(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)
(Présidence de M. Delehaye.)
(page 397) M. Ansiau procède à l'appel nominal à trois heures et un quart.
M. Calmeyn lit le procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est adoptée.
M. Ansiau présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.
« Le sieur Jonckheere, ancien gardien de la maison de force, à Gand, demande à être replacé dans cette position, ou qu'on lui restitue les retenues faites sur son traitement, ou bien qu'on lui accorde un secours. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
M. le président. - Ce soir, on distribuera le rapport sur le budget de l'intérieur ; la Chambre désire-t-elle fixer un jour pour la discussion.
- Plusieurs membres. - Mardi.
- La Chambre décide que la discussion aura lieu mardi prochain.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée de Verviers, le 7 décembre 1855, le sieur Boucher demande que les avocats et les magistrats d'un tribunal, qui sont membres de la société de St-François-Régis, soient considérés comme proches parents en matière de divorce.
Conclusions : Ordre du jour.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée d'Arbre-Fontaine, le 8 décembre 1855, le sieur Lassine réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une pension ou un secours en faveur de son beau-fils, le sieur Dewez, militaire congédié du service pour infirmités.
Le pétitionnaire expose à la Chambre que son beau-fils a été atteint d'aliénation mentale pendant qu'il était au service. Il résulte d'une dépêche de M. le ministre de la guerre en date du 16 novembre dernier, que les renseignements fournis au département de la guerre par les autorités militaires compétentes, constatent que ce jeune homme n'a subi pendant qu'il était sous les armes aucun traitement pour affection morale.
M. le ministre ne pouvant faire droit à la réclamation du pétitionnaire, votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée d'Ixelles, le 4 décembre 1855, le sieur d'Hooghe, ancien factenr des postes, demande un secours.
Le pétitionnaire n'a aucun droit à obtenir un secours du gouvernement, attendu qu'il a été révoqué de ses fonctions par arrêté ministériel du 20 juin 1853.
En conséquence, votre commission a l'honneur de vous proposer, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée d'Ixelles, le sieur Lefebure, officier pensionné, demande une gratification qui le mette à même de pourvoir à sa subsistance et à celle de sa famille.
Le pétitionnaire est âgé de 81 ans ; il était entré au service en 1790 et a fait toutes les campagnes de 1793 à 1815 ; il jouit d'une pension de 679 fr. ; il expose à la Chambre que, par suite des années calamiteuses que nous traversons, il se trouve dans la plus profonde détresse.
Votre commission, eu égard au grand âge du pétitionnaire, a l'honneur de vous proposer le renvoi de sa requête à M. le ministre de la guerre.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée de Saint-Hubert, le 2 décembre 1855, le sieur Hubert-Joseph Dehez, ancien préposé des douanes à Saint-Hubert, demande une pension et le remboursement de sa masse.
Le pétitionnaire a été révoqué de ses fonctions le 1er novembre 1844, il n'a aucun droit à l'obtention d'une pension, ni au remboursement des sommes qui lui ont été retenues pour la caisse des veuves et orphelins.
En conséquence votre commission a l'honneur de vous proposer, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée de Brugeletle, le 1er novembre 1855, la veuve du sieur Brismoutier, ancien gendarme, demande une pension.
Aux termes de la loi qui règle les pensions militaires, la pétitionnaire ne peut obtenir une pension viagère, attendu que son mari n'est pas mort des suites d'une blessure reçue sur le champ de bataille ou dans un service commandé.
Votre commission vous propose en conséquence, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée de Schaerbeek, le 20 novembre 1855, le sieur Hannaert, ancien blessé de septembre, demande une récompense.
Le pétitionnaire affirme qu'il a été blessé en septembre 1830 ; aucune pièce ne prouvant son assertion, votre commission vous propose, messieurs, l'ordre du jour.
- Adopté.
M. Allard, rapporteur. - Par pétition datée d'Autryve, le 14 juin 1855, des habitants d'Autryve réclament l'intervention de la Chambre pour faire cesser le cumul de fonctions exercé par un instituteur de cette commune.
Les pétitionnaires signalent à la Chambre les faits les plus graves à l'appui de leur réclamation.
L'instituteur communal, disent-ils, est membre du bureau de bienfaisance, organiste, négociant et fabricant de dentelles, en sa qualité de membre ou plutôt de chef suprême du bureau de bienfaisance, il distribue la charité et les secours au gré de son caprice, admettant au tableau des pauvres et par conséquent à la collation des secours les familles qui envoient leurs enfants dans ses ateliers où ils reçoivent un salaire des plus modique, repoussant et rayant impitoyablement de la table des pauvres ceux qui sont assez malavisés pour oser retirer leurs enfants de chez lui pour les envoyer dans des ateliers où on leur paye un salaire plus équitable.
Si, comme le prétendent les pétitionnaires, une enquête a établi les faits, il est inconcevable qu'on ne les ait pas encore réprimés. Le gouvernement ne peut tolérer un pareil abus qui constitue, du reste, une illégalité flagrante.
Votre commission, messieurs, a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
M. Lelièvre. - Messieurs, les faits énoncés à la pétition ayant un caractère de gravité incontestable, j'appelle l'attention spéciale de M. le ministre sur la réclamation.
- Le renvoi à M. le ministre de l'intérieur est adopté.
M. de Moor, rapporteur. - Le sieur Collant, ancien militaire, demande un secours.
Le pétitionnaire se fonde pour réclamer cette faveur 1° sur ce qu'il a servi pendant 35 ans et qu'il aurait obtenu la pension militaire s'il était resté deux mois de plus au service ;
2° Sur les attestations convenables qu'il a obtenues de ses chefs ;
3° Il déclare en outre avoir été décoré trois fois pour acte de courage.
Le pétitionnaire se disant sans ressources et votre commission ne pouvant apprécier si ses allégations sont justifiées, a l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de la guerre.
- Adopté.
M. de Moor, rapporteur. - La dame Nahoel, veuve du sieur Delaet, second à bord du bateau à vapeur de l'Etat « Princesse Charlotte », demande un secours pour elle et ses enfants.
Elle se fonde sur sa modique pension de 138 francs, et sur le prix élevé des vivres, pour réclamer un secours.
Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de la demande à M. le ministre des affaires étrangères.
- Adopté.
M. de Moor, rapporteur. - Le conseil communal de Hasselt demande la construction d'un canal de Diest à Hasselt.
Le gouvernement ayant émis dans le discours du trône le désir de soulager la misère de la classe ouvrière en lui donnant du travail au moyen de l’exécution de grands travaux d'utilité publique, les signataires prient la Chambre de comprendre dans les travaux à exécuter le canal de Diest à Hasselt, destiné à rattacher directement le réseau navigable de la province de Limbourg à ceux du Brabant, d'Anvers, des Flandres et du Hainaut.
Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Moor, rapporteur. - Les sieurs Parlongue et Gérard, vice-président et secrétaire du bureau de la société des Volontaires Liégeois, demandent que le gouvernement statue sur leur pétition qui a pour objet une récompense en faveur de ces volontaires.
C'est le 2 février dernier que les pétitionnaires se sont adressés à la Chambre qui a cru devoir renvoyer leur requête à M. le ministre de l'intérieur.
- Votre commission croit devoir vous proposer le renvoi de cette nouvelle pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Adopté.
M. de Moor, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 10 décembre 1855, le sieur Meynders, ancien curé, demande une augmention de pension.
A plusieurs reprises le sieur Meynders, ancien curé, a demandé la révision de sa pension, toujours votre commission a renvoyé ses requêtes à M. le ministre de la justice.
(page 398) Par une nouvelle pétition en date du 10 décembre écoulé et dans le même but, le sieur Meynders rappelle une brochure, « Une page de ma vie », adressée par lui à tous les membres de la Chambre ; il expose que, n'étant plus attaché à aucune église et ne touchant plus de ce chef aucun casuel, il se voit réduit à vivre de sa pension de 262 fr. Il trouve que, dans les circonstances actuelles, il ne pourrait plus le faire sans être obligé de tendre la main, d'invoquer la bienfaisance publique. Votre commission des pétitions croit devoir vous proposer des conclusions conformes à celles adoptées par la Chambre, le 31 janvier 1855, c'est -à-dire le renvoi de la pétition à M. le ministre de la justice.
- Adopté.
M. de Moor, rapporteur. - Le sieur Van Grasse, ancien second du bateau a vapeur de l'Etat, « Ville d'Anvers », demande un secours.
Le pétitionnaire se dit aveugle et père de cinq enfants.
Il se base sur l’insuffisance de sa pension, montant à 175 fr., pour demander un secours, afin de pouvoir traverser cette époque de crise alimentaire.
Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre des affaires étrangères.
- Adopté.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée de Monceau-sur-Sambre, le 27 mai 1855, le conseil communal de Monceau-sur-Sambre demande l’établissement d'un chemin de fer de Luttre à Denderleeuw par Nivelles et Hal.
Par pétition datée de Denderleeuw, le 16 novembre 1855, le conseil communal de Denderleeuw prie la Chambre d'accorder à la compagnie des chemins de fer de la jonction de l’Est, la concession d'un chemin de fer partant de Luttre et aboutissant à Denderleeuw, eu passant par Nivelles et Hal.
Par pétition datée de Jumet, le 2 juin 1855, le conseil communal de Jumet déclare adhérer à la pétition du conseil communal de Nivelles, relative à la construction d'un chemin de fer de Luttre à Denderleeuw, par Nivelles et Hal.
Par pétition datée de Nivelles, le 1er octobre 1855, un grand nombre d'industriels, négociants et habitants de Nivelles prient la Chambre d'accorder aux sieur Waring la construction d'un chemin de fer de luttre à Denderleeuw.
Même demande des membres du conseil communal de Hal.
La commission a l'honneur de proposer le renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi qui autorise la concession de cette ligne.
- Adopté.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée d'Anvers, le 12 novembre 1855, les président et membres de la commission de la cinquième section d'Anvers prient la Chambre, lorsqu'elle s'occupera de projets de loi concernant les travaux de défense d'Anvers, de porter son attention sur la nécessité d'établir ces travaux à une distance telle, qu'ils ne constitueraient pas une cause immédiate de ruine pour le commerce.
La pensée des pétitionnaires est celle de tous les membres de cette Chambre. Il n'est personne qui ne désire concilier autant que possible les exigences d'une défense solide avec les intérêts très respectables du commerce.
La commission a l'honneur de proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de la guerre, et le dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi annoncé par M. le ministre des finances dans la séance du 3 décembre.
M. Osy. - Messieurs, à la fin de la session dernière, à l'occasion d'un crédit demandé par M. le ministre de la guerre, l'honorable ministre avait promis d'examiner la question de l'agrandissement de la ville d'Anvers et celle qui est relative à la défense de bâtir en dehors de la ville ; il avait dit qu'il examinerait si cette question serait soumise à une commission. Une commission a été nommée, en effet, dans le courant de l'année dernière et nous avons vu par les journaux qu'on avait soumis à la commission deux projets qu'elle a écartés. Depuis lors nous n'avons plus rien appris sur les intentions du gouvernement. Je demanderai donc à l'honorable ministre de la guerre si nous pouvons bientôt espérer qu'on prendra une mesure et si la commission sera consultée sur la question de l'agrandissement de la ville d'Anvers et sur la faculté de bâtir en dehors de la ville.
A cet égard les plaintes sont incessantes ; il n'y a plus moyen de se loger en ville et, à l'extérieur, on empêche de bâtir. Il est donc indispensable de prendre une mesure pour l'agrandissement d'Anvers. L'administration communale a demandé un agrandissement vers le Nord et l'établissement d'un troisième bassin, qui est heureusement devenu indispensable par suite du développement des affaires. Or, il importe que le gouvernement ne puisse pas empêcher de bâtir autour de ce bassin, des magasins et des habitations.
J'espère donc que M. le ministre de la guerre pourra nous donner quelques éclaircissements, et surtout rassurer les intérêts de la ville d'Anvers ; car il y a bientôt un an que cette affaire a été soumise à la Chambre, et jusqu'ici on n'a rien appris de la commission, sinon qu'elle a écarté les deux projets.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Messieurs, dans les faits qui viennent d'être relatés par l'honorable M. Osy, je me permettrai d'abord de constater une légère inexactitude.
Le ministre de la guerre ne s'est pas engagé à demander l'avis d'un comité ni à instituer un comité mixte ; il a promis d'examiner la question de savoir s'il y avait lieu, oui où non, à réunir une commission consultative.
Eh bien, messieurs, à la suite de l'examen auquel on a procédé dans les bureaux de la guerre, il a été jugé convenable de nommer une commission consultative appelée à délibérer sur les projets qui avaient été préparés par le gouvernement.
Cette commission, après plusieurs séances d'un travail assidu, a fait reconnaître au gouvernement les inconvénients qu'il y avait à s'arrêter d'une manière absolue aux divers projets qui s'étaient fait jour jusque-là. Le gouvernement a dû recourir à un nouveau travail et à de nouvelles études. Il n'est donc pas étonnant que, depuis la séparation de ce comité, on n'ait pas entendu parler de ce qui s'est fait au ministère de la guerre relativement à l'agrandissement de la ville d'Anvers.
Je n'éprouve aucune difficulté à dire à la Chambre dans quelle situation se trouve l'affaire dans ce moment. Le projet du camp retranché est entièrement terminé. Nous espérons être arrivés à une solution qui pourra satisfaire à la fois les intérêts bien entendus de la ville d'Anvers au point de vue commercial et les intérêts du pays au point de vue de la défense.
Quant à l'agrandissement de la partie nord, le projet est également terminé ; il a été fait dans les vues les plus larges, d'après les propositions des membres du comité qui appartiennent plus directement à la ville d'Anvers et qui, dans le comité, étaient censés représenter l'administration communale de cette ville. On comprendra que des projets de cette importance doivent être soumis à plusieurs degrés d'instruction avant d'être présentés à la Chambre.
Toutefois, ils sont maintenant arrivés à un tel point que, d'ici à quelques jours, j'espère avoir l'honneur de les déposer sur le bureau de la Chambre.
M. Loos. - Messieurs, je remercie M. le ministre de la guerre des explications qu'il vient de donner à la Chambre. J'accepte avec reconnaissance ce qu'il vient de dire au sujet du projet qui est préparé à son département, projet qui, d'après lui, satisfera aux besoins légitimes d'Anvers, comme à ceux de la défense.
M. le ministre de la guerre vient de dire aussi que le projet d'agrandissement de la ville d'Auvers, au nord, est entièrement terminé dans son département. Je demanderai à M. le ministre s'il a l'intention de communiquer ce projet à la ville d'Anvers, car il serait inouï qu'on s'occupât de l'agrandissement d'une ville, sans avoir consulte seulement les autorités de cette localité. Je prierai donc M. le ministre de la guerre de vouloir bien me dire quelle est son intention à cet égard.
M. Osy. - Messieurs, je n'ai pas dit que le gouvernement s'était engagé à nommer une commission ; j'ai dit que M. le ministre de la guerre avait promis d'examiner s'il convenait de nommer une commission mixte, et qu'à la suite de cet examen, il avait en effet nommé une commission. Maintenant que les propositions qui ont été faites à cette commission n'ont pas abouti, j'espère que le gouvernement suivra la même marche et qu'il soumettra le projet qu'il a arrêté, non seulement à l'autorité communale d'Anvers, comme le demande mon honorable collègue, mais à la commission mixte. J'en fais du reste la demande, cette commission qui existe encore, ayant connaissance des premiers projets pourra examiner celui que le gouvernement a adopté.
M. Lelièvre. - A l'occasion de la pétition dont nous nous occupons, je crois devoir rappeler à M. le ministre de la guerre la présentation d'un projet de loi sur les servitudes militaires, projet qui doit faire cesser les inconvénients et la rigueur de la législation en vigueur, je désire savoir si la loi sera présentée pendant le cours de la session, actuelle. Il est certain que l'état de choses actuel compromet d'importants intérêts.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - J'aurai l'honneur de répondre d'abord à l'honorable M. Lelièvre que la question de la loi sur les servitudes militaires est indépendante de celle qui nous occupe.
Nous avons un projet de loi sur les servitudes militaires qui a été préparé longtemps avant mon entrée aux affaires. Ce travail, à mon point de vue, a besoin d'être modifié ; je compte faire cette modification dans un sens favorable au mouvement actuel des esprits sur cette question importante.
J'ai réuni des documents sur les lois qui régissent les servitudes militaires dans les pays étrangers, je dois attendre la traduction de ces documents pour former mon opinion et m'entendre avec mon collègue de la justice afin de présenter un projet de loi qui satisfasse les intérêts engagés dans cette grave affaire.
Quant à la demande des honorables députés d'Anvers, de soumettre au conseil communal de cette ville le travail qui a été fait, je ne puis prendre aucune espèce d'engagement à cet égard.
Les désirs de la population et des autorités d'Anvers, ainsi que les propositions de la cinquième section ont été reproduits assez fréquemment pour être parfaitement connus par le gouvernement. Je ne vois donc dans la proposition de soumettre le projet au conseil communal qu'une cause de retard sans utilité pour personne.
Cependant, depuis quelques jours, j'ai mis cette question à l'étude, on s'en occupe avec assiduité sans qu'il y ait jusqu'ici aucun parti pris à cet égard.
Il en est de même de la commission, consultative qui a été chargée (page 399) d'examiner le premier travail sur le camp retranché et l'agrandissement d'Anvers, car dans cette commission, comme cela arrive dans toutes les commissions scientifiques, se sont fait-jour destinions extrêmement divergentes.
Je me permettrai de dire aux membres qui insistent pour que celte, communication ait lieu, que leur demande va à rencontre du désir qu'ils ont manifesté de voir accélérer l'exécution de ce travail. Si nous Suivions cette marche, nous ne pourrions pas aboutir dans la session actuelle.
Tout en tenant compte des observations des honorables membres, je ne puis cependant prendre d'engagement à l'égard des propositions qu'ils viennent de faire.
M. Loos. - Le retard qu'a fait entrevoir M. le ministre n'est pas à craindre, car le conseil communal d'Anvers, dans l'examen auquel il pourra se livrer, ne mettra certes pas autant de temps qu'il en a fallu, au département de la guerre pour élaborer le projet. Cela est tout naturel ; le conseil n'est pas compétent pour examiner ce qui concerne, les travaux de défense ; aussi ce n'est pas cela qu'il examinera ; ce qu'il examinera, c'est ce qui concerne les nouvelles limites de la ville.
Le conseil communal, ne s'occupera pas des fortifications qui sont projetées. Il s'occupera uniquement de la question de savoir si dans le nouveau projet, on a tenu compte des besoins de la localité. Il s'agit de la partie de la ville où réside tout le commerce, c'est-à-dire où se trouvent les bassins, les entrepôts et où l'on est occupé à construire de nouveaux bassins.
La manière dont on veut agrandir la ville de ce côté ne peut donc être indifférente à la localité.
A-t-on tenu compte, non seulement des besoins actuels, mais aussi des besoins de l'avenir ? Messieurs, nous sommes à la veille, je l'espère, de voir terminer les hostilités qui pendant quelque temps ont ralenti la prospérité commerciale. Si la paix se fait, il est évident que le commerce prendra un grand essor. A-t-on tenu compte, de ce que cette prospérité peut amener pour Anvers ?
Voilà des questions que le conseil communal est désireux d'examiner et je puis répoudre qu'il ne mettra pas dans cet examen plus de temps que cela n'est nécessaire.
Cette question, produite devant le conseil communal, peut être résolue en moins de quinze jours. Ce ne sera donc pas le retard qui pourra provenir de ce côté qui empêchera que le projet de loi ne soit présenté dans la session actuelle.
Mais, je le répète, il serait inouï, et chacun de vous le comprendra, qu'on s'occupât au département de la guerre de l'agrandissement d'une ville et d'une ville de commerce comme Anvers, sans que les autorités de la ville intéressée aieut pu connaître de la suffisance ou de l'insuffisance de cet agrandissement. Je ne crois pas que jamais on ait agrandi une ville, n'importe où, sans que les autorités qui représentent cette ville aient été consultées.
M. Vandenpeereboom. - Je viens appuyer les observations que vous a soumises l'honorable M. Loos. D'après la loi, les conseils communaux règlent tout ce qui est d'intérêt communal, et s'il est une question de cette nature qui soit grave et importante, c'est surtout celle de l'agrandissement ou de l'amoindrissement des villes. Ce sont là des faits qui se présentent assez rarement dans l'histoire d'une localité, et qui ont des conséquences très longues et très durables.
J'ai pris la parole, non seulement pour appuyer les observations de mon honorable collègue et ami, mais je désire aussi demander, pour la ville d'Ypres, qu'il sollicite pour la cité dont il défend si bien les intérêts.
S'il est une ville qui s'est agrandie considérablement, qui s'est agrandie peut-être trop à son gré, c'est la ville d'Ypres. On a démoli ses fortifications et l'on va vendre, dans un bref délai, les terrains extra-muros, appartenant jadis, au domaine de la guerre.
M. Coomans. - C'est bien heureux pour elle.
M. Vandenpeereboom. - Je ne me plains plus, le fait est consommé. Mais pour vendre utilement ces terrains, on sera obligé de percer des chemins. Au point de vue communal, la ville a intérêt à être consultée sur le percement de ces nouvelles voies de communication.
D'après la loi communale, ou ne peui ouvrir ni supprimer une ruelle, une impasse, sans remplir des formalités nombreuses, sans qu'il soit procédé à une enquête de commodo et incommodo. Lorsqu'il s'agit de faire des chemins très étendus, qui existeront pendant de longues années, n'est-il pas désirable et juste que l'autorité communale soit entendue ?
La décision d'ailleurs n'est pas ici aussi urgente que pour Anvers. La ville d'Ypres a perdu toute valeur militaire ; elle n'aura plus désormais valeur civile, si je puis parler ainsi. C'est à ce point de vue que la question de la voirie de la banlieue de la ville d'Ypres doit être étudiée et l'administration communale en cette matière est le juge le plus compétent.
J'appelle sur cette question l'attention non seulement de M. le ministre de la guerre, mais aussi de M. le ministre des finances, puisque l'administration des domaines sera chargée de la vente des terrains, et aussi de M. le ministre de l'intérieur qui a la voirie vicinale dans ses attributions.
M. Osy. - Messieurs, pour des intérêts bien moindres on consulte toujours les parties intéressées ; s'il s'agit d'une question industrielle et commerciale, on l'envoie à l'avis des chambres de commerce. Je ne concevrais donc pas que pour une affaire aussi importante, on se passât de l'avis de tout le monde.
La ville d'Anvers dépense une somme de 2 à 3 millions pour faire des bassins ; et la ville ne saura pas si le nouveau projet comprend dans la nouvelle enceinte ces bassins, et des terrains suffisants pour construire des entrepôts et des magasins !
Je ne comprends pas comment le gouvernement se refuse à prendre l’engagement que lui demande mon honorable ami M. Loos. Lorsque le projet sera présenté, la Chambre elle-même ne voudra-t-elle pas connaître l'opinion de la ville d'Anvers, et ne pourrait-il pas alors en résulter une perte de temps ? Mieux vaut donc que le gouvernement consulte l'administration communale d'Anvers avant la présentation du projet.
Le gouvernement appréciera l'avis de cette administration et les observations qu'elle pourra faire et il nous présentera alors le projet de loi avec la certitude que les intérêts de la ville d'Anvers ne sont pas lésés. Car comme le disait tout à l'heure l'honorable M. Loos, nous pouvons espérer que bientôt nous aurons la paix, et si cet événement heureux se réalise, soyez persuadés, que grâce à la situation heureuse de la ville d'Anvers les affaires y augmenteront considérablement et qu'il faudra beaucoup de place pour recevoir les navires et les marchandises qui nous arriveront. Les personnes qui visitent Anvers peuvent voir ce qui se passe déjà dans nos bassins ; on a dû changer le mode de débarquement. Autrefois c'était des navires d'un petit tonnage, aujourd'hui ce sont des navires d'un grand tonnage qui nous arrivent. On est obligé de diriger la proue des vaisseaux vers les quais parce que la place manque.
Je crois donc que le gouvernement fera bien de prendre l'engagement de soumettre son nouveau projet à l'administration communale d'Anvers.
M. Dumortier. - Je comprendrais les efforts que font les honorables députés d'Anvers auprès de M. le ministre de la guerre, s'il s'agissait d'enlever quelque chose à la ville d'Anvers. Je comprendrais parfaitement que dans un cas semblable, on vînt réclamer l'exhibition des plans, on vînt demander que la ville fût consultée. Mais ici s'agit-il d'enlever quelque chose à la ville d'Anvers ? Non, il s'agit de lui donner du terrain, de l'air et de l'espace. Or, quand il s'agit d'agrandir une ville, il me semble qu'elle doit accepter avec reconnaissance ce que le gouvernement va lui donner, et que c'est pousser l'exigence un peu loin que de vouloir intervenir dans les projets qui intéressent la défense du pays.
M. le ministre de la guerre me paraît donc avoir complètement raison dans le système qu'il défend. En effet, que peut-il arriver ? C'est que le système d'agrandissement de la ville d'Anvers au point de vue militaire ne concorde pas avec celui qui conviendrait à la localité au point de vue de son avenir. Voilà donc que M. le ministre aurait la main forcée, et cela au préjudice de son propre point de vue, qui est celui de la défense du pays.
Je dis que les interpellations de mes honorables collègues, que je m'explique parfaitement bien, ne peuvent pas tenir devant les observations que vient de faire M. le ministre de la guerre. Il est d'ailleurs impossible de supposer que M. le ministre vous présentera un projet qui coupe en deux les bassins. M. le ministre est un homme trop éclairé, trop supérieur pour nous saisir d'un projet de ce genre. Mais laissez-lui présenter son projet, et si vous avez alors des observations à faire, vous serez libres de nous les soumeitre.
Il est impossible, messieurs, qu'une administration communale intervienne dans un plan de défense. Car, veuillez-le remarquer, on a beau dire le contraire, la question d'agrandissement se lie intimement à la question du plan de défense. M. le ministre de la guerre l'envisage à ce dernier point de vue et il a raison. Chargé de la défense du pays, il ne doit point l'envisager à un autre.
Il a sous sa responsabilité cette grave question et il importe qu'il jouisse, en ce qui la concerne, de la plus grande latitude. Je pense donc qu'on ferait bien de ne pas insister davantage.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Messieurs, si je résiste à prendre un engagement c’est que j’ai pour principe d’être sobre d’engagements, de ne prendre absolument que ceux que je suis disposé à tenir et en état de tenir.
Quant à l'inquiétude que pourraient concevoir les habitants d'Anvers et les honorables députés qui m'ont fait l'honneur de m'interpeller dans cette circonstance, j'aurai l'honneur de répondre que le projet est conçu dans un ordre d'idées plus vaste que celui qui avait été proposé par la ville d'Anvers elle-même ; il est plus vaste en quelque sorte que celui qui avait été proposé par l'honorable M. Loos parlant en son nom propre, et par l'honorable M. Loos comme membre de la commission.
Je répéterai, en outre, ce que j'ai déjà eu l'honneur de dire à l’honorable M. Loos, que je le conviais à passer dans mon cabinet, lui et tous les membres de la députation d'Anvers, que je serais heureux de leur communiquer tous les plans et d'entendre les observations qu'ils pourraient faire. J'ai lieu de croire qu'après avoir pris connaissance des documents ils seraient eux-mêmes convaincus de l'inutilité d'un nouveau recours à l'avis du conseil communal d'Anvers.
(page 400) Répondant à l'honorable M. Vandenpeereboom, en ce qui concerne la ville d'Ypres, j'aurai l'honneur de lui faire observer qu'il ne s'agit ici ni d'un agrandissement dans l'intérêt de la défense, ni d'un agrandissement dans l'intérêt du commerce, mais qu'il semble être un peu question d'une absorption par la ville d'Ypres de certaines propriétés qui appartiennent à l'Etat, en vertu des lois du 11 juin 1853 et du 14 mars 1854.
Des concessions ont été faites dans l'ordre le plus large, dans l'ordre le plus étendu ; M. le ministre des finances et moi, nous avons usé de toutes les ressources que la loi mettait à notre disposition, pour faire les conditions les plus favorables à la localité. Il y a encore quelques points en litige, mais ils n'ont aucun rapport avec ce qui se passe en ce moment
M. Loos. - Messieurs, si j'ai insisté pour que les plans fussent communiqués au conseil communal, c'est uniquement pour qu'il puisse se prononcer sur les nouvelles limites qu'on entend donner à la ville. J'ai déjà dit tout à l'heure que le conseil communal n'a pas à s'occuper des travaux de fortifications, à moins qu'ils ne viennent imposer de la gêne au commerce d'Anvers. Ainsi aujourd'hui nos quais se trouvent embarrassés par des batteries ; deux batteries se trouvent établies sur les quais. Or je crois que les quais sont surtout destinés à l'abordage des navires.
Il importe à la ville d'Anvers de savoir si dans le projet d'agrandissement on place de nouvelles fortifications sur les quais, si les quais seront abordables pour les navires ou s'ils seront exclusivement ou en partie réservés aux besoins de la guerre ; ce qui répondrait fort mal à l'attente du pays.
L'honorable ministre de la guerre a dit que le plan auquel il s'est arrêté est celui qui a été présenté ou préconisé par moi ; je n'ai présenté ni dans les comités ni à M. le ministre de la guerre, ni en qualité de bourgmestre d'Anvers, ni en qualité de représentant, aucun projet quelconque. On en a parlé et j'ai exprimé le désir que l'agrandissement fût le plus important possible ; j'avais indiqué un agrandissement qu'un officier du génie m'a dit ne pouvoir être réalisé parce qu'il aurait entraîné une dépense trop considérable ; supposant qu'on voulait présenter ce projet à M. le ministre de la guerre comme venant de moi, j'ai eu soin de dire que je n'en acceptais en aucune façon la responsabilité avant d'avoir vu le travail qui aurait été fait d'après cette idée. On m'avait promis de me faire voir ce travail, mais je ne l'ai pas vu, c'est une raison de plus pour que je fasse toutes mes réserves.
J'ai eu l'honneur de le dire à M. le ministre la guerre, je ne fais que le répéter à la Chambre, je n'accepte ni comme représentant ni comme bourgmestre, le projet sans l'avoir vu ; je ne serai convaincu qu'il satisfait aux besoins de la ville d'Anvers, que quand j'aurai pu m'assurer qu'aucune entrave n'existe sur les quais ni aux approches du fleuve.
J'espère que le projet qu'on nous soumettra fera disparaître les obstacles qui existent aujourd'hui et qui empêchent les navires d'une certaine importance, les bateaux à vapeur transatlantiques, d'aborder les quais. Ces ainsi que le fort Saint-Laurent a été placé précisément au point où débarquaient des bateaux à vapeur.
M. Vandenpeereboom. - Messieurs, j'ai été mal compris ou je me suis mal expliqué. Je n'ai nullement à me plaindre de ce que M. le ministre de la guerre en particulier et le cabinet actuel en général ont fait pour la ville d'Ypres.
Ils ont autant qu'il était en leur pouvoir réparé un préjudice qui résultait de circonstances forcées, et je suis heureux de saisir cette occasion pour les en remercier.
Je me suis borné à demander si le département de la guerre et l'administration du domaine chargée de la vente des terrains autour de la ci-devant place d'Ypres, ne pourraient pas s'entendre avec l'administration communale en ce qui concerne le percement des rues ou chemins à établir sur l'emplacement des ouvrages extérieurs. Il y a là un intérêt communal très caraclérisé.
Si, par exemple, on arrivait un jour à supprimer les octrois et par conséquent à combler les fossés, il serait vivement à désirer que les nouvelles rues fussent établies en prolongement des anciennes. C'est là une question dont le meilleur juge est certainement la commune elle-même.
Au point de vue financier, elle n'a rien à gagner, mais elle a à prévoir une amélioration matérielle permanente. L'officier d'état-major qui commande le génie à Ypres et que des études savantes ont placé au rang le plus distingué, l'honorable receveur des domaines, fonctionnaire d'un mérite incontesté, qui, très probablement, seront chargés de cette affaire, ont certes beaucoup de zèle, d'intelligence et de lumières, mais je crois que la commune mérite aussi d'être entendue. Je ne demande pas que le gouvernement cède gratuitement la moindre parcelle de ses droits, mais qu'il veuille bien tenir compte de la loi qui décrète qu'aucune voie de communication ne peut être établie d'office et sans le consentement de l'administration locale ; c'est une prérogative communale.
Je demande donc uniquement que la commune soit consultée sur le percement de ces communications. Je n'y vois aucun inconvénient et j'y vois un avantage réel. Il ne peut y avoir aucune perte pour l'Etat et il peut y avoir bénéfice pour la ville d'Ypres qui, dans ce cas encore, remerciera le gouvernement de ce qu'il aura bien voulu faire pour elle.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, dans les cas analogues à ceux auxquels l'honorable M. Vanden Peereboom fait allusion, il est évident que le gouvernement se met toujours en rapport avec les administrations, et que rien ne se fait sans les avoir au moins consultées.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Messieurs, si mes souvenirs me servent bien, lorsque, dans le comité consultatif, il a été question de l'agrandissement de la partie nord d'Anvers, l'honorable M. Masui, qui avait été nommé membre du comité, à la demande de l'honorable M. Loos, a fait la proposition de l'agrandissement de la partie nord dans des termes à peu près équivalents à ceux que je vais citer. « Il importe, disait M. Masui, que l'agrandissement soit parallèle à l'Escaut et non pas perpendiculaire à ce fleuve ; il importe que l'agrandissement aboutisse au fort du Nord et qu'on prenne les terrains nécessaires pour établir les bassins dans les plus vastes proportions. »
L'honorable M. Loos a dit qu'il se ralliait à l'opinion de M. Masui. Je crois que si mes souvenirs me servent bien, les choses se sont passées ainsi. Or, je ferai observer à la Chambre que le travail, non seulement va jusqu'au fort du Nord, mais qu'il englobe cet ouvrage dans l'agrandissement projeté.
M. Loos. - J'avais demandé que M. le ministre de la guerre voulût bien nommer M. Kummer membre du comité ; cet ingénieur dirigeait les travaux de l'écluse que le gouvernement fait construire à Anvers. Cette nomination a rencontré quelques obstacles et n'a pas eu lieu. C'est M. Masui qui, dans le sein du comité, a émis l'avis que l'agrandissement de la ville fût aussi important que possible parallèlement au fleuve, de manière à réserver l'espace nécessaire aux établissements maritimes qui lui manquent. Je ne prétends pas critiquer d'avance le plan qui a été arrêté.
Je ne suis pas éloigné de croire que dans ce projet M. le ministre de la guerre a concilié les intérêts du commerce et ceux de la défense ; mais je voudrais en avoir la certitude, et je persiste à prier M. le ministre de la guerre de communiquer le travail au conseil communal d'Anvers. Je crois pouvoir dire que, tel qu'il est indiqué par M. le ministre, ce projet recevra l'approbation du conseil communal.
M. Delfosse. - Messieurs, en m'abstenant sur le budget de la guerre, j'ai fait valoir deux motifs qui n'ont pas été agréables à M. le ministre de la guerre. Mais, au lieu de me répondre ici, soit immédiatement, soit dans une des séances suivantes, M. le ministre de la guerre a préféré porter la question devant le sénat. Interpellé, probablement à. sa demande, par un honorable sénateur, il a prononcé un discours dans lequel il a réfuté longuement les deux motifs que j'avais fait valoir. Plusieurs sénateurs qui, je crois, n'étaient pas préparés à la discussion, ont crié : « Très bien » après le discours de M. le ministre de la guerre. J'ai été jugé et condamné par contumace. Comme je ne voudrais pas que mon silence fût considéré comme un acquiescement à ce que M. le ministre de la guerre a dit au sénat, je le préviens que je lui répondrai, à mon tour, lors de la discussion sans doute prochaine du projet de loi relatif à la pension des officiers de 1830.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Messieurs, j'attendrai les observations que l'honorable préopinant se propose de faire, à l'occasion de la discussion du projet de loi qu'il vient de citer. Je dois cependant rectifier un fait :
Ce n'est nullement à ma demande que j'ai été interpellé au Sénat, relativement à la question qui avait été soulevée par lui lors de son abstention. Je déclare que j'aurais répondu à l'instant même, si mes honorables collègues ne m'avaient pas fait observer qu'il était contraire aux convenances parlementaires de discuter sur les motifs d'une abstention.
M. Delfosse. - Puisque M. le ministre de la guerre affirme que ce n'est pas à sa demande qu'il a été interpellé au Sénat, je le crois ; ma supposition n'avait, du reste, rien de désobligeant, ni pour M. le ministre de la guerre ni pour l'honorable sénateur auquel j'ai fait allusion.
Ce qui m'avait porté à croire qu'il y avait eu accord préalable, c'est que M. le ministre de la guerre était évidemment préparé à répondre à l'interpellation, il était muni des pièces et il n'y a pas eu dans sa réponse, quoique assez longue, la moindre hésitation.
- Personne ne demandant plus la parole, les conclusions de la commission des pétitions sur la pétition des président et membres de la commission de la ciuquième section d'Anvers sont mises aux voix et adoptées.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée de Sart, le 30 septembre 1855, les administrations communales de Sart, Theux, Spa, Pepinster, La Reid, Cornesse, Lam-bermont, Wegnez, Ensival et Polleur demandent une loi qui donne aux administrations communales le pouvoir de comminer des peines contre les contrevenants aux règlements de police en matière de changements de domicile.
Plusieurs administrations communales réclament une loi qui autorise les conseils communaux à comminer des peines contre les contrevenants aux règlements de police en matière de changement de domicile.
Cette demande n'est pas inopportune.
En effet, l'arrêté royal du 30 juin 1846, article 2, exige que chaque commune possède un registre de population, et l'instruction générale annexée à cet arrêté, ordonne aux administrations communales de (page 401) pourvoir par des règlements de police à l'exécution de l'article 2 de l'arrêté précité.
Les communes ont, en général, satisfait aux prescriptions qu'elles avaient reçues ; mais voici qu'un arrêt de la cour de cassation du 2 août 1854 décide que parmi les objets sur lesquels les conseils communaux peuvent faire des ordonnances de police et prononcer des pénalités, ne se trouve pas ce qui concerne la formation des registres de population.
Il y a donc conflit entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir administratif.
Il n'appartient pas à la commission des pétitions de prétendre que la cour suprême se soit trompée. Cependant, je dois dire que dans l'opinion de la commission des pétitions, des objections sérieuses peuvent être opposées à l'arrêt de la cour de cassation, et des motifs graves militent en faveur de l'arrêté du 30 juin 1846.
En effet, la tenue des registres de population n'est pas prescrite dans le seul but de réunir, jour par jour, les éléments d'une statistique complète de la population. Elle assure l'exactitude des actes de l'état civil où doivent être consignés les noms et prénoms des personnes qui ont changé de résidence ; elle prévient des contestations en matière de domicile de secours, de milice ; elle rend plus facile l'action de la police dans la recherche des crimes et délits ; elle permet une surveillance plus active sur les hommes dangereux.
Il semblerait donc que c'est avec raison que les communes ont pu être invitées à réglementer ce qui concerne la tenue des registres de population, c'est-à-dire à porter des ordonnances sanctionnées au moyen de pénalités de police.
Mais en présence de l'arrêt cité de la cour de cassation, il est peu probable que les règlements existants conservent de l'efficacité. Il serait donc utile de trancher la question par une loi.
Aussi, la commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition dont il s'agit à MM. les ministres de l'intérieur et de la justice.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée de Namur, le 29 novembre 1855, le sieur Belot, pharmacien à Namur, demande que la position des pharmaciens militaires soit améliorée.
Le sieur Belot présente de longues considérations en faveur des pharmaciens de l'armée. Il réclame pour eux une amélioration de position, et des mesures légales et administratives en harmonie avec celles qui concernent le corps médical militaire.
La commission des pétitions, en rendant hommage à la sollicitude du sieur Belot, pharmacien civil, pour ses confrères de l'armée, a l'honneur de proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de la guerre.
M. Lelièvre. - Je recommande l'examen de la pélition à M. le ministre de la guerre qui reconnaîtra certainement qu'il y a lieu d'améliorer la position des pharmaciens militaires.
J'appelle également l'attention de M. le ministre sur la position des médecins militaires qu'il est nécessaire de rétribuer convenablement, si l'on veut avoir un service de santé répondant aux nécessités. Le système actuel réclame depuis longtemps des modifications profondes. Je prie M. le ministre de la guerre de s'occuper de cet objet important.
M. Rodenbach. - Messieurs, je suis étonné que l'honorable M. Lelièvre n'ait pas pris dans le Moniteur connaissance d'un arrêté royal de date récente qui améliore considérablement le sort des médecins de l'armée.
Tout le monde doit en convenir, M. le ministre de la guerre a eu égard à toutes les réclamations qui avaient été faites, il s'est montré réellement généreux envers les médecins de l'armée. Quant aux pharmaciens militaires, M. le ministre ne les oubliera pas non plus, quoique leur sort soit meilleur que ne l'était celui des médecins de l'armée.
M. Lelièvre. - Je n'ignore pas les dispositions prises par le gouvernement en ce qui concerne les médecins militaires, mais à mon avis elles sont incomplètes. Si l'on veut que le corps du service de santé renferme dans son sein des hommes capables, il faut faire quelque chose de plus en faveur des médecins dont il s'agit, je me suis souvent expliqué à cet égard lors de la discussion du budget de la guerre et j'appelle sur ce point l'attention du gouvernement.
- Personne ne demandant plus la parole, le renvoi de la pétition du sieur Belot à M. le ministre de la guerre est ordonné.
M. Thibaut, rapporteur. - Plusieurs cultivateurs de l'arrondissement d'Anvers demandent que, dès le commencement de la saison de la monte, le département de l'intérieur envoie en station à Merxem deux étalons de gros trait et qu'il les y maintienne pendant toute la durée de cette saison.
La commission des pétitions, considérant que les dépenses du haras sont faites en grande partie en vue de procurer un avantage direct aux cultivateurs et que, par conséquent, leurs vœux doivent être consultés, a l'honneur de proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée de Woumen, le 28 novembre 1855, le sieur Despeghel réclame l'intervention de la Chambre, pour que son fils Amand soit admis à jouir de l'exemption du service militaire, accordé par la loi à l'enfant unique.
Despeghel expose qu'il a adressé une première pétition au Roi, et que le département de la guerre, auquel cette pétition a été transmise, lui a répondu que sa demande ne pouvait être prise en considération.
En supposant, messieurs, que le milicien Despeghel soit réellement devenu enfant unique depuis son incorporation dans l'armée, il est hors de doute qu'il peut réclamer l'exemption du service militaire (articles 21 et 22 de la loi de 1817).
Il est fâcheux que personne ne lui ait indiqué la marche à suivre en cette occurrence, marche qui est tracée par la loi elle-même.
La question' est, du reste, du ressort du département de l'intérieur qui a dans ses attributions tout ce qui concerne la milice.
La commission a donc l'honneur de proposer le renvoi à MM. les ministres de l'intérieur et de la guerre.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée de Saint-Josse-ten-Noode, le 25 novembre 1855, le sieur Barnick, ancien maréchal ferrant de l'armée, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une augmentation de pension.
Le pétitionnaire s'était déjà adressé à M. le ministre de la guerre, et comme il n'allègue pas que la loi sur les pensions ait été violée à son préjudice, la commission a l'honneur de proposer l'ordre du jour.
- L'ordre du jour est mis aux voix et adopté.
M. Thibaut, rapporteur. - Des habitants de Lise demandent que les hameaux de Seraing soient érigés en commune distincte et sous le nom de Lise.
Les signataires de cette pétition ne donnent aucun des renseignements à l'aide desquels la commission des pétitions pourrait se former une opinion sur la possibilité et l'utilité de séparer de Seraing les hameaux qui en dépendent, pour en former une commune distincte. Ils ne disent ni quelle est la population de ces hameaux, ni quelles sont les ressources qui leur sont propres, ni quelle est la distance qui les sépare du centre de la commune, ni quelle serait l'étendue du territoire de la nouvelle commune. Ils se bornent à énoncer des faits graves sans doute qui, s'ils étaient vrais, démontreraient que l'administration communale de Seraing n'est pas très paternelle pour les hameaux ; mais sur ce point encore nous ne trouvons que des allégations sans pièces à l'appui.
Dans cette situation, la commission des pétitions a l'honneur de proposer l'ordre du jour.
- L'ordre du jour est mis aux voix et adopté.
M. Thibaut, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 25 octobre 1855, le sieur Meunier demande que la législature apporte deux modifications à la loi sur les faillites :
l' A côté du curateur à la faillite, il propose de placer un commissaire spécial, choisi par la masse créancière dans son sein, et qui, à lui seul, représenterait cette masse créancière lorsqu'il s'agirait d'approuver les comptes du curateur et la clôture définitive de la faillite.
2° Il propose de déclarer le failli locataire déchu des droits que lui confère le bail, à dater du jour de la déclaration de faillite, et de prendre des mesures pour que ses meubles et marchandises soient enlevés immédiatement.
Sans entrer dans l'examen critique de ces propositions, la commission pense qu'une législation compliquée comme celle qui régit les faillites ne peut être modifiée légèrement ni dans des dispositions isolées, et qu'il convient d'ailleurs, la loi étant récente, d'attendre une plus longue expérience de son application.
La commission a donc l'honneur de proposer le dépôt au bureau des renseignements.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Thibaut, rapporteur. - Le sieur Bofamé se plaint de la manière dont a été réparti, au département des travaux publics, administration des chemins de fer, le crédit alloué par la législature pour venir en aide aux employés subalternes de l'Etat et aux ouvriers journaliers du gouvernement.
Il était à prévoir, messieurs, que la distribution du crédit de 400,000 francs donnerait lieu à des critiques, à des plaintes amères. La commission n'a pû se livrer à l'enquête minutieuse qui serait nécessaire pour établir l'exactitude de faits relatés dans la pétition de M. Bofamé. Cependant s'ils sont exacts, on devrait reconnaître que les intentions de la législature ont été violées. Il appartient à M. le ministre des travaux publics de faire des recherches à cet égard. La commission a donc l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition à ce haut fanctionnaire.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Le Roi m'a chargé de présenter les projets de loi dont je vais avoir l'honneur d'indiquer l'objet :
1° Un crédit extraordinaire de 2,359,760 fr. au département de la guerre pour couvrir les dépenses de divers travaux d'achèvement et d'amélioration du matériel du génie et de l'artillerie ;
2° Un crédit de 40,546 fr. 29 cent, au département de la guerre, destiné à payer des créances arriérées à charge de ce département, sur les exercices antérieurs à 1854 ;
3° Un crédit supplémentaire de 3,648,618 fr. 20 c. sur le budget de 1856 destiné à faire face au surcroît de dépenses qui résultera de la crise des denrées alimentaires.
(page 403) 4° Un crédit de 3,158,000 fr. au département des travaux publics pour l'exécution d'ouvrages d'utilité publique.
Il est donné acte à M. le ministre de la présentation des divers projets de loi qu'il vient de déposer.
Ces projets et les motifs qui les accompagnent seront imprimés et distribués et renvoyés à l'examen des sections.
M. le président. - A quelle heure la Chambre veut-elle se réunir demain ?
- Plusieurs voix. - A 3 heures !
D’autres voix. - A 2 heures !
M. Vander Donckt. - Je propose 2 heures. Nous avons à l'ordre du jour plusieurs pétitions qui donneront lieu à de longues discussions. L'une d'elles est relative à un testament ; les questions de cette nature dans les circonstances actuelles donnent lieu à de longs débats.
Il y a une pétition sur laquelle un prompt rapport a été demandé et dont la discussion a été renvoyée à demain.
En troisième lieu, nous avons une pétition réclamant un nouveau délai pendant lequel les vétérinaires non diplômés pourront continuer à exercer. Tout cela prendra assez de temps, je demande que la séance soit fixée à 2 heures.
- La Chambre consultée fixe la séance à 3 heures.
La séante est levée à 4 heures 1/2.