(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)
(Présidence de M. Delfosse.)
(page 611) M. Ansiau procède à l'appel nominal à deux heures et un quart ; la séance est ouverte.
M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. Ansiau présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Le conseil communal de Baelegem prie la Chambre d'accorder aux sieurs Delaveleye et Moucheron la concession d'un chemin de fer de Saint-Ghislain à Gand et Terneuzen. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le conseil communal de Papignies se prononce en faveur d'un chemin de fer de Saint-Ghislain à Gand. »
- Même renvoi.
« La dame Stellings, veuve du sieur Wilmin, ancien facteur des postes, demande un secours. »
- Même renvoi.
« Les habitants du quai Plantin-Saint-Michel et des rues adjacentes à Anvers réclament l'intervention de la Chambre pour que l'embarquement des immondices et vidanges se fasse loin du centre de la population de cette ville. »
- Même renvoi.
« Des fermiers, cultivateurs, marchands de bestiaux gras et commerçants à Moerkerke demandent que les artistes vétérinaires.non diplômés soient admis à continuer l'exercice de leurs fonctions. »
« Même demande de fermiers, cultivateurs, marchands de bestiaux gras et commerçants à St-André. »
- Même renvoi.
« Le sieur Nivelles, ancien militaire, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une pension »
- Même renvoi.
« Les sieurs d'Hanins de Moerkerke, Van Maele et autres membres de la société dite : « Yver en Broedermin », établie à Bruges, déclarent adhérer à la pétition du comité central flamand relative à l'enseignement agricole. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur cette matière.
« Des habitants de Zelzaete demandent qu'il y ait autant d'écoles vétérinaires d'agriculture et d'horticulture dans les provinces flamandes que dans les provinces wallonnes ; que l'enseignement y soit donné dans la langue maternelle et que si, pour l'une ou l'autre branche d'enseignement, on n'établissait qu'une seule école pour tout le pays, les élèves reçoivent les leçons dans la langue parlée dans leurs provinces. »
- Même disposition.
« M. Lebailly de Tilleghem, retenu à Bruges par suite de la mort d'un parent, demande un congé. »
- Accordé.
M. Rousselle dépose le rapport de la section centrale du budget de l'intérieur sur les articles de ce budget qui concernent la bibliothèque rurale et l'industrie séricicole.
- Ce rapport sera imprimé et distribué.
M. de Renesse (pour une motion d’ordre). - Messieurs, dans la séance d'avant-hier, le bureau de la Chambre lui a communiqué la réponse de M. le ministre de l'intérieur, sur une requête du conseil provincial du Limbourg, réclamant une somme de 7,000 fr. pour le concours de l'Etat dans la construction d'une caserne de gendarmerie établie près du camp de Beverloo, au Bourg-Léopold ; dans une séance précédente, l'on a communiqué pareillement à la Chambre la réponse de M. le ministre de la guerre.
J'ai l'honneur de proposé à la Chambre d'ordonner l'impression de ces deux réponses aux Annales parlementaires, pour que l'autorité provinciale du Limbourg puisse en prendre connaissance.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président. - La discussion continue sur l'article 137 (Académie de médecine).
M. Osy. - Messieurs, j'ai quelques mots à répondre au discours prononcé à la fin de la séance d hier par M. le ministre de l'intérieur. M. le ministre a paru s'étonner que la Chambre s'occupât une deuxième fois du même objet ; mais, messieurs, à qui est-ce la faute si la Chambre est obligée de revenir sur cet objet ? Dans la session dernière la Chambre a émis le vœu de voir réviser les statuts de l'Académie de médecine, et le gouvernement a fait une promesse formelle à cet égard. Le gouvernement n'ayant pas réussi à obtenir de l'Académie ce qu'il avait promis, force nous est de revenir à la charge et de chercher un moyen de contraindre l'Académie à exécuter ce que le gouvernement avait promis.
M. le ministre a confirmé ce que j'avais dit, que l'Académie, sur la première demande du gouvernement, avait nommé une commission chargée d'examiner la question de la révision des statuts, mais il a ajouté que la première commission n'a pas conclu.
Je crois que M. le ministre est tout à fait dans l'erreur : la première commission a conclu, elle a fait une proposition définitive, elle a remis à son président un projet de révision des statuts. Mais il a été impossible de faire sortir ce projet des cartons, de le faire soumettre à la discussion de l'Académie. C'est à la suite de cela que deux membres de la commission ont été obligés de donner leur démission. Ils l'ont donnée en séance publique, et on a trouvé le moyen de ne pas laisser parvenir au public les raisons par lesquelles ils ont motivé cette démission. Vous voyez, messieurs, que la marche est toujours irrégulière à l'Académie de médecine.
Nous aurons, messieurs, à nous occuper, d'ici à quelque temps, d'un projet de loi sur l'exercice de l'art de guérir ; nous ne sommes pas médecins, et sur une pareille question nous devrions être éclairés par les discussions de l'Académie ; eh bien, n'a-t-on pas demandé le huis clos pour l'examen de ce projet de loi ? (Interruption.) C'est le droit de l'Académie, mais malheureusement l'Académie est composée de fonctionnaires de l'Etat, de fonctionnaires qui dépendent de M. le président.
Sous ce rapport, il fait là ce qu'il veut, et la minorité ne peut pas se faire entendre, car on ferme les portes quand on délibère. Après que les membres de la première commission avaient été obligés de donner leur démission, on a dû nommer une seconde commission dans le courant de l'année dernière ; cette seconde commisson n'a pas abouti, parce qu'elle a été formée encore une fois de membres de cette majorité de l'Académie. Vous voyez que rien n'aboutit. Or, il est de la dignité de la Chambre d'arriver à l'exécution des promesses du gouvernement. Ma proposition n'est pas hostile au gouvernement ; au contraire, je ne l'ai faite que pour le fortifier.
(page 616) M. Devaux. - Messieurs, je viens d'entendre dire à l'honorable préopinant que l'année dernière la Chambre a émis un vœu, voté une injonction à l'Académie de médecine, de changer son règlement ; que M. le ministre de l'intérieur s'est engagé à lui faire faire ce changement.
Ai-je bien entendu l'honorable membre ? Mais ces assertions si formelles plusieurs fois répétées hier et aujourd'hui, sont de la plus complète inexactitude. La Chambre n'a émis aucun vote sur cette matière et le gouvernement n'a pas pris l'engagement qu'on lui prête. Que s'est-il passé, en réalité ?
(page 617) Un petit nombre de membres ont exhalé l’année dernière le même genre de plaintes que cette année.
M. le ministre de l'intérieur a dit : qu'il examinerait la question de savoir si le règlement de l'Académie réclamait quelque changement, et qu'il prierait l'Académie d'examiner elle-même cette question. Voilà ce qui s'est passé. Un membre à la vérité avait proposé d'aller plus loin, il avait présenté un amendement tendant à retrancher 1,000 fr. de l'allocation de l'Académie ; mais devant l'évidente certitude d'un échec, l'auteur s'est empressé de le retirer, alléguant que l'engagement de M. le ministre de l'intérieur lui suffisait.
Or, l'engagement pris par M. le ministre, ce n'était nullement d'opérer ou de faire opérer un changement quelconque dans le règlement de l'Académie, mais d'examiner s'il y avait quelque chose à changer et de prier l'Académie d'exprimer elle-même son opinion à ce sujet.
S'il y avait eu un vote à émettre, j'aurais surmonté, dès l’année dernière, la répugnance que j'éprouve à me mêler à un tel genre de débat ; j'aurais réclamé, comme je le fais aujourd'hui, l'honneur de défendre l'Académie de médecine contre d'injustes et mesquines attaques et contre une atteinte violente à sa dignité et à la liberté de ses travaux.
Messieurs, à l'époque où nous vivons, la science est assez honorée dans le monde pour que la dernière liberté que les gouvernements les plus despotiques songent à violer, soit celle des délibérations des corps savants ; elle obtient ce privilège sous les gouvernements les plus absolus.
Est-ce une chambre législative de notre Belgique qui voudra violemment s'emparer du règlement du ménage intérieur d'une académie, là où les statuts de cette institution ont très clairement réglé ses droits ; qui voudra imposer de force à son règlement une modification qui, aux termes des statuts organiques, ne peut être introduite qu'avec l'assentiment de l'Académie elle-même ? Et de quelle forme revêt-on cette intervention ?
On traite l'Académie de médecine comme une troupe d'écoliers, on la menace de punitions, on ajourne, jusqu'à ce qu'elle ait obéi, une partie de son traitement... je me trompe, messieurs, l'Académie n'a pas de traitement ; une partie des frais de ses utiles travaux. Si, ce que je ne crains pas, la Chambre se laissait entraîner dans la voie où on cherche à l'égarer, ce ne serait pas l'Académie de médecine qui seule serait humiliée, la Chambre y compromettrait elle-même sa dignité et sa considération.
Comment ! messieurs, il y a un corps savant qui, par l'activité de ses travaux et la vie qui l'anime, s'est peut-être placé en avant de tous les corps savants du pays ! En quelques années il a conquis le rang le plus honorable parmi les corps médicaux de l'Europe et attiré l'attention des savants de tous les pays ! et lorsque nous nous en occupons ici, ce n'est point pour l'encourager dans sa mission scientifique, ce n'est pas même pour nous préoccuper de ses travaux, mais pour le chicaner sur une misérable question d'argent, sur une question de quelques francs, je pourrais dire de quelques sous ; c'est la question de savoir si les 3,500 fr. alloués pour son bureau doivent être partagés entre le président, le secrétaire ci le secrétaire adjoint, ou seront donnés à un secrétaire général.
Voilà sur quelle misère on veut faire discuter une assemblée législative !
De pareilles questions sont du ménage intérieur de l'Académie. Nous qui sommes l'un des trois grands pouvoirs de l’Etat, cela n'est pas de notre ressort ; nous ne descendons pas jusque-là.
Si l’on vous disait que l'Académie de médecine occasionne au budget une dépense excessive, que cette dépense peut être diminuée sans inconvénients, cette question serait parlementaire, on resterait dans son rôle ; mais on ne nous dit pas que cette institution coûte trop ; on veut bien reconnaître aussi que les 3,500 fr. alloués à son bureau ne sont pas une dépense exagérée. Dès lors qu'avons-nous à voir si, de ces 3,500 fr., 1,000 fr. doivent aller à tel membre du bureau ou à tel autre ? c'est là du régime intérieur, de pareilles questions sont des questions de ménage et, permettez-moi l'expression, des questions de commérage. Mais enfin puisqu'on nous traîne là-dessus depuis deux ans, voyons les griefs qu'on élève contre l’Académie de médecine, examinons-les tous. Quel est le premier ? L'honorable M. Osy me dit que c'est la publicité des séances.
Je crois qu'il n'en a pas parlé cependant.
M. Osy. - J'en ai parlé.
M. Devaux. - Peu importe, je croyais que ce grief appartenait à M. Vander Donckt.
Eh bien, le règlement de l'Académie exige-t-il la publicité où ne l'exige-t-il pas ? Si l'Académie se conforme à son règlement, il n'y a rien à y redire.
C'est une question assez délicate que celle de savoir quels travaux d'une Académie doivent être publics ou secrets.
Pour moi, je penche pour une assez grande publicité, mais je ne voudrais pas, quand j'en aurais le droit, obliger une Académie malgré elle à la publicité de toutes ses délibérations.
L'Académie royale des sciences et belles-lettres n'a pour ses trois classes que trois séances publiques par an ; elle publie un bulletin, mais il ne contient pas toutes ses délibérations.
Le second grief, messieurs, concerne l'administration financière de l’Académie qui se fait tout entière, prétend-on, par son président.
Aux termes de ses statuts la gestion des finances de l'Académie appartient à son bureau. C'est ce qui a lieu sous le contrôle de la cour des comptes.
Devant les plaintes qui se sont produites ici l’année dernière, quoiqu'elle n'y fût pas obligée, l'Académie a nommé une commission dans son sein qui examine les comptes du bureau et fait son rapport à l'Académie elle-même. Que peut-on faire de plus ?
Messieurs, ce qui se passe à l'Académie de médecine, c'est exactement ce qui se passe à l'Académie des sciences et belles-lettres. Là, en effet, il y a une commission des finances qui administre les finances de l’Académie et une autre qui la contrôle. Si à ce sujet on prend une mesure contre l'Académie de médecine, il faudra en prendre une contre l'autre Académie, et j'en demande bien pardon à mon honorable contradicteur, il serait difficile que les choses se passassent autrement. Mon honorable contradicteur, disposé à ne voir partout que des questions de finances, semble ne voir dans les travaux d'une Académie que des affaires de comptabilité. Faudra-t-il que l'Académie de médecine se mette à discuter, à éplucher son budget, comme l'honorable membre épluche ici chaque année le budget de l'Etat ?
Mais ce n'est pas là la mission d'une Académie. Une Académie de médecine est instituée pour faire de la science. Elle se réunit une douzaine de fois par an ; elle ne va pas passer trois ou quatre séances à discuter son budget. Elle charge de ce soin une commission ; ici il y en a deux qui se contrôlent l’une l'autre. C'est tout ce qu'on peut faire, je le répète. C'est exactement ce qui se fait à l'Académie royale des sciences et belles-lettres.
Que reste-t-il donc de ce grief ? Je crois que je puis dire zéro.
J'en viens au troisième, aux 1,000 fr. d'indemnité du président : 1,000 fr. pour présider l'Académie, pour faire accueil aux étrangers qui viennent la visiter et même prendre part à ses travaux, pour faire face à des frais de bureau ; en vérité, voilà une énormité inexcusable.
Messieurs, le bureau de l'Académie de médecine a en tout 3,500 fr.
Mais, dit-on, ailleurs il y a un secrétaire général ; dans aucun pays du monde les présidents de l'Académie ne sont rétribués.
D'abord qui est-ce qui a fait ce partage ? C'est un arrêté de l'honorable M. de Theux de 1847, qui a fait le partage, qui a décidé que les 3,500 francs du bureau seraient attribués savoir : 1,000 fr. au président, 1,000 fr. au secrétaire et 1,500 fr. au secrétaire-adjoint chargé de surveiller les impressions.
Eh bien, l'honorable M. Osy trouve cela énorme. Suivant lui, dans tous les pays du monde, c'est le secrétaire général qui reçoit la somme destinée au bureau. L'honorable M. Osy en est-il bien sûr ? Cette assertion est bien hardie. L'innorable M. Osy connaît très bien les sociétés financières (et je ne sais si les présidents de ces sociétés se contentent de si peu) ; mais connaît-il aussi bien les sociétés littéraires ? Est-il bien certain que partout on rétribue le secrétaire général seul ? Je n'en sais rien. Je n'ai pas vérifié les faits ; mais j'en doute quelque peu.
Quoi qu'il en soit, je sais que cet usage existe en France. C'est de la France que nous l'avons importée pour l'Académie des sciences et belles-lettres.
Mais je ne vois pas, je vous l'avoue, que ce soit un usage tellement indispensable, tellement préférable, qu'on ne puisse à aussi bon droit faire le partage de l'allocation donnée au bureau, comme l’a fait l'honorable M. de Theux. L'année dernière, l'honorable M. de Theux vous a expliqué ses motifs et ils m'ont paru, quant à moi, très plausibles. Je ne dis pas qu'en règle générale, il vaille mieux que le secrétaire général ait tout, ou qu'il vaille mieux que le président ait quelque chose. Mais je dis que l'un et l'autre peut être préférable suivant l'organisation.
Remarquez que dans notre Académie des sciences et belles-lettres il y a un secrétaire général qui touche 3,500 francs. Mais ce secrétaire général est secrétaire des trois classes ; et de président de l'Académie j'oserais dire qu'il n'y en a pas, car le président, qui préside les trois classes, ne fonctionne qu'une fois par an, dans une séance générale. Vous comprenez pourquoi le secrétaire général est le personnage principal. Mais dans une Académie où il n'y a qu'une seule classe, où le président fonctionne chaque fois qu'il y a réunion, vous sentez que l'organisation peut être toute différente.
Dans tous les cas, je demande si c'est là une question qui soit digne d'occuper, non pas pendant deux ans, mais pendant un quart d'heure, une assemblée législative.
Mais, dit-on, ces 1,000 francs sont perçus par un homme qui cumule plusieurs traitements. Nous y voilà ! C'est donc une question personnelle. D'abord, messieurs, quels sont les traitements que ce fonctionnaire cumule ? Il est inspecteur général du service de santé ; comme tel, il a naturellement un traitement.
Le gouvernement, afin d'effectuer une grande économie, s'est adressé à Lui pour qu'il se chargeât de la même inspection dans les prisons et dans la marine ; elle gouvernement que lui alloue-t-il de ce chef ? 500 francs pour les prisons et 200 francs pour la marine. En tout, 700 francs.
Ce cumul est-il effrayant, et oseriez-vous dire que ce n'est pas une économie pour le trésor ? Mais, dans tous les cas, s'agit-il d'une mesure personnelle ? Est-ce que vous changerez le régime de l'Académie suivant que tel homme ou tel autre est président ? Si aujourd'hui c'est un fonctionnaire de l'Etat qui est président, demain ce sera un homme qui n'a aucune fonction ; accorderez-vous ou retrancherez-vous les 1,000 francs de représentation suivant que telle ou telle personne occupera le fauteuil ?
(page 618) Messieurs, le quatrième grief auquel il faut porter remède à tout prix, c'est que le même homme est rééligible à la présidence tous les ans ; car il paraît que ce dignitaire possède de tels moyens d'intimidation ou de tels moyens de séduction (sans doute à l'aide de ses mille francs d'indemnité), qu'il parvient à se faire réélire tous les ans et à se perpétuer dans son fauteuil.
Messieurs, il est vrai que le président de l'Académie est rééligible tous les ans.
Mais savez-vous pourquoi ? Parce que l'Académie tout entière l'a demandé.
Dans le règlement primitif de l'Académie, règlement qui, chacun le sait, avait été fait par l'honorable M. Nothomb, avec le concours et pour ainsi dire sous l'inspiration de ce même président, le fonctionnaire n'était pas rééligible. Eh bien, au bout de quelque temps, l'Académie à l'unanimité, moins la voix du président, a changé cela et a demandé au gouvernement d'approuver au règlement une modification par laquelle le président serait rééligible. Vous l'entendez, messieurs ? à l'unanimité moins la voix du président.
Voilà la faculté qu'on veut lui ôter, et si elle n'y renonce, il faut que nous lui signifiions qu'elle perdra toute allocation au budget. Et qui sommes-nous pour lui faire, une pareille injonction ?
Remarquez-le, messieurs, ceci approche du comique. Nous sommes une assemblée dont le président est rééligible sans la moindre entrave chaque année. Nous disons à l'Académie : Vous avez un système détestable ; si vous n'y renoncez, nous vous infligerons une punition exemplaire, mais ce système, nous le pratiquons, nous le trouvons si excellent pour nous-mêmes que, si jamais quelqu'un songeait à faire la moindre objection au droit que nous avons d'élire chaque année à la présidence qui bon nous semble, nous trouverions cela absurde et despotique.
Mais le président de l'Académie de médecine, soutient-on sérieusement, exerce une telle pression sur les membres de cette assemblée, que c'est par ses propres efforts qu'il est réélu chaque année. Messieurs, vous avouerez que si les choses se passent ainsi, si c'est par de tels moyens que dans une assemblée honorable un président parvient chaque année à se faire une majorité, il y aura inévitablement de l'autre côté une minorité qui protestera avec éclat contre de telles menées.
Or, messieurs, voici ce qui se passe : le nombre des membres qui ont le droit de prendre part à l'élection du président est de 36, et communément, le président actuel est réélu par 30 suffrages ; la minorité est réduite au sixième des votants. Ce fait ne dit-il pas tout ?
Non, dit-on, et voici ce qu'on nous donne comme le dernier mot de l'énigme. Le président, prétend-on, a arrangé les choses de telle manière que l'Académie regorge d'officiers de santé de l'armée, que le président en sa qualité d'inspecteur général du service sanitaire, tient sous sa dépendance ; voilà comment il se fait que sur 36 membres, il y en a 30 qui dans un scrutin secret n'osent pas écrire sur leur bulletin un autre nom que celui qui leur est imposé. Or, messieurs, voulez-vous savoir ce qui en est de ce grand nombre d'officiers de santé qui font la majorité à l'Académie de médecine ?
Savez-vous, sur les 36 membres titulaires prenant part à l'élection du président, combien il y en a qui appartiennent au service sanitaire de l'armée ? Il y en a 6. Voilà ce qui en est encore de ce grief capital. N'cst-il pas vrai, messieurs, que de telles accusations sont ridicules, et n'ayais-je pas le droit de les appeler de vrais commérages ?
Messieurs, il y a une commission qui s'occupe, non pas de changer le règlement, remarquez-le bien, mais d'examiner s'il y a lieu de le changer, car l'Académie peut très bien être d'avis qu'il n'y a pas de modifications à y faire ; elle en a le droit. Il paraît que cette commission conspire avec le président pour qu'on ne change rien, pour qu'il n'y ait pas même de conclusions. D'abord, messieurs, si la commission est si favorable à l'état actuel des choses, elle n'a qu'à conclure qu'il n'y a rien à faire.
Permettez-moi, cependant, de donner les noms des membres de cette commission.
Cette commission est présidée par un homme qu'on incriminait tout à l'heure, par l'honorable M. Lombard, praticien des plus recommandantes, des plus estimés, des plus renommés dans le pays, un des hommes qui font le plus d'honneur aux sciences médicales en Belgique et qui, certainement, ne dépend en aucune manière de l'inspecteur général du service de santé.
Les autres membres de la commission sont M. Craninckx, professeur à l'université de Louvain, M. Didot, M. Thiernesse, et M. Tallois. Ce dernier seul appartient au service de santé de l'armée.
M. Osy. - Et la première commission ?
M. Devaux. - Je n'en connais pas la composition. Si vous pouviez me donner les noms de ses membres, vous m'obligeriez.
M. Osy. - M. Lombard, président, M. Stas et M. Bellefroid.
M. Devaux. - Ainsi, c'est encore une fois M. Lombard qu'on est venu accuser d'escamoter les travaux de la commission ou de les retenir forcément dans ses cartons. Je demande si cela est digne de notre assemblée, et si une pareille accusation a la moindre vraisemblance.
Messieurs, cette commission s'est réunie, mais pourquoi n'a-t-elle pas terminé ses travaux ? Par une raison fort simple : comme les membres habitent des villes différentes, les commissions ont beaucoup de peine à se réunir ; il se passe là ce qui se passe dans toutes les Académies, ce qui se passe notamment à l'Académie des sciences et belles-lettres.
Ainsi, par exemple, M. le ministre a demandé à l'Académie des sciences et lettres, il y a peut être cinq ou six mois, un rapport sur un projet d'encouragement de la littérature dramatique ; l'Académie s'en est occupée, mais elle n'a pas encore abouti, et il se passera peut-être encore plusieurs mois avant qu'elle ait terminé ; pourquoi ? Parce qu'il est impossible de réunir les commissions ou les classes plus fréquemment, les membres habitant des villes différentes et ne pouvant sacrifier la plus grande partie de leur temps à leurs fonctions d'académiciens.
Messieurs, ce qui se passe prouve tout au plus qu'il y a quelques mécontents à l'Académie. S'il y avait des divisions plus considérables, ce n'est pas nous qui devrions nous en étonner ; il est parfaitement naturel qu'il y ait des divisisions d'opinion dans une assemblée délibérante, dans une assemblée de savants. Ce qui doit surprendre peut-être, c'est qu'il y ait si peu de dissidents et que des résolutions importantes prouvent souvent tant d'accord ; mais les dissentiments fussent-ils plus étendus et plus vifs, ce ne serait pas à nous à y intervenir et à nous ranger pour ou contre quelque opinion que ce soit. C'est à l'Académie à vider ses propres querelles. Il y a assez d'hommes de mérite dans son sein pour qu'elle sache se gouverner elle-même.
On assure que des membres de l'Académie vont confier leurs plaintes sur ce qui s'y passe aux membres de cette Chambre à qui ils déeandent d'y faire justice. Je ne sais si cela est exact ; dans tous les cas, ils ne sont pas venus chez moi ; s'ils y étaient venus je les aurais rappelés à leur dignité, je leur aurais dit : « De deux choses l'une, ou vous appartenez à la majorité, et alors il vous est facile de faire redresser vos griefs ; ou vous êtes en minorité, et alors faites ce que dans toute assemblée doit faire une minorité ; articulez vos griefs à l'Académie, là où ils peuvent être utilement débattus, et comme toute minorité consciencieuse mettez votre confiance dans la raison et votre bon droit. »
Mais, dans tous les cas, ne venez pas mendier une humiliation potfr le corps auquel vous appartenez. Arrangez vos affaires vous-mêmes, et ne venez pas nous demander d'être mis en tutelle.
Messieurs, c'est une chose vraiment extraordinaire ! une partie de l'Académie de médecine se plaint, dit-on, de ce qui s'y passe, et lorsque le moment vient d'articuler des plaintes à l'Académie même, on les retire ou même on s'associe au blâme qu'elles encourent.
Permettez-moi, messieurs, de vous faire connaître un ordre du jour motivé que l'Académie a adopté quelques jours après ce qui s'est passé ici l'année dernière. Voici cet ordre du jour tel qu'il a été proposé ;
« L'Académie,
« Entendu les explications données par M. le président au nom du bureau, tant dans sa séance de ce jour que dans celle du 12 février courant ;
« Ne voulant ni partager la responsabilité ni subir les conséquences de l'intrigue déloyale qui a provoqué l'incident parlementaire relatif à sa gestion financière ;
« Attendu qu’il est impossible de ne pas déverser un blâme énergique sur la conduite des personnes qui, pour des animosités particulières, n’ont pas craint de compromettre l’honneur de l’institution, alors surtout que personne ne s'est écarté des arrêtés et des instructions ministérielles qui régissent son régime intérieur...
« Passe à l'ordre du jour. »
Au texte de cette proposition un seul amendement a été adopté, il a été proposé par M. Martens et avait pour but de substituer aux derniers mots du troisième paragraphe les suivants : « N'ont pas craint de chercher à surprendre la bonne foi des membres de la Chambre des Représentants, et de compromettre, etc. » Le but de cet amendement était, vous le voyez, de faire comprendre que ce blâme ne pouvait atteindre aucun membre de la Chambre.
Quant on alla aux voix, voici ce qui eut lieu. Sur l'un des paragraphes, le président et cinq autres membres s'abstinrent. L'ensemble de l'ordre du jour fut ensuite adopté par l'unanimité des 31 membres qui prirent part au vote. Un seul s'abstint.
Voici les noms des membres qui se sont prononcés en faveur de l'ordre du jour : MM. Craninckx, Didot, Fallot, Fossion, François, Gaudy, Graux, Hairion, Hensmans, Lebeau, Lombard, Marinus, Martens, Mascart, Pétry, Raikem, Sauveur, Seutin, Stas, Thiernesse, Tallois, Van Coetsem, Verheyen, Vleminckx, Vellefroid, Boulvin, Carlier, Chandelon, Davreux, Lequime et Naghels.
Après un tel fait, messieurs, quelqu'un peut-il prendre encore au sérieux les prétendues plaintes de quelques membres de cette Académie.
Je crois qu'il est bien démontré que tout ce que nous ayons à faire, c'est de ne plus nous en occuper et de rejeter l'amendement qu'on nous propose.
S'il en était différemment, si la Chambre se laissait entraîner dans une autre voie, si on voulait infliger une humiliation à un des premiers corps savants de la Belgique, j'espère que ce corps ne restera pas au-dessous de ce qu'exige de lui l'honneur de la science médicale de notre pays, j'espère que devant un tel affront il suspendra ses travaux, jusqu'à ce que la liberté lui soit rendue et qu'il puisse les reprendre avec dignité.
(page 611) M. Dumortier. - Messieurs, je ne m'attendais pas à prendre la parole dans cette discussion ; mais je suis obligé de me lever quand j'entends l'honorable préopinant, prétendant nous gourmander comme des écoliers, dire qu'une discussion parlementaire est une atteinte portée à la liberté d'un corps savant quelconque ; je suis obligé de me lever, dis-je, pour soutenir la prérogative du parlement.
Comment ! la Chambre n'aurait donc plus le droit d'examiner les abus, sans porter atteinte à la liberté d'un corps, sans violer cette liberté ! Mais que deviendrait le mandat que nous avons à exercer dans cette enceinte, si de pareilles maximes venaient à avoir de l'écho dans la Chambre ?
Messieurs, comment les choses se sont-elles passées l'année dernière ? Des abus sérieux, des abus graves vous ont été signalés. Et par qui nous ont-ils été signalés ? Par la section centrale, émanation de la Chambre ; la section centrale, à l'unanimité, est venue révéler à la Chambre des abus réels et reconnus de tous, et un vote solennel a déclaré au pays que la Chambre réclamait le redressement de ces griefs. (Interruption.) On nie qu'il y ait eu une décision ; mais il est tellement vrai qu'il y a eu volonté de la Chambre de faire cesser l'état de choses dont on se plaignait, que M. le ministre de l'intérieur s'est formellement engagé à poursuivre la réparation des abus dont il reconnaissait l'existence.
Et aujourd'hui que la Chambre vient réclamer l'exécution de ses engagements, on veut nous contester en quelque sorte le droit d'exercer ici le mandat que nous tenons de la nation. Mais un pareil système est insoutenable, c'est l'anéantissement de nos institutions, l'affaiblissement des libertés publiques en Belgique. Je dis que lorsqu'il y a des abus, c'est à nous à les signaler, c'est à nous à en provoquer le redressement. Là est notre mandat, et l'honorable préopinant a fort mauvaise grâce de vouloir nous en contester l'exercice.
On dit qu'il n'y a pas d'abus ; quoi ! il n'y a pas abus, lorsque l'emploi des fonds mis à la disposition d'un corps reste sans contrôle ! Et n'est-il pas affligeant d'entendre soutenir ici que cela est légal, licite ? Quoi, n'est-ce pas un abus réel que de voir ces cumuls, ces perpétuités de fonctions dont on s'est plaint l'année dernière ? Quand de pareils abus qui lui ont été signalés en 1854, n'ont pas cessé d'exister malgré les engagements du ministre, il est du devoir de la Chambre de persister dans ce qu'elle a fait en 1854 ; que si la Chambre venait à faiblir dans cette circonstance, quelle en serait la conséquence ? C'est que le pouvoir parlementaire deviendrait le jouet de quelques académiciens médicaux...
M. Devaux. - La Chambre n'a pas émis de vote en 1854.
M. Dumortier. - Elle s'est prononcée.
M. Devaux. - Elle ne s'est prononcée que dans votre imagination.
(page 612) M. Dumortier. - Elle ne s'est pas prononcée dans mon imagination ; elle s'est prononcée par l'organe de la section centrale qui est, je le répète, son émanation. Lors de la discussion publique, il ne s'est trouvé personne dans cette enceinte qui se soit levé pour justifier les abus qu'on avait dénoncés à l'assemblée, et M. le ministre de l'intérieur s'est formellement engagé à y porter remède.
Maintenant qu'on ait voulu, par ces révélations dont on vient de vous entretenir, déverser le blâme sur tel ou tel membre de l'Académie, je ne m'en inquiète d'aucune manière ; comment la section centrale a-t-elle eu connaissance des faits qui lui ont été signalés, je ne m'en soucie pas davantage ; le fait est que des abus réels ont été dénoncés à ia Chambre, qu'ils ont été reconnus par M. le ministre de l'intérieur, que M. le ministre s'est formellement engagé à y porter remède. Tout le reste n'est qu'un misérable racontage.
En effei, que vous disait M. le ministre de l'intérieur dans la séance du 11 février 1854 ?
« L'honorable M. Julliot l'avoue, il n'a qu'un but : c'est d'appeler l'examen sur les prétendus abus signalés, sur les erreurs qui peuvent exister dans les statuts. Eh bien, le gouvernement s'engage à faire cet examen, et s'il y a quelque chose à modifier, le gouvernement le fera.
« Cela ne satisfait-il pas à toutes les exigences ? «
M. le ministre de l'intérieur était donc d'accord avec nous sur la réalité des faits, il n'a cependant pas exécuté les engagements qu'il avait pris envers nous, les choses sont restées absolument au même point. Même, si je suis bien informé, il paraît que de nouveaux bouleversements menacent l'Académie.
En effet, hier j'ai entendu M. le ministre de l'intérieur dire qu'un traitement était accordé au président de l'Académie, parce que ce corps n'a pas de secrétaire perpétuel ; mais, messieurs, veuillez ouvrir les statuts de l'Académie de médecine, et vous verez qu'il y a un secrétaire perpétuel ; l'honorable membre qui remplit ces fonctions appartient aussi à l'Académie des sciences ; c'est un homme distingué et qu'il importe beaucoup que l'intrigue ne parvienne pas à mettre dehors.
Je crains fort que ces intrigues déjà ne se préparent. Je dis qu'il est du devoir de la Chambre de ne pas se laisser dominer par un corps étranger, de ne pas accepter l'espèce de mercuriale que nous venons d'entendre, et de persister dans sa résolution de demander la rèformation des abus dont on s'est plaint. Ne voyant pas d'autre moyen d'arriver au but que nous proposons, que celui indiqué par M. Osy, je me verrai forcé de voter pour son amendement.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Les déclarations de l'honorable M. Devaux sont de la plus grande exactitude, tandis que les engagements que M. Dumortier prétend avoir été pris par le gouvernement ne sont pas conformes à ce qui s'est passé il y a un an. Le seul engagement qu'ait pris le gouvernement est celui-ci : il s'est engagé à examiner s'il y avait des abus à faire réformer dans l'administration et dans les statuts de l'Académie.
Le gouvernement a invité l'Académie à délibérer sur le point de savoir s'il n'y avait pas de changements à apporter à ses statuts et à son règlement d'ordre.
« Cette manière de procéder est la seule légale, car d'après ses statuts organiques, l'Académie peut seule prendre l'initiative de ces modifications.
Le gouvernement n'a rien promis au-delà. A-t-il été fidèle à cette promesse ? Hier j'ai fait connaître que le gouvernement, après la discussion qui avait eu lieu dans cette enceinte, s'était adressé à l'Académie pour la prier d'examiner si, au point de vue de l'élection du président et de la comptabilité, elle avait des modifications à proposer.
Vous connaissez tous les détails dans lesquels on est entré au sujet de deux commissions qui ont été nommées, le résultat de l'instruction à laquelle cette affaire avait été soumise. Si elle n'a pas abouti, la faute n'en est pas au gouvernement ; je me hâte d'ajouter que la faute n'en est pas non plus à l'Académie. Quaut aux commissions, elles étaient entièrement libres dans leur travail. Aucune limite ne lui a été assignée, et s'il n'est pas terminé, c'est que les honorables membres qui les composent ont cru ne devoir rien précipiter.
La comptabilité, dit-on, n'est pas régulière, elle est soumise à l'influence despotique du bureau et du président...
Tout cela, messieurs, est de la plus grande inexactitude. D'après le règlement de l'Académie, personne ne dispose arbitrairement de ses finances, elles sont administrées par le bureau, article 99 des statuts, le bureau contrôle et ordonnance toutes les dépenses, et soumet le budget tous les ans au gouvernement qui l'approuve. Il n'y a donc pas le moindre grief imputable à l'Académie ni au bureau. Tout s'y passe au grand jour et sous la surveillance du gouvernement.
Faut-il maintenant entrer dans le système d'intimidation qui est traduit dans l'amendement de M. Osy ? Je ne le crois pas.
Après les paroles éloquentes que vient de faire entendre l'honorable M. Devaux, je crois qu'il n'y a rien à ajouter. Je me bornerai à dire que ce serait une menace superflue, gratuite, adressée à un corps qui jouit de l'estime du pays et qui n'a pas démérité de la Chambre. Le gouvernement n'assume en aucun cas la responsabilité des conséquences qu'un vote de cette nature pourrait entraîner.
Au fond, de quoi est-il question ? De rechercher s'il y a lieu de modifier les statuts de l'Académie. Il ne faut pas de menace pour cela. J'ai la conviction que, d'ici à peu de temps, l'Académie aura répondu à la demande qui lui est adressée.
Restera au gouvernement à apprécier s'il y a lieu d'apporter les modifications qui seraient proposées, cela n'appartient pas au pouvoir législatif. C'est une mesure administrative dans l'examen de laquelle il convient de laisser à l'appréciation du gouvernement la plus complète et la plus entière liberté.
-La discussion est dose.
L'article 137 est mis aux voix avec le chiffre le plus élevé, qui est celui proposé par le gouvernement, 20,000 fr.
Plusieurs membres demandant l'appel nominal, il est procédé à cette opération.
En voici le résultat :
69 membres ont répondu à l'appel.
51 ont répondu oui.
18 ont répondu non.
En conséquence la Chambre adopte.
Ont répondu oui : MM. de Baillet-Latour, de Bronckart, de Haerne, Delehaye, Deliége, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Pitteurs, Dequesne, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, Dumon, Faignart, Goblet, Lambin, Lange, Lebeau, Lejeune, Lesoinne, Loos, Magherman, Manilius, Mascart, Matthieu, Moreau, Orts, Prévinaire, Rousselle, Sinave, Tack, Thiéfry, Tremouroux, Van Cromphaut, Vandenpeereboom, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Vermeire, Vervoort, Veydt, Visart, Wasseige, Ansiau, Anspach, Coppieters t' Wallant, Dautrebande et Delfosse.
Ont répondu non : MM. Dellafaille, F. de Mérode, de Naeyer, de Perceval, de Portemont, de Royer, Dumortier, Jacques, Janssens, Lelièvre, Osy, Pirmez, Vanden Branden de Reeth, Vander Dontkt, Van Overloop, Vilain XIIII, Brixhe et Coomans.
« Art. 138. Conseil supérieur d'hygiène publique ; jetons de présence et frais de bureau : fr. 4,200. »
M. Lelièvre. - L'article 4 de l'arrêté du 15 mai 1849, qui a institué le conseil supérieur d'hygiène publique, a prescrit au conseil de publier un compte annuel de ses travaux.
Je prie M. le ministre de veiller à l'exécution de cette disposition qui depuis quelques années n'a plus été exécutée. Cependant on ne contestera pas l'utilité de semblable mesure.
Il est donc important qu'à l'avenir on ait soin de se conformer à l'arrêté qui en fait une prescription formelle. Du reste j'espère que la nouvelle loi sur l'art de guérr consacrera l'institution des conseils provinciaux d'hygiène et de salubiité publiques.
Je recommande cette amélioration à la sollicitude du gouvernement qui, en établissant dans le pays une organisation hygiénique suffisante, réalisera un progrès réclamé depuis longtemps par les hommes d'expérience.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je ne demande la parole que pour faire remarquer que le Conseil supérieur d'hygiène publique u'est pas en retard de fournir le compte annuel de ses travaux. Ce corps rend les services les plus essentiels au pays. Dans toutes les circonstances où le gouvernement fait appel à ses lumières, il s'est empressé de lui fournir le contingent le plus utile pour toutes les affaires qui lui sont déférées.
- L'article 138 est adopté.
« Art. 139. Subsides pour les établissements publics de la commune de Spa : fr. 20,000. »
M. Magherman. - Il résulte des explications données par la section centrale et consignées dans son rapport sur le budget en discussion, qu'il existe toujours un établissement de jeux publics à Spa, établissement dont la suppression est subordonnée par le gouvernement à la suppression des maisons de même nature existant dans certaines villes voisines et notamment à Aix-la-Chapelle. Si mes renseignements sont exacts, les jeux publics n'existeraient plus à Aix-la-Chapelle, ils seraient supprimés.,
Quoi qu'il en soit, il me semble qu'il n'y a pas de raisons pour maintenir les jeux publics à Spa. Qu'importe ce que font les gouvernements étrangers, quand il s'agit d'une question de moralité ? Pour moi c'est ainsi que je considère la question des jeux publics. En effet, combien de fois n'a-t-on pas vu des pères de famille dissiper dans ces maisons les ressources qui leur étaient nécessaires pour soutenir leur famille !
Combien de fois n'a-t-on pas vu des jeunes gens dépenser des sommes considérables, qui, souvent, ne leur appartenaient pas ? Ces établissements, à ce point de vue, sont donc dangereux. Nous ne devons pas chercher ce qui se passe à l'étranger pour savoir ce que nous devons faire chez nous. Nous devons supprimer ce qui est contraire à la morale.
On a beau objecter que ces établissements, s'ils n'existaient pas ici, (page 613) existeraient ailleurs, et que les personnes qui dissipent aujourd'hui leur fortune à Spa iront la dissiper ailleurs.
Ce n'est pas un motif pour maintenir ce qui est contraire à la moralité publique.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Ce n'est pas contraire à la morale publique.
M. Magherman. - C'est mon opinion.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Ce n'est pas la mienne.
M. Magherman. - Les faits que je viens de rappeler sont tels, que tous ceux qui ont quelque souci des intérêts du père de famille et des intérêts de la société doivent s'en préoccuper.
Je demande si les faits de ruine que je viens de citer ne sont pas exacts, s'il n'y a pas eu des catastrophes à la sortie de ces maisons de jeu, si réellement on n'a pas toléré trop longtemps cet état de choses et s'il n'est pas temps d'y mettre fin ?
Quant à moi, je maintiens que les jeux sont contraires à la morale, qu'ils sont dangereux pour la société, et j'en demande la suppression.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - C'est une question très grave sur laquelle les moralistes sont profondément divisés, que celle de savoir s'il vaut mieux supprimer les jeux publics et favoriser ainsi les jeux clandestins qui ont certainement leurs dangers, que de régulariser la passion du jeu en la soumettant à des formes, à une intervention officielle de l'autorité, qui protègent les joueurs contre les dangers de la fraude.
Je ne discuterai pas cette questions Le moment n'est pas opportun. Je ferai seulement observer que le gouvernement n'est pas subordonné, dans son appréciation de la question des jeux de Spa, à la résolution à prendre par les gouvernements étrangers. La seule chose que le gouvernement ait promise, c'est, dans le cas où les gouvernements étrangers supprimeraient les jeux, d'examiner s'il y a lieu de les supprimer chez nous. Mais alors même que les gouvernements étrangers auraient prononcé cette suppression, nous restons parfaitement libres de décider s'il faut ou non les supprimer en Belgique.
La ferme des jeux de Spa n'est pas près de finir. Le contrat dure jusqu'en 1861. D'ici là les moralistes et les législateurs auront le temps de réfléchir sur le parti qu'il convient de prendre.
M. Moreau. - Messieurs, je me permettrai de vous présenter quelques observations sur ce que vient de dire l'honorable M. Magherman.
Je ne veux pas défendre d'une manière absolue les jeux de hasard, ni leur moralité. Je sais qu'on peut dire bien des choses en principe pour leur abolition ; mais cependant il faut prendre garde de se laisser aller à des entraînements irréfléchis.
Qu'on ne se fasse pas illusion, les monuments de la législation de presque tons les peuples attestent les efforts qu'on a faits de tout temps pour mettre un frein à la passion des jeux de hasard. Mais a-t-on obtenu le résultat qu'on se proposait ? Non, messieurs, parce que le jeu est un mal nécessaire et qu'il a été considéré comme tel par les meilleurs esprits.
Il faut bien le reconnaître, beaucoup de personnes ont la passion du jeu, c'est un amusement pour des riches, qui souvent blasés sur les jouissances de la vie, doivent à cet énergique stimulant le plaisir en quelque sorte de se sentir exister.
Fox lui-même, le grand orateur anglais, ne disait-il pas que le premier plaisir était de gagner au jeu, le second, d'y perdre.
S'il siégeait donc dans cette Chambre, je doute fort qu'il se prononçât pour l'abolition des jeux.
Aussi qu'a-t-on fait en cette occasion ? On s'est demandé avec raison, s'il n'était pas préférable d'autoriser des jeux de hasard à certaines conditions et dans quelques localités ? S'il n'était pas préférable d'en régulariser, si je puis le dire, l'action, afin d'en rendre les conséquences moins funestes.
C'est par ces motifs, que sous l'empire on a porté le décret du 24 juin 1806, qui, en prohibant en général les jeux de hasard, permet d'en autoriser l’établissement dans les villes où il y a des eaux minérales et à Paris.
C'est en vertu de ce décret que les jeux de Spa ont continué d'exister, je dis continué d'exister, car veuillez-le remarquez, messieurs, les princes evêques de Liège qui étaient sans doute des souverains qui, plus que tous autres devaient veiller à la moralité publique, avaient déjà autorisé l'existence des jeux de Spa.
Ce n'est pas par les lois que vous réformerez les moeurs, ce n'est pas en décrétant l'abolition des jeux que vous les ferez disparaître.
A Paris on les a aussi supprimés, et cependant joue-t-on avec moins de frénésie dans les salons et les tripots clandestins, qu'on ne le faisait auparavant sous la surveillance de la police ? Il suffit de lire les journaux pour répondre à la question.
En Angleterre les jeux sont aussi défendus, et ya -t-il un peuple où il se fait plus de paris. N'y a-t-il pas là des établissements que l'on nomme betting-bank, qui sont de véritables maisons de jeu ?
Mais, dit-on, en Prusse ou ne tolère plus les jeux. Il paraît qu'en effet une ordonnance du roi les a défendus au moment où ils allaient cesser ; déjà pareille mesure avait été prise il y a quelques années, et on sait comment elle a été éludée, au moten de cartes d'invitation. Il n'est donc rien moins que certain qu'on n'autorise pas de nouveau les jeux à Aix-la-Chapelle à la bonne saison.
Du reste, je doute fort que le gouvernement prussien ait été guidé par des sentiments de moralité, si je puis le dire, lorsqu'il a défendu les jeux ; car s'il défend aux autres de tenir des maisons où l'on joue, il continue à être maître de jeu en laissant exister la loterie, qui fait bien plus de victimes que les jeux d'Aix-la-Chapelle puisqu'elle s'adresse aux classes les plus nécessiteuses dans toutes les parties, du pays.
Enfin, messieurs, si vous supprimez les jeux de Spa, vous ruinez entièrement une ville importante et ses nombreux habitants ; vous leur enlevez, pour ainsi dire, des droits acquis par eux depuis un temps presque immémorial, et si vous ne voulez pas même tenir compte de la recette, terme moyen de 150,000 fr., que fait chaque année le trésor public, pensez que celui-ci essuiera des pertes bien plus fortes par la diminution des contributions et des revenus du chemin de fer.
D'ailleurs, messieurs, si l'on veut considérer comme immorale toute combinaison dans laquelle intervient le hasard, ne peut-on pas soutenir que les emprunts à prime que le gouvernement a dernièrement autorisés en faveur de deux villes, sont des espèces de loteries, et qu'ainsi les principes de la morale en exigent aussi bien la suppression que celle des jeux de Spa ?
M. de Mérode-. - On dit que la question n'a pas beaucoup d'importance puisqu'il n'est pas question, dans ce moment, de supprimer les jeux. Mais puisqu'on en a parlé, il est bien permis de dire quelques mots en faveur des principes de moralité et de dignité des gouvernements. Car si on les supprime à Aix-la-Chapelle, c'est qu'on n'a pas trouvé que ce fut pour les gouvernements une manière très digne de recevoir de l'argent. On vient de dire tout à l'heure que nous obtenons ainsi 156,000 francs. Il y a donc une duperie qui s'exerce pour une valeur de 150,000 fr. Il n'y a pas d'égalité entre les parties : chaque coup qui se joue est une perte pour le joueur. Il y a sans doute une chance de gagner, mais en résumé les trois quarts de ceux qui jouent finissent par perdre.
Cette exploitation d'une manie très dangereuse pour les familles ne me paraît pas bien intéressante. Je ne suis pas d'ailleurs persuadé que la ville de Spa n'aurait plus d'étrangers si on n'y jouait plus. On n'a pas cru qu'il n'y aurait plus d'étrangers à Aix-la-Chapelle, parce que les jeux y seraient supprimés.
Je voudrais savoir s'il y a une clause résolutoire de l'arrangement conclu avec Spa pour le cas où les jeux d'Aix-la-Chapelle seraient supprimés.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Non.
M. de Mérode. - Si une pareille chose n'existe pas, nous ne pouvons supprimer les jeux de Spa. Mais je crois qu'on a de très bonnes raisons pour supprimer cette institution partout où l'on peut le faire.
M. Van Overloop. - Messieurs, la question n'est pas, me semble t-il, de savoir s'il est moral ou non de supprimer les jeux publics. La question est de savoir s'il convient, oui ou non, que le gouvernement donne un subside de 20,000 fr. à des jeux publics.
Eh bien, poser cette question, c'est, me semble-t-il, la résoudre. (Interruption.)
- Un membre. - Le gouvernement fait au contraire une recette.
M. Van Overloop. - Si la somme rentre au trésor, je n'insiste pas, car je reconnais que c'est une question de savoir s'il faut, dans l'intérêt de la moralité, supprimer les jeux publics, et cette question je n'oserais la trancher incidemment.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Cette question n'en est pas une.
En réalité, d'après le contrat, le montant des bénéfices se partage entre le gouvernement et les concessionnaires, et l'on prélève sur cette recette 20,000 fr., qui figurent au budget de l'intérieur, pour servir aux embellissements de la ville de Spa et y attirer les étrangers.
M. de Haerne. - J'ai demandé la parole pour faire une observation au sujet de la question qui vient d'être soulevée.
Lorsqu'on sait ce qui se passe dans divers pays en matière de jeu, on ne peut disconvenir que cette passion entraîne de très fàcheuses conséquences, est souvent la cause de grands malheurs, d'actes de désespoir, de ruine. Quand on examine ces tristes résultats, on doit reconnaître qu'il y a quelque chose d'immoral dans les jeux, surtout comme on les tolère dans certains pays.
Quelle est la réponse qu'on fait à cette observation ? La principale raison que l'on allègue en faveur du maintien des maisons de jeu, c'est qu'on prétend qu'en les supprimant, on peut donner lieu à des maux plus grands encore, et qu'il faut, comme le dit M. le ministre de l'intérieur, examiner la question de savoir s'il ne vaut pas mieux régulariser le jeu plutôt que de l'abandonner à lui-même.
Messieurs, cette objection paraît assez subtile et je ne dirai pas que dans certains pays, comme en Amérique, elle n'ait pas quelque fondement. Lorsque la passion du jeu est telle, qu'on désespère de pouvoir l'étouffer ou la comprimer en éloignant les occasions, il est possible qu'il vaille mieux lui donner une certaine direction.
A San-Francisco, par exemple, le mal est tel, qu'on l’augmenterait en supprimant les jeux de hasard autorisés.
Mais telle n'est pas, je crois, la question pour nous. La haute (page 614) moralité qui distingue notre pays ne nous permet pas d'admettre une pareille supposition à l'égard de la Belgique ; et si mes souvenirs me servent bien, c'est ainsi qu'on en a toujours jugé dans cette enceinte. Il y avait autrefois des maisons de jeu non seulement à Spa, mais dans d'autres villes ; on les a supprimées.
Et pourquoi a-t-on maintenu les jeux à Spa ? A cause de la proximité de cette ville à l'égard de l'Allemagne, où de pareilles maisons existaient. On a dit que des maisons de jeu étaient reconnues en Allemagne, et que si l'on supprimait ces réunions à Spa, les étrangers qui aiment le jeu abandonneraient le pays et se porteraient de préférence vers les villes d'Allemagne, que le mal ne serait pas supprimé, mais déplacé. C'est probablement parce que cette coutume existait dans le temps de l'autre côté du Rhin, qu'elle fut aussi tolérée par les princes-évêques de Liège, dont le pouvoir d'ailleurs, comme on sait, était loin d'être absolu, et auxquels par conséquent on ne peut pas imputer toutes les fautes de leur gouvernement.
Telle est, si je ne me trompe, la véritable raison pour laquelle les maisons de jeu ont été maintenues et le sont encore dans la seule localité de Spa. Le gouvernement belge a été engagé par la Chambre à se mettre en rapport avec celui de Berlin pour arriver à la suppression simultanée de ces maisons dans les deux pays.
La question serait de savoir si le motif de l'existence de ces institutions dangereuses en Allemagne est suffisant. Pour moi, il ne le serait pas, si, comme j'en ai la conviction, les jeux donnent lieu chez nous à de graves inconvénients par l'entraînement de l'exemple. Ce n'est pas le cas de dire qu'il faut autoriser les jeux de hasard en Belgique peur empêcher le mal.
Ce qui occasionne le mal dans ce pays, c'est surtout l'exemple, c'est l'occasion. Les jeux clandestins ne sont suivis que par les joueurs d'habitude : les jeux publics entraînent d'autres personnes par une certaine contagion. Il faut apprécier ces questions d'après les circonstances et surtout d'après les mœurs du pays. Or, je le répète, la moralité du peuple belge ne permet pas de supposer qu'il faut maintenir les maisons de jeu, pour atténuer le mal ; c'est tout le contraire. Telle est l'opinion commune en Belgique.
Puisqu'il existe un contrat avec les entrepreneurs de Spa, il ne peut être question de supprimer immédiatement cette institution, dont l'attrait est plus dangereux qu'utile pour le pays en général. Mais je prierai M. le ministre de l'intérieur de nous faire connaître ce contrat à la première occasion, par exemple à l'occasion du budget prochain ; je pense qu'il y aurait lieu d'examiner s'il ne faudrait pas dénoncer le contrat en fixant quelque temps d'avance le terme auquel il viendrait à cesser.
Telle est, je crois, la véritable question dont on doit s'occuper. Elle est très sérieuse et mérite toute l'attention de la Chambre au point de vue moral, point de vue auquel on doit se placer avant tout dans cette enceinte, si l'on veut répondre au sentiment religieux et moral qui distingue la Belgique.
M. Coomans. - On dit que le crédit demandé ne constitue pas pour l’Etat une véritable dépense, attendu qu'il rentre au décuple à peu près dans les caisses du trésor. C'est du moins ce qu'on vient d'affirmer. Eh bien, c'est pour moi un motif de plus de demander la suppression du subside. Si l'Etat et les actionnaires gagnent tant à cette spéculation, et je crois qu'il en est ainsi (un actionnaire m'a dit qu'il recevait annuellement 200 à 300 p. c), je dis qu'il est urgentde la supprimer. Car c'est la démonstration la plus évidente qu'il y a chaque année un très grand nombre de dupes et de malheureux.
On dit encore qu'il y a un contrat par lequel le gouvernement se trouve lié envers je ne sais qui.
Il faut que ce contrat nous soit exhibé, car j'ai lieu de croire qu'il contient une clause résolutoire, qui permet au gouvernement de supprimer le subside, lorsque les jeux n'existeront plus dans une ville voisine, à Aix-la-Chapelle. S'il en est ainsi, le gouvernement doit se hâter de supprimer le subside ; car il ne nous est permis de voter de semblables sommes que lorsque nous y sommes forcés par des engagements formels.
J'interpelle donc formellement le gouvernement sur la question de savoir s'il a le droit de résilier le prétendu contrat, depuis que les jeux ont été supprimés à Aix-la-Chapelle.
Messieurs, on a voulu prouver trop. On a voulu prouver que l'existence des jeux de Spa était utile, parce qu'il valait mieux que le gouvernement présidât à des opérations qui font le malheur de beaucoup de personnes, que de permettre que ce malheur s'accomplît sons un autre patronage que le sien. Messieurs, quand le gouvernement ne peut pas empêcher un mal, ce n'est pas une raison pour qu'il intervienne dans les faits qui l'occasionnent, et s'il y a des gens qui veulent se ruiner, s'il y en a d'autres qui veulent tromper, eh bien, qu'ils aillent ailleurs qu'en Belgique, et que le gouvernement ne favorise pas de semblables abus, sous prétexte d'en diminuer la gravité.
On dit encore que Spa sera ruiné si l'on n'y joue plus. Il me semble que cet argument est un très mauvais service rendu à Spa par ses défenseurs naturels, car c'est dire que Spa n'a d'autre valeur que la roulette, la rouge et la blanche, n'a d'autre attrait que les jeux prohibés ; c'est faire une très mauvaise réclame pour les eaux de Spa, et je vous assure bien, messieurs, que si l'honorable M. Moreau avait raison, je ne retournerais plus à Spa. Ceux qui vont à Spa y vont la plupart pour cause de santé, et je crois qu'il est bien plus profitable à des malades de jouer au pacifique domino que de jouer à la fiévreuse roulette.
Autre chose, messieurs ; s'il est vrai que les jeux de hasard autorisés, subsidiés, réglés et exploités par le gouvernement, soient un obstacle à l'extension de cet abus, pourquoi vous bornez-vous à en ouvrir à Spa ? Pourquoi n'en créez-vous pas dans toutes nos grandes villes ? Pourquoi n'en fondez-vous pas à Ostende, ville qui a demandé la permission d'en ouvrir et qui nous offrait un beau revenu en récompense ? La ville de Bruxelles également, en supposant que son honorable bourgmestre voulût tremper dans cette spéculation, ce que je ne pense pas, la ville de Bruxelles, également, pourrait nous offrir à cette condition un beau supplément de ressources financières.
Eh bien, vous n'oseriez pas le faire, preuve que cette argumentation n'est pas bonne, car si vous avez raison de dire que les jeux publics officiels font plus de bien que de mal, ouvrez-en dans toutes les grandes villes et n'en établissez pas seulement dans des localités éloignées et pour la saison d'été. Les joueurs jouent dans toutes les saisons.
J'appuierai la motion de M. Magherman, et je me réserve de la reproduire l'an prochain si la Chambre l'écarte aujourd'hui. Rien ne nous empêche d'effacer du budget le subside de 20,000 fr. puisque le cabinet a pleinement le droit de résilier l'espèce de contrat qu'il invoque.
M. Orts. - Messieurs, je crois que dans cette affaire il ne faut pas se laisser guider par des idées de morale trop absolue, par un excès de puritanisme ni juger d'une manière trop abstraite, trop exclusivement théorique. Il faut considérer les choses comme elles se passent à Spa, puisque c'est de Spa qu'il s'agit.
En règle générale, je conviens parfaitement avec l'honorable M. de Mérode, que la passion du jeu est contraire à la morale. Mais M. de Mérode en conviendra par contre avec moi, des pays d'une excellente police, des pays parfaitement moraux, sont obligés de tolérer publiquement bien d'autres choses que les maisons de jeu, comme dérivatifs de passions beaucoup moins excusables encore.
Dans les jeux publics, au moins, on est sûr que l'on joue de bonne foi, et lorsque les jeux publics sont supprimés ils sont remplacés immédiatement, parce qu'on peut supprimer ces maisons de jeu mais on ne peut pas supprimer les joueurs, ils sont remplacés immédiatement par une foule de tripots clandestins où l'on « triche », où les « grecs plument les pigeons » pour me servir du langage usité dans ce monde suspect. (Interruption.) Cela est très mauvais sans doute ; mais pouvez-vous l'empêcher ? Allez demander au gouvernement français et à l'administration municipale de Paris s'il n'y avaii pas beaucoup moins de victimes lorsque les maisons de jeu publiques existaient, que depuis qu'elles sont supprimées ? Allez leur demander si le premier joueur venu qui ne connaît pas un certain monde de Paris et qui tombe dans un de ces tripots sur lesquels la police n'a pas la moindre action, n'y est pas inévitablement dépouillé. Voilà pour la question générale.
Au point de vue de Spa, messieurs, ne nous effrayons pas outre mesure de ce qui s'y passe. Les jeux de Spa sont excessivement pacifiques de leur nature ; on y perd de l'argent, sans doute ; l'été, quelques riches étrangers ou quelques hommes de loisir du pays viennent y perdre un certain nombre de pièces de 5 fr, de pièces de 20 fr., si vous le voulez, mais je n'ai jamais ouï dire qu'il se soit ruiné beaucoup de monde à Spa, ni surtout que beaucoup de gens s'y soient suicidés après avoir perdu leur argent ou celui des autres. Ces faits-là se sont passés ailleurs, soit ; mais non à Spa.
Maintenant on dit que la ville de Spa ne sera point perdue si les jeux y étaient supprimés, puisqu'ils sont supprimés ailleurs. Messieurs, on est parfaitement dans l'erreur quand on raisonne ainsi : la ville de Spa, comme toutes les villes d'eaux, a des concurrents, non pas seulement dans Aix-la-Chapelle, mais dans tous les endroits où il existe des eaux et des jeux.
Si vous supprimez les jeux à Spa, vous ne les supprimerez pas à Hombourg, à Wiesbaden, à Ems, à Baden-Baden, et ils sont si peu considérés comme immoraux que des gouvernements très respectables en autorisent l'ouverture récente, dans des villes où il n'en existait pas auparavant. Ils agissent ainsi pour attirer la foule dans des localités bien autrement attrayantes que Spa. Ainsi sur les bords du lac de Genève, par exemple, au milieu des sites les plus pittoresques, les plus propres à attirer les touristes par leurs séductions naturelles, on vient d'autoriser l'ouverture d'une maison de jeux.
Il en existe à Aix eu Savoie, et tout récemment le gouvernement grand ducal de Luxembourg ne vient-il pas de proposer à la Chambre d'autoriser les maisons de jeu aux bains de Mendorff ? La Prusse les a supprimés à Aix-la-Chapelle. Le roi de Sardaigne, le duc de Nassau, le grand-duc de Bade les autorisent en d'autres localités. Les jeux publics ne sont donc pas considérés universellement comme cas pendable.
Maintenant l'honorable M. Coomans m'objecte : Si vous jugez les jeux publics nécessaires, bons, utiles, pourquoi ne les autorisez vous pas à Bruxelles, à Ostende ? Ostende vous a demandé à pouvoir en établir, et a offert un bon prix pour l’obtenir. Je réponds, messieurs, par la raison qui a déterminé le gouvernenent prussien à supprimer les jeux d'Aix-la-Chapelle.
Les maisons de jeu peuvent être très peu dangereuses dans une petite localité, comme Spa, où les règlements en interdisent l'entrée à la population indigène, où les règlements qui l'en excluent sont d'une exécution très facile, parce que les habitants peu nombreux sont parfaitement connus ; mais dans une ville comme Aix-la-Chapelle, où il y a (page 615) des caissiers, des employés de maisons de banque, qui ont tous les jours la main sur des sommes considérables qui ne leur appartiennent pas et dont l'éclat les tente, là le danger est plus grand, là le gouvernement fait bien, par conséquent, de ne pas autoriser les maisons de jeu. Voilà pourquoi le gouvernement prussien a supprimé les jeux à Aix-la-Chapelle, tandis que des gouvernements non moins moraux les autorisent à Hombourg, à Ems, sur les bords du lac de Genève, etc.
A Ostende et surtout à Bruxelles des maisons de jeu pourraient présenter des dangers qu'elles ne présentent point à Spa. La tentation serait très grande pour une foule de gens qu'on ne pourrait pas reconnaître facilement à l'entrée et auxquels, par conséquent, on ne pourrait pas interdire la porte comme on peut le faire aux habitants d'une petite ville.
Du reste, il y a une autre raison : on a refusé à Ostende et à Bruxelles la permission d'établir des maisons de jeu ; pourquoi ? Parce que la loi le défend ; pour autoriser des maisons de jeu dans ces villes, il faudrait l'intervention du pouvoir législatif ; au contraire, il y a un décret impérial, un décret ayant force de loi, celui que le gouvernement grand ducal va appliquer aux bains de Mondorff dans le Luxembourg, qui permet au gouvernement d'autoriser l'ouverture de maisons de jeu en Belgique et en France dans les villes où les malades vont prendre les eaux minérales ; or, comme les eaux de la mer ne sont pas minérales, et que la capitale, loin de posséder la moindre eau minérale, en est réduite à chercher jusqu'à l'eau potable au dehors par des travaux gigantesques, le gouvernement ne peut appliquer le décret impérial de 1809 ni à Bruxelles, ni à Ostende, en eût-il le désir ou la volonté.
Fallût-t-il se placer sur ce dernier terrain, tout en convenant des dangers immenses, mais tout spéciaux d'une maison de jeu à Bruxelles, il me viendrait peut-être encore un doute à l'esprit.
Messieurs, je connais un peu par les voyages la ville de Spa et les autres villes que j'ai citées où existent des maisons de jeu, non pas que j'y aie jamais perdu ni gagné grand'chose, mais je les ai pratiquées. Eh bien, il est à ma connaissance qu'à Bruxelles, dans certaines sociétés qui ne sont cependant critiquées par personne, au su et au vu de tout le monde, il se perd tous les soirs d'hiver au lansquenet, au bacarat et à l'écarté ; il se perd, dis-je, tous les jours plus d'argent qu'il ne s'en perd dans la ville de Spa en une journée d'été. Je ne parle même pas de l'innocent domino, cité par l'honorable M. Coomans, où l'on peut perdre, si l'on veut, autant et plus qu'à la roulette.
Un journal n'a-t-il pas récemment rapporté ce fait qu'un négociant lyonnais avait réussi au domino à perdre 24,000 à 25,000 fr. en une soirée ?
M. Coomans. - C’était un fou.
M. Orts. - Tous les joueurs sont un peu fous, M. Coomans...
M. Coomans. - Le gouvernement n'a pas à se mêler des fous.
M. Orts. - Pardonnez-moi. Si le gouvernement permettait aux fous de courir les rues sans surveillance ni contrôle, la chose pourrait avoir ses dangers. (Interruption.)
Je persiste à dire qu'il se perd plus d'argent et plus facilement en une nuit de lansquenet à Bruxelles qu'en un jour, et que ruiner Spa, n'empêchera jamais les joueurs de se ruiner eux-mêmes.
- L'article 139 est mis aux voix et adopté.
« Art. 140. Traitements temporaires de disponibilité : fr. 10,859 16. »
La section centrale, d'accord avec le gouvernement, réduit le chiffre à 10,594 fr. 16 c.
- Ce chiffre est adopté.
« Art. 141. Dépenses imprévues, non libellées au budget : fr. 9,900. »
- Adopté.
M. le président. - La Chambre avait tenu en suspens deux articles ; à l'article 56, il s'agissait de déterminer :
1° Le chiffre pour achat d'instruments aratoires nouveaux ;
2° Le chiffre pour dépenses diverses.
La section centrale, d'accord avec le gouvernement, a proposé : Quant au n° 1°, 6,700 fr., dont 3,000 fr. seraient portés dans la colonne des dépenses ordinaires et 3,700 fr. dans la colonne des dépenses extraordinaires. Quant au n° 2°, 10,500 fr.
Les propositions de la section centrale sont successivement mises aux voix et adoptées.
Par suite des votes qui précèdent et des votes déjà émis par la Chambre sur l'article 56, cet article serait formulé ainsi :
« Conseil supérieur et commissions provinciales d'agriculture ; subsides pour concours et expositions ; encouragements aux sociétés et aux comices agricoles ; achats d'instruments aratoires nouveaux à distribuer par l'entremise des commissions d'agriculture ; dépenses diverses : fr. 94,000, dont 90,300 fr. à porter à la colonne des charges ordinaires et permanentes et 3,700 fr. à la colonne des charges extraordinaires et temporaires. »
- L'ensemble de l'article 56, tel qu'il est formulé ci-dessus, est mis aux voix et adopté.
M. le président. - Le second article que la Chambre avait tenu en réserve est l'article 89. Cet article est ainsi conçu :
« Art. 89. Frais de l'enseignement normal pédagogique destiné à former des professeurs pour les établissements d'instruction moyenne (bourses) (article 38, paragraphe 3, de la loi du 1er juin 1850) : fr. 40,300. »
Le gouvernement a demandé une augmentation de 7,000 fr. La section centrale propose d'accorder cette augmentation. Le chiffre de l'article 89 serait donc de 47,300 fr.
- Ce dernier chiffre est mis aux voix et adopté.
Sur la proposition de M. le président, la Chambre fixe le vote défiqitif du budget de l'intérieur à vendredi prochain.
M. le président. - La Chambre avait renvoyé à la section centrale quatre pétitions :
La première, souscrite par 32 individus qui se qualifient de blessés de septembre, et qui, après avoir exposé que M. le ministre de l’intérieur leur a fait connaître, par l'intermédiaire du gouverneur du Brabant, les motifs qui ne permettent pas soit de les relever de la déchéance qu'ont encourue les combattants de septembre, pour l'obtention de la croix de fer, soit même de reconnaître leurs droits à cette faveur, s'ils n'en étaient pas déchus, demandent que le subside au fonds spécial des blesses de septembre soit augmenté de manière à ce qu'ils puissent, comme d'autres qui, disent-ils, jouissent déjà de cet avantage, être assimilés pour la pension aux décorés de la croix de fer.
La deuxième, souscrite par le sieur J. Roulot, se disant ancien militaire, lequel prie la Chambre d'augmenter l'allocation destinée aux pensions des décorés de la croix de fer, de manière à pouvoir accorder cette pension à un grand nombre de décorés nécessiteux, qu'il dit en être privés.
La troisième a été présentée par un sieur Thonus, au nom des veuves Corbesier et Rombout. Elle tend à obtenir que la pension de cent francs dont ces femmes jouissent comme veuves de décorés de la croix de fer, soit portée à deux cents francs, en les rangeant ainsi, dit le pétitionnaire, sur la même ligne que les veuves de légionnaires, qui jouissent d'une pension de survivance de deux cents francs.
La section centrale propose de renvoyer ces trois pétitions à M. le ministre de l'intérieur.
- Ce renvoi est ordonné.
M. le président. - Quant à la quatrième pétition, envoyée par l'administration commnunale de Quaregnon, la Chambre, dans une séance précédente, en a déjà ordonné le renvoi à M. le ministre de l'intérieur avec demande d'explications.
M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi sur l'enseignement agricole.
M. le ministre de l'intérieur (M. Piercot). - Je demande que la Chambre veuille bien ne s'occuper de cet objet qu'après la discussion du projet de loi concernant la police sanitaire des animaux domestiques.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président. - On pourrait s'occuper du projet de loi interprétatif de l'article 13 de la loi sur la presse et dont la discussion a été retardée par suite de l'indisposition de M. le ministre de la justice.
M. le ministre de la justice (M. Faider). - Je suis prêt à aborder cette discussion, de même que celle qui concerne la réciprocité internationale en matière de sociétés anonymes ; mais je demanderai que cet objet ne vienne à l'ordre du jour que demain.
- Cette proposition est adoptée.
M. Orts. - Messieurs, puisque le projet de loi interprétatif de l'article 13 de la loi sur la presse est mis à l'ordre du jour de demain, je dois prévenir M. le ministre de la justice et la Chambre qu'il s'est glissé une erreur de rédaction dans l'amendement que j'ai eu l'honneur de déposer. Je la corrigerai pour demain. Mais il est bien entendu, quant au sens, que je propose le système des cours d'appel.
M. Coppieters. - Par pétition, datée de Bruxelles le 11 mars 1854, le sieur Sandrin réclame l'intervention de la Chambre, à l'effet d'être indemnisé des pertes qu'il a éprouvées par suite des événements de la révolution.
Le pétitionnaire expose qu'il a fait sans succès de nombreuses démarches pour obtenir l'indemnité à laquelle il prétend avoir droit, en vertu de la loi du 1er mars 1842, qu'il a renouvelé sa demande par deux requêtes adressées à M. le ministre de l'intérieur, l'une le 26 décembre 1853, l'autre le 9 février 1854 et qu'aucune réponse ne lui a été faite. La commission, sans entendre préjuger le mérite de la réclamation du sieur Sandrin, a l'honneur de vous proposer le renvoi de sa pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition, datée de Thielt, le 12 mars 1834, le sieur Feys, capitaine pensionné, demande la révision de sa pension.
(page 616) Le pétitionnaire prétend avoir droit à une augmentation de pension pour la campagne de 1815, qui a été omise dans ses états de service.
La commission estime qu'il y a lieu de renvoyer cette pétition à M. le ministre de la guerre.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition, datée de Bellefontaine le 11 mars 1854, le sieur Maître-jean, juge de paix du canton d'Etalle, prie la Chambre de maintenir dans le projet de loi sur la contribution personnelle, la faculté de déclarer des chevaux mixtes ou de comprendre les juges de paix des campagnes dans l'exception proposée en faveur des médecins, notaires, huissiers, etc.
La commission, ne pouvant reconnaître aux motifs invoqués par le pétitionnaire aucun caractère d'utilité générale, propose l'ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition, datée de Malines le 16 mars 1854, le sieur Van Beveren, ancien notaire, demande un emploi ou une indemnité.
La commission, considérant qu'il n'entre pas dans les attributions de la Chambre de statuer sur des demandes de cette nature, propose l'ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition datée d'Etalle, le 24 décembre 1853, plusieurs receveurs communaux demandent que la loi du 29 avril 1819 soit révisée et qu'il leur soit permis d'exercer les poursuites contre les débiteurs de la caisse communale, par le ministère des porteurs de contraintes, comme cela se pratique en matière de contributions directes.
Par pétition datée du 22 mars 1854, le sieur Gassart, receveur de Jodoiguc, fait la même demande.
La commission propose le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des finances.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par deux pétitions, datées de Bruxelles, l'abbé Meynders, ancien curé aumônier, demande l'intervention de la Chambre pour obtenir la révision de sa pension.
Les motifs invoqués par le pétitionnaire à l'appui de sa requête se trouvant développés dans une brochure qui a été distribuée à tous les membres de la Chambre, la commission croit pouvoir se dispenser d'en faire l'analyse ; elle propose de renvoyer la pétition du sieur Meynders à M. le ministre de la justice.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition datée de Grimberghen, le 9 avril 1854, le sieur Pyssot, cultivateur à Grimberghen, réclame l'intervention de la Chambre pour être indemnisé des pertes qu'il a subies par suite de la destruction de sa récolte en 1853.
La commission propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition en date du 25 mars 1854, plusieurs secrétaires communaux du canton de Florennes, province de Namur, demandent une loi qui permette au gouvernement et aux députations permanentes des conseils provinciaux, d'améliorer la position des secrétaires communaux en fixant leurs traitements d'après la population des communes. Les mêmes pétitionnaires réclament l'intervention de la Chambre afin qu'il leur soit permis de participer à la caisse des pensions de retraite, ou qu'une caisse soit instituée en leur faveur, à l'instar de celles des instituteurs primaires.
Par pétition datée de Noduwez-Linsmeau, le sieur Falckenberg, secrétaire communal, demande également l'établissement d'une caisse de retraite en faveur des secrétaires communaux.
La nécessité d'améliorer la position des secrétaires communaux et d'assurer par des mesures de prévoyance l'avenir de ces fonctionnaires est depuis longtemps généralement reconnue : aussi la commission se serait-elle empressée d'appuyer sans réserve les pétitions des secrétaires communaux, si l'une d'elles ne provoquait des modifications à la loi communale. En ce point, la commission ne saurait partager la manière de voir des pétitionnaires ; elle estime qu'il n'y a pas lieu d'amoindrir les attributions des conseils communaux, que c'est à ces collèges à apprécier si les ressources dont ils disposent permettent de rémunérer d'une manière plus équitable leurs secrétaires respectifs, et que l'autorité supérieure ne doit intervenir dans la fixation des traitements de employés communaux que pour sanctionner les résolutions prises par les administrations locales. Cette réserve faite, la commission proposes le renvoi des pétitions dont il s'agit à M. le ministre de l'intérieur.
M. Lelièvre. - J'appuie les conclusions de la commission. La caisse des retraites est une institution de progrès que l'on ne saurait assez favoriser. Ses bienfaits seront de jour en jour mieux appréciés ; et en ce qui me concerne, j'appelle toute la sollicitude du gouvernement pour assurer la prospérité de celle excellente institution.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition datée d'Irchonwelz, le 18 avril 1854, les sieurs Seghers, Peltier et Bille, miliciens de la classe de 1854, réclament l'intervention de la Chambre pour qu'il soit sursis à leur incorporation jusqu'à ce que l'autorité compétente ait statué sur leur réclamation contre la radiation du milicien Forgeois de la liste du tirage de 1853 et que les miliciens Bethune et Pilate aient été reportés sur les listes alphabétiques de 1854.
Les pétitionnaires ayant fait retirer du greffe de la Chambre les pièces qu'ils avaient produites à l'appui de leur réclamation, la commission estime qu'il n'y a plus lieu de s'occuper de leur pétition et propose l'ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition en date du 27 avril 1854, des miliciens de Gérouville demandent que la Chambre intervienne pour faire annuler le tirage au sort qui a eu lieu dans cette commune le 13 février 1854.
Les pétitionnaires se plaignent de ce que la députation permanentedu Luxembourg ait prescrit un tirage supplémentaire. Ils prétendent que cette opération est injuste et qu'elle consacre un privilège en faveur du milicien qui y est soumis. Ils demandent qu'il soit ordonné un nouveau tirage auquel tous les miliciens prendraient part.
Le tirage supplémentaire contre lequel les pétitionnaires réclament ayant eu lieu en vertu des dispositions légales sur la matière, la commission conclut à l'ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition datée de Grimbergen, le 28 avril 1854, la veuve Biesemans demande que son fils soit libéré du service militaire comme soutien de veuve ou tout au moins qu'il obtienne une année d'ajournement.
La commission, considérant que la pétitionnaire ne signale aucun fait qui puisse motiver l'intervention de la Chambre, propose l'ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition en date du 17 mai 1854, des membres du conseil communal de Neufchâteau demandent que la Chambre fasse opérer la rectification du budget de leur commune, conformément aux résolutions prises par la majorité du conseil communal.
Les pétitionnaires exposent que le conseil communal a proposé de modifier les traitements du bourgmestre, des échevins, du secrétaire et du garde champêtre et que la députation permanente, sans égard pour les motifs qui avaient guidé le conseil, a maintenu ces traitements à leur chiffre primitif ; ils prient la Chambre de vouloir ordonner la rectification du budget conformément aux résolutions prises par la majorité du conseil communal.
La commission, considérant que la décision dont se plaignent les pétitionnaires a été prise par la députation permanente en vertu des attributions que le conseil communal lui a conférées, que d'ailleurs le conseil communal pouvait réclamer auprès du Roi, s'il se croyait lésé (article 133 loi communale) conclut à l'ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition datée d'Ypres, le 28 octobre 1854, le sieur Van Caeseele, marchand et fabricant d'ornements d'église à Ypres, demande à être indemnisé des pertes qu'il a éprouvées en descendant avec ses marchandises de la nacelle qui remplaçait provisoirement le bac au passage de Visé sur la Meuse.
La commission propose l'ordre du jonr.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition datée d'Anvers, le 15 novembre 1854, lesieur Van Loock demande une modification à la loi électorale en ce qui concerne le mode de voter.
La commission propose le dépôt de cette pièce au bureau des renseignements.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Coppieters. - Par pétition sans date, les commissaires de police faisant fonction de ministère public dans les cantons de Meulebeke, Thourout, Ardoye, Thielt, Ingelmunster, Courtrai, Avelghem, Ypres, Ruysselede, Roulers, Menin et Poperinghe demandent que leur position soit améliorée.
Les pétitionnaires exposent que la loi du 1er mai 1849, sur l'organisation judiciarc, a considérablement étendu les attributions des commissaires de police dans les chefs-lieux de cantons, qu'avant l'introduction de cette loi leurs fonctions étaient presque exclusivement locales, que depuis elles sont devenues en quelque sorte cantonales, et que jusqu'à présent il ne leur a été tenu aucun compte du surcroît de besogne qui leur a été imposé ; ils prient la Chambre d'intervenir pour qu'une indemité leur soit allouée sur les fonds du trésor.
La commission estime que ces observations méritent d'être prises en très sérieuse considération, et qu'il importe que le gouvernement en fasse l'objet d'un examen approfondi avant la présentation du nouveau projet d'organisation judiciaire. Elle vous propose, en conséquence, de renvoyer la pétition à M. le ministre de la justice.
- Ces conclusions sont adoptées.
La séance est levée à 4 heures et demie.