que les dispositions du présent article, mais seulement en ce qui concerne, la forme à donner aux certificats et à la manière de les apprécier, s'appliquent aussi aux certificats dont il est parlé à l'article 2.

Pour le reste, en effet, la dissemblance est complète, et il est impossible que la disposition s'applique aux deux genres de certificats.

Messieurs, je rencontrerai maintenant quelques observations qui ont été faites par l'honorable M. Verhaegen.

Je ne pense pas non plus que la disposition que l’on nous propose de voter relativement, à la durée de certains cours, porte atteinte à la liberté d'enseignement. Cependant, je ne vois pas trop pourquoi cette disposition est nécessaire ; si l'élève produit le programme de l'établissement dont il a fréquenté les cours, il me semble que nous avons les mêmes garanties.

Je ne sais donc pas pourquoi on voudrait s'exposer à gêner l’organisation de l'enseignement dans les établissements libres. Si vous avez foi dans les certificats des professeurs constatant que l'élève a suivi tel cours pendant tant de jours et de semaines, pourquoi ne pas avoir la même confiance dans le programme qui règle le cours des universités ?

M. Devaux. - Et si l'on donne, dans une université, un cours de trois mois au lieu d'un cours d'un an ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Le jury dira qu'il n'y a pas preuve de connaissances suffisantes et l'élève devra subir un examen sommaire.

Mais si un établissement libre produit un programme, que dans ce programme vous ayez l'indication officielle de la durée de chaque cours, que cette durée soit convenable et qu'il n'y ait pas lieu de douter de l'exécution de ce programme, le jury peut se contenter de l'exécution de ce programme. Si, au contraire, ce programme est tel que le jury croie que l'instruction n'est pas suffisante, alors le jury a droit de demander un examen sommaire sur telle ou telle matière.

L'honorable M. Wasseige a demandé comment serait composé le jury devant lequel le récipiendaire, qui ne pourra pas produire un certificat d'études moyennes complètes, devra subir l'épreuve préparatoire. Ce cas sera très exceptionnel. Je ne vois pas qu'il y ait lieu de constituera cette fin un jury spécial ; on pourra sans inconvénient charger le jury de la candidature en philosophie et lettres de l'examen de ces quelques élèves qui auront à subir l'épreuve préparatoire.

M. Verhaegen. - Messieurs, à en croire les honorables MM. de Theux et Lelièvre, il ne s'agirait ici que de mesures d'exécution ; dans les observations que j'ai faites, il s'agit d'une question de principe. Si vous admettez un principe, il faut en admettre les conséquences. Voulez-vous que je vous dise où vous marchez avec la disposition telle qu'elle est présentée ? Vous donnez crédit aux certificats à délivrer par les établissements. Eh bien, je déclare très impartialement, car on sait que je porte intérêt à certain établissement, je déclare que le jury n'admettra plus que les certificats qui seront délivrés par les professeurs des universités de l'Etat et des deux universités libres.

M. le ministre de l'intérieur pense que, comme il y a une différence entre l'examen universitaire et l'épreuve préparatoire qui remplace l'examen d'élève universitaire, il pourrait changer la rédaction. Dans mon amendement, je n'ai posé qu'une question de principe. Le principe semble être adopté ; il faut donc bien, par une rédaction nouvelle, coordonner ce principe avec le projet ; sur ce point, je suis d'accord avec M. le ministre de l'intérieur. On pourrait dire dans un paragraphe additionnel :

« Dans tous les cas, le récipiendaire peut remplacer la preuve de fréquentation, savoir d'un cours universitaire, par un examen sommaire sur la même matière, et d'un cours d'humanités, y compris la rhétorique, par une épreuve préparatoire. »

M. Devaux. - Messieurs, je crois qu'il y a ici une espèce de malentendu. Je ne me rends pas bien compte des objections de M. le ministre de l'intérieur ; peut-être ne les ai-je pas bien comprises. Il me paraît difficile de ne pas déterminer dans la loi l'étendue des cours. Car que sera-ce qu'un cours ? Vous avez mis parmi les matières à certificat, le cours des éléments de droit civil, eh bien, si on donne six semaines aux éléments du droit civil, sera-ce le cours que vous voulez ?

Je sais que le jury peut ne pas admettre le certificat ; mais n'est-il pas utile de donner une règle aux études privées ? Ce n'est pas un maximum qu'on indique, mais un minimum. Je pense que l'enseignement privé sera moins libre si on supprime la disposition que si on ne la supprime pas ; ces exigences de la loi sont calculées sur le minimum de tout ce qui se passe aujourd'hui dans les établissements universitaires.

Il y a des cours qui ont une étendue différente dans les divers établissements ; on a pris pour règle l'étendue la moindre, en sorte qu'aucun établissement ne sera gêné.

Je répondrai à l'honorable M. Verhaegen que toutes les objections qu'il a faites à la disposition, en ce sens qu'elle gênerait la liberté, il a eu tort de ne pas les faire en 1849.

Depuis longtemps, il y a des dispositions concernant les examens, qui fixent l'étendue des cours ; je citerai le droit civil et les pandectes. Il y a plus, pour les pandectes même, on fixe d'avance la partie des pandectes sur laquelle les récipiendaires seront interrogés l'année suivante.

(page 654) Personne n'a jamais songé à voir là une atteinte à la liberté de l'enseignement.

On a été même plus loin ; de l'assentiment de toutes les universités représentées par des commissaires qui se sont entendus à cet effet, le gouvernement a décidé où commencerait tel cours, où s'arrêterait tel autre ; à quelles parties du Code on s'attacherait de préférence, quelles autres on négligerait.

Si je ne me, trompe, c'est en 1850 ou en 1851 que se sont réunies deux commissions, composées de professeurs des quatre universités qui ont arrêté pour certains cours de semblables dispositions que le gouvernement a approuvées.

L'honorable M. Verhaegen est dans l'erreur, quand il suppose qu'on exige autant pour un examen sommaire que pour un examen principal. L'examen principal dans le cas qu'il a cité ne porte que sur quatre matières ; il dure par conséquent moitié plus sur chacune d'elles que l'examen sommaire.

Quant à la fixation de la durée des cours, il régnera une très grande incertitude dans l'enseignement privé et même dans l'enseignement universitaire, si la loi ne la détermine pas. Il pourra arriver que dans une université libre, tel cours sérieux aujourd'hui arrive peu à peu à n'en être plus que le simulacre, parce qu'on l'aura peu à peu réduit à des limites trop étroites.

Je le répète, la loi se règle d'après les usages établis depuis des années dans les universités et reste au-dessous. On ne force aucun de ces établissements à augmenter ses cours existants. Il est beaucoup plus prudent d'établir une règle certaine et fixe dans la loi même.

M. de Theux. - M. le ministre de l'intérieur a demandé quelques explications sur l'article que nous discutons.

Il est évident que le certificat des études d'humanités doit être un certificat d'ensemble, d'avoir étudié les humanités d'une manière complète jusqu'à la rhétorique inclusivement ; à défaut de ce certificat l'élève subit une épreuve préparatoire.

Mais ce certificat peut être divisé ; si l'élève a fait ses études dans deux établissements, le certificat du premier établissement est valable pour la première partie des études qui y a été faite et il est complété par celui de l'autre établissement où l'élève a achevé ses humanités ; il n'est pas nécessaire que le certificat soit donné par un seul et même établissement.

Il est vrai que les dispositions de l'article 28bis ne peuvent pas s'appliquer toutes aux deux catégories d'examen, mais il nous a semblé qu'il serait très facile au gouvernement et au jury de distinguer dans cet article les dispositions communes aux deux examens de celles qui sont spéciales à chacun d'eux. Il suffit de lire l'article pour voir quelles sont les dispositions communes.

« Les certificats dont il est fait mention aux articles 8 bis et suivants de la présente loi, indiquent les noms, prénoms, demeure et qualités de qui les délivreront ; le programme de renseignement est eu outre communiqué au jury. »

Voilà évidemment une disposition commune :

« S'il s'agit d'un cours donné dans un établissement d'instruction supérieure ou moyenne, le certificat sera visé par le chef de l'établissement.

« Les certificats émanant de toute autre personne seront soumis à la légalisation de l'autorité locale. »

Voilà encore deux dispositions communes.

Les autres dispositions sont spéciales aux cours universitaires. L'honorable ministre de l'intérieur a demandé s'il ne suffirait pas de prescrire la communication du programme des cours, sans fixer la durée minimum de l'enseignement.

Je pense qu'il est nécessaire que le certificat mentionne que tels cours ont été donnés pendant tant de temps.

Je pense que les dispositions sont bonnes, seulement elles pourraient être autrement classées.

Il est facile de distinguer les dispositions communes aux deux examens de celles qui ne le sont pas, et d'ici au second vote, puisque c’est un amendement la section centrale pourra présenter une meilleure classification, pour que toute espèce d'ambiguïté disparaisse, quoique je sois persuadé que, dans la pratique, cela ne présenterait pas la moindre difficulté.

M. Orts. - Puisque la disposition dont il s'agit doit être soumise à un examen ultérieur de la section centrale, je demanderai la permission de soumettre à M. le rapporteur quelques questions pratiques, quelques difficultés qui n'ont pas été prévues et sur lesquelles il serait bon qu'on se mît d'accord.

Je demanderai ce qu'on entend par le chef d'un établissement, chargé de contresigner les certificats.

Dans les universités est-ce l'administrateur inspecteur ou le recteur qui devra remplir cette mission et attester que tes cours déterminés ont été régulièrement données et suivis par l'élève porteur du certificat ?

Dans les universités libres et dans les universités de l'Etat, il y a deux autorités ayant chacune la police et la surveillance de l'établissement. Il faut qu'on tranche la question, à savoir laquelle de ces autorités doit contresigner les certificats ; si l'on remettait cette appréciation au jury, un jour un jury déciderait que le certificat doit être signé par l'administrateur inspecteur, et un autre jury décidera qu'ils doivent être délivrés sous le contreseing du recteur. Pareille divergence exposerait l'élève à un ajournement.

Je demanderai ensuite à quelle époque doit être faite par l'élève la preuve que les certificats qu'il produit sont suffisants. Pour le certificat relatif à la fréquentation des cours d'enseignement moyen, la justification devra-t-elle, par exemple, être faite dès l'entrée à l'université ou bien quand, après une ou deux années d'études à l'université, l'élève se présentera devant le jury pour subir l'examen de la candidature ? S'il faut résoudre la question dans ce dernier sens, voici le danger.

Une simple irrégularité de forme, l'oubli de faire légaliser son certificat par le bourgmestre, exposera le récipiendaire à perdre deux années d'études ou tout au moins à un ajournement à l'année suivante pour passer son examen.

Aujourd'hui les justifications analogues se font au moment où l'élève sa présente à l'examen devant le jury. Pour le doctorat, par exemple, l'élève exhibe son diplôme de candidat au moment où l'examen par écrit va commencer. L'examen par écrit est supprimé, ce sera donc au moment de subir l'examen oral que le certificat serait produit, conformément à ces précédents. Est-ce là le système ? En ce cas, voici l'inconvénient assez grave qui peut en résulter. Un jeune homme se présente ; sur le refus de son certificat irrégulier ou insuffisant, il demande à passer un examen sommaire pour y suppléer. Mais le jury ne sera pas composé pour cette mission.

Il sera impossible de procéder immédiatement à l'examen sommaire. Faudra-t-il renvoyer encore l'élève à l'année suivante, et lui faire perdre une année d'étude ?

Je conçois qu'à défaut de justification de capacité on renvoie un jeune homme à l'université pour refaire son instruction incomplète. Mais pour une erreur de forme dans son certificat et lorsqu'il offre de subir un examen, il me semble dur de lui faire perdre une année d'études. Je dis que le jury devant lequel il se présentera sera impuissant à lui faire passer un examen immédiat. Et je vais le prouver. Je reprends pour exemple le jury pour la candidature en droit.

L'élève porteur des certificats exigés par la loi se présente ; le jury trouve le certificat irrégulier ; qui trouvera-t-il dans son sein pour l'examiner sur l'histoire du droit français, l'exposé du Code civil, le droit naturel, l'histoire politique ? Quatre professeurs de droit romain et un président qui seraient évidemment fort embarrassés pour lui faire subir un examen sérieux, quoique sommaire, sur ces diverses matières.

Faut-il renvoyer au jury spécial dont parle le paragraphe final de l'article 28 bis ? Ce jury n'existera peut-être pas. Le gouvernement ne doit le composer que si des élèves l'ont averti à l'avance que, faute de certificats, ils entendent passer un examen. Pareil avertissement n'aura pas été donné à l'avance, avant l'ouverture de la session par celui qui, muni de certificats, n'a pu ni dû prévoir que ses certificats étaient irréguliers et ne le saura que quand il sera sur le point de passer son examen oral, c'est-à-dire plus tard.

Voilà des difficultés sérieuses. Je les signale. Je ne propose pas d'amendement. Déterminé à voter contre la loi, je ne veux avoir aucune solidarité dans sa rédaction.

M. de Theux. - L'honorable membre demande qu'on détermine qui sera considéré comme chef d'établissement ; nous n'avons pas pu le faire, car l'administration est différemment composée et dans les universités et dans les établissements d'enseignement moyen ; nous n'avons, pas pu déterminer cela à priori dans la loi. Le gouvernement décidera si c'est l'administrateur inspecteur ou le recteur qui pour les universités de l'Etat devra signer les certificats.

Quant aux universités libres, elles auront à faire connaître au gouvernement quel est le chef de l'établissement, quel est celui qui doit donner le visa.

Cette communication sera transmise par le gouvernement aux jurys. Je pense donc que cela ne présentera aucune difficulté.

L'honorable membre demande à quelle époque la justification de -certificats devra être faite par l'élève. Il est évident que, généralement parlant, ce sera au moment où l'élève se présentera pour aborder les études de l’enseignement supérieur. Ce doit être ainsi, puisqu'il doit y avoir un an d'intervalle entre l'épreuve préparatoire à laquelle il serait soumis et l'examen pour la candidature.

Il est donc évident que l'élève qui voudra commencer des études supérieures, devra le plus tôt possible présenter ses certificats au jury qui sera chargé de les apprécier, soit un jury spécial si le gouvernement en institue un, soit les jurys établis par la loi.

Le jury prononcera alors sur l'admission des certificats et procédera à l'examen de l'élève dont les certificats ne seront pas admis. Si l'élève n'a pas de certificats ou s'il désire suivre des cours de l'enseignement supérieur avant de subir l'épreuve préparatoire, il attendra quelque temps avant de se présenter devant le jury.

Il est évident que c'est au commencement de la session du jury que l'élève devra présenter ses certificats pour qu'il ait le temps de les faire régulariser s'ils ne sont pas trouvés en règle, et pour subir l'épreuve préparatoire s'ils ne sont pas admis.

M. Lelièvre. - Les difficultés signalées par l'honorable M. Orts doivent, à mon avis, faire l'objet de dispositions qui devront être prises par le gouvernement pour l'exécution de la loi. La loi ne peut pas (page 655) s'occuper d'une foule de détails qui devront être arrêtés par le pouvoir exécutif.

Je pense donc que les questions soulevées par l'honorable M. Orts, comme plusieurs autres, tiennent à l'exécution delà loi et que des dispositions réglementaires sont nécessaires pour régler convenablement les divers points de détails dont la loi ne peut pas s'occuper.

M. Orts. - Je comprends que la première observation peut être considérée comme se rattachant à un objet devant être réglé au moyen de mesures administratives. Mais il n'en est pas de même de mon observation sur le point de savoir à quel moment l'élève devra justifier, quant à l'enseignement moyen, qu'il a satisfait aux exigences de la loi pour se présenter aux examens.

L'honorable M. de Theux a donné une solution que je crois très bonne. D'après lui, le jury de la candidature en philosophie et lettres devra examiner les certificats que présentera l'élève de l'enseignement moyen au moment de son entrée à l'université, sans avoir l'intention encore de passer d'examen.

Or, c'est une attribution nouvelle que vous donnez aux jurys. Jusqu'à présent les jurys n'étaient institués que pour examiner. Mais ils ne devaient pas apprécier séparément des certificats. Ils étaient bureaux de contrôle : vous en faites des bureaux d'enregistrement.

M. de Theux, rapporteur. - Ils doivent aussi apprécier les certificats.

M. Orts. - Oui, ils sont chargés d'apprécier et d'enregistrer les certificats simultanément et, si vous voulez leur permettre de séparer en deux cette appréciation, vous devez leur donner cette mission par la loi ; jusqu'à présent, ils ne l'avaient pas. Le jury appréciait les certificats quand il examinait ; mais il ne les appréciait pas quand il n'examinait pas. Il faut donc que ce soit dit dans la loi. C'est une compétence nouvelle que vous créez.

- La discussion est close.

L'amendement de M. Verhaegen est mis aux voix, il n'est pas adopté.

M. le président. - La Chambre a maintenant à statuer sur l'article 28bis avec l'amendement de M. Verhaegen, auquel la section centrale se rallie et qui consiste à commencer l'article par ces mots : « Les certificats dont il est fait mention dans la présente loi » et avec les deux modifications ci-après proposées par la section centrale :

« Ajouter au paragraphe premier :

« Celui d'introduction historique au cours de droit civil, avec l'exposé des principes généraux du Code civil, comprend 3 heures par semaine, pendant l'année scolaire.

« Au paragraphe 6, deuxième partie, remplacer les mots : qui seront nécessaires par ceux-ci : qu'il jugera nécessaires. »

M. Orts. - J'appelle l'attention de la Chambre sur une contradiction entre cette disposition et une autre qui a été votée précédemment et qu'on a perdue de vue.

L'honorable M. de Theux propose d'indiquer un temps plus long pour l'enseignement de l'introduction historique au cours de droit civil et de l'exposé des principes généraux du Code civil. Mais l'honorable membre a perdu de vue que d'après l'amendement de l'honorable M. Malou déjà adopté, l'introduction historique au cours de droit civil est comprise dans le cours d'encyclopédie du droit qui doit durer trente heures ou trois heures par semaine, pendant un quart d'année scolaire seulement. Il y a là contradiction et je la signale.

M. le président. - La discussion est close. On pourrait faire cette observation au second vote.

M. de Theux, rapporteur. - Je crois qu'il vaut mieux résoudre de suite cette difficulté.

M. le président. - S'il n'y a pas d'opposition, je donnerai la parole à M. de Theux. (Adhésion.)

M. de Theux, rapporteur. - J'ai présenté cette rédaction, parce que l'honorable M. Malou avait proposé de joindre l'introduction historique au cours de droit civil, à l'encyclopédie, dans la pensée que le cours élémentaire de droit civil serait supprimé ; mais l'honorable membre a déclaré que par suite du vote de la Chambre, son amendement de jonction de l'introduction historique au cours de droit civil, à l'encyclopédie venait à tomber. C'est par suite du maintien du droit civil élémentaire comme cours à certificat que j'ai rédigé ainsi ma proposition.

- L'article 28bis, tel qu'il vient d'être modifié, est adopté.

Article 29

L'article 29 a été voté dans la séance d'hier.

Article 30

« Art. 30. Les membres du jury n'ont droit qu'au produit des frais d'examen payés par les récipiendaires.

« La répartition en est faite entre les membres des jurys suivant le anode à déterminer par le gouvernement.

« Les membres du jury qui ne résident pas dans la capitale reçoivent, en outre, à charge du trésor, dix francs par jour de séjour et une indemnité de déplacement de 50 centimes par lieue sur les voies ferrées, et de 75 centimes par lieue sur les routes ordinaires. »

La section centrale propose la rédaction suivante :

« Art. 30. Les présidents du jury reçoivent par jour, pour les indemnités de vacations et de séjour, 24 francs, et les autres membres 18 francs, lorsque le jury examine 6 récipiendaires par jour ; les indemnités sont réduites à 20 et à 15 francs, lorsqu'il n'examine que 5 récipiendaires, el à 16 et 12 francs, lorsqu'il n'en examine que 4 ou moins.

« Les présidents et membres qui ne résident pas au siège du jury reçoivent, en outre, une indemnité de déplacement de 50 centimes par lieue sur les voies ferrées, et de 75 centimes par lieue sur les routes ordinaires.

« Le secrétaire reçoit 5 francs par jour. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Par suite des vote émis précédemment sur d'autres articles, il sera nécessaire de modifier la rédaction de l'article 30 tel qu'il est proposé par la section centrale.

La section centrale propose de proportionner l'indemnité des présidents et des membres des jurys au nombre des récipiendaires examinés chaque jour. Ces bases pouvaient être admises alors que les examens étaient uniformément d'une heure ou d'une heure et demie. Mais maintenant que probablement la Chambre décidera qu'il y aura une durée différente pour ces divers examens, il faudra prendre, pour fixer la rétribution des membres des jurys, une base différente. Il faudra prendre pour base le nombre d'heures consacrées à la séance de chaque jour.

J'aurai un autre changement à proposer à la rédaction de la section centrale. La section centrale n'alloue plus de frais de séjour. Je pense qu'il est convenable, qu'il est décent que la Chambre maintienne cette indemnité de frais de séjour pour les dépenses faites par les membres du jury siégeant dans une ville étrangère.

Quant aux frais de route, ils avaient été jusqu'à présent, je l'avoue, alloués d'une façon telle, que les membres des jurys étaient indirectement assimilés à la dernière classe des employés.

L'honorable M. Verhaegen a même fait de cette disposition l'objet de quelques observations critiques, et je crois qu'il y a lieu de faire droit à ces observations.

Je dois, en passant, un mot d'explication à cet égard pour justifier l'administration.

Voici comment, jusqu'à présent, on réglait les frais d'indemnité pour les membres des jurys.

L'article 58 de la loi de 1849 dispose que les membres des jurys n'ont droit qu'au produit des frais d'examen payés par les récipiendaires. Immédiatement après la mise en vigueur de la loi de 1849, voici comment on exécuta cet article de la loi. On commençait par défalquer toutes les dépenses fixes : indemnité du président, indemnité de 5 fr. pour le secrétaire, frais de route ; et ces frais de route étaient calculés sur le pied du remboursement des frais réellement faits par les membres. De sorte qu'on avait pris pour règle les chiffres de la dernière classe du tarif. On voulait ainsi réserver, pour le fonds commun à distribuer pour indemnité de présence, la plus grande somme possible.

La somme qui restait donc, défalcation faite de ces dépenses obligatoires, était répartie entre MM. les professeurs, d'après le temps consacré aux examens. Il en résultait, d'après les calculs qui ont été faits, qu'en général, MM. les professeurs n'avaient pour indemnité de présence que 1 fr. 25 à 1 fr. 50 cent. par heure.

Quelques années après la mise à exécution de la loi sur ce pied, le gouvernement jugea qu'il était indispensable d'y introduire quelques modifications ; et comme le produit seul des examens et des inscriptions ne suffisait pas, le gouvernement proposa d'allouer au budget de l'intérieur d'abord 30,000 fr. et plus tard 50,000 fr., afin de pouvoir suppléer au produit des inscriptions, de façon à donner à MM. les professeurs une indemnité plus convenable par heure de vacation. Par l'application de la loi dans ces derniers temps, MM. les membres du jury reçurent une indemnité de présence de 2 francs 80 cent. à 3 francs par heure.

Eh bien, d'après les calculs que nous avons pu faire, la proposition que j'aurai l'honneur de soumettre à la Chambre produira pour chaque membre des jurys la même indemnité d'à peu près 3 fr. par heure.

Voici la rédaction que j'aurai l'honneur de proposer à la Chambre :

« Les présidents des jurys reçoivent par jour, pour indemnité de vacation, 25 fr. et les autres membres 18 fr., lorsqu'il y a au moins six heures d'examen en exécution des articles 21 et 28 bis de la présente loi ; les indemnités sont réduites respectivement à 20 et à 15 fr., pour 4 heures d'examen et au-delà jusqu'à 6 heures exclusivement à 16 et à 12 fr. pour moins de 4 heures.

« Une indemnité spéciale de 5 fr. est attribuée aux secrétaires par jour de séance.

« Les présidents et membres qui ne résident pas au siège du jury reçoivent, en outre, des frais de route et de séjour fixés comme il suit: 1 fr. par lieue de 5 kilomètres sur les chemins de fer ; 2 fr. sur les routes ordinaires ; 12 fr. par nuit de séjour. »

Je n'ajouterai que quelques mots. La section centrale propose une indemnité de 24 francs pour le président. Jusqu'ici il lui a été alloué une indemnité de 25 francs. Je ne crois pas qu'il y ait lieu de diminuer ce chiffre d'un franc. Seulement le président avait une indemnité invariable de 26 francs. Maintenant je propose aussi de proportionner cette indemnité au nombre d'heures consacrées aux examens de chaque jour.

Quant à l'indemnité de 5 francs à allouer au secrétaire, il est juste de la lui accorder. Le secrétaire a une besogne très importante à faire, une besogne assez rude pour qu'on ne puisse l'imposer à un membre du jury sans une indemnité spéciale de ce chef.

M. de Theux, rapporteur. - Nous l'avons également proposé.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Par la proposition des frais, de route et de séjour tels qu'ils sont fixés plus haut, le gouvernement assimile MM. les professeurs à diverses catégories de fonctionnaires qui se trouvent à peu près sur le même rang, tels que les membres de (page 656) la commission des monuments, les membres des jurys chargés de donner les prix quinquennaux, les membres des jurys pour les concours universitaires, les membres du conseil de perfectionnement de l'enseignement supérieur, etc. En d'autres termes, je propose d'accorder aux membres et aux présidents des jurys, lorsqu'ils doivent se déplacer, des frais de route et de séjour sur le pied de la quatrième classe de l'arrêté de 1854.

M. Verhaegen. - Messieurs, l'article 30, au point de vue de l'exécution de la loi, n'est pas le moins important, et je suis convaincu que si l’on adoptait la proposition de la section centrale, ou même la proposition du gouvernement, le jury serait très souvent incomplet. Je puis en parler à mon aise, car je suis complètement désintéressé dans la question. Je n'ai jamais fait partie du jury ; mais d'après les renseignements que j'ai obtenus, il est certain que si on ne donne pas aux membres du jury une rétribution qui les mette à même, d'abord de ne pas prendre de l'argent de leur poche pour les frais de séjour et ensuite de les indemniser de la perte qu'ils font en abandonnant leur clientèle, il arrivera presque toujours que le jury se composera uniquement du président et des membres du corps professoral de la ville où se fera l'examen ; de sorte que les votes du jury ne seront que des votes mensongers.

J'ai eu l'occasion, messieurs, de le dire dans la discussion générale, il faut avoir des égards pour un corps qui se compose de savants ; il faut relever le corps professoral au lieu de l'amoindrir aux yeux des masses en le traitant comme on traiterait les derniers des fonctionnaires. Voyons où nous arrivons avec le projet de la section centrale. Chaque membre du jury aurait 50 centimes par lieue pour frais de voyage ; il n'aurait pas de frais de séjour alors même qu'il n'appartiendrait pas à la localité où siégerait le jury. Il n'aurait, en moyenne, que 12 francs de rétribution, car il est évident que si l'on a égard au nombre des récipiendaires et si on défalque les jours fériés pour lesquels on ne donne rien, on arrive par le système de la section centrale à allouer à chaque membre du jury 12 fr. par jour, sans indemnité pour frais de séjour et avec 50 centimes par lieue pour frais de voyage. Mais ce n'est pas assez pour payer leurs frais d'hôtel ! Quel sera donc le médecin ayant une forte clientèle qui va abandonner la ville où il exerce sa profession pour aller siéger pendant plusieurs jours dans une ville étrangère ? Quel sera le membre du barreau ayant des affaires à traiter dans sa ville qui consentira à faire partie du jury ?

Le système que propose M. le ministre de l'intérieur n'est pas beaucoup plus favorable. Ce système donnerait aux membres du jury 2 fr. 80 à 3 francs par heure. Eh bien, d'après les renseignements que j'ai obtenus de membres du jury qui m'inspirent toute confiance et surtout de présidents de jury, il est certain que le jury ne peut guère siéger plus de quatre heures par jour.

Il n'y a rien de plus fatigant, rien de plus énervant que la besogne du jury d'examen ; on s'abrutirait, en quelque sorte, en siégeant plus de 4 ou 5 heures par jour. Le maximum serait donc 12 ou 15 fr. par jour, 15 fr. tout au plus.

Ensuite, messieurs, il y a encore une grande difficulté à calculer par heure, car il y a de ces examens qui demandent un très grand nombre d'heures. Ainsi pour la candidature en médecine, pour le doctorat en médecine, il y a des opérations, des manipulations à faire ; pour faire un pharmacien, il faut trois jours. Or le pharmacien paye 50 fr. pour subir sou examen ; avec le calcul par heure vous y perdrez et les autres professeurs seront maltraités. Cela n'est pas possible.

Je préfère la première disposition du gouvernement et dans l'intérêt de la dignité du corps professoral et même dans l'intérêt du trésor, je tâcherai de coordonner le système, je me permettrai de faire une proposition.

Messieurs, on a compris qu'on ne pouvait pas traiter les membres du jury comme on les a traités jusqu'à présent. Non seulement, le premier projet du gouvernement, mais encore la proposition de la section centrale, n'allouaient aux membres du jury que 50 centimes par lieue pour frais de voyage. Eh bien, comme l'honorable ministre de l'intérieur vous l’a dit (la réflexion est venue un peu tard, mais mieux vaut tard que jamais), c'est traiter les membres du jury comme on traite le dernier des employés, comme on traite un huissier, comme on traite les petits employés dans les prisons.

Ce qui veut dire que si les membres du jury ne voulaient pas sortir quelque chose de leur poche pour se placer mieux, ils devraient faire route dans la compagnie de leurs subalternes jusqu'au degré le plus infime, dans la compagnie de leurs appariteurs, de leurs huissiers. On a compris que cela n'était pas possible et on propose un franc au lieu de 50 c. Sous ce rapport il est fait droit à mon observation précédente, car je reconnais que le chiffre d'un franc doit suffire pour les frais de voyage.

Reste maintenant la rétribution à accorder aux membres du jury. Qui veut la fin doit vouloir les moyens. La Chambre a voulu pour trois ans encore maintenir le jury combiné ; eh bien, messieurs, pour avoir un jury combiné, il faut que l'université d'une autre ville que celle où se fait l'examen puisse envoyer ses professeurs dans cette dernière ville. Si ces professeurs n'arrivent pas, il y aura, en tout et pour tout, le président et les professeurs de l'université de la ville où siégera le jury.

Ce sera en définitive le système de ceux qui voulaient faire délivrer le diplôme par chacune des universités ; ou bien le système de l'honorable M. de La Coste, avec moins de garanties ; mais ce ne seraient plus que des jurys mensongers.

Quand vous voulez une loi, il faut en assurer l'exécution. Pour avoir des jurys, il faut en payer les membres convenablement ; or, la rétribution qu'on propose n'est pas suffisante.

Je ne vois pas non plus pourquoi il faut faire une différence entre les présidents et les membres des jurys. Personne ne réclame ce traitement inégal ; j'ai parlé à plusieurs présidents qui désirent eux-mêmes qu'ils soient mis sur la même ligne que les membres du jury. Le président, c'est le primus inter pares.

Il y aura plus d'entente cordiale entre tous les membres du jury, quand le président et les membres seront tous traités de la même manière ; tous sont également dignes, tous sont également honorables. Je crois donc qu'il convient d'abandonner cette idée de donner une rétribution plus considérable aux présidents qu'aux membres du jury.

Dans cet état de choses, j'ai l'honneur de proposer la disposition suivante:

« Le produit des droits d'examen payés par les récipiendaires est réparti, à titre d'indemnité entre les présidents et membres des divers jurys, en proportion de la durée des examens auxquels chacun d'eux a assisté.

« Dans le cas où l'indemnité n'atteindrait point le chiffre de 5 francs par heure de séance, elle serait parfaite à charge du trésor jusqu'à concurrence de cette somme.

« Les présidents et membres des jurys astreints à un déplacement reçoivent, en outre, à charge du trésor douze francs par jour de séjour et un franc par lieue de voyage.

« Le secrétaire reçoit cinq francs par jour. »

Je mets sur la même ligne les présidents et les membres ; je partage le produit des inscriptions entre les simples membres et les présidents, à raison du nombre d'heures pendant lesquelles chacun aura assisté en réalité aux examens.

De cette manière-là, j'engage les membres du jury à être diligents ; chacun sera rétribué d'après ses œuvres ; on fera plus de besogne.

Ma proposition a un autre but, c'est de ne pas laisser traîner les examens. Si vous alliez payer simplement par heure, il pourrait se faire- je reconnais que ce serait l'exception - mais il pourrait se faire que certains jurys voulussent laisser s'accroître le nombre d'heures.

Je partage donc le produit des inscriptions entre tous les membres du jury, d'après le temps pendant lequel chacun d'eux a siégé ; et si dans la répartition chacun d'eux n'obtient pas trois francs par heure, c'est le taux que M. le ministre propose, on y supplée aux frais du trésor.

De cette façon les examens iraient plus vile, on ferait plus de besogne et il n'en coûterait rien ou presque rien à l'Etat. Voilà comment je partage le produit des inscriptions, et voici ce que je mets à charge du trésor : 12 fr. par jour de séjour. Je défraye seulement ceux qui n'appartiennent pas à la localité. Je suis d'accord avec M. le ministre quant au franc pour frais de voyage ; je ne pense pas que ce soit trop.

M. Vander Donckt. - Pour ma part, j'approuve la proposition de l'honorable M. Verhaegen en ce sens qu'il ne fait plus de distinction entre le président et les membres du jury. A cet égard, je soumettrai à la Chambre une autre observation, c'est de savoir jusqu'à quel point le président interroge ou n'interroge pas le récipiendaire.

Dans la pratique, il n'interroge pas, il se met à son aise ; il jouit de son indemnité, sans se donner la moindre de ces tortures que M. Verhaegen a fait valoir assez haut pour les membres du jury ; il vous a dit que c'était une tâche excessivement lourde que celle d'interroger des élèves.

Je suis d'accord avec lui, quant aux professeurs ; mais pour les présidents, j'ai la conviction qu'ils n'interrogent pas ; de sorte qu'ils ont en même temps une position plus honorable et plus aisée, puisqu'ils n'ont pas à se casser la tête pour interroger.

Quant à la question financière, il me semble, comme à quelques honorables membres, que ce qu'on propose est trop. Je vais vous dire les motifs qui m'engagent à prendre la parole dans cette discussion. La plupart des membres du jury appartiennent aux cours d'appel ou à la cour de cassation ; ce sont déjà des salariés de l'Etat, ce sont des fonctionnaires probes, surtout les présidents ; les professeurs appartiennent en grande partie aux universités de l'Eut, ils sont également rétribués par l'Etat.

C'est un véritable cumul qu'ils exercent. Il y a les médecins et les avocats ; non seulement ils jouissent des honoraires du professorat et de leur clientèle privée, mais ils touchent encore des indemnités assez larges à charge du trésor public, pour faire partie des jurys d'examen. Une considération qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est qu'indépendamment des gros traitements que la plupart touchent, c'est un grand honneur pour eux d'être membres d'un jury d'examen ; on peut bien faire un peu appel à leur dévouement à leur patriotisme et leur demander de sacrifier un peu de leur temps.

Je ne disconviens pas qu'il faut leur accorder une indemnité, il ne faut pas exiger qu'ils y mettent de leur poche.

Dans l'état actuel des choses, il y avait quelque chose à faire, c'était de mettre le président sur la même ligne que les professeurs, car il a déjà une position avantageuse ; on peut tenir compte du traitement qu'il reçoit comme professeur ou comme membre du corps judiciaire et modérer un peu la proposition de M. Verhaegen dans ce sens alors je serai disposé à l'adopter.

(page 657) M. Rogier. - Je ne puis admettre la proposition de l'honorable M. Verhaegen, qui consiste à mettre sur la même ligne, quant aux émoluments, le président et les autres membres du jury. Si le président du jury n'est que le primus inter pares, un président de cour et de tribunal n'est aussi que primus inter pares, et cependant la loi lui attribue un traitement plus élevé qu'aux autres membres du corps auquel il appartient. Ce président du jury joue un rôle très important ; je ne pense pas que les autres membres le jalousent, non parce qu'il serait président, mais parce qu'il obtiendrait une indemnité plus élevée ; s'ils pouvaient lui porter envie, ce serait peut-être à raison de son titre, maïs non sans doute parce qu'il recevrait par jour quelques francs de plus. Les fonctions étant différentes, je pense qu'il faut maintenir la différence de traitement.

L'honorable préopinant qui a parlé le dernier voudrait réduire le taux de l'indemnité des présidents, parce que ce sont des fonctionnaires publics jouissant de gros traitements auxquels il n'est pas nécessaire de joindre encore une grosse indemnité.

D'abord, les fonctionnaires publics dont il s'agit ne jouissent pas de très gros traitements ; je fais des vœux pour que les traitements se relèvent un jour de telle manière que les administrations supérieures puissent se recruter parmi les hommes les plus distingués du pays, pour que les cours et les tribunaux notamment puissent se recruter parmi nos meilleurs avocats, nos plus savants jurisconsultes qui repoussent la carrière des emplois publics, parce que ces emplois ne sont pas assez rétribués.

On dit que le président n'a pas droit à une indemnité plus forte parce qu'il ne fait que présider, qu'il n'interroge pas. Le rôle d'interrogateur n'est pas, à mes yeux, plus fatigant que celui d'auditeur ; celui qui est condamné à écouter est souvent dans une position plus désagréable que celui qui parle.

Ce n'est pas là une considération suffisante pour changer l'état de choses actuel. Les présidents sont, en général, des fonctionnaires publics, je le reconnais ; mais à quelle époque de l'année sont-ils appelés à exercer leurs fonctions dans les jurys ?

Dans les vacances, à une époque où un repos est accordé aux autres fonctionnaires ; ce repos, ils consentent à en faire le sacrifice dans l'intérêt de la chose publique.

Ne traitons pas avec rigueur les présidents, si nous tenons à leur concours. J'ai fait une expérience que mes successeurs ont dû faire aussi, c'est que les présidents convenables sont très difficiles à rencontrer.

La catégorie des hommes spéciaux, aptes à remplir les fonctions de président de jury est très restreinte. Nous ne devons pas amoindrir cette position. Nous ne devons pas jeter une sorte de défaveur sur des fonctions aussi importantes que difficiles à bien remplir.

J'appuie la proposition de fixer l'indemnité du président à 25 fr. et d'élever de 10 à 12 fr. les frais de séjour indistinctement pour tous les membres des jurys.

M. Verhaegen. - Loin de moi l'idée de jeter de la défaveur sur les présidents des jurys !

M. Rogier. - Ce n'est pas à vous, c'est à l'honorable M. Vander Donckt que j'ai répondu.

M. Verhaegen. - Nous avons eu jusqu'à présent des hommes très honorables à la tête des jurys d'examen, il est à désirer que ces mêmes hommes veuillent bien nous donner encore leur concours à l'avenir. Si j'ai fait cette proposition, c'est que les présidents mêmes des jurys avec qui j'ai eu l'honneur de m'en entretenir m'y ont engagé. Ce qui prouve que chez eux, indépendamment de leur mérite, il y a beaucoup de discrétion.

Au reste, la différence est très faible, et je ne maintiens ma proposition que pour être exact.

On m'a dit que je proposais beaucoup trop. Mais quelle différence y a-t-il entre ma proposition et celle de M. le ministre de l'intérieur ! Nous sommes d'accord sur l'indemnité de séjour qui est fixée à 12 fr. sur les frais de voyage qui sont fixés à 1 fr. par jour et sur l'indemnité du secrétaire qui est fixée à 5 francs. Seulement reprenant la proposition primitive du gouvernement, je demande que l'on accorde aux membres des jurys, pour droit de présence, le montant des frais d'inscription. J'ajoute qu'on leur accordera, à titre de minimum les droits de présence proposés par M. le ministre de l'intérieur.

En calculant comme vous le faites, vous allouerez beaucoup pour certains examens qui n'ont pas la plus grande importance, par exemple pour la candidature en droit, tandis que vous allouerez moins pour le doctorat en médecine, examen qui comprend des manipulations, des démonstrations anatomiques et sur le mannequin, comme pour l'examen de pharmacien ; car il faut trois jours pour faire un pharmacien.

Ce que je propose est un forfait pour lequel vous assurez un minimum. Il en résultera que la besogne ira plus vite.

En résumé, je reproduis la proposition primitive du gouvernement en ajoutant des frais de séjour pour ceux qui n'habitent pas la localité ; car ils ne peuvent être mis sur la même ligne que ceux qui l'habitent.

Il n'y a rien d'exagéré dans ma proposition. Ce que je demande pour les membres des jurys est juste, et je suis persuadé qu'il n'en résultera aucune charge pour le trésor.

M. de Theux, rapporteur. - Je dois l'aire remarquer à la Chambre que la proposition de la section centrale est l'application administrative du système que la Chambre a adopté.

Les frais d'inscription restent les mêmes. Mais les vacations des jurys seront diminuées de moitié, et l'honorable membre propose d'attribuer aux jurys les frais d'inscription, comme s'il n'y avait rien de changé dans les examens. Si vous adoptiez la proposition de l'honorable M. Verhaegen, les droits d'examen s'élèveraient par heure à fr. 6 50 c au lieu de 2 fr. 90, taux actuel des droits d'examen dont personne ne se plaint.

M. Verhaegen. - Je voudrais connaître la décomposition du produit des frais d'inscription.

M. de Theux, rapporteur. - Le tableau est imprimé à la suite du rapport. Je ne suis pas l'auteur du tarif proposé par la section centrale ;, il a été assez longuement débattu dans son sein. Je dirai cependant quelles sont les idées qui ont prévalu. On a voulu restreindre les frais de voyage à la dépense réelle. M. le ministre veut que le professeur ne soit pas, quant aux frais de voyage, placé dans une position inférieure à celle du fonctionnaire d'un ordre égal.

Il y a certainement quelque chose de fondé dans cette observation.

Quant à l'indemnité de séjour cumulée avec l'indemnité d'examen, la section centrale a pensé que c'était créer aux examinateurs une position exorbitante relativement aux membres de la Chambre des représentants. Cependant on ne s'est pas arrêté entièrement à cette comparaison et on a fixé à un taux plus élevé l'indemnité des examinateurs.

Voilà les principes qui ont guidé la section centrale.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - La proposition que j'ai eu l'honneur de faire à la Chambre et celle qui vous est faite par l'honorable M. Verhaegen se rapprochent en effet sur beaucoup de points.

Ainsi, pour les frais de route et de séjour, et pour l'indemnité du secrétaire, nous sommes d'accord. Mais pour l'indemnité du président et des autres membres, nous ne sommes plus d'accord. L'honorable membre pense que l'on doit mettre sur la même ligue le président et les membres ordinaires des jurys.

Dans le système primitif du gouvernement, il n'y avait pas de présidents ; mais une fois qu'il est décidé qu'il y aura des présidents, il faut leur faire une position convenable.il faut leur donner une indemnité supérieure à celle des membres ordinaires. Cela n'empêchera pas les bonnes relations entre les présidents et les autres membres des jurys.

Cependant, ma proposition nouvelle change la position actuelle des présidents qui a peut-être quelque chose d'exorbitant. Ainsi le président, quelle que fût la durée des examens, ne fût-elle que d'une heure, avait une indemnité fixe de 25 fr. A l'avenir l'indemnité sera proportionnelle à la besogne faite, aussi bien pour le président que pour les membres. Seulement l'indemnité sera toujours plus élevée pour lui que pour les membres.

Mais il me semble qu'il est nécessaire de lui conserver une position différente de celle des autres membres du jury, tout en proportionnant,, pour lui comme pour les autres membres, l'indemnité à la besogne faite par le jury.

Sur quels fonds faut-il payer les membres des jurys ? L'honorable M. Verhaegen dit : Sur le produit des inscriptions. C'est, en effet, ce que j'avais proposé d'abord, pour conserver l'étal de choses actuel.

Mais lorsque j'ai étudié la question de plus près, j'ai dû reconnaître qu'en réalité il n'en était pas ainsi. En effet, ou a vu, au bout de deux, ans, que ce fonds ne suffisait pas.

Nous avons porté annuellement au budget de l'intérieur une somme de 52,000 francs qui vient s'ajouter au fonds des inscriptions. Il est vrai que d'autres jurys sont compris dans cette somme. Mais les jurys universitaires proprement dits y sont compris pour 34,000 francs.

Si donc l’honorable membre déclarait en principe que les membres du jury n'auront droit qu'au produit des examens, je crois qu'il serait obligé de faire immédiatement une brèche à ce principe, et c'est en effet ce qu'il est obligé de prévoir.

Il est donc plus simple et plus régulier de dire que le produit des inscriptions sera versé au trésor, et que le gouvernement indemnisera les jurys d'après les bases admises par la Chambre.

Quelle sera la conséquence financière du système que je propose à la Chambre ?

Aujourd'hui le produit des inscriptions pour les 34,000 francs qu'y ajoute le budget sont absorbés par les jurys actuels. Mais avec l'organisation nouvelle des jurys, il y aura une diminution de dépenses résultant l° de la diminution proportionnelle de l'indemnité du président qui, au lieu de recevoir une indemnité fixe de 25 fr., recevra une indemnité qui variera de 25 à 20 et à 16 fr, d'après le nombre d'heures d'examen ; 2° de ce que les jurys ne seront plus aussi nombreux, car, pourvu que les établissements soient également représentés, on pourra, diminuer, de moitié peut-être, le nombre des examinateurs.

Il est donc permis d'espérer que la dépense pourra être couverte par le seul produit des inscriptions. Mais je ne veux pas prendre à cet égard d'engagement dans la loi, dans la crainte qu'on ne doive donner un démenti à ce principe.

Je pense, toutefois, qu'on pourra se passer de la majeure partie des 34,000 fr. alloués au budget de l'intérieur.

D'après des calculs faits, les produits des examens couvriront à très peu de chose près, les dépenses qui seront à faire pour les jurys.

La Chambre connaît donc quel sera à peu près le résultat financier des indemnités à donner aux membres des jurys. Ce résultat sera, me paraît-il, très satisfaisant.

(page 658) Peut-on dire que le mode de rétribution proposé par le gouvernement soit excessif ? Je ne le pense pas. Pour les frais de route et de séjour, je propose d'appliquer aux professeurs des universités de l'Etat le tarif de la quatrième classe de fonctionnaires qui se trouvent tous dans la même position. Et il faut tenir compte de la dignité des professeurs. Vous ne pouvez faire aux professeurs des universités une position inférieure à celle des personnes qui se trouvent sur le même rang hiérarchique.

Quant à l'indemnité de présence ou de vacation, on vous l'a dit, ce n'est pas un travail facile que d'assister à des examens. C'est un travail rebutant, c'est un travail fatigant au-delà de toute expression. Si vous voulez des jurys convenables, si vous voulez que les professeurs assistent aux séances, il faut accorder aux membres de ces jurys une indemnité raisonnable comme celle que je propose.

Je crois, messieurs, que ces explications suffiront pour prouver à la Chambre que les propositions du gouvernement n'ont rien d'excessif puisque, dans tous les cas, elles n'amèneront presque aucun sacrifice pour le trésor public, le produit des inscriptions devant probablement suffire pour payer les dépenses occasionnées par les jurys universitaires.

M. Delfosse. - Je reconnais que l'indemnité à accorder aux membres des jurys doit être convenable, et que les frais de séjour doivent être suffisants. Mais je tiens à signaler à la Chambre comment on se laisse aller insensiblement à augmenter les dépenses et comment les abus se propagent.

D'après le projet du gouvernement, on accordait aux membres du jury 50 centimes par lieue pour frais de voyage par le chemin de fer. C'était à peu près le remboursement de la dépense faite. Aujourd'hui on propose de doubler cette allocation ; et pourquoi ? Parce qu'on fait une comparaison ; parce qu'on dit que les membres des jurys ne doivent pas recevoir, pour frais de voyage, moins que d'autres fonctionnaires placés dans la quatrième classe du tarif.

Mais si l'on voulait procéder raisonnablement et entrer dans une voie d'économie qui, selon moi, est exigée par l'état de nos finances, on se serait demandé si les fonctionnaires qui se trouvent dans la quatrième classe ou dans une classe plus élevée, ne reçoivent pas trop.

Je veux bien admettre que les professeurs, que les membres des jurys ont le droit d'être rangés au moins dans la quatrième classe. Mais je n'en tire pas la même conséquence que M. le ministre de l'intérieur et que mon honorable ami, M. Verhaegen. Je dis que les frais de voyage alloués aux fonctionnaires placés dans la quatrième classe devraient être réduits.

Messieurs, l'allocation pour frais de voyage doit être le remboursement d'une dépense et non une occasion de bénéfice. Puisque nous allons accorder aux membres des jurys une indemnité et des frais de séjour convenables, pourquoi leur donner une occasion de bénéficier sur les frais de voyage ? On doit leur donner ce que coûte le voyage ou à peu près et non leur donner le double.

Ainsi j'admets la comparaison ; j'admets que les membres des jurys doivent être au moins assimilés aux fonctionnaires placés dans la quatrième classe ; mais ce qu'un ministre économe devrait examiner, c'est si le tarif des frais de voyage n'est pas trop élevé et je soutiens qu'il l'est.

J'ai tenu, messieurs, à signaler à la Chambre cet abus. C'est au moyen de ces sortes d'abus que les dépenses vont toujours en augmentant. On n'y fait guère attention parce que ces dépenses, considérées isolément, paraissent insignifiantes ; mais réunies, elles finissent par grever considérablement notre situation financière.

Tout en voulant donc accorder des frais de séjour et une indemnité convenables aux membres des jurys, je ne puis me rallier à la disposition proposée par M. le ministre de l'intérieur eu ce qui concerne les frais de voyage.

Je reconnais le fondement des plaintes de MM. les membres des jurys, lorsqu'ils demandent à être assimilés aux fonctionnaires de la quatrième classe. Mais ce qu'il y a lieu de faire, c'est de réviser le tarif tant pour la quatrième classe que pour toutes les autres classes.

Je crois que MM. les ministres ont fait preuve de beaucoup trop de complaisance dans la fixation des dispositions de ce tarif ; qu'ils se sont trop laissé aller au désir d'être agréables à MM. les fonctionnaires.

M. Lelièvre. - On sait que les présidents du jury sont ordinairement des magistrats de l'ordre judiciaire. Or, remarquez que les membres des cours qui vont présider les assises reçoivent vingt-cinq francs par jour, aux termes de la loi de 1849. Il me semble donc que l’indemnité leur accordée par l'article en discussion n'a rien d'exorbitant ; les magistrats qui présideront le jury recevront moins que s'ils allaient présider les assises dans les provinces et cependant la loi de 1849 a été votée sous l'empire d'une pensée d'économie qui dominait alors le parlement.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, en proposant jour les frais de route l'augmentation que j'ai indiquée tout à l'heure, j'ai seulement voulu mettre les professeurs sur la même ligne que d'autres fonctionnaires qui appartiennent évidemment au même rang hiérarchique. L'honorable M. Delfosse dit que l'on devrait réformer la classification et les indemnités fixées pour chaque classe. J'avoue que je n'ai pas pensé à cette mesure générale. J'ai trouvé les arrêtés ainsi conçus, et je me suis conformé à leurs dispositions.

S'il devait en résulter une grande charge pour le trésor, je concevrais les objections. Mais j'ai dit à la Chambre que d'après les calcul qui ont été faits, le produit des inscriptions suffira probablement pour couvrir tous les frais des jurys. Je ne pense pas que la Chambre veuille bénéficier sur le produit des inscriptions. Il est juste que ce produit soit alloué à MM. les examinateurs. Or, je le répète, il est très probable qu'il sera suffisant pour couvrir tous les frais.

M. Delfosse. - Je suis convaincu, quoi qu'en dise M. le ministre de l'intérieur, que le produit des inscriptions ne suffira pas ; vous en aurez la preuve lorsqu'on viendra vous demander un crédit pour cet objet. J'ajourne M. le ministre de l'intérieur à la présentation de ce projet de loi.

Mais lors même que le produit des inscriptions suffirait, mon observation n'en subsisterait pas moins, car elle s'applique à toutes les allocations portées aux divers budgets pour frais de route. Il est évident que lorsqu'on accorde des frais de route dépassant de beaucoup la dépense réelle, c'est de la prodigalité. Cela ne peut être nié par personne. MM. les ministres, même ceux qui ont les meilleures intentions, se laissent trop souvent aller à l'influence de leurs employés, lorsqu'ils approuvent ces sortes de tarifs.

Il reste donc vrai qu'il y a là un abus que j'ai cru de mon devoir de signaler à la Chambre et que l'on devrait faire cesser.

- L'article proposé par la section centrale est mis aux voix. Il n'est pas adopté.

La première partie de l'amendement de M. Verhaegen est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

M. Verhaegen. - La seconde partie de mon amendement est conforme à la proposition du gouvernement ; je me rallie donc à cette proposition.

- Les diverses parties de la proposition du gouvernement sont successivement mises aux voix et adoptées.

Cette proposition est ensuite mise aux voix et adoptée dans son ensemble.

Article 31

« Art. 31. Nul ne peut, en qualité de membre d'un jury, prendre part à l'examen d'un parent ou allié, jusques et y compris le quatrième degré, sous peine de nullité. »

- Adopté.

Chapitre IV. Des inscriptions et des frais d'examen.
Article 32

« Art. 32. Les époques et la forme des inscriptions pour les examens, l'ordre dans lequel on y est admis, sont déterminés par les règlements. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, je crois que c'est à cet article qu'il faudrait ajouter que le produit des inscriptions est acquis au trésor.

M. de Theux, rapporteur. - C'est de droit.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - C'est dans le but de prévenir une difficulté qui s'est présentée. Il y a eu pendant quelques années une caisse spéciale pour les fonds provenant du payement des inscriptions, et à plusieurs reprises l'honorable M. Osy, entre autres, a fait des réclamations de ce chef. Pour éviter toute difficulté je voulais proposer d'ajouter à l'article :

« Le produit des inscriptions est acquis au trésor. »

M. Osy. - Il me paraît, messieurs, que nous ne pouvons pas mettre dans la loi une chose qui va d'elle-même, une chose qui résulte de la loi de comptabilité. Malheureusement on ne s'y est pas conformé pendant plusieurs années, et je suis toujours élevé contre cette violation de la loi de comptabilité. Ce n'est pas une raison pour dire dans une loi une chose qui est ordonnée par une autre loi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Depuis deux ans cette recette figure au budget des recettes et dépenses pour ordre.

M. Delfosse. - L'irrégularité dont vient de parler M. le ministre» de l'intérieur a eu lieu sous l'empire d'une disposition portant, que le produit des inscriptions devait être réparti entre les membres du jury. Comme cette disposition vient d'être supprimée, l'irrégularité signalée ne peut plus se produire.

M. le président. - M. le ministre maintient-il sa proposition ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Non, M. le président.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Article 33

« Art. 33. Les frais des examens sont réglés comme il suit :

« Pour chacune des épreuves préparatoires, fr. 30

« Pour la candidature en philosophie et lettres, fr. 50

« Pour le doctorat en philosophie et lettres, fr. 50

« Pour le grade de candidat en droit, fr. 100

« Pour le premier examen de docteur en droit, fr. 100

« Pour le second examen de docteur en droit, fr. 150

« Pour l'examen de docteur en sciences politiques et administratives :

« Le candidat en droit paye, fr. 150

« Le docteur en droit paye, fr. 50

« Pour le grade de candidat en sciences, fr. 50

« Pour le doctorat en sciences, fr. 50

« Pour le grade de candidat en médecine, fr. 80

(page 659) « Pour le premier examen de docteur en médecine, fr. 80

« Pour le second, fr. 80

« Pour le troisième, fr. 80

« Pour l'examen de candidat notaire, fr. 100

« Pour l'examen de candidat en pharmacie, fr. 50

« Pour l'examen de pharmacien, fr. 50. »

La section centrale propose l'addition suivante :

« Si l'épreuve préparatoire n'est que partielle, les frais sont réduits à 15 francs.

« Dans le cas du dernier paragraphe de l'article 28bis, les frais sont fixés à dix francs par matière, et les indemnités du jury sont fixées par le gouvernement. »

M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-il à cette proposition de la section centrale ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je demanderai un mot d'explication sur le premier paragraphe de cette proposition. Je ne connais pas d'épreuve préparatoire partielle ; il y a une épreuve préparatoire ou il n'y en a pas.

M. Devaux. - Dans le premier projet il y avait une épreuve préparatoire partielle.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Il faut donc supprimer ce paragraphe.

M. de Theux, rapporteur. - Oui.

- L'article ainsi modifié est mis aux voix et adopté.

Article 34

« Art. 34 (projet du gouvernement). Le récipiendaire qui n'a pas répondu d'une manière satisfaisante est refusé ou ajourné.

« Le récipiendaire ajourné ne peut plus se présenter à l'examen dans la même session, à moins qu'il n'y ait été autorisé lors de l'ajournement.

« Le récipiendaire ajourné qui se représente, paye dans tous les cas, le quart des frais d'examen.

« Le récipiendaire refusé ne peut plus se présenter dans la même session, et il est tenu de payer la moitié des frais d'examen, s'il se présente à une autre session. »

La section centrale ne propose pas d'amendement.

M. Coomans. - Messieurs, il y a un peu de vague dans ces mots : « Le récipiendaire ajourné paye dans tous les cas le quart des frais d'examen. » Je crois qu'il faudrait supprimer les mots dans tous les cas.

De deux choses l'une : ou le récipiendaire est ajourné, ou bien il est accepté ; s'il est accepté, il paye toute la rétribution et non pas le quart seulement. S'il est ajourné, le quart peut suffire ; donc les mots « dans tous les cas » créent une obscurité.

M. Lelièvre. - La disposition dont parle M. Coomans est rationnelle. Le récipiendaire ajourné doit d'abord payer en entier les frais du premier examen, lors duquel l'ajournement a été prononcé. En effet, les frais soldés de ce chef sont acquis au jury. Mais il s'agit de subir un second examen et en ce cas l'élève ajourné paye un quart en sus à titre de la seconde épreuve.

L'article en question est donc parfaitement justifié. Il est naturellement dû une indemnité du chef des deux examens.

M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, les mots dans tous les cas doivent être maintenus. Il y a deux hypothèses ; le récipiendaire peut se représenter soit dans la même session, s'il y est autorisé, soit dans une autre session ; dans l'un et l'autre cas, il paye le quart des frais d'inscription.

- La discussion sur l'article 54 est close.

Cet article est mis aux voix et adopté.

Chapitre V. Des droits attachés aux grades
Article 35

« Art. 35. Nul n'est admis aux fonctions qui exigent un grade, s'il n'a obtenu ce grade de la manière déterminée par la présente loi. »

La section centrale ne propose pas d'amendement.

- L'article 35 est mis aux voix et adopté.

Article 36

« Art. 36 (projet du gouvernement). Nul ne peut pratiquer en qualité d'avocat, de médecin, de chirurgien, d'accoucheur ou d'oculiste, s'il n'a été reçu docteur, conformément aux dispositions de la présente loi.

« Néanmoins, le gouvernement peut accorder des dispenses spéciales pour certaines branches de l'art de guérir, après avoir pris l'avis du jury d'examen.

« La dispense spécifie la branche, et ne peut s'appliquer qu'à ce qui y sera nominativement désigné.

« Nul ne peut être nommé juge de paix, greffier ou commis-greffier près la cour de cassation, si, indépendamment des autres dispositions requises, il n'a obtenu le grade de docteur en droit.

« Nul ne peut être nommé notaire, si, indépendamment des autres conditions requises, il n'a subi devant le jury l'examen de candidat notaire.

« Les articles 43 et 44 de la loi du 25 ventôse an XI sont abrogés. »

La section centrale propose un avant-dernier paragraphe ainsi conçu :

« Nul ne peut être nommé notaire dans un canton où la langue flamande est usitée, s'il ne justifie devant le jury la connaissance de cette langue. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - J'annonce qu'il y a une lacune à combler dans l'article 36, en ce qui concerne les pharmaciens.

M. Vandenpeereboom. - Messieurs, je n'ai que deux mots à dire. Lorsque la Chambre a discuté l'article 17, il a été convenu que l’avant-dernier paragraphe de l'article 36 serait modifié en ce sens que :

« Nul ne peut être nommé notaire dans un canton où la langue flamande est usitée, s'il ne justifie devant le jury qu'il sait rédiger des actes en cette langue. »

J'ai l'honneur de déposer sur le bureau une disposition libellée de cette manière ; je crois que l'amendement n'a pas besoin de développements ultérieurs ; il a été suffisamment développé lors de la discussion de l'article 17.

- L'amendement est appuyé.

M. Coomans. - Messieurs, je suis Flamand et j'aime la langue flamande, mais je n'entends pas l'imposer de force à ceux de mes concitoyens qui ne la savent pas. Je suis Belge avant tout. Il me faut donc au moins une explication sur une disposition importante de l'article 36. Il y est dit que « nul ne peut être nommé notaire dans un canton où la langue flamande est usitée, s'il ne justifie, devant le jury, de la connaissance de cette langue. »

Il me semble que cette exigence pourrait nous mener un peu loin.

Je voudrais bien savoir ce qu'on entend par ce mot « usitée ». Entend-on que dans une localité comme Bruxelles, par exemple, où la langue flamande est usitée, ou ne pourra être nommé notaire que si on sait le flamand ? J'avoue qu'une pareille disposition me paraîtrait exorbitante.

Je comprends que M. le ministre de la justice aurait tort de nommer des personnes qui ne savent pas le flamand, aux fonctions de notaire dans des localités où non seulement la langue flamande est dominante, mais où le nombre de notaires est si restreint, que le public n'aurait pas un choix assez large ; mais dans des arrondissements très populeux, comme celui de Bruxelles notamment, je pense qu'il n'y a pas d'inconvénient à nommer des notaires qui ne savent pas le flamand. Il y a des précédents de semblables nominations dont le public n'a pas eu lieu de se plaindre.

Vous voyez, messieurs, que mon observation est bien désintéressée, puisque je désire aussi vivement que qui que ce soit, que la langue flamande occupe dans notre législation la place à laquelle elle a droit. J'approuve au fond l'amendement de l'honorable M. Vandenpeereboom,. mais je crois que nous devons être justes envers tous et ne pas interdire l'accès de Bruxelles, par exemple, à des notaires qui, bien que ne sachant pas le flamand, mériteraient cependant d'y être nommés, à cause de leurs capacités et de leurs titres. Sur trente notaires qu'il y a à Bruxelles, les clients pourront toujours choisir librement. La suppression du paragraphe qui nous occupe serait peut-être le meilleur parti à prendre.

M. Verhaegen. - Messieurs, il y a une lacune dans l'article 36, en ce qui concerne les pharmaciens. Le premier paragraphe de l'article 36 porte :

« Nul ne peut pratiquer en qualité d'avocat, de médecin, de chirurgien, d'accoucheur ou d'oculiste, s'il n'a été reçu docteur, conformément aux dispositions de la présente loi. »

Mais nous avons créé un grade de pharmacien ; il faut donc compléter l'article 36, en ce sens que :

« Nul ne pourra exercer en qualité de pharmacien, s'il n'a été reçu candidat en pharmacie conformément aux dispositions de la présente loi. »

Je ne dis pas docteur, parce qu'il n'y a pas de doctorat en pharmacie.

- Un membre. - Il faut dire non pas : « s'il n'a été reçu candidat en pharmacie », mais « s'il n'a été reçu pharmacien ».

M. Verhaegen. - D'après l'article 15, on appelle cela candidat en pharmacie. Voulez-vous dire pharmacien ? Je ne puis pas dire docteur, c'est un candidat !

Disons : « Nul ne peut pratiquer en qualité de pharmacien s'il n'a été reçu en conformité des dispositions de la présente loi. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - C'est un amendement, un paragraphe additionnel à placer après le troisième paragraphe de l'article 36.

Je propose de reproduire la disposition de la loi de 1849.

« Nul ne peut exercer la profession de pharmacien s'il n'a été reçu en cette qualité conformément aux dispositions de la présente loi. »

M. Lelièvre. - Je dois faire observer qu'en ce qui concerne les candidats notaires, il est essentiel d'énoncer que pendant quelques sessions encore les individus aspirant à ce grade seront dispensés de l'épreuve préparatoire et en outre qu'ils ne seront interrogés que (page 660) conformément à la loi de 1849. Il est de toute justice de ne pas les soumettre immédiatement aux obligations plus onéreuses qui leur sont imposées par la loi en discussion. Ces considérations justifient l'amendement que j'ai proposé à l'article 53 et qui trouvera sa place dans les dispositions transitoires.

M. Tesch. - Messieurs, je pense qu'il est bien entendu que l'article 36 n'aura pas d'effet rétroactif. Ainsi les candidats qui ont déjà passé leur examen et obtenu leur diplôme de candidat pourront être placés dans les provinces où l'on parle le flamand sans devoir passer un nouvel examen.

- Plusieurs voix. - Ils devront savoir le flamand.

M. Tesch. - Comment ! ils ont obtenu leur diplôme et ils devront passer un nouvel examen, faire preuve de la connaissance de la langue flamande ?

Je désirerais avoir une explication de la section centrale, je désirerais de plus qu'elle s'expliquât sur la portée à donner aux mots : « langues usitées ». Je demanderai si pour être nommé notaire à Bruxelles il faut savoir le flamand.

M. de T'Serclaes. - Je répondrai à l'observation de M. Tesch et à celle de M. Coomans en citant le seul fait officiel que nous connaissions sur les langues usitées dans la capitale du royaume.

Lors du recensement de 1846 le gouvernement a fait demander quelle était la langue dont les habitants faisaient principalement usage. La population de Bruxelles était alors de 104 mille habitants ; eh bien, sur ce nombre, 60 mille déclarèrent qu'ils faisaient principalement usage de la langue flamande. Ce renseignement officiel prouve à l'évidence que les habitants de Bruxelles n'ont point oublié la langue de leurs pères. On en a bien d'autres preuves, je n'en citerai qu'une seule.

Il n'y a pas bien longtemps, un procès criminel se plaidait aux assises de Bruxelles, témoins et accusés ne parlaient que flamand, et par une singularité qu'on ne voit dans nul autre Etat, ces gens, bien que dans leur ville natale, au milieu de leurs concitoyens, devant la justice de leur pays, ont été obligés d'entendre la traduction de toutes les dépositions faite en français pour être soumise à leurs juges. Je ne cite pas ce fait pour entamer une discussion qui pourrait devenir irritante ou éveiller un antagonisme que le sujet ne comporte pas ; voici où j'en veux venir, et je pense que la chambre sera de cet avis, c'est que l'on doit appeler langue usitée dans un canton, celle qui est parlée par la majorité des habitants.

En Belgique, toutes les personnes qui ont reçu une éducation soignée savent le français. Mais dans les provinces flamandes, c'est la minorité.

Je demande ici que l'intérêt de la classe la plus nombreuse et la moins aisée soit sauvegardé. Dans un Etat libre comme le nôtre, où les plus graves questions se décident par la voie de la majorité, ce n'est pas trop faire que de décider que les localités où le plus grand nombre parle flamand, soient desservies par des notaires qui connaissent cette langue.

(page 663) M. Orts. - Il est désirable que les fonctionnaires et les officiers publics comprennent, autant que possible, les langues usitées dans les localités où ils exercent leurs fonctions ; mais il ne faut pas aller jusqu'à l'exagération. Je crois que l'honorable membre y va tout droit par l'argumentation et les faits qu'il vient de présenter. Sans doute, le recensement de 1846 a constaté que les 3/5ème des habitants de la capitale ont déclaré qu'ils se servaient habituellement de la langue flamande ; mais dans ces 3/5ème de la population ne se rencontre pas la classe qui a des rapports d'affaires avec les notaires. D'autre part, le nombre des notaires à Bruxelles est très considérable et il est de leur intérêt de savoir autant que possible le flamand. C'est un moyen de clientèle pour le notaire comme pour l'avocat et pour le médecin, une facilité pour l'exercice de leur profession. On peut à cet égard s'en fier à l'intérêt particulier et se dispenser d'aggraver les exigences de la loi au-delà de ce qui est utile.

Quant à l'exemple cité par l'honorable M.de T'Serclaes, c'est peut-être un spectacle affligeant pour un accusé, pour des témoins de voir dans leur pays leurs dépositions traduites en langue française devant la cour d'assises. Mais pourquoi ? pour l'usage des juges, du jury ou du ministère public sans doute ? Si l'honorable membre veut éviter cet écueil, il doit compléter son système et demander que les personnes qui ne parlent pas flamand soient dispensées de faire partie du jury et exclues de la magistrature.

Un amendement relatif au jury, s'il était présenté par lui, lui concilierait certainement les sympathies de tous ceux qu'il concernerait. Il suffit qu'un seul des hommes qui figurent parmi les douze jurés ne sache pas le flamand, pour que la traduction, tant déplorée par l'honorable M. de T Serclaes, soit indispensable. Or, vous avez tout l'arrondissement de Nivelles dont les habitants concourent à la formation du jury du Brabant, et ne parlent pas un mot de flamand. Tout l'arrondissement de Nivelles, d'après M. de T'Serclaes, devrait donc être débarrassé de la charge très lourde de faire partie du jury.

Revenons à la question qui nous occupe. On peut, je pense, s'en fier à l'intérêt privé des notaires, comme des avocats et des médecins, dans les localités où l'on parle les deux langues, pour obtenir de ces personnes qu'elles en acquièrent autant que possible la connaissance.

S'il s'agissait de fonctionnaires que vous imposez au public, comme les préposés des douanes, les receveurs des contributions, je comprendrais cette exigence. Mais remarquez que vous avez un nombre suffisant de notaires auxquels la population peut s'adresser.

Il y a de plus à observer que les habitants de Bruxelles qui parlent exclusivement la langue flamande ne sont pas ceux qui ont le plus affaire aux notaires.

(page 660) M. Verhaegen. - Je suis grand partisan de la langue flamande ; car c'est ma langue. Mais je ne puis me rendre à l'exigence qui se produit.

Le paragraphe en discussion a une grande portée. S'il était adopté, aucun notaire de la partie wallonne du pays ne pourrait être nommé notaire dans les localités où l'on parle flamand. Aucun notaire du Hainaut ou de l'arrondissement de Nivelles ne pourrait être nommé à Bruxelles. Notre honorable ancien collègue M. de Broux n'aurait pù être nommé notaire à Bruxelles, sous l'empire de cette disposition.

Je comprendrais que l'on exigeât la connaissance de la langue flamande pour être nommé notaire dans les cantons où l'on parle exclusivement cette langue. Il y aurait à cela peu d'inconvénients ; car celui qui ne parle que le français n'acceptera pas une place de notaire dans un canton rural où l'on parle exclusivement le flamand. Mais il n'y a pas de ville de Flandre où l'on ne parle aussi français.

Il sera d'ailleurs de l'intérêt du notaire de savoir le flamand. S'il ne le savait pas, il ne pourrait lutter contre la concurrence.

M. de T'Serclaes. - Il est loin de ma pensée de vouloir pousser à l'exagération en quoi que ce soit. Je tiens à ce que les notaires qui exercent dans un canton où la majorité parle le flamand sachent parler et écrire la langue des habitants.

A mes yeux, la section centrale mérite des éloges pour avoir inscrit dans la loi une obligation qui est pour ainsi dire de droit naturel : je ne suis pas allé au-delà ; l'article ne concerne-que les notaires, je n'ai parié ni du jury, m des fonctionnaires de l’ordre administratif ou judiciaire, là n'est pas la question du moment.

Nous examinerons les autres questions, lorsque un jour, que je désire bien prochain, nous en viendrons à discuter la loi prévue par l'article 25 de la Constitution.

L'exemple de ce qui s'est passé à la cour d'assises du Brabant était chose incidente, je.regrette qu'il ait fourni matière à une digression. Le projet de la section centrale critiqué par l'honorable M. Coomans renferme-t-il quelque chose d'exorbitant ? Je persiste à soutenir la négative et il m'a paru nécessaire de faire ressortir et d'établir par des chiffres que Bruxelles est une des localités où la langue flamande est parlée par un très grand nombre d'habitants.

Mais pour cette ville j'admets qu'il y a une question d'appréciation dont le gouvernement doit être laissé juge et je ne voudrais pas qu'un notaire de l'arrondissement de Nivelles ou d'une autre partie wallonne du pays ne pût être nommé notaire à Bruxelles.

Je n'ajouterai qu'un mot ; N'est-il pas d'une bonne politique, conforme à la justice, aux principes de notre loi fondamentale et à l'intérêt de nos populations, que chacun puisse faire rédiger ses actes dans la langue qui lui est familière: dans les localités où le flamand est usité, ne faut-il pas que le notaire sache le flamand, de même que dans celles où le français est en usage, il possède cette dernière langue ? Où est l'inconvénient d'écrire une règle à cet égard dans la loi, de même que l'on impose au notaire la connaissance d'autres matières ? Je pense, messieurs, qu'en envisageant froidement la question, bien loin d'être exagérée, la proposition que nous discutons est sage, modérée, d'une application facile et qu'au lieu de faire naître l'irritation, elle apaisera de justes griefs.

M. de Muelenaere. - Je pense qu'il faudrait légèrement modifier la disposition finale de l'article 36, lors même qu'il s'agit d'atteindre un but qui peut être désirable, il faut cependant éviter de tomber dans les exagérations.

On s'est demandé si un candidat qui ne savait pas le flamand pouvait être nommé à Bruxelles. La ville de Bruxelles, quant à l'usage des langues, est une ville qui n'est ni exclusivement française, ni exclusivement flamande. On y parle assez généralement les deux langues. Il serait absurde de prétendre qu'un candidat qui ne sait que le français et qui appartient à une des parties de la province dont Bruxelles est le chef-lieu, ne peut, parce qu'il ne sait pas le flamand, être nommé notaire à Bruxelles. Cela me paraîtrait très ridicule.

Ce qu'on doit vouloir, dans une ville comme Bruxelles où les deux langues sont en usage, c'est qu'il y ait un certain nombre de notaires qui connaissent à la fois les deux langues. Le gouvernement doit y veiller. Pour le reste il doit être libre de nommer des notaires qui ne parlent que l'une des deux langues.

Je suis persuadé que la section centrale l'entend ainsi. Mais pour qu'il n'y ait pas de doute, je pense qu'il convient de modifier la rédaction.

M. Vandenpeereboom. - En présentant l'amendement, je croyais qu'il n'y avait pas la moindre difficulté.

Quand l'article 17 a été discuté, l'honorable M. de Breyne a présenté un amendement. Il a été retiré sur l'assurance donnée par deux membres de la section centrale (les honorables MM. de Theux et Devaux) et du gouvernement que le paragraphe inséré dans l'article 36 par la section centrale comprenait l'amendement, c'est-à-dire qu'il avait cette portée. Si donc j'ai fait une proposition, c'est uniquement pour rendre le sens de l'article plus clair.

Puisqu'il y a une opposition inattendue, je crois devoir dire quelques mots.

Je reconnais que Bruxelles est dans une position toute particulière. C'est une ville où beaucoup de personnes qui ont affaire aux notaires parlent plutôt français que flamand ; mais n'ayant pas l'honneur de représenter la capitale du pays, je crois qu'il ne m'appartient pas de présenter un amendement pour obvier aux inconvénients signalés.

Si l'un ou l'autre député de Bruxelles veut présenter un amendement pour exempter cette ville de la disposition dont il s'agit, je l'examinerai volontiers et l'accepterai peut-être ; car je reconnais que Bruxelles est dans une position différente des autres localités flamandes du pays.

Je demanderai à la Chambre s'il ne serait pas injustifiable d'admettre dans une loi une disposition qui permettrait de nommer dans une localité un notaire qui ne parle pas la langue qui y est en usage et ne sache pas rédiger les actes eu cette langue.

Messieurs, on dit qu'ils ne demanderont pas la place. Mais si j'insiste aujourd'hui sur ce point, c'est que nous avons eu des exemples. J'ai vu nommer dans l'arrondissement d'Ypres, que j'ai l'honneur de représenter, un notaire qui ne savent pas le flamand. Il avait un clerc qui connaissait cette langue, et ce clerc rédigeait les actes. J'ai vu ainsi des notaires passant des actes auxquels ils ne comprenaient rien du tout.

Messieurs, ne croyez pas que ce que je propose soit dans l'intérêt exclusif des candidats et des notaires flamands. Nous imposons aux candidats flamands un double travail. Déjà, nous avons exigé qu'ils fissent preuve qu'ils savaient rédiger les actes en français. Nous demandons maintenant qu'ils ne puissent être nommés sans prouver qu'ils savent rédiger en flamand.

Ma proposition est toute dans l'intérêt du public. Il y aurait quelque chose d'incroyable à nommer des notaires qui ne peuvent instrumenter dans la langue parlée exclusivement par les intéressés. Ainsi, on vous l'a dit, il arrive souvent que quand on passe un acte de vente en français, le cultivateur qui vend ne sait pas à quoi il s'oblige.

L'inconvénient se présente aussi pour les testaments. Un notaire qui ne connaît pas le flamand peut être appelé, au dernier moment, par le testateur qui ne connaît que cette langue, et ce notaire ne peut pas exprimer convenablement les dispositions qu'on lui dicte.

Il me paraît, messieurs, que ce serait un acte anomal, que ce serait ne pas tenir compte des intérêts, d'une grande partie de la population (page 661) que de ne pas exiger la connaissance du flamand des notaires appelés à instrumenter dans les parties flamandes. On a comparé les notaires aux avocats et aux médecins. Mais il y a ici une très grande différence. Mous savons tous qu'il n'y a pas disette d'avocats ; nous nous plaignons même souvent qu'il y en ait trop.

Lorsque l'un ne convient pas, on peut en prendre un autre. Mais il n'en est pas toujours ainsi des notaires. Sans doute Bruxelles fait exception ; on y trouve un grand nombre de notaires. Mais dans certains cantons on ne trouve que deux ou trois notaires.

Quelquefois un de ces notaires n'instrumente pas. La chose est ainsi extrêmement limitée.

J'insiste, messieurs, sur ce point. Je demande qu'on ne force pas les populations qui ne parlent que le flamand à avoir recours à des notaires qui ne peuvent les comprendre et qui ne peuvent exprimer leur pensée.

M. Tesch. - J'ai demandé tantôt une explication, j'en désirerais une autre sur le sens que la section centrale attache au paragraphe qu'elle a introduit dans la loi.

Je demanderai si les notaires qui sont actuellement en fonctions et qui changeront de résidence devront se présenter devant le jury et recevoir encore un certificat d'aptitude en ce qui concerne la langue flamande.

Si telle est l'intention de la section centrale, ce sera un motif de plus pour moi de voter contre cette disposition qui aurait ainsi des effets rétroactifs.

Lorsque les notaires ont été nommés, ils avaient rempli les formalités qui à cette époque étaient exigées par la loi, et l'on ne peut exiger d'hommes qui ont été dix, quinze ou vingt ans en exercice, qu'ils aillent de nouveau passer un examen.

M. Coomans. - Messieurs, l'opinion exprimée par l'honorable comte de Muelenaere est la mienne et il me semble qu'elle est également celle de la Chambre. Mais dès lors il faut supprimer le paragraphe qui nous occupe. En effet, l'amendement de l'honorable M. Verhaegen créerait des difficultés nouvelles.

M. Verhaegen. - Je n'ai pas proposé d'amendement.

M. Coomans. - L'ombre d'amendement, si vous le voulez, que l'honorable M. Verhaegen a annoncée, créerait des difficultés nouvelles. Nous ne savons pas toujours ce qu'il faut entendre par canton rural. Ixelles, par exemple, est rural. Dans le cas supposé par l'honorable M. Verhaegen, il faudrait donc faire preuve de connaissances en langue flamande, pour être comme notaire à Ixelles. Eh bien, franchement ; c'est une exigence que, pour mon compte, je ne formule pas.

Je trouverais la suppression de cette disposition d'autant plus simple et d'autant plus rationnelle, que nous n'avons pas exigé, par la loi, la connaissance de la langue flamande pour une foule de fonctions où elle est plus nécessaire, plus indispensable que pour les fonctions de notaire. Ainsi, si vous voulez être logique, dites que nul sera nommé procureur du roi, juge, officier, douanier, contrôleur, receveur, etc., etc., s'il n'a fait preuve de connaissance en flamand. (Interruption.)

Ce ne serait que juste, me dit-on. Mais cela n'existe pas jusqu'à présent. Or, comme cela n'existe pas dans des cas où, je le répète, il est souvent nécessaire et même indispensable de savoir le flamand, je ne vois pas pourquoi nous créerions des difficultés nouvelles pour les notaires seulement.

Je voudrais, messieurs, laisser à l'appréciation du gouvernement les faits qu'on nous propose de réglementer. Le gouvernement sera juge de ce chef, comme il l'est dans une foule d'autres cas. Nous ferons, je le répète, chose rationnelle en supprimant le paragraphe, parce que nous ne formulons pas de pareilles exigences pour des magistrats, etc., vis-à-vis desquels le public n'a pas même le choix comme il l'a vis-à-vis des notaires.

Cette disposition est, du reste, tout à fait accessoire ; car la loi dont nous nous occupons concerne les jurys d'examen et non le notariat. Je propose donc formellement la suppression du paragraphe dont il s'agit, laquelle implique le rejet de l'amendement de l'honorable M. Vandenpeereboom.

M. Rodenbach. - L'honorable M. Vandenpeereboom vous a dit que ce serait un acte anomal que de nommer dans les Flandres, dans un pays flamand, un notaire qui ne connaît pas la langue flamande.

J'irai plus loin et je dirai que nommer un notaire qui ne connaît que l langue française, dans un canton où il est continuellement dans le cas de devoir parler avec des personnes qui ne connaissent que le flamand, serait un acte de mauvaise administration.

Mais je ne crois pas qu'un ministre voulût nommer dans la partie flamande du pays, un homme qui ignorerait complètement la langue qui y est en usage.

On a parlé de Bruxelles et de sa banlieue. Bruxelles compte 153,000 âmes. Mais la banlieue en compte à peu près 100,000 qui parlent généralement la langue flamande et je crois que dans ces cantons ruraux il faut aussi des notaires qui connaissent le flamand. Je ne demande pas qu'on l'exige dans la loi ; mais je dis que c'est une considération à laquelle le ministre doit avoir égard.

J'ai surtout demandé la parole, messieurs, pour soutenir l'amendement de M. Lelièvre.

M. le président. - M. Rodenbach, l'amendement de M. Lelièvre ne se rapporte pas à l'article actuellement en discussion.

M. Rodenbach. - lors je demanderai de nouveau la parole plus tard. Je proposerai aussi un amendement.

M. Lelièvre. - A mon avis, la prescription dont nous nous occupons ne devrait pas être insérée dans une disposition législative, parce que, dans l'exécution, elle peut donner lieu à des inconvénients sérieux. On devrait abandonner au gouvernement le soin de régler le point dont il s'agit, conformément aux besoins des localités.

Sans doute, un ministre qui nommerait, pour un canton où la langue flamande est usitée, un notaire n'ayant aucune connaissance de cette langue, poserait un acte de mauvaise administration ; mais, à mon avis, c'est là un acte d'exécution qui doit être abandonné au pouvoir exécutif sous sa responsabilité.

D'ailleurs, il est impossible d'admettre une disposition aussi vague que celle qui est présentée par la section centrale. En effet, les expressions canton où la langue flamande est usitée donneront lieu à des difficultés sérieuses ; on se demandera à quels cantons s'appliquera semblable énonciation.

A mon avis, ce qu'il y a de mieux à faire, c'est de supprimer un article dont l'application serait très difficile, et il est préférable de se référer au gouvernement qui, dans les nominations, ne doit pas perdre de vue les intérêts des populations.

- La clôture est demandée.

M. de Theux, rapporteur. - M. Vandenpeereboom a dit que l'article 17 a été voté ensuite de la déclaration qui avait été faite que l'article 36 serait rédigé comme il vient de le proposer.

Ceci, messieurs, est exact ; mais je ferai remarquer à l'honorable membre que si on n'adopte pas son amendement, ni la proposition de la section centrale, il sera libre de revenir sur l'article 17 et de demander que la rédaction des actes en langue française ne fasse point obligatoirement partie de l'examen. Ainsi il n'y aura pas de surprise.

Quant à la question posée par l'honorable M. Tesch, il est certain que si la loi est adoptée le gouvernement ne pourra pas nommer, dans une localité où l'on parle plusieurs langues, un notaire qui ne connaisse pas ces langues, ni autoriser un changement de résidence qui amène le même résultat. Bien que j'aie donné mon adhésion à la proposition de la section centrale, je suis prêt à en voter la suppression. Je dirai seulement que cette proposition aura eu son côté utile.

M. de Breyne. -Messieurs, je suis l'auteur de l'amendement à l'article 17 ; je n'ai pas voulu y revenir parce que la Chambre a été occupée assez longtemps de cet article ; mais aujourd'hui que la question se présente de nouveau, je demanderai à faire connaître en très peu de mots mou opinion.

M. Dumortier. - Messieurs, comme il paraît que beaucoup de membres attachent un grand prix à cette discussion, je demanderai qu'on épuise la liste des orateurs.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, quelque désir que j'aie de voir la Chambre avancer dans la discussion de la loi, il me semble qu'il s'agit ici d'une question fort importante, du respect que nous devons montrer pour la langue des populations. J'avoue que l'article tel qu'il est rédigé pourrait donner lieu, dans l'application, à des difficultés sérieuses ; la question pourrait encore être examinée d'ici à demain et peut-être trouvera-t-on une solution à ces difficultés.

- La séance est levée à 4 heures trois quarts.