(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)
(Présidence de M. Delehaye.)
(page 965) M. Ansiau procède a l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Maertens donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. Ansiau présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.
« Les sieurs Cardinal et Sainctelctte, vice-président et secrétaire du comité des houillères du Couchant de Mons, présentent des observations sur une lettre de M. Dupont, concernant la question de la réforme douanière. »
- Dépôt sur Je bureau pendant la discussion du projet de loi concernant le tarif des douanes.
« Plusieurs propriétaires, industriels et négociants à Charleroi prient la Chambre de modifier la législation sur les servitudes militaires et de décider qu'en attendant il ne sera pris aucune mesure définitive quant aux constructions existantes. »
M. Pirmez. - Je prie la Chambre de décider que le rapport sur cette pétition soit fait en même temps que celui sur la demande des habitants d'Anvers qui regarde aussi la législation des servitudes militaires. Ces réclamations sont les mêmes, je pense, et il me semble qu'on doit s'en occuper en même temps. En attendant que la Chambre se prononce sur cette pétition, je crois qu'il n'est pas dans l'intention du gouvernement de prendre aucune mesure relative aux constructions existantes et je prierai M. le ministre de la guerre de vouloir bien nous en assurer.
M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Messieurs, je répondrai à l’honorable préopinant que le conseil des ministres n'est pas encore en mesure de prendre une décision quelconque sur l'affaire dont il vient de parler. L'importance de ces questions exige de sa part un très sérieux examen. Il s'agit de concilier à la fois l'intérêt des habitants de la ville d'Anvers et celui de la défense du pays.
M. Brixhe. - J'avais demandé la parole avant l'honorable M. Pirmez ; mais l'erreur est indifférente, car les observations que j'avais à produire sont identiquement les mêmes que celles dont mon collègue vient d'entretenir la Chambre et auxquelles je m'empresse de me référer.
- Le renvoi de la pétition de Charleroi à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport, est ordonné. La commission fera rapport en même temps sur la pétition d'Anvers.
« Quelques cultivateurs à Merckem demandent que les artistes vétérinaires non diplômés puissent continuer l'exercice de leur profession. »
« Même demande de cultivateurs à Bixschote et à Noordschote. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Plusieurs habitants de Vedrin prient la Chambre d'examiner s'il n'y a pas lieu de décider que les fabriques de produits chimiques suspendront annuellement leurs travaux du 1er avril au 1er octobre. »
- Même renvoi.
« La veuve Havard demande une modification à la loi sur les pensions, en faveur de la veuve remariée. »
- Même renvoi.
« Le sieur Alphonse Tripels, propriétaire, à Saint-Josse-ten-Noode, né à Maestricht, demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« M. Della Faille, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé de quelques jours. »
- Ce congé est accordé.
M. de Perceval. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau, au nom de la commission des naturalisations, un projet de loi conférant la grande naturalisation au sieur P.-E.D. Biver, officier d'état-major à Bruxelles.
- Ce projet de loi sera imprimé et distribué. La Chambre le met à la suite de l'ordre du jour.
M. Vandenpeereboom, M. Van Overloop et M. Wasseige déposent successivement sur le bureau des rapports sur des demandes de naturalisation ordinaire.
- Ces rapports seront imprimés et distribués.
La Chambre les met à la suite de l'ordre du jour.
M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, le Roi m’a chargé de présenter à la Chambre un projet de loi tendant à faire allouer au département de la guerre un crédit extraordinaire pour compléter le système défensif d'Anvers et des rives de l'Escaut. Ce crédit, qui s'élève à 9,400,000 francs, sera réparti sur quatre exercices à partir de 1855.
- Le projet de loi sera imprimé et distribué. La Chambre le renvoie à l'examen des sections.
M. le président. - M. le ministre de l'intérieur a fait parvenir à la Chambre un rapport sur l'exécution de l'article 10 de la loi du 3 avril 1851, concernant les sociétés de secours mutuels.
- Ce rapport sera imprimé dans les Annales parlementaires.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Messieurs, l'importance du projet de loi en discussion n'a pas besoin d'être démontrée ; elle est comprise de tout le monde. Le premier but du projet est de réunir et de condenser en un Code unique toutes les dispositions relatives aux poids et mesures, qui se trouvent éparses aujourd'hui dans un grand nombre de lois et de règlements.
L'autre but est de compléter les dispositions nécessaires pour l'orgation de l’administration des poids et mesures. C’est ainsi qu’on a proposé d’appliquer aux poids médicinaux le système décimal, de soumettre les balandes aussi à la vérification, d’étendre l’usage des dénominations légales aux écritures de commerce, de stipuler des garanties pour le commerce en gros des liquides, etc.
Dans la séance d'hier on a agité la question de savoir quel serait le meilleur moyen de généraliser le système décimal. Je ne me dissimule pas qu'il est difficile pour le gouvernement de faire quelque chose d'immédiatement efficace. D'honorables membres auraient voulu voir apporter plus de rigueur dans l'exécution des dispositions législatives et des mesures réglementaires en, matière de poids et mesures.
Je ferai observer qu'à mon avis ce n'est pas le bon moyen d'atteindre le but qu'on se propose. On est ici en présence des préjugés populajres, on doit les traiter avec ménagement.
Il faut tenir sévèrement à l'observation de la loi, en provoquer la rigoureuse application, mais toujours avec les tempéraments qu'on a reconnus nécessaires à toutes les époques.
Le gouvernement peut faire beaucoup en ordonnant que, pour ce qui concerne les documents publics, il soit fait usage de dénominations se rapportant au système métrique, mais il est évident que le temps seul peut faire disparaître les derniers obstacles que rencontrent l'introduction et la généralisation de ce système.
Il y a encore un moyen, et à mon avis c'est le plus efficace, de faire disparaître ces obstacles, c'est l’enseignement.
Rarement, quand il s'agit de combattre des préjugés, on y réussit auprès de la génération présente ; on ne peut compter sur le succès qu'auprès des générations à venir. C'est par l'enfance, au moyen de l’enseignement primaire, qu'on pourra parvenir à généraliser l'emploi du système décimal.
C'est ce à quoi on s'applique depuis la réorganisation de l’enseignement primaire. Le système décimal des poids et mesures est enseigné partout ; des modèles sont déposés dans les écoles. Je crois que par ce moyen on parviendra à la généralisation de ce système.
D'autres honorables membres ont, dans la discussion générale, examiné la question de savoir s'il devait y avoir une inspection générale ou si l'on devait s'en tenir au système actuel de vérification qui n'a de responsabilité vis-à vis de personne. Nous examinerons cette question quand nous en serons à l'article 11$ qui est relatif à l'inspection.
L'honorable M. Lelièvre s'est occupé de la question de savoir quelle juridiction aura à connaître des contraventions à la présente loi. Cette question spéciale devra être traitée aux articles 22 et 23.
Messieurs, je ne crois pas devoir entrer dans plus de développements, nous pourrions borner là la discussion générale. Lors de la discussion des articles, je rencontrerai les observations qui pourront être faites.
M. Magherman. - M. le ministre de l'intérieur vient de faîre quelques observations sur les moyens d'accélérer l'introduction du système décimal.
Je partage la manière de voir de l'honorable ministre, c'est plutôt par la persuasion que par la rigueur qu'on parviendra à introduire le nouveau système ; c'est surtout par la jeunesse qu'il faut chercher à introduire le système légal dans la pratique et c'est au moyen de l'enseignement qu'on pourra le faire pénétrer dans les jeunes générations ; mais il ne faut pas se borner à leur enseigner de la pure théorie, par exemple que le mètre est une mesure de longueur égale à la dix millionième partie de l’arc du méridien terrestre, compris entre le pôle boréal et l'équateur ; les jeunes gens ne comprendraient rien à cet enseignement abstrait.
Il faut autant que possible leur faire comprendre par (page 966) comparaisons avec les anciens poids et mesures, quelle est la valeur réelle du système légal.
Je ferai une autre observation.
L'exemple aussi est efficace pour l'introduction des nouveautés, si l'on peut appeler nouveauté un système que le gouvernement cherche depuis soixante ans à établir. A ce point de vue nous n'avons pas été trop heureux en ce qui concerne l'exemple du commerce. On nous a fait remarquer hier encore que le haut commerce d'Anvers emploie toujours les anciennes dénominations. Il est tout naturel que le commerce inférieur, qui est moins instruit, en fasse de même.
Mais si les exemples, partant de haut, sont contagieux, c'est surtout, au gouvernement à donner l'exemple de la sévérité dans tout ce qui concerne l'application des lois. Or, le gouvernement n'a pas toujours été exempt de reproches à ce point de vue.
Je citerai un exemple.
Dans la convention du 25 avril 1854, conclue entre le gouvernement et le sieur Spiiliaerdt-Caymax sur l'établissement d'un service de bateaux à vapeur entre Anvers et Rio de Janeiro, on lit à l'article premier ;
« Le service se fera par trois et au besoin par quatre navires ayant au minimum des machines de 100 chevaux de force, et une capacité pour marchandises de 500 à 550 tonneaux de 40 pieds cubes, etc. »
Voilà, rigoureusement parlant, en quatre lignes, trois contraventions à la loi.
D'abord, la dénomination de chevaux qui sert généralement à exprimer la force de traction, pourrait trouver son équivalent dans les dénominations légales. Je n'y insiste pas cependant.
En second lieu, l'expression de tonneau ne se trouve pas non plus consacrée par la loi.
En troisième lieu, lorsque le gouvernement, dans cet article, veut donner l'explication de ce qu'il entend par tonneau, pour donner le cube de ce tonneau, à quoi recourt-il ? Est-ce au mètre ? Non, c'est au pied.
Voilà un exemple partant de haut qui n'est pas de nature à encourager l'introduction du système légal.
Je pourrais multiplier les exemples. Je me bornerai à en citer un second que j'ai rencontré dans le tableau littera A de l'état général du matériel de traction du chemin de fer, il est joint au projet de loi par lequel on a demandé un crédit spécial de 9 millions, pour travaux urgents à exécuter au chemin de fer et complément de matériel. (Documents parlementaires, session 1855-1854.)
La dimension des cylindres des locomotives y est désignée en pouces et fractions de pouce. C'est encore évidemment une infraction aux lois.
Je dis, messieurs, que c'est au gouvernement de donner l'exemple de l'observance fidèle et sévère des lois et quand l'exemple partira de haut, le système légal s'infiltrera, à la longue dans les classes inférieures de la société.
Pour le moment je borne là mes observations, me réservant de prendre, s'il y a lieu, la parole dans la discussion des articles.
M. Anspach. - L'exposé des motifs qui nous est présenté par le gouvernement est une belle apologie du système décimal ; il l'explique d'une manière claire, et donne les véritables raisons qui se sont opposées à son entière application, malgré son incontestable utilité. Cet admirable système que nous devons aux premiers savants de l'époque et dont les noms sont connus de tout le monde, les Lagrange, les Monge, les Laplace, les Bertholet, les Legendre, cet admirable système répond à tous les besoins, se prête facilement à tous les calculs, ne laisse place à aucune objection et est assurément une des belles conceptions de notre siècle. L'honorable rapporteur lui adresse quelques reproches, très légers à la vérité, mais qu'il ne mérite pas, même au point de vue auquel l'honorable rapporteur s'est placé ; il dit que les nouvelles mesures s'éloignaient trop des anciennes, que cela a été un obstacle à leur adoption.
Voyons si cela est bien réel ; souvenons-nous que c'est en France, que c'est à Paris que le nouveau système s'établit. Le mètre est la moitié de la toise, le litre est à peu de chose près la pinte de Paris, le kilogramme est une double livre, poids de marc, le franc est, à une fraction près, la livre tournois ; ainsi donc, rapports faciles ou identités presque parfaites, ce n'est donc pas cela qui a fait obstacle à l'adoption des nouvelles mesures ; mais je n'admets pas la convenance de ces rapports ; c'était plutôt un mal ; puisqu'on adoptait un nouveau mode, il fallait rompre tout à fait avec l'ancien ; aussi c'est le hasard qui a fourni ces rapprochements, et les savants auteurs du système n'en sont pas coupables.
Si, après soixante ans, et c'est plus que les deux générations exigées par M. le ministre de l'intérieur pour faire adopter des mesures qui font changer les usages, nous sommes encore si peu avancés dans un exercice général du système, ce n'est pas aux habitudes, à l'esprit de routine qu'il faut seul l'attribuer ; ce sont surtout les hésitations, les tâtonnements, le peu de hardiesse et de persistance des gouvernants qu'il faut accuser. C'est la loi de 1812 qui a fait le plus de mal ; à cette époque, toutes les fabriques de tissus avaient adopté le mètre à la place de l'aune, tout le commerce était donc obligé de les imiter ; arrive la loi du 28 mars 1812, et tout ce que le système avait gagné pendant plus de quinze ans, est radicalement perdu.
C'est donc par la faute des gouvernements que nous ne jouissons pas dans toutes ses parties de cet admirable système décimal ; cela est si vrai que partout et sur tous les objets où il y a des adjudications publiques ou qui sont soumises aux contributions et par conséquent doivent être annoncées en mesures décimales, tout cela est depuis longtemps dans les habitudes du peuple. Entrez dans le premier cabaret venu, vous n'entendrez parler que de litres et demi-litres ; les anciennes dénominations pots, bouteilles, chopinnes sont inconnues. Assistez chez un commissionnaire à la pesée de ballots, ce sont des kilos ; les livres poids de marc sont passées. Allez chez un charpentier, chez un menuisier, chez un ébéniste, commandez n'importe quoi, aussitôt le mètre sort de la poche de l'ouvrier et il vous parle mètre et centimètre, il ne connaît plus le pied, les pouces et lignes d'autrefois. C'est donc le défaut de persistance qu'on doit accuser de la fausse position où nous sommes et dont la présente loi va nous faire sortir ; aussi je l'appuierai de toutes mes forces, me proposant de rejeter toute diminution d'amendes contre les délinquants, ainsi que toute disposition qui tendrait à restreindre l'application de la loi, n'admettant aucune exception.
M. le président. - La parole est à M. Rodenbach.
M. Rodenbach. - J'y renonce.
- La discussion générale est close.
« Art. 1er. Le système métrique décimal des poids et mesures, établi par la loi du 21 août 1816, continue d'être appliqué dans toute la Belgique.
« Les valeurs et les dénominations des mesures comprises dans ce système, sont déterminées dans le tableau ci-annexé. »
- Adopté.
« Art. 2. Le mètre et le kilogramme déposés à la Chambre des représentants, en exécution de la loi du 4 mars 1848, sont les étalons prototypes des poids et des mesures.
« Ces étalons sont conservés dans une armoire fermant à trois clefs, dont l'une est confiée au président du Sénat ; une autre au président de la Chambre des représentants, et la troisième au ministre de l'intérieur. »
- Adopté.
« Art. 3. Les dénominations indiquées dans le tableau dont il est fait mention à l'article premier sont exclusivement employées dans les actes publics, ainsi que dans les affiches ou annonces.
« A partir du 1er juin 1855, l'emploi exclusif en sera également obligatoire dans les actes sous seing privé, registres de commerce et autres écritures privées produits en justice. »
M. le président. - La section centrale propose un troisième paragraphe ainsi conçu ;
« Sont exceptés de cette mesure les actes de commerce relatifs aux affrètements et expéditions pour l'étranger. »
M. Deliége vient de déposer l'amendement suivant :
« Je propose de remplacer le paragraphe 3 par le suivant :
« Sont exceptés de cette mesure ;
« 1° Les actes de commerce relatifs aux affrètements et expéditions pour l'étranger, ainsi que les actes en général dans lesquels on doit faire mention de fonds étrangers, de négociations étrangères ou de biens immeubles situés en pays étranger, ainsi qu'aux actes portant consentement à radiation ;
« 2° la désignation de rentes ou créances résultant d'actes antérieurs à la loi qui a introduit le système décimal en Belgique. »
M. Deliége. - Messieurs, je développerai mon amendement en quelques mots.
Je suppose qu'en étudiant la loi, M. le ministre de l'intérieur aura trouvé la cause de mon amendement dans les auteurs qui ont traité de la matière.
D'abord quant à la désignation de rentes et créances résultant d'actes antérieurs à la loi qui a introduit le système décimal en Belgique, tous les auteurs qui ont écrit sur le notariat disent que les notaires peuvent, quant à ces créances et à ces rentes, insérer dans leurs actes les anciennes dénominations.
Remarquez, messieurs, qu'il ne peut pas en être autrement. Ce serait exagérer le système, et ce n'est pas le moyen de l'affermir dans le pays.
Il y a dans les diverses localités du pays des rentes de toute espèce. Il y en a qui sont constituées en nature, en grains, en froment, en épeautre, en seigle, en monnaie réelle, en monnaie conventionnelle... en florins liégeois, en florins de Brabant, il y en a même qui sont payables en chapons. Il y a eu des contestations à l'égard de la valeur de ces rentes ainsi que de leurs capitaux. Cette valeur a même fait l'objet de procès ; il y a une foule d'arrêts et la jurisprudence a varié. Il faut donc nécessairement que les notaires, comme les particuliers, dans leurs actes, rappellent les anciennes dénominations.
Je viens de dire, messieurs, que les auteurs sur le notariat avaient excepté ces rentes de la règle commune, dans leurs ouvrages. Ainsi un auteur que vous connaissez tous, M. Rutgeerts, de l'université de Louvain, a dit dans son Manuel du droit notarial :
« Enfin pour sortir de tous ces embarras, le ministre des finances de France a pris une décision, le 25 août 1842, qui porte que la loi du 4 juillet 1837 ne s'oppose pas à la reproduction textuelle des anciennes dénominations de poids, mesures et monnaies dans les copies, extraits et analyses d'actes antérieurs que font les officiers publics, pourvu que le notaire indique dans l'acte nouveau qu'en employant les anciennes (page 967) dénominations il analyse l’acte ancien ; une pareille interprétation équitable et sage doit nécessairement être admise en Belgique. »
La disposition que je propose est donc en vigueur en France, quoiqu'elle ne résulte que d'une disposition ministérielle.
J'en viens à l'autre partie de mon amendement.
J'ai ajouté, à la disposition introduite par la section centrale, et qui consiste à excepter les actes de commerce relatifs aux affrètements et expéditions pour l'étranger, j'ai ajouté, dis-je ;
« Et les actes en général, dans lesquels on doit faire mention de fonds étrangers, de négociations étrangères ou de biens immeubles situés en pays étranger, ainsi qu'aux actes portant consentement à radiation. »
Messieurs, les motifs qui militent pour l'adoption de l'amendement de la section centrale, militent également en faveur de cette partie de mon amendement.
J'ajouterai que la nécessité de la disposition que j'ai eu l'honneur de présenter à la Chambre, a été reconnue dans un pays voisin ; l'article 37 de la loi hollandaise du 9 juillet 1848 l'a érigée en loi pour ce pays.
M. Coomans. - Messieurs, nous ne devons inscrire dans la loi que des prescriptions utiles, j'ajouterai même nécessaires, afin de simplifier les choses, afin, aussi, de ne pas fournir aux juges et aux avocats plus de besogne qu'il ne faut.
Je lis dans l'article 3 :
« Les dénominations indiquées dans le tableau dont il est fait mention à l'article premier sont exclusivement employées dans les actes publics, ainsi que dans les affiches ou annonces. »
Je voudrais qu'il ne fût question ici que d’affiches et d'annonces officielles.
Il n'est pas juste d'imposer aux éditeurs des journaux une amende de 15 à 20 fr. chaque fois qu'ils auront laissé insérer, souvent a leur insu, dans leurs feuilles, les dénominations antiques. Qu'il s'agisse des annonces officielles, je le conçois à la rigueur, bien que j'avoue ne pas encore comprendre l'utilité de cette loi avec toutes les rigueurs minutieuses qu'on cherche à y consacrer. J'admets qu'on se serve exclusivement des dénominations officielles dans les annonces officielles ; mais, je le répète, chaque fois qu'il conviendra à un citoyen belge de se servir d'autres dénominations dans les journaux, ainsi qu'à l'éditeur de les imprimer, je ne pense pas qu'il soit juste d'infliger à l'un ou à l'autre une amende de 15 à 20 fr.
De plus, voyez, messieurs, où nous arrivons avec des prescriptions aussi étroites, aussi sévères. Il sera désormais défendu, ce semble (cela résulte de l'emploi du mot « exclusivement »), d'ajouter aux dénominations officielles les dénominations anciennes. Où serait cependant l'inconvénient d'apprendre de temps en temps au public que 100 litres font autant de pots et vice versa ? Pourquoi défendricz-vous à des notaires d'ajouter les mots « pieds » et « pouces » aux mots « mètres » et « centimètres » ? D'après l’article 3, vous défendez à tout jamais l'emploi des mots anciens. Pourquoi ne pas les conserver ne fût-ce seulement que pour ne pas déshabituer entièrement le public des anciens poids et mesures, qu'il sera toujours bon de connaître, quand ce ne serait que pour l'intelligence de l’histoire et des actes publics de nos pères ?
De plus, on ne pourra plus annoncer la mise en vente d'autant de bouteilles de vin. Mais, si on applique à la conversation les pénalités appliquées à la presse, qui de vous ne serait pas mis à l'amende dix fois par jour ? Vous ne pourrez plus entrer dans un restaurant pour y demander une bouteille de vin ; il faudra demander un demi-litre de vin. Vous ne pourrez plus annoncer qu'autant de bouteilles sont en vente à l'entrepôt, chez tel marchand, chez tel particulier ; il faudra se livrer à un travail assez compliqué pour calculer le nombre de litres que réprésente un certain nombre de bouteilles.
- Un menbre. - Nous tolérons la bouteille.
M. Coomans. - C'est déjà une concession.
Je demande une explication à ce sujet. Je demande au gouvernement et à la section centrale quel est le sens qu'on attache au mot « exclusivement », si ce mot exclut l'ajoute des anciens poids et mesures aux dénominations nouvelles ; en second lieu, si les pénalités indiquées à l'article 17 sont applicables à l'insertion, dans les journaux, d'annonces où l'on emploierait les dénominations anciennes. Il me semble que toute difficulté serait levée, si on ajoutait au mot « annonces », à la fin du premier paragraphe de l'article 3, le mot « officielles ».
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Messieurs, un amendement d'une certaine importance a été proposé par l'honorable M. Deliége. A la première vue, cet amendement me paraît pouvoir être accueilli par la Chambre.
En effet, il est fondé sur les mêmes motifs qui ont déterminé le gouvernement et la section centrale à admettre le paragraphe 3, c'est-à-dire que si nous avons toute liberté, quant à la manière d'imposer le système en Belgique, nous devons cependant user de certains ménagements, chaque fois qu'il s'agit des relations extérieures.
Si l'on se montre, sous ce rapport, moins rigoureux pour les actes de commerce, relatifs à l'affrètement, il peut en être de même de tous les actes qui se rattachent à des négociations étrangères, à des affaires traitées avec l’étranger. Je suis donc, sous réserve d'un examen ultérieur, favorable à l'adoption de l'amendement. Toutefois, je pense qu'il serait prudent de le renvoyer à l'examen de la section centrale.
L'honorable M. Coomans propose d'ajouter aux mots « affiches et annonces », le mot « officielles » ; je ne puis me rallier à cette proposition. C'est principalement dans tout ce qui a un caractère de publicité qu'il faut s'attacher à l'usage exclusif des dénominations légales.
Il y a d'ailleurs très peu d'inconvénients à redouter de l'adoption du premier premier de l'article 3 quant aux journaux. Avec un peu d'attention de la part des employés chargés du service des annonces, il sera facile d'éviter les dénominations illégales. Je crois donc que l'honorable M. Coomans s'effraye à tort des amendes qui menacent les directeurs des journaux.
J'insiste là-dessus ; les journaux ont réellement un caractère public ; le système des annonces faites par la voie des journaux constitue en quelque sorte le système de publicité le plus grand qui existe en Belgique ; dès lors si nous usons de tolérance envers les journaux, nous serons entraînés de concession en concession, le but de la loi sera évidemment manqué. Au reste, cette disposition est déjà introduite en France.
Je dirai en terminant qu'il faudra reculer de quelques mois la date à partir de laquelle la loi sera exécutoire ; on pourrait fixer cette date au 1er janvier 1856 ; car le gouvernement, après la promulgation de la loi, aura à rédiger des règlements qui exigeront un temps plus ou moins long.
M. Sinave. - Messieurs, à moins d'explications satisfaisantes, je ne saurais me rallier au troisième paragraphe de l'article 3. Sans excepter de cette mesure les actes de commerce relatif aux affrètements et expéditions pour l'étranger. Le gouvernement s'est rallié à cette proposition. Je ne comprends pas l'utilité de ce paragraphe. Pour tous les actes d'affrètements qui se font dans le pays, il faut maintenir la disposition de l'article 3 présenté par le gouvernement. L'affrètement se fait ordinairement par le courtier de commerce ou par notaire ; si on n'est pas tenu de se servir des dénominations légales et qu'où soit autorisé à se servir de dénominations étrangères, le but de la loi sera manqué.
Les chartes parties de connaissements contiennent la mesure légale, ces actes sont astreints à se servir des dénominations légales ; mais on met à côté la mesure étrangère. Il me semble que le paragraphe nouveau serait dangereux, car ce serait un moyen d'étuder la loi ; si vous adoptez en outre la proposition de M. Coomans et celle de M. Deliége, la loi ne sera pas exécutée avec rigueur.
M. Coomans. - Où est le mal ?
M. Sinave. - Quand on fait une loi, c'est pour qu'on l'exécute. Si vous ne voulez pas qu'on exécute la loi, ne la faites pas. Je préfère le rejet du troisième paragraphe et l'adoption de l'article 3 tel qu'il a été proposé par le gouvernement.
Les chartes parties de connaissements peuvent être produites en justice ; elles doivent contenir des dénominations légales, sauf à mettre en regard les mesures étrangères.
M. Vander Donckt. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour combattre les observations présentées par l'honorable M. Coomans. La Chambre aura à se prononcer si elle veut, oui ou non, de la loi sur les poids et mesures. D'un seul trait de plume la proposition de M. Coomans détruit toute l'économie de la loi. Si la Chambre était disposée à l'adopter, je l'engagerais à cesser toute discussion et j'inviterais le gouvernement à retirer la loi. Ce qui a empêché l'exécution franche de la loi, c'est qu'on a toujours permis d'énoncer les anciens poids et les anciennes mesures pour tout bien ou marchandise à vendre.
C'est l’énonciation de ces anciens poids et de ces anciennes mesures qui a fait qu'on a toujours établi ses calculs sur les anciens poids, sur les anciennes mesures ; c'est là précisément le côté vicieux de ce système. Nous voulons introduire le système décimal, il faut que dans les publications officielles ou officieuses les dénominations du système décimal soient exclusivement employées. J'ai fait partie de la section centrale, il y a été démontré qu'avec ces hésitations et ces tolérances on n'arrivait jamais au but. Il faut adopter l'article 3 tel qu'il est proposé par le gouvernement.
Quant aux observations de M. Deliége, je partage sa manière de voir, je suis disposé à adopter son amendement, il est fondé sur des motifs sérieux et il ne peut nuire à l'exécution de la loi.
Ces actes de renouvellement des actes et contrats devant notaire ne circulent pas dans le public, cela se fait entre particuliers ; d'ailleurs les nouvelles dénominations de poids et mesures seraient consignées à côté des anciennes.
Je crois que tout milite en faveur de l'adoption de l'amendement de l'honorable M. Deliége.
M. Coomans. - Messieurs, je regrette de devoir insister sur mes observations.
Il résulte des explications que vient de fournir l'honorable ministre de l'intérieur que l'amende de 15 à 20 fr. sera perçue chaque fois qu'un journal indiquera les vieux poids et mesures. Je pourrais demander qui payera l'amende, de l'éditeur ou de la personne qui aura fait insérer l'annonce ? Première difficulté.
Mais, messieurs, à quoi bon cette rigueur excessive ? Si le but que nous avions à atteindre était un but social, si la sûreté publique, si un grand intérêt public était en jeu, je comprendrais cette sévérité ; mais nous vivons, nous prospérons, nous progressons depuis des siècles, comme l'Angleterre, avec les anciens poids et mesures, qui d ailleurs se perdent lentement chez nous ; laissons le public se déshabituer peu à peu de ces anciennes dénominations, ne déployons pas un luxe de pénalités vexatoires et nous atteindrons notre but également.
(page 968) Je dois faire remarquer que d'après les explications du gouvernement on ne pourra pas ajouter aux nouvelles dénominations les anciennes. Je ne vois plus là l'intention sérieuse du législateur.
Est-ce que nos anciens poids et mesures sont chose si mauvaise qu'on doive en détruire le souvenir ? ne les enseigne-t-on pas dans les écoles et n'a-t-on pas raison de le faire ? Nos enfants n'auront-ils pas intérêt à être initiés à la connaissance de ces anciens poids et mesures, qui conserveront toujours une valeur historique ?
Pourquoi défendre de les rappeler dans des publications privées ? Laissez faire, ce sera une lecture instructive. Cet article 3 me paraît trop rigoureux.
Si nous votons l'article 3 tel qu'il nous est proposé, je prétends qu'il devient inexécutable.
On ne pourra plus annoncer la mise en vente des vins des maisons mortuaires, on ne pourra plus indiquer le nombre de bouteilles de vin à vendre. (Interruption.) Si vous permettez de se servir de bouteilles pour vendre le vin, vous devez permettre l'emploi des bouteilles et des cruchons pour la bière ; alors vous manquez votre but, vous cessez d'être logiques, vous faites brèche à votre loi, vous ne l'exécutez plus d'une manière rigoureuse, sévère, et vous sacritfez l'honneur de la théorie et des principes dont vous paraissez si fiers.
Ce qui me touche avant tout, c'est la justice, la facilité des relations sociales et individuelles. Prenez-y garde, vous ne pourrez plus vous servir des mois « pinte » et « pot ». A quoi bon cette pruderie ? Je me le demande encore une fois. Nous avons voté la liberté de la presse, nous donnons aux journaux le droit de dire tout ce qu'ils veulent, ce dont je suis loin de me plaindre. Il est permis à la presse de critiquer les institutions nationales et étrangères et toutes les lois que nous portons, d'attaquer à sa guise les hommes et les choses. Mais il est une seule chose qui lui sera défendue ; c'est de se servir des anciennes dénominations des poids et mesures ! Et vous appelez cela la liberté de la presse ! (Interruption.}
Je le dis très sérieusement, nous faisons du despotisme inutile. Pour ma part, je me servirai, lorsque cela me conviendra, des dénominations anciennes, sans pour cela me considérer comme plus mauvais citoyen, comme un homme plus rétrograde que les auteurs du projet de loi.
Je désire de tout mon cœur que les nouvelles dénominations métriques prévalent ; c'est une innovation excellente, mais il y a une infinité d'autres choses que nous désirons faire prévaloir, sans que pour cela nous invoquons l'aide du gendarme ou du percepteur des contributions.
On nous dit que si l'amendement que je propose était adopté, tout le système serait en danger. Mais non ! Avec cet amendement, tous les actes officiels contiendront, pour les poids et mesures, les dénominations prescrites par la loi ; toutes les autorités publiques seront forcées de les adopter. N'est-ce pas déjà beaucoup, surtout lorsque tous les hommes éclairés vous viennent en aide ? Mais parce que les journaux ajouteront les dénominations anciennes aux nouvelles, vous dites que le système et la science seront compromis. Je dis que cette crainte n'a rïen de réel.
J'insiste donc pour qu'on apporte une atténuation à l'article 3.
M. Deliége. - Je ne suis pas l'ennemi de la presse, au contraire. En 1829, lorsque je suis entré dans la vie politique, j'ai déclaré dans une profession de foi que la liberté de la presse était celle qui devait nous être la plus chère de toutes, puisqu'elle était la sauvegarde de toutes les autres.
Je ne puis cependant accepter l'amendement de l'honorable M. Coomans, et voici pourquoi ; Je crois que la liberté de la presse n'exige pas une exception en faveur de la presse. Comment ! les petits industriels, les petits commerçants, les marchands de beurre seront soumis à la loi, devront vendre par kilogrammes, litres et décilitres, et les journalistes pourront insérer dans les journaux d'autres dénominations de poids et mesures ! Evidemment la presse est un enseignement qui doit servir à doter le pays d'un bon système de poids et mesures. Je crois qu'elle doit nous venir eu aide par tous les moyens possibles, et s'abstenir de mentionner les anciennes dénominations
Quant à la deuxième partie de la proposition de l'honorable M. Coomans, qui consiste à dire qu'on pourra mettre les dénominations anciennes à coté des dénominations nouvelles, je crois que par les raisons que vient de donner l'honorable ministre de l'intérieur elle ne peut être admise non plus. Il y a une autre raison, c'est que la législation en vigueur s'y oppose ; car un arrêté royal du 15 décembre 1829 n'a admis cette faculté que pour un an ; or cet arrêté n'a jamais été attaqué par personne ; il est encore en vigueur. Le modifier ce serait faire l'abandon du système décimal ; car l'attention du lecteur se porterait toujours sur les anciennes dénominations et jamais sur les nouvelles.
Je crois donc qu'on ne peut adopter l'amendement présenté par l'honorable M. Coomans.
M. le président. - M. Coomans propose d'ajouter après le mot « annonces » le mot « affiches ».
M. Orts. - J'appuie, pour ma part, très fortement le renvoi à la section centrale des amendements qui viennent d'être présentés.
Je crois qu'il y a deux idées qu'il faut chercher à concilier, et qu'il ne faut pas confondre sous peine de rendre le projet de loi vicieux et de ne pas atteindre le but de la loi qui est de substituer dans l'usage en Belgique les dénominations métriques aux dénominations anciennes.
Quant à la proscription des dénominations anciennes, je serai auss rigoureux que qui que ce soit. Comme l'a fort bien dit tout à l’heure l'honorable M. Vander Donckt, ce n'est qu'en excluant d'une manière rigoureuse et absolue les dénominations anciennes, même leur emploi simultané, que l'on parviendra à généraliser l'emploi des nouvelles dénominations.
Mais il y a une distinction à faire à l'égard de certaines dénominations autres que celles attribuées aux poids et mesures légaux.
Cette distinction, l'amendement de l'honorable M. Deliége et l'amendement de la section centrale, auquel le gouvernement s'est rallié, l'ont entrevue, mais en la formulant d'une façon incomplète ou indécise. Il me paraît nécessaire de s'écarter d'une rigueur absolue, lorsqu'il s'agira d'actes destinés à régler des conventions commerciales de quelque nature que ce soit, entre la Belgique et d'autres pays. Dans ces actes passés avec des étrangers nous serons forcés d'employer quelquefois au moins simultanément les dénominations de poids et de mesures en usage dans le pays du cocontractant, sous peine de n'être point compris ou de rendre les transactions difficiles.
Ainsi, je ne comprendrais pas que l'on exigeât exclusivement l'usage des dénominations légales belges dans des connaissements relatifs à l'expédition de marchandises belges vers l'étranger ou à l'importation de produits étrangers en Belgique. Si l'on ne mentionne pas en même temps dans ces connaissements les poids et les mesures en usage dans le pays avec lequel on traite, les ventes de marchandises sous voile à l'étranger, les assurances seront hérissées d'obslacles et susciteront des retards.
Je ne comprendrais pas davantage qu'un contrat à la grosse constatant un emprunt de piastres à la Havane, ne pût être produit devant les tribunaux belges si l'on ne s'y est exclusivement servi de la dénomination monétaire belge.
Ces contrats peuvent cependant arriver devant la justice belge, et réclamer la sanction de nos tribunaux consulaires.
Dans ces limites et sous ce rapport, l'emploi simultané des poids et mesures étrangers et belges n'offre aucun danger. Jamais il n'amènera, comme l'emploi même simultané des dénominations belges anciennes, de mauvaises habitudes parmi les populations. Jamais les ouvriers de nos manufactures de tissus ne songeront à évaluer la dimension des pièces d'étoffe par yards ; nos paysans ne vendront jamais leurs grains par tchetwerts de Russie. Mais il peut être utile au commerce de compter ainsi pour faciliter les relations internationales.
Les amendements de M. Deliége et de la section centrale ne parlent que de certains actes commerciaux et d'expéditions pour l'étranger.
La faculté réciproque est bien plus nécessaire encore, c'est-à-dire la faculté d'employer les mêmes dénominations dans les actes, par exemple, faits à l'étranger pour être exécutés en Belgique.
M. Delfosse. - Il n'est pas nécessaire de dire cela dans la loi.
M. Orts. - Pardonnez-moi ; ces actes peuvent être produits devant les tribunaux belges, et l'article 3, tel qu'il est rédigé, les atteindrait.
Je crois qu'il serait bon d'examiner mûrement cette idée de manière à l'introduire dans la loi avec ie plus d'exactitude possible, sans toutefois lui donner une extensiou dangereuse.
Je ne vois pas d'inconvénient à l'amendement de l'honorable M. Deliége concernant les rentes et redevances anciennes créées dans le pays.
Quant à l'amendement de l'honorable M. Coomans, il ne me paraît pas pouvoir être accueilli.
Les dangers que l'honorable membre a signalés comme le déterminant à faire cette proposition, sont purement imaginaires, ils n'ont rien de sérieux.
L'honorable M. Coomans craint de ne pouvoir plus annoncer la vente d'une centaine de bouteilles de vin trouvées dans une succession, dans une maison mortuaire. Il craint qu'on lui enlève le droit de demander dans un estaminet un verre de bière. L'honorable M. Coomans se trompe. Ni les verres ni les bouteilles ne sont des mesures. La preuve que ce ne sont pas des mesures, c'est que je défie l'honorable M. Coomans de me traduire en litre et fraction de litre la quotité uniforme de liquide que contiendrait une bouteille. Après la loi comme avant, l'honorable M. Coomans, qu'il se rassure, pourra, sans payer la moindre amende, demander au restaurant sa bouteille de vin, voire même une demi-tasse et un petit verre.
M. de Theux. - Si je comprends bien le sens de la loi, les dénominations nouvelles devront être exclusivement appliquées là où il est possible de les appliquer. Mais je pense, avec l'honorable M. Orts, que quand il sera impossible d'appliquer une dénomination légale, on ne pourra être exposé à une amende, parce qu'à l'impossible nul n'est tenu.
Ainsi, comme il n'est pas défendu de fabriquer des bouteilles d'une contenance autre que celle du litre, du demi-litre, ou du décilitre, que l'on peut en fabriquer de telle contenance qu'on le juge à propos, qu'il est légal d'en posséder, il doit être aussi légal de les annoncer et de les vendre. On ne peut annoncer pour pour un litre de vin une bouteille qui en contient plus ou moins.
La même observation s'applique aux tonneaux, car les tonneaux qui sont dans le commerce ne sont pas des tonneaux métriques, qui soient poinçonnés de manière qu'on puisse leur appliquer rigoureusement les dénominations légales que la loi consacre.
Sous cette réserve, je suis aussi d'avis qu'il faut employer, même dans (page 969) les annonces de journaux comme dans les cotes des bourses de commerce, les dénominations légales. C'est le moyen le plus sûr de les populariser et de les faire passer finalement dans les habitudes.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Messieurs, il est évident qu'il s'agit d'entendre la loi d'une façon rationnelle. La loi ne concerne que les poids et mesures ; c'est-à-dire que tout ce qui n'est que récipient, qui n'est pas mesure, qui ne répond pas officiellement à une quantité déterminée, peut librement être employé et dénommé comme on le voudra.
Ainsi l'on pourra, comme vient de le faire observer l'honorable M. Orts, continuer d'annoncer la vente de tant de bouteilles de vin, la bouteille n'étant pas une mesure légale, n'étant qu'un récipient.
La même réflexion s'applique aux tonneaux.
Quant à l'emploi exclusif des dénominations légales, je crois qu'il est indispensable d'y tenir. Pourquoi, dit l'honorable M. Coomans, exiger qu'à côté des dominations légales on ne puisse indiquer les dénominations anciennes ? Faut-il effacer jusqu'au dernier souvenir de ces dénominations anciennes ? Je crois que oui ; car il faut détruire des habitudes invétérées. Si donc vous voulez faire passer dans l'usage les dénominations métriques officielles, il faut mettre hors d'usage les dénominations anciennes.
Quant aux annonces, je ne puis me rallier à la proposition de l'honorable M. Coomans. Il est certain que c'est surtout dans toutes les pièces qui ont un certain caractère de publicité qu'il faut habituer le peuple à ne plus trouver que les dénominations métriques. Or, le plus grand moyen de publicité, celui qui est le plus sous les yeux des citoyens, c'est le journal.
C'est donc là qu'il faut s'attacher à ce que désormais on ne rencontre plus que des dénominations officielles.
Il pourra, peut-être, dans les premiers temps en résulter quelques inconvénients. Mais avec un peu de prudence, un peu de circonspection de la part des employés des journaux, ces inconvénients seront facilement évités.
M. le président. - Persiste-t-on à demander le renvoi des amendements à la section centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - D'après les observations que vient de présenter l'honorable M. Orts, je persiste à croire qu'il serait bon de renvoyer l'amendement de l'honorable M. Deliége à la section centrale.
M. le président. - Dans ce cas rien ne s'oppose à ce que celui de M. Coomans lui soit également renvoyé.
- Le vote sur l'article 3 est réservé.
« Art. 4. Il est défendu de posséder ou d'employer des poids et mesures autres que ceux établis par la loi.
« Cette défense s'applique partout où les transactions exigent l'emploi de poids et mesures.
« Elle s'étend également à tous les lieux où les poids et mesures sont la base de perceptions à charge des particuliers. »
M. le président. - La section centrale propose la rédaction suivante :
« Il est défendu de posséder ou d'employer des poids et mesures autres que ceux établis par la loi.
« Cette défense s'applique partout où les poids et mesures sont employés aux transactions ou servent de base à des perceptions à charge des particuliers.
« Elle n'est pas applicable aux vases en verre et en poterie à l'usage des consommateurs dans les lieux où l'on vend à boire. »
M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-il à l'amendement de la section centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Je me rallie à l'esprit de cet amendement, mais, pour la forme, je crois que ce dernier paragraphe devrait être reporté à l'article 6.
Messieurs, j'approuve la pensée qui a engagé la section centrale à déclarer que la défense d'employer des poids et mesures non poinçonnés n'est pas applicable aux vases en verre et en poterie à l'usage des consommateurs dans les lieux où l'on vend à boire.
Mais je crois qu'il est impossible de placer cette disposition là où la section centrale a trouvé bon de la placer. L'article 4, paragraphe premier, consacre le principe général de la défense absolue d'employer d'autres mesures que celles prescrites par la loi, on ne peut ensuite renverser, dans le même article, ce principe général. Il ne faut de privilège pour personne ; il faut maintenir au principe toute son unité, toute son uniformité.
Je crois donc qu'il vaudrait mieux de dire à l'article 6 ; « Ne seront pas considérés comme mesures les vases en verre et en poterie à l'usage des consommateurs. »
M. Vander Donckt. - En section centrale j'avais proposé une restriction à cet article, quant aux poids et mesures qui se trouveraient dans des cabinets que posséderaient des personnes qui tiendraient à avoir des collections d'anciens poids et mesures. L'on m'a fait observer que la loi devait être entendue dans ce sens que celui qui posséderait ces anciens poids et mesures sans en faire usage, ne pourrait être exposé à une amende. Si c'est ainsi que la Chambre comprend l'article, je n'ai pas d'amendement à proposer. Mais dans le cas où l'on pourrait être exposé à une amende pour la simple possession d'anciens poids et mesures, je devrais proposer une exception par forme d'amendement à cet article 4.
M. de La Coste. - Messieurs, je dois vous soumettre une observation en ce qui concerne le dernier paragraphe de la proposition de la section centrale. Vous pouvez fort bien faire un litre en poterie ou en verre, parce qu'on ajoute une marque indiquant jusqu'où le liquide doit venir ; ce sont des vases que vous pouvez jauger. Mais comment pourriez-vous jauger les bouteilles, les cruchons, les tonneaux ? On peut les jauger, mais on ne peut pas leur donner une capacité déterminée d'avance. Il faut donc là une tolérance.
- L'article 4 est adopté, avec la modification proposée par M. le ministre de l'intérieur.
« Art. 5. Les dispositions sur le système décimal des poids et mesures seront applicables aux poids médicinaux immédiatement après la publication de la nouvelle Pharmacopée. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Je demanderai que la Chambre veuille bien surseoir à l'adoption de l'article 5 jusqu'à ce que les autres articles aient été votés. J'ai reçu aujourd'hui une réclamation de l'autorité médicale. Il paraît que les anciens médecins surtout auront de la peine à s'habituer aux poids décimaux. C'est là une question vitale ; nous sommes tous intéressés à ce que les prescriptions médicinales ne soient pas faussées. Je désire donc avoir le temps d'examiner s'il ne faut pas user ici d'une certaine tolérance.
- La proposition de M. le ministre de l'intérieur est adoptée.
« Art. 6. Les poids, mesures et instruments de pesage nouvellement fabriqués sont vérifiés et poinçonnés avant d'être exposés en vente ou livrés au commerce. »
M. le président. - La section centrale propose de dire :
« Les poids, mesures et instruments de pesage sont vérifiés et poinçonnés ayant d'être exposés en vente ou livrés au commerce. »
Le gouvernement se rallie-t-il à la proposition de la seelion centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Oui, M. le président.
M. le président. - M. le ministre de l'intérieur a proposé un paragraphe additionnel ainsi conçu :
« Ne seront pas considérés comme mesures les vases en verre et en poterie à l'usage des consommateurs. »
- L'article 6, tel qu'il est rédigé par la section centrale, est adopté avec le paragraphe additionnel proposé par M. le ministre de l'intérieur.
« Art. 7. Les poids et mesures présentés à la vérification, mis en vente ou employés dans le commerce, portent, d'une manière distincte et lisible, le nom qui leur est affecté dans la nomenclature systématique, ainsi que le nom ou la marque du fabricant.
« Les instruments de pesage portent également le nom ou la marque du fabricant.
« Une disposition royale pourra excepter de l'exécution de ces prescriptions les poids et mesures dont les dimensions ou la matière ne s'y prêteraient pas. »
M. le président. - La section centrale propose la rédaction suivante :
« Les poids et mesures présentés à la vérification, mis en vente ou employés dans le commerce, portent d'une manière distincie et lisible le nom qui leur est affecté dans la nomenclature systématique, ainsi que le nom ou la marque du fabricant ou du vendeur.
« Les instruments de pesage portent également le nom ou la marque du fabricant ou du vendeur.
« Un arrêté royal pourra excepter de l'exécution de ces prescriptions les poids et mesures dont les dimensions ou la matière ne s'y prêteraient pas. »
M. le président. - M. le ministre se rallie-t-il à la proposition de la section centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Oui, M. le président.
- L'article 7 est adopté tel qu'il est proposé par la section centrale.
« Art. 8 (nouveau proposé par la section centrale). Les instruments dont il aura été fait emploi avant la publication de la présente loi seront vérifiés et poinçonnés dans un délai à fixer par arrêté royal.
« Ils ne devront porter ni le nom ni la marque du fabricant ou du vendeur. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Je me rallie à cette proposition.
- L'article est adopté.
« Art. 8. Les poids et mesures sont soumis à une vérification périodique. Ceux qui en sont susceptibles sont chaque fois maqués d'un poinçon qui en garantit l'exactitude.
« Sont exempts de la vérification périodique les poids et mesures non encore en usage, ainsi que les mesures en verre ou en poterie. »
M. le président. - La section centrale propose l'adoption de cet article.
M. Van Overloop. - Par suite de l'adoption du paragraphe additionnel proposé par M. le ministre de l'intérieur à l'article 6, il me semble qu'il y aurait lieu à retrancher de l'article 8 les derniers mots ; « Ainsi que les mesures en verre ou en poterie. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Il faut distinguer, messieurs, les « mesures » en verre ou en poterie, des « vases » en verre et en poterie qui servent à la consommation dans les lieux où l'on sert à boire. Ces derniers sont de simples récipients ; ce ne sont pas des mesures.
(page 970) Cependant, le règlement qui sera fait en exécution de la loi, exigera qu'il y ail dans chaque lieu de consommation des mesures en verre et en poterie qui puissent servir à contrôler les récipients dont il s'agit. Il y aura donc encore des mesures en verre et en poterie pour mettre le consommateur à même de vérifier la quantité de boisson qu'on lui sert.
- L'article est adopté.
« Art. 10 (9 du projet primitif). A partir du 1er juin 1857, les futailles employées à la vente des boissons, liquides ou autres matières, porteront la marque du vendeur et l'indication de la contenance en mesures décimales.
« Sont exceptées de cette disposition les futailles provenant directement de l'étranger.
« Les marques prescrites ci-dessus seront apposées par les soins du vendeur, et sous sa responsabilité. »
M. Allard. - Messieurs, à aucune époque les futailles servant à la vente des liquides n'ont été poinçonnés ; il y aurait de grands inconvénients à admettre cette disposition. Il faudrait que toutes les futailles fussent marquées et portassent l'indication de leur contenance ; eh bien, chacun sait qu'au bout d'un an ou deux une futaille est diminuée de 2, 3 ou 4 litres. Ainsi à Tournai, ordinairement les brasseurs font fabriquer des tonneaux de 152 litres et plus tard ces tonneaux ne contiennent plus que 150 ou 149 litres. Les futailles dont se servent les cultivateurs pour venir acheter le purin dans les villes devraient aussi être marqués. Je ne sais jusqu'à cela pourrait nous conduire.
La bière est une boisson de faible valeur, et quand un particulier a eu pendant quelques années des futailles neuves il a reçu un certain nombre de litres de bière en plus. Au bout de quelques années, il y a peut-être un ou deux litres de moins par le rétrécissement des douves ; il y a donc compensation.
Jamais dans aucun pays, les futailles n'ont été marquées. Je crois que le gouvernement ne devrait pas tenir au maintien de cet article. J'en demande la suppression.
M. Moreau. - Je considère la mesure prescrite comme bonne et de nature à prévenir bien des fraudes.
Il n'est, en effet, pas rare de voir des marchands ou des fabricants vendre des boissons dans des tonneaux ou futailles d'une contenance moindre que celle qui est déterminée par l'usage dans certaines localités et de cette manière faire une concurrence ruineuse à d'autres fabricants de bonne foi.
Des brasseurs ne partagent pas l'opinion de l'honorable M. Allard, puisqu'ils se sont adressés à la Chambre pour lui demander de prendre des mesures pour détruire les abus qu'ils signalent.
Les chambres de commerce et les administrations des villes ont été pour ainsi dire unanimemeut d'avis qu'il fallait étendre aux futailles le système des mesures décimales. Seulement elles ont pensé que, dans la pratique, ou ne pouvait exiger que tous les tonneaux cusscut une capacité uniforme métrique.
Quant aux craintes exprimées par l'honorable M. Allard et provenant de ce qu'il est difficile de jauger exactement les futailles et de ce que leur capacité est sujette à diminuer par le rétrécissement des douves, elles ne me paraissent pas fondées, car l'exposé des motifs du projet de loi porte que dans les règlements d'exécution de la loi ou permettra d'user de certaines tolérances dans le jaugeage de ces \aisseaux.
M. Allard. - Il faudra donc que tous les tonneaux servant au transport des vidanges soient poinçonnés, il sera en conséquence nécessaire que les cultivateurs aillent les faire marquer de nouveau de temps en temps ; sinon, ils courront risque d'être mis en contravention, et de payer une amende de 15 francs, lorsque le tonneau sera diminué de quelques litres. La disposition dont je demande le retranchement n'a aucune importance, elle n'a d'ailleurs jamais été en vigueur nulle part.
- L'article 9, accepté par le gouvernement, tel qu'il est modifié par la section centrale, est mis aux voix et adopté.
M. Allard. - Messieurs, permettez-moi de présenter une observation, quant à la date mentionnée dans l'article 9 qui vient d'être adopté. Cette date est le 1er juillet 1857 ; je crois qu'il faut la reculer de quelques années. J'en fais la proposition.
M. le président. - Il est entendu que la section centrale examinera cette proposition, en même temps que les autres amendements qui lui ont été renvoyés.
« Art. 10. Il y a, dans les provinces, des fonctionnaires chargés de vérifier et de poinçonner les poids, mesures et instruments de pesage. Ils portent le titre de vérificateurs et vérificateurs-adjoints des poids et mesures.
« Ces agents sont nommés par le Roi. »
M. le président. - M. de Perceval a présenté à cet article l'amendement ci-après :
« Les fabricants sont autorisés à faire ajuster leurs poids et leurs balances dans les bureaux du vérificateur, sans qu'aucune rétribution puisse leur être réclamée de ce chef. »
M. Frère-Orban. - Mais l'article 9 est-il voté ?
- Un membre. - Oui.
M. Frère-Orban. - Le vote a passé inaperçu, l'honorable M. Allard avait présenté des objections très importantes qui n'ont pas été contredites.
M. le président. - Pardon ; M. le rapporteur a répondu à M. Allard ; M. Allard a ensuite répliqué, personne n'a plus réclamé la parole et c'est alors seulement que j'ai mis aux voix l'article qui a été adopté par assis et levé.
Si on ne demande pas qu'on revienne sur l'article 9 (silence), j'accorde la parole à M. de Perceval pour développer l'amendement qu'il a présenté à l'article 10.
M. de Perceval. - L'amendement, ou, pour mieux dire, le paragraphe additionnel que je propose à cet article, a pour but de permettre aux fabricants des poids et mesures de faire ajuster leurs poids et leurs balances dans les bureaux des vérificateurs sans qu'aucune rétribution puisse leur être réclamée de ce chef. Il importe d'insérer cette prescription dans la loi, car il existe, sous l'empire de la législation actuelle sur la matière, de graves abus qui provoquent à juste titre des plaintes très vives de la part des fabricants.
Des vérificateurs refusent tous les ans, à chaque nouveau poinçonnage, la plupart des poids qui leur sont présentés, et cela sous le prétexte que ces poids sont trop légers. Et pourquoi agissent-ils de la sorte ? Uniquement pour forcer les intéressés à soumettre les poids et les balances à un nouveau rajustage.
Ces faits que je signale, et qui sont réels, méritent à tous égards la plus sérieuse attention de la législature.
Avant l'application de la loi de 1836, les fabricants des poids et mesures pouvaient faire ajuster leurs poids dans les bureaux du vérificateur par un de leurs ouvriers, sans autres frais que certains droits prélevés par l’Etat, droits sur lesquels les fonctionnaires dont il s'agit avaient une remise de 5 p. c. Ces droits ont été abolis dans l'intérêt des contribuables, mais ils sont maintenant prélevés d'une manière détournée par les vérificateurs et à leur profit exclusif.
Ainsi, ces agents ne se contentent pas seulement du traitement qui leur est alloué par le gouvernement ; ils trouvent encore l'occasion de battre monnaie au grand détriment de la bourse de ceux qui doivent subir leur contrôle.
C'est là un très grave abus, et nous devons le faire disparaître.
Mais, objectera-t-on peut-être, pourquoi les fabricants n'ajustent-ils, pas dans leurs ateliers les poids et les balances qu'ils y confectionnent ?
Je réponds que cette opération est matériellement impossible, parce que les balances des vérificateurs sont tellement subtiles et délicates qu'il y a toujours une oscillation quelconque, une différence quelconque, et que, partant, on trouve continuellement le moyen de rejeter un poids soumis au contrôle du vérificateur.
Du reste, cette conduite de certains vérificateurs avait attiré également l'attention de plusieurs de nos honorables collègues, lorsque le projet de loi en discussion a été examiné dans les sections.
En effet, je lis dans le rapport de la section centrale, « que des membres de la première section se sont plaints de ce que des vérificateurs trouvent des poids trop légers ou trop pesants dans le but de réaliser un bénéfice sur le rajustage. »
En insérant dans la loi le paragraphe additionnel que j'ai l'honneur de vous proposer, messieurs, vous aurez d'un côté sauvegardé des intérêts nombreux et respectables, et de l'autre, détruit un abus dont on ne saurait contester la gravité.
M. Moreau. - L'honorable M. de Perceval demande que les fabricants soient autorisés à faire ajuster leurs poids et leurs balances dans les bureaux du vérificateur, sans qu'aucune rétribution puisse leur être réclamée de ce chef.
Je crois, messieurs, que déjà sous le régime des lois actuellement en vigueur les assujettis peuvent faire ajuster leurs poids par une personne tierce lors de la vérification, sans payer aucune rétribution au vérificateur, puisque celui-ci ne se livre à aucun travail ; il me paraît donc qu'il n'est pas nécessaire d'insérer l'amendement dans la loi.
Mais comme il y a des abus, je pense qu'il suffirait d'introduire une disposition analogue dans le règlement à prendre en exécution de l'article 23.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Il est possible que les abus signalés par l'honorable député de Malines existent. Le paragraphe additionnel qu'il propose à l'article 10 pour les faire cesser, figurerait mieux dans le règlement qu'il faudra rédiger en exécution de la loi. Je prends volontiers l'engagement de tenir compte, lors de l'adoption de ce règlement, des observations de l'honorable membre.
M. de Perceval. - Puisque M. le ministre de l'intérieur prend l'engagement formel d'insérer la disposition que j'ai proposée dans les instructions qu'il aura à transmettre aux fonctionnaires chargés du service des poids et mesures, je n'ai plus à insister, car mon but est atteint, et dès lors je retire mon amendement.
- L'amendement est retiré.
L'article 10, tel qu'il est proposé, est mis aux voix et adopté.
« Art. 11. Le service des poids et mesures est placé sous la surveillance d'un inspecteur.
« Ce fonctionnaire est aussi nommé par un arrêté royal, qui règle ses attributions. »
M. le président. - (page 971) La section centrale propose la suppression de cet article.
M. Moreau. - Messieurs, la section centrale a supprimé l'article 11, d'abord parce qu'elle n'a pas reconnu l'utilité d'un inspecteur, et en second lieu parce qu'elle n'aime pas la création d'un nouvel emploi qui grèvera encore le trésor public.
Dans son opinion il y a déjà en Belgique assez d'inspecteurs sans encore en augmenter le nombre. Il est temps, ce lui semble, de s'arrêter dans cette voie, qui toujours occasionne peu à peu de nouvelles dépenses pour le trésor.
Si l'on nomme un inspecteur, il est à craindre que dans peu on ne lui adjoigne un sous-inspecteur, des commis, et puisqu'il ne lui soit alloué des frais de bureau, etc.
Aujourd'hui, messieurs, les vérificateurs sont placés sous la surveillance du gouvernement et du commissaire d'arrondissement.
Ces fonctionnaires peuvent très bien contrôler les actes administratifs des vérificateurs, et s'il leur manque les connaissances nécessaires pour vérifier certaines opérations concernant le matériel du service, rien n'empêche que le gouvernement ne délègue de temps à autre un homme compéleni pour s'assurer qu'il est en bon état.
Depuis 1816, tant sous le régime hollandais que sous le gouvernement actuel, on a pu se passer d'inspecteur sans inconvénient, il faut bien le reconnaître, puisqu'on est resté si longtemps sans que le besoin d'un fonctionnaire semblable se soit fait sentir ; il y a même plus, on avait nommé à Anvers des contrôleurs de jauge des navires et ces emplois ont été supprimés il y a quatre à cinq ans.
Je ne sache pas non plus qu'en Hollande il y ait un inspecteur des poids et mesures.
En France la vérification des poids et mesures est faite sous la surveillance des préfets et sous-préfets, par des agents nommés et révocables par le ministre de l'agriculture et du commerce ; les vérificateurs sont de plus sous la surveillance des procureurs du roi.
Mais en France pas plus qu'en Hollande il n'y a d'inspecteur des poids et mesures, du moins ni les règlements ni la loi n'en font aucune mention. Pourquoi en Belgique créerions-nous ce nouvel emploi dont l'utilité n'a pas été reconnue dans les pays voisins où le système de poids et mesures semblable au nôtre est eu vigueur ?
Pourquoi établir une inspection dont on n'a pas reconnu la nécessité pendant cinquante ans et plus, si ce n'est peut-êlre pour donner de l'avancement à quelque employé ?
Si l'on a des vérificateurs capables et instruits, il sera rarement nécessaire d'inspecter et de vérifier leur matériel, opération, du reste, assez simple et peu compliquée qui se fait chaque année à Bruxelles en présence d'une commission nommée par le ministre ; voilà déjà, messieurs, une inspection du matériel et une inspection plus efficace que celle qui serait faile par un seul homme.
J'ai été un peu surpris d'entendre l'honorable M. Rodenbach, lui ordinairement si avare des deniers du trésor, demander vivement le maintien de l'article 11.
Je ne sais trop comment il a constaté, d'une manière spéciale, la nécessité de cette inspection et pourquoi il le défend avec tant de chaleur.
Je sais qu'il a dit que tout en Belgique devait être inspecté pour bien marcher ; mais à ce compte, si vous adoptez le système de l'honorable membre, quoiqu'il n'y ait pas mal d'inspecteurs dans le pays, vous devez vous attendre à grossir encore vos budgets de dépenses assez considérables, et je doute fort que le pays soit très satisfait de semblables mesures.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Il est évident, pour qui a examiné de près l'état actuel des choses en fait de poids et mesures, que ce service manque aujourd'hui d'ensemble et d'unité. En principe, il est difficile de concevoir une administration sans chef, sans unité de direction et de surveillance ; il me semble que le mot « administration » répugne presque à l'incohérence et à l'arbitraire qui semblent régner dans ce service.
Ce service est placé, il est vrai, sous le contrôle des gouverneurs de province ; mais on comprend qu'il est impossible que des fonctionnaires de cette importance descendent à des détails de la nature de ceux que comprend la vérification des poids et mesures.
Au reste, le fait est là ; aujourd'hui ni gouverneurs ni commissaires d'arrondissement ne s'occupent et ne peuvent s'occuper avec fruit du contrôle de ce service. Aussi ce contrôle n'existe-t-il pas. Que résulte-t-il de là ? C'est qu'il y a absence complète de principes dirigeants ; et quant à ceux qui existent, éparpillés dans une foule de règlements, chaque vérificateur csl pour ainsi dire maître de les interpréter et de les appliquer selon ses convictions ou ses convenances personnelles.
Aussi remarque-t-on dans l'application des lois et règlements sur les poids et mesures une bigarrure dont on ne peut pas se faire d'idée. Les étalons ne sont ni uniformes dans tous les bureaux, ni même exacts. Le rajustage donne lieu à beaucoup de difficultés. Ici, l'on permet l'adjonction du plomb aux poids, on ne la tolère pas ailleurs.
En compulsant les documents de l'administration centrale j'ai pu constater l'impossibilité d'introduire l'unité dans un service qui en a un si grand besoin ; il n'y a pas de sanction. Remarquez ensuite que ce manque d'unité n'existe pas seulement pour les opérations matérielles de vérification, mais aussi pour la jurisprudence administrative ; il y a là la plus grande latitude laissée à l'arbitraire. L'absence de contrôle engendre encore l'apathie ; le zèle des vérificateurs n'est jamais stimulé. De plus il y a manque complet de garantie pour les assujettis à la vérification ; nul appel, nul recours contre la décision du vérificateur, de manière que d'une part les fabricants de poids et mesures et d'autre part les détaillants qui se servent de poids sont livrés pour ainsi dire à l'arbitraire du vérificateur.
Cet état de choses doit cesser sous peine de rendre inutiles tous nos efforts pour améliorer le service de la vérification des poids et mesures. Le gouvernement a proposé de placer ce service sous la surveillance d'un inspecteur. Le moyen proposé est-il efficace, est-il le seul admissible ? C'est la question à examiner. Toujours est-il qu'il faut une direction unique, au moyen d'une surveillance à établir ; car il est indispensable d'imprimer au service des poids et mesures une impulsion uniforme. Il est donc rationnel de désigner un fonctionnaire qui soit chargé de ce soin.
On redoute, et à bon droit fort souvent, la création de nouveaux fonctionnaires. Mais celui-ci serait-il nouveau ? Il y a toujours eu un vérificateur en chef qui avait pour mission de remplir le rôle d'inspecteur. Le gouvernement a créé ces fonctions de vérificateur en chef, à l'époque où ce service ressortissait au département des finances. Depuis que le service des poids et mesures est passé au département des finances, on n'a pas désigné de vérificateur en chef ; mais on peut dire que la fonction existe encore ; seulement il n'y a pas, pour le moment de titulaire.
Yatl-il lieu de s'applaudir de l'absence d'un vérificateur en chef ou d'un inspecteur ? On n'a qu'à y réfléchir. On croit pouvoir se passer d'un inspecteur en chargeant de cette inspection les contrôleurs des contributions. Mais, en pratique, cela est impossible. Cela est si vrai qu'à l'époque où l'administration des poids et mesures était rattachée au département des finances, les fonctionnaires les plus élevés de ce département reconnaissaient eux-mêmes l'insuffisance de la surveillance telle qu'elle se pratiquait à cette époque.
Ils disaient qu'il était impossible de maintenir ces attributions à des contrôleurs, parce que ceux-ci ne possédaient pas les connaissances nécessaires pour les remplir. J'ai entre les mains un document d'où il résulte qu'un directeur à l'administration des finances proposait, en 1848, qu'un fonctionnaire spécial fût chargé, pour tout le royaume, de contrôler les opérations des vérificateurs, ce qui n'avait jamais pu être fait efficacement jusqu'alors, à défaut de connaissances spéciales chez les contrôleurs en général.
Il est donc établi que la fonction d'inspecteur ou de vérificateur en chef des poids et mesures n'est pas aussi nouvelle qu'on veut bien le dire, puisque déjà elle a existé.
On semble croire qu'une pareille fonction serait inutile. Mais c'est aller à l’encontre de tous les principes en matière d'administration ; c'est se refuser à l'évidence des faits. Ainsi que je l'ai prouvé tout à l'heure, non seulement cette fonction n'est pas inutile, mais elle est nécessaire ; et la création en est urgente, si l'on veut établir un peu d'ensemble, un peu d'unité dans le service des poids et mesures.
Ce qui fait qu'on recule devant la création de cette nouvelle fonction, c'est la dépense. Mais, si la surveillance d'un fonctionnaire supérieur et spécial est indispensable, et ce point est incontestable, que veut-on faire pour éviter une dépense nouvelle ? Charger de cette surveillance les contrôleurs de l'administration des finances ? Mais ce serait se jeter dans des dépenses beaucoup plus élevées qu'on ne le croit au premier abord.
En effet, pour surveiller les vérificateurs, il faudrait fournir à chaque contrôleur des modèles des instruments nécessaires à cette surveillance.
De plus, il serait impossible de donner de nouvelles attributions à ces contrôleurs déjà chargés de besogne, sans que, d'ici à quelque temps, il fallût sous la forme d'indemnité, ou sous toute autre forme, augmenter leur traitement.
Cette augmentation, si minime qu'elle fût, dépasserait bientôt la dépense qu'occasionnerait l'établissement d'un inspecteur.
Messieurs, je n'ai aucun motif pour demander la création de cet emploi, je suis fort indifférent au prétendu avantage d'avoir un fonctionnaire à nommer ; mais ce qui ne m'est pas indifférent, c'est le maintien de l'état actuel du service des poids et mesures. Encore une fois, il importe qu'il soit changé. Vous ne pouvez exiger que les gouverneurs et les commissaires d’arrondissement descendent à ces détails ; cela est de toute impossibilité.
Il faut donc organiser un contrôle sérieux. Si vous voulez qu'il soit sérieux, il faut qu'il soit exercé par une personne possédant des connaissances spéciales ; et ainsi, les frais de ce contrôle seront moins élevés que s'il était exercé par les contrôleurs du département des finances.
M. Deliége - En section centrale, j'ai voté contre la création d'un nouveau fonctionnaire à charge du budget, d'un nouvel inspecteur du service des poids et mesures.
J'ai ouï dire par un honorable ministre, qui n'était pas suspect de manquer à la vérité.... (Interruption.) Tous les ministres disent la vérité, et je ne veux pas dire que l'honorable ministre de l'intérieur ait dit un mensonge, cela est très loin de ma pensée. Mais ce ministre disait qu'avec les trois cinquièmes du personnel du département de (page 972) l'intérieur il se faisait fort de faire par abonnement tout ce qui s'y fait. Je crois donc inutile d'augmenter le personnel de ce département.
De quoi s’agit-il ? De 26 vérificateurs. Que font-ils ? On remet à chacun d'eux des étalons qu'ils doivent envoyer chaque année au ministère de l'intérieur pour y être vérifiés. Chaque commerçant peut faire vérifier ses poids et mesures soit au chef-lieu, soit lors des tournées que les vérificateurs font dans chaque commune. Quel abus peut-il se commettre alors ? Il ne peut y avoir que celui signalé par l'honorable M. de Perceval. Je sais que, dans certaines provinces, on se plaint de ce que les vérificateurs prétendent souvent qu'il y a des réparations à faire aux poids et mesures. Je crois qu'il faudrait leur interdire sévèrement de faire ces réparations et même d'indiquer les personnes qui les font. Voilà, messieurs, le seul abus dont on se plaint. Je crois qu'il n'y en a pas d'autres.
Quant à la vérification chez les industriels et les commerçants, pour s'assurer qu'ils ne se servent que de poids et mesures poinçonnés, elle se fait, comme vous le savez, par les employés de l'administration des accises.
On veut qu'il y ait un inspecteur pour tout le royaume. Je demande ce qu'il inspectera ! Je crois qu'il est inutile de créer une nouvelle place ; je crois qu'il y en a assez en Belgique. Il vaudrait mieux en avoir moins et les rétribuer mieux.
M. de Perceval. - Contrairement à l'opinion émise par l'honorable ministre de l'intérieur, je suis d'avis qu'au lieu d'augmenter le personnel de ce service, il convient plutôt de le diminuer.
Nous comptons actuellement 25 ou 27 vérificateurs des poids et mesures. Ce chiffre est trop élevé quand je considère le faible travail qui leur incombe. Ils ne sont réellement et sérieusement à la besogne que pendant six semaines à deux mois. Je pense qu'il serait préférable de n'avoir qu'un seul vérificateur par province ; il serait occupé pendant les douze mois de l'année ; ses opérations, son service se feraient avec plus d'ordre, de régularité ; et n'ayant pas, comme aujourd'hui les vérificateurs, neuf ou dix mois de repos, il ne songerait pas, comme ces derniers, à vexer, à molester nos concitoyens.
La simplification de ce rouage administratif concilie tous les intérêts ; ceux de l'Etat, ceux du trésor et ceux des vérificateurs eux-mêmes ; car, en réduisant le personnel, vous pourrez allouer un traitement plus élevé aux fonctionnaires que vous aurez conservés pour le service des poids et mesures.
En un mot, messieurs, vous poseriez un acte de bonne administration en adoptant le système que j'indique.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Il est très vrai que les vingt-cinq vérificateurs qui existent aujourd'hui n'ont pas immensément de besogne pendant toute l'année, et que c'est pendant deux ou trois mois surtout que leurs travaux ont une certaine importance ; mais que le nombre des vérificateurs soit excessif ou qu'il ne le soit pas, il n'en reste pas moins indispensable d'introduire l’unité et le contrôle dans cette administration.
Y aura-t-il moyen, à mesure des extinctions, de rattacher quelques-unes des vérifications actuelles à la juridiction d'autres vérificateurs ? Cela est possible. Mais cette mesure ne peut être prise immédiatement. Sans doute, avec les fonds provenant de la suppression de quelques vérificateurs (suppression qui est cependant rendue plus difficile par l'extension des opérations qui leur sont imposées rar le présent projet de loi), on pourrait organiser une inspection.
Mais là n'est pas le mal, pour le moment. Le remède à appliquer pour apporter une amélioration réelle au service des poids et mesures, c'est l'établissement d'une surveillance uniforme et efficace. Voilà ce que je demande au nom de l'administration.
M. Manilius. - Je crois aussi qu'il faut un bon système de surveillance dans l'administration des poids et mesures. Mais les plaintes nombreuses que nous avons entendues ne résultent pas de ce qu'il n'y a pas d'inspecteurs ou de contrôleurs. Les plaintes résultent de ce que les vérificateurs marchent trop bien, et je crois qu'il faudrait un contrôleur, un agent quelconque ou, un bon règlement pour les empêcher de marcher aussi bien, c'est-à-dire de se créer un traitement autre que celui qui leur est alloué, en trouvant moyen d'ajouter ou d'ôter du plomb aux poids qui sont soumis au poinçonnage.
Si l'on réduisait le nombre de vérificateurs à deux ou à un par province, on pourrait les rétribuer convenablement, et ces fonctionnaires ne seraient plus tentés de faire de petits mémoires à ceux qui soumettent des poids à la vérification. On ferait le poinçonnage avec la tolérance qui était inscrite dans les anciens règlements. Car ce trafic ne peut se faire qu'avec les personnes qui ne connaissent pas les règlements anciens.
D'après ces règlements il y a pour certains poids des tolérances. Il est en effet impossible comme on l'a dit tout à l’heure, qu'un poids qui est continuellement en usage soit exactement le même que l'étalon avec lequel on a fait la première vérification.
Les vérificateurs oublient que ces tolérances existent, et c'est ainsi qu'ils parviennent à se faire payer des rétributions qui ne leur sont pas dues.
S'il y avait un règlement sévère et si l'on payait convenablement les vérificateurs, ils ne feraient plus ces mauvais comptes ; ils ne chercheraient pas à trouver à redire à tous les poids et mesures qu'on leur présente, et vous n'auriez plus aucune plainte. Car jusqu'ici je n'ai pas entendu de plaintes d'autres chefs.
Les vérifications dans les lieux où l'on emploie les poids se font avec modération.
Depuis longtemps je n'entends plus parler de ces procès-verbaux nombreux qui se faisaient pour des poids non poinçonnés. Mais c'est dans les lieux du poinçonnage que se commettent les irrégularités que l'on désire voir cesser.
M. le président. - M. de Perceval vient de déposer un amendement ainsi conçu :
« Il y a, dans chaque province, un fonctionnaire chargé de vérifier et de poinçonner les poids, mesures et instruments de pesage. Il porte le titre de vérificateur des poids et mesures.
« Ces agents sont nommés par le Roi, et placés sous la surveillance d'un inspecteur.
« Ce fonctionnaire est aussi nommé par un arrêté royal, qui règle ses attributions. »
M. Moreau, rapporteur. - Je demande le renvoi de l'amendement de M. de Perceval à la section centrale. Il y a lieu d'examiner si un seul vérificateur par province peut suffire, si les marchands ne se trouveraient pas obligés de transporter leurs poids et mesures au chef-lieu de la province et ne seraient pas ainsi exposés à des déplacements et à des frais.
- Le renvoi de l'amendement à la section centrale est ordonné.
La séance est levée à 4 heures et demie.