(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1852-1853)
(Présidence de M. Delfosse.)
(page 177) M. Dumon procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
La séance est ouverte.
Il est procédé à la composition, par la voie du sort, des sections de novembre.
M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est adoptée.
M. Dumon fait connaître l'analyse des pièces adressées à la chambre.
« Le sieur Huge prie la chambre d'insérer daus le projet de loi relatif à la conversion des emprunts de 1848 une disposition autorisant le gouvernement à faire l'échange des récépissés qui n'ont pas été présentés en temps utile, et demande que cet échange puisse avoir lieu dans tous les bureaux d'enregistrement. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
« Un grand nombre d'habitants de Hasselt demandent la révision ds la loi sur la garde civique, et subsidiairement prient la chambre d'adopter la proposition qui modifie l'article 24 de cette loi. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner la proposition de loi.
« La chambre de commerce et des fabriques de l'arrondissement de Mons demande que l'exécution du chemin de fer de Manage à Erquelinnes et celle d'un chemin de fer de Mons à Maubeuge fassent l'objet de deux concessions distinctes, et prie la chambre d'ordonner pour la ligne de Mons à la frontière de France une adjudication publique avec rabais sur le péage. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la concession d'un chemin de fer du Centre à la Sambre vers Erquelinnes.
« Le sieur Reynaut, commissaire de police de la ville de Thourout, demande une indemnité du chef de ses fonctions de ministère public près le tribunal de simple police. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le conseil communal de Rosière prie la chambre d'approuver l'article de la convention, conclue avec la France, qui est relatif au bétail ardennais. »
- Même renvoi.
« Les membres de la société littéraire flamande dite : Moedertael en Broedermin, établie à Nevele, demandent une loi qui rende l'enseignement primaire obligatoire. »
- Même renvoi.
« Les membres de la société littéraire flamande dite : Moederiael en Broedermin établie à Nevele présentent des observations sur la part qui est faite à la langue flamande dans les mesures d'exécution de la loi sur l'enseignement moyen. »
« Mêmes observations de la société littéraire flamande dite : Vlaemsche taelmin établie à Wetteren. »
- Même renvoi.
« Plusieurs habitants d'Oude-Cappele demandent la révision de la loi sur la milice. »
- Même renvoi.
« Un grand nombre d'habitants de Gand prient la chambre d'adopter la proposition de loi relative à l'exemption de droits en faveur des actes pour l'expulsion de certains locataires. »
M. Delehaye. - Messieurs, la chambre entend sans doute renvoyer cette pétition à la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi due à l'initiative d'un de nos collègues.
Le propriétaire de Gand qui vous l'adresse signale des faits de nature à faire accueillir favorablement la proposition de notre honorable collègue.
J'appelle l'attention de M. le ministre de la justice sur cette pétition ; je suis sûr que quand il aura pu se rendre compte des faits qui y sont signalés, il n'hésitera pas à se montrer favorable à la proposition dont la chambre est saisie.
- Le renvoi à la commission spéciale est ordonné.
« Les propriétaires des ardoisières du Luxembourg présentent des observations contre le droit sur les ardoises qui est stipulé dans la convention conclue avec la France et demandent que les ardoises françaises soient frappées d'un droit d'entrée de 7 fr. 80 c. par mille. »
- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.
« Plusieurs habitants de Gand demandent la révision de la loi sur la garde civique. »
- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner la proposition de loi ayant pour objet de modifier l'article 24 de la loi sur la garde civique.
_ « Le conseil communal de Moll prie la chambre d'accorder la concession d'un chemin de fer de Lierre à Turnhout avecembranchement vers la Campine limbourgeoise. »
« Même demande du conseil communal de Meerbout qui sollicite en outre une natte sur le territoire de cette commune. »
- Même renvoi.
- M. Magherman demande un congé.
- Accordé.
M. le président. - La section centrale propose l'adoption du projet de loi, sauf un léger changement auquel le gouvernement s'est rallié.
M. Osy. - Je commence par féliciter le gouvernement d'avoir saisi un moment très favorable pour proposer la conversion des trois premiers emprunts 5 p. c. Je crois que îe moment est très opportun, l'argent est très abondant partout, les fonds publics sont à un taux très élevé. Je crois que l'opération pourra se faire sans aucune secousse et aussi bien qu'en 1844.
Je regrette de n'être pas tout à fait d'accord avec M. le ministre des finances sur le projet entier.
Je vois que nous ne suivons pas le système qu'on a adopté en 1844 pour l'amortissement. Lorsque la première fois nous avons réduit l'intérêt de notre dette, nous avons doté l'amortissement de 1 p. c. Le même jour nous avons discuté un emprunt pour racheter la dette hollandaise. Pour celui-là nous n'avons doté l'amortissement que d'un demi p. c. Mais c'est qu'il y avait une différence entre les deux dettes : le 5 p. c. que nous avons réduit à 4 1/2 était la vieille dette créée en 1831 pour constituer la Belgique tandis que l'autre, provenant de la dette qui nous a été imposée et provenant de notre réunion avec la Hollande, pouvant s'amortir plus doucement et peser plus longtemps sur la Belgique.
L'emprunt converti avait été contracté pour faire face aux dépenses de 1830-1831 aux emprunts forcés et à d'autres besoins urgents, alors que la Belgique n'avait pas ses finances dans un état convenable pour satisfaire à toutes les nécessités de la situation et devait avoir recours aux emprunts. C'est pour cela que vous avez établi uue différence entre ces deux fonds ; à l'un vous avez consacré un pour cent d'amortissement, et à l'autre un demi pour cent seulement.
Avec un pour cent et les intérêts composés, le 4 1/2 ne s'amortit qu'en 40 ans. Avec un demi pour cent il faut un terme plus long (80 ans), surtout depuis qu'on a introduit un système que j'appellerai mixte, qui n'est plus l'ancien amortissement avec intérêts composés, car pour l'emprunt de 26 millions il a été décidé que quand l'amortissement ne serait pas possible, les fonds étant au-dessus du pair, les sommes destinées à cet objet rentreraient au trésor et recevraient une autre destination. Pour le fonds converti, M. le ministre suit le système introduit l'année dernière. Je comprendrais, si nous n'avions pas de dettes, si nous en étions à contracter notre premier emprunt, qu'on n'amortît qu'avec les excédants du budget.
Mais depuis 22 ans nous n'avons jamais eu d'excédant. Quand il y en a, on a malheureusement bien soin de le dépenser pour des travaux publics ou pour d'autres besoins. De manière que je crois que si nous suivons le système actuel, jamais notre dette ne sera amortie.
Je regrette, du reste, que nous n'ayons pas suivi le système adopté en 1844. Il y a aussi dans le courant de cette année un antécédent qui me fait regretter que M. le ministre des finances n'ait pas porté l'amortissement à 1 p. c.
Vous vous rappelez qu'en décembre dernier vous avez décrété, pour les travaux publics, un emprunt de 26 millions.
En janvier suivant, M. le ministre des finances a négocié cet emprunt, et y a affecté 1 p. c. d'amortissement. Un mois plus tard, il nous a présenté un projet de loi pour la conversion des titres de l'emprunt forcé de 1848. Cet emprunt n'avait pas d'amortissement. M. le ministre des finances a cru convenable de le doter d'un amortissement qui a été également fixé à 1 p. c.
Ainsi, en fixant l'amortissement à un demi p. c, nous nous départissons du système adopté en 1844 et cette année même. Il y avait alors d'honorables collègues qui ne trouvaient pas que ce fût assez. Je crois que l'amortissement de 1 p. c. avec l'intérêt composé est suffisant, et qu'ainsi la dette ne pèsera pas sur un trop grand nombre de générations.
Mais si vous admettez que le fonds d'amortissement puisse être employé à une autre destination, le terme d'amortissement peut se prolonger beaucoup, et la dette peut peser sur un bien plus grand nombre de générations qu'on n'avait décidé dans le principe.
Je désirerais également pouvoir procurer au trésor une recette de 2,100,000 fr., comme le fait pressentir M. le ministre des finances. Mais il ne faut pas considérer seulement les revenus du trésor ; il faut considérer le bien-être, la stabilité du crédit public. En dotant le nouveau 4 1 et demi p. c. d'un amortisssment d'un p. c, vous aurez une économie de 1,400,000 fr. au lieu de 2,100,000 fr.
Mais avec la perspective que nous avons de voir les fonds publics dépasser le pair, il est probable que la recette sera, non pas de 2,100,000 fr., mais de 2,800,000 fr.
Mais il ne faut pas se préoccuper seulement du bon temps ; il faut aussi songer aux mauvais jours. Lorqu'il y aura crise, il est très avantageux que le gouvernement puisse disposer d'une somme assez forte pour soutenir, le crédit et rassurer les petits détenteurs de fonds publics en consacrant à des achats de fonds publics toute la somme affectée à l'amortissement.
(page 178) Ce point est le seul sur lequel je sois en désaccord avec M. le ministre des finances.
Je ne vous ferai pas encore la proposition formelle de revenir à l'amortissemenl d'un p. c. Mais après les explications que nous donnera M. le ministre des finances, j'espère que la chambre pourra revenir au système qu'elle a adopté en 1844 et dans le courant de cette année encore pour les deux emprunts dont j'ai parlé. )
J'attendrai donc les explications de M. le ministre et de nos contradicteurs, avant de déposer une disposition formelle, pour conserver 1 p. c. au nouveau 4 1/2 comme nous l'avons fait en 1844, et cette année pour l'emprunt de 26 millions et pour les emprunts forcés de 1848 par la loi votée cette année, à l'occasion de la conversiion des titres provisoires.
M. Allard. - Messieurs, je ne prends pas la parole pour combattre le projet qui nous est soumis ; je ne puis qu'approuver cet acte de bonne administration.
Dans la séance du 4 février dernier, j'ai engagé le gouvernement à accorder un nouveau délai pour l'échange des récépissés des emprunts de 1848. M. le ministre des finances m'a répondu :
« Aujourd'hui tous les comptes sont réglés ; on n'avait pu, jusque là, arrêter le chiffre de l'emprunt ; ce chiffre est maintenant définitivement fixé ; il serait impossible d'accorder un nouveau délai. On ne pourrait procéder que par voie de remboursement direct. »
Messieurs, je crois que le moment est venu de faire droit aux réclamations qui nous sont adressées par beaucoup de contribuables. Vous vous rappelez avec quel patriotisme les emprunts de 1848 ont été payés. Je crois que tous les contribuables doivent être remboursés des avances qu'ils ont faites.
J'ai donc l'honneur de proposer à la chambre de modifier l'article 8 du projet. Je crois que les sommes qui n'ont pas été réclamées s'élèvent à peu près à 80,000 fr. Voici la rédaction que je propose pour l'article 8 :
« Art. 8. Un crédit de deux cent cinquante mille francs (250,000 fr.) est ouvert au département des finances, savoir :
« 1° Cent cinquante mille francs (150,000 fr.) pour les frais de confection et d'émission des nouveaux titres ;
« 2° Cent mille francs (100,000 fr.) pour le remboursement des récépissés des emprunts de 1848, qui n'ont pas été échangés dans les délais fixés par la loi du 24 mai 1850.
« Les demandes de remboursements devront avoir lieu avant le 1er janrier 1854.
« Les récépissés primitifs et supplémentaires, les duplicata de récépissés et les bordereaux de récépissés seront frappés de déchéance, et leur montant définitivement acquis au trésor de l'Etat, après le délai ci-dessus fixé. »
Messieurs, je crois que le gouvernement acquiescera à ma demande. Il est de toute justice, comme je viens de le dire, que tous les contribuables qui ont payé les emprunts en 1848 soient remboursés.
M. le président. - Nous nous occuperons de cet amendement lorsque nous arriverons à l'article 8.
La parole est à M. Mercier.
M. Mercier. - Je veux parler dans le même sens que l'honorable M. Osy. Si quelque honorable membre se propose de soutenir le système du gouvernement, je lui céderai la parole.
M. T'Kint de Naeyer. - Au sein de la commission, j'ai appuyé les propositions du gouvernement. Je ne sais pas si les honorables préopinants ont l'intention de présenter un amendement ; mais comme ils se sont déclarés partisans d'un amortissement plus élevé, je désirerais, à mon tour, soumettre à la chambre quelques considérations très brèves à l'appui de la décision qui a été prise par la majorité de la commission.
Je pense, messieurs, qu'il est extrêmement sage de consacrer chaque année une partie de son revenu à payer ses dettes. Mais on ne paye pas ses dettes en faisant des emprunts nouveaux. On se ruine à force de se dégrever de la sorte.
L'Etat ferait dans cette circonstance une opération semblable à celle d'un particulier, ayant quelque crédit, qui payerait ses dettes en empruntant ailleurs. Mais s'il continue à dépenser plus que son revenu, ses embarras croîtront d'année en année. Car il devra chaque année ajouter aux intérêts les commissions et les frais que ses agents ne manqueront pas de réclamer. Il sera en outre soumis à toutes les fluctuations du loyer des capitaux.
La théorie de l'amortissement paraît merveilleuse au premier abord, puisque, avec une dotation de 1 p. c. successivement accrue des intérêts capitalisés, une dette à 5 p. c. se trouvera éteinte, par des rachats au pair, dans l'espace de 36 ans.
Mais, messieurs, pour que ces calculs ne deviennent pas une véritable déception, il faut de l'esprit de conduite, de l'esprit d'économie : aucun plan financier ne saurait en tenir lieu. Diminuer les dépenses ou augmenter les recettes, voilà l'unique moyen d'amortir la dette d'un pays. Or, qu'avons-nous fait depuis 1848 ?
L'honorable ministre des finances l'a parfaitement démontré à la commission ; de 1838 à 1851, on a emprunté 20 millions en bons du trésor et on a amorti annuellement 4 à 5 millions. Quel avantage cette opération a-t-elle présenté ? Pour éteindre un franc de dette, on charge l'avenir d'un franc et demi.
Ce n'est pas seulement en Belgique que les choses se sont passées ainsi. En Angleterre, les faits sont encore plus frappants. Les emprunts contractés chaque année, depuis 1794 jusqu'en 1816 s'élevaient à 584,874,557 liv. avec une charge annuelle pour le public de 30,174,364 liv. Les commissaires de l'amortissement reçurent 188,522,350 liv. produit de nouveaux emprunts, ce qui représentait annuellemen 9,726,090. liv. La somme rachetée donnait seulement un revenu de 9,168,232 liv. Il y a donc eu en réalité une augmentation de dépenses, une perte sèche de 557,857 liv. par an, et qui, à 3 p. c, représente un capital de 18,595,233 liv. sans les frais d'administration évalués à 60,000 liv.
En France, depuis 1816 jusqu'en 1823, le trésor a emprunté 1,792,183,139 fr. pendant qu'il employait à l'amortissement des rentes l,276,462,534 fr.
Et voilà cependant le résultat pratique de cet amortissement qu'on appelait le palladium du crédit public, l'ancre de salut de la nation.
Sous le ministère de Pitt, notamment, les hommes les plus intelligents s'étaient fait illusion au point de croire qu'avec un fonds d'amortissement fonctionnant isolément, comme nous l'avons dit, par l'accumulation des intérêts capitalisés, on parviendrait à éteindre l'ancienne dette.
On se montrait d'autant plus facile à en créer une nouvelle, c'était un mirage financier.
Depuis quinze ans on a changé de système ; l'excédant des recettes sur les dépenses est consacré à l'amortissement de la dette.
Ne croyez pas, messieurs, que l'amortissement ait cessé. Quatre opérations de ce genre, l'année dernière entre autres, ont été très heureusement effectuées.
Les mêmes principes ont prévalu dans le royaume des Pays-Bas, la terre classique des financiers.
Nous ne venons pas, messieurs, vous proposer une réforme radicale, nous nous bornons à demander que la Belgique se rapproche insensiblement d'un système que nous croyons bon et surtout rationnel. Les principes absolus viennent ordinairement échouer dans la pratique ; il importe de tenir compte des habitudes, des droits acquis.
J'ajouterai même que, dans certaines circonstances, la dotation de l'amortissement pourra être très utilement employée, elle servira à relever ou à soutenir le crédit public. Un demi pour cent sera consacré à l'amortissement, mais ce chiffre s'accroîtra encore chaque année des intérêts accumulés de toutes les sommes amorties.
Un amortissement trop considérable devient un embarras dans les moments de crise, car c'est précisément alors, l'expérience l'a démontré, que les recettes diminuent et qu'il devient pour ainsi dire impossible de créer des ressources nouvelles. On en est réduit à emprunter à tout prix. Ainsi, il pourra se faire que, pour amortir du 4 1/2 p. c, vous serez un jour obligés d'émettre des bons du trésor à 5 p. c. Cette opération sans doute ne sourira à personne.
Je désire vivement que la Belgique parvienne à réduire ses dettes ; je désire surtout qu'elle parvienne à réduire sa dette flottante ; je partage entièrement à cet égard l'opinion de M. le ministre des finances et je le félicite du plan qu'il voudrait adopter de ne plus émettre de bons du trésor au-delà du chiffre qui est rigoureusement nécessaire pour assurer le service de la trésorerie.
Nous ne sommes malheureusement pas encore dans la position de pouvoir consacrer des sommes très considérables à l'amortissement.
D'après la situation du trésor, nous nous trouvons en présence d'un découvert de 13 millions, et à cedécouvert viendront se joindre les dépenses pour le département de la guerre, de sorte que bientôt nous aurons à faire faire face à un déficit d'une vingtaine de millions.
Si l'on parvient à consolider ce découvert, la moitié de l'économie que vous faites aujourd'hui sur la conversion du 5 p. c. devra être consacrée au service des intérêts d'un nouvel emprunt. Il ne vous restera donc plus qu'un million destiné à assurer au moins pendant les premières années, le minimum d'intérêt que vous avez accordé par la loi du 20 décembre dernier pour les travaux à exécuter par l'industrie privée.
Dans cet état de choses, il me paraît sage, prudent d'adopter purement et simplement les propositions de gouvernement. Les partisans d'un amortissement élevé eux-mêmes devront reconnaître qu'en dehors de toute question de principe il y a des motifs très puissants pour les engager à réserver au trésor, en réduisant l'amortissement d'un p. c. à un demi p. c, une ressource que l'on chercherait vainement ailleurs.
Le meilleur moyen d'arriver à une diminution des charges que la dette fait peser sur le pays, ce sera la réduction successive de l'intérêt.
Mais cet abaissement ne s'obtient pas par une simple loi. Il doit résulter de la force même des choses ; c'est de la prospérité générale qu'il doit sortir.
Le gouvernement fera donc bien de ne pas recourir à des impôts nouveaux qui entravent le développement de la richesse publique. Les capitaux en se multipliant, les perfectionnements dus au génie de l'homme exerceront une influence décisive sur le taux de l'argent.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, votre commission a donné une adhésion unanime aux propositions du gouvernement, sauf sur un seul point ; le projet de loi fait descendre l'amortissement des emprunts à convertir à un demi p. c, tandis que plusieurs membres de la commission pensent que, selon le système que nous avons suivi jusqu'à ce jour, cet amortissement devrait être de 1 p. c.
Messieurs, jamais je ne me suis montré partisan d'un amortissement exagéré.
Plus d'une fois dans cette chambre j'ai eu à soutenir des luttes contre d'honorables membres qui combattaient les propositions du gouvernement comme insuffisantes ; en dernier lieu j'ai appuyé l'amortissement (page 179) tel qu'il a été présenté par l'honorable M. Frère-Orban, tandis que d'honorables collègues le critiquaient comme n'ayant pas une action assez puissante ; j'ai moi-même fait valoir cette considération qu'il ne fallait pas imposer uniquement à la génération actuelle les charges résultant de travaux publics gigantesques qui devaient profiter également aux générations futures. La dotation de l'amortissement depuis 1831 jusqu'à ce jour a constamment été de 1 p. c. sauf une seule exception qu'explique et justifie le rapport de votre commission.
Dans l'origine, notre amortissement d'un p. c. devait s'accroître d'année en année par les intérêts composés des obligations amorties. De telle sorte que l'on pouvait espérer que nos emprunts seraient remboursés dans un espace de temps d'environ 34 à 55 ans. Mais plus tard, les choses ont été bien modifiées.
D'abord, il a été décrété que l'action de l'amortissement serait suspendue aussitôt que le cours des obligations serait au-dessus du pair.
En second lieu, il a été admis en fait que lorsque la conversion d'un emprunt pourrait se faire, le fonds d’amortissement serait supprimé et que, par conséquent, les intérêts des obligations amorties antérieurement, portés au budget, cesseraient d'y figurer. C'est ainsi que notre amortissement primitif a été profondément atténué.
Les modifications qu'il a subies mitigent fortement, écartent même complètement ce qu'il pouvait avoir de trop onéreux.
Désormais, il ne recevra plus d'application que dans les moments où la confiance sera ébranlée, non précisément par de grandes catastrophes, mais par ces crises financières qui sont plus ou moins intenses et se renouvellent de temps à autre. Dans ces circonstances son action reprendra son cours, mais le plus souvent elle restera suspendue, car il n'est pas douteux que dans une situation normale les fonds publics à 4 p. c. dépassent le pair.
Est-ce pousser trop loin la prévoyance que de porter à un pour cent l'amortissement de la dette publique dans de telles conditions ? Un tel amortissement peut-il être considéré comme onéreux pour le présent et comme donnant trop de faveur à l'avenir ? Jugeons-en, messieurs, voyons en quel espace de temps notre dette serait amortie dans le système proposé avec 1 p. c. et 1/2 p. c. d'amortissement.
Si l'action de l'amortissement était continue à raison d'un pour cent mais sans qu'il y eût accumulation d'intérêts composés, ce qui est l'hypothèse du projet qui nous est soumis, il faudrait cent ans pour amortir notre dette.
On doit reconnaître qu'il existe à cette époque une grande tendance à l'abaissement de l'intérêt ; nous avons tous la persuasion que le nouveau fonds à 4 1/2 p. c. excédera le pair dans des circonstances normales ; nous faisons une très large concession en admettant que sur les 8 ou 10 ans qui s'écouleront avant que le nouveau fonds soit converti, il y en ait quatre ou cinq pendant lesquels la cote sera au-dessous du pair ; j'ai calculé, messieurs, qu'avec l'amortissement d'un pour cent, il faudrait, pour amortir la dette sur ce pied, en supprimant tous les huit ou dix ans le fonds d'amortissement créé durant cette période, il faudrait, dis-je, un espace de temps de 150 à 160 ans, en comptant l'intérêt à 41/2 p. c, que serait-ce donc si l'amortissement, comme le veut le projet de loi, était réduit à 1/2 p. c ? Il faudrait 300 ans pour rembourser nos emprunts. Peut-on sérieusement ériger un tel système en règle générale ?
On a objecté que l'amortissement occasionne une perte ; que l'on emprunte à des conditions plus onéreuses, que l'on rachète au-dessus du cours de l'émission des emprunts. Eh bien, ce fait n'est pas exact. En général, nous amortissons au-dessous du taux d'émission. Ainsi, l'honorable M. Osy a eu la patience de recueillir la cote du 3 p. c. depuis quinze ans, de 1838 à 1852 ; il en résulte que pendant quinze ans, on a amorti en moyenne le 3 p. c. à 68-77, tandis que ce fonds a été émis à 73 1/2.
Il en est de même des emprunts à 4 1/2 p. c. émis en 1844 dont l'amortissement, d'après la loi, ne peut se faire qu'au-dessous du taux d'émission. C'est également ce qui a lieu à l'égard du 5 p. c. créé en 1842 ; une stipulation du contrat de cet emprunt porte que l'amortissement sera suspendu quand le cours s'élèvera au-dessus du pair ; cet emprunt ayant été contracté à un taux supérieur au pair, il en résulte que son amortissement tel qu'il est organisé ne peut être que favorable au trésor. Je sais qu'il n'en a pas toujours été ainsi.
En 1831 et en 1840 alors que nous nous trouvions dans des circonstances difficiles, nous avons contracté des emprunts qui ont été dans certains moments amortis à des conditions plus onéreuses. Mais ce fait ne peut pas se reproduire à l'égard des emprunts dont la conversion nous est proposée.
Les emprunts nouveaux sont émis au pair ; l'article 6 porte qu'ils ne pourront pas être amortis au-dessus du pair, par conséquent l'objection sur laquelle on a tant insisté, qu'on amortissait à un taux supérieur à l'émission, cette objection est sans aucune valeur quant aux emprunts actuels.
Messieurs, on préconise beaucoup le système qui consiste à appliquer l'excédant des recettes sur les dépenses à l'amortissement de la dette publique. Si les gouvernements et les chambres étaient toujours sages, bien prévoyants, ce serait en effet le meilleur système, mais une longue expérience prouve combien les uns et les autres se laissent dominer par les convenances du moment.
M. le ministre des finances reconnaît lui-même cet entraînement dans sa réponse consignée à la page 5 du rapport de la commission. Il fait à cet égard une observation pleine de raison.
«. Lorsque, dans notre pays, dit-il, le législateur a organisé le système d'amortissement, il a espéré que les fonds pour l'amortissement seraient prélevés sur les recettes normales du pays : chacun sait combien est grande la tendance des nouveaux gouvernements et des assemblées parlementaires à dépenser tout ce que les impôts produisent. »
Ces paroles sont parfaitement vraies. Les faits qui se sont passés en Angleterre les justifient complètement. En 1829, le système d'amortissement de la dette publique a été radicalement transformé dans ce pays.
Le gouvernement anglais a renoncé au système appliqué chez nous, mais il est à remarquer que les charges de l'ancien amortissement étaient telles qu'elles étaient devenues écrasantes ; les emprunts s'étaient tellement accumulés qu'il lui était impossible de faire face à l'amortissement et à toutes les autres charges publiques ; aussi est-ce par nécessité bien plus que par principe que l'ancien système a été abandonné. Comme il arrive souvent, on a érigé en principes ce qui était conforme aux exigences de la situation. Quoi qu'il en soit il arriva que l'amortissement des 18 années qui suivirent l'adoption du nouveau mode ne dépassa pas celui d'une seule année antérieure à cette mesure.
Un deuxième fait, c'est que l'Angleterre a encore emprunté, après avoir supprimé la dotation de l'amortissement ; elle a même emprunté plus qu'elle n'a amorti.
Ainsi le reproche qu'on fait à notre système d'emprunter tout en amortissant s'applique également au système anglais.
Un autre fait se produit encore en Angleterre. Lorsque la balance des budgets laisse quelques excédants de ressources, c'est à qui en demandera une autre application que celle de l'amortissement de la dette.
L'exercice 1851 laissait un excédant assez considérable ; dans le parlement les uns réclamaient la suppression du droit sur le thé ; d'autres, la suppression du droit sur les portes et fenêtres ; d'autres demandaient que l'on mît à la charge de l'Etat une partie des taxes locales.
Le chancelier de l'échiquier ne put employer que la moitié de l'excédant à l'amortissement, le reste fut consacré à la suppression ou à la réduction de certains impôts.
Ainsi, vous le voyez, ce n'est pas seulement en Belgique qu'existe l'entraînement dont a parlé M. le ministre des finances ; la même tendance se manifeste partout ; c'est une conséquence de l'imperfection des hommes et des gouvernements ; il est donc sage de s'imposer un amortissement fixe et obligatoire ; que cet amortissement existe ou non, la balance des budgets, j'en suis persuadé, restera la même ; car chaque fois qu'un excédant de ressources apparaît, chacun s'empresse d'en demander un emploi particulier, et le gouvernement cède presque toujours.
C'est la pensée qu'exprimait naguère, en termes plus énergiques que notre honorable ministre des finances, le chancelier de l'échiquier. « Il est reconnu, disait-il au parlement, que tout le monde regarde le surplus des recettes sur les dépenses comme une proie à piller. » Ce n'est que trop vrai.
Je fais le vœu que ces paroles et notre propre expérience suffisent pour vous démontrer, messieurs, que nous ne devons pas renoncer à un système qui paralyse en partie cet entraînement.
Quant aux emprunts nombreux qui ont été faits depuis 1830, et que l'on invoque pour renverser le mode d'amortissement actuel, je dirai que je ne puis admettre que la destinée de la Belgique soit de rester toujours à l'état d'emprunteur ; je repousse de toutes mes formes un système basé sur cette hypothèse. Nous n'aurons pas toujours d'immenses travaux publics à faire exécuter par l'Etat. J'espère que nous entrerons enfin dans une situation normale.
Notis ne devons pas avoir en vue un état exceptionnel pour asseoir notre crédit.
M. de Theux. - Je me prononcerai pour le projet du gouvernement. Les intérêts de l'Etat, dont on doit plus particulièrement se préoccuper sont suffisamment sauvegardés en consacrant un demi pour cent à l'amortissement.
Le gouvernement fait la position du créancier bonne ; il sera garanti pendant 8 ans contre le remboursement. C'est un avantage suffisant peur le déterminer à accepter la conversion.
D'un autre côté, il y a avantage pour l'Etat à n'être pas astreint à rembourser ses dettes à époque fixe, quand il n'est pas certain d'avoir des ressources dépassant ses dépenses.
Jusqu'à présent telle n'est pas la situation de la Belgique ; quoique notre crédit soit assuré et que nos finances soient en bon état, nous ne sommes pas en situation de laisser languir sans emploi des capitaux considérables dans les caisses du trésor. Si cette situation se présentait, le gouvernement trouverait toujours aux fonds disponibles un emploi utile sans devoir augmenter l'amortissement au-dessus d'un demi p. c. Je n'en dirai pas davantage ; cela se conçoit facilement quand on connaît l'état de nos dettes. Si nous avions besoin de relever notre crédit l'amortissement d'un p. c. au lieu d'un demi pourrait avoir cet effet.
Car plus le terme de remboursement est rapproché, plus le créancier a confiance dans son débiteur. Mais tel n'est pas le cas ; notre crédit et celui de presque tous les Etats sont parfaitement affermis ; dans plusieurs pays on s'occupe d'une conversion, puis il y a en ce moment une très grande abondance de numéraire.
Toutes ces causes me déterminent à voter purement et simplement le projet du gouvernement.
J'ajouterai une simple réflexion sur la mesure en elle-même : c'est que cette mesure est très utile, que déjà, dans une session précédente ; je l'avais signalée à l'attention du gouvernement, en faisant remarquer (page 180) les excellents résultats de la mesure prise, en 1844, sur la proposition de M. Mercier, qui a fait la première réduction de l'intérêt à 4 1 /2 p. c.
Ainsi l'on arrivera à avoir une dette moindre et à diminuer le taux de l'intérêt en général, ce qui sera un grand bien pour le pays.
M. Devaux. - Messieurs, puisque h discussion générale se concentre sur la question de l'amortissement, je placerai ici les observations que j'avais à faire sur cette disposition du projet de loi, que, d'ailleurs, j'adopte dans son ensemble.
Jusqu'à présent, personne, dans cette enceinte, ne s'est jamais prononcé pour les emprunts perpétuels, c'est-à-dire, sans amortissement. Tout le monde veut que la dette s'amortisse, la divergence jusqu'aujourd'hui ne porte que sur le mode.
Ce n'est pas à dire cependant que la question se réduise à savoir si l’on portera chaque année au budget une allocation d'un pour cent pour l'amortissement ou si l'on se bornera à un demi. Elle est plus importanle. Au fond il s'agit de savoir si l'on veut un amortissement régulier, permanent, annuel, ou si l'on ne veut amortir qu'éventuellement et lorsque à la fin de l'exercice les recettes offriront un excédant sur les dépenses. Je dis que telle est la question, car si M. le ministre des finances veut réduire l'amortissement de 1 p. c. à un demi, c'est parce qu'il est contraire au système d'amortissement fixe et veut une espèce de transition au système de l'amortissement facultatif et éventuel.
Si M. T'Kint de Naeyer appuie la réduction à 1/2 p. c. c'est également parce que cet honorable membre condamne l'amortissement fixe. Ce sont donc les deux systèmes d'amortissement qui sont réellement en présence.
L'amortissement est une institution de prévoyance, une de ces institutions qui n'ont en vue que l'avenir et demandent quelques sacrifices au présent ; aussi a-t-il fallu de tout temps s'attendre à la voir souvent attaquée. L'argent qu'elle absorbe, en vue d'une utilité lointaine, pourrait être appliqué à quelques dépenses populaires ou servir à prévenir quelque augmentation d'impôt ; de là deux forces opposées, contre lesquelles elle doit également lutter ; le désir de dépenser davantage et celui d'imposer moins. Aussi chaque fois qu'on a porté quelque coup à notre amortissement, ses défenseurs n'ont pas été très nombreux. Pour moi, je me suis toujours fait un devoir de venir à son secours.
C'est pour la troisième fois en effet qu'on y porte la main aujourd'hui pour l'appauvrir, diminuer son action et par conséquent reculer l'époque de l'extinction de nos dettes. On a d'abord commencé par faire décider par la législature que l'action de l'amortissement serait suspendue chaque fois que le fonds à racheter dépasserait le pair.
Or, comme l'usage a heureusement prévalu d'emprunter à un tel taux d'intérêt que le capital nominal subisse peu d'augmentation, comme les réductions successives d'intérêt ne sont que d'un demi p. c, il en résulte que ces fonds, toujours émis à un taux rapproché du pair, doivent très souvent dépasser le pair, que l'amortissement doit être fort souvent suspendu, et que son action en est très affaiblie.
On ne s'est pas borné là. Il semble être passé en usage que lorsqu'on convertit un fonds, tout l'amortissement qui y était attaché, avec les intérêts composés qui l'avaient grossi, est annulé et se fût-il élevé déjà, par les acquisitions faites, à trois ou quatre fois l'allocation primitive de 1 p. c, on revient purement et simplement à celle-ci ; le fonds nouveau est privé de toute la puissance d'amortissement qui s'était accumulée par l'effet du temps écoulé entre la création du fonds primitif et sa conversion.
En supposant une conversion tous les dix ans, l'époque de l'extinction de la dette serait chaque fois reculée de dix ans. Et si l'on arrivait par des réductions successives d'un demi p. c. de l'intérêt à un fonds de 3 p. c, ce ne serait qu'en reculant l'époque de l'extinction de la dette de quarante ans et même plus. Car il ne faut pas oublier que par cela seul que l'intérêt est moindre on affaiblit encore les moyens de l'amortissement qui n'agit qu'à l'aide de cet intérêt, et qu'on recule encore par conséquent l'époque où la dette sera complètement amortie.
Voilà donc déjà deux coups qu'avait reçus l'amortissement, deux affaiblissements successifs et considérables. Les faibles ressources que cette double atteinte lui laisse, on vous propose aujourd'hui de les réduire encore de moitié. A quelle époque reporte-t-on ainsi l'extinction de la dette contractée ? On vient d'en présenter le calcul, je ne l'ai pas vérifié ; je ne sais si c'est à deux ou trois siècles ; mais évidemment cette époque est tellement reculée qu'on peut dire que l'amortissement deviendrait illusoire. J'aimerais mieux supprimer le 1/2 p. c. et ne stipuler aucune dotation pour l'amortissement. Car payer ses dettes est une obligation tellement sacrée en Belgique, que je suis persuadé que trois ou quatre ans ne se passeraient pas sans une réaction en faveur de l'amortissement.
En stipulant 1/2 p. c. on a l'air de faire quelque chose, on se croira déchargé de toute obligation envers l'avenir et au fond on n'aura rien fait.
Messieurs, voici l'argument qu'on croit décisif contre l'amortissement fixe.
Si votre budget est assez riche, dit-on, et présente des ressources pour l'amortissement, qu'avez-vous besoin de vous y obliger par une allocation expresse ? Effacez l'allocation au budget des dépenses, vous aurez un excédant du même chiffre à la recette, il suffit de consacrer vos excédants à l'amortissement.
Si votre budget n'en présente pas, pourquoi amortir ? C'est créer un déficit que vous ne remplirez qu'avec un emprunt ou des bons du trésor. C'est diminuer un emprunt pour en créer un autre. Autant dans ce cas vaut ne rien faire, vous y gagnerez les frais de commission et autres.
Ce raisonnement peut avoir sa valeur si on le prend d'une manière abstraite : c’est-à-dire abstraction faite des circonstances et des influences sous l'empire desquelles s'accomplissent les actes financiers du gouvernement.
Mais dans la réalité pratique des faits, les choses se passent tout autrement. Soyez bien sûr que si vous ne vouliez pas d'une manière formelle apporter chaque année à votre budget un crédit pour l'amortissement, jamais, si ce n'est à de rares intervalles, vous n'aurez d'excédant ; jamais, si ce n'est par hasard, vous n'amortirez.
Supposez un budget de 100,000,000 de francs de dépenses sur lequel 5,000,000 de fr. soit alloués chaque année à l'amortissement. Qu'on supprime tout à coup cette allocation, que les dépenses soient réduites à 95,000,000 de fr., croyez-vous que ces 5,000,000 de fr. vont tomber chaque année en excédant ? Voici ce qui arrivera. Si le budget primitif était en équilibre, c'est-à-dire, si les voies et moyens annuels s'élèvent à 100,000,000 fr., il ne se passera pas deux ou trois ans que le vide de 5,000,000 dans les dépenses, ne soit comblé par quelque dépense nouvelle. Car un gouvernement a toujours des dépenses et de très utiles dépenses à faire.
Chaque année, avant de paraître devant nous, le budget est discuté au conseil des ministres ; là, le ministre des finances a la lutte souvent la plus pénible et la plus laborieuse à soutenir contre ses cinq collègues, qui tous viennent lui dire qu'ils ont des dépenses utiles ou urgentes à faire, que des augmentations de crédit leur sont indispensables. Si le ministre des finances, seul contre tous, n'a à leur opposer î'argument de la nécessité absolue de l'équilibre du budget ; si, au lieu de cela, il ne peut alléguer que la convenance d'un excédant facultatif, je le défie de tenir plus de deux ans dans cette position contre ses collègues ; et s'il tenait contre eux, il ne tiendrait pas contre les chambres qui, on le sait, ont aussi leurs entraînements en face de projets de dépenses utiles ou désirées.
L'amortissement par les excédants du budget serait donc tout simplement une chimère.
Pour en revenir à l'hypothèse du budget dont je viens de parler, si au lieu de supposer que les voies et moyens s'élevaient à 100,000,000 de fr., je suppose qu'il présentait un déficit de 5,000,000 et qu'il ne s'élevait qu'à 95,000,000. Il arrivera alors, si vous maintenez l'allocation fixe et obligatoire de l'amortissement, que les recettes et les dépenses ne se balançant plus, on reconnaîtra la nécessité d'augmenter les impôts pour créer des ressources.
Si, au contraire, vous faites disparaître du budget l'allocation de l'amortissement, lesvoies et moyens balançant les recettes, jamais un ministre ne songera à créer un impôt à l'effet d'amener un excédant purement facultatif ; jamais surtout un ministre ne viendra présenter aux chambres un impôt qui n'aurait que cette destination. Le sort d'un tel projet serait trop facile à présager.
Si donc vous voulez réellement qu'un amortissement se fasse, il faut rendre les excédants obligatoires, c'est-à-dire qu'il faut vous lier à une allocation annuelle, il faut écrire cette obligation dans le contrat des prêteurs, seul moyen de lier le législateur d'une manière définitive. Mais si vous faites dépendre l'amortissement d’excédants facultatifs, vous pouvez bien compter qu’il ne se fera pas.
J'en trouverais au besoin une preuve surabondante dans les paroles de M. le ministre des finarces lui-même ; en effet le million et demi qu'il retranche chaque année à l'amortissement obligé tombera-t-il en excédent ? Non, il y a déjà des dépenses utiles qui l'attendent, à savoir l'intérêt d'un emprunt de 26 millions et les dépenses qu'entraîne le minimum accordé aux concessions de travaux publics.
On a objecté que c'est avec des bons du trésor qu'on a opéré jusqu'ici l'amortissement de la dette et qu'ainsi on emprunte d'une main ce qu'on amortit de l'autre.
En fait, messieurs, je crois l'assertion inexacte. Si l'allocation de l'amortissement n'avait pas existé au budget des dépenses, elle eût été remplacée par une autre dépense, et chaque année on n'aurait pas moins émis ce que la législature tolérait de bons du trésor. Mais si l'assertion était vraie en fait, qu'en faudrait-il conclure ? Non pas que l'amortissement obligé est une mauvaise mesure, mais que les bons du trésor sont une institution des plus dangereuses.
Oui, messieurs, c'est là qu'est le mal, c'est là qu'est la facilité de dépenser, c'est là qu'est la source des déficits et de ces entraînements qui coûtent si cher à nos finances. M. le ministre nous annonce qu il désire se passer de bons du trésor. Je l'engage à ne pas se contenter de s'écarter de cette voie, mais à examiner s'il ne peut pas la fermer d'une manière définitive, car je crains bien que tant qu'il restera quelque chose de cette dangereuse source elle ne tardera pas à reparaître tout entière.
Je voterai, messieurs, pour que l'amortissement soit porté à 1 p. c. ; de cette manière notre amortissement sera encore appauvii de 700,000 à 800,000 fr. par an ; à mon avis, c'est déjà trop.
M. le président. - Boici un amendement qui vient d'èlre déposé sur le bureau :
« Nous avons l'honneur de proposer de porter l'amortissement à 1 p. c.
« (Signé) Mercier, Osy, Dumortier. »
M. le ministre des finances (M. Liedts). - Messieurs, le désir qui m'anime (page 181) de voir voter la loi aujourd'hui, afin qu'elle puisse être votée par le sénat dès demain, ou au plus tard après-demain, m'engage à être aussi court qu'il me sera possible.
La question qui se discute en ce moment a divisé les meilleurs esprits, du moins au point de vue théorique. Il n'est donc pas étonnant que les deux systèmes en présence trouvent des adversaires et des défenseurs dans cette chambre. Toutefois, la question de principe, nous ne voulons pas la trancher, et la preuve de ce que je dis, c'est que le projet du gouvernement ne tend à introduire aucune innovation dans votre système d'amortissement.
En effet, vous avez aujourd'hui deux emprunts à 4 1/2 p. c., un qui a une dotation de 1 p. c., un autre de 84,656,000 qui n'a qu'un amortissement de 1/2 p. c. Entre ces deux emprunts à 4 1/2 p. c, nous donnons la préférence à celui qui n'a que 1/2 p. c. d'amortissement. C'est donc en vain qu'on semble redouter l'espèce de bigarrure, le mot a été employé, que nous voulons introduire dans nos emprunts 4 1/2. Cette bigarrure existe déjà. Nous ne faisons que nous prononcer pour un système qui consiste à n'établir qu'une dotation de 1/2 p. c, comme on l'a fait pour l'un de nos plus grands emprunts. Nous ne tranchons donc pas le principe. Peu m'importe qu'il y ait eu des motifs particuliers pour n'affecter à cet emprunt 4 1/2 p. c. que 1/2 p. c. d'amortissement. Toujours est-il que cette dotation de 1/2 p. c. existe, et qu'en suivant aujourd'hui la même ligne de conduite, nous ne faisons rien d'insolite.
Abordons la question théorique en elle-même. Messieurs, on se trompe si l'on croit qu'il s'agit de savoir s'il vaut mieux, pour un pays, avoir, oui ou non, des emprunts perpétuels. La question, ainsi posée, n'est pas celle qu'il s'agit de résoudre ; personne ne veut d'emprunts non amortissables ; le point sur lequel on diffère est celui-ci : le système d'amortissement suivi en Angleterre est-il préférable à celui qui a été jusqu'ici suivi en Belgique ? Quel est, en d'autres termes, celui des deux systèmes qui grève le moins l'avenir ?
Eh bien, messieurs, je n'hésite pas à dire que c'est le système anglais et non pas le système que nous avons suivi jusqu'à ce jour.
Le système que nous avons suivi jusqu'ici n'a que l'apparence d'amortir la dette et de dégrever l'avenir ; il a pour conséquence infaillible, inévitable, fatale, de grever nos successeurs plus lourdement que si on n'amortissait point.
Lorsque, comme je l'ai dit dans la commission, nos prédécesseurs ont jeté les bases du système d'amortissement à 1 p. c, ils se sont imaginé et ils ont pris pour point de départ qu'on forcerait ainsi la législature à prélever ce 1 p. c. d'amortissement sur les revenus ordinaires de l'Etat.
Cela est tellement vrai, messieurs, que si vous voulez consulter les lois d'emprunts successivement décrétées, vous lirez dans toutes un article final portant que l'intérêt ainsi que la dotation de l'amortissement seront prélevés sur les revenus de l'Etat et quelquefois, plus directement encore, qu'ils seront prélevés sur les revenus du chemin de fer, par exemple, ou sur les revenus de tel ou tel canal qu'il s'agissait de créer avec l'emprunt. On croyait forcer ainsi le gouvernement et la législature à prélever la dotation de l'amortissement sur les ressources ordinaires de l'Etat.
Eh bien, messieurs, les faits se sont-ils passés de cette manière ? Pas une seule fois. Lorsqu'on a arrêté les budgets, chaque fois, d'année en année, sans qu'il y ait une seule exception à cette règle, au lieu de prélever l’amortissement sur les revenus des travaux d’utilité publique créés au moyen de l’emprunt, il a fallu ouvrir un emprunt nouveau, sous forme de bons du trésor, pour payer l’amortisssement. C’est ainsi que, pour équilibre les budgets, on a emprunté au moyen de bons du trésor (somme ronde) :
En 1838, 9,079,090.
En 1839, 23,800,000.
En 1840, 56,742,000.
En 1841, 9,860,000.
En 1842, 15,500,000.
En 1843, 12,135,000.
En 1844, 21,000,000.
En 1845, 17,500,000.
En 1846, 10,000,000.
En 1847, 36,400,000.
En 1848, 21,700,000.
En 1849, 33,000,000.
En 1850, 14,600,000.
Ainsi, messieurs, voici, en deux mots, l'opération à laquelle nous nous sommes livrés ; nous avons arrêté nos budgets de dépenses, et ces budgets arrêtés, on s’est aperçu que les revenus de l’Etat n’étaient pas suffisants pour couvrir l’amortissement ; on a grossi d’autant le chiffres des bons du trésor, et c’est sur les bons du trésor qu’on a payé l’amortissement.
Maintenant, non seulement l'Etat a supporté des pertes du chef de la création de ces bons du trésor, mais de deux en deux ans ou de trois en trois ans on a converti les bons du trésor en emprunts consolidés, et de tout cela il est résulté pour le pays une nouvelle aggravation de charges.
C'est ainsi, messieurs, qu'on a toujours marché et, permettez-moi de le dire, que l'on continuera à marcher jusqu'à ce que l'impopularité qu'entraîne la création de nouveaux impôts l'emporte sur la popularité que donne, au gouvernement et aux chambres, la création de travaux d'utilité publique.
C'est alors, messieurs, mais alors seulement que tous les pouvoirs publics s'entendront une bonne fois pour arrêter la construction de travaux publics, les léguant ainsi à leurs successeurs qui auront aussi leurs besoins, c'est alors qu'on sentira la nécessité d'arrêter les budgets avec un excédant disponible et sans recourir aux emprunts pour les équilibrer.
C'est ce qui existe en Hollande ; dans ce pays, ni les chambres, ni le gouvernement ne cherchent plus à créer de nouveaux travaux publics au moyen de l'emprunt, et l'amortissement se prélève sur les revenus ordinaires de l'Etat.
C'est ainsi que l'année dernière encore, pendant que j'étais en Hollande, le ministre des travaux publics vint présenter une loi qui disposait de 3 millions d'excédant.
Je les ai en main, dit-il, et je me hâte d'en faire l'application parce que si les chambres et mes collègues en avaient connaissance, chacun s'empresserait de mettre le grappin dessus, permettez la trivialité de l'expression.
Mais, dit-on, prenez-y garde, vous allez grever l'avenir de toute la charge des emprunts. Eh bien, moi, je réponds qu'avec le système que vous combattez on dégrèverait l'avenir.
En effet, c'est une singulière manière de ne pas surcharger l'avenir que de faire un emprunt de 105 fr. pour en éteindre un de 75 ou 80 fr. C'est cependant à cela que se réduit l'opération à laquelle vous donnez votre approbation.
Mais, dit-on, supposez que nous ayons agi autrement ; nous eussions fait les mêmes emprunts et vous n'eussiez pas amorti. Eh bien, messieurs, les faits parlent éloquemment contre cette objection : prenons la première année venue parmi celles dont j'ai parlé tout à l'heure ; prenez l'année 1846 : au commencement de l'exercice, on connaissait les budgets, votés avant le 1er janvier, et c'est parce qu'il y avait un déficit de 10 millions, que l'on créa pour 10 millions de bons de trésor.
Je le demande aux honorables membres, si le 1er janvier il avait été constaté qu'on n'avait pas besoin de 5 millions pour l'amortissement, aurait-on émis pour 10 millions de bons du trésor ?
Evidemment non, on n'en aurait émis que pour 5 millions, puisque le déficit n'aurait été que de 5 millions. C'est-à-dire que pour éteindre une dette de un franc, on créait une dette nouvelle qui grèvera l'avenir d'une charge de 1 fr. et demi.
On a encore invoqué contre nous les résultats mêmes de la conversion que nous proposons de faire. Voyez, dit-on, le ministre des finances qui va avoir une économie de deux millions se propose-t-il d'en consacrer une partie à l'amortissement de la dette ? Non. Il est vrai, messieurs, que jusqu'ici aucune partie de l'économie qui doit résulter de la conversion ne peut tourner au profit de l'amortissement.
En effet, le calcul est très simple ; l'année actuelle se clôturera, grâce aux mesures financières prises par mon prédécesseur, se clôturera sans déficit, malgré les crédits supplémentaires, en dehors de celui qui concerne la guerre, et c'est peut-être la première fois qu'un pareil résultat se présente.
L'année 1852 donc se clôture sans déficit ; mais les exercices précédents laissent un découvert de 15 millions ; à ces 15 millions viennent se joindre les crédits extraordinaires pour la guerre ; et dans les premiers mois de l'année prochaine, il est plus que probable que nous aurons à voter quelques nouveaux fonds pour la défense du pays. Somme toute, je prévois que le découvert de tous les exercices précédents s'élèvera à une vingtaine de millions.
Je suis décidé, quant à moi, à sortir de l'ornière dans laquelle nous n'avons marché que trop longtemps, et à demander que cette dette flottante soit consolidée ; cela exigera un des deux millions que procurera la conversion.
Il reste un million. Mais n'oublions pas qu'en dehors des travaux publics qui s'exécuteront avec l'emprunt de 26 millions, il y a une autre série de travaux publics que vous avez laissés à l'industrie privée, et qui s'élèvent à 25,300,000 fr.
Sans doute, ces travaux publics ne seront pas tous exécutés dans le courant de l'année 1853 ; vous avez alloué de ce chef au budget de mon département une première somme de 300,000 fr. pour couvrir le minimum d'intérêt en 1853.
Mais il est probable qu'en 1854 tous ces travaux publics, pour lesquels vous avez garanti un minimum d'intérêt, seront exécutés.
Eh bien, je désire me tromper, mais à prendre l'ensemble de ces travaux publics qui doivent répandre l'aisance, le bien-être dans beaucoup de nos provinces, qui doivent avoir des résultats financiers favorables dans l'avenir, vous aurez un sacrifice à vous imposer pendant les premières années ; la prudence me commande de prendre mes mesures et de prévoir le cas où l'intégralité du minimum d'intérêt qui a été garanti retomberait à charge de l'Etat.
Je prévois donc de ce chef une allocation d'à peu près un million durant quelques années.
Voilà toute l'économie, résultant de la conversion, employée à équilibrer nos dépenses et nos recettes.
Je raisonne dans l'hypothèse, comme vous le voyez, que toute notre dette flottante soit éteinte, et ne doive plus renaître.
J'étudie, en effet, la question qui a été soulevée par l'honorable M. Devaux : celle de savoir s'il n'est pas possible de détruire cette source des emprunts, les bons du trésor, ce tonneau des Danaïdes que chaque année vous voulez remplir et qui, chaque année, se vide.
(page 182) La question n'est pas insoluble. J'ai déjà réuni plusieurs matériaux. Quand la question sera mûre, je viendrai la soumettre à vos délibérations.
M. Dumortier. - Messieurs, je viens appuyer le maintien du mode d'amortissement que nous avons suivi depuis plus de vingt ans.
Lorsque nous avons fait le premier emprunt en 1831, cet emprunt fut contracté par deux de nos honorables collègues qui siègent encore dans cette enceinte, MM. Ch. de Brouckere et Osy.
Quel était le système qui a été adopté à cette époque ? C'était de consacrer annuellement au service de l'amortissement une somme d'un p. c. des emprunts, avec accumulation des intérêts, et en faisant tourner au bénéfice de l'amortissement toutes les sommes amorties.
Au moyen de ce système que j'ai toujours regardé comme éminemment sage, et avec l'intérêt qui était alors établi, en trente-six ans, l'emprunt devait être entièrement remboursé ; de manière que si nous n'avions pas converti le premier emprunt de 1831 en 1867, c'est-à-dire dans quinze ans, cet emprunt disparaissait complètement de notre budget. Et pourquoi ? Ce pourquoi est excessivement simple : c'est que lorsqu'on procède à l'amortissement des emprunts par les intérêts composés et l'application à l'amortissement de toutes les sommes déjà payées, on arrive à cette conséquence que l'amortissement opère avec la plus grande énergie dans les dernières années. On serait donc arrivé après quelques années, pour l'emprunt dont je parle, à un résultat excessivement fructueux pour le trésor public, et il en est de même des emprunts qui l'ont suivi.
Eh bien, on a changé ce système, et j'en éprouve un vif regret. Pourquoi éprouvé-je ce regret ? Pour ce motif fort simple qu'après avoir créé un emprunt en 1831 pour assurer la défense du pays, pour créer une Belgique, nous nous sommes jetés dans le système de faire faire par le trésor de l'Etat la majeure partie des travaux publics du pays. Qu'a -t-on fait pour exécuter ces travaux publics ? On a créé un moyen factice, éminemment regrettable et que j'apprends avec un plaisir extrême qu'il est dans l'intention de M. le ministre des finances de faire disparaître, moyen contre lequel je me suis bien des fois élevé dans cette enceinte ; je veux parler du système des bons du trésor. Ce système est, pardonnez-moi l'expression, le pont aux ânes financier des gouvernements. C'est un moyen facile et commode de faire sans cesse de nouvelles dépenses, car jamais les gouvernements, comme les particuliers, ne sont plus disposés à s'endetter que lorsque l'emprunt est facile.
Et puis à ce système est venu s'en joindre un autre, celui de faire faire les travaux publics, non pas, comme en Angleterre, par l'intérêt privé, mais par le trésor public. Ainsi nous avons substitué le trésor public à l'intérêt privé dans les grandes dépenses, et nous avions pour cela la facilité immense que nous donnait la loi des bons du trésor ; d'emprunt en emprunt, nous avons été amenés à créer une dette considérable. En 1831, j'ai eu l'honneur de faire le rapport général sur les budgets dans cette chambre ; la dette publique de la Belgique s'élevait alors, si ma mémoire est fidèle, à 640,000 fr. Vous savez à combien de centaines de millions elle s'élève aujourd'hui !
On vient nous dire : « Dans la situation actuelle mieux vaut le système anglais au point de vue belge ; mieux vaut ne pas amortir et laisser aux excédants de notre budget le soin de pourvoir à l'amortissement. »
Je répondrai aux honorables membres qui nous tiennent ce langage : Voulez-vous le système financier anglais ? Soit, je le veux bien ; mais alors acceptez-le dans son entier ; renoncez à votre système les bons du trésor ; ne faites plus faire les travaux publics par le gouvernement ; renoncez surtout aux crédits supplémentaires que vous demandez chaque année. A ces conditions, je veux le système anglais.
Mais le système que vous proposez en ce moment n'est ni le système anglais, ni le système français, ni le système belge ; c'est un système bâtard. Contrairement au système anglais, vous faites faire les travaux publics par le gouvernement et à l'aide du trésor public ; contrairement au système anglais, vous aurez un amortissement qui n'en sera pas un ; contrairement au système anglais, vous aurez chaque année des crédits supplémentaires à payer. (Interruption.)
J'aime à croire qu'aussi longtemps que l'honorable M. H. de Brouckere sera aux affaires, nous n'aurons pas de crédits supplémentaires ; j'ai confiance dans l'honorable ministre des affaires étrangères et dans les déclarations qui nous ont été faites. (Interruption.) Si je m'étais trompe, j'en éprouverais du regret.
M. le ministre des affaires étrangères (M. H. de Brouckere). - Nous n'avons pas pris et nous n'avons pas pu prendre un engagement aussi formel ; nous avons dit que nous ferions tout ce qu'il est humainement possible de faire pour éviter de devoir recourir aux crédits supplémentaires.
M. Dumortier. - Est-il donc difficile de ne pas avoir de crédits supplémentaires ? Pendant les quinze années du gouvernement hollandais, on n'a jamais voté de crédits supplémentaires ; donc on peut encore le faire aujourd'hui.
M. Malou. - Mais il n'y avait pas de budgets.
M. Dumortier. - Il y en avait, ils étaient votés par les états généraux. (Interruption de M. Rogier.) Je répète que bien qu'en puisse dire l'honorable M. Rogier, qui m'interrompt fort singulièrement, dans les états généraux hollandais on n'a jamais recouru aux crédits supplémentaires. Il fallait votre arrivée aux affaires pour y recourir.
Comment voulez-vous songer à amortir votre dette publique avec les excédants de votre budget, lorsque vous avez ce double système détestable qui doit fatalement absorber tous vos excédants, savoir exécuter vos travaux publics aux frais du gouvernement et demander tous les ans des crédits supplémentaires ?
L'honorable M. Devaux l'a fort bien dit, lorsqu'il est impossible de trouver des excédants, il sera de toute impossibilité de payer vos dettes.
Messieurs, un gouvernement soucieux de l'avenir doit maintenir dans le pays la nationalité, et l'honorable M. Devaux a parfaitement raison quand il dit que nous devons nous imposer cette obligation forcée de mettre tous les ans au budget une somme convenable pour amortir notre dette.
Si aujourd'hui nous faisons tel emprunt, dans dix ans tel autre, si nous n'avons jamais amorti notre dette, il arrivera qu'un jour, par l'accumulation des intérêts, nous nous trouverons dans ces crises fatales que l'on a vues dans la plupart des gouvernements de l'Europe dans le siècle dernier. Un pays doit toujours sa mettre en garde pour l'avenir ; y veiller, c'est faire acte de bon gouvernement.
A chaque jour sa tâche. Ignorez-vous que l'avenir vous prépare encore des emprunts ? Le véritable homme d'Etat qui songe à l'avenir doit donc chercher à amortir les emprunts anciens pour laisser place aux nouveaux besoins et chercher à les amortir sérieusement et efficacement.
Or, l'amortissement à un demi pour cent n'est pas efficace parce que, mon honorable collègue et ami nous l'a dit, l'amortissement à un p. c. irait à plusieurs siècles et la Belgique se trouverait stationnaire au point de se créer des dangers. N'y aura-t-il point des événements, des troubles, des guerres, des disettes, des malheurs publics qui nous forceront encore de créer de nouveaux emprunts ?
Ayez donc la prévoyance de l'avenir, si vous êtes des hommes d'Etat ; si vous ne voulez point prévoir ces éventualités, si vous faites une loi aujourd'hui pour le jour où elle est discutée, vous arriverez à ce point que vous aurez toujours accumulé emprunt sur emprunt et qu'à l'avenir vous n'aurez pas les moyens de faire face aux événements.
Je désire que l'on reste autant que possible dans le système qni a été admis en 1831, et qui nous a parfaitement servi, car s'il n'eût point été établi, il est incontestable qu'en 1867 le premier emprunt de cent millions disparaissait de notre budget.
Maintenant, l'honorable M. de Theux qui a défendu tout à l'heure le système à un demi p. c. a fait une confusion lorsqu'il a dit qu'au moyen d'un demi p. c. il y aurait une garantie pour les prêteurs qui auront huit ans de garantie. Ces deux points n'ont aucune espèce de connexité. J'approuve, pour mon compte, que l'on admette qu'il n'y aura point de nouvelle conversion, mais cela n'a pas de rapport avec le chiffre de l'amortissement, et cela ne sera efficace qu'autant qu'on restera dans de justes limites et qu'on dira que les fonds acquis à l'amortissement continueront à y être affectés.
Votre capital de 1 p. c. est une somme très peu convenable pour votre amortissement, ce n'est que dans les dernières années que vous arriverez à former des sommes convenables pour votre amortissement ; c'est dans ces dernières années que l'amortissement devient considérable.
Je désire vivement que l'on veuille bien réfléchir sérieusement à la nécessité de prévoir un jour ce qui peut arriver dans notre pays, afin de ne pas mettre alors le gouvernement dans l'impossibilité de faire face à ses dettes, à son budget.
M. Malou. - D'après le désir manifesté par M. le ministre des finances, je m'attacherai à être très bref et à circonscrire ce débat.
Il ne s'agit pas de décider un principe général ; mais de savoir si, d'après l'ensemble de notre situation financière, il y a lieu d'admettre un demi ou un pour cent d'amortissement pour le nouveau 4 1/2.
On paraît croire et mon honorable collègue et ami qui vient de se rasseoir disait que le beau idéal du système était l'amortissement décrété en 1831 ! Qu'est-il arrivé alors ? La Belgique née récemment, n'ayant pas encore la plénitude de son crédit, a subi, pour l'amortissement comme pour le taux de certains emprunts, les conditions que les prêteurs lui ont faites.
Ainsi l'on argumente aujourd'hui, lorsque nous jouissons de notre pleine liberté, des conditions qui nous étaient imposées en 1831 par les prêteurs ; ils rendaient, je le reconnais, un grand service, ils concouraient à fonder le crédit de la Belgique ; mais ils ont dicté alors le mode et les conditions de l'amortissement. Je repousse donc entièrement l'autorité de ce précédent.
Il faut voir la vérité de notre situation ; depuis lors nous avons emprunté beaucoup et je ne partage pas l'opinion de plusieurs honorables préopinanls qui croient que nous avons beaucoup trop emprunté. Si nous n'avions pas exécuté en Belgique les travaux qui y ont été faits, elle ne serait pas politiquement aussi grande qu'elle est, aussi forte, aussi sûre d'elle-même. Les travaux publics exécutés hardiment, mais avec mesure, ont été une œuvre de nationalité. Le développement de ces travaux, les emprunts qui ont été conclus n'ont pas été sans compensation ; ils ont apporté aussi un certain contingent à notre budget des voies et moyens.
Messieurs, si je voulais examiner ici toutes les conséquences financières des travaux publics, je devrais entrer dans de grands développements. J'attire seulement votre attention sur ce fait que l'œuvre des travaux publics, poursuivie successivement depuis 1830, a été utile à notre nationalité.
(page 183) Je vois l'ensemble sans approuver tous les actes qui ont été posés.
On a attaqué également les bons du trésor ; s'il faut en croire d'honorables préopinants, les bons du trésor sont la cause de tout le mal.
Pour être dans le vrai il faut attaquer les dépenses exagérées ; on l'oublie trop souvent. On s'en prend aux bons du trésor qui sont l'effet, et quand il s'agit de dépenses, qui sont la cause, on les vote.
Je me borne encore à citer les faits en général, sans discuter aucun fait particulier.
L'honorable M. Devaux et l'honorable M. Dumortier, après avoir exalté les bienfaits de l'amortissement, ont eux-mêmes reconnu que cet amortissement ne sera pas sérieux aussi longtemps que nos dépenses excéderont nos recettes. Quand le résultat inverse se produira, nous discuterons utilement le principe, je le reconnais ; mais aujourd'hui nous n'y sommes pas.
Le fait est que depuis 1830 par des dépenses nécessaires ou facultatives, nous avons toujours dépassé nos recettes, et l'opération s'est bornée à inscrire majestueusement d'une main la dotation de l'amortissement et de l'autre main à emprunter beaucoup plus que nous n'amortissions.
Voilà ce qu'on a fait, et la situation financière est encore telle que peut-être, pendant les huit années indiquées comme terme de la conversion, nous serons encore dans la même voie. Posée sur ce terrain, la question est résolue.
En effet, quel est le père de famille ou l'administrateur intelligent d'une grande fortune qui consacrerait ses revenus à amortir, tandis qu'une longue expérience lui aurait démontré qu'il doit emprunter plus et j'ajoute, à des conditions plus onéreuses ? Voilà toute la question soumise aujourd'hui à votre examen.
Nous agissons donc aujourd'hui avec pleine et entière liberté. Si les habitudes d'amortissement n'existaient pas, s'il n'y avait pas d'inconvénient sérieux à créer une variété nouvelle de notre dette, non dotée d'amortissement, je n'hésiterais pas à dire qu'il n'y a pas lieu d'attacher un fonds d'amortissement au nouveau 4 1/2.
Mais il suffit qu'un amortissement existe pour que le succès de la conversion, qui me paraît d'ailleurs certain, ait une garantie de plus.
En principe, quand nous pourrons aborder plus tard la question de l'amortissement, il sera démontré à l'évidence, j'en suis convaincu, que nous avons accompli et au-delà les obligations imposées à la génération actuelle. Indépendamment des travaux faits avec nos ressources ordinaires, nous avons amorti 57 à 58 millions.
- La discussion générale est close.
« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à effectuer le remboursement du capital restant :
1° De l'emprunt de 86,940,000 francs à 5 p. c, contracté en vertu de la loi du 28 juin 1840 ;
2° De l'emprunt de fr. 28,621,718 40 c. à 5 p. c., contracté en vertu de la loi du 29 septembre 1842.
« Et 3° de la dette de 37,513,940 fr., résultant des emprunts décrétés par les lois du 26 février et du 6 mai 1848.
« Les remboursements pourront être effectués par séries. »
- Adopté.
« Art. 2. Les propriétaires d'obligations au porteur et d'inscriptions nominatives de ces emprunts ont la faculté d'en obtenir la conversion au pair, en titres à 4 1/2 p. c. La jouissance de l'intérêt à 5 p. c. sera conservée jusqu'au 1er mai 1853 aux détenteurs d'obligations ou d'inscriptions qui n'en auront pas demandé le remboursement. »
- Adopté.
« Art. 3. Tout propriétaire de titres des trois emprunts précités, qui, dans le délai de quinze jours, à partir de l'époque à fixer par arrêté royal, n'en aura pas demandé le remboursement, sera considéré comme ayant accepté la conversion.
« L'exercice du droit de remboursement du nouveau fonds à 4 1/2 p. c. est suspendu pendant huit années, à compter du 1er mai 1853. »
- Adopté.
« Art. 4. L'échange des obligations à 5 p. c. contre de nouveaux titres à 4 i}2 p. c. se fera, sans frais, dans les divers chefs-lieux d'arrondissement du royaume et à Paris. Le gouvernement est autorisé à l'effectuer également à Londres.
« Les nouveaux titres au porteur seront, pour les deux premiers emprunts indiqués ci-dessus, de 2,000, 1,000 et 500 francs.et pour les emprunts de 1848, de 2,000, 1,000, 500, 200 et 100 francs ; les intérêts pourront en être rendus payables à Paris.
« La fraction non échangeable des anciens titres sera remboursée en numéraire. »
- Adopté.
« Art. 5. Il sera pourvu aux remboursements à effectuer au moyen de la réserve provenant des fonds d'amortissement des emprunts, à 5 p. c, de 1840 et de 1842, et, au besoin, par une émission de bons du trésor.
« Dans le cas où le montant des remboursements serait inférieur au chiffre de la réserve, le restant disponible de celle-ci viendra en déduction de la dette flottante. »
- Adopté.
« Art. 6. Il sera consacré à l'amortissement de la nouvelle dette une dotation annuelle d'un demi pour cent du capital, indépendamment des intérêts des titres amortis.
« Cette dotation prendra cours à partir du 1er mai 1853.
« En cas d'élévation de la nouvelle dette au-dessus du pair, l'action de l'amortissement sera suspendue, et les fonds non employés pendant deux semestres consécutifs pourront recevoir une autre destination. »
- Ici vient l'amendement présenté par MM. Mercier, Osy et Dumortier.
M. Anspach. - Messieurs, dans la commission nommée pour examiner le projet de loi pour la conversion de 5 p. c. en 4 1 /2, j'ai été d'avis que l'amortissement de 1/2 p. c. n'était pas suffisant et qu'il fallait le porter à 1 p. c. ; les raisons qui ont été données pour justifier cette diminution ne m'ont pas paru convaincantes, et je suis resté dans mon opinion.
On a attaqué le principe même de l'amortissement, on a dit que c'était charger l'avenir d'une dette onéreuse, pour éteindre un capital existant, que c'était une opération qu'un bon père de famille ne ferait point. Pour soutenir une pareille thèse, qui, selon moi, est contraire au plus simple raisonnement, il a fallu nécessairement partir d'une base fausse, et c'est ce qu'ont fait les adversaires de l'amortissement ; ils se mettent fort à l'aise, ils ne séparent jamais l'amortissement, des emprunts nouveaux à contracter, c'est son accompagnement obligé ; alors ils se donnent carrière sur les désavantages de l'amortissement.
Comment, vous créez un amortissement pour pouvoir emprunter plus facilement ! Vous remboursez au pair des emprunts qui vous ont coûté cher et vous réalisez ainsi une perte ! C'est une opération désastreuse, c'est une opération qu'un bon père de famille ne fera jamais !
Messieurs, tout cela serait vrai, si vous admettiez que vous aurez toujours de nouveaux emprunts à contracter ; or c'est ce que je n'admets pas, je ne veux plus d'emprunt, et la position satisfaisante dans laquelle se trouvent nos finances, grâce à l'habileté et à l'énergie de l'ancien cabinet, me permet d'espérer qu'il n'y en aura plus ; une nation qui adopterait ce principe d'emprunts successifs marcherait à sa ruine et finirait par arriver inévitablement à la banqueroute.
Il faut donc séparer l'amortissement de cette prétendue obligation d'emprunts nouveaux à contracter ; alors tous les reproches qui lui sont adressés tombent à plat, les uns parce qu'ils ne lui sont pas applicables, les autres parce qu'un résultat tout contraire à celui annoncé, semble prouvé ; il ne reste donc que l'amortissement considéré en lui-même ; or, voici les effets de l'amortissement, d'abord c'est un moyen de soutenir le cours des fonds publics, non pas lorsque des circonstances politiques amènent une baisse générale, car il n'y a pas de puissance financière qui puisse l'empêcher, mais lorsque, dans un état normal une circonstance particulière, mise à profit par quelques intérêts financiers, qui cherchent à en augmenter l'influence, peut amener une variation en baisse, au détriment de qui ? Au détriment du public qui n'est pas dans la confidence ; alors l'amortissement, agissant avec énergie, met obstacle à cette manœuvre et ramène les fonds publics à leur état normal.
Voilà un des bons effets de l'amortissement. Il en a bien d'autres, mais dont il est inutile de vous parler maintenant.
Ensuite le but de l'amortissement, et c'est l'essentiel pour moi, est l'extinction progressive de l'emprunt contracté. On a dit que, pour être sage et logique, on ne devait appliquer à l'amortissement que l'excédant des recettes. Mais je vous le demande, messieurs, qu'aurions-nous amorti depuis que le royaume de Belgique existe ? Rien ! absolument rien !
On nous oppose l'exemple de l'Angleterre ; cet exemple me semble mal choisi ; nous ne sommes pas dans la même position ; l'Angleterre a des recettes indirectes qui, dans certaines années prospères, augmentent considérablement à cause de l’immense importance de son commerce et peuvent être appliquées à l'amortissement ; encore cela est-il très rare ; pour nous il n'en est pas de même, et si nous voulons augmenter nos recettes, il faudra augmenter nos impôts ; alors dans ce cas, j'aime encore mieux le jeu régulier de l'amortissement.
L'amortissement consiste donc à régler ses dépenses de manière à pouvoir appliquer chaque année une certaine somme destinée à diminuer les charges dont la fortune publique est obérée ; j'applique ce système à la fortune du bon père de famille dont on a parlé, et je demanderai à tout le monde s'il est une seule personne qui puisse ne pas trouver sage et prudente une pareille conduite. Je demanderai donc que l'amortissement soit porté à 1 p. c.
M. de Mérode. - Je viens d'entendre M. Malou comparer l'administration des finances de l'Etat à celle d'un père de famille. Il n'est pas de père de famille qui consentirait à administrer ses finances propres comme on administre les finances de l'Etat, surtout comme on l'a fait depuis 1830.
Dans une famille, un père prudent restreint ses dépenses au niveau de ses ressources, tandis que dans un pays constitutionnel on ne s'occupe que de dépenser et on est obligé de dépenser énormément pour satisfaire à toutes les réclames.
Qu'en résulte-t-il ? C'est que la dépense est toujours portée aussi loin que possible. Or l'amortissement agit en silence, de manière à réduire quelque peu chaque année cet excédant de dépenses. Par ce motif, l'amortissement est très utile, et je suis disposé à le maintenir autant que possible.
J'ai encore été étonné d'entendre M. Malou prétendre que tous nos travaux publics exécutés au moyen des emprunts étaient un bienfait. S'il en est ainsi pourquoi les a-t-il combattus. Moi j'en ai toujours combattu l'exagération et je continuerai à la combattre. Je ne célébrerai pas ce que j'ai blâmé. Je crois que l'honorable membre a manqué de mémoire.
(page 184) - La discussion est close.
L'amendement de MM. Mercier, Osy et Dumortier est mis aux voix.
Il n'est pas adopté.
L'article 6 est mis aux voix et adopté.
« Art. 7. Avant leur émission, les obligations à créer en vertu de la présente loi seront visées par la cour des comptes. »
- Adopté.
« Art. 8. Un crédit de cent cinquante mille francs (150,000 francs) est ouvert au département des finances, pour les frais de confection et d'émission des nouveaux titres. »
M. le président. - Ici vient l'amendement proposé par M. Allard.
M. le ministre des finances (M. Liedts). - La simple lecture de l'amendement fait clairement voir qu'il n'a aucun rapport avec la loi de conversion. Le but de l'honorable membre est de relever de la déchéance prononcée par la loi les détenteurs de l'emprunt de 1848, qui n'ont pas fait l'échange de leurs récépissés dans le temps voulu. Il n'y a aucun rapport entre cette demande et le projet de conversion.
Je n'entends me prononcer ni pour ni contre l'amendement. Je prie l'honorable membre de le retirer, et de le représenter dans la discussion du budget des finances ou dans la discussion du budget de la dette publique. Il sera alors examiné avec attention.
M. Allard. - En présence de la déclaration de M. le ministre, je déclare retirer mon amendement ; je le reproduirai.
- L'article 8 est adopté.
« Art. 9. Le ministre des finances rendra aux chambres un compte détaillé de l'exécution des dispositions de la présente loi. »
- Adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi, qui est adopté à l'unanimité des 66 membres qui prennent part au vote ; deux membres (MM. F. de Merode et Dumortier) se sont abstenus.
Ont pris part au vote : MM. Osy, Pierre, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Roussel (A.), Rousselle (Ch.), Thiéfry, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (E.), Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Veydt, Vilain XIIII, Allard, Anspach, Brixhe, Cans, Clep, Coomans, Dautrebande, David, de Baillet (H.), de Breyne, de Denterghem, de Haerne, de La Coste, Delehaye, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de Naeyer, Dequesne, de Renesse, de Royer, de Ruddere, Desmaisières, de Steenhault, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, Dumon, Jacques, Jouret, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Loos, Maertens, Malou, Mascart, Mercier, Moreau, Moxhon, Orban, Orts et Delfosse.
- M. le président invite les membres qui se sont abstenus à motiver leur abstention.
M. de Mérode. - Je me suis abstenu, parce que si je trouve la réduction de l'intérêt avantageuse, je trouve nuisible la réduction de l'amortissement.
M. Dumortier. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs.
- La séance est levée à quatre heures et demie.