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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 20 décembre 1853

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1853-1854)

(Présidence de M. Delfosse.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 321) M. Maertens procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.

M. Ansiau lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Maertens présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Dekosler, douanier en retraite, prie la chambre de lui accorder un secours. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

« Les facteurs ruraux attachés au bureau de Wavre demandent uue augmentation de traitement. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics.

Projet de loi augmentant temporairement le contingent de la contribution foncière

Rapport de la section centrale

M. Mercier. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi sur l'augmentation temporaire du contingent de la contribution foncière.

- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et le met à la suite des objets à l'ordre du jour.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l’exercice 1854

Discussion du tableau des crédits

Chapitre II. Ponts et chaussées. Bâtiments publics

Section III. Service des canaux et rivières, des bacs et bateaux de passage et des polders
Article additionnel

M. le président. - La discussion continue sur la proposition de la section centrale relative à la reprise de divers canaux et rivières, et sur les amendements qui se rattachent à cette proposition.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, à la suite de la discussion qui s'est engagée hier, je crois devoir donner à la Chambre quelques développements qui seront peut-être de nature à calmer les inquiétudes que pourrait exciter chez quelques-uns le vote de l'amendement tel qu'il est proposé par la section centrale.

Je ferai d'abord remarquer à la Chambre que le débat a pris une toute autre direction que celle à laquelle je m'attendais. Je croyais tout d'abord que j'aurais eu à combattre, dans le cours de la discussion, ceux qui, comme l'honorable comte de Mérode, veulent supprimer la restriction que le gouvernement met à la reprise des cours d'eau compris dans l'arrêté de 1819, et en fait il se trouve que le gouvernement a à défendre le principe même de la reprise avec la restriction qu'y met la section centrale, et qu'adopte le gouvernement.

Les craintes exprimées par les honorables membres hostiles à la proposition de la section centrale, peuvent, selon moi, se résumer dans les points suivants :

Puisqu'une loi, dit-on, doit intervenir sur cette matière, loi destinée à régler la part contributive des provinces, des communes et des particuliers dans l'exécution des travaux extraordinaires à faire à ces cours d'eau, pas n'est besoin de décréter dès à présent le principe de la reprise de la Nèthe, de l'Yser, etc. Voilà une première objection.

Une autre objection peut se résumer ainsi : cette reprise anticipée doit engager le trésor dans une voie des plus dangereuses ; elle sera de nature à compromettre l'avenir de nos finances ; elle enchaînera l'action du gouvernement qui, sous la pression des intérêts locaux, ne pourra pas se soustraire dans la suite aux dépenses extraordinaires que viendront réclamer les provinces et les riverains.

Une troisième objection est celle-ci : Où s'arrêtera-t-on ? Qui nous dit que lorsque l'on aura accepté la reprise de l'Yser, de la Nèthe et des autres cours d'eau compris dans l'amendement, on ne viendra pas proposer au gouvernement de reprendre successivement tous les petits ruisseaux qui sont en Belgique ?

Voilà bien, je pense, dans toute leur force, les objections qui ressortent de la discussion qui s'est engagée hier devant la Chambre.

Avant de les rencontrer, je crois devoir donner à la Chambre quelques explications sur les précédents de cette affaire.

Il y a, messieurs, dans la question qui se rapporte à la reprise des cours d'eau compris dans l'arrêté de 1819, deux périodes bien distinctes. La première s'ouvre en 1838 ; la seconde commence seulement en 1840.

En 1838, quand le gouvernement est venu proposer aux chambres la reprise de la Meuse, de l'Escaut et de la Lys, il était surtout déterminé par des considérations d'intérêt public ; c'était afin de soustraire ces grandes rivières qui traversent plusieurs provinces, qui se lient au système de navigation avec les pays étrangers, à l'oubli, à l'abandon où elles étaient tombées, afin d'imprimer à leur administration plus d'unité et d'ensemble, afin de coordonner le système de travaux que ces rivières réclamaient, que le gouvernement est venu proposer en 1838, au nom de l'intérêt public, la reprise de l'Escaut, de la Meuse et de la Lys.

Je trouve la démonstration de ce fait dans les documents parlementaires de cette époque. Je la trouve dans le rapport que l'honorable M. Nothomb, ministre des travaux publics à cette époque, a soumis aux Chambres. Je la trouve dans la discussion de la Chambre. Je la trouve enfin dans les débats qui ont eu lieu en 1838 à l'occasion de la reprise du canal de Mons à Condê.

Voici, messieurs, en quels termes s'exprimait le ministre des travaux publics en 1838 :

« L'Etat s'est déjà remis en possession de celles des routes de première classe dont l'administration avait été attribuée aux provinces.

» En proposant des allocations pour des travaux à faire, dans le cours de 1839, à l'Escaut, à la Lys et à la Meuse, le gouvernement croit devoir y mettre pour condition la reprise de ces rivières, à partir du 1er janvier 1840.

« L'avenir décidera jusqu'à quel point l'utilité publique ou la justice envers les provinces exige que d'autres ouvrages rentrent encore dans l'adminislralion de l'Etat. »

Dans la suite du rapport, l'honorable ministre de cette époque justifie les considérations d'intérêt public qui réclamaient la reprise de ces grandes voies fluviales de premier ordre et dans la séance du 25 décembre 1838, il s'exprimait ainsi :

« M. le ministre des travaux publics. - Du moment qu'on abandonne le premier fleuve de la Belgique aux provinces et aux propriétaires, l'administration est sans point central, sans unité ; on divise ce qui est indivisible par la nature même des choses ; car enfin l'Escaut ne peut pas se diviser, il présente un ensemble d'administration ; ce qui se fait à Tournai doit se coordonner avec ce qui se fait à Audenarde et à Gand, et réciproquement. Cependant le moyen de coordination (si je puis m'exprimer ainsi) n'existe pas ; car ces autorités se trouvent l'une à côté de l'autre, et n'ont pas le droit d'agir l'une sur l'autre. Qu'arrive-t-il dans ces conflits perpétuels quand un embarras majeur se présente ? On a recours au ministre à qui on au ministre à qui on a soustrait l'administration du fleuve, pour demander qu'il mette fin au conflit, qu'il fasse cesser les embarras, quand il est reconnu que les autorités locales et provinciales ne peuvent pas y mettre un terme à elles seules.

« C'est aussi au gouvernement central que s'adresse le commerce étranger, car l'Escaut ne présente pas seulement un grand intérêt pour la Belgique, mais aussi pour les nations étrangères ; c'est pour cela que l'Escaut a été rangé parmi les fleuves qu'on doit considérer comme étant du droit des gens. C'est au gouvernement que la France s'adresse quand la retenue extraordinaire d'eau qu'on est obligé de faire dans le petit bief d'Antoing à Tournai, fait refluer les eaux en France. C'est le gouvernement central qui est responsable vis-à-vis du commerce étranger. Ainsi, on a eu beau faire, on a voulu morceler le fleuve, le fleuve ne s'est pas prêté au morcellement. Le gouvernement paraît étranger à l'adminislralion de ce fleuve, il l'est en effet ; mais quand il s'agit de rétablir l'unité dans cette administration, c'est à lui qu'il faut s'adresser, parce que lui seul est capable de la rétablir. »

Plus loin, il réclamait également, au nom, en quelque sorte, du droit international, la reprise de ces rivières par l'Etat.

Dans la séance du 25 décembre 1838, l'honorable M. Desmet, député d'Alost, avait demandé que la reprise ne fût pas limitée à l'Escaut, à la Meuse et à la Lys, mais que le gouvernement rapportât complètement l'arrêté de 1819, et fît rentrer dans les mains de l'Etat toutes les rivières navigables et flottables abandonnées aux provinces en 1819. Le ministre des travaux publics répondit en ces termes :

« L'honorable préopinant pense qu'il faut insérer dans la loi du budget, car c'est une loi que nous faisons, que l'Etat reprendra tout ce qui a été attribué aux provinces en 1819. Messieurs, c'est sans doute un sentiment de justice qui anime le préopinant, mais l’honorable M. Gendebien lui a déjà répondu.

« Le gouvernement reconnaît qu'il est d'intérêt général que l'Etat se remette en possession de nos trois grandes rivières, l’Escaut, la Lys et la Meuse : faut-il faire davantage et reprendre toutes les autres rivières navigables ? Mais attendez que les provinces fassent leurs réclamations ; si ces réclamations sont justes, vous ne les repousserez pas. »

Je n'ai pas besoin, messieurs, de rappeler ici la discussion de 1843 qui eut lieu à l'occasion de la reprise du canal de Mons à Condé. Elle démontre également de la manière la plus évidente, que l'intérêt qui, en 1838, guidait le gouvernement, en ce qui concerne la reprise de l'Escaut, de la Lys et de la Meuse était l'intérêt national.

Voilà, messieurs, la première période.

Mais en 1840 c'est un autre système qui prévaut chez le gouvernement. Le gouvernement vient proposer à la Chambre, par la loi du 18 février 1840, de reprendre la Dendre, la Dyle, le Demer et le Ruppel et par la loi de budget de 1843 il propose d'y ajouter encore le canal de Gand à Ostende. Toutes les discussions qui se sont élevées à l'occasion de la reprise de ces cours d'eau que j'appellerai des voies de communication fluviales de second ordre, l'exposé des motifs, le rapport de la section centrale. la discussion de la Chambre attestent ce fait important, (page 322) ce fait décisif qu'il a suffi des réclamations des provinces pour que le gouvernement se décidât à opérer la reprise de ces cours d'eau. Voici ce que disait l'exposé des motifs, développements du budget des dépenses du ministère des travaux publics pour l'exercice 1840.

« La députation permanente du conseil provincial du Brabant demande que l'Etat reprenne l'administration de la Dyle et du Demer, confiée à la province, par l'arrêté royal du 17 décembre 1819. Cest pour satisfaire à cette demande de l'autorité provinciale du Brabant, et par des considérations d'équité, qu'il est stipulé que la Dyle et le Demer rentreront dans les attributions de l'Etat, à partir du 1er janvier 1841.

« La dépulaiien permanente, du conseil provincial de la Flandre orientale a fait, auprès du gouvernement, une démarche tendant à ce que l’Etat reprenne l'administration de la Dendre, confiée à la province, par l'arrêté royal du 17 décembre 1819.

« Le conseil provincial de la Flandre orientale a cependant assuré le service de cette rivière, pendant l'exercice 1840, en votant des fonds pour cet objet au budget provincial de cet exercice.

« C'est pour déférer à la demande de l'autorité provinciale et par application d'un principe d'équité qu'il est stipulé que la Dendre rentrera dans les attributions de l'Etat. »

Dans le rapport de la section centrale présenté par l'honorable M. Van Hoobroeck de Fiennes, je lis également :

« Des considérations d'équité portent le gouvernement à faire droit aux réclamations du conseil provincial du Brabant. »

Et enfin dans un autre rapport fait également par M. Van Hoobroeck, on formule des considérations de même nature.

Vcdlà donc, messieurs, les précédents parlementaires sur cette question. En 1838, intérêt public. En 1840, des considérations d'équité qui déterminent le gouvernement à opérer la reprise des cours d'eau d'importance tout à fait secondaire.

En 1850 qu'arrive-t-il ? Un fait nouveau se produit : les conseils provinciaux de la Flandre occidentale et de la province d'Anvers sollicitent, avec inslauce la reprise de l'Yser, la reprise de la Grande-Nèthe, car, je prie la chambre de le remarquer, c'est une question de fait qui a engendré ici la question de principe ; ce sont les démarches incessantes de la députation permanente de la Flandre occidentale et de la députation permanente de la province d'Anvers qui ont fait naître la question que l'on discute aujourd'hui devant la Chambre.

Mais, messieurs, il était facile au gouvernement de s'apercevoir que c'étaient moins les Iravaux à faire dans l'intérêt de la navigation de ces cours d'eau, lesquels, à ce point de vue, sont excessivement insignifiants ; que c'était moins cet intérêt qui dirigeait les démarches de ces corps que l'intérêt de l'écoulement des eaux.

Le département des travaux publics avait confié à l'ingénieur cn chef de la Flandre occidentale le soin de rechercher quels étaient, au point de vue de l’écoulement des eaux et de l'intérêt des riverains, les travaux extraordinaires à faire à l'Yser, comme il avait institué une commission qui en 1850 avait arrêté un ensemble d'ouvrages à faire dans l'intérêt des riverains des deux Nèthes ; eh bien, il devait être évident pour le gouvernement, et de là la résistance que j'ai faite aux demandes des conseils provinciaux ; il devait être évident, dis-je, pour le gouvernement, que ce qu'on demandait de lui, c'était l'exécution des ouvrages nécessités dans l’intérêt de l’écoulement des eaux, pour prévenir les inondations désastreuses auxquelles les débordements de ces rivières donnent lieu.

En 1840, quand la Chambre a décrété la reprise de la Dyle et du Demer, elle ne s'était pas préoccupée de ce côté de la question ; elle se trouvait à cette époque cn présence d'ouvrages considérables que le gouvernement projetait au Demer et à la Dyle ; il ne s'agissait de rien moins, en 1840, que de faire un canal latéral au Demer qui devait coûter plusieurs millions. Cependant aucune espèce de réserve ne fut insérée dans la loi du budget.

Le gouvernement ne pouvait accéder dans ces termes aux sollicitations du conseil provincial de la Flandre occidentale, ni de celui de la province d'Anvers : il devait se rappeler que lorsqu'il s'agit de travaux à faire dans l’intérêt des riverains, ces travaux font presque toujours l’objet d allocations votées par des lois spéciales.

Lors de la discussion du grand projet de loi des travaux publies, le gouvernement a distribué aux chambres un tableau qui renseigne exactement les fonds spéciaux qui ont été alloués pour le service des travaux hydrauliques depuis 1830 jusqu'à 1849, et un second tableau qui indique le relevé général des dépenses faites pour l'entretien, l'amélioration et l'exploitation des canaux, rivières, ports, etc., depuis 1830 jusques et y compris l'année 1849. Or, qu'est-ce qui ressort de l'inspection de ces deux tableaux ? Ce fait extrêmement important et sur lequel j'appelle toute l'attention de la Chambre, c'est que, lorsqu'il s'est agi de iravaux extraordinaires à faire dans l'intérêt de l'écoulement des eaux, toujours la Chambre a voté la dépense de ces travaux par des lois spéciales.

Lorsqu'il s'est agi d'assécher les terrains des polders, de décréter le principe de l'exécution du canal de Selzaete, ce sont des lois spéciales qui ont alloué au gouvernement les fonds nécessaires à l'achèvement de ce travail. Lorsqu'il s'est agi de débarrasser le bassin de Gand du trop-plein des eaux de la Lys, c'est une loi spéciale, celle relative au canal de Deynze à Schipdonck, qui est venue décréter le principe de cette dépense. Lorsqu'il s'est agi de soulager le bassin de la Meuse, c'est encore une loi spéciale, une disposition de la grande loi des travaux publics, qui a arrêté le principe de la dépense. Quand il s'est agi de soulager les riverains de l'Escaut, oa a également alloué un crédit spécial inscrit dans la loi qui a décrété le principe de la dépense. Pour la Sambre, les 650,000 fr. ont fait l'objet d'une disposition spéciale ; pour les 600,000 fr. de la Dendre, disposition spéciale. Si on en excepte la Dyle et le Demer, les crédits compris dans la loi du budget en ce qui concerne les cours d'eau navigables ou flottables sont presque toujours, je pourrais dire toujours, des crédits votés dans l'intérêt de la navigation. S'il en fallait une preuve, on l'aurait dans l'ensemble des sommes affectées aux services hydrauliques.

De 1830 à 1849 le lotal des crédits votés est de 27,274,000 fr. pour 27 cours d'eau de première importance, d'importance principale ou secondaire, mais d'importance encore très réelle, c'est-à-dire dans un espace de 19 ans, ce qui fait un peu plus de 50 mille fr. par an et par cours d'eau. Il est évident que le gouvernement ne faisait que persister dans un système extrêmement sage en combattant les conclusions des conseils provinciaux de la Flandre occidentale et de la province d'Anvers.

Dans quels termes se présente le débat devant la Chambre ? S'il s'agit de la reprise comme nous l'entendons pour mettre à charge du trésor public le simple entretien des petits cours d'eau d'une navigation restreinte, dépense qui aujourd'hui affcete les provinces, il n'y a pas de difficulté à ce que le gouvernement y consente ; mais s'il s'agit de faire les travaux que nécessite la conservation des propriétés riveraines, c'est différent ; il n'y a qu'une loi d'ensemble qui puisse déterminer la part contributive des particuliers, des provinces et des communes dans ces travaux extraordinaires. C'est ainsi que le gouvernement l'entend, c'est ainsi que la section centrale l'entend également.

Maintenant j'aborde les objections formulées contre les conclusions de la section centrale. La première consiste à dire : Puisqu'une loi doit intervenir sur cette matière destinée à déterminer la part contributive des provinces, des communes et des particuliers, point n'est besoin de décréter dès à présent le principe de la reprise. Je réponds par les considérations suivantes : D'abord par le passé : il s'agit de travaux à faire dans l’intérêt de l'écoulement des eaux, personne ne niera ce fait ; or, dans ces cas on a toujours procédé par crédits spéciaux demandés à la Chambre. Remarquez en outre qu'ici les travaux à faire dans l'intérêt de l'écoulemeut des eaux de l'Yser sont des travaux d'ensemble qui, dans l'opinion des hommes de l'art, ne peuvent pas être divisés.

Ces travaux intéressent tout à la fois la navigation et la décharge des eaux.

Il résulte du mémoire de l'ingénieur qui a été chargé de l'examen des ouvrages à faire qu'une somme d'environ 1,300 mille francs serait nécessaire dans laquelle la navigation n'entre, à proprement parler.que pour 200 à 300 mille francs. Aujourd'hui une grande ligne de navigation présente une lacune regrettable ; uue ou même plusieurs sections de cette ligne de navigation ne sont pas complétées, le gouvernement français pour ce qui concerne la partie située sur son territoire a exécuté ou fait exécuter des travaux de dévasement et d'élargissement sur la grande ligne de Mons vers Duukerque.

Le gouvernement belge n'a rien fait, et cependant arrivés à Plasschendaele, les bateaux belges, ne trouvant plus le tirant d'eau voulu, sont obligés de transborder les produits ; ce qui est une entrave et une source de frais considérables qu'il serait facile d'éviter. Ainsi, c'est même dans l'intérêt du bassin houiller comme dans l'intérêt de ces contrées que les travaux d'amélioration sont réclamés.

Quant aux travaux à faire pour l'écoulement des eaux, je le répète, l'importance de la dépense s'élève à plus d'un million. Le conseil provincial de la Flandre occidentale, qui comprenait parfaitement que le gouvernement ne pouvait s'imposer tout d'une pièce une dépense aussi considérable, avait demandé que ces ouvrages fussent scindés, fussent exécutés partiellement.

Le conseil des ponts et chaussées a délibéré sur cette demande et par un avis motivé que j'ai sous les yeux il a décidé que ces travaux ne pouvaient être scindés. Ou est revenu sur cette proposition ; on a demandé au gouvernement d'exécuter partiellement ces ouvrages. Dans uue dépêche postérieure, j'ai fait remarquer à la députation permanente que l'opinion du conseil était formelle en ce qui touche la solidarité et l’indivisibilite de ces travaux dans lesquels les provinces et les communes seront bien obligées d’intervenir.

Encore une fois, il est évident que, pour l'Yser, lorsqu'il s'agira de régler la part contributive des provinces, des communes, des particuliers et de l’Etat, la chambre sera saisie d'une loi spéciale. Elle n'a donc pas à craindre d'être engagée par la reprise dans une voie fâcheuse pour les finances de l'Etat.

J'en dirai autant pour la Grandc-Nèthe. Une commission spéciale a examiné ce qu'il fallait faire dans l'intérêt des riverains des deux Nèthes. Il ne s'agissait pas seulement de travaux à faire à la Grande-Nèthe, à la Petite-Nèthe, ni aux Deux-Nèthes. Il s'agissait aussi et principalement de travaux aux affluents de ces cours d'eau ; et ici encore je dois faire remarquer à la Chambre que la commission reconnaît que, pour opérer un effet réel, efficace, immédiat, il y a lieu de procéder avec ensemble à l'exécution des travaux.

Une autre observation importante à noter, c'est que le gouvernement, dans le budget, n'a pas tranché la question de principe ; il a tenu en réserve les fonds alloués par la loi de 1851. Le crédit de 600,000 fr. voté pour l'amélioration de la Senne, de la Nèthe et de l'Yser a été tenu intact, du moins pour la Nèthe et pour l'Yser. Le gouvernement n'a pas (page 323) voulu trancher la question de principe sans l'intervention législative.

Pour ce qui concerne l’amélioration dc certains cours d'eau, également repris dans l'amendement, je ferai remarquer à la Chambre que, en ce qui concerne l'Emblève, point n'est besoin de faire des travaux extraordinaires. Aujourd'hui, la province de Liège, qui administre la Vesdre et l'Emblève, dépense en frais d'entretien 2,000 à 2,500 fr. Dans la pensée du gouvernement, le fait de la reprise de cette rivière n’implique pas d’autre dépense.

Je sais qu'il peut surgir d'autres projets qu'on peut demander la canalisation de l'Emblève, à partir de Stavelot ; mais encore une fois, ce serait l'objet d'un projet de loi spécial ; il ne s'agirait plus alors de coalition (puisque ce mot a été prononcé) et le vote de la Chambre serait bien plus difficile qu'aujourd'hui.

Pour la Vesdre, le gouvernement ne propose que la reprise de ce qui a été abandonné à la province en 1839. Les travaux intéressant la navigation sont fort peu de chose, ou plutôt nuls, puisqu'il y a une route et un chemin de fer qui rendraient la Vesdre, si même elle était navigable, sans objet au point de vue de la navigation. Quant aux dangers qui peuvent résulter des débordements de cette rivière, je crois qu'ils sont bien moins considérables que les dangers que causent dans les Flandres et dans la province d'Anvers les débordements de la Dyle, du Demer, de la Nethe et de l'Yser.

Il y a une autre objection consistant à dire que le gouvernement s'engage dans une voie qui peut l'entraîner beaucoup plus loin, et que s'il reprend la Nèthe et l'Yser, il n'y a pas de raison pour qu'il ne reprenne successivement tous les cours d'eau.

Je ferai remarquer à la Chambre qu'il s'agit du l'arrêté de 1819, et qu'en 1840 lorsqu'on a repris la Dendre, la Dyle et le Demer on a déféré à la demande des conseils provinciaux.

Ce qu'on a fait aujourd'hui est la conséquence de ce que nous avons fait en 1840. Est-ce que tous ces cours d'eau ne figurent pas dans l'arrêté de 1819 ? Je ne sache pas que des membres de cette assemblée ou des conseils provinciaux proposent de reprendre des cours d'eau figurant dans l'arrêté de 1839 et ne figurant pas dans la proposition de la section centrale. On ne fait qu'accueillir les réclamations des conseils provinciaux. Ce qui a amené ces réclamations ce sont les désastres effrayants que les riverains supportent chaque année. C'est ainsi que le gouvernement, d'accord avec la section centrale, vous propose de sanctionner le fait de la reprise sous une condition que je considère comme un bien, parce qu'elle introduit dans notre système de législation en cette matière le principe nouveau de la solidarité entre les provinces, les communes, les particuliers et l'Etat dans les dépenses à faire dans l'intérêt de l'amélioration des cours d'eau. Ce principe est admis d'une manière expresse et solennelle, si la proposition de la section centrale est adoptée dans le sens que j'y donne et qu'y donnent les auteurs de la proposition.

Messieurs, l'année dernière l'honorable M. Dumortier, d'accord avec ses honorables collègues MM. Rodenbach et de Muelenaere, avait proposé la reprise de l'Yser canalisée, du canal de Plasschendaele à la frontière de France vers Dunkerque et de la Mandel. L'honorable membre n'avait pas même fait la réserve que l'on fait aujourd'hui et qui est expresse, qui figurera dans la loi. Je suis, du reste, convaincu que l'adoption du principe tel qu'il ressort de la discussion actuelle, ne peut pas donner lieu, au point de vue des intérêts du trésor, aux conséquences qu'ont signalées plusieurs honorables membres, et dans cette confiance, je crois pouvoir persister dans la proposition de la section centrale.

M. le président. - La parole est à M. de Brouwer de Hogendorp.

M. de Brouwer de Hogendorp, rapporteur. - J'y renonce pour le moment. Je ne pourrais parler que dans le même sens que M. le ministre des travaux publics.

M. Roussel. - Messieurs, la question soumise à vos délibérations est d'autant moins difficile à résoudre qu'elle a été plus longtemps étudiée et que la solution doit en être moins préjudiciable à l'intérêt public.

A prendre à la lettre les discours de quelques honorables préopinants, l'on serait tenté de croire qu'il s'agit de mettre à sec et pillage les caisses de l'Etat. Selon d'autres honorables préopinants, l'article nouveau que la section centrale propose au budget des travaux publics formerait une brèche peu large, il est vrai, dans ce moment, mais qui devrait nécessairement être élargie plus tard afin de permettre aux provinces et aux communes l'entrée des caves de la Banque nationale.

Enfin, une troisième phalange de défenseurs des deniers de l'Etat se présente, au milieu desquels brille mon honorable ami M. Julliot, avec lequel je regrette de ne pouvoir, cette fois, marcher de conserve et qui soutient que l'Etat va se mêler d'une chose qui doit lui rester étrangère.

Analysons ces trois manières de voir, car il suffit de les analyser pour les réfuter.

A ceux qui, sous le drapeau de MM. Dumortier et Lebeau, frémissent à la vue du pillage que nous méditons du trésor public nous répondons par les chiffres produits par M. le ministre des travaux publics et desquels il résulte que l'entretien demandé des rivières et canaux est, à peu de chose près, couvert par les produits de ces mêmes cours d'eau. Nous ajoutons à cette réponse péremptoire que l'Etat nous semble pouvoir améliorer encore ces produits, de sorte que, dans peu d'années, la mesure qui soulève aujourd'hui tant de réclanuîious pourrait bien être un avantage pour le trésor public.

Quant au procès de tendance que l'on fait à l'amendement de la section centrale, il est malheureux comme tous les procès de tendance. Quoi ! c'est au moment même où l'on fait une réserve dans le budget pour toute dépense qui ne serait pas dépense d'entretien, c'est à ce moment qu'on accuse la section centrale d'ouvrir une brèche pour l'agrandir plus tard !

Enfin, que l'honorable M. Julliot me permette de le lui dire, sa doctrine si juste de la non-inlervenlion de l'Etat dans les choses qui lui sont étrangères ne peut que perdre à une application erronée. Et n'est-ce pas une application erronée que celle qui rejette l'intervention de l'Etat la où les besoins choses l'exigent impérieusement, parce que les choses sont communes à plusieurs et intéressent le pays tout entier, là où la plus sévère justice prescrit de faire pour tous ce qu'on a déjà fait pour quelques-uns ?

Cette dernière observation est conciliante. A-t-on bien le droit de s'apitoyer sur les effets financiers d'une mesure lorsqu'elle est prescrite par la justice ? De même qu'il faudrait repousser une mesure avantageuse au trésor si elle était injuste, de même faut-il adopter une mesure, fût-elle préjudiciable au trésor, lorsqu'elle est commandée par la justice. Mais, grâce au soin que la section a pris de réserver à une loi nouvelle la distribution des grosses dépenses, la mesure proposée n'a plus rien d'onéreux pour le trésor et ne conserve plus que son caractère hautement équitable.

Ce caractère équitable résulte d'un coup d'oeil jeté sur le budget. Pourquoi, d'un côté, des voies navigables entretenues par le gouvernement et d'autres à la charge des provinces ? On conçoit que Guillaume Ier ait établi le régime provincial pour les cours d'eau navigables et flottables ; mais alors au moins, le régime était ou devait être uniforme. Mais une fois l'uniformité rompue, à quel principe se rattacher pour n'être pas injuste ? Dans l'impossibilité de faire retourner aux provinces ceux des cours d'eau repris par l'Etat, force est bien de consacrer une reprise générale lorsqu'elle est demandée, lorsque d'ailleurs la loi civile proclame la domanialité de ces cours d'eau. Heureux sommes-nous encore de trouver un moyen qui fasse échapper l'Etat aux conséquences exclusives de cette domanialité en ce qui concerne les dépenses préventives ou réparatrices de grands sinistres !

Permettez-moi, messieurs, une dernière observation qui ne me semble pas dénuée de toute force.

La difficulté soulevée par les réclamations de plusieurs conseils provinciaux et par un grand nombre de nos honorables collègues est réelle ; il faut, en définitive, qu'elle disparaisse. La section centrale vous propose un moyen équitable d'en sortir sans grever outre mesure le trésor public.

Je demande quel système on produit pour remplacer celui que la section centrale vous propose.

Ce système de mes honorables contradicteurs, c'est le néant. Ce n'est pas, selon nous, défendre le trésor publie que de prolonger une difficulté qui, dans certaines circonstances données, peut devenir fort onéreuse pour les finances de l'Etat. J'estime qu'un bon règlement de la difficulté sera mille fois plus avantageux à l’Etat que les protestations d'amour les plus éloquentes à l'endroit de la caisse commune. Voyez un peu la grande différence !

Los frais d'entretien sont couverts ou à peu près par les produits. Eh bien, l'Etat va faire la recette et la dépense au lieu des provinces. La recette et la dépense seront mieux faites et la justice commande d'en agir ainsi à raison des rétroactes.

Voilà, en définitive, tout ce qui doit résulter de l'amendement de la section centrale, et voilà pourtant ce qui soulève des réclamations !

M. le président. - La parole esta M. de Theux.

M. de Theux. - J'y renonce. Après les explications que vient de donner M. le ministre des travaux publics et celles que pourront donner les membres appartenant aux localités intéressées, la Chambre devra être plus que suffisamment instruite. Mon intention était d'ailleurs de parler en faveur de la proposition de la section centrale qui me paraît avoir un caractère d'utilité générale.

- La clôture est demandée.

M. Van Overloop (contre la clôture). - Hier la Chambre a trouvé la question assez importante pour remettre la discussion à aujourd'hui. Aujourd'hui la séance est à peine ouverte, que l'on demande la clôture. Cependant tout le monde reconnaît qu'il s'agit d'un principe extrêmement important.

Je crois devoir m'opposer à la clôture. Quant à moi, j'ai déclaré hier que je n'étais nullement préparé. Heureusement je connaissais d'avance un peu la question ; c'est ce qui m'a permis de protester contre le projet de la section centrale. Depuis hier je me suis préparé, et je demande à pouvoir combattre formellement la proposition qui occupe la chambre.

M. Dumortier (contre la clôture). - Il ne me paraît pas possible de clore en ce moment la discussion sur une question aussi grave que celle qui nous occupe, sur une question qui peut engager le budget dans des dépenses de plusieurs millions. Après avoir entendu deux orateurs dans le même sens, il est de toute justice que la voix contraire, celle qui veut défendre le trésor public, puisse aussi se faire entendre. Sinon, ce ne serait plus une discussion, ce seraient simplement des commissaires qui viendraient défendre un système, et la Chambre serait condamnée à ne pas parler.

M. Rousselle (contre la clôture). - Si la Chambre trouve (page 324) bon de clore la discussion générale, j'espère qu'elle m'accordera la parole pour défendre mon amendement. J'ai déposé une proposition qui touche à la question de principe ; je crois que je dois être admis à la développer.

M. de Mérode (contre la clôture). - J'insiste pour qu'on entende les orateurs qui ont des arguments à opposer à ce qui a été dit par M. le ministre des travaux publics. Sans cela il n'y aurait plus de discussion ; on entendrait le pour et on n'entendrait pas le contre. L'honorable M. Van Overloop vient de dire que depuis hier il s'est préparé pour développer son opinion. Je demande qu'il soit entendu.

- La clôture est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

M. Rousselle. - Messieurs, je regrette bien sincèrement le vote qui a été émis hier dans cette Chambre et qui a décidé que l'on rattacherait au budget des travaux publics l'amendement proposé par la section centrale, et tranché ainsi, à mon avis, une question de principe extrêmement grave.

L'honorable ministre des travaux publics, dans le discours très savamment étudié qu'il vient de prononcer, vous a dit : qu'il n'y a pas de danger pour la Chambre à s'engager dans l'amendement présenté par la section centrale ; tous les grands travaux seront décidés par une loi spéciale ; nous viendrons, chaque fois qu'il y aura des travaux importants à faire aux rivières qui seront reprises, demander un vote de la Chambre.

Messieurs, je demande comment il sera possible, alors que la Chambre aura prononcé la reprise de toutes ces rivières, de ne pas consentir aux travaux qui seront demandés, sans passer pour négliger des intérêts que l'on aura considérés comme graves, comme touchant à une utilité générale.

La question de principe n'est pas la même pour toutes les rivières comprises dans l'amendement. Parmi ces rivières il en est quelques unes d'un intérêt excessivement restreint. Evidemment la part contributive des provinces et des communes pour ces cours d'eau devra être différente de celle destinée aux cours d'eau d'un intérêt plus général.

M. le ministre veut séparer la question d'entretien de la question des travaux d'amélioration. Quant à moi, je trouve que ces deux questions sont absolument les mêmes. Si le cours d'eau est d'un intérêt général, et l'entretien et l'amélioration appartiennent à l'Etat. S'il est d'un intérêt restreint, l'entretien comme les travaux d'amélioration doivent être répartis proportionnellement à l'intérêt des provinces, des communes et même des particuliers qui peuvent, dans certains cas, y être aussi intéressés.

L'honorable ministre des travaux publics a cherché à m'entraîner sur le terrain des intérêts locaux en venant parler de l'intérêt que le bassin houiller de Mons peut avoir à la canalisation de l'Yser. Je déclare que dans cette discussion je ne vois pas du tout une question d'intérêt particulier, et c'est en vain que l'on m'appellerait à l'espèce de coalition qui semble se former pour faire voter en même temps la reprise de voies de communication qui sont d'intérêt général et d'autres qui ne le sont pas. En votant, je ferai des distinctions.

L'honorable M. Malou en parlant hier dans cette chambre vous a dit : « Que s'est-il passé pour la reprise des canaux et rivières ? En 1819, on avait tout abandonné aux provinces. A partir de 1837, on a reconnu que l'Etat devait reprendre toutes les voies de communication par eau artificielles ou naturelles, qui présentent un caractère d'intérêt général. »

Sur ce terrain je m'accorderai bien vite avec l'honorable M. Malou, mais la chambre comprendra que je désire connaître quelles sont les voies de communication d'intérêt général, et quant à celles-là je vtlerai pour leur reprise par l'Etat.

L'honorable ministre des travaux n'avait pas toujours été de l'avis qu'il vous a développé tout à l'heure.

Voici ce qu'il disait dans son rapport, page 9 :

« Ainsi à l'exception du canal de Plasschendaele vers Dunkerquc. les autres voies navigables ne présentent aucun caractère d’intérêt général. Elles n'offrent en quelque sorte qu'une utilité locale ; sur l'Yser et surtout sur la Grande-Nèthe et sur l'Emblève, la navigation ne peut avoir lieu partout d'une manière suivie ; elle est subordonnée a des effets accidentels. »

Aujourd'hui toutes ces rivières sont d'un intérêt général ; il faut qu'elles soient reprises par l'Etat, et mon honorable ami M. Ad. Roussel vous disait tout à l'heure que la domanialité de toutes ces rivières ayant été prononcée par le Code civil, c'est une justice, c'est une obligation pour l'Etat d'en reprendre l'entretien.

Messieurs, nous en revenons toujours à la question principale sur laquelle l'honorable M. Roussel fait ici une confusion.

Il invoque le Code civil. Messieurs, le Code civil n'a pas dérogé aux règlements ni aux lois spéciales sur les voies navigables. Or, il devrait bien savoir qu'en France, sous le Code civil, toutes les voies navigables ne sont pas du domaine public national. Il en est qui sont à la charge des départements, des communes et qui même appartiennent à des associations particulières.

Du reste, messieurs, c'est ainsi que le détermine la législation française qui nous régit encore, même en présence du Code civil.

L'honorable ministre des travaux publics, dans son rapport, a invoqué cette législation, une loi de 1807 particulièrement, qui appelle à concourir à l'entretien et à l'amélioration des voies de communication par eau ou par terre, les provinces et les communes, quand ces voies de communication ne sont pas d'intérêt tout national.

Messieurs, j'ai proposé par mon amendement de laisser la question entière, de ne pas la préjuger, pour l'entretien comme pour les travaux d'amélioration. J'espère que M. le ministre des travaux publics consentira à cet amendement. Il tend à empêcher que la question ne soit préjugée trop fortement, parce que vous pouvez être certains qu'en votant aujourd'hui l'entretien vous le voteriez sous l'impression des discussions par lesquelles on a voulu établir que l'entretien doit être à la charge de l'Etat, parce que les rivières qu'il s'agit de reprendre sont du domaine public national. Eh bien, la question de savoir si ces voies de communication sont du domaine public national, pour moi, elle n'est pas décidée, et je ne voudrais ni la trancher ni la préjuger ; nous l'examinerons quand nous nous occuperons de la loi spéciale qui doit nous être présentée.

Finalement, M. le président, je modifierai mon amendement ; il disait : « Part de l'Etat dans l'entretien....» Je supprime les mots : « Part de l'Etat dans l’», et je laisso seulement : « Entretien, etc., » car, messieurs, si la reprise a lieu, le budget de l’Etat doit comprendre l’entretien tout entier, et il faut porter au budget des voies et moyens les recettes des cours d'eau dont il s'agit.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, l'amendement de l'honorable M. Rousselle a une grande importance ou il n'en a aucun : il a une très grande importance si l'honorable M. Rousselle par son amendement prétend décider le contraire de ce qui a été implicitement décidé hier, si l'honorable M. Rousselle entend ajourner la question, s'il se met en contradiction avec le vote émis hier par la Chambre. L'amendement n'a aucune imporlancc si l'honorable M. Rousselle entend respecter la décison prise hier par la Chambre, quand elle a refusé d'ajourner la question ; que signifierait, en effet, l'amendement de l'honorable M. Rousselle en présence du refus fait hier par la Chambre d'ajourner le fait de la reprise ? Ce gouvernement serail obligé de reprendre ces cours d'eau pour ne rien y faire et les provinces ne seraient plus obligées de pourvoir à leur entretien, de manière que les 25,000 ou 30,000 fr. qui sont aujourd'hui affectés tant bien que mal aux cours d'eau dont il s'agit seraient sans application. Le gouvernement ne serait pas obligé de pourvoir à l'entretien, et les provinces n'y seraient pas obligées non plus. C'est là une position équivoque que je prie l'honorable M. Rousselle de faire cesser.

(page 339) M. le président. - La parole est à M. Van Renyngbe.

M. Van Renynghe. - Les motifs qui militent en faveur de l'amendement de la section centrale ont été si clairement exposés par M. le ministre des travaux publics, que je ne crois point devoir ajouter quoi que ce soit. Je renonce donc à la parole.

(page 324) M. Desmaisières. - Messieurs, ayant fait partie de la section centrale, je viens expliquer en très peu de mois les motifs de mon vote.

Messieurs, je n'ai été guidé que par un principe et ce principe c'est qu'il n'est pas d'administration publique pour laquelle les vues d'ensemble et l'unité d'action sont plus nécessaires que pour l'administration des cours d'eau, qu'ils soient navigables et flottables ou qu'ils ne soieut ni navigables ni flottables.

Cette opinion, messieurs, n'est pas nouvelle chez moi : je l'ai déjà consignée dans plusieurs rapports et notamment dans celui que j'ai fait en 1845. Je vais vous le prouver par la lecture que je vous demande la permission de faire d'un très court passage de ce rapport :

« Plusieurs d'entre nous (je parle des membres de la commission instituée pour rechercher les remèdes aux inondations du bassin de l'Escaut et de la Lys), plusieurs d'entre nous, et notamment messieurs les membres de la sous-commission qui a été chargée de parcourir dans ce but les vallées de l'Escaut, de la Scarpe, de la Deule et de la Lys, ont remarqué que l'une des causes secondaires de certaines inondations pernicieuses, ou tout au moins de l'extrême lenteur avec laquelle les eaux d'inondation s'écoulent aujourd'hui, réside dans le système des rigoles d'assèchement, qui demande à être considérablement amélioré, tant sous le rapport des travaux à y exécuter, que sous celui de leur administration et de la police et surveillance.

« Presque partout, ces rigoles, ainsi que tous les cours d'eau non-navigables et non-flottables, qui sont en rapport avec l'Escaut et la Lys, ne sont aucunement entretenus et sont abandonnés à la merci et au caprice, pour ainsi dire, des propriétaires ou de tous autres particuliers qui veulent s'en occuper.

« Il en résulte que beaucoup de rigoles, d'aqueducs et d'éclusettes sont ou obstrués par des amas de terre, ou même fermés en maçonnerie, expressément dans des intérêts privés, souvent si peu intelligents qu'ils se nuisent à eux-mêmes. »

J'ai moi-même vu, messieurs, lorsque j'ai inspecté, en qualité de ministre des travaux publics, les rives de l'Escaut, j'ai moi-même constaté sur beaucoup de points de ces rives que les intérêts privés avaient souvent exécuté des travaux nuisibles, non seulement aux terres voisines, mais encore à ces intérêts privés eux-mêmes.

Nulle part il n'y avait, pour assurer l'écoulement des eaux, ni exécution de travaux, ni direction des manœuvres des écluses et éclusettes, ni police ni surveillance d'ensemble ; il y avait, au contraire, absence complète de l'unité d'action ; rien n'était coordonné, tout se combattait et, par conséquent, si par-ci par là on voyait quelques intérêts privés satisfaits, l'intérêt général souffrait considérablement de cet état de choses.

Ce n'est donc par ici un intérêt de localité, c'est l'intérêt général qui exige la reprise par l'Etat de tous les cours d'eaux navigables et flottables.

En effet, messieurs, ces cours d'eau, des vues d'ensemble ne peuvent être obtenues que quand l’administration est entre les mains de (page 325) l'Etat ; pour les cours d'eau non navigables et non flottables, l'unité d'action administrative s'obtient pas l'institution de wateringues soumises à l'approbation et à la surveillance du gouvernement. Déjà par la loi qui décrète le règlement du canal de Schipdonck, vous avez autorisé le gouvernement à approuver l'institution de wateringues dans les vallées de l'Escaut, de la Lys et de la Dendre ; eh bien, quoique les redressements du haut Escaut et le canal de Schipdonck ne soit pas encore entièrement creusés, beaucoup de wateringues sont déjà instituées et produisent les meilleurs effets. Je pourrais citer une wateringue à l'institution de laquelle a participé mon honorable ami et voisin M. Magherman.

Eh bien, depuis que cette wateringiie a été instituée, avec quelques centaines de francs de dépense, on a réussi à affranchir du fléau des inondations tous les terrains situés dans cette wateringue. Cette wateringue est située dans la vallée du haut-Escaut.

Il y a donc, selon moi, nécessité absolue, dans l'intérêt général du pays, que le gouvernement reprenne toutes les voies navigables et flottables, et qu'on autorise l'institution de wateringues, non seulement comme on l'a déjà fait par la loi du canal de Schipdonck pour les vallées de l'Escaut, de la Lys et de la Dendre, mais encore pour tout le bassin de l'Escaut et par le bassin de l'Yser et celui de la Meuse. C'est alors seulement qu'on obtiendra, dans l'intérêt général du pays, une bonne administration des eaux et que nous verrous l'agriculture ne plus avoir à souffrir toutes les calamités qui l'affligenf périodiquement aujourd'hui.

(page 339) M. Julliot. - Messieurs, hier j'avais demandé à dire quelques mots dans la question d'ajournement proposé par l'honorable M. Dumortier ; mais les parties prenantes m'ont arrêté tout court, sous prétexte que je traitais la question de fond.

M. le président. - C'est le président qui vous a arrêté.

M. Julliot. - Je conviens que parfois la vérité est dure à entendre, mais quand on poursuit les finances de la fortune publique au profit de sa province, on devrait savoir subir ce petit supplice avec moins d'impatience.

On aurait dû se dire : Laissez-le parler, pourvu que le Limbourg paye sa quote-part dans la plus-value de nos propriétés, que le principe dissimulé dans le budget nous prépare.

Messieurs, je ne demande pas qu'on abandonne complètement les provinces, mais je demande qu'on laisse à chaque fraction constitutionnelle du pays la gestion de ce qui constitue son domaine public.

Je demande qu'on renonce à ces votes de coalition qui sacrifient toujours de plus petits à de plus grands ; quand vous aurez loti ceux dont vous vous occupez, croyez-vous avoir tout fait ? Mais le nombre de ceux qui resteront méconnus est plus considérable que celui de ceux que vous aurez sauvegardés.

Il n'y a pas ombre de justice dans ce procédé. C'est toujours le fort qui, relativement, foule et écrase le faible : cela blesse la conscience publique.

Je veux que le principe constitutionnel de l'égalité des Belges devant la loi soit respecté. Que l'on admette tout l'un ou tout l'autre.

Que se passe-t-il ici ? Tout est dissimulé dans cette affaire, on dissimule un principe ruineux pour le trésor dans deux lignes du budget qui ont l'air de ne rien dire.

Et on dissimule une dépense d'avenir de quelques millions dans le chiffre insignifiant de 30,000 fr.

Soyons plus francs.

Le gouvernement propose de faire déclarer, par le vote du budget, que quelques cours d'eau navigables et quelques autres non navigables sont du domaine public de l'Etat.

Or, il faut, non pas qu'on choisisse quelques cours d'eau non navigables, mais qu'on adopte ou repousse le principe tout entier.

Le gouvernement, dans le rapport qu'il nous présente, démontre à l'évidence que les cours d'eau dont nous nous occupons sont d'intérêt provincial et local ; et au lieu de conclure à ce que la province conserve ses droits et ses devoirs, et à ce qu'on rende aux provinces en général les cours d'eau de cette catégorie dont l'Etat s'est chargé dans des moments de distraction ou de pression et sans savoir pourquoi, il conclut à côté de l'exposé et nous propose de substituer ses devoirs à ceux de la province ; et quand cette porte sera ouverte, il n'est pas de ruisseau qui ne viendra murmurer au pied de la tribune la prétention de se faire la chose de l'Etat. L'honorable M. Desmaisières vient déjà de vous le dire.

Messieurs, nos provinces et nos communes ne sont pas des fractions nominales d'un royaume à gouvernement absolu. Elles ont une existence propre, aucun impôt ne peut leur être imposé que par leur volonté. La Belgique est formée de neuf provinces fédérées sous une royauté constitutionnelle, la province et la commune ont leurs libertés et leurs droits, mais à côté de ces droits elles ont leurs devoirs, et un de leurs devoirs c'est de conserver leur domaine public provincial et communal, mais de ne pas plus l'aliéner au profit de l'Etat qu'elles ne sont disposées à aliéner leurs libertés et leurs droits.

L'équilibre est rompu quand la province conserve ses droits et échappe à ses devoirs.

En Belgique, plus qu'ailleurs, le domaine public est divisé en trois degrés et le degré supérieur, qui est l'Etat, n'a d'autres devoirs à remplir que ceux qui s'adressent à la généralité ; tout devoir fractionné incombe à la province ou à la commune. D'ailleurs, ce principe vient encore d'être consacré, en ce qui concerne l'Etat et la commune, par un arrêt de la cour de cassation du 25 avril 1852.

Cette cour ne dit rien des devoirs de la province, mais la question provinciale n'était pas en jeu. Si cette cour se trouvait en présence de la province et de son domaine public, sous forme de rivière, la cour ne jugerait pas autrement qu'elle ne l'a fait ; car elle n'a pas l'habitude de se déjuger. En présence de son arrêt du 25 avril, elle déclarerait que les rivières, navigables ou non, qui traversent les provinces, sent du domaine public de ces dernières.

En coordonnant les principes constitutionnels, on arrive aux conclusions que voici :

Les côtes et les ports de mer qui protègent et alimentent le pays tout entier sont du domaine public de l'Etat.

Les rivières navigables et flottables sont le domaine public des provinces qu'elles traversent.

Il en est de même des ruisseaux, en ce qui concerne les communes.

Où cherche-t-on maintenant que, dans le régime des eaux, la parenthèse du domaine public provincial doit rester ouverte, que la province seule n'a pas de domaine public, que pour elle ce mot est sans application ? Pour arriver à ce système, nous devons faire successivement deux soustractions inconstitutionnelles ; nous devons commencer par nous soustraire à nos devoirs provinciaux, puis nous faisons la soustraction des deniers de la généralité pour les appliquer à notre spécialité.

Maintenant quels sont les devoirs de la province dans la question des rivières ? La province n'a d'autre charge que celle de l'entretien en état de navigabilité, c'est-à-dire que le fond seul la concerne, et que les rives sont la matière des servitudes actives et passives attachées aux propriétés riveraines.

Le riverain a l'avantage des prises d'eau et des irrigations, et le désavantage des inondations.

Ce n'est pas à l'Etat à diminuer par des impôts la propriété de tous pour renforcer la propriété des riverains, c'est à eux à se défendre.

Si la proposition de l'honorable comte de Mérode-Westerloo, par exemple, était adoptée, toutes les wateringues qui couvrent le pays auraient le droit de se faire remplacer par l'Etat et de cesser la défense de leur propre territoire, car l'honorable membre dit à l'Etat : Prenez tout le passif pour vous, nous garderons l'actif. Mon opinion a donc pour but de mettre fin à ces tiraillements qui se produisent en dehors de toute législation avouable. Je ne veux pas qu'on abandonne les provinces, car la mienne serait des plus punies ; mais je désire qu'on nous présente un ensemble où les uns ne soient pas sacrifiés aux autres.

Qu'on examine si la régie par les provinces avec subside sous forme d'abonnement n'est pas le moyen pour faire le plus de bien avec le moins de sacrifices. Pour ma part, je le crois et je ne cesserai de le préconiser, la réussite des chemins vicinaux est plus éloquente que toutes les jérémiades qu'on vient nous débiter ici.

(page 325) M. Van Overloop. - Messieurs, les discours qui ont été prononcés en faveur du projet de la section centrale n'ont nullement ébranlé ma conviction.

La première question de droit, et c'est toujours la plus importante, c'est celle qu'a tranchée la section centrale : c'est la question de savoir si, oui ou non, les rivières navigables ou flottables sont du domaine de l'Etat ; car c'est à quoi aboutit en définitive l'opinion développée dans le rapport, remarquable du reste, de la section centrale.

Permettez-moi d'examiner cette question ; je serai aussi bref que possible.

Voici le raisonnement de la section centrale :

« La raison indique que c'est au propriétaire à veiller aux réparations que sa propriété exige.

« Or, l'Etat est propriétaire des rivières navigables ou flottables.

« Donc à l'Etat incombe le soin de veiller aux réparations qu'elles exigent.

« Et comme l'Yser, la Grandc-Nèthe, l'Emblève, la Vesdre, le canal de Plasschendaele et de Nieuport, la Lieve, la Langeleede, sont des cours d'eau navigables ou flottables, il faut que l'Etat les reprenne. »

Voilà la première argumentation que j'ai trouvée dans le rapport de la section centrale.

La section centrale a parfaitement raison lorsqu'elle dit : « Au propriétaire incombe le soin de veiller à l'entretien de son bien. » Mais est-elle dans le vrai lorsqu'elle prétend que l'Etat est propriétaire des rivières navigables et flottables ?

C'est cette mineure du raisonnement de la section centrale que je crois devoir combattre. Je ne me permettrai pas de trancher cette question ; je me contenterai d'appeler sur elle l'attention de la chambre. C'est une question qui exige de mûres réflexions.

La section centrale et avec elle l'honorable M. Roussel disent que l’article 538 du Cod ecivil consacre le principe de la propriété de l'Etat sur les rivières navigables et flottables. Messieurs, lisez l'article 538, et comme moi, vous n'y verrez pas le principe mis en avant par la section centrale. Cet article porte : « Les rivières navigables ou flottables sont considérées comme des dépendances dit domaine public. »

Or, autre chose est le domaine public et autre chose est le domaine de l'Etat.

Voici ce que je lis dans le répertoire de Ledru, « Domaine de l'Etat », n°3.

« Le domaine public s'entend, dans son sens propre, des choses qui servent à un usage public et commun, et qui, tant que leur destination n'aura pas été changée, ne sont pas susceptibles de propriété privée. Le domaine de l'Etat comprend, au contraire, des biens qui sont de la même nature que ceux qui sont l'objet du droit de propriété privée. Leur destination n'est pas de servir à un usage public et. commun, et l'Etat les possède à peu près de la même manière que les particuliers. »

Il y a donc une différence radicale entre le domaine public et le domaine de l'Etat.

D'autres auteurs disent :

« Il résulte de la nature même des choses dont se compose le domaine public qu'à leur égard, le gouvernement n'exerce qu'un possessoire de protection, pour assurer la jouissance commune, et non un possessoire de propriété pour s'attribuer exclusivement les prérogatives ou les avantages attachés au titre de propriétaire inclusif du Roi. »

Ces auteurs sont Proudhon, Lerigny et La Ferrière.

C'est donc erronémenl qu'on a donné à l'expression ;« domaine public » la portée du domaine de l'Etat.

La section centrale continue :

« Tous les biens ont un maître en Belgique, quel est le maître des rivières navigables et flottables ? N'est-ce pas celui à qui la loi en accorde tous les usages utiles ? »

Messieurs, pour aboutir dans une discussion, il faut qu'on commence par s'entendre sur la portée des termes qu'on emploie.

Par maître, la section centrale a-t-elle entendu dire propriétaire ? Dans ce cas, je ne suis pas de son avis, car je crois avoir établi que l'Etat n'est pas propriétaire, dans la véritable, acceplion du mot ; il serait beaucoup plus rationnel d'appliquer aux cours d'eau, au lieu de l'article 544 du Code civil, l'article 714 qui porte : « Il est des choses qui n'appartiennent à personne et dont l'usage est commun à tous. Des lois de police règlent la manière d'en jouir. »

Je sais que cela s'applique à l'air, à des choses que la puissance de l'homme ne peut pas saisir. »

Je ne dis pas que les cours d'eau tombent directement sous l'application de cet article, mais entre l'article 544 qui concerne les propriétés proprement dites et l'article 714, il y a à choisir, et je pense que si l'un des deux devait être appliqué aux cours d'eau ce serait plutôt l'article 714 que l'article 544.

Si donc la section centrale entend le mot « maître »en ce sens que l'Etat a le pouvoir de régler l'entrelien et l'administration de tous les cours d'eau navigables ou flottables, je suis d'accord avec elle ; mais dans ce cas, les conclusions que la section centrale déduit de sa majeure sont complètement erronées.

Mon intention n'est pas de trancher cette question ; je désire seulement mettre la chambre en garde contre le raisonnement de la section centrale, lui exposer que la question de principe est très grave et qu'il serait prudent d'en ajourner la solution jusqu'à ce que nous soyons saisis d'une loi complète sur la matière. Toutefois, il ne faut pas vous le dissimuler, cette loi ne sera pas facile à faire. Il faudra d'abord savoir ce qu'on doit entendre par rivières navigables, sont-ce les rivières navigables de fait, ou les rivières navigables de droit ? Les auteurs sont partagés sur ce point.

Les uns prétendent que pour qu'une rivière soit navigable, il faut une déclaration de l'autorité publique qui lui donne ce caractère ; d'autres prétendent qu'il suffit qu'en fait une rivière serve à la navigation pour être rangée parmi les rivières navigables. La même incertitude se présente quant à ce qu'on doit entendre par rivières flottables ; la même division se rencontre parmi les auteurs, les uns prétendent que pour qu'une rivière soit flottable, il faut qu'on puisse y faire flotter des trains, d'autres qu'il suffit que le flottage s'y fasse à bûche perdue.

Autre difficulté : si vous déclarez que l'Etat doit se charger de l'entretien et de l'administration de toutes les rivières navigables ou flottables, que ferez-vous des affluents de ces cours d'eau ? A la charge de qui les mettrez-vous ? En vertu du principe que l'accessoire doit suivre le principal, direz-vous : L'Etat est chargé de l'entretien du principal, il doit aussi être chargé de l'entretien de l'accessoire ? Mais où arrivez-vous avec ce système ? Vous arrivez à ce résultat que l'Etat finira par être chargé de l'administration des plus petits cours d'eau du pays.

Nous avons encore un grand nombre de cours d'eau qui sont navigables ou flottables sur une très petite partie de leur cours, que ferez-vous de la partie de ces rivières qui n'est ni navigable ni flottable ? Vous voyez que la question est de la plus haute importance.

Je partage l'opinion de la section centrale quand elle dit avec le gouvernement, que qui a les avantages doit supporter les charges. Mais je demanderai quels sont les avantages que retire l'Etat des cours d'eau dont il s'agit pour lui imposer les charges d'administration.

Oubliant bien vite le principe qu'elle a posé, la section centrale reconnaît que ce sont les provinces qui retirent les avantages des cours d'eau dont elle propose la reprise par l'Etat, c’est-à-dire qu'elle voudrait que la province continuât à retirer les avantages et que l'Etat supportât la charge, ce qui est précisément le contraire du principe qu'elle a mis en avant.

On dit ensuite que l'arrêté du 17 décembre 1819 n'a pas force de loi. C'est encore trancher d'une manière extrêmement prompte une question constitutionnelle de la plus grande gravité. Si la section centrale avait dit : L'arrêté de 1819 n'est pas une loi, j'aurais été d'accord avec elle, mais elle a dit : L'arrêté de 1819, n'a pas force de loi. Or, les arrêtés rendus en exécution des lois ont force de loi ; personne, je pense, ne peut dire que l'arrêté dn 17 décembre 1819 n'ait pas été pris par le roi Guillaume dans l'exercice de ses attributions. Je pense, moi, que cet arrêté a été pris en exécution des attributions que la loi fondamentale donnait au roi Guillaume.

Maintenant cet arrêté a-t-il été abrogé pour l'article 138 de la Constitution ? Qu'abroge cet arrêté ? Les actes et règlements antérieurs, contraires à la Constitution. Il faudrait commencer par prouver que l'arrêté du 17 décembre 1819 est contraire à la Constitution. Cette preuve, je ne la trouve nulle part.

Voilà quant à la question de droit.

Je crois avoir établi, messieurs, que tous les cours d'eau ne sont pas du domaine national, mais du domaine public, et qu'il y a trois espèces de domaine public : le domaine public national, le domaine public provincial et le domaine public communal.

En examinant la question sous un autre point de vue, est-il juste que l'Etat ait la charge de l'entretien et de l'administration des cours d'eau énumerés dans la proposition de la section centrale ? Le principe fondamental de la justice est : ubi commodum ibi incommodum. Là où est l'avantage là doit être le désavantage.

(page 326) Est-il juste que certaines parties du pays contribuent à l'entretien et à l’amélioration de cours d'eau dont elles ne retirent aucun profit ? Je dis non ;!

Quand je ne tire pas de profit ou d’avantage d’un ouvrage quelconque, la loi de la justice veut que je ne sois pas tenu de contribuer à la dépense.

- Un membre. - Et le chemin de fer ?

- Un autre membre. - Et la Meuse ?

M. Van Overloop. - On invoque les précédents ; mais que sont les précédents ? S'ils sont mauvais, il faut se hâter de les abandonner ; s'ils sont bons, il faut les suivre.

Je crois que les précédents qu'on invoque dans cette circonstance ne sont pas bons, voilà pourquoi je combats la ligne de conduite qu'on veut suivre. En continuant à la suivre sous prétexte qu'il y a des précédents, où cela vous conduit-il ? Je suppose qu'aujourd'hui vous basant sur les précédents, vous fassiez reprendre par l'Etat les cours d'eau énumérés dans le rapport de la section centrale, de quoi droit l'année prochaine, quand je viendrai avec une nouvelle liste de cours d'eau invoquant vos précédents, refuserez-vous d'en faire reprendre l'administration par l'Etat ? Vous ne le pourriez pas à moins d'assumer le reproche d'iniquité.

En effet, vous seriez iniques si vous me refusiez, ce que vous auriez accordé à d'autres.

Il est donc urgent de s'arrêter dans cette voie. Je comprends qu'on fasse une exception en faveur d'une des rivières dont il s'agit. Nous avons trois grands bassins en Belgique ; telle est notre situation hydrographique, le bassin de l'Escaut, te bassin de la Meuse et le bassin de l'Yser. Deux de ces bassins sont entretenus et administrés par l'Etat, il y a un motif de justice distributive à mettre également à charge de l'Etat l'entretien et l'administration du troisième, de celui de l’Yser.

Uu deuxième motif, c'est que l'Yser nous met en relations telles avec la France qu'il peut être nécessaire à l'Etat d'avoir l'administration de ce cours d'eau. Quant aux autres, je ne vois pas d'utilité à les reprendre.

Voyez les conséquences qui résulteraient de l'adoption de la proposition de la section centrale. Je trouve dans ce rapport la Langeleede, je connais parfaitement cette rivière, c'est un misérable cours d'eau qui n'a pas le dixième d'importance du canal de Stekene dont l'Etat n'a pas voulu, car il vient de s'en débarrasser au profit de la commune de ce nom. L'Etat après s'être débarrassé de l'administration du canal de Stekene, voudrait-il reprendre celle de la Langeleede ?

Est-ce logique ? Si le gouvernement veut reprendre la Langeleedc (ce qui, si j'écoutais mon intérêt personnel, me conviendrait), je le prierais de reprendre aussi la Zuydleede qui est, dans les environs de la Langeleede, et qui est plus importante.

Voilà les conséquences qu'aurait la proposition de la section centrale, par suite de la faiblesse du gouvernement à reprendre les cours d'eau sans avoir décrété une loi complète sur la matière. A un autre point de vue ; est-il utile que l'Etat se charge de l'entretien et de l'administration de tous les cours d'eau, qu'on veut lui faire reprendre ? Plus l'Etat administre, plus il y a de bureaucratie, plus il y a de paperasseries, plus il y a d'employés, plus il y a de frais et plus il y a de retard dans l'expédition des affaires. Plus il y a d'employés, moins promptement les affaires s'expédient. Tous les jours, vous qui devez vous adresser aux divers ministères, vous en faites l'expérience. J'en appelle à tous les membres de la chambre.

Enfin, messieurs, la proposition de la section centrale aurait pour effet de renforcer le système de gouvernement qu'on appelle centralisation, système que, jusqu'à preuve du contraire, je trouverai pernicieux.

Il y a deux systèmes d'administration : l'un consiste à tout faire administrer par l'Etat, c'est le système de la centralisation renforcée. L'autre consiste à ne laisser à l'Etat que les attributions qui sont indispensables pour qu'il puisse remplir sa mission.

Le système de centralisation nous vient de l'étranger. Je le repousse, d'abord parce qu'il nous vient de l'étranger. En toutes circonstances, je tâcherai de faire oublier à mon pays étrangère.

Je le repousse encore, parce qu'il est basé sur ce faux principe : « L'homme est né pour la société. » Tandis que la société n'est qu'un moyen donné par la Providence à l'homme pour le faire arriver à sa destination.

Je le repousse encore, parce que l'expérience d'un pays voisin m'a convaincu que la centralisation n'est bonne ni pour l'administration ni pour le maintien de l'ordre.

Je le repousse, parce que l'exemple d'un autre pays voisin nous prouve que la décentralisation est, au contraire, un système admirable pour assurer la conservation de la liberté et le maintien de l'ordre. Ce système de décentralisation, ne l'oublions pas, est celui qu'a voulu le Congrès. Nous avons voté un monument au Congrès. Restons fidèles à son esprit. Le Congrès, cette assemblée éminemment libérale, a voulu la décentralisation, parce qu'il a compris que la liberté ne peut être assurée qu'avec ce système d'administration.

C'est par ces motifs que je votrai contre les propositions de la section centrale.

- Plusieurs membres. - La clôture ;!

M. de Brouwer de Hogendorp, rapporteur. - Pendant toute la séance d’hier, nous avons entendu des orateurs qui sont venus combattre l'amendement de la section centrale. Aujourd'hui, l'on veut prononcer la clôture après un discours qui combat carrément la proposition de la section centrale.

Je dennnde si c'est juste. J'espère que la chambre voudra bien permettre au rapporteur de répondre quelques mots au discours que vou» venez d'entendre. L'honorable M. Jacques veut bien me céder son tour de parole.

M. Dumortier. - Je ferai remarquer à l'assemblée qu'elle n'a entendu qu'un orateur « contre » ; tout le reste de la séance a été rempli par des orateurs « pour ». Si l'on accorde la parole à un nouvel orateur « pour », je demande que la chambre veuille bien m'entendre. C'est bien le moins que l'on entende deux orateurs « contre ».

M. Coomans. - Je n'insiste pas, car il est impossible que la demande de clôture soit prononcée. Je ferai seulement remarquer que la Nèthe a été le plus maltraitée dans ce débat.

M. le président. - Ceci est étranger à la demande de clôture.

M. Coomans. - Je veux dire que j'ai intérêt à défendre la rivière qui a été le plus maltraitée. Je conçois que les défenseurs de l'Yser renoncent à la parole, puisqu'on veut faire grâce au vaste bassin de l'Yser. Mais je demande qu'il me soit permis de dire un mot en faveur de la Nèthe, contre laquelle ou invoque des principes rigoureux et des distinctions inadmissibles. Je prouverai qu'il est bien naturel que la grande Nèthe soit reprise par l'Etat quand la petite l'est déjà.

- La clôture est mise aux voix et rejelée.

M. de Brouwer de Hogendorp. - La proposition de la section centrale vient de soulever des discussions auxquelles, je vous l'avoue en toute sincérité, je ne m'attendais certes pas. Que fait la section centrale ? Elle vient vous demander de respecter la loi et de l'appliquer uniformément. Dans notre opinion que je crois bien fondée, la Grande-Nèthe, l'Yser et les autres cours d'eau, dont il est question, sont la propriété de l'Etat ; ils n'ont jamais cessé de lui appartenir ; les provinces n'en ont eu que la direction, l'administration. Aujourd'hui les provinces repoussent cette charge ; pouvez-vous continuer à la leur faire supporter ? Non, vous ne le pouvez pas, à moins que vous ne vouliez violer la loi. Vous n'êtes pas omnipotents, messieurs ; vous devez respecter la loi aussi longtemps que vous ne l'aurez pas formellement abolie.

Nous avons entendu bien des discours, mais il n'est venu personne qui ait osé dire que les rivières navigables et flottables ne sont pas du domaine public de l'Etat. L'honorable M. Van Overloop, qui annonçait tout à l'heure que nos arguments étaient si mal fondés, est resté en défaut de prouver nos erreurs. Les rivières navigables et flottables sont-elles la propriété de l'Etal ? Voilà où est toute la question. Y a-t-il quelqu'un qui nie cette domanialité ?

M. Dumortier. - L'Etat n'en est pas propriétaire.

M. de Brouwer de Hogendorp. - L'Etal en est propriétaire, comme il est propriétaire des ports, dos rades, des portes, murs, fossés, remparts des places de guerre. Niez-vous que ce soit là la propriété de l'Etat ? Eh bien, le code civil assimile aux objets que je viens d'énumérer les rivières navigables et flottables.

il n'y a pas de distinction entre ces choses ; les unes appartiennent à l'Etat au même titre que les autres.

Je défie les membres qui combattent notre proposition de citer un seul texte de loi, un seul auteur qui dise que l'Etat n'est pas propriétaire des rivières navigables et flottables.

Aussi, M. Van Overloop ne nie-t-il pas notre principe : la question est grave dit-il ; il faut l'examiner sérieusement ; il ne faut pas la trancher par incident. Oui, la question est grave, mais elle ne présente pas ces difficultés qui doivent vous arrêter. Le principe n'est pas douteux : la ; Grande-Nèthe, l'Yser sont la propriété de l'Etat, parce que l'Yser et la Nèthe sont des rivières navigables et flottables.

Or, si ces rivières sont la propriété de l'Etat, qui doit supporter les charges de leur entretien et de leur curage ? Qui oserait répondre : Non, ce n'est pas l'Etat qui doit les supporter, ce sont les provinces ? Celui le souvenir de la domination qni respecte la loi ne l'oserait pas ; vous ne l'oseriez pas, M. Dumortier, pas plus qu'aucun membre de cette Chambre.

Messieurs, nous avons voulu consacrer le droit qui avait été violé si longtemps et nous l'eussions fait en eût-il coûté à l'Etat le quintuple de la dépense que nous mettons à sa charge. Nous n'avions pas le pouvoir de transiger avec le droit.

Mais je veux descendre à un autre ordre d'idées, je veux bien examiner ici, en présence du droit qui domine toutes les autres considérations, ce qu'il y aura donc de si onéreux pour l'Etat dans cette reprise.

Il s'agit, en réalité, d'une somme de dix mille francs à porter annuellement au budget, et c'est une pareille somme qui donne lieu à cette opposition si vive, à ces lamentations si bruyantes sur le sort du trésor public ! Dix mille francs à porter annuellement au budget, voilà tout l'effet de notre proposition !

Je savais que vous êtes économes des deniers publics ; mais je ne savais pas, messieurs, que vous le fussiez à ce point. Savez-vous quelle est ma pensée ? Je vais vous la dire. Il m'est avis, quand je vois l'honorable M. Dumortier se joindre aux représentants de Liège, pour faire une si vive opposition à notre humble proposition, il m'est avis, dis-je, que si mon honorable voisin se récric si fort contre la reprise des rivières navigables qui sont restées jusqu'ici sous l'administration des provinces, c'est que nous ne les reprenons pas aux conditions auxquelles nous avons repris l’Escaut. La reprise de (page 327) l'Escaut a été faite sans réserve et l'Etat a été assez généreux pour faire à ses frais les dépenses des travaux d'amélioration que la section centrale voudrait mettre pour une part à la charge des provinces, des communes et des riverains qui en profitent.

Ne serait-ce pas là aussi le motif de cette opposition unanime de MM. les représentants de Liège ? La section centrale veut revenir aux principes de la loi du 16 septembre 1807, qui impose aux riverains, dans les dépenses d'amélioration des rivières, une part proportionnelle à l'amélioration et à l'augmentation de valeur qui en résultent pour leurs propriétés. Ce sera, je l'avoue, un spectacle étrange de voir les riverains de la Nèthe et de l'Yser payer, en bons deniers, le bien que l'Etat va leur faire et ceux de la Meuse obtenir ce bien presque gratis. La comparaison sera assez piquante, je l'avoue, et je soupçonne fort les députés liégeois de vouloir s'y soustraire en enterrant, par leur vote, la proposition de la section centrale.

Je n'ai qu'une crainte, pour ma part, c'est qu'en revenant à la législation de 1807, nous ne fassions pas assez pour les provinces d’Anvers et de la Flandre occidentale et que nous n'ayons trop fait pour les autres.

Mais les défenseurs du trésor se réjouissent : la section centrale aura ranimé un principe salutaire, l'intervention des intéressés dans des dépenses mises trop longtemps par des intérêts particuliers à la charge du pays. Il y a là une source d'économies qui ne fera pas regretter les 10,000 fr. que nous vous demandons, messieurs, de voter.

L'honorable M. Jacques ayant bien voulu me céder son tour de parole, j'ai à remplir un devoir à son égard.

L'honorable membre avait voulu demander la parole pour répondre à l'honorable M. Dumortier quia ;prétendu que l'Ourlhe n'était pas une rivière navigable. Il résulte d'un décret impérial que l'Ourthe est navigable jusqu'à la réunion des deux Ourthes. Cette navigabilité existe donc jusqu'à un point qui excède celui indiqué par l'honorable M. Jacques.

- La clôture est de nouveau demandée.

M. Dumortier (contre la clôture). - Je demande à répondre quelques mots de l'honorable rapporteur.

- La clôture est mise aux voix et prononcée.

M. Dumortier. - Je demande le vote par division.

M. le président. - Trois amendements ont été présentés : celui de M. Jacques, celui de M. de Méroec-Westerloo et celui de M. Charles Rousselle.

M. de Mérode-Westerloo. - Je retire mon amendement.

M. le président. - On a demandé la division. Je mets aux voix la première partie de l'article proposé par la section centrale :

« Entretien de l'Yser. »

- Cette disposition est adoptée.

« De la Grande-Nèthe. »

- Cette disposition est adoptée.

« De l'Emblève. »

- Cette disposition n'est pas adoptée.

« De la Vesdre. »

- Cette disposition n'est pas adoptée.

« Du canal de Plasschendaele et de Nieuport, par Furnes, à la frontière de France. »

- Cette disposition n'est pas adoptée.

« De la Lieve. »

- Cette disposition n'est pas adoptée.

« Et de la Langeleede. »

- Cette disposition n'est pas adoptée.

M. le président. - M. Jacques a proposé d'ajouter les mots : « de l'Ourthe ». Je mets cet amendement aux voix.

- Cet amendement n'est pas adopté.

M. le président. - La Chambre doit se prononcer maintenant sur l'amendement de M. Rousselle.

M. Rousselle. - Je voudrais ajouter quelque chose à mon amendement.

M. le président. - On ne peut, après la clôture de la discussion, présenter ni modifier des amendements.

M. Rousselle. - En ce cas je retire mon amendement.

M. David. - Je le reprends.

- L'amendement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

M. le président. - L'article reste ainsi conçu :

« Entretien de l'Yser et de la Graude-Nèthe dont l'administration est reprise par l'Etat, à dater du 1er janvier 1854. (La part contributive des provinces, des communes et des propriétaires intéressés, dans l'exécution des grands travaux d'amélioration, sera ultérieurement déterminée par une loi) ;: fr. 30,000 »

Par suite des votes qui viennent d'être émis, M. le ministre ne croit-il pas devoir réduire le chiffre ?

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je crois que le chiffre de 10,000 fr. suffira ; je le propose. Je n'ai pas les détails sous les yeux ; on pourra y revenir au second vole.

M. le président. - Je mets aux voix l’article avec le chiffre de 10,000 francs.

- L'appel nominal est demandé.

L'article est mis aux voix par appel nominal.

84 membres sont présents.

49 votent pour l'adoption.

34 votent le rejet.

1 (M. Dumortier) s'abstient.

En conséquence, l'article est adopté.

Ont voté l'adoption : MM. Anspach, Brixhe, Clep, Coomans, Coppieters, H. de Baillet, de Brouwer de Hogendorp, de Chimay, de Decker, de Haerne, de La Coste, Delehaye, de Man d'Attenrode, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Portement, de Ruddere, de Sécus, Desmaisières, de Theux, Devaux, de Wouters, Dumon, Faignarl, Jacques, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Loos, Magherman, Malou, Manilius, Osy, Rodenbach, Rogier, A. Roussel, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Van Cromphault, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire et Visart.

Ont voté le rejet : MM. Boulez, Closset, David, de Bronckart, Deliége, de Renesse, Frère-Orban, Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, Laubry, Lebeau, Lejeune, Lelièvre, Lesoinne, Maertens, Mascart, Mercier, Moreau, Moxhon, Orbau, Orts, Pierre, Pirmez, Ch. Rousselle, Thienpont, Tremouroux, Vander Donckt, Van Overloop, Vilain XIIII, Allard, Ansiau et Delfosse.

M. Dumortier, qui s’est abstenu, motive son abstention en ces termes. - Messieurs, s'il s'était agi de voter la reprise de l’Yser par l’Etat, j'aurais associé mon vote à ceux qui ont voté l’amendement de la section centrale, ainsi que je l’avais annoncé précédemment ; mais en ce qui concerne la grande Nèthe, je ne puis consentir à la reprise de cette rivière par l’Etat, quand je lis dans le rapport de M. le ministre des travaux publics :

« A l'exception du canal de Plasschendaele sur Dunkerque, les autres voies navigables ne présentent aucun caractère d intérêt général ; elles n'offrent en quelque sorte qu’une utilité locale... »

Et plus loin :

«... .Sur la grande Nèthe et sur l'Emblève la navigation ne peut avoir lieu partout d’une manière suivie ; elle est subordonnée à des effets accidentels. »

En présence de cette déclaration de M. le ministre des travaux publics, je suis étonné de le. voir insister pour faire reprendre par l'Etat des cours d'eau sur lesquels il s'exprime lui-même de cette manière dans son rapport.

J'ai donc cru devoir m'abstenir.

Section V. Personnel des ponts et chaussées
Article 43

« Art. 43 (art. 41 du projet). Traitement des ingénieurs et conducteurs des ponts et chaussées, frais de bureau et de déplacement.

« Charge ordinaire ;: fr. 566,640.

« Charge extraordinaire ;: fr. 34,599 98.

La section centrale, d'accord avec M. le ministre des travaux publics, propose de fixer le chiffre de cet article à 600,209 fr. 98 c, par suite d’un transfert au budget du ministère de l'intérieur.

- Le chiffre de 600,209 fr. 98 c. est adopté.

Article 44

« Art. 44 (art. 42 du projet). Traitements et indemnités des chefs de bureau et commis, des éclusiers, pontonniers, gardes-ponts à bascule et autres agents subalternes des ponts et chaussées.

« Charge ordinaire ;: fr. 369,461 56.

« Charge extraordinaire ;: fr. 4,682 92. »

M. Mascart. - Je vois par le rapport de la section centrale que le gouvernement a supprimé, en 1853, quatre ponis à bascule, ce qui en réduit le nombre à dix de vingt et un qu'il était il y a quelques années.

Il serait sans doute préférable qu'on les supprimât tous à la fois, si la mesure ne devait pas donner lieu à des réclamations de la part de ceux qui ont pris à bail les réparations des routes.

On ne comprend pas que l'Etat, qui possède 800 lieues de routes, maintienne dix ponts à bascule, c'est-à-dire un pont pour 80 lieues de routes. Si on les répartissait d'une manière égale, la route d'Arlon à Ostende ne serait pas même assez étendue pour en établir un.

J'engage le gouvernement à persévérer dans la voie où il est entré ; car les ponts à bascule, utiles quand on les a établis au point de vue de la conservation des routes, sont un non-sens depuis que les matières pondéreuses sont transportées par les chemins de fer et par les canaux. Il n'y a personne qui ne soit convaincu de leur parfaite inutilité. Leur suppression est réclamée par tout le monde, sauf par les préposés qui y trouvent leur comple. Elle l'est surtout dans l'intérêt de l'Etat, qui a des traitements et des pensions à payer, dans celui du public pour qui les ponts à bascule sont une cause de vexations incroyables et de grande dépense.

- L'article 44 est adopté.

Article 45

« Art. 45 (art. 43 du projet). Frais des jurys d'examen et voyages des élèves ingénieurs et conducteurs de l’école spéciale du génie civil ;: fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Mines

Article 46

(page 328) « Art. 46 (art. 44 du projet). Personnel du conseil des mines. Traitement ;: fr. 41,700. »

M. Lelièvre. - Le ministère a annoncé un projet de loi tendant à autoriser le gouvernement à accorder, dans certains cas, la concession des mines de fer.

Au moment où il s'agit par conséquent d'étendre les attributions du conseil des mines, j'appellerai l'attention du gouvernement sur la disposition des lois en vigueur qui ne permet pas d'accorder une concession contre l'avis du conseil des mines. Semblable prescription peut avoir de notables inconvénients. Le conseil des mines peut commettre des erreurs, et le gouvernement, qui aurait la conviction que cette autorité s'est trompée, réduit à ne pouvoir passer outre, et les richesses minérales doivent rester enfouies sans aucune utilité pour personne. D'un autre côté, les droits des intéressés sont en péril d'être lésés.

D'après les principes fondamentaux de nos institutions, un recours est toujours accordé aux parties contre les décisions d'un corps quelconque, surtout lorsqu'il s'agit d'intérêts importants, témoin ce qui se passe en ce qui concerne les actes de la justice. Un second degré de juridiction est introduit en faveur de la partie qui a succombé et le législateur a de cette manière voulu établir de sérieuses garanties contre les erreurs possibles.

Il ne peut en être autrement en matière de mines, c'est pour ce motif qu'il est essentiel que les décisions de ce corps administratif puissent dans tous les cas possibles être contrôlées et au besoin réformées par une autorité supérieure.

Je prie le gouvernement de faire étudier ce point qui me paraît assez important pour mériter une attention spéciale de sa part. Lorsqu'il s'agit de statuer sur une concession, un droit de propriété très important est mis en question et à ce point de vue, nos institutions libérales exigent que les citoyens jouissent des mêmes garanties que celles qui sont décrétées par nos lois, lorsqu'il s'agit de droits civils dont l'appréciation appartient aux tribunaux.

- L'article 46 est adopté.

Articles 47 et 48

« Art. 47 (art. 45 du projet). Personnel du conseil des mines. Frais de route ;: fr. 600. »

- Adopte.


« Art. 48 (art. 46 du projet). Personnel du conseil des mines. Matériel ;: fr. 2,000. »

- Adopté.

Article 49

« Art. 49 (art. 47 du projet). Subsides aux caisses de prévoyance et récompenses aux personnes qui se distinguent par des actes de dévouement ;: fr. 45,000. »

M. T’Kint de Naeyer. - La loi du 3 avril 1851, qui assure certains avantages aux sociétés de secours mutuels ne s'applique pas aux caisses communes de prévoyance en faveur des ouvriers mineurs.

On ne pouvait absolument comprendre dans le même cadre les sociétés destinées à accorder des secours temporaires en cas de maladie, à qui par prudence on interdit de garantir des pensions viagères, et les caisses de prévoyance en faveur des ouvriers mineurs qui s'étendent sur toute une grande division du territoire minier et dont l'objet principal est d'accorder des pensions aux victimes d'accidents ou à leurs familles.

C'eût été bouleverser le système que l'on avait cru le meilleur pour les sociétés de secours mutuels ; le rapporteur de la section centrale en fit la remarque.

On s'en remit donc, pour les caisses de prévoyance des mineurs, à un projet de loi séparé que présenterait le gouvernement.

Dès cette époque le conseil des mines était déjà saisi de la question. Après avoir recueilli l'avis des commissions administratives des caisses de prévoyance et celui des députations permanentes des provinces minières, il soumit, à la fin de l'année dernière, si mes renseignements sont exacts, un travail complet au gouvernement.

J'ignore les motifs qui ont empêché M. le ministre des travaux publics de présenter un projet de loi aux Chambres, et j'espère qu'il voudra bien nous faire connaître ses intentions à cet égard.

Pendant l'année 1851, le total des recettes des caisses de prévoyance et des caisses particulières de secours établies près de chaque exploitation, avait été de fr. 843,220 06 c. Le total des dépenses de fr. 725,054 69 cent., dont la presque totalité avait été répandue en bienfaits dans la classe si pauvre des ouvriers mineurs, surtout dans les familles que la mort ou l'incapacité de travail de leurs chefs avaient plongés dans la misère.

En 1852, les recettes ont encore augmenté ; elles ont été de 989,263 fr. 82 c. ; les dépenses se sont élevées à fr. 809,376, 16 c.

Une population de plus de 55,000 ouvriers mineurs, qui, avec les femmes et les enfants, présente un total de 224,000 personnes, est intéressée au développement et à la durée des caisses de prévoyance. Il importe que la loi, en les déclarant établissements d'utilité publique, leur accorde des avantages analogues à ceux qui ont été assurés aux Sociétés de Secours mutuels qui soumettent leurs statuts à l'approbation du gouvernement.

M. Brixhe. - Messieurs, les principales observations que je comptais soumettre à la Chambre ont été rencontrées par l'honorable préopinant ; je ne pourrais que leur donner un développement assez inutile dans ce moment ; je renonce donc à la parole. J'appuie cependant de tout mon pouvoir les observations de l'honorable préopinant, et je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir bien fournir quelques explications à la Chambre.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, l'objet que les deux honorables préopinants viennent de signaler à mon attention a fait le sujet d'un projet de loi qui m'a été renvoyé par le conseil des mines et que je serai en mesure de soumettre aux délibérations de la Chambre à sa rentrée.

- L'article 49 est mis aux voix et adopté.

Articles 50 à 56

« Art. 50 (art. 48 du projet). Impressions, achat de livres, de cartes et d'instruments ; publication de documents statistiques, encouragements et subventions, essais et expériences ;: fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 51 (art. 49 du projet). Traitements et indemnités du personnel du corps des mines.

« Charges ordinaires ;: fr. 136,600.

« Charges extraordinaires ;: fr. 4,033 33. »

- Adopté.


« Art. 52 (art. 50 du projet). Jury d'examen et voyage des élèves de l'école des mines ;: fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 53 (art. 51 du projet). Commission des procédés nouveaux. Frais de route et de séjour ;: fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 54 (art. 52 du projet). Matériel, achat de réactifs, d'appareils, etc. ;: fr. 1,400. »

- Adopté.


« Art. 55 (53 du projet). Commission des Annales des travaux publics. Frais de route et de séjour ;: fr. 1,100. »

- Adopté.


« Art. 56 (art. 54 du projet). Commission des Annales des travaux publics. Publication du recueil, frais de bureau, etc. ;: fr. 3,900. »

- Adopté.

Chapitre IV. Service d’exécution. Chemin de fer. Postes. Télégraphes. Régie

Discussion générale

M. le président. - La parole est à M. Magherman.

M. Magherman. - Messieurs, mon intention n'est pas d'engager le gouvernement dans de nouvelles dépenses, le moment n'étant pas opportun. Je crois cependant devoir appeler son attention sur l'utilité, la nécessité même de réduire en une seule, dans un avenir prochain, les deux stations de la ville de Bruxelles.

En effet, un voyageur venant d'Anvers et se rendant dans la direction de Mons, parcourt une seule et même ligne appartenant à un seul et même propriétaire ; au milieu de son parcours, il rencontre une solution de continuité, il doit descendre de voiture ; il doit faire à pied un trajet d'environ une demi-lieue, s'il n'a pas le moyen de prendre une voiture, traîner péniblement derrière lui ses bagages, car les voyageurs qui prennent les voitures de troisième classe sont les plus nombreux ; c'est pour ceux-là que l'inconvénient que je vous signale présente le plus de gravité. Arrivé à la station du Nord, il se voit exposé à de nouveaux embarras. En effet, le service du chemin de fer n'est pas réglé de façon que le départ de la station du Nord coïncide avec l'arrivée à la station du Midi.

Notre voyageur se voit donc forcé malgré lui de séjourner à Bruxelles, d'y entrer dans un établissement public en attendant le départ du plus prochain convoi, d'y faire de la dépense. Voilà donc une perte de temps et d'argent.

Dans quel but cela peut-il avoir lieu ;? Est-ce pour arrêter pendant quelque temps les voyageurs à Bruxelles ?

Je ne puis croire à une telle intention, l'on ne peut avoir été guidé par une considération aussi mesquine ; j'ai assez bonne opinion des magistrats de Bruxelles pour croire qu'ils seraient les premiers à désapprouver une pareille combinaison si elle n'avait pas d'autre but ; la capitale ne présente-t elle pas assez d'attrait à l'étranger pour l'y attirer spontanément, sans avoir recours à de pareils expédients !

Messieurs, tant que la station des Bogards n'est pas définitivement construite, jusqu'ici les bâtiments qu'on y a faits ne sont que provisoires, ce que je demande pourrait se faire sans aucun inconvénient et saus donner lieu à une grande perte sur les dépenses déjà opérées ; mais si plus tard le gouvernement s'avisait de faire des constructions définitives à cette station, il n'en serait plus de même. Aujourd'hui tout ce qui existe n'étant que provisoire, j'engage le gouvernement à maintenir les (page 329) choses dans l'état où elles sont jusqu'à ce qu'il puisse aviser à faire des constructions définitives et à réunir alors les deux stations en une seule à la station du Nord, où l'on peut donner à l’établissement autant d'extension qu'on veut ; car le terrain n'y fait pas faute dans la direction de Malines. Quant aux bâtiments qui se trouvent à la station du midi, ils ne seront pas perdus car le gouvernement sera toujours obligé de maintenir cette station pour le service des marchandises

En effet, la circulation des marchandises sur la ligne du Midi est très considérable ; cette station peut et doit donc être maintenue à l'état de station pour les marchandises. Le gouvernement a cru devoir relier les deux stations pour le transport des marchandises, pourquoi n'en ferait-il pas de même pour le transport des voyageurs ? Dans les autres capitales de l'Europe, on a senti cette nécessité, à Paris, à Londres où les lignes de chemins de fer ne sont pas la propriété de l'Etat, où elles ont été construites et sont exploitées par des compagnies ; il n'est pas étonnant que chaque compagnie y ait établi sa station. Eh bien, malgré cet état de choses, on y sent la nécessité de les relier par une ligne de ceinture et d'établir une administration centrale.

Je passe a un autre objet.

Messieurs, le gouvernement par un arrêté du 21 septembre dernier a enfin concédé la ligne de chemin de fer d'Audenarde à Gand qui fait l'objet d'un des articles de la loi du mois de décembre 1851 comprenant l'ensemble des travaux publics décrétés à cette époque par la législature.

J'appellerai l'attention de M. le ministre sur une lacune que j'ai remarquée dans la convention conclue avec la société concessionnaire. Voici le fait : le point de jonction du chemin d'Audenarde à Gand n'est pas la station de Gand, mais un point situé à quelques kilomètres de cette station, de manière que les trains de la société concessionnaire devront parcourir une certaine étendue de la ligne de l'Etat. Or, les conditions auxquelles cette circulation sera permise ne sont pas déterminées dans la convention. On peut dire que l'exploitation de la ligne d'Audenarde à Gand n'est pas possible, tant qu'une convention ultérieure n'iulervient pas sur ce point essentiel. La convention aujourd'hui existante n'est pas complète. Cet état de choses laisse la porte ouverte à des difficultés, à des inconvénients graves, à des procès, il serait même possible que cela donnât lieu à l'annulation de la convention. J'insiste auprès de M. le ministre pour l'engager à combler le plus tôt possible cette lacune.

Puisque je parle du chemin de fer d'Audenarde, j'engagerai M. le ministre à donner à cette ligne toute l'extension utile qu'elle comporte. Nous avons l'expérience que les lignes à l'état de tronçon sont nécessairement improductives. Cependant le gouvernement, d'après la loi de 1851, garantit un minimum d'intérêt de 4 p.c, pour les 1,800 mille fr. engagés dans la construction de cette ligne. Il est donc de l'intérêt du gouvernement de la tirer de l'état d'isolement où elle se trouve.

Nous avons eu la preuve de ce que j'avance dans plusieurs lignes exploitées dans de semblables conditions : ainsi, la ligne de Tournai à Mouscron, quoique Tournai soit une ville importante, n'a donné aucun profit tant qu'elle n'a pas été réunie à la ligne du Sud par l'embranchement de Jurbise ; la ligne de Saint-Trond à Hasselt, la ligne exploitée d'Alost à Termonde, tous ces tronçons ne peuvent pas faire leurs frais. Il en sera de même de la ligne d'Audenarde à Gand si on ne la continue pas. Je prie le gouvernement de faire en sorte que cette ligne puisse recevoir une extension fructueuse.

L'extension à lui donner se trouve indiquée par la ligne pavée, à savoir, l'ancienne ligne de Gand vers Valenciennes par Reiiaix, Frasnes, Leuze et Péruwelz. J'ajouterai que cette ligne pourrait très utilement remplacer celle dont on a récemment entretenu la Chambre, je veux parler de la ligne directe entre Gand et St-Ghislain. Cette ligne, que la ville de Gand appelle de tous ses vœux, n'a pas d'avenir, elle ne traverse pas de centre populeux ; elle ne rencontre qu'une seule ville, Ath, qui n'a pas grande importance industrielle ; d'ailleurs, cette ville est déjà desservie par la ligne de Tournai à Jurbise, et par le chemin de Dendre-et-Waes ; elle n'a pas besoin d'être rattachée à une ligne nouvelle ; sur presque tout le reste du parcours on ne rencontre que des villages, la plupart de peu d'importance, habités par des populations agricoles, qui sentent peu le besoin de voyager par chemin de fer. Cette ligne n'a donc pas d'autre élément de succès que le transport du charbon ; eh bien, pour le transport du charbon, ce chemin de fer ne pourrait pas lutter avec les voies navigables ; le canal de Mons à Antoing et l'Escaut d'Antoing à Gand pourront toujours transporter, en temps ordinaire, le charbon à meilleur compte que le chemin de fer en ligne directe.

Le chemin de fer que je viens d'indiquer verrait donc échapper, pondant les trois quarts de l'année, le seul élément de succès sur lequel il puisse compter, à savoir le transport du charbon. Ce transport pourra se faire par la ligne d'Audenarde aux mêmes conditions que par la ligne directe de Saint-Ghislain à Gand ; car qu'est-ce qu'une différence d'une lieue et demie ? C'esl peu de chose pour un chemin de fer, et rien n'empécherait de racheter cette différence en faveur du transport du charbon par une stipulation du tarif. Les nombreux avantages qu'elle rencontrerait dans son passage par des centres populeux et industriels permettraient une pareille réduction sans inconvénient.

Cette ligne aurait sur son passage : Audenarde, ville de 6,000 habitants, Renaix qui en a 12,000, Frasnes qui est un bourg de 4 à 5 mille habitants, Leuze et Peruwelz, qui ont chacun de 6 à 8 mïile habitants. Toutes ces villes ont une industrie et un commerce très actifs. Il y a là toutes les garanties possibles de succès.

Je trouve donc que le bassin houiller de Mons et le commerce de Gand devraient réunir leurs efforts pour diriger la voie qu'ils avaient en vue à vol d'oiseau, par le parcours que je viens d'indiquer et par là multiplier leurs relations déjà très suivies avec les villes situées sur cette ligne.

Si l'on veut avoir une idée de l'importance relative de la circulation sur ces deux lignes, on la rencontre dans le produit des barrières établies sur les routes pavées qui existent dans les deux directions.

De Gand à Renaix, il y a sept barrières produisant 19,673 fr.

De Renaix à Leuze, trois barrières donnant 10,200 fr.

Total 29,873 fr.

Cela fait terme moyen 2,987 francs. soit chiffre rond : 3,000 francs.

Que remarque-t-on de l'autre côté ?

De Gand à Hundelghem il se trouve 4 barrières produisant 6,870 fr. 37

De Gand à Ath 2 barrières donnant 650 fr. 00

Ensemble 7,520 fr. 57

Donc le terme moyen est de 1,253 fr. par barrière, c'esl donc quelque chose comme 12 1/2 à 30.

Voilà l'exacte proportion de la circulation qu'il y a sur les deux lignes, et remarquez qu'un chemin de fer établi dans des centres industriels fait quadrupler la circulation, tandis qu'il est loin d'en être de même dans les contrées agricoles.

Je prie donc M. le ministre des travaux publics de fixer son attention sur cette ligne et de vouloir le plus tôt possible en accorder la concession aux sociétés qui la sollicitent ; car, si je suis bien informé, je crois que plusieurs sociétés sollicitent l'extension du chemin de fer d'Audenarde dans cette direction.

Mais, a dit M. le ministre des travaux publics dans une précédente séance, il ne suffit pas que des sociétés sollicitent ; il faut qu'elles justifient des moyens d'exécution. En cela, il peut avoir raison. Mais quand les sociétés concessionnaires qui s'occupent de chemins de fer s'adressent à des compagnies financières, que disent celles-ci ? Elles disent : Produisez la garantie que le gouvernement est disposé à exécuter cette ligne ; car nous ne pouvons sans cela faire les fonds.

Il y a un moyen terme. Je prie M. le ministre des travaux publies d'y prêter attention. Il me semble qu'il pourrait, dans cet état de choses, faire une espèce de promesse à la société, en ce sens qu'il lui accorderait la concession aussitôt qu'elle aurait justifié de moyens d'exécution. Par cette promesse, la société concessionnaire obtiendrait bien plus facilement d'une compagnie financière la réalisation des fonds nécessaires à l'exécution de la ligne sollicitée.

M. Lelièvre. - A l'occasion du chapitre en question, je crois devoir signaler à M. le ministre des travaux publics la nécessité de construire une station à Moustier sur Sambre près de Namur. L'étude de la question ne laissera aucun doute sur la légitimité de cette réclamation.

M. Delehaye. - La ligne dont a parlé l’honorable M. Magherman est digne de toute sollicitude. Je n'ai pas l’intention de la combattre. Je l'appuie au contraire de toutes mes forces. Il y a peu de localités aussi populeuses, aussi riches que ces localités. Mais je ne comprends pas l'honorable membre, lorsque je l'entends s'opposer à la concession d'une ligne qui doit mettre Gand, la ville industrielle par excellence, avec le pays qui produit la houille, car le chemin de fer de St-Ghislain, qui est appelé à desservir ces localités, ne peut nuire à la ligne qu'il a indiquée. Il ne traverse pas des localités moins importantes que celles qu'il a indiquées sur l'autre ligne. L'honorable M. Jouret, qui appartient à ces localités, s'empressera, je n'en doute pas, de prendre la parole pour appuyer cette ligne. Le chemin de fer de Saint-Ghislain est appelé à de très belles destinées ; il doit mettre en communication Gand et Mons, deux cités industrielles. Ce n'est qu'au moyen de ce chemin de fer que l'on peut arriver à avoir à Gand la houille à bon marché, ce qui est dans le vœu de tous.

J'appuie donc et le chemin de fer de Renaix et celui de St-Ghislain.

M. Magherman. - Quoi qu'en dise l'honorable M. Delehaye, je pense que le chemin de fer par Audenarde et Renaix a exactement le même but que celui qu'il préconise. Tous deux ont les mêmes aboutissants : ils ont pour point de départ Gand et pour point d'arrivée le bassin houiller du couchant de Mons. Il est donc évident que ces deux lignes ne peuvent coexister. A laquelle faut-il donner la préférence ? A celle qui dessert des centres de population importants et si rapprochés les uns des autres qu'ils ne sont séparés que par des intervalles de deux lieues.

Jetez un coup d'œil sur la carte, et vous verrez un grand vide entre la ligne de Gand vers Courtrai et la ligne de la Dendre. Ce vide serait exactement coupé en deux au moyen de la ligne que j'indique ; donc, elle se trouverait dans les conditions les plus avantageuses au point de vue de l'intérêt général. Celle que préconise l'honorable M. Delehaye n'a pas le même avantage ; elle se rapproche trop de la ligne de Dendre-et-Waes, elle a uniquement en vue le transport du charbon qui peut se faire aussi avantageusement par la ligne que je viens d'indiquer. Il n’y a qu'une différence d'une lieue et demie, ce qui est peu de chose, lorsque la ligne plus longue présente des éléments de succès qu'on ne rencontre pas de l'autre côté.

(page 330) M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, il y a quelques jours l'honorable M. Allard a appelé mon attention sur un projet de chemin de fer qui intéresse directement le chef-lieu de l'arrondissement qui l'a envoyé dans cette enceinte. Il s'agit du chemin de fer de Saint-Ghislain à Tournai ou même du chemin de fer destiné à mettre le bassin de Mons en communication avec Leuze. Plusieurs autres directions ont été indiquées ; j'ai eu l'honneur de les signaler à la Chambre, il v a quelques jours, à l'occasion du rapport qui vous a été fait sur une pétition ayant pour objet le même chemin de fer.

Des demandeurs sont en instance auprès du département des travaux publics pour obtenir la concession d'un chemin de fer allant de Grammont à Gand et à Zelzaete ; d'autres demandent que la ligne ait son point d'origine à Lessinnes et se dirige également vers Gand ; d'autres se dirigent vers Renaix, d'autres encore proposent de construire une grande ligne à partir de Saint-Ghislain vers Gand ou même de Thulin vers Gand ; d'autres encore prennent Manage pour point de départ.

Toutes ces directions ont un but commun : c'est de relier le marché si important des Flandres aux bassins très importants aussi de Mons, de Charleroi et du Centre.

I.e gouvernement est dans l'impossibilité de se prononcer, en dehors d'une instruction approfondie et dans laquelle devront être entendus les divers délégués des provinces, sur la direction qui convient le mieux aux intérêts à desservir et même aux intérêts du trésor, car les intérêts du trésor sont également pour quelque chose dans cette question.

Je dois donc déclarer aux honorables membres qu'avant qu'une enquête n'ait mis le gouvernement à même de se prononcer sur la direction la plus utile et la plus conforme aux intérêts généraux, les chambres ne seront pas saisies d'un projet de loi.

M. Manilius. - J'avais demandé la parole pour répondre à l'honorable M. Magherman ; M. le ministre vient de le faire d'une manière assez favorable.

En effet, messieurs, il y a plusieurs demandes en concession pour des chemins de fer qui doivent être dirigés des bassins houillers de Mons et du Centre vers Gand. Ce sont des lignes qui seront entièrement utiles et qui inévitablement seront très profitables.

J'applaudis à ce que vient de dire M. le ministre des travaux publics. Je désire aussi qu'une instruction sérieuse soit faite ; mais je demande qu'elle soit faite dans le plus bref délai possible et surtout qu'il ne puisse en résulter aucun préjudice pour le trésor.

Je viens d'entendre prononcer ces derniers mots par M. le ministre des travaux publics. Or, messieurs, je crois qu'jl y a au moins une douzaine de demandes de concession pour des chemins de fer, allant de St-Ghislain à Leuze, de St-Ghislain à Ath, de. St-Ghislain à Tournai, de St-Ghislain à Renaix et par Sotteghem sur Gand ; à côté de cela pour relier le Centre à Gand, il y a un projet partant de Grammont, un autre partant d'Ath, un troisième de Lessines, tous se dirigeant sur Gand. Enfin toutes les communes comprises dans l'espace entre Gand et les bassins de Mons et du Centre sont comprises dans les différents projets ; il n'y a pas de point important que nous ne voyions figurer sur les cartes que l'on nous distribue tous les jours.

Je dis que dans une pareille situation, le gouvernement doit agir avec une grande réserve et ne pas accorder facilement des minimums d'intérêt. Or, ce n'est que de cette manière que les intérêts du trésor pourraient être compromis. Du moment que j'entends le gouvernement nous dire que l'intérêt du trésor pourrait se trouver engagé, je crains qu'on n'amène une combinaison telle, que le gouvernement serait encore engagé par une intervention pécuniaire.

Mais du moment où une pareille intervention n'existe pas, les intérêts du trésor ne courent aucun risque et le gouvernement ne doit pas hésiter à accorder plusieurs de ces concessions. Car il ne s'agit pas de concéder une seule ligne ; l'intérêt des localités en exige plusieurs. Il faut une voie de Gand sur Grammont pour nous mettre en communication avec le bassin du Centre. Car le Centre est une grande source d'alimentation pour la ville industrielle dont il s'agit.

Quant aux deux ou trois projets qui ont pour point de départ Saint-Ghislain, que le gouvernement les examine et qu'il décide, mais qu'il le fasse dans le plus bref délai possible. Il est nécessaire d'éviter tout retard ; nous en avons la preuve dans les démonstrations de tous les bassins houillers qui vont avoir à concourir avec les charbons étrangers, pour lesquels on a demandé la libre entrée. Il y a grande urgence de mettre la production nationale à même de pouvoir lutter avec les produits étrangers qui vont leur faire concurrence.

je le répète, je ne puis trop applaudir à ce que vient de dire M. le ministre des travaux publics, à condition, toutefois, qu'il ajoute qu'il fera son possible pour éviter tout relard dans l'instruction que je reconnais nécessaire.

M. Delehaye. - Je dois faire remarquer que le chemin de fer de Saint-Ghislain à Gand est un chemin de fer purement commercial et industriel. Je demande donc que le gouvernement examine, avant tout, ici les exigences du commerce et de l'industrie.

Quant aux craintes manifestées par M. le ministre relativement aux intérêts du trésor, je ferai observer que le chemin de fer dont parle l'honorable M. Magherman est décrété déjà avec le garantie d'un minimum d'intérêt, tandis que le chemin de fer que réclament le commerce et l'industrie n'exigera aucun sacrifice du trésor. Des concessionnaires se présentent pour faire cette ligne à leurs frais et sans garantie de minimum d'intérêt.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Quand j'ai dit tantôt à la Chambre que j'entendais, dans cette question, faire état aussi des intérêts du trésor, je n'ai pas voulu dire que les demandeurs en concession fissent du concours du gouvernement l'objet d'une condition quelconque. Je reconnais, avec les honorables membres que de toutes les concessions qui sont aujourd'hui en instance au département, il n'en est pas une seule qui soit subordonnée à l'intervention financière du trésor ; ce sont toutes concessions demandées purement et simplement. J'ai seulement voulu appeler l'attention de la Chambre sur ce point qu'aujourd'hui le marché de Gand est alimenté en charbon par des voies navigables existantes et qu'il était important d'examiner quelle serait an point de vue des intérêts du trésor, l'influence d'une nouvelle qui pourrait faire concurrence aux voies navigables.

M. Magherman. - Je veux seulement faire observer que pour l'extension que j'ai indiquée d'Audenarde par Renaix, Leuze et Péruwelz, on ne demande pus de garantie d'un minimum d'intérêt. Il y a plus, c'est que cette extension aura pour résultat d'éviter au gouvernement le payement de ce minimum d'intérêt sur la ligne d'Audenarde à Gand. On doit être convaincu qu'aussi longtemps que cette dernière ligne ne sera pas continuée, le gouvernement sera forcé de payer l'intérêt sur une somme de 1,800,000 fr. ; tandis qu'avec l'extension que j'ai demandée, cette ligne deviendra tellement fructueuse que le minimum d'intérêt ne devra plus être payé.

C'est donc dans l'intérêt du trésor que je réclame l'exécution de cette ligne qui offrira à la ville de Gand les mêmes avantages que celle indiquée par l'honorable M. Delehaye.

- La discussion est close.

Section I. Voies et travaux
Articles 57 et 58

« Art. 57 (art. 55 du projet). Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés ;: fr. 179,160. »

- Adopté.


« Art. 58 (art. 56 du projet). Salaires des agents payés à la journée ;: fr. 1,177,400. »

- Adopté.

Article 59

« Art. 59 (art. 57 du projet). Matériaux, engins, outils et ustensiles ;: fr. 948,000. »

- La section centrale, d'accord avec M. le ministre, demande une augmentation de 400,000 fr.

M. David. - Messieurs, à plusieurs reprises déjà j'ai eu l'honneur de demander à la Chambre de vouloir allouer une légère augmentation à ce crédit pour arriver enfin à fermer par des rideaux les voilures de troisième classe. Ma proposition à été acceptée par M. le ministre ; à deux reprises différentes il m'a promis que cette amélioration aurait lieu. Mais que m'objectait-il à cette époque ? Il disait : Nous venons de voter un nouveau tarif pour le transport de voyageurs. Si l'on améliore les waggons, il y aura déclassement ; nous ne pouvons admettre ed ce moment la fermeture de ces voitures.

Messieurs, je crois que cette objection n'en est plus une aujourd'hui ; voilà deux ans et demi que l'on fait l'expérience du nouveau tarif ; on doit connaître les résultats des modifications qu'il a introduites.

Nous sommes, messieurs, en plein hiver ; je voudrais vous voir assister au débarquement des voyageurs de troisième classe dans nos stations ; vous vous diriez : Il faut dès demain, si c'est possible, que les waggons soient fermés au moyen de rideaux.

Je ne demande pas que la fermeture des waggons soit permanente. Je pense même que l'été il est plus agréable de les avoir ouverts. Mais par humanité pour les voyageurs, fermez au moins les waggons pendant les rigueurs de l'hiver. Les rideaux que l'on mettra à ces voitures pourront servir pendant plusieurs années et dès lors la dépense sera peu considérable.

Je pense d'ailleurs, qu'en posant un acte d'humanité, nous poserons en même temps un acte de bonne administration, un acte très favorable aux recettes du trésor. Vous comprenez fort bien que le voyageur de troisième classe, qui ne doit pas absolument se déplacer, reste chez lui lorsqu'il gèle à 10 degrés. Nous allons peut-être avoir 20 degrés de froid, et alors vos voitures de troisième classe seront vides. C'est donc un acte d'humanité et de bonne administration que je vous demande de poser.

Je propose une augmentation de 12,000 francs pour fermer 300 waggons.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - L'honorable M. David propose une somme de 12,000 fr. J'ignore quels sont les éléments des calculs auxquels il s'est livré pour affirmer qu'on pourra, moyennant cette augmentation, fermer 300 waggons. Je voudrais savoir si ses calculs reposent sur une appréciation exacte des faits.

Je reconnais, avec l'honorable M. David, qu'il est extrêmement désirable que l'on pourvoie de rideaux les voitures de troisième classe, il y aura là un acte d'hnmanité et de bonne administration. Cependant il est dans l'erreur quand il pense qu'à cet égard lieu n'a été fait.

Il y a un certain nombre de waggons qui sont pourvus de rideaux et qui circulent sur les grandes lignes. Si la fermeture des waggons dont parle l'honorable M. David consiste dans de simples rideaux, je puis affirmer que ces rideaux existent pour un certain nombre de ces véhicules. Cependant si l'honorable M. David veut s'expliquer sur les détails du chiffre qu'il propose, je verrai si je puis m'y rallier.

M. David. - M. le ministre des travaux publics vient de dire qu'il y a un certain nombre de waggons fermés au moyen de rideaux. Je ne sais si M. le ministre se rend bien compte des waggons qui sont fermés au moyen de rideaux. S'il avait recherché avec soin quels sont ces waggons, il se serait assuré que c'est uniquement à chaque convoi de (page 331) marchandises qu'on accroche un waggon à rideaux, et que ce waggon est exclusivement destiné aux gardes du convoi.

Voilà en quoi consiste le matériel de la troisième classe, garni de rideaux. Je puis l'affirmer à M. le ministre.

Je n'ai pas calculé le nombre de waggons qu'on pourrait garnir de rideaux au moyen de la somme de 12,000 francs que je propose ; je demande qu'on emploie cette somme à fermer le plus grand nombre de waggons possible ; il ne s'agit pas de rideaux de soie ; je crois que 40 fr. suffiront pour chaque waggon ; ainsi avec 12,000 fr. vous fermeriez 300 waggons. Comme pendant l'hiver le nombre des voyageurs diminue dans une proportion assez considérable, avec le nombre de 300 waggons fermés, vous pourriez traverser la mauvaise saison.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je me rallie à l'amendement de M. David.

- L'article 59, augmenté de 12,000 fr., est mis aux voix et adopté.

Article 60

« Art. 60 (art. 58 du projet). Travaux et fournitures ;: fr. 363,000. »

- Adopté.

Section II. Traction et arsenal
Articles 61 à 66

« Art. 61 (art. 59 du projet). Trailements et indemnités des fonctionnaires et employés ;: fr. 118,600. »

- Adopté.


« Art. 62 (art. 60 du projet). Salaires des agents payés à la journée ;: fr. 1,418,000. »

- Adopté.


« Art. 63 (art. 61 du projet). Primes d'économie et de régularité ;: fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 64 (art. 62 du projet). Combustibles et autres consommations pour la traction des convois ;: fr. 1,060,000. »

- Le gouvernement propose une augmentation de 500,000 fr. La section centrale adopte.

Le chiffre de 1,560,000 fr. est mis aux voix et adopté.


« Art. 65 (art. 63 du projet). Entretien, réparation et renouvellement du matériel ;: fr. 918,710. »

- Adopté.


« Art. 66 (art. 64 du projet). Redevances aux compagnies ;: fr. 90,000. »

- Adopté.

Section III. Mouvement et trafic
Articles 67 à 71

« Art. 67 (art. 65 du projet). Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés ;: fr. 771,500. »

- Adopté.


« Art. 68 (art. 66 du projet). Salaires des agents payés à la journée et manœuvres ;: fr. 825,500. »

- Adopté.


« Art. 69 (art. 67 du projet). Frais d'exploitation ;: fr. 181,790. »

- Adopté.


« Art. 70 (art. 68 du projet). Camionnage ;: fr. 220,000. »

- Adopté.


« Art. 71 (art. 69 du projet). Pertes et avaries ;: fr. 20,000. »

- Adopté.

Section IV. Télégraphes
Discussion générale

M. Osy. - Messieurs, j'accorde avec plaisir l'augmentation de 18,000 fr. que le gouvernement demande pour ce service, d'autant plus que les télégraphes rapportent beaucoup plus qu'on n'avait pu le prévoir Je prierai M. le ministre des travaux publics de vouloir bien examiner si, au moyen de cette augmentation, il ne serait pas convenable de rétribuer un peu mieux les employés subalternes de l'administration. Vous savez que ce service exige de la part des employés un secret inviolable. Il est peut-être à craindre que si vous ne donnez que des traitements de 500 à 600 fr. aux employés dont il s'agit, il ne se commette des indiscrétions.

Je profite de l'occasion pour prier M. le ministre des travaux publics de vouloir bien examiner s'il ne pourrait pas faire arriver le télégraphe jusqu'au local même de chacune des bourses de Bruxelles et d'Anvers. Cette amélioration, qui coûterait assez peu, serait très productive pour le trésor public. Aujourd'hui il arrive souvent qu'on n'envoie pas de dépêches, parce que le temps manque.

Articles 72 à 74

« Art. 72 (art. 70 du projet). Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés ;: fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 73 (art. 71 du projet). Salaires des agents payés à la journée ;: fr. 9,000. »

- Adopté.


« Art. 74 (art. 72 du projet). Entretien ;: fr. 12,000. »

- Adopté.

Section V. Service en général (chemins de fer et télégraphes)
Articles 75 à 78

« Art. 75 (art. 73 du projet). Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés ;: fr. 28,550. »

- Adopté.


« Art. 76 (art. 74 du projet). Salaire des agents payés à la journée ;: fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 77 (art. 75 du projet). Matériel et fournitures de bureau ;: fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 78 (art. 76 du projet). Subside à la caisse de retraite et de secours des ouvriers de l'administration ;: fr. 10,000. »

- Adopté.

Section VI. Régie
Articles 79 et 80

« Art. 79 (art. 77 du projet). Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés ;: fr. 36,500. »

- Adopté.


« Art. 80 (art. 78 du projet). Frais de bureau et de loyer ;: fr. 3,500. »

- Adopté.

La suite de la discussion est remise à demain.

La séance est levée à 4 heures et demie.