(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)
(page 1) La disposition de la salle de la Chambre des représentants est la même qu'aux précédentes séances royales. Le trône surmonté d'un dais remplace le bureau du président. Une tribune destinée à la Famille royale est placée dans la salle contre la porte qui conduit au local du Sénat.
Le couloir, derrière les bancs des membres, est réservé aux dames.
Les portes sont ouvertes à midi ; les tribunes publiques et réservées sont aussitôt envahies.
On remarque dans la tribune diplomatique le nonce du pape et les divers ministres plénipotentiaires et chargés d'affaires accrédités près de la cour de Bruxelles.
A midi et demi M. le baron de Pélichy Van Huerne, sénateur, doyen d'âge des deux Chambres, vient occuper le fauteuil. A ses côtés siègent au bureau, comme secrétaires, MM. de Mérode-Westerloo et Calmeyn, membres de la Chambre des représentants.
Il est procédé, par la voie du tirage au sort, à la composition des députations chargées de recevoir Sa Majesté et LL. AA. RR. le Duc de Brabant, le Comte de Flandre, la Duchesse de Brabant et la Princesse Charlotte.
La députation chargée de recevoir S. M. le Roi se compose de MM. Michiels, chevalier du Trieu, prince de Ligne, Laoureux, baron de Tornaco, Pollet, sénateurs, et MM. Moreau, Looz, Devaux, Faignart, Lelièvre, Lesoinne, Van Grootven, Goblet, Boulez, de Chimay, Thienpont et Thiéfry, représentants.
La députation chargée de recevoir LL. AA. RR. se compose de MM. Savart et d'Hoop, sénateurs, et MM. Dellafaille, Max. de Renesse, de Moor et Mathieu, représentants.
Les députations, précédées de MM. les questeurs des deux Chambres, se retirent pour recevoir S. M. et LL. AA. RR.
A une heure, S. A. R. le Comte de Flandre, S. A. R. et I. la Duchesse de Brabant et S. A. R. la Princesse Charlotte prennent place dans leur tribune. Leur entrée est saluée par de vifs applaudissements.
A une heure dix minutes, le Roi, accompagné de S. A. R. le Duc de Brabant, entre, précédé de la grande députation et suivi de M. le grand maréchal du palais, de ses aides de camp et d'un brillant état-major.
Sa Majesté et Son Altesse Royale sont accueillies par des applaudissements prolongés et par les cris répétés de : « Vive le Roi ! »
Son Altesse Royale le Duc de Brabant va prendre place sur le premier banc de l'assemblée ou se trouvent déjà M. le prince de Ligne, M. le comte de Renesse et M. d'Omalius d'Halloy, président et vice-président du Sénat pendant la dernière session.
Le Roi salue l'assemblée, s'assied, se couvre et prononce le discours suivant.
Messieurs,
En présence de la guerre qui afflige une partie de l'Europe, la Belgique sent plus vivement que jamais le prix d'une neutralité que fortifient la confiance et les sympathies de toutes les Puissances. Toutes les Puissances, en effet, continuent à nous donner des marques de leur estime et de leur bon vouloir.
Dans cette position, en quelque sorte privilégiée, la Belgique se livre avec sécurité aux travaux de la paix.
L'instruction publique, à tous les degrés, est l'objet d'une constante sollicitude ; Mon Gouvernement est pénétré de l'importance de ce grand intérêt social ; les lois qui le règlent reçoivent une exécution conforme à leur esprit.
Votre attention, Messieurs, sera appelée sur l'organisation du jury d'examen de l'enseignement supérieur.
Nos artistes soutiennent dignement la vieille renommée de l'école belge ; l'Exposition de 1854 en a offert une preuve éclatante.
Les lettres et les sciences justifient, par des progrès incontestés, les encouragements que l'Etat leur assure.
Dans l’ordre matériel, l'industrie et l'agriculture attestent par leurs heureux développements qu'elles sont aussi l'une des forces et l'une des gloires du Pays.
En bénissant la Providence de nous avoir accordé le bienfait d'une récolte favorable, Je constate avec douleur l'influence quel es événements exercent sur le prix de toutes les denrées alimentaires. Mon Gouvernement vous proposera les mesures qu'il juge propres à améliorer cette situation, et j'espère que les ressources du travail et la sollicitude des classes aisées parviendront à soulager les souffrances de nos excellentes populations ouvrières.
Notre commerce extérieur suit, en général, une marche ascendante.
Un traité conclu avec le Mexique mettra désormais notre pavillon à l'abri des surtaxes inscrites dans l'acte de navigation de ce pays ; il imprimera un nouvel élan à nos relations avec l'un des principaux débouchés transatlantiques.
Vous aurez aussi à examiner, Messieurs, une convention destinée à garantir la propriété artistique et littéraire entre la Belgique et la Grande-Bretagne et à améliorer, par l'abaissement des tarifs, la position de notre commerce de librairie sur le plus important de ses marchés.
L'organisation judiciaire et l'institution du notariat ont donné lieu à des travaux dont les résultats vous seront soumis.
La deuxième partie du nouveau Code pénal pourra également faire l'objet de vos délibérations.
L'achèvement des chemins de fer dont l'exécution est confiée à des compagnies aura bientôt complété un ensemble de voies de communication, dont peu de contrées offrent l'exemple.
(page 2) Les sociétés concessionnaires ont rencontré dans les circonstances des obstacles imprévus ; elles n’en ont point été découragées.
L'augmentatiqn progressive des produits de l'exploitation de nos voies ferrées démontre la prospérité actuelle et présage la prospérité à venir de cette grande entreprise nationale.
Cette augmentation et celle de plusieurs autres branches du revenu public ont dépassé les prévisions et dispenseront de recourir à un nouvel impôt.
L'emprunt que vous aviez autorisé a été conclu. Il a permis à Mon Gouvernement d'exécuter, sans perte pour le Trésor, la loi du 28 décembre 1850, sur la démonétisation des pièces d'or.
Il vous sera rendu un compte spécial de ces deux opérations.
L'armée, pénétrée de ses devoirs, s'y dévoue complètement. De même que la garde civique, elle est digne de votre sollicitude et de la confiance du Pays. L'une et l'autre sont unies par une même pensée d'ordre et d'attachement à l'indépendance nationale.
Cette indépendance, Messieurs, s'est affermie, et nous pouvons envisager l'avenir sans inquiétude. Toutefois, la tâche du Pouvoir a d'inévitables difficultés ; il en existe de particulières dans la situation présente. Vous en tiendrez compte, Messieurs ; votre patriotisme Me l'assure, et c'est avec confiance que Je réclame pour Mon Gouvernement votre concours bienveillant et efficace.
- Ce discours, écoulé avec recueillement, est accueilli par de vifs applaudissements.
Le Roi, après avoir salué l'assemblée, se retire avec le même cérémonial avec lequel il a été introduit et au milieu des plus chaleureux applaudissements, accompagnés des cris de « Vive le Roi ! » qui partent de tous les points de la salle.
S. A. R. le Comte de Flandre, S. A. I. et R. la Duchesse de Brabant et S. A. R. la Princesse Charlotte se retirent et sont saluées de vives acclamations.
La cérémonie est terminée à une heure et demie.
Le Sénat se retire dans la salle de ses délibérations.
(Présidence de M. Van Remoortere, doyen d’âge)
La séance est ouverte à une heure et demie.
M. de Mérode-Westerloo et M. Calmeyn remplissent les fonctions de secrétaires.
M. de Mérode-Westerloo présente l'analyse des pièces suivantes, adressées à la Chambre.
« Plusieurs électeurs d'Anvers demandent l'annulation d'une élection qui a eu lieu dans cette ville, le 13 juin dernier. »
- Renvoi à la commission de vérification,des pouvoirs.
« Le sieur Jacques, ancien membre du Congrès national, présente une réclamation concernant l'élection de Marche. »
« Même réclamation du baron Coppens, ancien sénateur. »
« Même réclamation des sieurs Bourguignon, Dauloy, Geubel, Hippolyte et Edouard Orban et du sieur Constant. »
- Même renvoi.
« M. le ministre de l'intérieur transmet à la Chambre une réclamation qui lui a été adressée concernant l'élection de Bastogne. »
- Même renvoi.
M. le président d’âge. - Nous allons procéder au tirage au sort des commissions chargées de vérifier les pouvoirs des membres élus dans l'intervalle des sessions.
M. Verhaegen. - Cet objet n'est pas à l'ordre du jour.
M. Landeloos. - On a toujours procédé ainsi.
M. Verhaegen. - Il peut y avoir des antécédents ; mais de moment qu'il y a opposition, il faut procéder régulièrement. Je m'oppose formellement à ce que l'on procède aujourd'hui à la composition des commissions, d'autant plus que nous sommes à peine trente membres.
M. Dumortier. - Depuis vingt-cinq ans on a toujours nommé les commissions de vérification de pouvoirs le jour même de l'ouverture.
M. Verhaegen. - Je déclare m'y opposer d'une manière formelle.
- Des membres. - Demain à midi.
M. le président. - La Chambre se réunira demain à midi pour procéder à la composition des commissions de vérification des pouvoirs.
- La séance est levée à 1 heure trois quarts.