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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 3 février 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. Delehaye.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 639) M. Crombez procède à l'appel à une heure et un quart ; il lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée ; il présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Les sieurs Gréban, Chantreil et autres représentants des sociétés concessionnaires des chemins de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse, de la Flandre occidentale, de Charleroi à Louvain, de Minage à Wavre, d'Anvers à Rotterdam, d'Anvers à Gand, d'Aix-la-Chapelle à Maestricht et Landen, de Lierre à Turnhout, de Châtelineau à Morialmé, présentent des observations sur le projet de loi qui autorise le gouvernaient à réglementer l'exploitation et la police des chemins de fer concédés. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.


(page 640) « Les sieurs Bois, Dalcq et Antoine, gardes forestiers à Couvin, demandent une augmentation de traitement. »

« Même demande des sieurs Ansiaux et Bourguet, gardes forestiers à Petigny. »


- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi concernant un crédit pour augmenter les traitements des employés inférieurs de l'Etat.

« Le sieur Le Revert, commissionnaire de commerce à Anvers, né à Rouen (France), demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« Des habitants de Steenhuysen demandent la révision de la loi du 25 ventôse an XI. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Sabot, ancien ouvrier houilleur, décoré de la croix de Fer, demande la pension des décorés de la croix de Fer ou une augmentation de pension. »

- Même renvoi.


« Le sieur Schmidt, ancien ouvrier, décoré de la croix de Fer, demande une pension. »

- Même renvoi.

M. de Baillet-Latour demande un congé de quelques jours.

Composition des bureaux de section

Composition des bureaux des sections du mois de février

Première section

Président : M. de La Coste

Vice-président : M. Lesoinne

Secrétaire : M. Laubry

Rapporteur de pétitions : M. Van Renynghe


Deuxième section

Président : M. Osy

Vice-président : M. Wautelet

Secrétaire : M. Van Iseghem

Rapporteur de pétitions : M. Jacques


Troisième section

Président : M. Lelièvre

Vice-président : M. Coppieters ‘t Wallant

Secrétaire : M. Calmeyn

Rapporteur de pétitions : M. Van Cromphaut


Quatrième section

Président : M. Lebeau

Vice-président : M. de Moor

Secrétaire : M. de Perceval

Rapporteur de pétitions : M. de Paul


Cinquième section

Président : M. de Renesse

Vice-président : M. Moreau

Secrétaire : M. Crombez

Rapporteur de pétitions : M. Moncheur


Sixième section

Président : M. Le Bailly de Tilleghem

Vice-président : M. Matthieu

Secrétaire : M. de Portemont

Rapporteur de pétitions : M. Vander Donckt

Proposition de loi relative à la contrainte par corps sur des étrangers

Lecture

M. le président. - Les sections ayant autorisé la lecture de la proposition de loi déposée par M. de Brouckere, l'auteur est prié de venir la lire à la tribune.

M. de Brouckere (à la tribune). - Messieurs, voici le texte de la proposition de loi que j'ai eu l'honneur de déposer.

« Léopold, etc.

« Art. 1er. Toute personne non stellionataire, incarcérée pour dettes civiles, obtiendra son élargissement de plein droit par le laps de cinq années consécutives de détention.

« Art. 2. La contrainte par corps en matière de commerce ne pourra être prononcée contre les débiteurs qui auront commencé leur soixante et dixième année.

« Art. 3. L'emprisonnement pour dettes commerciales cessera de plein droit le jour où le débiteur aura commencé sa soixante et dixième année.

« Art. 4. Les articles 18, n°6 du titre III de la loi du 18 germinal an VI, 800, n°5 du Code de procédure civile, 1, 2 et 3 de la précédente loi et l'article 2066, paragraphe premier du Code civil, en tant qu'ils concernent les septuagénaires, sont applicables aux étrangers.

« Art. 5. Quinze jouis après la promulgation de la présente loi, tous débiteurs belges ou étrangers actuellement détenus pour dettes civiles ou commerciales obtiendront leur élargissement, s'ils ont commencé leur soixante et dixième anuée, ou si leur détention a duré cinq ans, à l'exception, toutefois, des stellionataires, à l'égard desquels il n'est point dérogé au Code civil. »

Développements et prise en considération

M. le président. - A quel jour M. de Brouckere désire-t-il présenter les développements de sa proposition ?

M. de Brouckere. - M. le président, immédiatement si la Chambre y consent ; je suis prêt.

- La Chambre consultée décide qu'elle entendra immédiatement les développements de la proposition de loi.

(Nous publierons ces développements.)


- La Chambre décide qu'elle procédera immédiatement à la discussion pour la prise en considération de la proposition de loi.

La discussion est ouverte.

M. Lelièvre. - Je crois devoir appuyer la prise en considération de la proposition de M. de Brouckere. Depuis longtemps j'ai signalé la nécessite de réviser la loi sur la contrainte par corps.

Notre législation, sous ce rapport, est essentiellement vicieuse, et personne ne méconnaît les abus auxquels elle donne lieu. Je considère la proposition de M. de Brouckere comme un pas dans la voie d'une réforme devenue indispensable, et je ne puis que lui donner mon assentiment.

M. de Muelenaere. - Messieurs, je pense qu'il y a quelque chose à faire en matière de contrainte par corps ; notre législation a besoin d'être révisée sur ce point. Je me réserve cependant d'examiner mûrement la proposition qui vient d'être déposée par l'honorable M. de Brouckere. Comme toutefois la prise en considération n'est autre chose qu'une sorte de déclaration par la Chambre qu'il y a lieu à délibérer sur une proposition qui lui est soumise, je ne vois aucun inconvénient à ce que la Chambre décide dès à présent que la proposition de l'honorable M. de Brouckere est prise en considération.

- Personne ne demandant plus la parole, la discussion est close. La Chambre consultée prend la proposition de loi en considération.

M. le président. - De quelle manière la Chambre entend-elle faire l'examen de la proposition de loi ?

- Des membres. - Il faut la renvoyer à l'examen d'une commission spéciale.

M. de Brouckere. - Messieurs, je n'ai aucune raison de préférer tel mode d'examen de ma proposition, à tel autre ; mais il me semble qu'il serait convenable qu'elle fût examinée par une commission spéciale composée de jurisconsultes et de négociants.

M. Delfosse. - Je propose le renvoi à la commission chargée de l'examen du projet de loi d'organisation judiciaire.

M. de Brouckere. - Il m'est indifférent à quelle commission ma proposition sera renvoyée.

M. de Perceval. - Je ne m'oppose pas à la proposition que vient de faire l'honorable M. Delfosse, mais je crains cependant que ce soit une fin de non-recevoir ; car, si nous arrivons à la fin de la session sans avoir été saisis du travail de la commission spéciale qui est chargée d'examiner l'organisation judiciaire et si nous n'avons pas eu le temps de discuter le rapport de cette commission spéciale, l'examen de la proposition de loi de l'honorable M. de Brouckere se trouvera donc aussi forcément ajourné.

M. Delfosse. - Si j'ai proposé le renvoi de la proposition de l'honorable M. de Brouckere à la commission spéciale qui est chargée de l'examen du projet de loi sur l'organisation judiciaire, c'est que cette commission est composée d'hommes compétents ; ce renvoi n'entraînera aucune espèce de retard, car il va sans dire que la commission n'attendra pas qu'elle ait terminé son travail sur l'organisation judiciaire pour faire son rapport sur la proposition de l’honorable M. de Brouckere. Cette proposition a un caractère d'urgence, qui sera, je n'en doute pas, apprécié par la commission.

M. de Muelenaere. - J'avais demandé la parole pour faire la même observation que l'honorable M. Delfosse ; la commission n'attendra pas que son travail sur l'organisation judiciaire soit terminé, pour faire un rapport sur la proposition spéciale de l'honorable M. de Brouckere. On demande le renvoi à cette commission parce qu'elle est composée d'hommes compétents pour juger de l'utilité ou des inconvénients que la proposition pourrait présenter.

M. de Perceval. - Du moment que la commission spéciale veut prendre l'engagement de faire un prompt rapport sur la proposition de loi due à l'initiative de l'honorable M. de Brouckere, je n'ai plus d'objection à faire à ce qu'elle lui soit renvoyée.

- La proposition de loi de M. de Brouckere est renvoyée à la commission chargée d'examiner le projet de loi d'organisation judiciaire.

Projet de loi sur les jurys d’examen universitaire

Discussion des articles

Titre premier. Des grades académiques et des jurys d'examen

Chapitre II. Des examens
Article 19

M. le président. - La Chambre en était restée à l'article 19.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Cet article doit disparaître.

Il n'y a que ia disposition finale qui puisse être maintenue en partie. La question est de savoir s'il faut en faire un article spécial.

M. Delfosse. - La section centrale propose d'en faire l'objet d'une disposition spéciale.

M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, je pense que l'article 19, tel que l'a proposé la section centrale, doit être maintenu, d'autant plus que j'ai proposé une disposition additionnelle qui me paraît indispensable.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Pourquoi la section centrale a-t-elle ajouté les mots « par séries » ?

M. de Theux, rapporteur. - Ces mots peuvent s'appliquer au jury central. Tous les élèves doivent s'inscrire à une époque déterminée. On peut par un tirage au sort établir des séries. Je crois que cela s'est toujours pratiqué ainsi.

Je proposerai d'ajouter à la disposition de la section centrale le paragraphe suivant :

« Le gouvernement prend des mesures réglementaires pour les examens par écrit prévus par l'article précédent. »

Puisqu'on prévoit le cas d'un examen par écrit, lorsque la majorité du jury l'autorise, il faut que le gouvernement puisse prendre des mesures réglementaires.

(page 641) M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je ne m'étais pas rallié complètement à la rédaction de la section centrale, parce que la section centrale se sert des mots « par séries ». Or ces mots « par séries » supposent le jury central, devant lequel doivent se présenter tous les élèves. Je concevrais qu'alors on dût établir des séries ; mais maintenant que nous avons décidé que l'article 40 de la loi de 1849 sera prorogé, qu'il y aura lieu par conséquent à maintenir le système du jury combiné allant d'une ville universitaire à l'autre, je ne vois plus l'utilité des mots « par séries ».

M. de Theux, rapporteur. - Je crois que provisoirement il convient d'adopter la proposition de la section centrale. L'examen par séries peut être très utile pour le jury central, qui existe encore. On peut aussi organiser l'examen par séries dans le jury combiné ; il n'y a aucun inconvénient. Du reste il y aura nécessairement un second vote sur cet article.

Et puis le paragraphe proposé par la section centrale sert de point de départ pour la disposition additionnelle, devenue nécessaire par suite du vote qui a eu lieu dans la séance de samedi, qui permet à la majorité du jury d'autoriser une épreuve par écrit, complémentaire de l'épreuve orale.

M. Delfosse. - On ne peut pas exiger d'une manière impérative par la loi, que l'examen ait lieu par séries. Il peut arriver que le nombre des récipiendaires soit tellement petit, qu'il n'y ait pas moyen d'établir des séries ; on pourrait dire : « Les élèves seront examinés par séries, s'il y a lieu et suivant l'ordre de priorité déterminé par un tirage au sort. »

- L'article, modifié comme le propose M. Delfosse, est adopté.

La disposition additionnelle, proposée par M. de Theux, est adoptée.

L'ensemble de l'article est adopté.

Article 20

L'article 20, par suite du vote relatif à l'examen par écrit, est supprimé.

Article 21

« Art. 21. L'examen oral dure une heure par récipiendaire. Néanmoins, il dure une heure et demie pour les doctorats en philosophie et lettres et en sciences. »

La section centrale propose la rédaction suivante :

« Art. 21. L'examen oral dure une heure et demie pour un seul récipiendaire, et trois heures, s'il y en a deux ou trois. »

M. de Theux propose, par amendement, d'ajouter à l'article du gouvernement la disposition suivante :

« L'examen dure une heure par récipiendaire, pour la candidature en philosophie et lettres préparatoire au droit, pour la candidature en sciences naturelles, pour la candidature et le doctorat en droit et pour celui de candidat notaire. La durée des épreuves préparatoires prévues par la présente loi est fixée par le gouvernement. »

M. de Theux, rapporteur. - Voici les motifs de l'amendement que je propose :

Le projet du gouvernement portait une heure et demie d'examen pour un seul récipiendaire, et trois heures s'il y avait deux ou trois élèves.

La section centrale avait adopté seulement une heure par récipiendaire. Elle se fondait sur ce qu'on avait dispensé de l'examen sur plusieurs matières en en faisant des matières à certificats. Cependant la section centrale proposait la durée d'une heure et demie pour les doctorats en philosophie et lettres et en sciences.

Nous nous sommes concertés avec l'honorable M. Devaux pour la production de l'amendement que j'ai proposé.

Nous proposons une heure pour la candidature en philosophie et lettres (cet examen ne porte plus sur beaucoup de matières) ; pour la candidature en sciences naturelles ; pour les examens en droit (une heure par récipiendaire suffit aussi), enfin pour l'examen de candidat notaire.

Mais, il y avait une lacune. Il faut déterminer la durée des épreuves préparatoires. Nous abandonnons ce soin au gouvernement qui prendra des mesures d'administration.

Pour la médecine nous maintenons le projet du gouvernement. Nous adoptons donc son projet, sauf que nous réduisons d'une demi-heure pour la candidature en philosophie et lettres préparatoire au droit, pour la candidature en sciences naturelles, pour la candidature et pour le doctorat en droit et pour celui de candidat notaire.

Je ferai observer que ceci étant un amendement sera de nouveau soumis à l'examen de la Chambre au second vote. Et à cette occasion je demanderai que la Chambre veuille bien ordonner le renvoi du projet à la section centrale pour coordonner toutes les dispositions qui auront été prises au premier vote, pour s'assurer qu'il n'y a pas de lacune ou de vice de rédaction.

M. Verhaegen. - Je crains beaucoup qu'avec ces amendements qui surgissent à l'improviste et que l'on vote immédiatement, nous ne votions des dispositions qui ne se coordonnent nullement. On dit qu'il y aura un second vote ; mais cette garantie me paraît insuffisante, et quant à moi, plutôt que d'établir à l'improviste des mesures qui pourraient produire des inconvénients, je préférerais qu'on abandonnât au gouvernement le soin, après avoir pris les hommes compétents, d'établir des dispositions à cet égard.

Un premier inconvénient qui se présente à ma pensée, est celui-ci : l'honorable M. de Theux demande une heure pour la candidature en droit et une heure pour chacun des examens du doctorat. Eh bien, je crois qu'il faudrait une différence quant aux différents grades. Par exemple, d'après ce qui a été arrêté dernièrement, vous n'avez plus, pour la candidature en droit, de matière d'examen que les institutes et l'histoire du droit romain, car le droit civil élémentaire, que nous avons fait admettre, n'est qu'une matière à certificat. Vous avez voulu rendre l'examen plus facile, eh bien, messieurs, je défie l'élève qui a le mieux étudié, de passer une heure d'examen sur les institutes. Je vais plus loin, je ne crois pas que les examinateurs soient à même d'examiner pendant une heure sur les institutes. (Interruption.)

Je ne citerai pas de noms propres, mais il est à ma connaissance qu'un magistral très haut placé s'était fait un canevas pour interroger sur le droit romain. Malheureusement il avait compté sur la coopération de collègues qui refusèrent de lui venir en aide, et au bout d'un quart d'heure il fut en défaut et obligé de s'arrêter.

Si je vous indiquais le magistrat à qui cela est arrivé, vous seriez bien étonnés.

Je le répète, messieurs, je crains fort que des amendements ainsi introduits à l'improviste ne nous conduisent fort loin et que nous ne fassions en définitive un projet de loi n'offrant plus que de l'incohérence.

Il vaudrait peut-être mieux, messieurs, de renvoyer l'amendement de l'honorable M. de Theux à la section centrale.

M. Lelièvre. - Je demande également le renvoi de l'amendement de M. de Theux à la section centrale ; cette mesure me semble nécessaire afin de mettre la disposition proposée en harmonie avec les autres articles de la loi. Il s'agit de détails qui doivent être examinés.

M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, je n'éprouverais absolument aucune espèce de répugnance pour ce renvoi, mais je ferai observer à l'honorable membre que notre temps est déjà parfaitement rempli et que les réunions de la section centrale, pendant la discussion première de la loi, ne sont pas sans inconvénient pour la discussion même. Mais voici comment on pourrait procéder : après le premier vote nous faisons réimprimer les divers projets mis en regard, le projet du gouvernement, celui de la section centrale ci celui qui aura été adopté par la Chambre ; eh bien, dans une quatrième colonne nous pourrions faire figurer les nouvelles propositions que la section centrale aurait à faire pour mettre toutes les dispositions en harmonie.

On pourrait ensuite prendre un temps suffisant pour permettre au gouvernement et aux membres de la Chambre d'examiner à fond et définitivement le dernier projet et de voir si tout est parfaitement coordonné. La Chambre pourrait juger alors, au second vote, s'il y a lieu d'adopter l'opinion de M. Verhaegen, qui consiste à laisser au gouvernement le soin de fixer la durée des examens, après avoir pris les renseignements nécessaires.

M. Verhaegen. - Messieurs, je crois que nous gagnerions du temps en renvoyant la proposition de la section centrale. Si nous commençons par adopter une disposition qui ne seront pas admise plus tard, il y aura peut-être des dispositions subséquentes qui ne seraient plus en rapport avec celle que la Chambre substituerait à la disposition dont il s'agit. Il y a dans ce mode de procéder quelque chose qui m'effraye. Le gouvernement nous a présenté un projet ; la section centrale tranche dans ce projet à toutes mains, et quand la section nous a présenté son projet à elle, son honorable rapporteur vient nous présenter des amendements qui ont une assez grande portée. Je crains qu'après une si longue discussion, nous n'aboutissions pas. Il y a déjà tant de dispositions adoptées qui se croisent, qu'il n'y a plus d’ensemble. Si je devais voter en ce moment sur l'ensemble de la loi, je devrais voter contre.

M. Devaux. - Messieurs, je pense qu'on ferait bien de renvoyer les amendements sur cet article à l'examen de la section centrale. Il s'agit d'une organisation de détails. Je crois que le projet du gouvernement et celui de la section centrale avaient été un peu loin, en raison de ce qui existe ; or, l'amendement de l'honorable M. de Theux a pour but de se rapprocher des dispositions en vigueur. Je demande que cet amendement soit renvoyé à la section centrale ; on pourrait fixer la séance publique de la Chambre à 2 heures ; l'examen de l'amendement par la section centrale nous fera gagner du temps.

M. de Muelenaere. - Messieurs, la question que soulève l'amendement qui a été présenté, me semble assez importante ; je crois aussi qu'il vaudrait mieux renvoyer cet amendement à la section centrale ou bien abandonner, comme l'a dit l'honorable M. Verhaegen à l'appréciation du gouvernement toutes les dispositions relatives à la durée des examens.

Il me semble que pour l'examen de candidats notaires, par exemple, la durée proposée par l'honorable M. de Theux ne serait peut-être pas suffisante. Le candidat notaire doit être interrogé sur diverses matières, et, en outre, il est appelé à rédiger un acte eu langue française ; s'il le désire, il pourra même être admis à rédiger un acte en langue flamande ou en langue allemande ; évidemment il y aura des candidats qui useront de cette dernière faculté ; il est donc désirable qu'ils aient le temps de rédiger les deux actes d'une manière satisfaisante ; or, il me semble qu'indépendamment des autres examens, une heure ne serait pas suffisante pour répondre aux diverses questions qui leur seront proposées el composer les deux actes dont la réduction leur sera imposée.

Je crois qu'il faudrait consulter sur ce point les hommes du métier, et entendre des notaires qui ont l'habitude d'interroger les élèves sur de semblables matières.

(page 642) M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, l'article 55 de la loi du 15 juillet 1849 fixait une durée spéciale pour chacun des examens. Cette durée variait d'une heure à deux heures. L'examen pour la plupart des doctorats était de 2 heures, d'une heure et demie pour certaines candidatures et d'une heure pour d'autres candidatures.

Le gouvernement avait fixé d'une manière générale l'examen oral à une heure et demie, il avait eu pour cela deux motifs. D'abord, dans le projet du gouvernement, il y avait un examen par écrit. Or, l'examen oral commence par la lecture attentive de l'examen par écrit : ce qui prend un quart d'heure et quelquefois même une demi-heure. Ensuite, le nombre des matières d'examen, dans le projet primitif du gouvernement, était plus ou moins considérable ; il fallait donc de ce chef encore donner une durée plus longue à l'épreuve.

Mais maintenant qu'il n'y aura plus d'examen que sur certaines matières, et que, d'un autre côté, il n'y aura plus lieu de donner lecture de l'examen par écrit, en supposant que la Chambre maintienne sa première décision, je ne crois pas qu'il faille encore une durée aussi longue pour l'examen oral.

Du reste, comme, cet objet a une certaine importance, il serait convenable de renvoyer l'amendement à la section centrale.

- La Chambre consultée renvoie l'amendement à l'examen de la section centrale.

Article 22

« Art. 22 (projet du gouvernement.) Tout examen oral est public ; il est annoncé dans le Moniteur. Le récipiendaire n'est pas tenu de comparaître, s'il n'a été prévenu au moins trois jours d'avance ou par la voie du Moniteur. »

La section centrale propose de rédiger cet article ainsi qu'il suit :

« Art. 22. Tout examen oral est public ; il est annoncé trois jours au moins d'avance dans le Moniteur. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je me rallie à la proposition de la section centrale.

M. Verhaegen. - D'après cette proposition, il suffira de prévenir les récipiendaires par la voie du Moniteur. Leur enverra-t-on le Moniteur ? Il vaut mieux les avertir par lettres affranchies à la poste. Je demande la substitution de la copulative « et » à la disjonctive « ou ».

M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, ce que propose la section centrale est une amélioration de ce qui existe. Jusqu'à présent les récipiendaires n'ont été prévenus que par le Moniteur. Il est très facile de comprendre que tous ceux qui sont intéressés à se présenter aux examens, prennent connaissance du Moniteur qui doit les informer du jour où ils doivent comparaître. Cependant, comme des récipiendaires ont cherché quelquefois à justifier leur absence de l'examen, par la circonstance qu'ils n'avaient pas été avertis à temps par le Moniteur, la section centrale a ajouté à l'article une disposition qui ôtera désormais au récipiendaire ce motif d'excuse.

M. Lelièvre. - Dans l'état actuel des choses, les élèves sont informés du jour de l'examen non seulement par le Moniteur, mais aussi par une lettre spéciale que leur adresse le secrétaire du jury qui doit les interroger. Il me semble qu'il faut maintenir cet état de choses. Eh effet, comme l'a fort bien dit l'honorable M. Verhaegen, tous les élèves ne lisent pas le Moniteur et il importe cependant que tous connaissent le jour de l'examen. Une information spéciale par lettre me semble indispensable.

Du reste, il n'y a aucun motif de s'écarter des usages suivis jusqu'à ce jour, usages qui n'ont donné lieu à aucun inconvénient.

Il s'agit ici d'un objet important pour l'élève, qui a bien le droit de demander d'être informé par lettre du jour d'une épreuve qui l'intéresse notablement. Maintenons donc ce qui s'est passé jusqu'aujourd'hui. .

M. Verhaegen. - Je propose la conjonctive au lieu de la disjonctive.

M. Devaux. - Il y a une autre raison de la nouvelle disposition proposée ; toujours il arrive que des élèves inscrits ne se présentent pas. Il en résulte des chômages, si tout examen doit être annoncé trois jours à l'avance. Car alors on ne peut pas interrompre sans ce délai l'ordre primitivement réglé. D'après les dispositions les jours devenus ainsi vacants pourront être remplis par d'autres élèves, s’ils y consentent ; mais ces élèves ne sont tenus de se présenter que s'ils ont été avertis trois jours à l'avance.

- L'amendement proposé par M. Verhaegen est mis aux voix et adopté après une première épreuve déclarée douteuse.

L'art. 22 ainsi amendé est mis aux voix et adopté.

Article 23

« Art. 23 (projet du gouvernement). Après chaque examen oral, le jury délibère sur l'admission et le rang des récipiendaires. Il est dressé procès-verbal du résultat de la délibération. Ce procès-verbal mentionne le mérite de l'examen écrit et de l'examen oral ; il en est donné immédiatement lecture aux récipiendaires et au public.

« Art. 23 (projet de la section centrale). Art. 23. Après chaque examen, le jury délibère sur l'admission des récipiendaires. Il est dressé procès-verbal du résultat de la délibération. Il en est donné immédiatement lecture aux récipiendaires et au public. »

M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-il à la proposition de la section centrale ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - La section centrale propose de supprimer de l'article du gouvernement les mois « et le rang des récipiendaires », c'est à-dire que la section centrale est conséquente avec la décision qu'elle a prise à l'article 29, où elle a jugé convenable de supprimer toutes les distinctions dans les grades.

Le gouvernement ne peut pas se rallier à une pareille suppression. Le gouvernement est d'avis que le maintien des distinctions dans les divers grades obtenus par les élèves est une chose essentielle comme moyen d'émulation entre les élèves et même entre les divers établissements d'enseignement supérieur que nous avons en Belgique. Il y a là, d'ailleurs, une question de justice à l'égard des élèves. Si nous voulons que chacun soit rémunéré selon ses œuvres, il faut que le jury soit investi de la faculté de reconnaître plus de capacité chez un élève que chez l'autre.

Ces distinctions ont encore un autre avantage qui est considérable. Elles servent à élever généralement le niveau des études universitaires.

S'il s'agissait seulement de faire déclarer que tel candidat qui veut exercer telle profession possède suffisamment de connaissances pour l'exercer sans danger pour la société, une simple admission suffirait. Mais nous sommes convenus que les examens universitaires ont un autre but que celui-là, celui d'élever le niveau des hautes études. Du moment qu'on veut se proposer ce but, il faut admettre les distinctions dans les grades.

Ces distinctions ont d'ailleurs leur utilité pratique. Les distinctions sont des moyens d'appréciation de la capacité des personnes qui, plus tard, se destinent à certaines fonctions. Il est bon que, pour l'admission à des fonctions, le gouvernement ait quelques moyens officiels d'apprécier l'intelligence des personnes qui aspirent à ces positions.

Ces distinctions offrent encore une autre utilité pratique pour la collation des bourses. Entre les élèves qui demandent des bourses, il faut bien faire un triage. Ce triage se fait, eu égard à la position de fortune, mais surtout eu égard à l'intelligence respective de ceux qui demandent des bourses.

Il y a donc utilité à ce que ces distinctions soient maintenues.

Les supprimer serait aller à rencontre des usages généralement admis, car pour l'admission à l'école militaire et dans la carrière diplomatique, on a toujours établi des distinctions dans les examens. Certains règlements tiennent compte, pour l'avancement dans la carrière, des distinctions obtenues dans les examens.

Il est donc, ce me semble, conforme à tous nos usages de maintenir ces distinctions.

On n'a articulé, que je sache, qu'un seul motif pour les supprimer : c'est qu'elles ont été la principale cause de discussions désagréables et parfois pénibles entre les membres du jury. Mais, c'est là un faible inconvénient, en présence des avantages que je viens d'indiquer, et qui, de l'aveu de tous, sont inséparables des distinctions.

M. Lelièvre. - Je propose d'abord de joindre la discussion de notre article avec celle de l'article 29, afin que la Chambre prenne en même temps une décision sur les deux dispositions qui ont entre elles une connexité intime. En effet, la proposition du gouvernement sur l'article 29, ayant pour objet de maintenir les distinctions, et notre article supposant ce maintien, puisqu'il énonce que le jury délibère sur l'admission et le rang des récipiendaires, il est évident que le moment est venu d'examiner si les distinctions continueront d'être accordées.

Quant à la question même qui est soumise à la Chambre, je partage l'avis de M. le ministre de l'intérieur, et je pense que, dans l'intérêt du niveau des études, il faut maintenir les distinctions.

En effet, il est évident qu'elles sont un stimulant puissant pour les intelligences d'élite. Si on les supprimait, les élèves de mérite, certains de leur admission, ne se livreraient plus à l'élude avec la même ardeur que s'ils pouvaient espérer une récompense honorifique.

C'est donc un moyen puissant d'émulation, que le système de la section centrale tend à faire disparaître.

Du reste, ce moyen d'encouragement était admis sous le régime des universités du roi Guillaume et il a produit d'heureux fruits, Enfin, à mon avis, la justice distributive ne permet pas de placer au même niveau l'élève qui a subi son examen d'une manière brillante et celui qui a simplement satisfait à ce qu'on pouvait rigoureusement exiger de lui. Je crois donc devoir me rallier au système du gouvernement.

M. Verhaegen. - J'appuie de toutes mes forces les observations qui viennent d'être faites par l'honorable ministre de l'intérieur et par l'honorable préopinant.

Je ne comprends pas comment il est possible que ceux qui prétendent que le niveau des études est baissé (je ne suis pas au reste, il s'en faut, de cet avis) trouvent qu'il faut précisément mettre de côté ce qui est de nature à les relever.

Vous avez déjà rendu les examens très faciles, beaucoup trop faciles d'après moi, car quoi qu'on en dise, pour moi il est évident que toutes les matières à certificats ne seront plus étudiées. Si maintenant l'élève (page 643) n’a plus le stimulant des distinctions, il fera juste ce qu'il faut pour obtenir l'objet matériel qu'il désire: le diplôme ; car malheureusement dans le siècle où nous vivons, on n'a pas autre chose en vue ; ou s'inquiète fort peu du reste.

Mais n'y aurait-il pas autre chose sous cette proposition ? Les distinctions que certains établissements ne peuvent obtenir attestent leur infériorité. N'est-ce pas pour cela qu'on en propose la suppression, comme on a demandé la suppression du grade d'élève universitaire, que moi-même j'avais demandée naguère sans m'être bien rendu compte de la portée de cette mesure ? Je serais curieux de connaître les raisons que l’on fait valoir. Pour moi, je pense qu'il faut maintenir les distinctions, dans l'intérêt des études, dans l'intérêt des élèves. Ce serait un grand mal d'adopter la proposition de la section centrale.

M. de Theux, rapporteur. - Je ferai d'abord observer que la motion de l'honorable M. Lelièvre, tendante à ce que la discussion sur l'article 25 soit jointe à la discussion sur l'article 29 ne peut être accueillie ; car l'article 25 admet seulement le principe des distinctions ; quand ce principe aura été admis, il y aura à examiner combien il y aura de distinctions.

Quant à moi, j'ai, en section centrale, combattu la disposition qu'elle a adoptée. J'ai défendu le projet de M. le ministre de l'intérieur que tous les honorables membres qui ont pris part à la discussion ont également défendu.

Ceci répond à une insinuation de l'honorable M. Verhaegen, car j'ai fortement combattu la suppression des distinctions, comme j'ai combattu le grade d'élève universitaire, sauf l'alternative des certificats et de l'épreuve préparatoire qu'a proposée la section centrale.

Ainsi l'honorable M. Verhaegen est dans l'erreur dans sa supposition.

Quant à moi, je suis convaincu que le maintien des distinctions est tout à fait essentiel pour que l'enseignement supérieur produise des élèves très distingués. Si vous supprimez cette disposition, vous arriverez à ce résultat que la plupart des élèves qui font de grands efforts pour obtenir la distinction n'en feront plus.

Ils travailleront seulement de manière à passer leurs examens. Ils ne feront plus les études fortes qu'ils doivent faire aujourd'hui pour obtenir la distinction.

Ainsi, je pense que la législation existant depuis 1835 doit être maintenue. C'est, à mon avis, une disposition essentielle de la loi qui doit être maintenue sous peine d'abaisser les études des jeunes gens les plus distingués, c'est-à-dire ceux auxquels le pays doit tenir essentiellement, parce que ce sont eux qui, dans toutes les positions de la vie publique, doivent jeter de l'éclat sur le pays.

Ainsi, je suis entièrement d'accord avec la proposition du gouvernement.

M. Devaux. - Il est très vrai que l'honorable M. de Theux a été de l'opinion de l'honorable M. Verhaegen dans la section centrale. Cinq membres ont été d'un avis contraire. L'honorable M. de Theux a été seul de son opinion.

M. de La Coste. - C'est une erreur.

M. Devaux. - C'est ce que le rapport constate. Il est extrêmement court ; il le dit cependant. Il porte : « L'article 23 maintient le système des distinctions dans l'admission des élèves, tel qu'il a existé depuis 1835, cette disposition a été rejetée en section centrale par cinq voix contre une. »

M. de Theux, rapporteur. - Mais il y a eu un deuxième vote.

M. Devaux. - Puisque le rapporteur combat la proposition de la section centrale, comme il faut bien qu'elle soit soutenue par quelqu'un, quoique je ne sois pas rapporteur, je vais en remplir les fonctions.

Nous arrivons à une partie de la loi où les dispositions n'ont plus une portée aussi grande que celle des dispositions précédentes. Les distinctions dont il s'agit ici n'ont d'action que sur un certain nombre d'élèves. Elles n'en ont pas sur la généralité, mais seulement sur cette classe d'élèves qui y aspirent.

J'ai longtemps répugné à m'associer à ceux qui demandaient l'abolition des distinctions dans les grades. Je trouvais regrettable d'enlever une récompense aux étudiants qui l'ont méritée par leur travail.

Mais je me suis éclairé par la lecture des enquêtes, par mon contact avec des hommes qui ont vu de près ce qui se passe dans le jury, et surtout par l'opinion que de tous côtés les hommes de science ont énoncée sur l'influence antiscientifique de l'examen.

Les raisons qu'on donne pour le retranchement des distinctions m'ont paru si fortes, que je n'ai pu y résister. La Chambre a rétabli le jury combiné. Or, tout le monde, sait que l'éccueil du jury combiné a été jusqu'à présent les conflits qui se sont élevés entre les professeurs, la vivacité de leurs dissentiments, les querelles en un mot, et tout le monde sait aussi que ces dissentiments prennent toujours naissance dans la collation des distinctions. Tout le monde a dit que lorsque le jury a à se prononcer sur la question de savoir si, un élève doit être admis ou rejeté, les dissentiments, s'il y en a, n'ont aucune espèce d'aigreur, et l'on comprend très bien pourquoi ; c'est que le jury, en présence d'une décision qui a une telle influence sur le sort d'un jeune homme, ne voudrait pas commettre une injustice. (Interruption.)

Il faut être juste en tout, m'objecte-t-on. Fort, bien, mais comme vous ne tenez pas la nature humaine dans vos mains pour en faire ce que vous voulez, il faut bien la subir.

Or, lorsque les distinctions, qui sont choses plus ou moins arbitraires, sont en délibération, ce n'est plus le sort des jeunes gens qui est en jeu, mais une récompense qu'on regarde tout autant comme celle de l'établissement que comme celle de l'élève ; et les enquêtes faites nous disent ; qu'aussitôt une partie du jury se transforme en avocats de l'élève admis, une autre en adversaires.

De là tous ces conflits, toutes ces querelles.

Or, lorsque le dissentiment s'est ainsi envenimé, il est naturel qu'il ait une influence sur toutes les délibérations ultérieures et il y a grand danger dès lors qu'il ne se fasse sentir jusque dans les décisions sur la simple admission.

L'impartialité, messieurs, c'est le premier mérite d'un juge quelconque.

La première chose à faire donc, c'est d'écarter du jury toute influence qui tend à le pousser hors des voies de l'impartialité.

La Chambre a voulu rétablir le jury combiné ; elle ne peut vouloir lui conserver les défauts que l'expérience a révélés lorsqu'il est facile de les amoindrir.

Sans doute, messieurs, cette récompense a de l'attrait pour les jeunes gens qui espèrent l'obtenir, mais leur est-elle utile ? Ne donne-t-elle pas une fausse direction à leur travail ? Les plaintes qui s'élèvent de toutes parts sur l'état des études, que signifient-elles ? Que nous dit-on de tous côtés ? L'examen, dit-on, n'est plus qu'un immense effort de mémoire, il épuise l'intelligence, il matérialise l'esprit de la jeunesse. Pourquoi ? Tout le monde nous le dit, parce qu'on travaille uniquement en vue de l'examen et non plus pour s'approprier la science elle-même. On cherche uniquement à acquérir une science qui ne durera que quelques jours, parce qu'elle n'est que de mémoire, au lieu de s'assimiler, par des études approfondies, des connaissances qui resteront toute la vie. Ainsi le travail se fait exclusivement en vue de l'examen. Voilà le défaut.

Messieurs, y a-t-il un moyen d'exciter les élèves les plus distingués, c'est-à-dire les esprits dont il importe le plus au pays lui-même d'assurer le développement, y a-t il un moyen de les faire travailler plus exclusivement en vue de l'examen, que ces distinctions qui excitent leur amour-propre ? Que faut-il dire aux élèves distingués ? Il faut leur recommander de ne pas tenir les yeux attachés sur l'examen, mais de travailler pour la science elle-même.

Les distinctions font précisément le contraire. Elles tournent constamment l'esprit de l'élève vers l'examen et l'excitent à ne pas se proposer d'autre but dans ses études. Or, l'élève sent très bien que devant des professeurs qui ne sont pas les siens, qui ne le voient pas travailler journellement, qui n'ont eu ni conférences ni conversations avec lui, le moyen le plus sûr de briller et de n'être pris au dépourvu sur rien, c’est d'exercer sa mémoire et de ne se fier qu'à elle. Ainsi cette voie, dont nous nous efforçons depuis plusieurs jours de sortir les études est précisément celle dans laquelle les distinctions enfoncent de plus en plus l'étudiant.

Il faut récompenser, dit-on, les intelligences d'élite. Je réponds que ces jeunes gens n'ont pas besoin d'être excités pour l'examen, ils ont besoin de la sérénité de leur esprit.

L'examen pèse assez sur eux. Laissez faire les jeunes gens distingués ; vous n'avez pas besoin de fixer leur attention sur les examens ; ils y penseront toujours assez. Poussez-les au travail scientifique, mais ne les en détournez pas par ces efforts mnémotechniques qui sont tout le contraire.

Ce stérile travail n'épuise pas seulement leur intelligence ; il est souvent tellement surexcité que les maladies sont devenues chose pour ainsi dire ordinaire chez les jeunes gens qui se préparent aux examens. Les fièvres célébrales, le typhus et d'autres genres de maladie, les épilepsies même, rien ne leur est épargné... (Interruption.) Vous niez. Voulez-vous que je vous en donne la preuve ? Savez-vous combien, chaque année, il y a d'élèves inscrits pour l'examen qui ne peuvent se présenter devant le jury, qui en sont incapables ? Il y en a tous les ans 75 à 80.

M. Verhaegen. - Parce qu'ils ne sont pas prêts.

M. Devaux. - Non pas parce qu'ils ne sont pas prêts, mais parce qu'il leur est impossible de se présenter devant le jury. Cela résulte des tableaux statistiques, où il y a une colonne toute spéciale pour les inscrits dont le jury reconnaît les causes légitimes d'absence, et une autre colonne pour les absences non légitimées.

Les absences de la première colonne ne peuvent être que celles qui sont motivées par des maladies ou des malheurs de famille. Ce sont celles-là qui s'élèvent, année moyenne, à 77. Ces jeunes gens s'étaient fait inscrire trois semaines auparavant. Dans l'intervalle, ils tombent malades et ne peuvent se présenter. Ce résultat vous paraît-il insignifiant ? Faut-il encore surexciter ce travail pour l'examen dans la classée des étudiants la plus laborieuse ?

Messieurs, je me demande : Est-ce bien la fonction du gouvernement, est-ce bien la fonction de l'Etat que de classer les hommes en savants, très savants, extrêmement savants ?

Que le gouvernement fasse ce qui est nécessaire pour la garantie sociale, qu'il fasse ce qui est d'une très grande milité pour les études, mais quant à mettre des étiquettes sur les individus, pour apprendre au (page 644) public le degré précis de science qu'ils ont, je dis que ce n'est pas sa fonction. Ce n'est pas le gouvernement qui doit mettre des écriteaux sur la porte des avocats et des médecins.

Le gouvernement s'assure du minimum de connaissances nécessaire pour exercer certaines professions ; quand ce minimum est constaté, ii n'a plus rien à faire.

Sous le roi Guillaume, messieurs, il y avait une formule de distinction, mais on y attachait si peu d'importance qu'à peine savait-on si on l’avait obtenue et les autres élèves n'en savaient rien.

Messieurs, quand le gouvernement fait passer des examens à des fonctionnaires, je conçois ces classements, c'est une manière de s'éclairer sur le choix qu'il a à faire ; mais alors il nomme le jury en conséquence et il a bien soin de ne pas le composer d'éléments rivaux dont les uns ont intérêt à favoriser et les autres à déprécier les récipiendaires. Comment voulez-vous qu'un jury composé de professeurs appartenant à des établissements rivaux s'entende sur ces distinctions ? Qu'arrive-t-il ? On invente tous les moyens pour se mettre d'accord et on n'y parvient pas. On a la manière satisfaisante, la distinction, la grande distinction et la plus grande distinction ; eh bien, messieurs, on trouve que ce n'est pas assez et pour se mettre d'accord, on invente encore des degrés intermédiaires, afin que quand l'un veut une distinction et l'autre une distinction plus grande, on puisse transiger.

On a inventé ainsi, je pense, la mention honorable pour tenir le milieu entre deux autres modes d'admission.

Si la Chambre ne veut pas aller jusqu'à l'abolition des distinctions, il faudrait tout au moins en diminuer le nombre, n'avoir que deux modes d'admission et borner les distinctions au dernier examen du doctorat, afin de ne pas diriger, pendant tout le cours des études, les regards des meilleurs élèves vers les examens ; mais ce qui vaudrait mieux encore, ce serait de n'encourager personne à se traîner dans l'ornière des exercices de mémoire.

Par l'admission des certificats et par la suppression de l'examen écrit, nous avons fait quelque chose pour améliorer les travaux de la généralité des élèves ; maintenant faut-il sacrifier au statu quo les élèves les plus distingués ? Je ne le crois pas.

M. de La Coste. - Messieurs, il doit y avoir, je ne dirai pas erreur dans le procès-verbal, mais quelque chose que je ne m'explique pas. On allègue qu'à l'article dont nous nous occupons, les distinctions ont été rejetées par cinq voix contre une, et cependant à l'article où les distinctions sont établies, à l'article 29, il y a eu à cet égard une longue discussion à la suite de laquelle on a voté séparément sur chacun des degrés de distinction ; c'est alors qu'ils ont été rejetés, mais seulement par parité de suffrages. Quant à moi, messieurs, je n'ai pas voté pour la suppression des distinctions ; mais je crois que j'ai admis leur simplification.

Il faut donc, ou que l'article dont nous nous occupons ait passé sans discussion, sans qu'on y eût fait attention, ou que je ne fusse pas présent lorsqu'on l'a discuté.

Je passe, messieurs, au fond de la question, ce qui est le plus important, car enfin il est bien entendu que chacun demeure libre jusqu'au dernier moment et si même au second vote on peut revenir encore sur le vote qu'on a émis en séance publique, à plus forte raison on n'est point lié par celui qu'on a émis en section centrale.

Je pense, messieurs, qu'il y a quelque chose à répondre à l'honorable M. Devaux. D'abord de ce que nous avons fait, il résulte que les inconvénients signalés par l'honorable membre sont moins à craindre. En effet, nous avons cherché à élaguer de l'examen tout ce qui n'était qu'un exercice de mémoire ; nous avons cherché à obtenir que l'examen donnât la preuve réelle de l'intelligence de l'élève et de son application. Des lors, messieurs, la distinction ne sera plus un prix de mémoire, ce sera un prix de travail et d'intelligence.

Quant aux discussions qui pourraient s'élever dans le sein du jury au sujet des distinctions à accorder, c'est là malheureusement une preuve de plus que nous devons chercher à établir le jury sur des bases meilleures ; mais, enfin, nous trouvant réduits à cet instrument tel qu'il est, il faut bien l'employer, et ne pas renoncer, à cause de ses imperfections, à ce qui peut être utile à la science et aux études. Espérons qu'avant l'expiration des trois années que durera cette nouvelle épreuve, on arrivera à trouver un mode de composition du jury qui ne donne plus prise aux objections qu'a faites l'honorable membre.

Je pense, messieurs, qu'on pourrait, pour le moment, admettre en principe les distinctions, sauf à nous prononcer à l'article 29 sur le nombre de degrés à établir.

M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, le rapport de la section centrale rend compte des votes qui ont été émis ; voici ce qu'il porte : « Cette disposition de l'article 23 a été rejetée par cinq voix contre une. « Un membre ayant proposé deux degrés, à savoir : l'admission simple et la distinction, il y a eu partage de voix, un membre étant absent lors du vote. »

Voilà ce qui s'est passé dans la section centrale. L'honorable M. Devaux, en combattant les distinctions, dit que l'Etat n'a qu'une seule mission, c'est de constater si le récipiendaire est habile à exercer utilement la profession à laquelle le jury l'autorise.

Messieurs, si cet argument était déterminant pour cette question-ci, ce serait également un argument déterminant pour le jury professionnel dont on s'est beaucoup occupé dans la discussion générale ; c'est là le fondement de la proposition relative aux jurys professionnels. La majorité de la section centrale a cru qu'il y avait aussi quelque chose à faire pour garantir le développement des études universitaires.

L'honorable M. Verhaegen pense que les divers votes qui ont été émis par la Chambre, et surtout le vote concernant les matières à certificats, seront très préjudiciables aux études universitaires. Nous croyons absolument le contraire ; nous croyons que si les votes que la Chambre a émis sont maintenus, il en résultera une amélioration considérable pour les études universitaires.

Et, en effet, l'opinion exprimée par toutes les autorités qu'on a consultées établit qu'il y a un vice dans l'état actuel de l'organisation du haut enseignement. Ce vice doit être assez grand, si nous tenons compte des résultats des diverses épreuves telles qu'elles ont été organisées par la loi de 1849. Ces résultats sont concluants. A l'examen d'élève universitaire, un tiers des jeunes gens n'a pas été admis, soit que le jury les ait rejetés, soit qu'ils se soient retirés volontairement, parce qu'ils craignaient probablement le résultat de l'épreuve. A l'examen de candidat en philosophie et lettres, le tiers également des récipiendaires n'a pas été admis ; aux examens en droit, la moitié des récipiendaires a été écartée.

Il n'est pas possible d'expliquer de tels résultats par un défaut d'intelligence, de zèle et d'application chez tous ces récipiendaires ; ces échecs si nombreux doivent être bien plus exactement attribués à un vice dans l'organisation de l'enseignement moyen et de l'enseignement supérieur ; ils proviennent à la fois de l'enseignement encyclopédique qu'ont à suivre les élèves et des examens encyclopédiques qu'ils ont à subir.

En effet, ces examens portent sur beaucoup de matières qui sont très vagues par leur nature et qui jettent nécessairement le trouble dans l'esprit des élèves. Sous un pareil régime les élèves ne peuvent se préoccuper que d'une seule chose, c'est d'acquérir par la mémoire une connaissance superficielle des matières de l'examen ; et, dès lors ils se trouvent embarrassés pour peu qu'on approfondisse l'une ou l'autre des matières.

Je pense que la Chambre à parfaitement bien fait d'adopter les propositions de la section centrale, tendantes, d'une part, à éliminer du programme des examens, ces matières vagues dont j'ai parlé, et à maintenir seulement pour l'examen certaines matières sur lesquelles on interrogera les élèves d'une manière approfondie et qui constateront chez les récipiendaires des études sérieuses, raisonnées. Je crois que si la Chambre persiste dans ses votes, il en résultera un très grand avantage pour les études supérieures.

L'honorable M. Devaux a signalé un écueil ; il a parlé des discussions qui ont lieu, surtout dans le sein des jurys combinés, pour la collation des distinctions. Pour ma part, je n'hésite pas à demander, au prix même dé quelques difficultés dans le sein des jurys, le maintien d'un stimulant si puissant pour les jeunes gens. Que sont ces quelques difficultés au prix des immenses services que la société peut espérer des intelligences d'élite que ce stimulant aura révélées ?

L'honorable M. Devaux a dit encore que les élèves travaillent spécialement en vue des distinctions et, par conséquent, toujours en vue des examens ; que par là on perd un peu de vue l'étude de la science considérée en elle-même.

Je ne puis pas admettre cette opinion, surtout en présence des dispositions que la Chambre a votées relativement aux matières d'examen. Ces matières, telles qu'elles sont réglées par la loi, peuvent être facilement étudiées à fond par les récipiendaires, de manières qu'ils puissent satisfaire aux examens, quelle que soit la forme des questions ; c'est à quoi nous devons tendre, si nous voulons avoir des sujets capables et qui deviendront ensuite l'honneur de la carrière qu'ils auront embrassée.

On a parlé de l'épuisement intellectuel d'un certain nombre de jeunet gens, ainsi que des maladies que quelques-uns ont contractées en se préparant à l’examen. Cela pouvait être vrai sous le système des examens encyclopédiques ; mais cela ne se présentera plus sous l'empire des décisions prises par la Chambre, si ces décisions sont maintenues.

Je crois donc que les motifs les plus puissants se réunissent pour le maintien des distinctions. Quant à moi, je voterai pour le projet du gouvernement qui est la continuation de la loi de 1855 et de celle de 1849.

M. Delfosse. - L'honorable M. de La Coste vient de nous dire qu'il ne s'expliquait point la mention consignée au rapport en ce qui concerne l'article 23 ; il a cru qu'il y avait erreur ; c'est l'honorable M. de La Coste qui se trompe, la mention consignée au rapport est incomplète, trop peu développée, mais elle est exacte. On a d'abord mis aux voix, à l'article 23, la question de savoir s'il y aurait quatre modes d'admission, comme le propose le gouvernement ; sur cette question 5 ont répondu non, 1 a répondu oui. Un membre a ensuite proposé de n'établir que deux modes d'admission, l'admission ordinaire et la distinction. Sur cette proposition il y a eu partage, 3 voix pour, 3 voix contre.

Je suis au nombre de ceux qui ont voté pour ; mon vote a été dicté par le désir de faire disparaître en partie les inconvénients signalés par l'honorable M. Devaux, tout en laissant aux élèves l'émulation qui peut naître de l'espoir d'obtenir quelque chose de plus que l'admission ordinaire.

Les dissentiments entre les membres des jurys combinés proviennent surtout de ce qu'il y a quatre degrés d'admission ; pour décider dans (page 645) laquelle de ces quatre catégories le récipiendaire doit être placé, il y a une foule de nuances à saisir, ce qui n'est pas chose facile ; de là des luttes fréquentes et quelquefois trop passionnées entre les membres du jury ; on les ferait disparaître au moins en grande partie, on les rendrait moins vives en n'établissant que deux modes d'admission ; il est plus aisé de se mettre d'accord sur le point de savoir si le récipiendaire sort de la ligne ordinaire, que sur le choix à faire entre la distinction, la grande et la plus grande distinction.

D'un autre côté les élèves seraient stimulés par le désir d'obtenir la distinction, ils feraient pour atteindre ce but tous les efforts dont ils sont capables.

Je propose à la Chambre d'adopter l'article 23 du projet du gouvernement ; l'adoption de cet article signifiera que la Chambre veut qu'il y ait plus d'un mode d'admission. Y en aura-t-il deux, trois ou quatre ? C'est ce que nous déciderons à l'article 29. Bornons-nous en ce moment à rejeter la proposition de la section centrale qui supprime toute espèce de distinction.

J'ai voté samedi contre l'examen écrit ; dans ma pensée, ce vote se liait à l'article 23 proposé par la section centrale.

L'examen oral me paraissait suffisant pour décider s'il y a lieu à admission, mais il ne suffirait plus, selon moi, pour faire apprécier le mérite relatif des divers élèves ; pour apprécier ce mérite, pour décerner convenablement, soit la distinction, soit la grande, soit la plus grande distinction, il serait nécessaire de soumettre les récipiendaires, non seulement à un examen oral mais aussi à un examen écrit.

Si, comme je le propose, l'article 23 de la section centrale est rejeté, je me prononcerai donc, au second vote, pour l'examen écrit.

M. de Brouckere. - Je suis comme M. le ministre de l'intérieur et comme le rapporteur de la section centrale, partisan du maintien des distinctions à accorder aux élèves à la suite des examens. Je regrette le dissentiment qui s'élève encore une fois à l'occasion de cette question entre l'honorable M. Devaux et moi.

Mais nos dissentiments n'ont rien de surprenant : nous partons de deux points de vue complètement différents.

L'honorable membre prétend que les études universitaire» ont singulièrement dégénéré, qu'elles sont tombées dans un état désastreux ; dans l'espoir de les relever il veut tout changer.

Moi je pense que les études universitaires sont à peu près ce qu'elles étaient il y a dix ans et qu'elles étaient il y a dix ans à peu près ce qu'elles étaient vingt ans auparavant : je ne veux donc modifier la loi que dans celles de ses dispositions qui sont reconnues défectueuses.

J'ai vivement regretté que dans une séance précédente la Chambre eût admis le système des certificats en ce qui concerne les études moyennes. Pourquoi ? Parce qu'en admettant ce système des certificats la Chambre mettait tous les établissements d'enseignement moyen sur le même rang, les nivelait tous.

Si aujourd'hui vous supprimez les distinctions qui s'accordent à la suite des examens, vous opérerez un autre nivellement, le nivellement des élèves ; sauf ceux non admis, tous seront mis sur le même rang, les bons, les médiocres et les mauvais ; tous obtiendront le même diplôme.

On vous a dit que c'était particulièrement à l'occasion des distinctions à accorder aux élèves que s'élevaient les dissentiments et même les querelles entre les membres du jury et qu'il fallait faire cesser cet inconvénient.

Je n'entends pas faire une loi pour rendre leur tâche plus agréable à MM. les membres du jury ; je m'occupe fort peu de ce qui les concerne ; ce que je veux, c'est faire une bonne loi dans l'intérêt des élèves et surtout dans l'intérêt des études ; quant aux membres du jury, ils ne jouent ici qu'un rôle fort secondaire.

Mais, dit-on, ces distinctions on les accorde bien plus aux établissements qu'aux élèves et elles rejaillissent bien plus sur les établissements que sur les élèves.

Il en serait alors de même des admissions et des refus. Vous savez très bien qu'après les réunions des jurys on fait non seulement la supputation des distinctions obtenues par les universités, mais on fait aussi le calcul du nombre relatif des élèves reçus ou refusés pour chaque université.

Ce sont là des inconvénients, mais des inconvénients qui ne sont pas assez graves pour que nous modifiions des dispositions de la loi qui ont, sous d'autres rapports, d'excellents résultats.

Selon l'honorable M. Devaux, il faudrait qu'on s'appliquât surtout à faire travailler les élèves dans le but de savoir et non pas dans le but d'avoir des récompenses. Si l'on admet ce raisonnement, il faut que l'on supprime tous les concours, toutes les distributions de prix, toutes les distinctions quelconques. Il faut qu'un jeune homme depuis dix à onze ans jusqu'à ce qu’il ait termine ses études, soit convaincu que c'est dans son intérêt qu'il travaille et que par conséquent on supprime toute espèce de récompense.

Qu'on en vienne là, et c'est alors que vous pourrez bientôt dire que les études auront dégénéré, et qu'elles seront tombées à un niveau bien autrement bas que celui qu'on suppose aujourd'hui.

Laissez faire les jeunes gens, dit-on. Je suis au contraire d'avis qu'il faut des récompenses et des stimulants, pour encourager les jeunes gens à étudier.

Remarquez-le, les distinctions ont un double avantage. D'abord le jeune homme ambitionne la distinction pour elle-même. Ensuite, lorsqu'il entre à l'université, ses parents lui disent: Etudiez bien, et si dans votre examen vous obtenez une distinction quelconque, nous nous engageons à vous accorder telle ou telle récompense, tel ou tel plaisir. Vous allez mettre les parents dans l'impossibilité d'user de ce stimulant.

Quand un fils de famille retournera chez lui, il n'aura aucun moyen de montrer à ses parents s'il a bien employé son temps, s'il a bien passé ses examens, s'il s'est vraiment instruit à l'université, ou s'il n'a guère fait que s'amuser, se distraire, perdre son temps, s'il n'a fait que ce qui était strictement nécessaire pour obtenir son diplôme.

On a mis en avant les maladies qu'auraient contractées un assez grand nombre de jeunes gens, à la suite des fatigues auxquelles les études universitaires les condamneraient. Je me permets de le dire, tout en admettant qu'il y a du vrai dans cette assertion, il y a quelquefois des maladies simulées ; les élèves qui ne sont pas en état de passer leurs examens aiment à rejeter la fâcheuse position où ils se trouvent sur l'état de leur santé, plutôt que sur leur ignorance, et je suis très convaincu que parmi ces nombreuses maladies qu'on nous a signalées, il y en a de simulées. Mais en fin de compte, nous avons apporté à ces maladies un remède préventif qui en réduira le nombre, en réduisant le nombre des matières sur lesquelles l'examen doit porter, et en admettant, pour beaucoup de matières, de simples certificats.

M. Devaux. - Malgré vous !

M. de Brouckere. - Non pas malgré moi ; car j'ai voté pour les certificats universitaires, et quand la Chambre le voudra, j'expliquerai la différence qu'il y a entre les certificats d'études universitaires et ceux qui concernent l’enseignement moyen.

On a dit : C'est une chose souverainement ridicule que vouloir que le gouvernement apprécie le plus ou moins de savoir des jeunes gens, qu'il place sur leur front une espèce d'étiquette indiquant jusqu'à quel point ils ont profité de leurs études.

Mais puisque vous chargez le gouvernement de faire procéder aux examens, c'est que vous le reconnaissez comme parfaitement compétent, pour décider, par les personnes qu'il désigne comme membres du jury, si un jeune homme est capable d'être avocat ou médecin, ou s'il a fait les études nécessaires pour être nommé professeur, magistrat, etc. Du moment que vous lui reconnaissez cette compétence, pourquoi lui contester le droit de décider si les jeunes gens sont capables à tel ou tel degré ? Il y a une contradiction dans une opinion exprimée de cette manière. Si le gouvernement n'est pas capable de déterminer les degrés d'instruction, il n'est pas apte non plus à faire procéder aux examens ; qui prouve trop ne prouve rien.

Qu'il me soit permis de rappeler que les distinctions que l'on combat ont existé dans tous les temps. L’honorable orateur, auquel je m'attache surtout à répondre, a dit tout à l'heure que l'on n'y tenait pas. Je le conteste formellement. Si ma mémoire ne me trompe pas, on y tenait beaucoup. On passait les examens cum laude ; magnâ cum laude ; summâ cum laude. Si mes souvenirs sont fidèles, l'élève qui avait obtenu un diplôme sur lequel ses professeurs (car c'étaient eux qui l'examinaient) avaient inscrit la mention « summâ cum laude » était très fier de le rapporter dans sa famille. Il en était donc du temps du gouvernement des Pays-Bas, comme il en est aujourd'hui.

On a proposé une transaction. Au lieu d'avoir trois degrés de distinction, on n'en aurait plus qu'un seul, c'est-à-dire que les élèves seraient rangés en deux classes : ceux qui seraient reçus d'une manière satisfaisante ; ceux qui seraient reçus avec distinction. Comme on l'a fort bien dit, cette question viendra, quand nous en serons à l'article 29. S'il le faut, je me rallierai à cette transaction. Mais pour le moment actuel (comme l'honorable M. Delfosse l'a fait observer avec beaucoup de justesse),pour le moment, il ne s'agit que de savoir une seule chose :Y aura-t-it divers modes d'admission pour les jeunes gens ? Si la question est résolue affirmativement, qu'il y en ait deux, trois ou quatre, c'est ce que nous déciderons à l'article 29. Mais je prie la Chambre d'admettre ce principe, très nécessaire aux bonnes études, qu'il y aura des distinctions.

M. Verhaegen. - Je ne répéterai pas ce que j'ai dit tantôt en, appuyant la proposition du gouvernement.

Je veux seulement répondre quelques mots aux observations qui ont été faites par l'honorable M. Devaux.

L'honorable M. Devaux ne veut pas de distinction dans l'intérêt du jury d'abord, dans l'intérêt des élèves ensuite.

Ainsi que vous l'a dit mon honorable ami M. de Brouckere, nous n'avons pas à nous inquiéter du jury. Le jury doit faire son devoir. Les membres du jury sont rétribues pour cela, et il faut qu'ils remplissent leur mission d'une manière convenable. Du reste, les observations que l'on a présentées, quant au jury, sont loin d'être fondées. Il y a, dit-on il y a querelle entre les membres du jury, mais seulement lorsqu'il s'agit d'établir des distinctions, d'accorder des grades, il ne peut pas y en avoir lorsqu'il s'agit de recevoir ou de refuser un récipiendaire. Car les jurés sont d'honnêtes gens. Mais s'ils sont honnêtes lorsqu'il s'agit d'admettre ou de refuser, ils sont honnêtes aussi lorsqu'il s'agit d'accorder des distinctions.

On ne compose pas ainsi avec sa conscience, on est honnête ou on ne l'est pas.

Je n'admets pas cette distinction. Ce serait violer les règles de la morale, ce serait trahir sa conscience que de venir donner à un élève (page 646) qui ne le mérite pas la grande distinction, et de refuser à un autre la distinction qu'il aurait méritée.

L'honnêteté exige que l'on se conforme aux règles de la justice distributive.

Ainsi, ce motif allégué par l'honorable M. Devaux ne me touche guère.

Il s'agit de l'intérêt des élèves, dit-on. Oui, de l'intérêt des mauvais élèves. C'est l'intérêt des mauvais élèves que l'on soutient ; car on veut les mettre au niveau des bons élèves.

Vous vous apitoyez constamment sur le sort des élèves Les élèves doivent faire des efforts de mémoire ; ils doivent apprendre par cœur ; ils sont souvent malades à l'approche des examens. Mais avec ce système, vous arrivez à dire que tous les examens doivent être supprimés. Si les élèves doivent étudier dans l'intérêt de la science sans égard pour les examens, il faut donc s'en rapporter à eux et vous arriverez à supprimer tout examen.

Malheureusement les jeunes gens ne sont pas ce qu'on veut bien les faire ; s'il n'y a pas de stimulant le jeune homme préférera s'adonner au plaisir, suivre les bals, les soirées que d'étudier. Les choses ne se passent plus aujourd'hui comme autrefois ; nous étudiions dix ou douze heures par jour ; et aujourd'hui il semble qu'il suffise d'étudier deux ou trois heures au plus.

Vous craignez que les élèves ne se bornent à des efforts de mémoire, et pour éviter cela, vous ne voulez plus de distinction Que voulez-vous donc ? Je prends pour exemple la candidature en droit. L'élève doit répondre sur tout ce qui est relatif aux institutes et à l'histoire du droit romain.

Vous voulez donc qu'il étudie uniquement ce qu'il faut pour passer son examen ; et s'il veut approfondir davantage dans l'espoir d’obtenir la distinction, la grande distinction ou h plus grande distinction, vous trouvez que cela n'est pas nécessaire.

Messieurs, qu'on ne s'y trompe pas, quand on est soumis à un examen oral, il faut qu'on fasse preuve d'intelligence ; les seuls efforts de mémoire ne peuvent suffire. Je n'ai jamais fait partie d'un jury d'examen ; mais si j'interrogeais, il me serait facile de m'assurer si un jeune homme a appris par cœur ou s'il connaît la matière et l'a étudiée.

Il est facile, me paraît-il, de s'assurer si un élève doit être admis ou refusé, s'il mérite on ne mérite pas une distinction. Que l'on fasse un appel à son intelligence et l'on pourra bientôt distinguer comment il a étudié. El sur ce point, les distinctions sont très utiles ; car pour savoir si l'élève en mérite, le jury doit s'assurer s'il a fait de bonnes études ou s'il s'est borné à des efforts de mnémotechnie.

Messieurs, on est allé jusqu'à nous dire qu'il n'appartenait pas au gouvernement de mettre des étiquettes sur le dos des récipiendaires, de faire connaître au pays qu'ils ont mérité une distinction Mais s'il en est ainsi, supprimez donc toutes les décorations et toutes les distinctions qui s'accordent dans la société civile. Car ce sont aussi des étiquettes que vous placez, non pas, il est vrai, sur le dos, mais sur la poitrine de ceux qui peuvent les avoir méritées. Dans le système de l'honorable M. Devaux, il faut niveler toutes les positions ; ii n'appartient pas plus au gouvernement de mettre des étiquettes sur la poitrine que d'en mettre sur le dos.

Vous voyez, messieurs, que lorsque, pour faire admettre une thèse, on emploie tous les moyens, il s'en rencontre quelquefois qui vont à l’encontre de la démonstration que l'on veut faire.

Je conclus donc en disant qu'il est indispensable d'admettre des distinctions dans l'intérêt des études, dans l'intérêt des élèves et dans l’intérêt de l'exécution de la loi. Car enfin, il y a aussi des bourses à donner et il faut que le gouvernement sache quels sont ceux qui les ont méritées.

Ces bourses sont données aux élèves pour leur permettre de voyager et de compléter leurs études à l'étranger, et comme l'a fort bien dit M. le ministre de l'intérieur, c'est aussi en vue de cette disposition de la loi, qu'il a maintenu, dans l'article dont nous nous occupons, les distinctions eu faveur des élèves.

M. de Haerne. - Messieurs, je ne suis, quant à moi, décidé ni sur le nombre des distinctions à admettre, ni sur les qualifications à donner à ces diverses distinctions.

Je crois cependant qu'on ne peut faire table rase en cette matière.

Que demande d'abord l'élève qui se présente devant le jury ? Tient-il à ces distinctions ? Oui et non.

Oui, il y tient après qu'il les a obtenues, parce que ces distinctions sont de véritables titres d'honneur qu'il fait valoir à l'occasion. Non, il n'y tient pas lorsqu'il s'agit de passer l'examen.

En général, ce n'est pas là le but que se propose l'élève. J'ai vu une masse d'élèves et presque tous m'ont dit que leur but n'était pas d’obtenir telle ou telle distinction, que leur but était de passer l'examen.

Or, messieurs, comme ils ne sont pas toujours sûrs de réussir, quelle que soit leur capacité, ils se préparent à l’examen avec le désir d’être admis, et s'ils obtiennent une distinction, c'est pour eux un surcroît de bonheur.

Messieurs, j'abonde assez dans le sens de l'honorable M. Delfosse ; mais j'attendrai la suite de la discussion pour me décider.

Comment se confèrent les degrés de distinction ?

D'abord, une règle générale admise par tous les jurys, c'est qu'on n'accorde une distinction que lorsque l'élève a obtenu un certain nombre de points.

Je crois, messieurs, qu'il y a trop de degrés, car vous comprenez qu'à force de distinguer, il n'y a presque plus de distinction, mais il serait, selon moi, dangereux pour les études de supprimer les distinctions complètement.

Il y a une autre considération, qu'il ne faut pas perdre de vue : les distinctions ont existé précédemment, et comme j'ai' eu l'honneur de le dire, les élèves qui les ont obtenues les font valoir en temps et lieu, lorsqu'ils ont à se placer ou à se faire une position quelconque.

Je pense que la distinction pure et simple pourrait répondre à ce but, mais si vous supprimez tout, vous jetez une espèce de défaveur sur les distinctions accordées précédemment et vous privez tous les jeunes gens qui en ont obtenu jusqu'à présent, de l'avantage qu'ils peuvent en retirer. Si la loi supprime les distinctions, en général, c'est comme si elle disait que précédemment les distinctions n'avaient pas de valeur. Or, quand la chose n'est pas tout à fait nécessaire, il me semble qu'il ne faut pas faire tort aux jeunes gens qui, précédemment, ont brillé dans leur examen.

Comme l'a très bien fait observer tout à l'heure l'honorable rapporteur, les dangers signalés par l'honorable M. Devaux n'existent plus au même degré que sous l'ancien régime, parce que, par l'introduction des certificats pour certaines matières, on a considérablement simplifié les examens ; on ne peut donc plus admettre que les jeunes gens, en s'appliquant de toutes leurs forces à l'étude, se feront le tort qu'on suppose qu'ils se sont fait précédemment. Je crois que ce mal existe jusqu'à un certain point, mais qu'on l'a exagéré en l'attribuant d'une manière trop spéciale aux études, car les maladies des jeunes gens se présentent aussi ailleurs.

Ainsi, par exemple, on a observé depuis longtemps que les miliciens ne jouissent plus d'une si bonne santé que par le passé. A quoi cela tient-il ? Je ne me permettrai pas de résoudre cette question qui se rapporte bien plus aux sciences médicales qu'à l'objet dont nous nous occupons.

Je le répète, messieurs, le jeune homme s'attache bien plus à passer son examen qu'à obtenir un degré quelconque de distinction et par conséquent le mal qu'on veut éviter en faisant table rase, on ne l'évitera pas entièrement, car un bon étudiant fera toujours tout ce qui est possible pour pouvoir passer son examen, soit avec, soit sans distinction.

En résumé, messieurs, j'abonde assez dans le sens de l'honorable M. Delfosse, sauf cependant à modifier mon opinion, si je puisait des motifs pour le faire, dans les raisons qui pourront être données par les orateurs qui prendront ultérieurement la parole.

M. Devaux. - Messieurs, les orateurs qui viennent de parler, et moi, nous partons de points tout à fait opposés. L'honorable M. de Brouckere part de ce fait que l'instruction supérieure est florissante. Pour se faire cette idée, il faut fermer les yeux à la lumière. J'ai cité, il y a trois jours, les avis de l'université de Liège, de l'université de Louvain, de l'université de Gand, de la commission spéciale de 1855. De tous côtés on nous dit que l'examen actuel épuise l'intelligence, ruine l'esprit scientifique, matérialise l'esprit de la jeunesse, qu'il n'y a plus dans son travail ni spontanéité, ni fécondité, que tout est exercice de mémoire.

J'aurais pu citer encore l'avis des douze présidents du jury qui ont vu les élèves de près, et qui déclarent à l'unanimité que les études universitaires sont en décadence.

Je voudrais bien savoir où l'honorable M. de Brouckere puise ses autorités pour se mettre en contradiction avec ce qu'affirment trois universités, la commission de 1855 et les douze présidents du jury.

Ensuite, messieurs, tous les honorables membres partent de ce point que l'examen est scientifiquement utile. Pour moi au contraire l'examen sous le rapport scientifique a une influence funeste. J'admets l'examen universitaire comme un mal indispensable, mais il faut qu'il se borne à ce qui est nécessaire, il faut qu'il se borne à constater le minimum de capacité nécessaire pour passer d'un grade préparatoire à un autre et du doctorat à la pratique. Mais vouloir se servir de l'examen, qui rétrécit nécessairement les études supérieures, comme d'un moyen scientifique, c'est la plus complète erreur. Dans cette haute sphère de l'instruction, il est impuissant pour développer l'esprit scientifique et il le tue si on en abuse comme on l'a fait jusqu'à présent.

A raison des juge, mêmes, il faudrait réduire l'examen au nécessaire. Vous avez un tribunal composé de rivaux, qui doivent lutter contre l'influence de leur position pour n'être pas partiaux dans leurs décisions N'est-ce pas une raison pour restreindre sa juridiction dans le cercle le plus étroit ?

On me demande pourquoi je n'abolirais pas aussi les concours. Les concours ne s'adressent pas à la mémoire ; ils demandent des travaux d'intelligence.

Les examens au contraire ne demandent aux élèves que de répéter ce que le professeur a dit en chaire. On n'apprend rien par cœur pour les concours.

Messieurs, je sens très bien qu'il est difficile dans une assemblée aussi nombreuse où l'on n'est familiarisé ni avec l'ordre de faits dont il s'agit, ni avec les enquêtes auxquelles ils ont donné lieu, de faire admettre des idées qui paraissent nouvelles à beaucoup de personnes.

Aussi est-ce peut-être trop demander que de vouloir qu'on (page 647) abandonne à la fois toutes les illusions que l’on attache à ce système des distinctions académiques.

C'est ce qui m'a fait dire tout à l'heure qu'on pourrait au moins restreindre le système dans de plus étroites limites, réduire de moitié les distinctions et ne les attacher qu'aux derniers grades. Pour ne pas prolonger inutilement la discussion, je me contenterai de cette réforme provisoire.

Je n'en demanderai pas davantage pour le moment ; j'attendrai que le temps ait préparé le reste.

M. de Theux, rapporteur. - A l'article 25 du projet du gouvernement, on dit :

« Ce procès-verbal mentionne le mérite de l'examen écrit et de l'examen oral. »

Il faut se borner à dire :

« Ce procès-verbal mentionne le mérite de l'examen. »

M. Delfosse. - Il peut y avoir un examen supplémentaire par écrit ; dès lors, le mot « écrit » ne doit pas disparaître de l'article. On pourrait dire :

« Ce procès-verbal mentionne le mérite de l'examen oral, et, s'il y a lieu, de l'examen écrit. »

M. de Theux, rapporteur. - C'est inutile ; si nous nous bornons à mettre le mot « examen » dans cette partie de l'article 23, rien n'empêchera le jury de mentionner au procès-verbal le mérite de l'examen oral, et, le cas échéant, de l'examen supplémentaire par écrit.

M. Delfosse. - Je n'avais pas bien entendu ce que M. de Theux a dit tantôt ; il est clair que si ou supprime le mot « oral », le mot « écrit » peut être supprimé aussi.

M. le président. - Si personne ne demande plus la parole, je mets aux voix l'article 23 du projet du gouvernement, qui consacre le maintien du système des distinctions.

- On demande l'appel nominal.

M. Devaux. - Pourquoi un appel nominal ?

J'ai seul défendu la proposition de la section centrale, et je viens de déclarer que je me ralliais à l'amendement de l'honorable M. Delfosse.

M. Verhaegen. - On a demandé l'appel nominal, parce que la section centrale a mis de côté les distinctions ; maintenant, que la section centrale et l'honorable M. Devaux reviennent de leur opinion, rien n'empêche qu'on ne vote par assis et levé.

- L'appel nominal n'est plus demandé.

L'article 23 du projet du gouvernement, modifié comme l'a proposé tout à l'heure M. de Theux, est mis aux voix et adopté.

Article 29

M. Verhaegen. - Je demande que la Chambre passe à l'article 29 qui consacre les distinctions.

- Cette proposition est adoptée.

« Art. 29 (projet du gouvernement). Les certificats d'examen, les diplômes de candidat ou de docteur, sont délivrés au nom du Roi, suivant la formule qui sera prescrite par le gouvernement.

« Ils sont signés, ainsi que les procès-verbaux des séances, par tous les membres du jury, et contiennent la mention que la réception a eu lieu d'une manière satisfaisante, avec distinction, avec grande distinction, ou avec la plus grande distinction. »

« Art. 29 (projet de la section centrale). Les certificats d'examen, les diplômes de candidat ou de docteur, sont délivrés au nom du Roi, suivant la formule qui sera prescrite par le gouvernement.

« Ils sont signés, ainsi que les procès-verbaux des séances, par tous les membres du jury. »

M. le président. - M. Delfosse propose deux degrés d'admission: la simple admission et la distinction.

La parole est à M. Delfosse pour développer son amendement.

M. Delfosse. - J'ai fait connaître tout à l'heure les motifs de cet amendement.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Messieurs, la Chambre vient de décider qu'il y aura plusieurs degrés d'admission ; je crois qu'il me suffira de quelques mots pour prouver qu'il faut maintenir, sinon les trois distinctions, du moins plus d'une seule distinction.

Je conçois qu'il soit difficile d'établir une nuance entre la distinction et la grande distinction : il y a là matière à contestations ; mais puisque nous voulons un stimulant, conservons un stimulant pour les élèves d'une force moyenne qui forment la grande majorité, et un autre stimulant pour les élèves d'élite. Maintenons la distinction pour les premiers, et la plus grande distinction pour les autres.

J'ai dit tout à l'heure qu'il faut maintenir les distinctions, eu égard aux règles que l'on suit généralement pour la collation des bourses. Ainsi, pour les bourses ordinaires d'études, les facultés continueront de prendre en considération les distinctions que les élèves ont obtenues dans leurs examens ; pour les bourses de voyage, on continuera de les accorder, aux termes de la loi, à ceux qui ont obtenu la plus grande distinction.

M. Delfosse. - Je ne dirai que quelques mots en réponse à M. le ministre de l'intérieur. Je crois que les élèves seront tout aussi stimulés dans mon système que dans celui de M. le ministre de l'intérieur. Dans les deux systèmes, ils feront de leur mieux pour sortir de la ligne ordinaire, pour obtenir une distinction ; mais mon amendement a cet avantage qu'il complique moins les opérations du jury et rend l'accord plus facile entre les membres qui le composent.

Il ne faut pas d'ailleurs perdre de vue qu'outre le stimulant de l'examen à passer devant le jury, les élèves d'un mérite exceptionnel seront portés à de fortes études par l'espoir de prendre part avec succès aux concours universitaires.

M. Verhaegen. - J'étais partisan des distinctions établies par le projet du gouvernement, je ne vois aucun inconvénient à me rallier à la proposition que vient de faire M. le ministre de l'intérieur, c'est-à-dire de réduire à trois au lieu de quatre, comme c'était dans le projet primitif, les degrés d'admission. Maintenant que le principe a triomphé, il faut bien en admettre les conséquences, elles sont nécessairement celles-ci : c'est qu'il faut pouvoir apprécier le mérite des récipiendaires à tous les degrés ; si c'est un élève d'une intelligence exceptionnelle, d'un talent extraordinaire, il faudra bien lui accorder la plus grande distinction comme des élèves autrefois l'ont obtenues.

L'honorable M. de Theux a dit que dans l'intérêt des anciens élèves il fallait maintenir les distinctions, parce que si la Chambre venait à les supprimer pour l’avenir, les distinctions obtenues jusqu'ici seraient considérées comme étant sans valeur. Moi je dis que, dans l'intérêt des élèves nouveaux, il faut maintenir ces distinctions, parce que si les élèves anciens peuvent montrer un diplôme mentionnant qu'ils ont été reçus aveu la plus grande distinction qui conduit souvent à l'obtention de certaines faveurs, il ne faut pas enlever à des élèves nouveaux la possibilité de concourir pour l'obtention de ces faveurs avec des élèves anciens, parce que ceux-ci pourraient présenter un diplôme portant une mention que n'auraient pu obtenir les autres, quelque distingués qu'ils fussent.

Dans la situation nouvelle, d'après la proposition de M. Delfosse, il y aurait le simple diplôme et le diplôme obtenu avec distinction ; cela ne serait pas juste. Je crois que nous devons être tous d'accord pour adopter la proposition modifiée de M. le ministre de l'intérieur.

M. Orts. - Je demande à dire quelques mots, et j'espère qu'ils seront de nature à exercer quelque influence sur la manière de voie de l'honorable M. Delfosse.

Il y a nécessité d'établir trois degrés d'admission, du moment qu'on est sorti du système que la section centrale avait voulu faire prévaloir ; outre l'examen subi sans aucune espèce de distinction, c'est-à-dire constatant que le récipiendaire réunit le minimum de connaissances nécessaires pour exercer sans danger pour la société la profession à laquelle il veut se livrer, il faut deux degrés, pourquoi ?

Parce qu'il faut donner quelque chose à celui qui a plus que le minimum et ensuite quelque chose de plus à celui qui subit un examen irréprochable.

Aujourd'hui la plus grande distinction ne s'accorde qu'à l'élève qui n'a fait aucune espèce de faute dans l'examen écrit et dans l'examen oral ; il faut donner quelque chose de plus qu'à l'élevé médiocre, à un très bon élève qui a eu le malheur de se tromper sur une seule question de son examen, mais qui se trouve de beaucoup supérieur à celui qui ne possède que le minimum de connaissances nécessaires pour être admis.

Pour ceux qui veulent se faire une position hors ligne et auxquels nous réservons la plus grande distinction, l'honorable M. Delfosse indique la participation aux concours universitaires ; mais cela est impossible pour la majorité des jeunes gens qui par raison de fortune ne peuvent pas rester à l'université au-delà du temps nécessaire pour obtenir leur diplôme.

L'étudiant qui veut prendre part aux concours universitaires sacrifie pour cela une année d'étude ; cela n'est pas permis à tout le monde.

M. Delfosse. - J'avais proposé une transaction entre la proposition du gouvernement et celle de la section centrale ; le gouvernement présente à son tour une transaction entre sa proposition et la mienne ; je persiste à croire que la mienne offre le plus d'avantages ; elle complique moins les opérations du jury tout en laissant subsister l'émulation ; la différence n'est du reste plus très grande, nous nous sommes rapprochés, la Chambre appréciera.

- La proposition de M. Delfosse est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

L'article 29, proposé par M. le ministre de l'intérieur, est mis aux voix et adopté.

Chapitre III. Des jurys d’examen
Article 24

« Art. 24 (projet du gouvernement). Des jurys, siégeant à Bruxelles, font les examens et délivrent les certificats et les diplômes pour les grades. »

« Art. 24 (projet de la section centrale). Des jurys font les examens et délivrent les certificats et le» diplômes pour les grades ; ils siègent successivement, ensuite d'un tirage au sort, dans les villes où se trouvent des établissements complets d'enseignement universitaire. »

M. de Theux. - Par suite du vote de la Chambre qui maintient le jury combiné et le jury central, il y a lieu d'effacer du projet de la (page 648) section centrale les dernières lignes : « Ils siègent successivement, etc. » Cette disposition supposait un jury unique ambulant ; par suite du maintien du jury combiné et du jury central, la disposition additionnelle proposée par la section centrale devient sans objet. L'article doit être réduit à ces termes :

« Des jurys font les examens et délivrent les certificats et les diplômes pour les grades. »

- L'article 24 ainsi rédigé est mis aux voix et adopté.

Article 25

« Art. 25 (projet de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie). Il y a annuellement deux sessions des jurys. L'une commence le mardi de la semaine de Pâques ; l'autre, le deuxième mardi du mois de juillet. La durée des sessions est déterminée par le nombre des récipiendaires.

« La session de Pâques est exclusivement réservée aux derniers examens de docteur dans chaque faculté, et à l'examen des candidats notaires et des pharmaciens. »

M. Wasseige. - D'après les propositions de la section centrale et du gouvernement, la session de Pâques est exclusivement réservée aux derniers examens de docteur dans chaque faculté et à l'examen des candidats notaires et des pharmaciens. Je vois, quant à moi, un inconvénient assez grand dans ce paragraphe. Il en résultera qu'un jeune homme, ajourné à un examen de candidature, devra toujours attendre un an avant de pouvoir se présenter de nouveau devant le jury. Or, il peut arriver qu'un jeune homme ajourné soit parfaitement en état de se présenter devant le jury quelques mois après. Si le paragraphe est maintenu, cela ne lui sera plus possible.

Je demanderai à cet égard une explication soit à M. le ministre de l'inférieur, soit à M. le rapporteur.

S'il n'est pas admis que la session de Pâques est affectée, comme celle du mois de juillet, à toute espèce d'examen, je proposerai une disposition transitoire tendante à ce qu'au moins il en soit ainsi pour la session de Pâques de cette année ; sans cette disposition transitoire, la loi consacrerait une injustice évidente.

M. Verhaegen. - Je partage l'avis de l'honorable préopinant, qu'il est très sévère de contraindre un jeune homme qui a échoué dans un examen de candidature au mois d'août, à ne se présenter devant le jury qu'au mois d'août de l'année suivante.

Mais si je puis l'admettre pour les jeunes gens qui ont échoué dans leur examen, il me serait impossible de l'admettre pour les jeunes gens qui, pour cause de maladie, n'ont pu se présenter devant le jury.

J'espère que M. le ministre de l'intérieur appréciera les raisons qui ont été données par l'honorable préopinant et par moi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Les honorables préopinants se préoccupent de deux catégories exceptionnelles d'élèves, de ceux qui ont été ajournés et de ceux qui sont malades. Mais on fait une loi pour la généralité des élèves, et nous ne pouvons nous occuper des exceptions. En définitive, nous devons savoir si nous voulons sauvegarder les intérêts de l'enseignement. C'est à la demande de toutes les universités que l'on propose de supprimer la session de Pâques, parce qu'elle durait parfois six semaines, deux mois, et qu'ainsi en réalité, le deuxième semestre de l'année académique n'existait plus. Il ne faut pas que le désir d'obvier à quelques inconvénients qui concernent un très petit nombre d'élèves nous empêche d'atteindre ce grand but. Mais je suis d'avis que, faisant droit à une observation de l'honorable M. Wasseige, il faudra adopter une disposition transitoire en faveur des élèves qui se sont préparés pour passer leur examen à la prochaine session de Pâques.

M. Lelièvre. - Je ne puis approuver une disposition aussi générale que celle proposée par le gouvernement, parce qu'elle consacre des résultats inadmissibles. En effet, un élève a pu être légitimement empêché de se présenter à la session de juillet après son inscription, il est devenu malade ; eh bien, est-il juste de renvoyer ce jeune homme à un an alors que c'est un événement de force majeure que ne lui a pas permis de subir l'examen ?

Je désirerais au moins que la loi accordât au gouvernement la faculté d'autoriser certains élèves à subir un examen de candidature à la session de Pâques. Celte faculté ne concernerait que les élèves qui se trouveraient dans l'hypothèse dont j'ai parlé ou qui justifieraient d'un motif légitime.

Formuler une prescription aussi absolue que celle du projet me semble dangereux, et en ce qui me concerne, je ne puis accepter une disposition qui, dans divers cas, peut donner lieu à de sérieux inconvénients et créer un ordre de choses contraire à l'équité.

M. Orts. - J'adhère à ce que vient de dire l'honorable ministre de l'intérieur. Je crois que la disposition est dans l'intérêt des élèves et des études. Quand un élève est ajourné ou refusé, c'est que son examen a prouvé qu'il ne possède pas l'instruction complète qui est exigée pour le grade auquel il aspire. Or, il n'y a pas de demi-cours dans les universités. Il est donc dans l'intérêt de l'élève de recommencer une année d'études, et de suivre les cours pendant une année entière. Il n'y a pas de mesure qui oblige les élèves à fréquenter les cours pendant un temps déterminé, et beaucoup de jeunes gens se présentent devant le jury avec une instruction incomplète. C'est ce qui arriverait encore, si la disposition de l'article 25 n'était pas adoptée.

M. de Theux, rapporteur. - Si la session de Pâques pouvait être moins longue, je partagerais l'opinion émise par les honorables M. Wasseige et Lelièvre, mais les inconvénients de la session de Pâques prolongée sont incontestables pour les études universitaires.

Il y aura un autre inconvénient, c'est que l'élève qui entrera à l'université sans avoir subi l'épreuve préparatoire devra faire deux années de philosophie. Mais c'est un inconvénient qu'on ne peut éviter sans tomber dans l'inconvénient d'avoir une longue session de Pâques.

M. Wasseige. - Il est entendu que si l'article est adopté je me réserve de présenter une disposition transitoire portant que la prochaine session de Pâques pourra être affectée à toute espèce d'examen.

M. le président. - Cette disposition transitoire pourra être présentée, quand vous le voudrez.

- L'article 25 est mise aux voix et adopté.

Article 26

« Art. 26. Le gouvernement procède à la formation des jurys chargés des examens, et prend les mesures réglementaires que leur organisation nécessite, conformément aux bases fixées par la présente loi. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je crois que ce serait ici le lieu d'introduire l'amendement de l'honorable M. de Brouckere, sous-amendé par l'honorable M. Devaux.

Voici comment il faudrait, d'après la décision de la Chambre, rédiger cet article :

« Art. 26. Le gouvernement, en se conformant aux règles générales qui ont été suivies jusqu'ici pour l'exécution de l'article 40 de la loi du 15 juillet 1849, procède à la formation des jurys chargés des examens, et prend les mesures réglementaires que leur organisation nécessite.

« Il compose chaque jury d'examen de telle sorte que les professeurs de l'enseignement dirigé ou subsidié par l'Etat et ceux de l'enseignement privé y soient appelés en nombre égal.

« Le président du jury est choisi en dehors du corps enseignant. »

M. Devaux. - Il est bien entendu que le gouvernement n'est pas tenu de nommer, dans chaque jury, le même nombre de membres qu'aujourd'hui ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Il s'agit uniquement d'une représentation égale.

M. de Theux, rapporteur. - La volonté de la Chambre a été de maintenir, pour trois ans, l'article 40 de la loi de 1849, et c'est ce que ne dit pas la rédaction proposée par M. le ministre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je n'ai pas reproduit ici cette décision, parce qu'à l'article 56, j'ai proposé de dire : « le mode de formation des jurys d'examen, tel qu'il est fixé par l'article 26 de la présente loi, est établi pour une période de trois années. »

- L'article 26, rédigé comme le propose M. le ministre de l'intérieur, est adopté.

Article 27

« Art. 27. Il y a pour chaque faculté autant de jurys que d'examens divers prescrits pour l'obtention des grades établis au chapitre premier.

« Toutefois, un même jury procède aux diverses épreuves préparatoires prescrites par l'article 8 du chapitre II, et le jury de la candidature en sciences naturelles procède à l'examen de candidat en pharmacie, conformément à l'article 15.

« Le gouvernement règle à chaque session l'ordre simultané ou successif des travaux des différents jurys d'une même faculté. »

La section centrale propose la rédaction suivante :

« Art. 27. Il y a pour chaque faculté autant de jurys que d'examens divers prescrits pour l’obtention des grades établis au chapitre premier.

« Le jury de la candidature en sciences naturelles peut être chargé de l'examen de candidat en pharmacie, conformément à l'article 15. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je me rallie à la rédaction de la section centrale.

- L’article 27, rédigé comme le propose la section centrale, est adopté.

Article 28

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Ici devrait venir se placer l'article 43 de la loi de 1849, article que le gouvernement n'avait pas reproduit dans son projet de loi, parce qu'il proposait d'établir un jury sans président. Maintenant que nous en sommes revenus à la loi de 1849 et qu'il y aura un président, il faudra introduire ici cette disposition de la loi de 1849 :

« Le président du jury veille à l'exécution de la loi et à la régularité de l'examen. Il a la police de la séance. Il accorde la parole aux divers examinateurs. »

Cette disposition prendrait la place de l'article 28 qui vient à disparaître.

- L'article proposé par M. le ministre de l'intérieur est adopté.

Article 28bis

« Art. 28bis (projet de la section centrale). Les certificats dont il est fait mention aux articles 8bis et suivants de la présente loi, indiquent les noms, prénoms, demeure et qualités de ceux qui les délivrent ; le programme de l'enseignement est, en outre, communiqué au jury. Les cours de logique, de philosophie morale, de statique élémentaire, de philosophie comparée, de médecine légale et d'encyclopédie du droit, comprennent au moins 30 heures de leçons, ou 3 heures par semaine, pendant un quart de l'année scolaire.

« Tous les autres cours dont la fréquentation doit être constatée, comprennent au moins 60 heures de leçons, ou 3 heures par semaine, pendant la moitié de l'année scolaire.

« S'il s'agit d'un cours donné dans un établissement d'instruction supérieure ou moyenne, le certificat «sera visé par le chef de l'établissement.

(page 649) « Les certificats émanant de toute autre personne, seront soumis à la légalisation de l'autorité locale.

« Si les certificats ne sont pas en règle, ou ne paraissent pas présenter un caractère suffisant de sincérité, le jury ajourne l'examen, à moins que le récipiendaire ne se soumette à passer, devant le même jury, et du consentement de celui-ci, un examen sommaire sur chaque matière dont la fréquentation n'a pas été établie.

« Dans tous les cas, le récipiendaire peut remplacer la preuve de fréquentation d'un cours par un examen sommaire sur la même matière, sauf à en donner avis préalable au gouvernement, dans le délai qui sera ultérieurement fixé. Le gouvernement organisera pour ces examens les jurys qui seront nécessaires, et se conformera à cet effet aux règles établies par la présente loi pour la formation des autres jurys.

« La durée des examens sommaires dont il est parlé dans les dispositions précédentes, sera de dix minutes pour chaque matière. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Dedecker). - Je demanderai à l'honorable rapporteur de la section centrale ce qu'il compte faire pour permettre d'apprécier les certificats remplaçant le grade d'élève universitaire.

Il n'en est rien dit. L'article concerne seulement les certificats universitaires. Il faudrait au moins dire, ce me semble, que les dispositions du présent article concernant le mode et l'appréciation des certificats, sont applicables aux certificats mentionnés à l'article 2, ou quelque chose d’analogue.

M. de Theux, rapporteur. - Telle était la pensée de la section centrale. Elle a cru que les dispositions de l'articles 28bis s'appliquaient également aux certificats à produire en remplacement de l'épreuve préparatoire.

J'ai en en outre deux observations à présenter. Le paragraphe premier de l'article 28 bis détermine la durée minimum des cours à certificats, mais comme la Chambre a rangé maintenant, parmi les matières à certificats, l'introduction historique au droit civil et le droit civil élémentaire, il faut compléter ce premier paragraphe en y ajoutant ces mots :

« Celui de l'introduction historique au droit civil et celui de droit civil élémentaire, 3 heures par semaine. »

J'ai lu le programme des quatre universités, et je crois que la disposition correspondra à la durée de ces cours.

Ensuite, messieurs, dans l'avant-dernier paragraphe du même article, il est dit : « Le gouvernement organisera pour ces examens les jurys qui seront nécessaires ». Je crois qu'il vaudrait mieux dire : « qu'il jugera nécessaire. »

Le gouvernement pourrait très bien renvoyer ces examens au jury ordinaire. La pensée de la section centrale n'a pas été d'imposer au gouvernement l'obligation de créer des jurys spéciaux, si le gouvernement le juge convenable, il pourra autoriser le jury ordinaire à faire ces examens, de même qu'il pourra aussi autoriser le jury de philosophie et lettres à faire subir l'examen préparatoire aux élèves qui n'auront pas produit de certificat.

M. Verhaegen. - Messieurs ce qui vient de se passer pour l'article 28tis prouve, encore une fois, que la loi n'est pas suffisamment élaborée et qu'à chaque pas nous rencontrons des contradictions. Voilà maintenant que, d'après le projet de la section centrale, les certificats doivent être conçus dans les formes indiquées par cet article, mais cela ne concerne évidemment que les certificats relatifs à l'enseignement universitaire.

On vient de faire une observation quant aux matières qui font l'objet de l'examen préparatoire, substitué à l'examen d'élève universitaire et on dit qu'il était dans l'intention de la section centrale qu'il en fût ainsi.

Cependant le projet de loi établit le contraire. Je crois donc, messieurs, qu'il faut non pas ajouter quelque chose à l'article 28 bis, mais changer la rédaction des premières lignes de l'article et dire : « Les certificats dont il est fait mention dans la présente loi. » Cela comprendra les certificats relatifs aux examens universitaires et ceux qui remplacent l'épreuve préparatoire.

Je ne fais cette observation que pour éviter que la loi soit en contradiction avec elle-même, car je suis loin d'être favorable aux certificats ; et j'y reviendrai au second vote.

Maintenant, messieurs, ce qui me paraît assez singulier ce sont les heures que l'on exige pour chaque cours. Cela est fort bien pour les universités, mais qu'arrivera-t-il pour l'enseignement privé.

Ainsi, par exemple, un père donne un cours à son fils, faudra-t-il que ce cours ait autant d'heures et comment le constaterez-vous ? (Interruption). Mais on ne veut pas d'examens ; on se contente de certificats.

Je le répète, messieurs, la chose est facile pour les universités, mais on admet le principe qu'un père peut donner l'instruction à son fils, un frère à son frère, que tout particulier, quel qu'il soit, peut donner un cours, et vous exigez que ce cours ait autant d'heures: comment le constaterez-vous ? Est-ce par le certificat ? Ainsi un tel constate que son fils a suivi un cours de telle matière et que ce cours a duré tel nombre d'heures ; vous contenterez-vous de cela ?

Vous le voyez, messieurs, ce système est impraticable, à moins qu'on ne se contente d'un certificat quelconque sans s'inquiéter en aucune manière du point de savoir si ce certificat est sincère.

M. de Theux, rapporteur. - Je ferai d'abord remarquer, messieurs, que la lacune dont on parle n'existe pas dans l'article, puisqu'on, dit : (L'orateur donne lecture de l'article).

Maintenant, je n'ai aucune objection à faire contre la rédaction proposée par M. Verhaegen ; c'est absolument la même chose.

L'honorable M. Verhaegen s'est déclaré constamment l'adversaire des certificats, qui sont admis par le gouvernement, par la section centrale et par la Chambre à une très grande majorité. Suivant l'honorable membre, la loi est détestable à cause des certificats.

Il soulève de très petites difficultés pour faire tomber dans le discrédit une mesure des plus importantes, des plus essentielles. En définitive, pour suivre l'opinion de l'honorable M. Verhaegen. il y avait une chose fort simple à faire, c'était de dire : « La loi de 1849 est prorogée pour autant d'années ». Mais la Chambre a manifesté depuis si longtemps le désir de modifier la législation à cause des inconvénients signalés de toutes parts et qui seraient incompréhensibles, inexplicables s'ils ne résultaient pas de vices dans l'examen ; il faut donc bien admettre un grand principe, dût-il en résulter dans l'application quelques difficultés.

C'est bien le cas de suivre cet adage : De minimis non curat proetor. Quand un père de famille ou tout autre aura délivré un certificat, si le jury a des motifs de croire que le certificat n'est pas sincère, il fera subir une épreuve au récipiendaire. Vouloir attaquer les grands principes d'une loi par des arguments relatifs à des minuties, c'est un système que je ne comprends pas.

- La séance est levée à 4 heures et demie.

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