(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1852-1853)
(Présidence de M. Delfosse.)
(page 1426) M. Maertens procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
La séance est ouverte.
M. Ansiau donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.
M. Maertens fait connattre l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.
« Les instituteurs primaires du canton de Quevaucamps demandent que le gouvernement soit invité a rapporter l'arrêté du 10 décembre 1852, qui a modifié le règlement organique des caisses provinciales de prévoyance des instituteurs primaires. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des électeurs à Florenville demandent que les élections aux chambres se fassent au chef-lieu du canton. »
- Renvoi à la commission des pétitions du mois de mars.
« Des électeurs à Hoogstraeten demandent que les districts électoraux pour les nominations aux chambres soient composés de 40,000 âmes et que l'élection se fasse au chef-lieu du canton. »
- Même renvoi.
« Par dépêche du 19 mai, M. le ministre de la justice transmet à la chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation ordinaire du sieur Sudrot, Edmond-Augustin, ancien maréchal des logis au régiment des guides. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
-M. Ad. Roussel demande un congé de deux jours.
- Accordé.
Les sections du mois de mai se sont constituées comme suit :
Première section
Président : M. de Man d’Attentode
Vice-président : M. Van Iseghem
Secrétaire : M. Closset
Rapporteur de pétitions : M. Thienpont
Deuxième section
Président : M. Ch. Rousselle
Vice-président : M. de Royer
Secrétaire : M. de Perceval
Rapporteur de pétitions : M. Jacques
Troisième section
Président : M. Delehaye
Vice-président : M. Lange
Secrétaire : M. Janssens
Rapporteur de pétitions : M. Tremouroux
Quatrième section
Président : M. Lesoinne
Vice-président : M. le Bailly de Tilleghem
Secrétaire : M. de Steenhault
Rapporteur de pétitions : M. Coomans
Cinquième section
Président : M. de Chimay
Vice-président : M. de Renesse
Secrétaire : M. Van Overloop
Rapporteur de pétitions : M. Orban
Sixième section
Président : M. Matthieu
Vice-président : M. Moreau
Secrétaire : M. Pierre
Rapporteur de pétitions : M. Vander Donckt
M. de Perceval dépose les rapports sur la demande en grande naturalisation du sieur Fuchs, président de la chambre de commerce d'Anvers, et sur la demande en naturalisation ordinaire du sieur Delgeur.
- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports et les met à l'ordre du jour à la suite des objets qui s'y trouvent déjà portés.
M. Maertens dépose le rapport sur le projet de loi concernant un crédit supplémentaire pour créances arriérées du département de la guerre.
- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport, et met le projet à l'ordre du jour à la suite des objets qui s'y trouvent déjà portés.
« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement du personnel des bureaux : fr. 105,050 »
La section centrale propose de porter ce chiffre à 107,120 francs.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, je me suis mis d'accord avec le rapporteur de la section centrale ; il s'agit uniquement d'un transfert et ce transfert n'a pour but qu'une régularisation.
Je demande que le chiffre de 105,050 fr. soit porté à 108,491 fr., dont 2,076 fr. seraient pris sur l'article 42 ; 365 fr. sur l'article 43, et 1,000 sur l'article 49, total 3,441 fr. C'est une régularisation plus complète que celle qui était proposée par la section centrale.
M. Van Iseghem, rapporteur. - Je suis d'accord avec M. le ministre.
- Le chiffre de 108,491 fr. est mis aux voix et adopté.
« Art. 3. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 2,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Secours à des fonctionnaires et employés, à leurs veuves ou enfants, qui, sans avoir droit à la pension, ont des titres à l'obtention d'un secours à raison de leur position malheureuse : fr. 1,000. »
- Adopté.
« Art.5. Matériel : fr. 37,600. »
- Adopté.
« Art. 6. Achat de décorations de l'Ordre de Léopold, sans que l'on puisse augmenter ce chiffre par des imputations sur d'autres articles : fr. 8,000. »
- Adopté.
« Art. 7. Missions en Allemagne : fr. 101,000. »
M. Magherman. - Messieurs, quoique notre diplomatie ne soit pas aussi richement dotée que celle d'autres puissances ; eu égard à notre importance territoriale et à nos ressources financières, elle nous coûte assez cher pour que nous puissions nous attendre à ce qu'elle nous rende tous les services possibles. Elle ne doit donc point borner sa mission à nouer des relations avec les puissances étrangères et à entretenir ces relations sur un pied amical, mais encore se rendre utile aux Belges qui se trouvent à l'étranger, soit pour leur agrément, soit pour leurs affaires.
J'aime à rendre cette justice à notre diplomatie, qu'en général elle se prête volontiers aux services qu'on demande d'elle. Cependant cette règle n'est pas sans exception. Dans une circonstance récente, beaucoup de Belges qui voyageaient dans un pays voisin, n'étaient pas accueillis à notre légation avec les égards auxquels avaient droit nos concitoyens. Alors qu'il était possible de leur accorder immédiatement satisfaction, on leur imposait des courses inutiles, on leur faisait perdre un temps précieux. Cela est excessivement désagréable, même quand on voyage pour son agrément. Je dois ajouter que les Belges ne trouvaient pas même, dans l'hôtel de la légation, à qui s'adresser en leur langue nationale. Cependant quand des Belges ont reçus à une légation de leur pays, ils ont le droit de se croire dans leur pays même et n'ont pas besoin de se faire accompagner d'un interprète.
J'appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur cet objet, et j'espère que ces abus ne se renouvelleront plus.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, je suis très étonné des plaintes qui viennent d'être articulées dans cette enceinte. Je dois déclarer que j'ai toujours entendu, au contraire, que tous les voyageurs belges se louaient extrêmement de l'empressement qu'ils trouvaient auprès de nos agents diplomatiques à leur rendre les services qui étaient en leur pouvoir. Si l'honorable M. Magherman a. à se plaindre d'un fait spécial, je serais bien aise qu'il voulût me le signaler en particulier, et je puis lui assurer que la plainte qu'il a formulée ne se renouvellera plus.
M. Magherman. - Je fais observer que ce dont on se plaint est assez général et que j'ai entendu beaucoup de personnes articuler ce grief. Au reste, j'aurai l'honneur de donner confidentiellement des renseignements à M. le ministre des affaires étrangères.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - L'honoraleo préopinanl n'a parlé que d'une seule légation.
M. Magherman. - Je le répèle, les plaintes sont générales, en es sens qu'elles ont été articulées par beaucoup de nos compatriotes, mais elles ne concernent qu'une seule légation.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - J'attendrai les renseignements confidentiels que m'annonce l'honorable M. Mannesman.
- L'article 7 est mis aux voix et adopté.
« Art. 8. France: fr. 45,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Grande-Bretagne : fr. 62,000. »
- Adopté.
« Art. 10. Italie : fr. 37,000 »
- Adopté.
« Art. 11. Pays-Bas : fr. 39,000. »
- Adopté.
(page 1427) « Art. 12. Russie : fr. 62,000. »
- Adopté.
« Art. 13. Brésil : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Danemark, Suède et Hambourg : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 15. Espagne : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 16. Etats-Unis : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 17. Portugal : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 18. Turquie : fr. 27,000. »
- Adopté.
« Art. 19. Indemnités à quelques secrétaires et attachés de légalions (charge extraordinaire) : fr. 12,000. »
- Adopté.
« Art. 20. Traitements des agents consulaires et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 82,600. »
M. Osy. - Messieurs, hier dans la discussion générale l'honorable M. de Muelenacre a attiré l'attention du gouvernement sur le consulat qu'il désirait voir établir, entre autres, à Alexandrie. M. le ministre des affaires étrangères a répondu qu'à Alexandrie nous n'avions plus de consul rétribué, que le consul que nous y avions n'avait qu'un titre honorifique. Je connais beaucoup ce consul. Je profite de cette occasion pour rendre ici publiquement justice à ce fonctionnaire ; je crois que si on eût eu à Alexandrie un consul rétribué comme anciennement, il lui eût été difficile de rendre plus de services à la Belgique et de lui être plus dévoué ; il en a déjà rendu comme consul non rétribué. Il aurait pu procurer encore plus d'affaires à la Belgique, si, par un malheureux événement, les Flandres n'avaient pas éle privées de la commande de toutes les tentes de l'armée égyptienne.
Voici ce qui est arrivé. Il y a quelques années notre consul, désirant procurer à la Belgique un gran débouché pour ses toiles, envoya à M. le ministre des affaires étrangères le modèle des tentes de l'armée égyptienne. Malheureusement, l'on envoya ce modèle en Flandre, où l'on dit qu'il était impossible d'exécuter cette commande parce qu'il faudrait changer les métiers. C'est ainsi que cette commande nous a échappé.
Je le regrette d'autant plus que l'honorable négociant qui est consul non rétribué à Anvers est plein de zèle pour la Belgique. Je suis persuadé qu'il procurera encore des affaires aux Flandres ; déjà il a procuré au pays des commandes d'affûts de canons et autres armes, qui précédemment allaient en Angleterre.
J'ai profité de cette occasion pour rendre hommage au zèle de ce consul et aux services qu'il rend au pays.
J'ai vu, dans les états déposés sur le bureau, que nous avions dans l'Amérique du Sud un consul au traitement de 12,000 francs qui, en 1852, a touché 28,500 francs pour indemnité de déplacement et frais de voyage.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Il est rappelé.
M. Osy. - Je sais que ce n'est pas le fait de l'administration actuelle. J'espère que ce fait ne se renouvellera pas. Quand on fixe un traitement à 12,000 francs, il ne faut pas prétexter des voyages pour que ce traitement s'élève de 12àa 40 mille francs.
M. Delehaye. - Messieurs, ma santé ne me permet pas d'entrer dans de longs développements au sujet de l’établissement de consulats.
J'envisage l'organisation de bons consulats comme étant la mesure la plus utile, la plus favorable pour l'exportation de nos produits.
Je persiste à croire que nos affaires ne seront bien ménagées que par des consuls rétribués.
Je rappellerai ici l'observation que j'ai faite, lors de la discussion du budget de 1853, au sujet de la nomination u'un agent consulaire à Beyrout, sur la côte de Syrie.
Voici les avantages que présente cette localité, avantages qui sont signalés par un homme qui a longtemps habile ces contrées.
Il est facile de concevoir que les pays qui possèdent un littoral étendu et garni de plusieurs ports sont les plus favorables à la formation d'établissements commerciaux et doivent être choisis de préférence par les nations qui, comme nous, désirent exporter leurs productions. C'est toujours dans les ports que se forment les premiers établissements d'outre-mer. Le pays qui possède le plus de ports, avec parité dans ses autres avantages commerciaux, est celui qui nous présentera le plus de chances de la rapide érection du plus grand nombre d'établissements. En effet, ces établissements peuvent s'échelonner à l’aise le long d'une côte étendue, sans se nuire par un rapprochement qui engendre la concurrence et la défaveur dans les prix de trente.
L'écoulement des marchandises vers l'intérieur se fait par un plus grand nombre de voies : les relations avec l'intérieur sont plus multipliées ; une distribution plus prompte et plus uniforme s'étend également sur tout le pays et se présente sur tous les points à la consommation. Ce sont entre autres ces considérations qui m'ont fait émettre la proposition d'établir un consulat en Syrie.
Ce pays nous présente une longue suite de ports ou, plus exactement, de rades ou de baies, commandées par des villes qui jouissent d'une importance commerciale. J'ai dit que Beyrout était le meilleur ancrage et le plus éminent par ses relations avec Damas ; mais dans un parcours de cette côte, en commençant à sa limite septentrionale, nous trouvons les ancrages d'Alexandrette et de Lalakié, ports et entrepôts de la province d'Alep.
Nonobstant le fond rocheux de la baie de Tripoli qui coupe, dit-on, les câbles des ancres, les navires de plusieurs nations abordent à ce chef-lieu encore florissant. Le port de Séïda possède un vaste et solide entrepôt, bâti à grands frais par la France, qui n'en refuse pas l'accès à ses alliés. Sour ou Tyr, uni au continent par la digue d'Alexandre (le Grand, le Macédonien), qui s'est accrue et consolidée, présente un double ancrage. La rade de Caïffa, au Mont-Carmel ou de St-Jean-d'Acre, voit se balancer les navires qui approvisionnent ce chef-lieu d'une grande province, et Jaffa voit encore aborder les pèlerins qui se rendent aux Lieux saints.
J'estime donc que la Syrie nous présente de nombreuses chances de succès et une grande facilité de relations à la faveur de nos traités de commerce existants (traité du 3 août 1838 ; convention de commerce et de navigation du 30 avril 1840), et d'un tarif de douane modéré.
L'exportation vers ce pays n'intéresse pas l'industrie d'une seule de nos provinces, mais de toutes, par la multiplicité des productions que nous pourrions y placer.
Je ne veux pas répondre à l'étrange observation que vient de faire M. Osy au sujet de l'infériorité de notre industrie qui se refuserait de fabriquer ce que l'on demmde. L'industrie fabriquera toujours tout ce qui est productif.
M. Manilius. - J'avais demandé la parole, ignorant que l'honorable M. Delehaye était inscrit, et c'était surtout pour répondre à l'assertion de l'honorable M. Osy, qui vous a signalé cette circonstance pénible que des ordres nous auraient été envoyés d'Egypte pour des espèces de toiles que les industriels des Flandres se sont refusés de confectionner sous prétexte que les métiers auraient dû être changes.
Je ne veux pas laisser passer cette assertion sans répondre quelques mois.
Il est très regrettable qu'une pareille opinion ait été émise à cette tribune. Je dirai à l'honorable M. Osy que ceux qui ont été chargés de faire de pareilles commandes ne se sont pas donné les peines que l'on prend en pareille circonstance. Quand on a des ordres à donner on ne s'arrête pas à un seul industriel ; on s'adresse à plusieurs et l'on est certain d'en trouver qui sont prêts à exécuter les commaneics.
Il arrive souvent qu'on s'adresse à Anvers pour obtenir des renseignements sur tel ou tel objet. On ne réussit pas dans une première demande ; on en fait une seconde et l'on est plus heureux. Eh bien, si ceux qui étaient chargés de faire des commandes pour la confection des tentes égyptiennes s'étaient adressés à des industriels plus actifs, je suis certain qu'ils auraient réussi.
J'ai cru devoir répondre à cette espèce de reproche de nonchalance, de laisser aller, lancé contre les industriels flamands, d'une manière peu précise et, à mes yeux, douteuse.
M. Osy. - Je suis loin d'accuser les industriels de nonchalance. L'honorable M. Manilius me permettra de compléter ce que j'ai dit.
Notre consul d'Alexandrie avait envoyé à M. le ministre des affaires étrangères (le fait remonte à sept ou huit ans) les modèles de tentes pour l'armée égyptienne. M. le ministre des affaires étrangères a envoyé ces modèles à une commission pour l'industrie linière qui existait alors, et c'est le président de cette commission qui a répondu à M. le ministre que la Belgique ne pouvait confectionner ces sortes de toiles, parce qu'il faudrait changer les métiers. Le Pacha n'a donc pu donner de commandes à notre consul, comme il l'aurait désiré, et il s'est adressé ailleurs.
Voilà le fait tel qu'il s'est passé. Ce n'est donc pas à des industriels qu'on s'est adressé ; c'est au comité pour l'industrie linière, et c'est le président de ce comité qui a fait la réponse que j'ai fait connaître.
M. Rodenbach. - Je regrette qu'on ait fait connaître en Egypte et ailleurs qu'on ne sait pas tisser en Belgique des toiles d'une grande largeur. J'ai pris moi-même des informations, et je puis assurer que jamais on ne s'est adressé à l'atelier modèle de Roulers. Or, cet atelier, qui est protégé par le gouvernement, fait des toiles de toute largeur. C est à Roulers que l'industrie mécanique a d'abord été établie en Belgique, et toutes les commandes qui lui ont été faites ont été exécutées.
C’est donc probablement dans les bureaux qu'on aura supposé, comme on le suppose souvent encore, que les Flandres ne font aucun progrès en industrie.
Je puis donner l'assurance que si des commandes directes avaient été faites à nos industriels, elles auraient été exécutées. Cela doit peiner d'apprendre qu'on nous ait fait des commandes et qu'il n'y ait pas été satifait, d'autant plus qu'à cette époque l'industrie linière était en grande souffrance.
(page 1428) M. Manilius. - Je suis charmé que l'honorable M. Osy ait bien voulu compléter le fait qu'il avait signalé. Il vous a dit que ce fait date de 6 à 7 ans. Il a ajouté qu'on s'est adressé à cette époque à une société linière qui existait alors.
Eh bien, il n'est pas étonnant que les étrangers qui se sont adressés à cette société aient été éconduits. Il est de fait et constaté que ceux qui ont donné des ordres ne se sont pas adressés à des industriels, mais à des théoriciens qui s’occupent de choses qu’ils ne pratiquent pas. Si on avait fait la commande à des industriels, ils auraient profité de l’occasion de faire des affaires ; mais il se sont adressés à une société linière instituée pour entretenir l’ancien système de filage à la main. Je ne veux pas revenir là-dessus, je me bornerai à dire que le reproche qu’on a adressé aux industriels des Flandres vient de ce qu’on s’est adressé à une mauvaise enseigne et pas à la bonne.
M. Desmaisières. - J'ai eu l'honneur de présider une commission linière ; je ne sais pas si c'est à celle-là que l'honorable M. Osy fait allusion. J’ai été, pendant quelques années, président du comité directeur d’une société linière instituée non, comme l’a dit erronément l’honorable M. Manilius, pour maintenir l’ancien système de fabrication, mais pour faire faire des progrès aux travailleurs de l’industrie linière, et nous leur en avons fait faire de très grands sous divers rapports. L’honorable M. de Haerne était aussi membre de ce comité ; il confirmera ce que je dis.
Je déclare que pendant tout le temps que j'ai présidé ce comité, aucune communication, aucune commande de la nature de celle dont a parlé l'honorable M. Osy, ne nous a été adressée.
- M. de Haerne fait un signe d'adhésion.
M. Veydt. — Messieurs, j'ai demandé la parole pour une simple observation, pour une régularisation, en quelqne sorte.
Une loi du mois de mars 1848 a autorisé le gouvernement à régler par arrêtés royaux les droits que nos consuls peuvent percevoir.
L'article 2 de cette loi slatue que ces arrêtés seront soumis à l'approbation des chambres. Je crois que cette disposition n'a pas encore été exécutée. S'il en est ainsi, j'appellerai l'attention de l'honorable ministre des affaires étrangères sur ce point.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Je donnerai suite à l'observation de l'honorable M. Veydt.
Je ne répondrai qu'un mot aux honorables membres qui ont pris la parole avant lui ; mon département s'occupe sans relâche du soin de compléter l'organisation consulaire ; j'ai lieu de penser que le gouvernement pourra incessamment instituer quelques nouveaux agents consulaires qui seront d'une grande utilité pour le commerce. Quant à l'agent consulaire de l'Amérique méridionale dont a parle l'honorable M. Osy, il est rappelé.
- L'article 20 est mis aux voix et adopté.
« Art. 21. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale ; frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »
- Adopté.
« Art. 22. Indemnités pour un dogman, six cavasses employés dans diverses résidences en Orient, et pour un capou-oglan : fr. 6,030. »
- Adopté.
« Art. 23. Frais divers : fr. 73,970. »
- Adopté.
« Art. 24. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité (charge extraordinaire) : fr. 36,000. »
- Adopté.
« Art. 25. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 26. Ecoles de navigation. Personnel : fr. 15,920. »
- Adopté.
« Art. 27. Ecole de navigation. Frais divers : fr. 7,280 »
- Adopté.
« Art. 28. Chambres de commerce : fr. 12,000. »
- Adopté.
« Art. 29. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 15,700. »
- Adopté.
« Art. 30. Encouragements pour la navigation entre les ports belges et étrangers, sans que, dans l'un ou l'autre cas, les engagements puissent obliger l'Etat au-delà du crédit alloué pour l'exercice 1854, et sans que les crédits puissent excéder 40,000 fr. par service, sauf pour le service au-delà du cap Horn. Personnel : fr. 1,050. »
- Adopté.
« Art. 31. ldem. Frais divers : fr. 113,350. »
- Adopté.
« Art. 32. Pêche maritime. Personnel : fr. 7,950. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, j'ai remis à l'honorable M. Sinave les renseignements qu'il m'avait demandés quant aux primes pour la pêche.
M. Sinave. - En effet, messieurs, j'avais demandé hier la répartition des primes pour la pèche nationale. J'ai examiné ce document, mais je crois que ce n'est pas à la chambre d'intervenir dans cette répartition. J’espère que M. le ministre voudra bien me recevoir dans son cabinet ; je lui proposerai une répartition plus équitable.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Avec le plus grand plaisir.
- L'article est adopté.
« Art. 33. Pêche maritime. Primes : fr. 92,500. »
- Adopté.
« Art. 34. Coutume à Lamina, chef des Nalous, pour l'exercice 1853 : fr. 5,000. »
- Adopté.
« Art. 35. Pilotage. Personnel : fr. 168,450. »
M. Osy. - Messieurs, la cour des comptes a demandé dans son cahier d'observations, que nous eussions un tarif plus réduit et en proportion avec la facilite actuelle des moyens de transport. J'engage également M. le ministre à examiner cette affaire. Remarquez, messieurs,que d'Anvers à Flessingue les voyages se font par les navires du gouvernement ; indépendamment de cela, on accorde des frais de route : c'est payer deux fois.
J'engage M. le ministre à faire faire un nouveau tarif et à réduire les frais de route et de séjour dans des proportions convenables.
- L'article est adopté.
« Art. 36. Pilotage. Remises à payer aux pilotes et autres dépenses relatives au pilotage (crédit non limitatif) : fr. 200,610. »
- Adopté.
« Art. 37. Passages d'eau. Personnel : fr. 11,850. »
- Adopté.
« Art. 38. Police maritime. Personnel : fr. 26,400. »
La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose de réduire ce crédit à 25,400 fr.
- Ce crédit est adopté.
« Art. 39. Police maritime. Primes d'arrestation aux agents et vacations aux experts et agents chargés de la surveillance de l'embarquement des émigrants (crédit non limitatif) : fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 40. Sauvetage. Personnel : fr. 14,300. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Je déclare à la chambre que j'ai déjà donné des ordres pour que des améliorations très notables soient apportées au service du sauvetage ; elles le seront incessamment.
- L'article 40 est adopté.
« Art. 41.Paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres. Traitements des courriers et agents : fr. 14,350. »
M. Sinave. - Messieurs, lors de la discussion du budget des affaires étrangères de 1853, le rapport de la section centrale contenait certaines insinuations tendant à faire éclore un service de bateaux à vapeur, une exploitation par l'Etat, d'une certaine étendue. J'en fis l'observation et l'honorable rapporteur d'alors me dit que je me trompais (page 1429) sur le sens des propositions de la seection centrale, qu'il n'était nullement question de donner la moindre extension à la construction des bateaux à vapeur à charge de l'Etat, que cette extension se trouvait uniquement dans mon imagination. Ce sont ses expressions. Dans le rapport de la section centrale sur le budget des affaires étrangères de 1854, dont la chambre se rappelle les expressions, on voit, messieurs, que je ne me suis nullement trompé dans mes prévisions, que ce que j'avais dans mon imagination, d'après l'honorable rapporteur, est une réalité.
J'ai cru jusqu'à présent qu'il n'y avait rien de sérieux dans ces insinuations du rapport de la section centrale, mais l'honorable ministre des affaires étrangères a immédiatement pris la parole et a dit à la chambre : Accordez-moi 50,000 fr., je vous ferai construire un joli petit bateau, ayant une légère consommation de charbon, et qui pourra, à peu de frais, faire le trajet entre Anvers et Tamise. Enfin, messieurs, le tout est couleur de rose ; mais dans mon opinion les roses auront des épines, car avec 50,000 fr. vous ne faites rien, et, d'après la déclaration de la section centrale, le service ne produit que 19,000 fr., c'est à-dire à peine la somme nécessaire pour payer le charhon.
M. le président. - M. Sinave, il ne s'agit en ce moment que du service de bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres. Veuillez-vous renfermer dans cette question.
M. Sinave. - Puisqu'il y a bateaux et bateaux, j'en viens aux bateaux à vapeur d'Ostende à Douvres. J'ai eu l'honneur de demander à M. le ministre des affaires étrangères un état général des recettes pour les années 1851 et 1852.
J'ai dit, il y a trois mois, que ce service était impossible ; que, depuis l'établissement d'une communication directe (deux fois par jour) de Bruxelles par Calais, il n'y avait pas moyen de maintenir la concurrence par Ostende ; que cette concurrence devait être fatale à nos recettes ; je n'avais alors aucune note officielle ; eh bien, pour 1851, il y a un déficit de 80,000 fr. Pour nos bateaux à vapeur, tout est perte, avec la concurrence établie, il est impossible d'obtenir un résultat favorable.
Il y a trois mois, j'ai émis l'idée qu'il y avait lieu de livrer cette exploitation à l'industrie privée. Je sais qu'on a déjà fait des démarches dans ce sens ; mais ces démarches pouvaient-elles pas aboutir, alors qu'on proposait à des compagnies de reprendre nos mauvais bateaux ? (interruption.)
Oui, ce sont de très mauvais bateaux, rapiécés, allongés, qui ne nous en ont pas moins coûté des sommes considérables. Et, je le répète, si vous voulez endosser ces bateaux à des compagnies, vous ne trouverez personne.
A défaut de compagnies qui ne se présenteront pas avec cette condition, on pourrait proposer au gouvernement angfais de faire le service. Il y a 4 ou 5 ans, ce gouvernement s'est offert à se charger de tout le service, moyennant 50,000 francs pour le transport de nos lettres ; mais on n'a pas donné suite à cette proposition.
Si vous continuez le service, vous pouvez compter annuellement sur un déficit de 400,000 fr., et comme ce déficit a déjà eu lieu depuis nombre d'années, vous avez déjà de ce chef perdu des millions.
Voici donc la proposition que je crois devoir présenter ; je prie le gouvernement de faire des démarches pour céder l'exploitation des bateaux à vapeur à une compagnie privée ; et si cela n'est pas possible, d'abandonner le service au gouvernement anglais qui fait déjà le service 3 ou 4 fois par semaine.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, l'honorable préopinant désirerait que le service des bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres fût abandonné à l'industrie privée ; mais il sait parfaitement, et il vous l'a dit lui-même, que des démarches ont été faites pour arriver à ce résultat, et qu'elles n'ont pas abouti. Je m'engage volontiers à en faire de nouvelles. Mais il faut avouer que l'honorable preopinant s'y prend singulièrement, pour me venir en aide dans les efforts que je me propose de faire, car il commence par déprécier nos bateaux à vapeur....
M. Sinave. - C'est connu.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - J'ajoute qu'il les déprécie très injustement : ces bateaux sont excellents. L'honorable preopinant leur reproche d'avoir été allongés ; c'est précisément parce qu'ils ont été allongés qu'ils sont très bons et qu'ils font parfaitement le service.
En ce qui concerne la seconde partie de la proposition de l'honorable M. Sinave, c'est-à-dire, en ce qui regarde la vente de nos bateaux, afin de nous mettre entièrement à la disposition d'un gouvernement étranger, je déclare que je m'y oppose de la manière la plus formelle.
MM. Van Iseghem. - Je voulais présenter des observations dans le sens de celles qui viennent d'être faites par M. le ministre des affaires étrangères. Je voulais assurer à la chambre que les reproches articulés par l'honorable M. Sinave contre nos bateaux ne sont pas fondés. Ces bateaux, au contraire, depuis qu'ils ont été allongés, sont excellents, font un service très régulier et font l'admiration de tous les connaisseurs.
Pour ce qui regarde l'opinion de l'honorable M. Sinave, d'abandonner entièrement ce service, cela est impossible ; jamais le commerce et l'industrie ne pourront consentir à ce que nous livrions le transport de notre correspondance entre les mains d'un pays voisin ; il y aurait une grande imprudence pour la Belgique d'envoyer ses lettres par Calais.
Pour ce qui regarde le gouvernement anglais, il envoyait il y a 8 ans à Ostende quatre bateaux par semaine, pour lesquels la Belgique payait une indemnité de 50.000 fr. par an. La Belgique voulait alors avoir une correspondance journalière et a fait des propositions à l'Angleterre, qui a déclaré ne pouvoir admettre de semblables propositions, et c'est justement à cette époque que notre gouvernement a été forcé d'organiser aussi un service, d'acheter des bateaux, et les deux sevices se font maintenant tout à fait d’accord et d’une manière très régulière.
M. Rodenbach. - Messieurs, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt M. le ministre des affaires étrangères et l'honorable député d'Ostende. Mais malgré leur assertion, il n'en est pas moins vrai que ce service de bateaux à vapeur nous coûte environ 400,000 fr. par an. Ce sacrifice considérable, nous nous l'imposons, pour avoir un voyage par jour au lieu d’en avoir quatre par semaine. Ce voyage par jour sert à transporter quelques lettres ; il faut avouer que cet avantage ne compense nullement le pris considérable auquel nous l'achetons. Je veux bien q,ue le gouvernement fasse quelques sacrifices, mais 400,000 fr., uniquement dans le but d'avoir un voyage par jour pour le transport des dépêches, c'est évidemment trop.
Je préférerais qu'on fît seulement trois ou quatre voyages par semaine, au lieu d'expédier des lettres et des voyageurs tous les jours. Cela coûte trop cher ; notre commerce avec ce pays-là n’est pas assez important pour que nous affections une somme aussi considérable à ce service.
M. Sinave. - M. le ministre et M. le rapporteur viennent de déclarer que les bateaux dont j'ai parlé sont excellents. Je ne ferai qu'une seule comparaison pour leur répondre : un vieil habit rapiécé vaut-il autant qu'un habit neuf ? Ce sont là des assertions qui ne tiennent pas. Un bâtiment construit d'après les proportions voulues a sa longueur en rapport avec sa largeur et sa profondeur ; si vous l'allongez, vous le disproportionnez.
Je ne disconviens pas qu'il peut acquérir un peu plus de marche, mais il n'obéit plus au mouvement du gouvernail, il entre difficilement dans les ports ; dernièrement l'on a donné en plein dans l'estacade au risque de faire périr les passagers ; un bâtiment allongé ne manœuvre plus comme un bâtiment construit de premier jet ; personne ne prétendra le contraire.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Les chiffres fournis par l'honorable M. Rodenbach sont complètement inexacts. Je fais un appel à l'honorable rapporteur de la section centrale qui voudra bien s'en expliquer.
M. Van Iseghem, rapporteur. - Pour prouver à l'honorable M. Sinave que les bateaux sur Douvres ne font pas perdre au trésor annuellement 400,000 à 500,000 fr., pour lui démonfrer que les lettres ne coûtent pas 5 fr. de transport, je lui ferai le compte de l'exploitation tant en recettes directes qu'indirectes.
Le transit des lettres peut être évalué à 200,00 fr.
Le transport des voyageurs par les bateaux varie entre 200,000 et 110,000 fr. ; je prends pour moyenne, 150,000 fr.
Tous les voyageurs doivent prendre le chemin de fer de l'Etat, ce qui peut être évalué à au moins 150 mille francs et beaucoup plus, si on veut tenir compte des voyageurs qui arrivent par les bateaux du gouvernement anglais : prenons le minimum, 150,000 fr.
Les officiers qui sont à bord de nos navires appartiennent à la marine royale, ils auraient droit aux deux tiers de leur solde de disponibilité qui peut se monter à environ 20,000 fr.
Avant l’établissement du service belge notre gouvernement payait à l'Angleterre, 50,000 fr.
Au total, 570,000 fr.
Les dépenses s'élèvent à :
Traitement du personnel attaché à l'exploitation, 82,256 fr.
Vivres aux équipages, 21,170 fr.
Matériel, charbon, huile, entretien ordinaire et extraordinaire, 160,800 fr.
Frais d'agence, 14,350 fr.
Au total, 274,556 fr.
Qu'on ajoute encore 5 p. c. intérêt du capital, 50,000 fr., soit 328,556 fr.,
Il reste encore un bénéfice d'environ 240,000 fr., ce qui est loin d'une perte.
Je ne connais pas le nombre des lettres qu'on transporte, mais je ne serais pas étonné que le nombre allât à 400,000 par an, sans compter les journaux. Je laisse la chambre juge de l'exagération du prix de 5 fr., que l'honorable député de Bruges a indiqué.
L'honorable membre a parié aussi d'un accident qui est arrivé dernièrement à l'un de nos bateaux à l'entrée du port ; des accidents pareils peuvent arriver à tout navire, même aux meilleurs qui existent. Ce sont des cas qui se présentent souvent en mer, et cela n'a rien d'étonnant, quand on est exposé au mauvais temps et à tous les dangers que présentee en général la navigation. Uni seule vague peut jeter le navire de travers et le faire échouer.
(page 1430) L'honorable député de Bruges peut être tranquille ; nos bateaux ne sont pas de vieiles carcasses, ce sont d'excellents navires ; j'ai été moi-même par ces bateaux en Angleterre et je n'ai eu qu'à me louer des voyages. Ces navires se conduisent admirablement.
L'honorable membre a-t-il oublié qu'en pleine mer souvent des navires essuient des avaries et se perdent ?
Pour donner ce service à l'industrie privée, il y a deux ans le gouvernement a fait un appel sans résultat ; les conditions étaient trop onéreuses, et le subside demandé, si mes renseignements sont exacts, trop élevé.
M. Sinave. - Je ne ferai qu'une seule observation : voici les chiffres officiels qui ont été déposés sur le bureau par M. le ministre des affaires étrangères ; ce chiffre est de 119 mille francs.
M. Van Iseghem. - Pour les voyageurs.
M. Sinave. - Il est difficile d'établir que le chemin de fer retire une augmentation de produits des bateaux à vapeur ; car la recette que vous etrez dans la direction de Mons ou de Mouscron compensera ce que vous n'aurez pas par Ostende ; ce que vous aurez en moins d'un côté, vous l'aurez en plus de l'autre.
On ne peut pas faire entrer cela en ligne de compte. Puisqu'on conteste les chiffres officiels donnés par le ministre, je demande que M. le ministre veuille bien instruire la chambre de la situation exacte des choses, si ce n'est pas dans cette session qui tire à sa fin, ce sera pour la prochaine. Les choses ont marché comme cela jusqu'ici, elles pourront bien continuer encore. Quant à mes calculs, je les tiens pour exacts, la dépense est de plus de 400 mille francs. Il faut considérer les dépenses faites annuellement aux bateaux.
Il ne suffit pas de dire que vous portez au compte de la marine 40 mille francs. Combien avez vous dépensé il y a deux ans ? 80 mille francs. Je ne veux pas abuser de vos moments. Puisqu'il y a divergence d'opinion sur les appréciations des dépenses, il faut attendre les détails officiels ; nous pourrons les avoir pour la session prochaine.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Les chiffres que j'ai remis à M. Sinave sont exacts ; ce sont ceux qu'il m'a demandés ; mais ils ne représentent pas toutes les recettes ; car il y a les recettes directes et les recettes indirectes. Les chiffres que j'ai donnés représentent les recettes directes seulement, c'est-à-dire les sommes perçues au bureau des bateaux à vapeur. Comme il n'insiste pas pour avoir aujourd'hui de plus amples détails, avec le budget prochain, je m'engage à présenter un tableau résumant toutes les dépenses et toutes les recettes directes et indirectes des bateaux à vapeur.
- La discussion est close.
L'article 41 est mis aux voix et adopté.
« Art. 42. Bâtiments de l'Etat. Personnel : fr. 235,831 67. »
- Adopté.
« Art. 43. Bâtiments de l'Etat. Vivres : fr. 88.600. »
M. le président. - Ici vient une proposition de la section centrale.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - La proposition, je pense, a été retirée par suite de la déclaration que j'ai faite.
M. Van Iseghem, rapporteur. - Par suite de la déclaration de M. le ministre que les officiers renonçaient aux vivres, la proposition de la section centrale est retirée.
- L'article 43 est mis aux voix et adopté.
« Art. 44. Premier terme des pensions à accorder : fr. 1,500. »
- Adopté.
« Art. 45. Secours aux marins blessés, veuves et médicaments : fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 46. Dotation à la caisse de prévoyance : fr. 10,000. »
- Adopté.
« Art. 47. Magasin : fr. 2,000. »
- Adopté.
« Art. 48. Matériel des divers services : fr. 349,500. »
- Adopté.
« Art. 49. Personnel : fr. 3,000. »
- Adopté.
M. le président. - Ici vient un article 49 nouveau propeso par MM. Van Overloop, Janssens, T'Serclaes, Veydt, Hyacinthe de Baillet, de Perceval, Osy, Landeloos, de Decker, Rogier, de Brouwer et Vermeire.
Il est ainsi conçu :
« Constructiin d'un troisième bateau à vapeur destiné au service du bas Escaut et de la Durme : fr. 50,000 fr. »
- Cet amendement est signé par MM. Van Overloop, de T'Serclaes, Janssens, de Perceval, Osy, Veydt, Loos, de Decker, Hyac. de Baillet, Rogier, Vermeire et de Brouwer de Hogendorp.
M. Van Overloop. - Après ce qu'ont dit hier les honorables MM. Osy et Vermeire et l'honorable ministre des affaires étrangères, il me suffira d'ajouter quelques mots.
La section centrale, les auteurs de l'amendement, l'honorable ministre des affaires étrangères, tout le monde est d'accord qu'il conviendrait d'abandonner le service des bateaux à vapeur dans l'Escaut à l'industrie particulière. Mais comme il se peut que des particuliers ne se présentent pas dans un délai assez rapproché, il faut bien qu'on utilise le service actuellement existant. Cela est si vrai (c'est une objection que je fais d'avance à mon honorable ami M. Julliot) que vous venez de voter les chapitres du personnel et du matériel de ce service.
Quel est actuellement l'état des choses ? Le service se fait de la manière la plus irrégulière. Cette irrégularité est telle, qu'entre Anvers et Tamise, le chômage dure presque 5 ou 6 mois par an. Quelle en est la cause ? Nous voyons, dans le rapport de la section centrale, que c'est l'insuffisance du matériel. Que faut-il pour rendre le service régulier ? Un troisième bateau ; il est indispensable. Nous avons reçu une masse de pétitions qui établissent qu'il est impossible d'établir un service régulier sans un troisième bateau.
L'honorable ministre des finances a déclaré, dans une précédente séance, qu'il s'opposerait énergiquement à toute dépense qui ne serait pas évidemment productive ; celle que nous proposons est si évidemment productive que le gouvernement, M. le ministre des finances présent, se joint à nous.
En effet, le service de Tamise produit par an plus de 19,000 francs, comme le constate le rapport de la section centrale, et cependant le bateau chôme 5 à 6 mois ! On pourrait donc évaluer les produits de ce service au double si le bateau marchait régulièrement. Que résulterait-il de la marche régulière du bateau ?
La navigation, au lieu d'occasionner des pertes, produirait des bénéfices.
Je croirais abuser des moments de la chambre si j'insistais davantage. Je le répète, la section centrale, le gouvernement, les auteurs de l'amendement, tout le monde est d'accord.
M. Sinave. - Je ne sais pas comment cela s'est fait. J'ai laissé passer l'article 37 qui concerne le passage d'eau sur l'Escaut. Maintenant nous avons un nouvel amendement, à propos duquel je vais continuer de présenter mes observations.
M. le ministre des affaires étrangères, intervenant dans la discussion, a déclaré qu'il avait un troisième bateau, fait sur d'autres dimensions, également construit par l'Etat qui a coûté 150,000 francs, et que le gouvernement lui-même avoue être mal construit puisqu'on voit qu'il en faut un autre. Voilà encore un fait avoué.
Maintenant que veut-on ? On veut établir un service régulier entre Anvers, Tamise et St-Amand, au moyen de la construction et de l’exploitation par l'Etat d'un autre bateau à vapeur. Mais ce service ne regarde pas l'Etat. L'obligation de l'Etat, c'est d'assurer le passage d'eau sur le fleuve entre Anvers et la Tête-de-Flandre.
Aucune extension de cette obligation n'est admissible. Si nous entrons dans cette voie d'entretenir pour la navigation entre Anvers, Tamise et St-Amand un bateau à vapeur aux frais de l'Etat, Liège et Namur demanderont la même chose. Nous qui allons par le chemin de fer prendre les bains à Ostende, nous vous demanderons un petit yacht pour aller prendre les bains tout à notre aise. Tout le monde demandera l'organisation de services aux frais de l'Etat.
Voyez l'article 47 du budget en discussion. Vous y trouvez les frais du magasin aux vivres pour les hommes de l'équipage. Ce sont des frais sans fin, tandis qu'une compagnie particulière n'aurait que quelques modestes traitements à payer à des employés.
Réellement, la demande n'est pas sérieuse. Si elle est sérieuse, nous en demandons tous autant. C'est évident.
Cette proposition est un petit ballon d'essai. Vous savez que lorsqu'il doit y avoir une ascension d'aérostat, on commence par lancer un petit ballon pour voir la direction du vent. C'est ce que l'on fait aujourd'hui. Au moyen de la proposition en discussion, on s'assure que le vent est favorable.
Viennent alors les honorables députes d'Anvers avec leur ballon monstre d'un million (ligne de navigation à vapeur transatlantique). Or, il est impossible en Belgique d'avoir un service de cette nature. Le service de Brème aux Etats-Unis donne des pertes considérables.
M. le président. - Nous n'avons à nous occuper en ce moment que du passage d'eau entre Anvers et Tamise.
M. Sinave. - Pour faire ma démonstration, il faut bien que je cite des exemples. Cette entreprise particulière qui existe entre Brème et l'Amérique du Nord ne donne pas de bénéfice. Nous avons déjà fait un essai qui nous coûte 4 millions. Il est vrai que depuis la chambre a été en partie renouvelée. On espère que les membres nouveaux n'y feront pas attention ; mais ils connaissent les antécédents. J'espère que le gouvernement ne se mêlera plus de ces affaires.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Si fait.
M. Sinave. - On nous a annoncé un service nouveau. C'est impossible !
M. le président. - Ce n'est pas une discussion. Il ne s'agit pas maintenant d'un service transatlantique. Il s'agit d'un amendement (page 1431) tendant à allouer un crédit de 50,000 fr. pour le passage d'eau entre Anvers et Tamise.
M. Sinave. - Hier, M. le président, vous avez prononcé la clôture de la discussion générale, lorsqu'un seul orateur avait répondu au député d'Anvers.
M. le président. - Vous pouviez demander la parole pour répondre à M. Loos dans la discussion générale. Maintenant on ne discute que l'article 49 nouveau.
M. Sinave. - Mais, M. le président, n'est-il pas permis de faire une démonstration et de prouver que ce système d'exploitation par le gouvernement est un système funeste ? Je ne crois pas qu'on puisse passer ces choses sous silence. Il faut déclarer ouvertement ce qui en est.
Si cependant, M. le président, vous m'ôtez la parole...
M. le président. - Je ne vous ôte pas la parole, je vous prie seulement de rester dans l'article en discussion. Vous pouvez sans doute indiquer le rapport qu'il y a entre l'amendement et le subside demandé au gouvernement pour la navigation transatlantique ; mais il ne faut pas aborder la discussion d'une proposition qui n'est pas encore soumise à la chambre.
La parole vous est continuée ; mais je vous prie de ne pas vous écarter de l'article en discussion.
M. Sinave. - Puisqu'il ne m'est pas permis de démontrer combien serait funeste au trésor le système auquel on veut en venir, je me borne à m'opposer à la demande de 50,000 fr. pour un nouveau navire à exploiter aux frais de l'Etat, et j'espère bien que la chambre, à une grande majorité, repoussera une pareille proposition.
M. Julliot. - Messieurs, vous voyez qu'une fois que la porte des bénéfices est ouverte, on trouve toujours quelqu'un pour demander qu'on l'élargisse. Vous le voyez, on ne peut plus présenter un budget sans qu'une foule de réclames l'arrêtent au passage ; ce n'est plus un grand ensemble qu'on réclame, mais on veut se lotir en détail, c'est par portions détachées qu'on procède, et chaque industrie viendra nous faire des phrases économiquement fausses, pour vous démontrer qu'il est de l'intérêt du pays qu'on lui adjuge telle portion, sous telle forme, dont la carte est toujours payée par la terre et par l'agriculture. On nous dit bien que nous y avons le même intérêt que l'industrie, mais ceux mêmes qui le disent savent le contraire, j'ai trop bonne opinion de leur intelligence. Ce qui, du reste, prouve qu'il n'en est rien, c'est que ceux qui se lèvent pour arracher au trésor des subsides et des primes nous trouvent toujours prêts à les combattre, et à arrêter les mains qui se disposent à nous spolier sous le couvert de la loi.
Messieurs, tous nous parlons avec respect de la famille et de la propriété ; je n'hésite pas à dire que, à mon point de vue, les groupes rapaces qui n'ont jamais assez du budget présentent le triste spectacle de l'esprit de famille à l'état d'égoïsme fanatique, guerroyant contre le principe de la propriété dans la personne du contribuable. Ces deux éléments ne devraient jamais se séparer, et cependant c'est ici la famille qui attaque la propriété d'autrui, ce n'est que cela, je l'ai déjà démontré. Car ce sont toujours des groupes qui demandent un privilège qu'où ne donne pas à tous.
Je n'ai pas pu laisser passer inaprçues les réclames qui s'adressent au budget des affaires étrangères sans protester, je le crois d'autant plus que je m'aperçois que l'honorable ministre pousse la conciliation un peu loin quand il se laisse convaincre sur toutes ces nécessités industrielles improvisées.
C'est à titre d'ami politique que je crois devoir venir à son aide, non pas pour faire de la conciliation, mais pour résister au torrent des nouveaux appétits qui se révèlent de tous côtés avec un laisser aller déplorable, je vois des dangers dans ces allures, et je demande au gouvernement où est la démarcation de son point d'arrêt.
Le gouvernement est attaqué de tous les côtés, et personne pour le soutenir.
On a présenté un amendement pour construire un baleau à vapeur de plus, on demande que la navigation gouvernementale sur l'Escaut ne s'arrête plus à Tamise, on veut aussi que la Durme en profite et qu'elle aille jusqu'au pont de Hamme ; ce pont est un obstacle à ce qu'elle aille plus avant, mais l'année prochaine ou modifiera le pont et on sera obligé de le faire pour contenter ceux qui se trouvent en amont ; savez-vous qui a signé cet amendement ?
C'est l'honorable M. Rogier qui a encadré sa signature dans plusieurs signatures les plus conservatrices de la chambre, et cette signature s'y trouve parfaitement à l'aise, cet honorable homme d'Etat adopterait-il aussi la fusion des idées modérées et ferait-il voile sur un bateau de l'Etat vers les régions de la modération, de la prudence et de la conciliation.
Et je ne m'en plaindrais pas.
L'honorable ministre nous dit bien qu'il fera son possible pour passer le service de l'Escaut à l'industrie privée, mais cela ne me suffit pas. car l'honorable M. d'Hoffschmidt avait dit la même chose.
Je dis, moi, que l'Etat ne doit pas plus de service à perte sur l'Escaut au groupe d'Anvers, qu'il n'en doit au groupe de Liège sur la Meuse, au groupe de Gand ni à tout autre.
Le ministre ferait bien de dire à ce groupe privilégié : Prenez vos mesures, mais au 1er janvier 1853 je cesse le service et les bateaux seront vendus ; je ne vous dois rien de plus qu'aux autres. Voilà, à mes yeux, un langage de gouvernement et c'est le seul admissible. Toute autre détermination me paraît moins bonne parce qu'elle fera plus de mécontents que de satisfaits.
D'un autre côté mon honorable et laborieux ami M. Vermeire qui comprend admirablement les questions économiques, quand il est d'humeur à vouloir les comprendre, car c'est le seul côté où je lui trouve l'humeur un peu inégale, vient à la charge pour les primes de construction de navires. Je voudrais en dire quelques mots, mais M. le président est très sévère et je l'approuve.
M. le président. - Le président doit faire exécuter le règlement. Si donc vous sortez de l'article en discussion, je serai obligé de vous en faire l'observation.
M. Julliot. - M. le président, voici mes raisons. J'ai proposé la suppression des primes pour construction de navires. Cette suppression a eu lieu naturellement, car le terme assigné à la loi est arrivé. Aujourd'hui qu'on demande le rétablissement de ces primes et que personne ne combat cette demande...
M. Orts. - On ne combat pas un mort.
M. Julliot. - Plus d'un mort est ressussité, mais si la chambre le décide, je renoncerai à mes observations.
- Plusieurs membres. - Parlez ! parlez !
M. Julliot. - Je voudrais bien en dire quelques mots si la chambre le permet, déjà on nous a fait voter un transfert de prime posthume au profit d'un constructeur de Boom ; je n'ai pu comprendre le but de ce transfert, si ce n'est de nous tenir en haleine pour voter les primes navales, et il paraît que j'avais deviné.
L'honorable député de Termonde est venu nous dire : Nous ne pouvons construire des navires sans primes, l'intérêt de la navigation exige que nous en construsions, donc il faut nous donner des primes ; d'ailleurs la construction dans le pays procure l'occasion au Hainaut et à la province de Liège de fournir les fers nécessaires à cette construction et les fournitures donnent du travail aux ouvriers, « ergo ».
Voilà le raisonnement, toujours le thème ressassé du travail national sans se préoccuper de savoir comment il se produit.
L'honorabie membre se place donc carrément sur le terrain de l'organisation du travail par l'Ettl, car le principe est trop découvert ici pour ne pas être vu de tous.
Que l'Etat donne des primes pour construire des navires ou pour construire des ateliers, quelle différence y voyez vous ? Aucun ; car le navire est un instrument d'échange et l'atelier un instrument de production.
Ce dernier devrait même avoir le pas sur l'autre, car il faut fabriquer pour pouvoir échanger. Mais dans l'un comme dans l'autre cas, c'est l'organisation du travail dans la proportion des sommes que le gouvernement donne en primes.
On me dira :Ce n'est que la restitution des droits que nous payons. Eli bien abolissez les droits sur les matières de construction, mais ne faisons pas de ces complications qui échappent à l'investigation et dont les apparences toujours sont odieuses parce qu'elles revêtent le cachet du privilège.
J'ai démontré dans le temps qu'un sacrifice de 900 mille francs nous avait procuré en plusieurs années deux navires de plus que nous n'en avions lors de l'introduction des primes.
Notre tonnage était proportionnellement un peu plus fort, mais il n'est pas possible de recommencer une tâche pareille pour d'aussi maigres résultats. Qu'on avise à d'autres moyens.
J'espère donc que les primes de navires ne seront pas rétablies, et que le service de l'Escaut sera déclaré abandonné à partir de 1855. Je prierai l'honorable ministre des affaires étrangères de vouloir me dire ce que définitivement il pense sur l'utilité de couper court à la navigation de l’Escaut. Je verrai s'il me reste une proposition à faire.
M. Vermeire. - Messieurs, je ne sais si je dos rencontrer les dissertations économiques auxquelles vient de se livrer mon honorable ami, M. Julliot ; mais je désire répondre quelques mots à ce qu'il vient de dire concernant les primes que j'aurais, de nouveau, réclamées pour la construction des navires. Je lui ferai remarquer que les primes qu'on a payées pour ces constructions ont été couvertes par les droits que, d'autre part, l'Etat a perçus sur la nationalisation des navires étrangers et sur certains objets appréciables qui entrent dans l'équipement et la construction des navires, droits qu'on peut parfaitement établir par des chiffres irrécusables. Je maintiens donc qu'aussi longtemps qu'on n'abolit pas ces droits ou qu'on ne rétablit pas les primes, on se rend coupable d'uue injustice criante ; car ces mesures incomplètes ont eu pour résultat de ruiner une industrie qui était florissante dans le pays.
Deux mots maintenant en ce qui concerne la navigation par bateaux à vapeur sur l'Escaut.
L'honorable M. Sinave croit qu'on aura besoin, pour faire le service, d'un bateau qui coûtera beaucoup plus de 50,000 francs. Il est dans l'erreur la plus complète.
Je me suis assuré du fait et je puis garantir à l'honorable membre que les plans sont faits, que ce marché peut être conclu dés aujourd'hui, à forfait, pour la fourniture d'un pareil bateau très apte à dessertir parfaitement cette navigation.
Messieurs, de quoi s'agit il ? Des populations, privées des avantages des chemins de fer et des autres voies de communication faciles, dont jouit la plus grande partie de la Belgique, se serrent du bateau à (page 1432) vapeur pour se rendre aux divers lieux où leurs affaires les appellent.
Aussi longtemps que la construction du chemin de fer du pays de Waes n'existait pas et que le service était fait régulièrement, il donnait de très belles recettes au trésor. Aujourd'hui, en présence de cette nouvelle concurrence, on veut améliorer le service : on vous dit qu’avec un petit bateau on économisera sur le combustible et sur le personnel : et, qu'en prenant pour point de départ et de retour le pont de Ilamme, on y rencontrera une pratique très considérable, puisque la population de ce bourg et de quelques autres communes très industrielles, s'élève à 40,000 âmes, indépendamment des 70,000 qu'il dessert sur l'Escaut.
Le service qu'on demande de régulariser n'est pas nouveau, il existe depuis longtemps ; d'après nous, il y aurait quelque injustice à priver de cette voie de communication des populations nombreuses privées des chemins de fer, et qui n'ont que ce seul moyen pour se rendre à Anvers, où elles viennent vaquer à leurs affaires, et d'où ensuite elles continuent souvent leur voyage par le chemin de fer de l'Etat. Le service, tel qu'il existe aujourd'hui, se fait dans de mauvaises conditions ; tout ce que nous demandons, c'est qu'il se fasse avec plus de régularité, avec plus d'économie ei de matière à ne pas causer des dépenses au trésor.
M. H. de Baillet. - Il me paraît, messieurs, que la construction de ce troisième bateau est une question de loyauté, que c'est le résultat d'engagements qui ont été pris en 1841.
Lorsque le gouvernement a voulu établir ce service, il a demandé à la province d'Anvers d'y concourir. Le conseil provincial a accordé un subside, et cependant ce service n'a jamais été bien établi. La province a payé la somme qu'on lui a demandée. Il est dès lors juste que, par contre, le service soit fait régulièrement et qu'on ne se borne pas à faire marcher ie bateau cinq ou six mois par année.
M. Rodenbach. - J'ai demandé la parole pour combattre la demande de 50,000 fr. L'honorable M. Vermeire vient de nous dire qu'il résulterait de la construction d'un troisième bateau un avantage considérable pour le gouvernement, et que la dépense ne s'élèverait pas à plus de 50,000 fr.
Messieurs, si cet avantage était réel, l'industrie privée s'empresserait d'établir ce service ; car vous savez que quand il s’agit de gagner de l'argent, ou trouve toujours des personnes disposées à profiter de la circonstance.
Ceia est même très honorable lorsque c'est un bénéfice honnête ; mais cela me fait douter que ce service puisse être d'un produit aussi considérable qu'on vient de le dire, car l'industrie privée ne laisserait pas échapper cette bonne occasion. Comme l'a dit l'honorable M. Sinave, le passage d'Anvers à la Tête-de-Flandre nous coûte deja extrêmement cher, car il paraît qu'il ne rapporte que le prix du combustible, environ 19,000 fr. On prétend que tout cela est organisé avec peu d'économie, qu'il y a des magasins de vivres, etc., comme pour un voyage de long cours.
D'ailleurs, messieurs, cette somme de 50,000 fr. n'est pas demandée par M. le ministre des affaires étrangères, qui paraît être assez économe.
Il a dit qu'il ferait tous ses efforts pour que l'entreprise fût conduite avec infiniment plus d'économie, et je ne vois pas dès lors pourquoi l'on vient nous demander, en quelque sorte par anticipation, cette somme de 50,000 francs.
Je dis, messieurs, que le principe qu'on veut faire prévaloir en cette circonstance est un principe très dangereux ; nous ne pouvons pas entrer dans cette voie ; si nous établissons aux frais du trésor un bateau à vapeur entre Anvers et Tamise, toutes les localités pourront venir demander la même faveur : on viendra demander que le gouvernement établisse des diligences et des bateaux à vapeur partout.
Il est très commode d'aller d'Anvers à Tamise pour 90 centimes, mais les habitants de Bruges voudraient bien aussi aller à Ostende pour 90 c, et il serait fort agréable aux Namurois d'être transportes à Liège et aux Liégeois de pouvoir se rendre à Namur pour ce prix de 90 cent. Or je ne vois pas de quel droit le gouvernement refuserait a Bruges, à Namur, à Liège ce qu'il aurait accordé à Anvers. Je le répète, c'est là un principe éminemment dangereux et je le combats de toutes mes forces. J'espère que le gouvernement ne se ralliera pas à la demande de 50,000 fr.
M. de T’Serclaes. - Messieurs, il est une chose que j’ai entendu dire plusieurs fois dans cette discussion : différents orateurs croient qu’il s’agit d’un service nouveau ; il n’en est rien, le service qu'il s'agit de régulariser aujourd'hui existe depuis 15 ans ; il a été établi après mûre délibération, avec le concours des provinces et des localités intéressées. Il s'agit aujourd'hui de rendre ce service régulier, par des moyens immédiatement productifs pour le trésor. La construction du bateau dont il s'agit est combinée de telle façon qu'avec l'économie sur le combustible, le bateau serait racheté en très peu d'années.
Maintenant, messieurs, il faut tout dire, le service de bateaux à vapeur sur l'Escaut coûte beaucoup, mais pourquoi ? C'est parce que ces bateaux sont construits pour trois services diffeérents, dont le principal concerne les communications entre les divers ports de l'Escaut. Ces bateaux sont beaucoup trop grands pour le service auquel ils sont actuellement employés, mais il a toujours été reconnu qu il était nécessaire d'avoir dans l'Escaut des bateaux à vapeur d'une force assez considérable pour parer aux différentes éventualités qui peuvent survenir.
Je reviens, messieurs, au crédit de 50,000 francs.
Dans le principe de l'organisation du service, il y avait 3 bateaux ; on a été obligé d'en démolir un : le « Prince Philippe », mais le gouvernement s'était formellement engagé à le remplacer. Il ne s'agit donc pas du tout d'une chose nouvelle ; il s'agit de régulariser ce qui existe et de le rendre productif pour le trésor, notamment en mettant une nombreuse population industrielle et commerciale en rapport avec Anvers et avec le reste du pays, par le chemin de fer de l'Etat.
M. Van Overloop. - L'honorable M. Sinave a dit tantôt que l'Etat ne doit que le passage aux citoyens qui voyagent. Je suis parfaitement de cet avis. La loi du 6 frimaire an VII ne parle que du passage. Aussi ne demandons-nous pas l'établissement d'un service nouveau ; nous demandons la régularisation d'un service existant.
L'honorable M. Sinave se récrie contre la somme de 50,000 francs que nous demandons ; mais il voudrait bien, lui, que l'Etat consacrât des sommes considérables à l'établissement d'un canal vers Blankenberghe, et si ce canal était creusé, peut-être l'honorable membre demanderait-il que l'Etat y organisât un service pour l'agrément des Brugeois.
Si mon honorable et spirituel ami M. Julliot avait bien examiné la question, je crois qu'au lieu de combattre la somme de 50.000 francs demandée pour régulariser le service de l'Escaut par la construction d'un troisième bateau à vapeur, il se serait mis avec nous sur ce bateau pour naviguer de concert avec l'honorable M. Rogier et les autres signataires de l'amendement, dans les eaux de la fusion. Je me sers de ses expressions.
En effet, messieurs, ce service existe et il est exploité par l'Etat au profit de qui ? Au profit des arrondissements d'Anvers, de Malines, de Termonde et notamment au profit de l’arrrondissement de St-Nicolas qui ne connaît du budget que l'égalité devant l'impôt, mais nullement l'égalité devant les mandats sur le trésor public. Cet arrondissement a contribué aux dépenses du chemin de fer, du canal de Schipdonck, de la Meuse, etc., comme celui de Termonde ; il n'a jamais rien obtenu ; il est vrai qu'il n'a rien demandé : il a vécu de sa propre énergie.
Tandis que les autres parties du pays frappaient incessamment à la porte du trésor, Saint-Nicolas et Termonde ont eu le courage de voler librement, sans se mettre sous l'aile de l'Etat.
Et quand l'arrondissement de Saint-Nicolas vient, appuyé par celui de Termonde, demander une modique somme de 50,000 francs pour un objet qui doit améliorer les revenus du trésor public, y aurait-il équité à refuser cette somme ? J'en appelle à la conscience de la chambre et je dis qu'elle ne peut pas repousser notre proposition. Toutes les parties du pays ont eu leur part du budget ; il n'y a que les arrondissements de Saint-Nicolas et de Termonde qui fassent exception à cette règle. Eh bien, messieurs, malgré cela, je le déclare hautement, je serais le premier à protester contre l'établissement d'un service nouveau au profit de ces arrondissements ; mais, je le répète, il ne s'agit que de la régularisation d'un service existant et on ne peut pas nous refuser cette régularisation ; non seulement l'équité l'exige, mais il y a obligation formelle de la part du gouvernement.
Le gouvernement a entrepris le service en 1841. Qu'en est il résulté ? Par suite de la concurrence de l'Etat, tous les services de communications avec Anvers ont été anéantis. Et le gouvernement ne devrait pas une indemnité ? Et il pourrait ne pas exploiter régulièrement le service sur Tamise ? Ce serait insoutenable. J'ai dit qu'il y a obligation formelle dans le chef du gouvernement. En effet, un honorable préopinant vient de dire que le conseil provincial d'Anvers a alloué dans le temps un subside considérable, parce que le gouvernement s'était engagé à établir et à exploiter le service sur Tamise, et le gouvernement pourrait cesser aujourd'hui d'exploiter, et le subside aurait été alloué en pure perte !
Tamise, de son côté, a construit un débarcadère qui lui a coûte plus de 20,000 fr. somme disproportionnée avec ses ressources, parce que le gouvernement avait promis l'établissement d'un service de bateaux à vapeur.
Et l'on viendrait aujourd'hui contester les 50,000 fr. ! L'équité, la justice distributive, la bonne administralioa du trésor public, tout exige qu'on inscrive au budget les 50,000 fr. pétitionnés pour la construction d'un troisième bateau à vapeur.
Au reste, la construction de ce troisième bateau n'est demandée que pour le cas où M. le ministre des affaires étrangères ne parviendrait pas à traiter avec une compagnie particulière.
Nous désirons que le gouvernement abandonne ce service à l'industrie privée ; c'est là mon désir, et en cela je suis d'accord avec l'honorable M. Julliot. Mais si M. le ministre des affaires étrangères ne parvenait pas à traiter avec une compagnie, ce qui n’est pas impossible, parce que le service, ayant toujours été mal fait, une compagnie pourrait craindre de ne pas trouver un grand avantage à l'exploiter, pour ce cas-là seulement nous demandons la construction d'un troisième bateau. Il résulterait de l'usage de ce bateau que les recettes devenant plus considérables on trouverait facilement une compagnie, dans une année peut-être.
Je pense donc que, puisque tout le monde est d'accord avec les auteurs de la proposition sur la nécessité de ce troisième bateau, même au point de vue du trésor, la chambre ne peut pas se refuser à allouer les 50,000 fr.
Remarquez que, d'après le budget que nous discutons, le personnel des bateaux coûte 11,850 fr., et le matériel 34,000 fr. ; total fr. 48,530 ; le produit en 1852 n'a été que de 50,552 fr,, ce qui ne donne pas un (page 1433) bénéfice de 2,000 fr. ; mais veuillez observer que les bateaux ont chômé pendant six mois, et que s'ils avaient fait le service pendant ces six mois, le bénéfice aurait probablement été d'environ 15,000 fr.
Nous ne faisons donc que défendre véritablement les intérêts du trésor public, en demandant à la chambre d'ailouer les 50,000 francs.
Il est inutile, je pense, d'insister davantage.
M. Orban. - Messieurs, on vient de déposer une proposition qui est signée par un grand nombre de membres, et qui est entièrement inattendue pour le reste de la chambre. Les auteurs de la proposition en connaissent parfaitement les avantages, mais nous, qui n'y étions pas préparés, nous ne sommes pas en mesure de la discuter. Le débat en ce moment est impossible. Je ne comprendrais réellement pas cette nouvelle manière d'engager les finances de l'Etat, qui consiste à faire, séance tenante, une semblable proposition et à l'adopter sans aucune espèce d'examen.
Nous conseillons tous les jours au gouvernement d'entrer dans la voie des économies, de se mêler de beaucoup moins de choses qu'il ne l'a fait par le passé, de renoncer surtout au système d'intervention dans les entreprises particulières. Le gouvernement, par exception, et par un louable retour sur lui-même, paraît disposé, et il vous l'a exprimé tantôt encore, à abandonner, en cette circonstance, la voie dans laquelle il est entré ; il vous a annoncé qu'il était dans l'intention de renoncer au service des bateaux à vapeur exploités par le gouvernement. Ne serait-ce pas, en quelque sorte, l'engager à faire le contraire que de voter une somme destinée à compléter ce service ?
Je pense que ce serait nous ôter le droit d'engager, à l'avenir, le gouvernement à faire des économies, à restreindre son cercle d'action, à ne pas intervenir inutilement dans des entreprises qui doivent être laissées à l'industrie privée, que de faire un semblable accueil aux intentions qu'il a annoncées, que de venir en quelque sorte manifester une opinion contraire à celle qu'il a exprimée lui-même.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Messieurs, je dois reconnaître que le service de la navigatiou sur l'Escaut laisse beaucoup à désirer. Des démarches avaient été faites auprès de moi, pour que je proposasse au budget le crédit de 50,000 fr. qui est demandé aujourd'hui. Si je m'y suis refusé, c'est parce que, dans les circonstances où nous nous trouvons, je crois qu'il est du devoir du gouvernement d'ajourner toute dépense qui n'est pas urgente.
Je n'ai pas voulu cependant, dès le principe de cette discussion, prendre position relativement à l'amendement présenté par les honorables députés de Saint-Nicolas et d'Anvers ; mais je pense qu'après la déclaration que je vais faire, ces honorables membres se décideront à la retirer.
Je m'engage à examiner dans un très prompt délai toutes les questions qui se rapportent à la navigation de l'Escaut.
M. Vermeire. - et de la Durme.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Soit ; et dans le cas où je jugerais nécessaire la construction d'un troisième bateau à vapeur, j'en ferai l'objet d'une demande de crédit supplémentaire, en y ajoutant tous les développements et toutes les explications dont la chambre aura besoin. (C'est cela !)
M. Van Overloop. - Messieurs, en mon nom et au nom de quelque uns des cosignataires de l'amendement, je déclare que nous sommes satisfaits de la promesse que vient de nous faire M. le ministre des affaires étrangères ; nous avons pleine confiance dans la parole de ce ministre, et en conséquence, pour notre part, nous relirons l'amendement.
- Aucun des cosignataires de l'amendement ne déclarant le maintenir, il est retiré.
La chambre passe au texte du budget.
« Article unique. Le budget du minisière des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1854, à la somme de deux millions trois cent vingt mille huit cent quatre-vingt-deux francs soixante-sept centimes {fr. 2,320,882-67), conformément au tableau ci-annexé. »
- Adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal.
Le projet de budget est adopté à l'unanimité des membres qui ont répondu à l'appel.
Il sera transmis au sénat.
Ont répondu à l'appel : MM. Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Rousselle (Ch.), Sinave, Thiéfry, Thienpont, Tremouroux, Vandenpeeroboom (E.), Vander Donckt, Van Iseghem, M. Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Visart, Ansiau, Anspach, Boulez, Clep, Coomans, David, de Baillet (H.), de Breyne, de Bronckaert, de Decker, de Haerne, Delehaye, de Liedekerke, Deliège, de Mérode (F.), de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Portemont, de Renesse, de Royer, de Ruddere, Desmaisières, de T’Serclaes, Devaux, de Wouters, Dumon, Jacques, Janssens, Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Magherman, Manilius, Matthieu, Moreau, Orban, Orts, Osy et Delfosse.
M. le président. - Par suite d'un retard indépendant de la volonté du rapporteur, le rapport sur le budget des voies et moyens n'est pas encore imprimé, mais on a distribué hier le rapport sur le budget de la guerre, je propose de le mettre à l'ordre du jour de demain. (Adhésion.)
Personne ne demandant la parole, la chambre passe au vote.
« Léopold, Roi des Belges,
« A tout présents et à venir, salut.
« Vu la demande du sieur Jean Marie-Eusèbe Feys, professeur à l'Athénée royal de Bruges, né à Rambervillers (France), le 27 décembre 1819, tendant à obtenir la naturalisation ordinaire :
éAttendu que les formalités prescrites par les articles 7 et 8 de la loi du 17 septembre 1835 ont été observées ;
« Attendu que le pétitionnaire a justifié des conditions d'âge et de résidence exigées par l'article 5 de ladite loi ;
« Les chambres ont adopté et Nous sanctionnons ce qui suit :
« Article unique. La naturalisation ordinaire est accordés audit sieur Jean-Marie Eusebe Feys. »
- Adopté.
La formule qui précède est applicable à la demande du sieur Pierre-Henri Delhaes, préposé des douanes à Anvers, né à Gueldres (Prusse), le 5 février 1812.
- Adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal sur les deux projets.
En voici le résultat :
56 membres répondent à l'appel.
55 membres répondent oui.
1 membre (M. Jacques) répond non.
En conséquence la chambre adopte ; les projets de loi seront transmis au sénat.
Ont répondu oui : MM. Rodenbach, Rogier, Rousselle (Ch.), Sinave, Thienpont, Tremouroux, Vandenpeereboom (E.), Vander Donckt, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Vermeire, Visart, Ansiau, Anspach, Boulez, Clep, Coomans, David, de Baillet (H. ), de Breyne, de Bronckaert, de Decker, de Haerne, Delehayc, Deliége, de Mérode (F.), de Mérode-Westerloo, de Muelenacre, de Naeyer, de Perceval, de Portemont, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, Devaux, Dumon, Janssens, Jouret, Julliot, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Magherman, Manilius, Matthieu, Moreau, Orban, Orts, Osy et Delfosse.
- La séance est levée à 4 heures et demie.