(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)
(Présidence de M. Delehaye.)
(page 289) M. Ansiau procède à l'appel nominal à une heure et un quart.
M. Calmeyn lit le procès-verbal de la séance précédente.
- La rédaction en est adoptée.
M. Ansiau présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.
« Le sieur Deffense demande que son fils Désiré soit libéré du service militaire, ou du moins placé dans la position de milicien de la classe de 1851. »
M. Lelièvre. - J'appuie la pétition, et eu égard aux considérations qui militent en faveur du milicien ; je prie M. le ministre de la guerre de bien vouloir lui accorder un congé illimité.
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Mertens, membre du conseil provincial d'Anvers, demande l'endiguement d'un schorre, situé à l'extrême frontière du canton d'Eeckeren, vis-à-vis de Sanlvliet. »
M. Vervoort. - Il s'agit d'une demande relative à la mise en adjudication de travaux d'endiguement de quelques alluvions qui se sont formées dans l'Escaut. Cette affaire est très urgente, parce que si l'adjudication se fait, elle devrait avoir lieu avant le mois de mars.
Je demande donc le renvoi à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport.
- Cette proposition est adoptée.
M. Thienpont, rapporteur. - Par pétition datée de Masnuy-Saint-Pierre, le 24 novembre 1855, l'administration communale de Masnuy-Saint-Pierre réclame l'intervention de la Chambre pour que le département des travaux publics fasse construire une station dans cette commune qui est traversée par le chemin de fer de l'Etat.
D'après la requête, messieurs, l'établissement de cette nouvelle station doit nécessairement avoir pour effet d'amener un développement considérable du commerce et de l'industrie. Les pétitionnaires énumèrent longuement les avantages qui en résulteront. Le trésor public aussi bien que Masnuy-St-Pierre et plusieurs autres communes y sont également intéressés. Voilà du moins l'opinion des pétitionnaires, opinion que le gouvernement semble ne pas partager, à en juger toutefois d'après le résultat négatif qui a suivi des démarches et des sollicitations réitérées. Jusqu'aujourd'hui les conseillers communaux de Masnuy-St-Pierre paraissent avoir prêché dans le désert et c'est pourquoi ils ont pris le parti de s'adresser à la législature.
Votre commission, a pensé, messieurs, qu'il n'y avait aucun inconvénient à envoyer cette demande à l'appréciation de M. le ministre des travaux publics.
M. Laubry. - Je prierai M. le ministre des travaux publics de vouloir examiner avec une sérieuse attention la pétition du conseil communal de Masnuy-Saint-Pierre dont M. le rapporteur vient de faire l'analyse, et je le supplie de prendre une décision prochaine qui satisfasse les pétitionnaires.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. Moreau, rapporteur. - Messieurs, je suis chargé par la commission des pétitions de vous présenter de prompts rapports sur deux objets assez importants, l'un concernant l'usine de la Vieille-Montagne, située au faubourg Saint-Léonard, à Liège ; l'autre, sur une requête de plusieurs habitants de Liège qui demandent une loi sur les établissements dangereux, insalubres ou incommodes.
Ces rapports sont assez longs, et je doute que la Chambre puisse examiner aujourd'hui ces affaires ; je suis cependant aux ordres de la Chambre ; j'en donnerai lecture si elle le désire ; mais je crois qu'il est préférable d'imprimer ces rapports dans les Annales parlementaires avant-la discussion.
M. Deliége. - Je voulais faire la même proposition que l’honorable rapporteur. La Chambre gagnera du temps en ordonnant l'impression des rapports. Ils sont trop importants pour être discutés avant cette impression.
M. Lelièvre. - J'appuie la demande d'impression du rapport. Il s'agit d'une question importante qui doit être résolue dans un intérêt général.
Il y a un ordre de choses illégal qui ne saurait être maintenu. J'engage M. le ministre à s'occuper sans délai de l'affaire grave qui fait l'objet de la pétition et à prendre de suite une décision qui est attendue depuis longtemps.
M. Delfosse. - Le rapport n'étant pas imprimé, je ne puis demander qu'on le discute immédiatement ; mais je regrette que la discussion ne puisse venir qu'après les vacances.
J'engage vivement M. le ministre des travaux publics à ne pas perdre de vue qu'il a été mis en demeure, par le conseil communal de Liège, d'assurer l'exécution des lois en ce qui concerne l'usine à zinc de la Vieille-Montagne.
Une responsabilité d'autant plus grande pèse sur M. le ministre des travaux publics, que son collègue des affaires étrangères est l'un des administrateurs de cette société. Loin de moi la pensée que cette circonstance soit de nature à exercer de l'influence sur les résolutions de M. le ministre des travaux publics. Mais il reconnaîtra qu'il doit aux pétitionnaires et à son collègue des affaires étrangères de ne pas prolonger les retards dont on se plaint avec raison.
M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, je ne vois aucun motif pour m'opposer à la remise demandée par quelques honorables membres. Je pense aussi que le rapport de l'honorable M. Moreau, sur une question de cette importance, doit être long et substantiel et mérite un examen sérieux de la part des membres de la Chambre avant la discussion.
L'honorable M. Delfosse a saisi cette occasion pour appeler mon attention sur l'importance de la question. Je suis d'accord avec lui et, comme j'ai eu l'occasion de le lui dire, je n'attends qu'un rapport, qui doit être très avancé maintenant.
Je remercie l'honorable membre de vouloir bien supposer que dans ces questions, je ne cède à aucune pression ; l'affaire sera examinée pour elle-même et non pour les personnes qu'elle intéresse.
M. Delfosse. - Je dois cependant faire remarquer que M. le ministre des travaux publics a laissé passer trois mois après l'avis donné par la députation permanente, avant de nommer la commission dont il attend le rapport. Par la faute de M. le ministre des travaux publics, il y a eu trois mois perdus.
M. de Renesse. - Je propose de décider que cet objet figurera en tête de l'ordre du jour, à notre rentrée.
- Cette proposition est adoptée.
(page 299) >M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, par pétition, datée de Namur, le 25 mai 1855, plusieurs habitants des plus notables de cette ville demandent la révision des lois sur les servitudes militaires. Ils déclarent adhérer à toutes les considérations exposées par les pétitionnaires d'Anvers et de Charleroi et à tous les arguments que ces derniers ont fait valoir dans leurs requêtes. Mais ils ont, en outre, des motifs spéciaux à faire valoir à l'appui de leur demande, qu'ils ont longuement développés dans leur pétition.
Votre commission, messieurs, considère que la Chambre voudra agir par les mêmes principes d'égalité, d'équité et de justice envers les habitants de Namur comme envers les autres localités pétitionnaires.
Par ces motifs, elle a l'honneur de vous proposer le renvoi de leur requête à M. le ministre de la guerre.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, par pétition datée d'Alost, le 25 novembre 1855, la chambre de commerce d'Alost demande que la société concessionnaire du chemin de fer de Dendre et Waes soit autorisée à abandonner aux consommateurs et au commerce une partie de la part qui lui est allouée sur le prix du transport des houilles.
Votre commission, messieurs, sans approuver ni improuver les nombreuses (manquent quelques mots$) pour appuyer leur demande, et qu’ils ont pour but de faire baisser le prix de ces combustibles dans l'intérêt des populations et du commerce de ces contrées, se borne à faire remarquer que la question concernant les remises à accorder par la compagnie concessionnaire, telle qu'elle qu'elle est présentée par les pétitionnaires, n'est plus la même que celle qui a fait l'objet de la discussion de la Chambre vers la fin de la session dernière. En eifet, ils admettent que les remises dont il s'agit ne peuvent être accordées qu'avec l'autorisation du gouvernement, et loin de révoquer en doute le droit du gouvernement, qui a été contesté par la compagnie, ils demandent que le gouvernement veuille bien faire usage de ce droit en faveur des consommateurs et du commerce de l'arrondissement d'Alost, en prenant les précautions nécessaires pour sauvegarder les intérêts du trésor.
Pour ces motifs elle a cru, sans rien préjuger, pouvoir vous proposer le renvoi pur et simple de la requête au département des travaux publics.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Messieurs, par pétition, datée de Namur, le sieur Woyard prie la Chambre de statuer sur la pétition des habitants de Namur, relative à la réduction des frais de procédure en matière d'expulsion de petits locataires.
Mêmes demandes d'autres habitants de Namur, de Braine-Lalleud et de Soignies.
Par suite d'une nombreuse série de pétitions, l'honorable M. Lelièvre usant de son droit d'initiative, dans la séance du 18 novembre 1852, déposa une proposition tendant à exempter des droits de timbre, d'enregistrement et de greffe, les actes de l'instance en expulsion des locataires dont la somme n'excède pas cent francs, pour toute la durée du bail.
Cette proposition accueillie par la Chambre fut renvoyée à une commission spéciale, dont l'honorable M. Deliége présenta le rapport en séance du 26 février 1853 ; les conclusions adoptées par la Chambre tendaient au renvoi à M. le ministre de la justice, pour la prendre en considération, lors de la révision du code de procédure civile, en exécution de l'article 139 de la Constitution.
Dans la séance du 9 mars 1853, l'honorable comte de Muelenaere combattant ces conclusions par des considérations fort judicieuses, ajouta : Il y a vingt-deux ans que la Constitution a fait cette recommandation au gouvernement et aux législateurs à venir, et Dieu sait quand cette tâche sera accomplie, et puis il se demanda : Dès lors l'adoption d'une mesure analogue à celle de l'honorable M. Lelièvre n'est-elle pas commandée par un principe social ? En terminant il proposa de modifier le (page 300) renvoi au ministre avec invitation de soumettre à la Chambre, soit un projet de loi, soit un rapport sur la question.
L'honorable M. Lelièvre combatlant à son tour les conclusions de la commission disait : Cet ajournement indéfini du projet équivaut à un refus formel. Par suite de l'adoption de cette proposition de M. le comte de Muelenaere appuyée par plusieurs autres membres qui ont prit part à la discussion, M. le ministre a déposé dans la séance du 28 janvier 1854, un rapport tendant à maintenir les conclusions primitives de la commission, à savoir : d'ajourner toute modification jusqu'à la révision du code de procédure civile.
Dans la séance du 22 février 1854, l'honorable comte de Muelenaere provoqua, par motion d'ordre, le dépôt au greffe de tous les documents relatifs à l'enquête ordonnée par le gouvernement sur cet objet pendant un terme de deux mois et sur la déclaration de M. le ministre que, dès le lendemain le dépôt serait effectué, il déclara avec ses collègues, MM. Rodenbach et Lelièvre, que le moment n'était pas venu de discuter le rapport de M. le ministre en date du 28 janvier 1854, qui n'était pas à l'ordre du jour, il se réservait de le discuter à fond en temps et lieu.
Une dernière discussion, sans suite, a eu lieu sur cet objet en séance du 27 novembre 1855.
Votre commission, en présence des considérations et des griefs nombreux que font valoir les pétitionnaires, considérant que ces demandes incessantes méritent un examen sérieux de la part du gouvernement et des Chambres, et qu'il est désirable qu'il soit une bonne fois statué et sur le rapport du gouvernement, et sur les nombreuses pétitions y relatives, a l'honneur de vous proposer le dépôt de ces pétitions sur le bureau pendant la discussion du rapport du 28 janvier 1854, et ensuite le renvoi à M. le ministre de la justice.
(page 289) - La Chambre décide que ces rapports seront imprimés et distribués.
M. le président. - Nous avons maintenant à l'ordre du jour la question du chemin de fer de Conlich à Lierre.
M. le ministre des travaux publics (M. Dumon) (pour une motion d'ordre). - Je comptais saisir la Chambre, dès l'ouverture de la séance, d'une nouvelle convention ; elle ne m'est pas encore parvenue ; j'espère pouvoir la déposer vers la fin de la séance.
M. Loos. - Je crois que la Chambre avait décidé que le rapport de M. le ministre des travaux publics sera renvoyé à la section centrale qui s'est occupée de la première convention. Je demande que cette décision soit maintenue.
M. le président. - Aucune décision n'a été prise, la Chambre a suspendu le vote jusqu'au moment de la présentation de la convention annoncée par M. le ministre des travaux publics. A présent que cette convention est connue, elle peut être renvoyée à la section centrale.
M. le président. - Messieurs, nous avons reçu la lettre suivante :
« Bruxelles, 21 décembre 1855.
« Messieurs,
« Je lis dans le Moniteur la discussion qui a eu lieu hier à la Chambre au sujet de la navigation du Levant. Comme mon nom y est intervenu, je crois devoir vous adresser ces lignes.
« La Compagnie générale maritime, fondée par le Crédit mobilier de France, a l'intention formelle et décidée d'établir très prochainement une ligne de navigation à vapeur entre Anvers et Marseille. Cette ligne correspondra directement avec toutes celles qui aboutissent déjà ou qui pourront aboutir à ces deux ports, et notamment avec les services desservant de Marseille tous les ports de l'Italie et du Levant.
« L'établissement de cette ligne a été annoncé au public par circulaire du 10 septembre dernier et la nouvelle en a été accueillie avec sympathie. On se propose maintenant d'établir une ligne rivale. Aussi longtemps qu'elle reste dans les termes d'une concurrence privée, je n'ai rien à y voir, mais lorsqu'elle demande un subside aussi considérable au gouvernement, je me permets respectueusement de poser deux questions :
Est-il juste de favoriser une concurrence, quand cette faveur ne peut tourner qu'au détriment d'un projet antérieur ?
(page 290) Est-il conformes aux principes de liberté commerciale d'aider une société à lutter contre une rivale avec les fonds du pays ?
« Veuillez agréer, messieurs les président et membres de la Chambre, les assurances de mes respectueux sentiments.
« Henri Schmidt. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Messieurs, nous continuons l'incident, qui s'est élevé à la dernière séance. Voici une note que M. Varlet m'a remise ce matin :
« Dans la séance d'hier de la Chambre des représentants, l'honorable M. Sinave, à propos du projet de loi concernant l'établissement d'une navigation à vapeur entre Anvers et le Levant, a avancé quelques assertions et produit une lettre qui me sont personnelles.
« Selon ces assertions et cette lettre, j'ai été instruit verbalement, par M. Schmidt, au mois de septembre dernier, du projet de la Compagnie générale maritime (Crédit mobilier) d'établir, sans subside du gouvernement belge, une navigation à vapeur qui aurait pour effet de relier Anvers à Marseille, et de là, au Levant, par les paquebots-postes.
« Que M. Schmidt m'ait fait une communication de cette nature,cela peut être. Mais j'affirme que je ne m'en souviens pas du tout ; et si la communication qu'on prétend m'avoir faite était assez formelle et assez précise pour permettre de croire à la réalisation plus ou moins prochaine d'un tel projet, j'ose affirmer également que je me serais empressé d'en faire part à M. le ministre des affaires étrangères, conformément à mon devoir et à mes habitudes administratives.
« Je me rappelle parfaitement avoir eu, il y a quelques mois, avec M. Schmidt, une conférence, mais, selon mes souvenirs, il ne s'y est agi que du projet qu'avait la compagnie d'organiser en Belgique une grande entreprise de pêche maritime.
« Bruxelles, le 21 décembre 1855.
« Varlet. »
Je pense qu'on ne peut rien ajouter à ces explications.
Il s'agit de moi maintenant, car on m'a accusé d'avoir reçu une missive par laquelle je devais connaître les projets de la compagnie générale du Crédit mobilier.
Messieurs, je vais vous donner lecture de cette pièce ; ce n'est pas le même exemplaire que celui que j'ai reçu au mois de septembre dernier. Je reçois tous les jours plusieurs circulaires sous bandes ; ces circulaires sont ordinairement des annonces d'ouvrages de librairie ; ce sont des prix courants de négociants en vins qui m'offrent leurs marchandises ; ce sont des marchandes de modes qui m'annoncent qu'elles sont de retour de Paris avec des chapeaux et des bonnets frais ; vous comprendrez facilement, messieurs, que je n'ai pas le temps de lire ces circulaires ; tout cela va au panier, sans que je déchire même la bande. Par extraordinaire, j'ai déchiré la bande de la circulaire dont il s'agit en ce moment, j’en ai lu les 4 ou 5 premières lignes ; je me suit dit : « Ce sont des actions qu'on m'offre dans une nouvelle entreprise, je n'y mords pas. » J'ai alors jeté la circulaire au panier, de sorte que je n'avais pas la moindre connaissance du fond même de la pièce en question.
Je vais, messieurs, vous la lire tout entière.
« Bruxelles, 10 septembre 1855.
« Monsieur,
« Nous avons l'honneur de porter à votre connaissance que la Compagnie générale maritime établie à Paris vient de nous déléguer sa représentation, et de nous confier le soin de ses affaires en Belgique, en Hollande, en Allemagne, etc.
« Cette compagnie, créée par la société du Crédit mobilier en France, sous le patronage de laquelle elle reste, a été formée au capital de trente millions de francs et a pour objet de se livrer, soit directement, soit en participation avec des tiers, aux opérations suivantes :
« La construction, la vente, l'armement et l'affrètement de navires à voiles et à vapeur ;
« L'établisssement de lignes de navigation à voiles et à vapeur ;
« Les assurances de mer ;
« Les emprunts à la grosse ;
« Le transport de colons et d'émigrants ;
« La pêche maritime ;
« La fabrication, l'achat, la vente et le transport de conserves alimentaires et d'engrais ;
« Les consignations ;
« Les avances sur consignations et warrants ;
« En un mot, à tout ce qui est commerce maritime ou s'y rattache.
« Vous saisirez immédiatement le grand avenir auquel est appelée la Compagnie générale maritime, dont les moyens d'action et d'influence sont sinon illimitée, du moins des plus étendus, à cause surtout de ses rapports intimes avec le Crédit mobilier, ce grand réservoir des capitaux européens, et l'utilité de vous metfre en relation avec cette compagnie disposée à faire, seule ou en participation avec ses amis, toutes les opérations sérieuses et celles principalement qui, par leur importance, échappent à l'action individuelle.
« Jusqu'à présent l'esprit d'association et le concours d'une puissante institution de crédit ont le plus souvent fait défaut aux opérations du commerce maritime ; il n'en sera plus ainsi désormais, les capitaux et l'influence de la compagnie s'allieront à l'expérience et à l'habileté de toute maison respectable, car la Compagnie générale maritime n'est pas une arme de concurrence, mais au contraire, un nouvel appui offert aux efforts individuels, une nouvelle impulsion imprimée à des industries qui, largement commanditées et fécondées par l'esprit d'association, sont appelées à prendre des développements considérables.
« L'intervention de la Compagnie générale maritime sera multiple :
« Au grand commerce maritime ainsi qu'au commerce de la pêche elle offre son intervention pour des opérations qui ne peuvent pas être bien entamées par des tentatives isolées ; avec la compagnie on pourra aborder les grandes affaires de longue haleine qui nécessitent la coopération d'une puissante institution de crédit ;
« A l'agriculture, la compagnie offre un secours important par l'emploi de nouveaux procédés dont elle s'est assuré la propriété et qui ont pour objet la transformation des détritus de poissons et autres matières animales en un guano égal en puissance au guano du Pérou, et dont la fabrication peut être obtenue à meilleur marché ;
« A l'industrie et au commerce d'importation et d'exportation elle offre sur consignations et warrants l'usage de ses capitaux.
« Ayant établi sur une grande échelle et par les meilleurs procédés la préparation de conserves alimentaires dans ses établissements sur les rives de la Plala, la compagnie fournira aux populations d'excellentes viandes à des prix beaucoup plus bas que les prix actuels.
« La compagnie est enfin appelée à rendre au commerce un service plus grand encore, nous voulons parler de la création de lignes de navigation, reliant les ports d'Europe entre eux et aux centres les plus importants de l'Amérique du Nord et de l'Amérique du Sud. (en note de bas de page : Nous pouvons dès à présent annoncer que la Compagnie générale maritime établira très prochainement un service de bateaux à vapeur entre Anvers et Marseille, avec échelle sur les principaux ports de France de l'Océan et de la Méditerranée. Ce service correspondra directement avec les lignes à vapeur qu'elle établit au Havre sur les Etats-Unis et le Brésil.)
« Nous venons donc vous engager, monsieur, à vous mettre en relation avec la Compagnie générale maritime et à utiliser le concours qu'elle vous offre pour vos opérations, concours qui en tout état de chose ne peut que vous être avantageux, la compagnie mettant, à des conditions fort modérées, ses capitaux au service de toute affaire commerciale sérieuse et respectable.
« Des raisons de diverses natures faisant désirer que les opérations à traiter dans les pays cités parviennent à la compagnie par notre intermédiaire et avec notre avis, nous vous prions de vous mettre directement en rapport avec nous pour tout ce que vous auriez à lui soumettre.
« Nous sommes dès à présent à votre disposition pour tous renseignements ou éclaircissements spéciaux que vous voudriez obtenir sur telle ou telle opération qui entre plus particulièrement dans votre genre d'affaires.
« Nous n'avons pas besoin, pensons-nous, de vous assurer de notre zèle pour favoriser les relations qui s'établiront entre vous et la Compagnie générale maritime, et, nous plaisant à croire que vous voudrez bien nous continuer la confiance dont vous nous avez honoré jusqu'ici, nous vous prions d'agréer l'expression de notre dévouement.
« Schmidt et Cie. »
Messieurs, je vous ai dit que je n'avais lu que les premières lignes de cette circulaire ; par conséquent, je ne suis pas coupable du crime, qu'on me reproche, d'avoir négligé une société qui ne demandait aucun subside, pour donner la préférence à une compagnie qui réclamait l'intervention pécuniaire du gouvernement.
Maintenant, je m'étonne que, puisqu'on a eu cette idée dès le mois de septembre dernier, on ait attendu le jour où la discussion du projet de loi s'ouvrait dans cette Chambre, pour signaler tel objet à notre attention.
Il me semble que le consul du Chili pouvait très bien venir chez moi me parler des intentions de la compagnie générale, ou bien adresser une pétition à la Chambre. Le pays sait, depuis le discours du Trône, qu'une convention a été passés entre le ministre des affaires étrangères et une compagnie d'Anvers, et le projet de loi est présenté depuis un mois.
On aurait pu mettre plus tôt la Chambre à même de statuer ou de s'instruire.
Quoi qu'il en soit, si j'avais reçu ces propositions d'une manière plus nette et plus précise, je ne les aurais pas acceptées, il ne s'agit pas d'établir des relations entre la Belgique et les différents ports de mer de la France, ce serait sans doute fort utile, mais ce n'est pas le but que nous nous proposons par notre projet ; arrivé à Marseille, il faudrait transborder les marchandises sur les bateaux-postes français ; ce n'est pas ce que j'ai eu en vue en contractant avec la compagnie belge.
Quelques mots maintenant sur la différence qu'il y a entre les chiffres posés dans l'exposé des motifs et ceux qui ont été produits par M. Sinave dans son discours.
Je dirai d'abord que dans l'exposé des motifs je n'ai pas donné comme (page 291) miens, comme officiels les chiffres qui s'y trouvent ; pour des chiffres officiels, il serait difficile d'en fournir.
D'ailleurs, j'ai eu soin de guillemeter le passage qui les contient, passage que j'empruntais à une brochure publiée à Liège en 1851, ou de mettre en note que c'était à cette brochure que je les empruntais, de sorte que si ces chiffres sont erronés, je n'en suis pas responsable. Je n'en faisais pas un argument fondamental, en faveur du projet de loi, c'était un simple renseignement que j'offrais aux différents membres de la Chambre. De sorte que je ne crois pas avoir mérité les reproches si acerbes que m'a adressés l'honorable M. Sinave.
Tout le système de l'exposé des motifs revient à ceci :
Sans transports économiques, directs et réguliers, notre commerce avec le Levant ne prendra jamais le développement dont il est susceptible.
Les expéditions par terre sont chères, sujettes à beaucoup de formalités, de détours et d'inconvénients.
Les expéditions par navires à vapeur seraient considérablement plus économiques, plus faciles, plus régulières.
Tel est le fait capital. Il domine toute la question. A-t-il été ébranlé par M. Sinave ?
Pas le moins du monde ; au contraire.
Vous avez, dit l'honorable orateur, trop enflé le chiffre du fret par terre et trop abaissé le chiffre du fret par mer.
Le gouvernement n'a rien à retirer de ce qu'il a dit, à la seule condition qu'on n'altère pas la manière dont il a présenté les choses.
Passons les chiffres en revue.
Le gouvernement cite d'abord le prospectus d'une société qui avait eu le projet, il y a quatre ans, de faire ce que nous réalisons aujourd'hui. Cette société était formée, soit de négociants belges, établis à Constantinople, soit de négociants étrangers, résidant en Turquie, et en relations d'affaires avec la Belgique. On peut croire, apparemment, que ces commerçants connaissaient, au moins aussi bien que l'honorable M. Sinave, les conditions du commerce entre la Belgique et le Levant. Le gouvernement a donc pu, avec quelque confiance, reproduire les données de leur exposé.
Dans cet exposé l'on s'occupe surtout des petits colis, et c'est avec raison ; car ce sont surtout les marchandises de peu de poids ou de volume qui peuvent prendre la voie de terre ; les grosses marchandises les clous, les sucres, etc., ne peuvent l'aborder. Mais, dit l'honorable M. Sinave, on a eu le tort de généraliser ce calcul et de conclure de ce qu'un colis de 100 kilogr. coûte tant, qu'un colis de 1,000 kilogrammes coûtera dix fois autant. Ce tort, messieurs, le gouvernement ne l'a pas eu. Il a pris soin d'indiquer la source de la citation, la date de l'exposé à laquelle il l'empruntait ; il a spontanément fait remarquer que plusieurs faits, plusieurs chiffres pouvaient s'être modifiés depuis cette date. Il n'y a donc eu d'équivoque pour personne. Quand il s'est agi d'indiquer le fret d'un tonneau de marchandises de Bruxelles a Constantinople, ce n'est pas le chiffre de 936 fr. compris dans la citation et critiqué par M. Sinave, que le gouvernement a fait sien ; c'est, au contraire, le chiffre de 400 fr., sans compter les frais à Marseille. Or, l'honorable M. Sinave lui-même, d'après des factures, indique le chiffre de 609 fr. 57 c. pour 1,240 kil., soit 480 fr. par tonneau, tout compris. Jugez de la différence ?
Mais, continue l'honorable M. Sinave, votre chiffre de 400 fr. s'applique à une tonne et non à un tonneau. Cette objection, messieurs, n'est pas sérieuse. D'abord, il n'est pas exact de prétendre que le terme de tonne ne s'emploie qu'à l'égard des marchandises de cubage et, en second lieu, il suffit de lire tout le passage pour être convaincu qu'il s'agit bien là de marchandises au poids.
Je maintiens donc, messieurs, et je le maintiens en m'appuyant sur les propres chiffres de M. Sinave, que le fret de Belgique à Constantinople, par terre, est cher, très cher. Qu'il soit de 400 fr. ou de 480 fr., par tonneau, c'est, dans tous les cas, un chiffre écrasant ,alors même que le trajet serait direct, court, sans entraves, sans formalités.
Passons au fret maritime.
L'exposé des motifs dit que nos bateaux à vapeur pourront ne demander que fr. 25 pour les marchandises de poids, et 50 fr. pour les marchandises de cubage.
Ces conditions sont impossibles, dit l'honorable M. Sinave.
La Chambre voudra pourtant bien croire que le gouvernement ne les a pas inventées. Elles ont été indiquées par le fondateur même de l'entreprise.
Assurément, elles pourront monter, comme elles pourront descendre. L'honorable M. Sinave, qui en paraît si frappé, sera étonné d'apprendre que la société qui essaya de se former en 1851 proposait le chiffre de 55 fr. en moyenne et que peu d'années auparavant le fret par navires à voiles était descendu à 10 fr. ! C'est parce que le gouvernement sait que la navigation à vapeur devra abaisser son fret jusqu'aux plus extrêmes limites pour lutter contre la navigation à voiles, c'est pour cela qu'il croit superflu d'imposer un maximum ou un minimum de fret à la nouvelle société.
Que conclure de tout cela, messieurs ? C'est que le fait essentiel, c'est-à-dire la cherté du fret par terre, le bon marché relatif et la facilité des transports par mer n'est pas contestable, n'est pas contesté. On peut différer sur les chiffres ; j'ai fait demander des chiffres à diverses maisons qui font des affaires avec Constantinople ; je n'ai pu en réunir d'uniformes, de complets, s’appliquant à tous les cas. Mais le fait capital reste vrai, et il est admis par l'honorable M. Sinave lui-même, puisqu'il trouverait très bon qu'une compagnie française eût rempli la tâche que nous confions à une société belge.
Les négociants du Levant, Belges ou étrangers, qui font des affaires avec la Belgique ;
Les agents du gouvernement belge en Orient, sans exception ;
Notre commerce, notre industrie, également sans exception ;
Le gouvernement et la section centrale ont considéré l'établissement d'une ligne de bateaux à vapeur entre la Belgique et le Levant comme la condition absolue de l'accroissement de nos relations commerciales avec le Levant. L'honorable M. Sinave, seul, s'élève contre le projet, en invoquant des différences de chiffres, qui, fussent-elles réelles, n'altéreraient en rien la thèse du gouvernement. La Chambre appréciera s'il y a là de quoi compromettre une œuvre qui a été accueillie avec un intérêt général dans le pays.
Messieurs, on reproche aussi au gouvernement la prodigalité, on trouve énorme le subside que nous accordons à la société ; mais ce subside se réduit à une somme, une fois payée, de 330 mille francs. Savez-vous ce que d'autres nations consacrent à ce service de navigation à vapeur vers l'Orient ? L'Autriche donne pendant dix ans un million de florins, c'est-à-dire, dix millions de florins bon argent, soit 25 millions de francs. La France donne pendant dix ans trois millions, ce qui fait 30 millions. A dater de la onzième année le chiffre s'abaisse de cent mille francs par an, c'est-à-dire que la onzième année le subside n'est plus que de 2,900,000 fr., la douzième de 2,800,000 fr. et ainsi jusqu'à la vingtième année.
La vingtième année le subside est réduit à 2 millions, et alors il continue tant que le service existera. Voilà les sacrifices que fait la France pour avoir un service de navigation dans la Méditerranée vers l'Orient, Constantinople et la mer Noire.
Vous savez que l'Angleterre ne subsidie aucun service. C'est contraire à ses principes économiques.
M. Frère-Orban. - Elle en subsidie.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Elle ne subsidie pas, mais elle a un abonnement qui équivaut à un subside, pour le transport des lettres et dépêches dans toute la Méditerranée vers l'Orient et vers les Indes par Aden. Savez-vous à combien s'élève ces abonnement que paye l'Angleterre ? 224,300 liv. st. ou près de 6 millions de francs par an.
Ainsi, l'Autriche 25 millions, la France 3 millions les dix premières années et 2 millions toutes les autres ; l'Angleterre près de 6 millions par an ; et nous, 330,000 fr. une fois payés ; somme qui peut être répartie sur plusieurs années en payant les intérêts de 30,000 fr. par an. Je demande s'il y a là de quoi s'effrayer !
Messieurs, je maintiens mon projet de loi. Si quelques objections partielles s'élèvent, je m'efforcerai d'y répondre. Mais quant à l'incident qui s'est élevé dans la séance d'hier, je le considère comme vidé.
M. de Haerne. - D'après ce que nous venons d'entendre de la bouche de M. le ministre des affaires étrangères, la question qui a été soulevée hier ne mérite pas les proportions ni les formes qu'on y a données. Je m'étais déjà dit qu'alors même qu'une compagnie étrangère se serait présentée pour faire le service de navigation directe d'Anvers vers le Levant, encore aurait-il fallu y réfléchir à deux fois et entourer de garanties sérieuses cette opération entreprise par des étrangers.
Mais, messieurs, nous venons d'apprendre que le projet qui a été présenté au gouvernement n'est pas du tout le même que celui que le ministère a eu en vue en contractant avec la société anversoise. Car un fait doit vous avoir frappés, c'est que la compagnie française, d'accord avec le Crédit mobilier français, offre à la Belgique, d'après ce que vient de nous dire M. le ministre, d'établir une ligne d'Anvers vers Marseille et de la mettre en communication avec une autre ligne qui, de Marseille, doit se diriger vers les différents ports de la Méditerranée et de l'Atlantique.
Vous le comprenez, c'est un projet tout différent. Il ne s'agit plus de communication directe avec le Levant ; il faudrait opérer un transbordement à Marseille. Or, tout le monde sait que c'est là un immense inconvénient qui entrave les affaires.
Ce projet ne peut donc, au point de vue commercial et industriel, atteindre le but qu'on a dû se proposer dans la magnifique entreprise qui est en discussion.
Messieurs, il faut cependant le reconnaître, le subside qui est proposé, quoique minime en comparaison des sacrifices qui ont été faits dans un but pareil par d'autres nations, quoique insignifiant proportion gardée, est cependant une prime accordée à l'industrie et au commerce. Je ne recule pas devant les primes lorsqu'elles sont bien établies, qu'elles doivent aboutir à un but utile et que l'on peut espérer que tôt ou tard ces primes pourront être supprimées. Or, ici, c'est bien le cas, puisque enfin il s'agit d'une somme une fois donnée, ou plutôt d'une somme déjà allouée, mais à laquelle on veut donner une meilleure destination.
Il est à remarquer d'ailleurs qu'en développant le commerce et l'industrie on crée de nouveaux revenus qui viennent en compensation des. sacrifices faits par l'Etat.
(page 292) Mais on pourrait se dire que si la ligne de navigation directe vers l'Orient est établie et que la compagnie ne peut pas se soutenir, l'entreprise devra recourir au gouvernement pour obtenir de nouveaux subsides ; que cette affaire une fois entamée, le gouvernement ne pourra guère l'abandonner et que la Chambre sera forcée de venir annuellement au secours de la compagnie. Eh bien, à ce point de vue nous aurions encore à examiner la question, si elle nous était présentée dans ces conditions.
Après avoir examiné le projet, après avoir étudié sérieusement les documents qui nous ont été soumis par le gouvernement et le rapport de la section centrale, je crois que cette entreprise offre des garanties sérieuses de succès ; je crois qu'elle offre un bel avenir à l'industrie et au commerce.
Messieurs, nous savons que jusqu'à présent l'industrie a été en quelque sorte paralysée dans ses exportations, parce que nous n'avions pas de communications directes assez bien établies. Nous avons jusqu'ici été forcés de recourir pour nos expéditions maritimes à des ports étrangers. Ainsi nos marchandises doivent être envoyées non seulement vers le Havre en transitant par la France, mais souvent aussi vers Hambourg. Or, c'est là un grave inconvénient, parce qu'il faut faire un grand détour et des frais considérables de transport par terre.
On doit cependant passer par là ; on va à Hambourg et au Havre à cause de la facilité des communications directes par mer et à cause du bon marché du fret.
C'est ce double avantage qu'il s'agit surtout d'atteindre par la ligne qui vous est proposée.
Dans l'exposé des motifs, l'honorable ministre des affaires étrangères entre dans quelques détails pour faire comprendre l'utilité d'une navigation directe vers le Levant.
Il jette même un coup d'oeil sur l'avenir et il parle de cette gigantesque entreprise qui, dans un avenir prochain, doit relier la Méditerranée et l'Atlantique avec la mer Rouge, établir ainsi une communication directe entre tous les ports de l'Occident, les Indes et la Chine et replacer le grand commerce dans la position où il s'est trouvé au moyen âge, Quant aux communications avec les Indes, par la Méditerranée, avec cette différence que le mouvement sera peut-être centuplé en comparaison de ce qu'il était avant la découverte de la voie par le Cap de Bonne-Espérance.
J'appelle, messieurs, votre attention sur cette circonstance, car vous savez qu'à cette époque, la Belgique, par ses ports, par ses communications avec le nord de l'Allemagne, a joué un rôle magnifique, un rôle des plus brillants dans les affaires du monde ; que les ports belges, notamment le port de Bruges, étaient à cette époque les premiers de l'Europe ; eh bien, je crois que cette situation peut se représenter dans l'avenir, à certains égards et avee les modifications qui doivent résulter des circonstances.
Remarquez que dans la supposition établie avec raison par M. le ministre des affaires étrangères, la voie de communication la plus directe entre l'Amérique du Nord, les Indes et la Chine, c'est par la Méditerranée. Le chemin est raccourci d’à peu près 2,000 lieues par la Méditerranée.
Vous concevez les modifications qui doivent en résulter dans le mouvement général du commerce. Suez devient par là le centre des grandes affaires, le pôle du monde commercial.
Il importe qu'Anvers soit reliée à l'avance avec ce centre futur d'affaires.
La priorité et l'initiative en matière de commerce et d'industrie sont des conditions assurées de succès, surtout dans les relations avec les pays lointains, où l'on ne se peut faire connaître qu'avec le temps et moyennant des sacrifices et de grands efforts.
Qu'on me permette de toucher ici une question qui a été traitée hier par un honorable député de Bruges. Il s'est plaint de ce que la ville d'Ostende paraissait abandonnée dans la proposition du gouvernement.
Dans la supposition fondée où la grande communication à laquelle je faisais allusion tout à l'heure viendrait à se réaliser il est évident que nos bateaux à vapeur qui navigueront vers l'Orient seront en communication avec ceux qui iront d'Anvers vers l'Amérique. Il en résulte que d'après toutes les convenances et pour donner au commerce et à l'industrie toutes les facilites possibles, il faut que ces deux lignes aboutissent à un même port, à un même centre de commerce, et comme la ligne vers les Etats-Unis a été établie à Anvers, il est tout naturel, il est nécessaire que celle qui est projetée vers le Levant soit établi dans le même port.
Ces deux lignes n'en feront pour ainsi dire qu une ; car un détour d'environ 600 lieues sur plus de 4,000 est bien peu de chose. Les conditions favorables de l'industrie belge appelleront vers Anvers les navires américains en destination des Indes et de la Chine, et par suite les relations entre l'Amérique et l'Asie emprunteront nos lignes de bateaux à vapeur.
Je ne sais, messieurs, si mon patriotisme m'égare, mais il me semble que notre horizon commercial doit s'élargir considérablement dans la supposition très probable que je viens d'établir. Sous ce rapport comme sous bien d'autres, Anvers est pour nous le centre des affaires.
Du reste, je suis aussi grand partisan de la prospérité d’Ostende que l’honorable membre auquel je réponds, et si plus tard nos expéditions maritimes se multiplient, je pense bien qu'Ostende pourra aussi jouir des faveurs qui sont attachées à ces concessions, et que, si elle prend une initiative dans ces sortes d'entreprises, elle aura l'appui de la législature et du gouvernement.
D'après ces motifs, messieurs, je dois donner mon assentiment au projet du gouvernement. Je crois qu'il sera fécond en bons résultats pour le commerce et pour l'industrie.
On a fait dans les sections une observation sur laquelle je désire appeler un moment l'attention de la Chambre. Je n'abuserai pas de son indulgence.
On a demandé l'établissement d'un droit différentiel pour les transports qui doivent se faire vers l'Orient par nos bateaux à vapeur. Je dois combattre cette idée. Ce serait, on doit l'avouer, un droit différentiel d'une nature tout à fait nouvelle ; ce serait un droit différentiel de transit, et je crois qu'un tel droit ne figure dans aucun tarif du monde, ni dans le tarif différentiel de la France, ni dans celui de l'Angleterre, ni dans les tarifs d'aucun des pays qui ont des droits de ce genre.
Mais il y a un autre motif pour lequel je dois m'opposer à l'établissement d'un pareil droit. Ce droit serait tout à fait illogique et tendrait à nous éloigner du but que nous cherchons à atteindre. Par ce droit on voudrait établir une faveur pour les marchandises belges vis-à-vis des marchandises de l'Allemagne. Je crois qu'il ne peut y avoir d'autre motif à cette proposition.
Mais la position de la Belgique à l'égard d'Anvers donne à ses produits un avantage sous ce rapport ; il y a dans le rapprochement un véritable droit différentiel en faveur du pays. Comme j'avais l'honneur de le faire remarquer tout à l'heure, les communications de la Belgique vers l'Amérique, vers les pays lointains se font maintenant en grande partie par Hambourg. A plus forte raison les marchandises d'Allemagne doivent prendre cette voie. Et pourquoi ? Parce que Hambourg offre beaucoup d'occasions ; parce qu'elle a des lignes directes nombreuses des départs fixes, parce que le fret y est à meilleur compte. Et l'on irait établir un droit différentiel pour entraver le commerce de l'Allemagne par Anvers ! Ce serait non seulement paralyser notre commerce de transit qui va toujours croissant et qui favorise nos propres expéditions ; mais ce serait restreindre le nombre d'expéditions d'Anvers, les départs de nos bateaux à vapeur dont nous devons toujours, je le répète, profiter les premiers. Plus ces départs sont fréquents, plus le fret s'abaissera, plus notre commerce et notre industrie se développeront.
En établissant un droit différentiel, on irait donc à rencontre du but qu'on se propose. Il est clair qu'un droit différentiel existe par la nature même des choses, je crois que c'est le seul qu'on puisse réclamer et qu'aller plus loin, ce serait entraver l'entreprise.
En ce qui concerne l'ajournement qui a été proposé, je ne puis l'admettre. La proposition faite par le Crédit mobilier de France n'est pas du tout la même que celle dont nous sommes saisis. Je crois l'avoir démontré. Si la société française avait voulu nous faire des propositions sérieuses, elle aurait dû nous les soumettre dans les formes régulières. Elle aurait pu le faire, puisqu'elle a été avertie depuis longtemps du projet du gouvernement. Si nous nous arrêtons devant des considérations semblables, on pourrait toujours suspendre nos délibérations et entraver les entreprises les plus utiles au pays. L'intérêt national et la dignité de la Chambre s'opposent, selon moi, à ce que nous consacrions un principe qui pourrait établir un précédent dangereux. Je crois donc, messieurs, pur les motifs que je viens d'avoir l'honneur d'exposer à la Chambre, devoir m'opposer à l'ajournement et voter en faveur du projet de loi qui nous est présenté.
M. Frère-Orban. - Messieurs, je n'ai aucun prévention contre la proposition du gouvernement ; j'étais disposé à la voter. Mais je soumets à la Chambre la question de savoir si, après la communication qui a été faite aujourd'hui par M. le président, il n'y a pas lieu, dans l’intérêt même du projet de loi, de remettre cette affaire jusqu'après les vacances, afin que l'opinion publique ne se méprenne pas sur la résolution que nous avons à prendre. On allègue, à tort ou à raison, d'une manière positive, qu'une compagnie ayant un caractère sérieux, veut établir, sans subsides, un service direct ou indirect d'Anvers vers le Levant. N'est-il pas prudent de rechercher ce qu'il y a de vrai dans cette assertion ? Faut-il sans autre examen, sans éclaircissements,voter une subvention convenable, s'élevant à 300,000 fr., pour établir une communication directe avec le Levant ? C'est un point sur lequel j'appelle l'attention de la Chambre.
Y a-t-il urgence, messieurs ? Aux termes de la convention qui vous est soumise, le service ne doit entrer en activité que « dans les deux années qui suivront la sanction législative de la convention. » Je ne crois pas qu'un retard de vingt jours puisse nuire en aucune façon à l'opération.
D'un autre coté, je remarque que, d'après l'article 13 du contrat, qui promet le subside de 300,000 francs, le gouvernement s'engage à déférer à des arbitres, statuant en dernier ressort, les contestations qui pourraient s’élever entre lui et les armateurs.
Il me semble que cette clause n'est pas valable. Le gouvernement ne peut que se soumettre à la décision du pouvoir judiciaire. Il faudrait, pour qu'il pût compromettre, qu'il y fût autorisé par une loi spéciale. La convention ne sera pas une loi.
Je n'ai pas examiné de près cette question ; mais elle fait naître un doute qu il est nécessaire de lever.
(page 293) Je demande donc que l'affaire soit remise jusqu'à la prochaine réunion de la Chambre.
M. Loos. - Messieurs, je ne crois pas qu'il soit utile de remettre cette discussion. La Chambre pourra toujours l'ajourner si, après avoir examiné la question, elle pense qu'un délai est nécessaire. Vouloir dès à présent renvoyer l'affaire après les vacances, ce serait tout à fait préjuger les éclaircissements qui seront donnés. Pour ma part, je crois pouvoir dire que si l'honorable M. Frère veut laisser continuer les débats, il verra que même, en admettant tout ce que prétend l'honorable M. Sinave, tout ce que prétend M. Schmidt, il y aurait encore des motifs déterminants pour adopter le projet de loi.
Je demande que la Chambre continue la discussion, sauf à ajourner ensuite s'il y a lieu.
M. Lelièvre. - Messieurs, je m'étais fait inscrire dans la discussion générale, précisément pour faire la même observation que vous a soumise l'honorable M. Frère. L'article 13 de la convention renferme une disposition nulle, par mesure d'ordre public. Il contient une promesse de compromis qui ne peut certainement obliger ni le gouvernement, ni l'autre partie. On ne peut, en effet, compromettre sur des affaires qui doivent être communiquées au ministère public. Or, comme toutes les causes qui concernent l'Etat sont communicables, l est évident que toute clause de compromis qui concerne l'Etat est nulle vis-à-vis de toutes les parties, attendu que l'une d'elles ne peut être obligée si l'autre ne l'est pas.
C'est ce qui a été décidé récemment par la Cour de cassation qui a jugé qu'une clause de même nature concernant une société houilleresse ne pouvait recevoir son exécution lorsqu'il existe des associés mineurs. Or le même principe milite lorsqu'il s'agit de l'Etat.
Remarquer du reste qu'en autorisant le gouvernement à passer une convention, la législature ne fait que donner une autorisation qui ne préjuge en aucune manière la légalité des clauses énoncées à la convention, clauses qui restent sous l'empire des lois générales d'autant plus que la partie qui a contracté avec le gouvernement n'est soumise, relativement à cette convention, qu'aux principes généraux du droit, et dès lors elle est fondée à prétendre que la clause de compromis ne l'a jamais obligée. Le gouvernement se trouve dans la même position.
Je pense qu'il conviendrait d'ajourner la discussion pour examiner la difficulté qui peut se présenter sur ce point.
L'ajournement me semble devoir être adopté avec d'autant plus de raison que les questions que soulève le projet de loi ne me paraissent pas suffisamment éclaircies.
M. David. - Messieurs, je ne pense pas que nous puissions continuer maintenant ia discussion. D'après ce que vient de dire l’honorable M. Loos, il nous manque un des moyens d'appréciation : vous avez reçu tantôt une communication de M. Schmidt, qui vous prouve qu'il peut surgir des propositions plus favorables. Ainsi, d'après le projet qui vous est soumis, il y aura dans les deux années, deux navires ; six mois après il y en aura un troisième et le maximum sera quatre ; eh bien, messieurs, que pouvez-vous faire avec quatre navires ? La société concurrente possède beaucoup plus de navires. Nous devons d'ailleurs attendre que les propositions aient le temps de se produire. Quel est l'intérêt du commerce et de l'industrie ? C'est d'avoir le plus grand nombre de départs possible.
Ainsi, messieurs, l'un des moyens d'appréciation nous manque ; nous n'avons encore sous les yeux de positif que la convention d'Anvers. La discussion que nous aurions dans cet état de choses, serait une véritable perte de temps. Je voudrais que l'honorable M. Loos nous dît, par exemple, pourquoi la société française ne ferait pas de propositions. (Interruption.) M.le président a lu une lettre de M. Schmidt d'où il résulte que la société française est toute disposée à se charger du service ; mais nous ne savons pas encore à quelles conditions. Eh bien, nous devons connaître ces conditions avant de prendre une décision.
M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - Messieurs, le gouvernement pourra nous dire s'il y a des inconvénients à ajourner le projet de loi. Dans tous les cas il importe que la discussion continue. La question est entrée dans une phase nouvelle. La section centrale, dans son rapport, n'a pu tenir compte du fait signalé par l'honorable M. Sinave, vu qu'elle l'ignorait complètement. Je désire présenter quelques considérations à cet égard, et je demande que la Chambre veuille bien m’entendre.
Lorsque la discussion générale sera close, vous serez mieux à même de juger s'il y a lieu de donner suite à la motion d'ajournement.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Je demande aussi que la discussion continue, sauf à la Chambre de voir ce qu'elle aura à faire quand la discussion sera épuisée.
Je dirai un mot à l'honorable M. Frère. Ce n'est qu'en hésitant que je pose le pied sur le terrain où il s'est placé ; je ne suis pas fort en Code de procédure, mais je lui ferai observer que l'article 13, reproduit ici, se trouve dans la loi relative à l'établissement d'un service de navigation à voiles et qu'il a été copié dans la loi qui a approuvé le traité conclu pour un service de navigation à vapeur vers Rio. En outre, j'appellerai l'attention de l'honorable membre sur l'article 15 du projet de convention qui est ainsi conçu :
« La présente convention ne sera valable qu'après avoir reçu la ratification législative. »
Ainsi, en votant le projet de loi, la Chambre votera en même temps la convention, et puis encore la Chambre a un vote à émettre sur la convention même.
L'article unique porte : « La convention conclue, etc., est approuvée. »
En approuvant la convention, la Chambre me paraît en adopter tous les articles. Si je me trompe, je prie la Chambre de ne faire peser la faute que sur moi seul. J'avoue que je n'ai pas communiqué la convention à mon collègue, M. le ministre de la justice ; je ne croyais pas qu'il se présenterait une difficulté sous ce rapport. Je ne suis pas à même de résoudre la question d'une manière formelle ; mais j'ai copié l'article dans les autres lois du même genre que la Chambre a déjà adoptées.
M. Frère-Orban. - Messieurs, je ne m'oppose pas, pour ma part, à ce que la discussion continue, sauf à la Chambre à statuer sur ma motion, après avoir entendu les explications qui pourront être données.
Quant à l'observation que fait M. le ministre des affaires étrangères, je crois qu'elle a un côté vrai. Si la convention est expressément approuvée par la loi, on pourra en induire que le gouvernement te trouve investi du pouvoir de compromettre. Le recours aux tribunaux, en cas de contestation, me paraît toutefois préférable.
M. le président. - Ainsi, s'il n'y a pas d'opposition, la discussion continue, sauf à la Chambre à statuer plus tard sur la motion de M. Frère.
La parole est à M. David.
M. David. - Messieurs, vous aurez remarqué comme moi avec quelle légèreté M. le ministre des affaires étrangères a rejeté tout examen de la proposition qui surgit aujourd'hui de la part de la société maritime. Que nous a-t-il dit pour motiver son intention de ne pas s'occuper de cette proposition ? Qu'il n'est jamais entré dans son intention de favoriser l'établissement d'une ligne de bateaux à vapeur entre les ports belges et les ports français ; voilà le seul argument qu'il ait présenté ; en ajoutant la considération que puisque cette ligne n'aboutirait qu'à Marseille, il y aurait transbordement dans ce port, pour des marchandises qui de là devraient être expédiées vers des destinations plus éloignées.
M. le ministre des affaires étrangères veut comme nous tous, j'en suis convaincu, que la nouvelle ligne de bateaux à vapeur à établir rende les services les plus étendus possible au commerce et à l'industrie de la Belgique ; nous recherchons tous, consciencieusement, les moyens d'arriver a ce résultat.
Que la proportion de fonder le service de navigation à vapeur vers le Levant nous soit faite par une société étrangère ou par une société belge, peu nous importe, pourvu que nous obtenions les conditions les plus favorables à nos relations avec l'étranger.
Eh bien, examinons si la société anversoise se trouvera dans les mêmes conditions que nous devons supposer à la société maritime française. D'après les clauses de la convention soumise à notre approbation, la société anversoise possédera, dans le principe, deux bâtiments qui ne seront tenus de commencer le service qu'endéans les deux années. Il faut donc attendre deux ans pour le premier départ ; le troisième navire ne devra prendre la mer que six mois après ce premier départ et plus tard un quatrième bâtiment complétera le matériel flottant de la société.
Ces navires n'effectueront qu'un seul départ par mois d'Anvers. Un départ mensuel d'Anvers est bien peu de chose, quand il s'agit de relations aussi importantes que celles que la Belgique entretient déjà avec le Piémont et Gênes, avec tout le Levant, l'Adriatique et la mer Noire.
Ce service sera donc incomplet, si on le compare à celui que pourra établir la société maritime française, comme il vous est aisé de le voir, d'après le capital de 30 à 40 millions, affecté à ses armements maritimes à vapeur.
Cette société est très puissante ; ses steamers, qui desserviront aussi Hambourg, relâcheront à Anvers à chaque voyage d'aller et de retour ; de là nécessairement une correspondance plus active et des départs bien plus fréquents d'Auvers pour Marseille ; ces départs d’Anvers pourront se renouveler plus d'une fois par mois. Sous ce rapport donc, nous trouverons déjà un avantage à faire une convention avec la société maritime de France.
On croit faire une objection irréfutable en nous disant : « Prenez garde, il y aura transbordement des marchandises à Marseille ! » Mais, avec la société anversoise, vous aurez aussi des transbordements inévitables ; car, que vous promet aujourd hui cette société ? Elle vous promet de passer à Malte, à Syra, et d'aller à Constantinople ; mais toutes les marchandises qu'on expédie n'ont pas exclusivement Constantinople pour lieu de destination ; nous envoyons beaucoup à Trébisonde ; nous avons des relations suivies avec Odessa et surtout avec Trieste ; nous faisons des affaires sur toutes les côtes de Syrie et en Egypte.
Si d'un côté vous avez des transbordements à Marseille, vous ne pouvez les éviter de l'autre à Syra, à Malte et à Constantinople pour les marchandises en destination de l'Adriatique, de l'Egypte, de la Syrie et de la mer Noire. Que le transbordement ait lieu ici ou là, cela revient donc au même.
(page 294) La société française acceptera par son connaissement signé à Anvers des marchandises directement pour toutes les destinations ; vous stipulerez et payerez votre fret à Anvers, et quoique étant transbordées à Marseille, vos marchandises seront transportées dans tous les ports du Levant, de l'Adriatique et de la mer Noire.
La question de subside n'est que secondaire pour moi ; en demandant l'ajournement, je n'ai qu'un but : c'est de mettre l'industrie et le commerce de la Belgique dans la position la plus favorable, sous le rapport de la fréquence des occasions d'expéditions et du bon marché du fret. Qu'une société se présente et nous offre toutes les conditions désirables de sûreté, d'économie, de régularité et de fréquence de départs, et je serai prêt à voter même une augmentation de subside.
La section à laquelle j'appartenais avait demandé qu'on introduisît dans la convention un amendement aux termes duquel la société (et je dois insister là-dessus dans le cas où ce serait la compagnie anversoise qui obtiendrait la préférence) serait tenue d'accepter à Anvers des marchandises pour tous les lieux de destination auxquels ne toucheraient pas ses bâtiments et qui sont desservis par navires des sociétés du Lloyd autrichien, des sociétés françaises et anglaises.
J'appuierai cet amendement. Si la convention est modifiée dans ce sens, nos relations avec toutes les échelles du Levant seront singulièrement simplifiées. Les envoyeurs d'Anvers y payeront le fret jusqu'à destination, pourront à l'avance établir leur prix de revient, ne subiront pas de pertes de temps et ne seront pas obligés d'avoir des correspondants dans toutes les villes où les transbordements s'opèrent et de payer à ces intermédiaires des frais de commission, magasinage, etc.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Je puis satisfaire l'honorable préopinant, relativement aux agences. Je me suis entendu avec la société d'Anvers pour que d'Anvers les marchandises puissent être expédiées sur tous les lieux qui avoisinent la Méditerranée, la mer Noire et l'Adriatique. Il y aura des agences, des correspondances avec le Lloyd autrichien pour l'Adriatique. Je me suis entendu avec la société pour ces agences et correspondances. Il lui serait d'ailleurs impossible d'exister sans cela. Il n'est pas de petite diligence s'établissant dans le pays qui n'ait des correspondances avec toutes les parties du royaume.
Il y aura même probablement plus ; j'espère qu'il pourra s'établir une grande agence générale où l'on pourra envoyer les marchandises belges pour les exposer, en un mot un Malte belge ; le grand bazar que les Anglais ont à Malte, nous l'obtiendrons dans un endroit quelconque, sur les côtes de la Méditerranée, où l'on pourra venir visiter les produits belges et faire des commandes. Sous ce rapport l'honorable M. David peut être tranquille.
Cet honorable membre dit que le transbordement à Marseille ne doit pas effrayer la Chambre. Il y a autre chose que le transbordement à Marseille par la ligne française ; il y aura une lenteur désespérante dans les transports et un plus haut prix que par la ligne anversoise.
Cette ligne projetée entre Anvers et Marseille fera escale sur toutes les côtes de France, nécessairement elle mettra un très long temps pour arriver à Marseille, il faudra payer une plus haute prime d'assurance, la prime étant en raison de la durée du voyage ; ce sont là tous inconvénients pour le commerce.
M. Osy. - D'après les renseignements que vient de donner M. le ministre des affaires étrangères, les objections de l'honorable M. David viennent à tomber ; elles avaient été produites en section centrale où il avait été répondu que la société ferait transporter, aux frais de l'expéditeur bien entendu, les marchandises qu'on lui confierait, sur tous les points de la Méditerranée où l'on voudrait les envoyer.
Il n'y a aucune inquiétude à avoir sous ce rapport, car c'est l'intérêt de la compagnie d'avoir le plus de marchandises possible.
Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de m'arrêter longtemps sur les propositions que pourrait faire la compagnie française. Voudriez-vous qu'on expédiât par la ligne française avec toutes les échelles qu'elle devra faire avant d'arriver à Marseille, au Havre, à Bordeaux, sur les côtes d'Espagne, partout ? Vous comprenez que cette société ne nous donnerait pas les avantages que nous désirons et que nous procurera la compagnie anversoise : porter promptement les produits de la Belgique et nous rapporter ceux du Levant.
Vous comprenez que la lenteur est une augmentation de fret indépendamment des primes d'assurances qui viennent grever la marchandise, d'autant plus que les risques de mer durent plus longtemps. Il est extraordinaire que depuis cette circulaire du 10 septembre on n'ait pas établi le service comme on l'annonçait ; c'est précisément le jour de la discussion du projet qu'on vient soulever cette question pour mettre, comme on dit, uu bâton dans la roue. Nous avons eu beaucoup de peine à faire naître l'esprit d'association dans notre pays, il commence à se développer et vous voudriez l'arrêter sous l'action d'une compagnie étrangère !
Ce ne serait pas digne d'une législature belge, d'autant moins que cette société maritime demande non seulement de faire des affaires avec nous, mais cherche des actionnaires en Belgique, car son capital n'est pas formé. On est venu nous solliciter de prendre des actions. Nous serions à la remorque de l'étranger.
Vous avez la preuve que les sociétés du pays auxquelles on a accordé des concessions étaient des compagnies sérieuses, vous pouvez être sûrs que celle dont il s'agit ne l'est pas moins et exécutera fidèlement et loyalement ses engagements.
L'honorable M. Sinave, s'emparant d'une conversation particulière est venu dire qu'un souverain étranger était intéressé dans l'affaire. Si j'ai été bien informé, je ne vois pas qu'il y ait lieu de se plaindre de ce fait ; nous devons attirer autant que possible les capitaux étrangers dans le pays.
Nous avons un juif dans la compagnie ; s'il y a d'autres maisons très respectables qui ne sont pas catholiques, je ne vois pas pourquoi nous n'accepterions pas leurs écus. Est-ce que le crédit mobilier est catholique ?
Attirons autant que nous le pouvons les capitaux étrangers dans nos affaires, ce sera un bienfait pour la Belgique. Nous en avons déjà attiré beaucoup ; nous en attirerons encore. J'espère que la proposition d'ajournement ne sera pas adoptée. L'honorable M. Frère se trompe quand il dit qu'il n'y a pas péril en la demeure ; c'est dans les deux années, à partir du vote de la loi, que le service devra être établi.
Quant à l'article 13 de la convention, il se trouve dans d'autres conventions semblables et n'a jamais fait l'objet de la moindre observation. Ainsi, il se trouve dans les conventions concernant les lignes de New-York et de Rio ; jamais il n'a donné lieu au moindre inconvénient, il n'en fera pas naître davantage ici.
J'engage donc la Chambre à repousser l'ajournement proposé et à approuver la convention dès à présent.
M. T’Kint de Naeyer, rapporteur. - M. le ministre des affaires étrangères a déjà fait ressortir tanlôt la différence qu'il y a entre l'entreprise française projetée par le Crédit mobilier et à l'égard de laquelle, d'ailleurs, il n'existe aucune proposition, et l'entreprise nationale qu'il s'agit de créer à Anvers. Si des relations directes, promptes, économiques avec les pays lointains ne présentent aucun avantage, qu'il me soit permis de le dire, messieurs, vous vous êtes engagés dans une fausse voie en établissant un service régulier de navigation à vapeur avec les Etats-Unis et le Brésil. Si le temps et l'argent ne doivent pas être ménagés, rien n'est plus facile que d'avoir recours aux lignes étrangères qui existent sur tous les points du globe ; mais, je vous le demande, à une époque où la concurrence entre toutes les nations industrielles est poussée jusqu'aux dernières limites, à une époque où les questions de transport et de fret sont tout, n'est-ce rien que de pouvoir embarquer nos produits à Anvers, et d'avoir la certitude qu'ils arriveront à leur destination sans transbordement, sans frais extraordinaires et dans un délai prévu d'avance ? J'en appelle à tous les honorables membres de cette assemblée qui connaissent le commerce d'exportation et particulièrement à ceux qui ont eu des relations avec le Levant.
Il y a des affaires considérables, organisées en Orient, qui ont avorté par le seul motif que l'on avait compté sur le départ d'Anvers d'un navire à voiles subsidié, et que, le jour venu, la prime n'a pas été acceptée et le départ n'a pas eu lieu. Le marchand Levantin veut, avant tout, recevoir ses marchandises à point nommé et ne veut courir aucune chance de retard.
Dans un pays comme le nôtre, où la production dépasse considérablement les besoins du marché intérieur, je crois que nous ne devons rien négliger, que nous devons avoir recours à tous les moyens possibles pour augmenter nos débouchés à l'étranger. C'est là, messieurs, la base de notre politique commerciale.
Des communications régulières et directes, des rapports plus fréquents et plus faciles entre les producteurs elles consommateurs doivent exercer une influence décisive sur nos exportations.
D'un autre côté, il y a un grand intérêt que nous ne pouvons jamais perdre de vue, c'est le transit.
La Belgique, aujourd'hui, a un commerce de transit qui vaut 200 millions. Prenons-y garde. Déjà les Pays-Bas, le Havre commencent à nous disputer une partie de ce mouvement d'affaires si important. Pour que notre magnifique réseau de chemin de fer reste l'artère commerciale du centre de l'Europe, il faut que vous le complétiez par l'organisation de lignes de bateaux à vapeur vers les pays lointains.
Sans cela, nous courons risque de rester dans l'isolement et de perdre ce que nous avons eu tant de peine à créer depuis vingt ans. Sans transit, les exportations deviendraient de plus en plus difficiles, car l'une affaire amène l'autre.
Il y a donc urgence à compléter l'œuvre nationale qui a été inaugurée par la ligne des Etats-Unis et dont vous avez, dès l'abord,, saisi la sérieuse portée.
Il serait désirable, sans doute, que la navigation à vapeur, sous pavillon belge, pût s'organiser sans aucun encouragement. Ce serait un progrès, mais je crains bien qu'il ne se réalise pas d'ici à longtemps. Car pour la navigation à voiles même, nous ne sommes parvenus à établir des communications directes avec un grand nombre de pays que moyennant subsides.
Je crois, quant à moi, que le gouvernement eût manqué à tous ses devoirs, s'il avait repoussé un arrangement de la nature de celui qu est soumis aujourd'hui à votre ratification.
Car enfin, messieurs, cet arrangement se borne à reproduire et quelque sorte les clauses que vous avez admises pour la ligne du Brésil. Nous sommes entrés dans une voie nouvelle, puisque au lieu de garantir un minimum d'intérêt comme cela s’est fait pour le service ver les Etats-Unis, vous vous bornez aujourd'hui à accorder un subside e (page 295) 30,000 fr, pendant dix ans, à prendre sur les ressources ordinaires du budget.
Ainsi l'établissement de cette ligne du Levant ne crée aucune charge nouvelle, c'est en réalité un simple transfert, ou plutôt un changement de libellé au budget du département des affaires, étrangères. (Interruption.)
Il y a au budget du département des affaires étrangères un crédit de 113,000 fr. pour subsidier la navigation à voiles.
Eh bien ! tout ce que le gouvernement vous demande aujourd'hui, c'est de pouvoir consacrer une partie de ce crédit à la navigation à vapeur.
M. Prévinaire. - On favorisera d’autant moins la navigation à voiles.
M. T'Kint de Naeyer. - On favorisera d'autant moins la navigation à voiles, dit l'honorable M. Prévinaire. Mais je rappelle que M. le ministre des affaires étrangères ne parvient qu'avec de grandes difficultés à organiser nos lignes de navires à voiles, que peu d'armateurs se présentent, soit parce qu'ils ne jugent pas les primes suffisantes, soit parce que leurs navires sont employés ailleurs. Entre la navigation à voiles et la navigation à vapeur le choix n'est pas douteux. Si vous inscrivez au budget des sommes destinées à favoriser l'une, vous devez à plus forte raison encourager l'autre.
Dans mon opinion, des lignes telles que celle des Etats-Unis, celle du Brésil, celle du Levant, s'élèvent dans leur ensemble à la hauteur d'un.grand intérêt national, et que l'on ne vienne pas nous dire que de pareilles entreprises feront la richesse et la prospérité d'Anvers uniquement. Si la prospérité d'Anvers augmente, nous nous en réjouirons tous, car ce sera l'indice le plus certain du développement de l'industrie et du commerce en général.
Nos exportations facilitées, le transit ranimé, le travail stimulé, tels sont les avantages que vous pouvez attendre d'un grand mouvement de navigation à vapeur, et cela au prix de sacrifices peu importants, comparés à ceux que d'autres pays s'imposent, de sacrifices qui seront compensés par l'accroissement des produits de la douaue et des recettes des chemins de fer.
Il y a une dernière considération, messieurs, en faveur du projet, et ce ne sera pas la moins forte à vos yeux ; il importe que la Belgique ait une marine marchande à elle, qu'elle ne reste pas en arrière quand d'autres nations pensent à organiser une navigation à vapeur. Il ne faut pas que notre commerce d'exportation puisse être entravé par une simple décision du conseil administratif d'une compagnie étrangère que l'on a appelée toute-puissante.
Nous acceptons le concours de ces compagnies comme auxiliaires, je dirai même que la présence de leurs navires dans nos ports sera une excellente garantie contre l'élévation du fret que d'honorables préopinants redoutent. Mais en matière de navigation, de commerce, comme en toutes choses, gardons soigneusement notre indépendance. L'œuvre à laquelle le gouvernement vous demande d'apporter un nouveau contingent fera honneur à la Belgique en même temps qu'elle servira ses intérêts.
M. Sinave. - Messieurs, l'honorable ministre des affaires étrangères m'a reproché très vivement de l'avoir offensé. Je crois que tous les membres de la Chambre qui ont assisté à la discussion reconnaîtront qu'il ne m'est pas échappé une parole offensante ni pour M. le ministre, ni pour M. le directeur. Je ne comprends donc pas pourquoi M. le ministre s est emporté comme il l'a fait hier.
Il me serait d'ailleurs échappé un mot un peu vif qu'il aurait trouvé son excuse dans les interruptions qui m'arrachaient hier de toutes parts : c'était derrière moi l'honorable bourgmestre d'Anvers, à ma droite l'honorable M. Malou, à ma gauche l’honorable M. Osy ; c'était M. le ministre des affaires étrangères, c'était M. le président lavec son maillet... (Interruption.) Il n'esl pas étonnant qu'en pareille circonstance, on perde un peu de son calme si on laissait un orateur parler tranquillement, quelle raison aurait-il de s'animer ?
Quoi qu'il en soit, je répète que je n'ai pas prononcé un mot offensant pour M. le ministre, et je crois qu'il a eu singulièrement tort de m'attaquer comme il l'a fait.
Messieurs, je ne suivrai pas l'honorable ministre dans tous les chiffres qu’il vous a donnés. Il est convenu que des erreurs avaient été commises. A quoi bon nous lancer dans de nouveaux calculs ? Mes chiffres sont là, ceux de M. le ministre sont là également. Les personnes qui voudront les confronter jugeront entre nous.
L'honorable M. David est outré dans des détails qui me dispenseront de traiter de nouveau le fond de la question. Le grand argument de M. le ministre des affaires étrangères, de l'honorable M. de Haerne et de l'honorable rapporteur de la section centrale, c'est que les offres dont je vous ai entretenus nous viennent d'une compagnie étrangère. Je ne comprends pas l'importance de cet argument. Est-ce que la plupart des compagnies qui ont doté le pays de chemins de fer ne sont pas composées d'étrangers ? Vous prétendez que cette compagnie étrangère ne vous offre pas les mêmes garanties que M. Spilliaert. J'admets que M. Spilliaert offre la plus grande solidité ; mais ce n'est pas avec ses capitaux que se fera l'entreprise.
On dit encore : La société étrangère sera obligée d'opérer des transbordements. Mais voyez votre convention, vous désignez trois ou quatre ports où vos bateaux à vapeur devront s'arrêter. Or, il y a, je crois, une centaine de ports dans la Méditerranée et la mer Noire. Il est évident que lorsque vos bateaux à vapeur auront un colis pour quelque port de la Méditerranée ou de l'Archipel, ils ne s'arrêteront point à ce port pour la remise de ce colis.
Ils seront obligés de s'adresser aux compagnies étrangères, soit à la compagnie autrichienne qui offre aussi beaucoup de solidité, qui a 65 à 70 bâtiments qui vont partout, soit aux compagnies françaises. Et comment traite-t-on avec ces compagnies ? Le lieutenant n'a qu'à donner son connaissement pour l'endroit désigné et la compagnie se charge de tout ; elle fait partout les déclarations, les transbordements.
Je crois donc que les arguments qu'on m'oppose n'ont aucune solidité.
L'honoiable rapporteur dit que l'on n'est venu parler ici des propositions de la compagnie française qu'au dernier moment, que la section centrale n'en a eu aucune connaissance. Il vaut mieux arriver à propos que trop tard. Si par des circonstances indépendantes de ma volonté et de celle de la personne chargée de vous faire des communications, celles-ci ne vous sont pas arrivées plus tôt, il n'y a pas péril en la demeure. Qu'on renvoie le dossier à la section centrale et qu'à notre rentrée, après les vacances, elle nous fasse son rapport. Vous perdrez ainsi fort peu de temps.
L'honorable M. Osy a paru vouloir lancer des attaques contre la société française.
M. Osy. - Je n'ai attaqué personne.
M. Sinave. - Vous avez dit qu'elle cherchait à placer des actions. Mais toutes les sociétés ne cherchent-elles pas à placer des actions ? Vous avez paru en conclure que cette société n'était pas solide. Mais il n'en est pas moins vrai qu'elle a aujourd'hui plus de 40 millions à sa disposition, et dans de pareilles conditions, je crois qu'on peut regarder une société comme très solide.
Messieurs, je n'entrerai pas dans de plus longs détails. Mais puisque la section centrale n'a pas connu les faits, que des démarches sont faites aujourd'hui au nom d'une compagnie qui nous présente toutes les garanties désirables, je crois que vous ferez bien en adoptant la proposition de l'honorable M. Frère.
Je demande que le dossier soit renvoyé à la section centrale, pour qu'elle fasse son rapport après la rentrée de la Chambre.
M. Lelièvre. - Je ne prends la parole que pour déclarer que, dans mon opinion, la clause de l'article 13 de la convention restera sans valeur, même après l'approbation de la convention, comme je l'avais cru au début de la discussion. La convention reste soumise aux principes généraux du droit.
Ce n'est pas par une simple approbation d'une convention qu'on porte atteinte aux lois existantes. Cela est d'autant plus vrai que l'individu qui traite avec le gouvernement stipule comme partie intéressée, et, par conséquent, il reste soumis aux principes du droit commun comme il a droit de les invoquer en sa faveur.
En conséquence, la clause de compromis vis-à-vis de toutes les parties ne peut avoir ses effets que conformément aux principes de la législation générale. Je ne puis donc que persister dans les observations que j'ai déduites.
M. Loos. - Messieurs, s'il est un projet de loi que je supposais à l'abri de toute critique, que je croyais devoir être accueilli par l'unanimité des membres de la Chambre, c'est évidemment celui que nous discutons en ce moment. En effet, après avoir vu la Chambre accueillir avec sympathie, avec empressement le projet de loi relatif à l’établissement d'une ligne de bateaux à vapeur vers les Etats-Unis d'abord, vers le Brésil ensuite, je m'attendais à ce que le projet qui nous occupe en ce moment reçut un meilleur accueil encore.
Le gouvernement, messieurs, ne demande aucune charge nouvelle pour le trésor. Un subside existe au budget des affaires étrangères pour favoriser des lignes de navigation régulière à voiles vers certains ports. Qu'est-il arrivé et qu'arrive-t-il encore tous les jours ? Le subside ne trouve pas d'application, c'est-à-dire qu'aucun armateur ne consent à remplir les conditions exigées ; ils préfèrent renoncer au subside et avoir leur navigation entièrement libre.
Le but que le gouvernement s'était proposé et qui était de procurer aux fabricants, aux industriels des moyens d'exportation réguliers et économiques, ce but n'a donc pas été atteint.
Aujourd'hui, messieurs, il ne s'agit plus de subsidier éventuellement des navires à voiles allant vers le Levant, il s'agit de subsidier une compagnie qui s'engage à entretenir un nombre déterminé de navires à vapeur et d'organiser des départs périodiques. Cela est tout à fait à l'avantage du pays et principalement de l'industrie. Ce n'est plus une navigation irrégulière par navires à voiles dont le voyage varie considérablement pour la durée, ce sont des bateaux à vapeur dont le départ et l'arrivée sont exactement déterminés. Je croyais que la Chambre aurait pesé ces considérations et que le projet n'aurait rencontré aucune opposition.
Il en aurait été ainsi, messieurs, si l'honorable M. Sinave n'était pas venu nous parler d'un autre projet plus avantageux encore, puisqu'il devait faire atteindre le but sans rien coûter à l'Etat. Je ne m'étonne pas que la Chambre ait prêté l'oreille à une semblable proposition, seulement vous n'en avez pas pesé toutes les conséquences, mais il me sera facile de vous les faire connaître.
(page 298) La nouvelle compagnie annoncé par une circulaire qu'elle veut établir des relations entre le Midi et le Nord de l'Europe, qu'à cet effet elle établira des bateaux à vapeur qui viendront prendre les marchandises et les passagers à Anvers. (On a consenti à substituer Anvers à Dunkerque, afin de rencontrer quelque sympathie dans le pays.) On prendrait donc les marchandises et les voyageurs à Anvers, on déposerait au Havre ceux qui sont en destination du Brésil, et on conduirait à Marseille ceux qui sont eu destination du Levant ; là on les livrerait à une ligne de bateaux à vapeur qui existe depuis fort longtemps, à la ligne des Messageries impériales.
Afin de dissiper certaines préoccupations qui ont fait naître la demande d'ajournement, je vais supposer, messieurs, que toutes les conditions favorables, dont on parle, existent pleinement. Cependant, elles n'existent encore que sur le papier, il n'y a pas de bateaux à vapeur, mais, d'après une lettre que j'ai vue, la compagnie s'engage à en avoir au bout de trois mois.
La compagnie d'Anvers, plus prudente, demande deux ans. Mais enfin, je suppose qu'au bout de trois mois, les navires soient prêts. Ils partent d'Anvers et ils emportent des marchandises destinées au Levant.
Ils ne s'arrêtent ni au Havre, ni à Bordeaux, ni dans aucun port de la côte de France ; ils se rendent directement à Marseille et là ils livrent les marchandises à la ligne du Levant. La compagnie remplit donc toutes ses conditions de la manière la plus satisfaisante. Eh bien, messieurs, est-ce que par là votre but sera atteint ? Evidemment non. Quand vous avez voté des subsides pour la navigation vers le Brésil, vous n'ignoriez pas qu'il existait en Angleterre des lignes vers le Brésil et qu'il existait à Anvers des lignes vers l'Angleterre. Quand vous avez voté la garantie d'un intérêt de 4 p. c. en faveur de la ligne vers New-York, vous n'ignoriez pas qu'il y a entre l'Angleterre et les Etats-Uni une navigation à vapeur parfaitement organisée et que d'Anvers une quantité de bateaux à vapeur se rendent très régulièrement dans le ports anglais d'où partent les navires pour les Etats-Unis. Vous saviez parfaitement tout cela, messieurs, mais vous n'avez pas voulu une ligne brisée : vous n'avez pas voulu soumettre vos marchandises au débarquement et au rembarquement en Angleterre, comme vous ne voudrez pas les soumettre aujourd'hui au débarquement et au rembarquement en France. Avec des idées comme celles de l'honorable M. Sinave, vous ne deviez pas voter la ligne vers les Etats-Unis pas plus que la ligne vers le Brésil.
Notez, messieurs, qu'il est infiniment plus facile de transiter par l'Angleterre que de transiter par Marseille. Il ne faut pas aller chercher au bout de la France un port où vous embarqueriez vos marchandises pour le Levant ; vous n'avez pas besoin pour cela de la compagnie qui s'offre ; vous trouverez à Liverpool des lignes de bateaux à vapeur pour le Levant, desservant la Grèce, tout l'Archipel, Alexandrie et toute l'Egypte, desservant Constantinople et la mer Noire. Tout cela vous ne pouvez pas l'ignorer. Il est évident pour tout le monde qu'il est beaucoup plus avantageux de transiter par Liverpool que par Marseille.
A Liverpool tout est organisé d'une manière beaucoup plus commerciale, beaucoup plus régulière qu'à Marseille, le fret n'est pas aussi élevé et le trajet est infiniment plus court.
Ensuite, messieurs, que sont les bateaux qui partent de Marseille et avec lesquels la compagnie offre de vous mettre en relation ? Ce sont des bateaux-postes, destinés aux voyageurs, aux bagages et au transport des lettres ; ils n'ont qu'un très faible emplacement pour les marchandises. Aussi je dois dire que s'il est une voix que j'ai été étonné d'entendre s'élever contre le projet, c'est à coup sûr celle de l'honorable M. David, qui représente ici l'arrondissement de Verviers.
Les fabricants de Verviers doivent savoir beaucoup mieux que moi-même tous les embarras, tous les frais qui résultent de l'embarquement à Marseille.
Les bateaux qui partent de Marseille, n'ayant que peu de place pour les marchandises, ne peuvent pas charger toutes celles qui leur sont destinées, et les marchandises françaises obtiendront naturellement la préférence ; on s'inscrit à Paris, on s'inscrit à Marseille pour avoir de la place, et je pense qu'il ne s'effectue pas un seul départ pour l'Orient, sans que des marchandises restent à quai, malgré la fréquence des départs. Nous livrerions donc à la compagnie nos marchandises et celles que nous recevrons de l'Allemagne, et lorsque ces marchandises arriveraient à Marseille, croyez-vous qu'elles obtinssent la préférence ? Personne de vous, messieurs, ne le supposera.
Evidemment la priorité sera accordée aux expéditions provenant de Lyon, de St-Etienne, de Paris, mais non pas à celles qui viendront de Verviers ou de Liège.
Ce qu'on expédie le plus fréquemment en Orient, surtout par Marseille, ce sont des marchandises de valeur, comme les draps de Verviers, les armes de Liège. Eh bien, messieurs, si vous consultiez les industriels da Liège et de Verviers, ils vous diraient quel est le meilleur des deux services dont nous nous occupons, et soyez bien certains que ce serait celui pour lequel on nous demande un subside de 300,000 francs. Ce service procurera aux seuls industriels de Liège et de Verviers plus de 10,000 francs d'économie annuelle sur les frais de transport et sur les faux frais de douane. Cela ne sera contesté par aucun de nos fabricants.
C'est donc, en définitive, pour 300,000 francs, messieurs, quve vous pouvez obtenir, avec garantie d'existence pendant dix années, un service vers le Levant.
Messieurs, si je me suis opposé à l'ajournement, c'est que je ne trouve dans le nouveau projet dont on nous entretient rien d'assez sérieux pour faire péricliter celui qui nous est soumis par le gouvernement.
En admettant même que la compagnie maritime réalisât de la manière la plus complète toutes les conditions qu'on nous offre en son nom, je dis qu'il n'est pas dix membres dans cette Chambre qui préféreraient la ligne non subsidée à la ligne subsidiée par 300,000 francs.
Messieurs, je ne vous ai parlé qu'en passant des frais résultant du transbordement à Marseille. Pour ma part, j'ai eu sous les yeux quelques comptes de frais, et ces frais ne sont pas insignifiants comme on pourrait le croire ; ils sont très considérables et l'honorable M. David pourrait édifier la Chambre en produisant quelques-uns de ces comptes, payés par des fabricants de Verviers. C'était là un renseignement fort précieux que l'honorable membre, mieux que personne, aurait pu produire pour faire apprécier s'il faut préférer une ligne partant d'Anvers directement vers le Levant, à une ligne entre Anvers et Marseille pour y transborder vers le Levant, alors même que la première doit coûter 300,000 francs.
Je ne sais pas si l'arrondissement de Verviers a une parfaite connaissance de la convention qui nous occupe, mais je dois croire que quand on l'aura examinée on saura gré au gouvernement de l'avoir conclue.
Je crois que la Chambre peut très bien statuer aujourd'hui en pleine connaissance de cause, en supposant, je le répète, que tout ce que promet la compagnie rivale vienne à se réaliser ; et c'est dans ces conditions que je vous prie, messieurs, de vouloir envisager la question de ne pas prendre pour réel tout ce qui n'est encore qu'hypothétique ; en présence de ces deux situations, je prie la Chambre d'opter.
L'honorable M. David a fait valoir un argument accessoire : « On ne vous offre en définitive, dit-il, d'ici à deux ans que deux bateaux à mettre en activité. Il est vrai qu'on s'engage pour quatre bateaux, mais puisqu'il faut deux ans pour en faire partir deux, on peut calculer ce qu'il faudra de temps pour en faire partir quatre. »
Les choses ne se passent pas ainsi. On trouve des constructeurs qui s'engagent pour un nombre déterminé de navires ; pour le moment, tous les constructeurs de navires de la qualité de ceux qui doivent faire le service, sont engagés pour quelque temps. A l'heure qu'il est, faute de trouver des chantiers en Belgique, on construit à l'étranger des bateaux pour le Brésil. On en a construit deux, je pense, pour New-York. Vous ne trouverez donc pas aujourd'hui des constructeurs disposés à contracter l'engagement de livrer les quatre bateaux en deux ans. Mais cette forte demande a fait augmenter le personnel de tous les chantiers. Je considère comme n'étant pas impossible de voir les quatre navires construits au bout de trois ans.
Ainsi, en est-il advenu des bateaux de New-York ; il a fallu beancoup de temps pour construire le premier navire ; et maintenant les bateaux qui étaient nécessaires encore vont être fournis peut-être de trimestre en trimestre.
A quoi s'engage la société ? Elle s'engage à faire un départ d'Anvers tous les mois. Je suis convaincu que cet engagement sera en pleine réalisation au bout de trois ans. Mais supposons même qu'il faille réellement quatre ans pour avoir les quatre bateaux à vapeur. Eh bien, dès aujourd'hui vous pouvez dire que la Belgique sera à peu près au niveau des ports de France qui sont en possession d'une ligne de navigation régulière vers le Levant.
C'est précisément, si ma mémoire est fidèle, pour la navigation vers Constantinople qu'on ne trouvait plus de navires à voiles ; je crois même que déjà deux départs ont manqué. Ici, vous obtenez l'assurance que dorénavant les départs ne feront plus défaut.
Je crois que, dans les conditions que je viens de déterminer, il ne doit pas être difficile à la Chambre de se prononcer, en mettant même les choses au mieux du côté de la compagnie maritime, et au pis du côté de la société belge.
M. David. - Messieurs, il existe une différence essentielle entre l'honorable M. Loos et moi, c'est que je n'ai pas, comme lui, à l'heure qu'il est, de préférence pour une société ; je me trompe : j'accorderai la préférence à la société qui offrira le plus d'avantages à l'industrie et au commerce de la Belgique sans lui demander son certificat d'origine.
Nous ne sommes pas encore à même de juger ce que pourra proposer la société maritime, j'ai donc cru raisonnable de demander l'ajournement. Bien loin de moi l'intention de combattre l'établissement d'aucune ligne de bateaux à vapeur : c'est le seul moyen d'étendre nos relations avec l'étranger. Jusqu'à présent il avait manqué à la Belgique plusieurs choses pour donner du développement à ses exportations vers les pays transatlantiques. Fort peu de maisons belges sont établies dans les pays transatlantiques. Sauf Verviers et Liège dont les industrieux enfants ont toujours parcouru et parcourent encore les diverses parties du monde à la recherche de débouchés nouveaux pour leurs produits, la Belgique en général avait trop compté sur la consommation intérieure et sur les marchés des pays immédiatement limitrophes. Aujourd'hui l'esprit d'entreprise se développe et des établissements belges assez nombreux se fondent à l'étranger.
En second lieu, nos consuls, à quelques honorables exceptions près, (page 297) déployaient fort peu de zèle dans l'exercice de leurs fonctions. Depuis quelques années ils prennent leur rôle au sérieux et s'acquittent convenablement de leur devoir ; ils mettent même de l'empressement à nous fournir des renseignemements précieux.
La troisième chose qui nous manquait, c'étaient des moyens de transport prompts, directs, économiques et réguliers. Aussi, dans ma section, comme dans la section centrale, ai-je applaudi au principe du projet, et j'engage M. le ministre des affaires étrangères à saisir toutes les occasions qui se présenteront d'encourager l'établissement de nouvelles lignes vers des destinations différentes.
Messieurs, je connais un peu le commerce du Levant. Je n'y ai pas fait pendant vingt-cinq ans des affaires sans savoir comment elles se traitent. L'honorable M. Loos me dit : Verviers ne sera plus obligé d'emprunter à grands frais le port de Marseille pour ses expéditions et transactions avec l'Orient. Messieurs, Verviers n'a jamais pu se servir de Marseille, le transport par terre jusque-là est trop coûteux. Mais que se passe-t-il ? Verviers a des dépôts à Trieste ; c'est à ces dépôts que les maisons grecques, turques, arméniennes, égyptiennes et de tout le littoral de la Méditerranée viennent s'approvisionner.
L'honorable M. T'Kint de Naeyer, lui, nous entretenait tantôt des consommateurs turcs et autres qui exigent de recevoir leurs marchandises à jour fixe ; qu'il me permette de le lui dire, le Levantins jusqu'à présent n'ont pas fait d'achats directs ; ils achètent dans les dépôts de Trieste, Constantinople, Smyrne, Alexandrie et autres dans les divers ports du Levant ; au Levant toutes les affaires se font par l'entremise de commissionnaires.
L'honorable M. Loos me disait que je devais apporter ici quelques comptes simulés des frais d'expédition ; j'aurais pu facilement faire cette production de mémoire il y a quelques années, et aujourd'hui par écrit si j'avais pu m'attendre à cette discussion. Mais à aucune époque il ne m'eût été possible d'en donner pour Marseille. J'ai déjà déclaré que Verviers ne se sert pas de Marseille pour les expéditions vers le Levant.
Selon l'honorable membre, il y aura pour Verviers une économie de 10,000 francs par an dans les frais d'expédition, par suite de l’établissement de cette nouvelle ligne de bateaux à vapeur. L'honorable M. Loos ne pourrait pas affirmer que la société française ne nous offrirait pas un avantage supérieur à celui-là. Je pourrais à mon tour demander à l'honorable membre de produire un compte simulé des frais de transport pour les bateaux à vapeur de la société française.
Il ne le pourrait évidemment pas, qu'il me permette donc de croire que toute autre société que la société anversoise pourra nous offrir les mêmes avantages.
L'honorable M. Loos a dit encore : « Il n'y aura aucune charge nouvelle pour le trésor public. » Nous savons bien que le subside accordé à la société anversoise sera pris sur l'allocation votée chaque année pour subsidier la navigation à voiles.
Mais si nous ne devions pas donner cette somme à la société anversoise, elle resterait dans les caisses de l'Etat, et elle servirait à subventionner une autre ligne de navigation, soit à voiles, soit par bateaux à vapeur.
Je me résume, messieurs, je n'accepte pas l'espèce d'accusation dont j'ai été l'objet de la part de l'honorable M. Loos, à savoir que je suis opposé au projet de loi. Non, messieurs, il n'en est rien ; je suis favorable au projet de loi, à moins qu'il ne se présente quelque chose de plus avantageux pour le commerce et l'industrie du pays, surtout sous le rapport de la fréquence des départs d'Anvers.
M. Van Iseghem. - L'honorable M. Sinave a dit hier quelques mots en faveur du port d'Ostende et je le remercie.
Comme on doit être toujours franc et sincère, je dois déclarer à la Chambre que dans ce moment on ne songe nullement, dans la ville que j'ai l'honneur de représenter, à organiser un service de bateaux à vapeur entre la Belgique et le Levant ; aussi le commerce de la ville d'Ostende n'a présenté aucune réclamation à la Chambre contre le projet que nous discutons en ce moment.
Je donnerai donc mon assentiment au projet tel qu'il est présenté par le gouvernement et j'espère que si plus tard on était disposé à Ostende à établir un service régulier de bateaux à vapeur vers l'une ou l'autre destination, ma ville natale pourra alors compter sur le bienveillant concours du gouvernement et des Chambres.
L'impossibilité qui existe actuellement d'organiser chez nous des lignes de navigation à vapeur, provient uniquement d'une espèce d'hostilité qui règne dans l'administration du chemin de fer contre les intérêts du port d'Osiende ; cette administration ne veut pas tenir compte de ce que les marchandises qu'on importe à Ostende ne payent pas le péage sur l'Escaut, qui est une charge très lourde pour le budget de l'Etat, et en outre qu'à grande distance on peut expédier à meilleur compte qu'à courte distance.
Entre Anvers et Malincs et Ostende et Malines, il y a une différence de 20 lieues, qui au prix de 3, 4 et 5 centimes par quintal-lieue, donne un avantage à la ville d'Anvers de 6 fr., 8 fr. et 10 fr. par tonneau ; cette faveur est immense et elle est un empêchement à ce que pour le transit ou pour l'intérieur du pays les marchandises arrivent à Ostende ; cependant l'Etat fait un sacrifice énorme par le remboursement du péage sur l'Escaut.
Rien ne serait donc plus juste et plus équitable que de diminuer le tarif pour les transports à grande distance et d'accorder pour les marchandises qui arrivent à Ostende ou qui en sont expédiées une réduction d'au moins 33 centimes par 100 kil. en compensation de l'économie du péage sur l'Escaut. Il est douloureux pour nous d'être surtaxés pour le transport du chemin de fer et d'être obligés de payer en outre notre part dans le remboursement du péage. J'appelle donc toute l'attention du gouvernement sur cette criante injuste, et s'il veut être juste envers le port d'Ostende il peut être convaincu que mes concitoyens ne resteront pas en arrière et qu'ils feront tout ce qui dépend d'eux pour augmenter leurs relations commerciales.
- Plusieurs voix. - La clôture. ! la clôture !
M. Vervoort. - Je voulais dire quelques mots seulement et vous parler de l'article 13 de la convention critiqué par quelques membres. Cependant si la Chambre veut clore, je n'insisterai pas.
- Plusieurs voix. - Parlez ! parlez !
M. Vervoort. - La Chambre doit comprendre qu'après le discours de l'honorable M. Loos, ceux de M. le rapporteur de la section centrale et de M. le ministre des affaires étrangères, je n'entends pas faire une dissertation et traiter toutes les questions soulevées à propos du projet de loi qui lui est soumis.
L'honorable M. David ne repousse pas le projet du gouvernement, mais il demande vingt jours pour s'éclairer sur les projets d'une compagnie française. Voilà le sens de son discours.
Eh bien, je me pose cette question : S'agit-il d'aller à la recherche d'une compagnie offrant des conditions plus ou moins avantageuses pour l'établissement d'un service de navigation vers Marseille, sauf à le mettre en communication avec les bateaux-postes français de l'Orient, ou bien faut-il agréer les offres d'une compagnie belge, présentant des garanties sérieuses à nos concitoyens et à l'industrie belge ?
Faut il se mettre à la remorque d'une compagnie étrangère qui n'a pas même fait connaître ses projets au grand jour ou faut-il protéger une entreprise nationale et adopter le projet du gouvernement, projet qui a rencontré les sympathies presque unanimes des sections et l'appui de la section centrale ? et je réponds : La solution n'est pas douteuse pour nous après les discours que nous venons d'entendre.
Il s'agit de doter le pays d'un service direct, régulier, permanent avec le Levant, par une compagnie surveillée par le gouvernement, car un article de la convention autorise le gouvernement à nommer un surveillant pour s'assurer de l'accomplissemant de toutes les stipulations de la convention. Mieux vaut, à coup sûr, avoir affaire à une compagnie à laquelle participeront des capitaux belges et de grandes maisons du pays, que de se livrer à une compagnie étrangère qui peut avoir à subir l'influence de la politique ou des besoins de son gouvernement.
Si, par exemple, la guerre était portée des bords de la mer Noire sur un autre point et que d'immenses transports étant dirigés vers la Baltique, la compagnie, dont il a été parlé, et celles qui exploitent les lignes du Levant dans la Méditerranée, fussent invitées à livrer une partie de leurs bateaux à vapeur, la navigation de la Belgique vers l'Orient pourrait être interrompue et les marchandises expédiées à Marseille pourraient être exposées à y être emmagasinées indéfiniment. Non ; il faut à la Belgique un service direct qui n'ait à courir d'autres hasards que les chances générales du commerce et les fortunes de mer.
Qu'il me soit permis, messieurs, de vous signaler aussi les avantages accordés à l'Etat par l'article 11, dont il n'a pas été dit un mot. Cet article accorde le transport gratuit, par les bateaux à vapeur de la compagnie, de nos agents diplomatiques et des correspondances et envois du gouvernement.
J'arrive à l'article 13 de la convention.
L'honorable M. Lelièvre a insisté sur la nullité de cet article. Les jurisconsultes ne sont pas d'accord sur la validité de la promesse de compromettre renfermée dans certains contrats. Nous n'avons pas à nous occuper de cette question.
Il est vrai que l'on ne peut pas compromettre sur les contestations dans lesquelles l'Etat se trouve engagé, mais si la clause compromissoire de l'article 13 peut être considérée comme contraire à la loi lorsqu'on isole la convention de la loi proposée, il est incontestable qu'elle sera relevée de son illégalité par la disposition légale qui doit la sanctionner. On peut par une loi spéciale déroger à un principe général.
L'honorable ministre des affaires étrangères a présenté à cet égard des observations très justes.
M. Frère-Orban. - J'insiste sur la motion d'ajournement que j'ai présentée ; elle a été très faiblement combattue par les honorables membres qui ont pris la parole ; on a défendu le projet ; on s'est attaché à en faire ressortir les avantages, et quant à ma motion on s'est borné à dire en thèse générale, que si les intentions qu'on supposait à une compagnie étrangère venaient à se réaliser on voterait encore pour le service subsidié par l'Etat. Je ne suis pas convaincu que si un service sans subside de nature à faire atteindre le but qu'on poursuit était offert à la Chambre elle ne l'adopterait pas plutôt qu'un service que l’on nomme national, mais qui exige une subvention de 300,000 fr.
Je l'ai déjà dit, je ne suis pas opposé au projet du gouvernement, mais je trouve qu'il est de l'intérêt de la mesure qu'on veut faire décréter et qu'il est aussi de la dignité de la Chambre, au moment où des propositions nouvelles sont annoncées, où l'on affirme que l'on fera gratis ce qu'il s'agit de faire pour de l'argent ; je trouve qu'il est convenable et prudent d'ajourner la discussion, ne fût-ce que pour lever les scrupules d'une partie de l'assemblée.
(page 298) Il n'y a pas urgence. Si l'on veut remettre à quelques jours je ne m'y oppose pas ; j'indique vingt jours, parce que c'est le terme des vacances décidées par la Chambre. On' aurait le temps d'examiner, les opinions pourraient se former. On voterait alors à une forte majorité, j'en suis convaincu, le projet du gouvernement, si l'on reconnaissait que les propositions que l'on annonce ne sont pas sérieuses ou sont insuffisantes. Mais dans l'intérêt de la mesure même, il importe qu'on ne puisse pas dire que précipitamment sans examen, on s'est hâté de voter un subside de 300,000 fr. pour une opération qui, peut-être, pourrait être faite sans l'intervention pécunaire de l'Etat.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Messieurs, remarquez que s'il ne s'agit que de vingt jours pour la Chambre des représentants, en fait le retard sera beaucoup plus long. Le Sénat est assemblé en ce moment, il va épuiser son ordre du jour avant de se séparer, il ne se réunira plus au plus tôt que dans les premiers jours de février, de sorte que si vous prononcez l'ajournement, c'est un retard de six semaines ou deux mois. C'est une simple observation que je fais.
Je demande encore pour quelques mois l'attention de la Chambre. L'honorable M. David disait que le grand avantage qui pourrait lui faire donner son assentiment à la loi, serait la fréquence des départs d'Anvers, que pour lui c'était là la condition essentielle ; d'autres membres ont parlé de l'avantage d'avoir une ligne nationale. Je pense qu'il y a encore une autre raison qui domine celles-là, c'est la stabilité de la ligne.
Dans le commencement, des lignes de navigation n'ont pas beaucoup à faire ; le commerce ne prend que lentement un chemin nouveau qu'on lui ouvre, ce n'est qu'au bout de quelques mois, de quelques années souvent, qu'on peut juger si ce chemin sera adopté et si l'entreprise peut réussir ; or, une compagnie qui ne ferait aucun arrangement awe le gouvernement, et c'est là la position que veut garder la compagnie maritime ; elle place des bâtiments à Anvers, elle peut les retirer quand bon lui semble ; au bout d'un an, si elle ne fait pas de bonnes affaires, elle les retire, personne n’a rien à dire ; tandis que la société avec laquelle nous contractons reste en Belgique, elle est composée de gros capitalistes sur lesquels nous aurons toujours la main.
Je leur demande pardon de poser une hypothèse impossible.
Mais enfin s'ils n'exécutaient pas leurs engagements, le gouvernement serait là pour les forcer à le faire. Avec la société qui a contracté avec le gouvernement, la stabilité de nos relations vers le Levant est assurée. Avec l'autre société, vous n'avez à cet égard aucune espèce d'assurance.
- La clôture de la discussion est prononcée.
La proposition d'ajournement faite par M. Frère est mise aux voix pas appel nominal.
70 membres répondent à l'appel nominal.
38 répondent oui.
38 répondent non.
En conséquence la proposition d'ajournement n'est pas adoptée.
Ont voté pour l'adoption de cette proposition : MM. David, de Breyne, Delfosse, Deliége.de Mérode (Félix), de Moor, de Naeyer, de Perceval, de Portemont, Desmaisières, Devaux, Dubus, Frère-Orban, Jouret, Lambin, Landeloos, Lange, Laubry, Lebeau, Lelièvre, Manilius, Mascart, Moreau, Orts, Pirmez, Sinave, Tesch, Thienpont, Tremouroux, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Verhaegen, Visart, Allard, Ansiau, Anspach et Coppieters ’t Wallant.
Ont voté contre : MM. de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Della Faille, de Man d'Altenrode, de Mérode-Westerloo, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de T'Serclaes, de Wouters, Dumon, Jacques, Janssens, Lesoinne, Loos, Magherman, Malou, Matthieu, Moncheur, Osy, Prévinaire, Rodenbach, Tack, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, Van Grootven, Van Iseghem, Van Overloop, Van Remoortere, Vervoort, Veydt, Vilain XIIII, Wasseige, Boulez, Brixhe, Calmeyn, Coomans et Delehaye.
L'article unique du projet est ainsi conçu :
« Article unique. La convention conclue le 12 novembre 1855, entre le gouvernement et le sieur Spilliaerdt-Caymax, pour l'établissement d'un service régulier de bateaux à vapeur entre la Belgique et le Levant est approuvée. »
Il est procédé au vote par appel nominal sur cet article unique.
72 membres sont présents.
47 votent l'adoption.
25 s'abstiennent.
En conséquence le projet de loi est adopté. Il sera transmis au Sénat.
Ont voté l'adoption : MM. de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Della Faille, de Man d'Attenrodc, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Renesse, de Ruddere de te Lokeren, de T'Serclaes, de Wouters, Dubus, Dumon, Jacques, Janssens, Jouret, Lambin, Lesoinne, Loos, Magherman, Malou, Matthieu, Moncheur, Orts, Osy, Prévinaire, Rodenbach, Tack, Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Vervoor, Veydt, Vilain XIIII, Wasseige, Ansiau, Anspach, Boulez, Brixhe, Calmeyn, Coomans et Delehaye.
Se sont abstenus : MM. David, de Breyne, Delfosse, Deliége, de Mérode (Félix), de Naeyer, de Perceval, de Portemont, Desmaisières, Devaux, Frère-Orban, Landeloos, Lange, Lebeau, Lelièvre, Manilius, Moreau, Pirmez, Sinave, Thienpont, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Visart, Allard et Coppieters 't Wallant.
M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.
M. David. - On me trouvera toujours le plus ferme, le plus zélé défenseur des lois qui ont pour but de faciliter nos exportations. Le projet en discussion est de ce nombre ; je n'ai donc pas voulu voter contre. Mais j'aurais voulu que nous eussions le temps d'examiner les propositions qui nous étaient annoncées de la part d'une autre société présentant autant d'avantages, si pas plus. Dans ces conditions, j'ai dû m'abstenir.
M. de Breyne. - Je me suis abstenu, non parce que j'étais hostile au projet présenté par le gouvernement, mais parce que j'aurais voulu avoir le temps de m'éclairer.
M. Delfosse. - Je me suis abstenu parce que la Chambre a repoussé la proposition d'ajournement. Je croyais cet ajournement très utile.
M. Deliége. - Je me snis abstenu, parce que je ne suis pas assez éclairé.
M. de Mérode, M. de Naeyer, M. de Perceval, M. de Portemont, M. Desmaisières, M. Devaux, M. Frère-Orban, M. Landeloos, M. Lange, M. Lebeau, M. Lelièvre, M. Manilius, M. Moreau et M. Pirmez déclarent s'être abstenus pour les mêmes motifs.
M. Sinave. - Je me suis abstenu par les motifs que j'ai développés dans la discussion. Je n'ai pas voulu me prononcer contre une entreprise utile. Mais d'autre part, après une discussion pénible que nous avons eue pendant quinze jours pour aviser aux moyens de procurer un soulagement aux misères du peuple, je trouve qu'il ne convient pas de jeter des centaines de mille francs à la tête des millionnaires.
M. Thienpont. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs que l'honorable M. Delfosse.
M. Vandenpeereboom. - Je n'ai pas volé contre la loi parce qu'elle ne me semble pas mauvaise, je n'ai pu vtler pour parce qu'il ne m'est pas démontré qu'il serait impossible d'obtenir des conditions meilleures.
L'an passé, le Sénat, en rejetant la loi relative aux literies militaires et votée par la Chambre à la fin de la session, a procuré à l'Etat un bénéfice important ; ce fait prouve que parfois il est utile de temporiser.
M. Vander Donckt. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs.
M. Visart. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs, à l'exception de ceux allégués par l'honorable M. Sinave.
M. Allard. - Je me suis abstenu par les motifs exprimés par les honorables MM. David, Delfosse et autres membres.
M. Coppieters. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs.
M. de Perceval. - Nous ne pouvons, au moment de nous séparer pour prendre nos vacances de nouvel an, examiner sérieusement cette demande de crédii supplémentaire.
Je propose l'ajournement de la discussion de ce projet de loi jusqu'après notre rentrée.
M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je ne m'oppose pas à l'ajournement. Je signale seulement à la Chambre les graves inconvénients qu'il y a de laisser en souffrance un nombre considérable de dettes ; car le crédit est de deux millions et parmi les créanciers se trouvent probablement un certain nombre de fonctionnaires publics.
- L'ajournement proposé par M. de Perceval est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La discussion générale est ouverte.
M. de Breyne. - Messieurs, il y a peu de jours une pétition a été déposée sur le bureau, et à ma demande la Chambre a bien voulu la renvoyer à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport.
Comme cette requête se rattache au projet de loi en discussion, je regrette que la commission des pétitions n'ait pas eu le temps nécessaire pour nous présenter son rapport. Je demande à la Chambre la permission d'entrer dans quelques détails sur le contenu de cette requête.
La loi du 30 novembre 1854, dont on demande la prorogation, (page 299) autorise la distillerie des céréales étrangères et l'exportation des alcools ainsi fabriqués et ce moyennant certaines conditions et avec restitution de droits.
Mais l'opération doit se faire dans un laps de temps assez court. Celui qui veut fabriquer pour l'exportation est obligé de faire la déclaration en entrepôt, et d'opérer toutes les manipulations et l'expédition dans le terme de 40 jours, pour pouvoir jouir de l'avantage de la restitution.
Messieurs, les pétitionnaires dont il s'agit se trouvent dans une position tout à fait exceptionnelle, et ils demandent à la Chambre si elle ne pourrait tenir compte de cette position et leur venir en aidé.
La loi est juste en principe ; mais, il n'en est pas de même dans l'application.
Les distillateurs qui se trouvent à proximité d'un entrepôt public, à proximité du chemin de fer, à proximité d'un centre où se font les opérations en céréales, ont un très grand avantage, parce qu'ils ont les plus grandes facilités pour se procurer la matière première, pour fabriquer et expédier dans le délai prescrit. Mais ceux qui ne jouissent pas de cette faveur, ceux qui ne se trouvent pas sur le chemin de fer, ceux qui sont éloignés des localités où se font les opérations en céréales, ceux-là ont la plus grande peine à terminer leurs opérations dans les 40 jours que la loi leur accorde.
La société dont je vous parle se trouve à 40 kilomètres du point le plus rapproché du chemin de fer. Elle a son centre à une grande distance d'un entrepôt public.
Elles se trouvent très éloignées de notre métropole commerciale où se font toutes les opérations en céréales et par conséquent, elles n'ont pas les avantages que la loi accorde à ceux qui sont dans une situation plus favorable.
On nous dira : Vous avez des canaux, vous êtes sur une voie fluviale. Cela est vrai, messieurs ; mais savez-vous combien de temps il nous faut pour faire venir des céréales d'Anvers à Dixmude Il nous faut quinze à vingt jours. Ajoutez à cela le chargement, le déchargement, toutes les manipulations que les céréales doivent subir avant d'être converties en alcool ; ajoutez-y encore le temps nécessaire pour l'expédition, et vous verrez à toute évidence que le terme de 40 jours est insuffisant.
La fabrication se fait surtout en hiver ; les rivières alors sont gelées. Je ne parlerai pas des entraves à la navigation qu'on rencontre à chaque instant, je ne dirai rien des ponts, des écluses,du passage des villes, je ne parlerai pas des baisses ou des crues d'eau ; tout cela entrave la navigation.
Quant à faire le transport par charriage, on a les neiges, le dégel, la fermeture des barrières.
Nos industriels rencontrent donc une foule d'entraves que ne rencontrent pas ceux qui sont plus favorisés sous le rapport de l'emplacement.
Si je ne comprenais pas l'empressement de la Chambre à finir, si, d'un autre côté je ne comptais sur les dispositions favorables du gouvernement, je ferais une proposition tendant à rendre la loi équitable pour tous les distillateurs qui se trouvent dans la position que je viens d'indiquer et je proposerais à la Chambre de leur accorder la faveur de l'entrepôt fictif. (Interruption.) Je crois que M. le ministre des finances est disposé à donner une explication ; je lui cède la parole.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, j'ai interrompu l'honorable membre pour lui dire que s'il m'avait fait connaître les difficultés dont il vient de parler, j'aurais examiné la question. Ces difficultés ne m'ont jamais été signalées.
Je voudrais savoir quel est l'amendement que l'honorable membre serait disposé à présenter. Je l'examinerais d'ici à demain.
M. de Breyne. - M. le ministre se plaint que je ne l'aie pas prévenu, mais, messieurs, j'ai attendu le rapport sur les pétitions déposées, il y a quelques jours, rapport que la commission n'a pas eu le temps de faire. Je répète donc que j'avais l'intention de demander à la Chambre s'il n'y aurait pas moyen d'autoriser les distillateurs qui se trouvent dans la position dont je viens de parler, à avoir un entrepôt fictif.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, je pense qu'il convient de voter la loi telle qu'elle est proposée. Quand le rapport sera fait sur les pétitions adressées à la Chambre, si je trouve qu'une disposition législative est nécessaire pour faire droit à la demande de l'honorable préopinant, je proposerai cette disposition que la Chambre pourra voter après les vacances.
M. de Breyne. - Je suis satisfait de la réponse de M. le ministre des finances. J'attendrai donc qu'il ait pris connaissance du rapport que la commission des pétitions ne tardera pas sans doute à présenter et qu'il ait pu examiner la question, et j'examinerai alors s'il y a lieu de faire une proposition formelle.
- La discussion est close.
« Art. 1er. Les articles 1, 2 et 10 de la loi du 30 novembre 1854 (Moniteur n°335) sont prorogés jusqu'au 31 décembre 1856. »
- Adopté.
« Art. 2. Le deuxième alinéa de l'article 2 de la même loi est remplacé par la disposition suivante :
« A. Les eaux-de-vie de grains dont la fabrication avec des céréales étrangères est dûment justifiés, à raison de 200 kilogrammes de seigle ou de maïs par hectolitre d'eau-de-vie à 50° Gay-Lussac, à la température de 15° centigrades. »
- Adopté.
Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet qui est adopté à l'unanimité des 66 membres présents.
Ce sont : MM. David, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Delfosse, Deliége, Dellafaille, de Man d'Attenrode, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Naeyer, de Perceval, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de T'Serclaes, Devaux, Dubus, Dumon, Faignart, Frère-Orban, Janssens, Jouret, Lambin, Landeloos, Lebeau, Lelièvre. Lesoinne, Loos, Magherman, Malou, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Orts, Osy, Pirmez, Rodenbach, Sinave, Tack, Tesch, Thiéfry, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Vervoort, Vilain XIIII, Visart, Allard, Ansiau, Anspach, Boulez, Brixhe, Calmeyn, Coomans, Coppieters 't Wallant et Delehaye.
Il est procédé au tirage au sort de la grande députation qui sera chargée de complimenter Sa Majesté à l'occasion du renouvellement de l'année.
Le sort désigne MM. Thienpont, de Sécus, Anspach, Vander Donckt, Devaux, Matthieu, Calmeyn, Jacques, Orts, de Man d'Attenrode et Veydt.
La séance est levée à 4 heures et demie.