(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1852-1853)
(Présidence de M. Destriveaux, doyen d'âge.)
(page 3) M. de Mérorde-Westerloo, secrétaire provisoire, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Janssens, autre secrétaire provisoire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est adoptée.
- MM. Dechamps, Frère-Orban, Pirmez et T'Kint de Naeyer, admis dans la séance d'hier, prêtent serment.
M. Deliége, rapporteur de la troisième commission, fait le rapport ci-après sur l'élection de M. de Chimay, élu par le district électoral de Thuin. - Messieurs, comme nous avons eu l'honneur de vous le dire dans votre séance d'hier, les électeurs de l'arrondissement de Thuin, convoqués pour le 8 juin dernier, furent divisés en cinq sections.
Dans la première, deux électeurs avaient porté sur leurs bulletins ces mots : « Le prince Joseph. » A qui devaient être attribués ces deux suffrages ?
Le bureau les attribuait à M. le prince Joseph de Chimay.
Dans la deuxième section, M. le prince Joseph de Chimay obtient 226 voix et M. le prince Alphonse de Chimay 1 voix.
Trois suffrages inscrits comme suit : « De Chimay, Pre ou Pce, à Chimay », furent annulés comme ne contenant pas une désignation suffisante.
Une protestation fut à l'instant même déposée entre les mains du président de la deuxième section. Cette protestation est ainsi conçue :
« Je réclame contre la décision du bureau, rejetant, comme ne contenant pas une désignation suffisante, trois bulletins portant : « M. de Chimay (pre). » Je fonde ma réclamation sur ce qu'évidemment l'auteur du bulletin a désigné de Chimay (prince) et sur ce qu'en tout cas le prince de Chimay est le seul qui a le titre de de Chimay ; le prince Alphonse n'a droit à ce titre qu'en faisant précéder le nom de Chimay de son prénom, ainsi que cela résulte de l'arrêté royal lui accordant le titre de prince et la notoriété publique.
« Jul. Despret, not. »
Dans la troisième section, M. le prince Joseph de Chimay obtint 126 voix.
M. le prince Alphonse de Chimay, 27.
Un suffrage ainsi conçu : « Le prince de Chimay » fut annulé comme ne contenant pas une désignation suffisante.
La protestation suivante fut déposée entre les mains du président du bureau :
« Le soussigné déclare protester et faire toutes ses réserves, quant à la décision prise par les président et membres composant le bureau électoral du canton de Beaumont, laquelle déclare nuls les bulletins portant les noms du prince de Chimay sans autre qualification.
« Cette protestation est fondée sur ce que cette qualification seule est suffisante et valable, sur ce que l'alné seul dans les familles princières porte le nom de la maison, sur ce que ce n'est qu'aux autres membres de prénom.
« Que cela est d'autant plus vrai que lors de la confirmation des titres de la famille de Chimay, c'est sous celui de prince de Chimay qu'est désigné l'alné, le prince Joseph ; qu'il en est tout autrement, quant à la confirmation des titres du prince Alphonse ; que là l'arrêté l'a spécialement désigné sous le titre de prince Alphonse de Chimay ; que pour lui le titre n'est qu'à vie ; que tous les jours la chambre des députés et tous les pouvoirs de l'Etat ne donnent d'autre qualification au prince Joseph de Chimay, que celle de prince de Chimay.
« D'après ces considérations et ces motifs, le soussigné déclare protester contre la nullité des bulletins dont s'agit, et il demande au bureau acte de ses dires et réserves pour y être ultérieurement fait droit comme il appartiendra.
« F. Feron. »
Dans la quatrième section, M. le prince Joseph de Chimay obtint 194 suffrages.
M. le prince Alphonse de Chimay 18 suffrages.
Dans la cinquième section, M. le prince Joseph de Chimay obtint 78 suffrages, « y compris (est-il dit dans le procès-verbal) 2 suffrages énoncés en ces termes : M. le prince de Chimay ; suffrages que le bureau a, à l'unanimité, attribués s M. le prince Joseph de Chimay, aucun autre candidat du nom de de Chimay n'étant sur les rangs. Cette décision a été prise sur la réclamation de M. Augustin Leleux, bourgmestre d'Erquelinnes, qui a paraphé, avec les membres du bureau, les deux bulletins contenant lesdits suffrages. Ces deux bulletins resteront annexés au présent procès-verbal. »
Dépouillement fait par le bureau principal, il fut constaté que le nombre de bulletins valables s'élevait, pour les 5 sections, à 1,561
Que la majorité absolue était de 781
Et que M. le prince Joseph de Chimay avait obtenu 781 voix, y compris les deux suffrages ainsi conçus : « M. le prince de Chimay » que la section lui avait comptés.
Votre troisième commission a dû nécessairement se demander si l'indication contenue dans ces bulletins était suffisante ; ou s'il y avait lieu à l'application de l'article 34 de la loi électorale qui dit :
« Sont nuls tous les suffrages qui ne contiennent pas une désignation suffisante. »
Cette question a été examinée avec l'attention qu'elle mérite.
Nous savons qu'il ne faut pas facilement annuler une élection, qu'il ne faut recourir aux électeurs pour savoir ce qu'ils ont voulu que lorsqu'il y a des doutes fondés à cet égard.
Mais vous reconnaîtrez aussi, avec votre troisième commission, que la chambre ne doit admettre dans son sein que ceux qui ont été incontestablement élus par la majorité du corps électoral.
Cette règle est admise dans tousles gouvernements constitutionnels : elle est élémentaire.
Après une longue discussion, votre commission vient vous proposer,, par 5 voix contre 2, de charger le gouvernement de prendre des renseignements dans l'arrondissement de Thuin.
L'enquête porterait sur la question de savoir s'il est de notoriété publique que la qualification de prince de Chimay, sans autre désignation, ne peut s'appliquer qu'au prince Joseph de Chimay.
Voici les motifs de cette proposition.
Il est assez évident que dans l'arrondissement de Thuin, au moins, on attribue le titre de prince, non seulement à M. Joseph de Chimay, mais encore à M. Alphonse de Chimay, ce qui se prouve :
D'abord par plus de 700 suffrages donnés au premier dans lesquels les électeurs ont cru devoir ajouter le prénom (Joseph) au nom de famille (prince de Chimay).
Ce qui se prouve ensuite par 46 suffrages donnés à M. Alphonse de Chimay, dans lesquels ou lui a expressément attribué le titre de prince.
Ce qui se prouve en troisième lieu par un arrêté de 1835 d'une puissance voisine, qui a conféré à M. Alphonse de Chimay le litre de prince.
Ce qui se prouve enfin par la décision de deux bureaux de section qui ont déclaré cette désignation « le prince de Chimay » insuffisante.
Une seule section, la cinquième, a cru que la désignation était suffisante. Elle a dit pourquoi.
C'est parce qu'aucun autre candidat du nom de Chimay n'était sur les rangs.
Les membres de la cinquième section ignoraient sans doute que 46 suffrages avaient été donnés dans les autres sections au prince Alphonse de Chimay et qu'un certain nombre d'électeurs avaient ainsi clairement manifesté leur intention, peut-être contre son gré, d'opposer sa candidature à celle du prince Joseph. Si elle l'avait su, il est probable qu'elle aurait agi autrement.
Nous n'examinerons pas la question de savoir si M. Alphonse de Chimay a le droit de porter en Belgique le titre de prince, s'il a dû remplir et s'il a rempli certaines formalités à cette fin.
Il me paraît suffire d'avoir prouvé que, dans le pays, il y a plusieurs personnes à qui l'on donne le titre de prince de Chimay.
Que dans l'arrondissement de Thuin, entre autres, on le donne à deux personnes au moins ; ce qui résulte à l'évidence de la notoriété publique et même des bulletins déposés par les électeurs présents le 8 juin dernier ainsi que des autres pièces que nous avons rappelées.
En général, on donne, dans le langage ordinaire, le titre de prince anx fils de prince.
On donne encore ce titre que conférait anciennement la possession de certaines terres seigneuriales ; quoique aujourd'hui il est impossible de remplir la condition que doit remplir le titulaire : celle de faire relief. C'est une manière de nommer, de désigner les possesseurs de ces terres, admise non dans le langage légal, qui n'est pas celui des électeurs, mais dans le langage usuel dont ils se servent.
S'il est évident que l'on donne dans l'arrondissement de Thuin et ailleurs encore le titre de prince de Chimay à deux personnes au moins ; si, en général, on croit devoir désigner, et si l'on désigne en effet ces personnes par leurs prénoms, ce qui résulte clairement des pièces qui ' ont servi à l'élection du 8 juin, il est impossible de décider à laquelle de ces deux personnes on doit attribuer un suffrage qui contient une désignation applicable à toutes deux.
Ces motifs, messieurs, militent pour la non-admission du prince Joseph de Chimay.
Votre troisième commission a cru qu'ils étaient au moins suffisants pour requérir le gouvernement de procéder à une enquête.
M. Malou. - Messieurs, la discussion sur le rapport que vous venez d'entendre ne comporte pas de grandes proportions. En effet, je crois qu'il est facile d'établir en peu de mots que les motifs de (page 4) l'ajournement ne sont pas sérieux et qu'en partie ils ne sont pas dignes de la chambre.
J'ai dit que ces motifs en partie ne sont pas dignes de la chambre, parce qu'en supposant qu'il y eût lieu à faire une information, ce n'est évidemment pas au gouvernement que ce pouvoir devrait être confié. Il est dans la nature des choses, il est dans notre droit et dans nos usages de vérifier nous-mêmes complètement les pouvoirs des membres de la chambre. Je crois ne pas devoir insister sur cette considération : il me paraît évident que c'est à la chambre à procéder à l'information, s'il y a lieu réellement à une information.
Maintenant y a-t-il lieu de procéder à une enquête pour savoir si les bulletins portant la désignation : « le prince de Chimay », doivent être attribués au prince Joseph de Chimay ? Voilà, messieurs, dans toute sa simplicité, la question que soulève le rapport.
On reconnaît que dans les actes officiels, authentiques, qui constituent l'état du prince Joseph de Chimay, il est désigné sous ce titre : le prince de Chimay ; on reconnaît que légalement il a le nom de prince de Chimay. Voilà un premier point. Mais il y a plus : on reconnaît que nul autre que lui n'a le droit de porter le nom de prince de Chimay seul, que nul autre que lui n'a droit de signer : le prince de Chimay ; il a donc la désignation qui lui donne son état dans la société, et cette désignation ne peut s'appliquer qu'à lui seul.
Y a-t-il une autre personne en droit de signer, dans les actes de la vie civile, « le prince de Chimay », sans autre désignation ? Cela est résolu par le rapport : il n'y en a pas. Vous ordonneriez une information sur la question de savoir s'il y a une autre personne en droit de signer le prince de Chimay, sans autre désignation ; tandis que vous trouvez la question résolue dans les documents que vient d'analyser l'honorable rapporteur de la commission.
Il y a plus : vous ordonneriez cette information contre des actes officiels. Je tiens en mains la liste electorate de 1847, et un de mes honorables amis,qui faisait partie de la commission de vérification des pouvoirs a constaté que la liste officielle, affichée dans la salle, porte la même désignation que celle dont je vais donner lecture à la chambre : prince de Chimay (sans autre désignation), prince de Chimay, né le 10 aoùt 1808.
Ainsi, en 1847 et depuis lors, le prince de Chimay est porté sur la liste électorale officielle, arrêtée par l'autorité, et sur laquelle seule on puisse établir des réclamations, est désigné, dis-je, sous la simple désignation « prince de Chimay », sans autre qualification ; et le nom qui suit immédiatement est celui du prince Alphonse de Chimay ; et la même indication se retrouve depuis 1847 jusqu'aujourd'hui sur la liste, base de l'élection.
Que vous propose-t-on ? On vous propose de mettre en doute le bulletin d'un électeur qui a copié la liste électorale qui doit être affichée dans la salle pour que l'électeur sache si son suffrage est valable. Voilà la proposition qu'on vous soumet en ce moment. Je dis que si la chambre en présence de ces faits, de ce droit existant, admettait qu'une enquête dût être faite par elle ou pa rle gouvernement, il n'y aurait plus de vérification de pouvoir sérieusement possible.
Je demande qu'on mette aux voix l'admission du prince Joseph de Chimay.
- Plusieurs membres. - Aux voix ! aux voix !
M. de Brouckere. - Je crois qu'on doit mettre d'abord aux voix les conclusions de la commission ; si la majorité se prononce contre, on mettra ensuite aux voix l'admission du prince Joseph de Chimay.
- Les conclusions de la commission sont mises aux voix ; elles ne sont pas adoptées.
L'admission de M. le prince Joseph de Chimay est ensuite mise aux voix et prononcée.
M. de Chimay prête serment.
M. le président. - Nous allons procéder à la nomination du bureau définitif.
M. Lesoinne (pour une motion d’ordre). - Je demande la parole pour une motion d'ordre, On a dit que le ministère voulait faire de la nomination du président une question de cabinet. Je demande que le gouvernement s'explique ; je ne comprends pas une question de cabinet résolue par un scrutin secret. (Interruption.)
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je demande à donner quelques explications. J'en prends au besoin l'initiative, et je pense qu on n'a pas le droit de m'interdire la parole en cette circonstance.
Un assez grand nombre de représentants m'ont demandé s'il était vrai que le cabinet attachât son existence au résultat du vote de la chambre, pour la nomination du président ; s'il était vrai que l'on transformât ce vote de la chambre en une question de cabinet.
Voici la réponse que j'ai faite à ces membres de la chambre qui m'ont interpellé :
Si l'honorable président qui dirige les travaux de la chambre depuis cinq ans ne rencontre plus une majorité suffisante, le gouvernement pense que la majorité qui ferait défaut à l'honorable président lui fera également défaut ; que la majorité libérale ne sera plus suffisante pour lui au sein de la chambre.
En faisant cette déclaration, nous constatons un fait, et nous ne faisons que suivre les précédents d'autres pays parlementaires.
On a été plus loin. On a dit que le gouvernement faisait de la nomination du président une question de confiance, en ce sens que si la majorité de la chambre nommait l'ancien président, cela signifierait que cette majorité a confiance dans le cabinet, aussi bien dans son passé que dans son avenir. Eh bient cette conséquence est fausse, et ce n'est pas du tout ainsi que nous l'entendons.
Il serait parfaitement déraisonnable d'exiger à l'avance un vote de confiance sur des actes qui ne sont pas encore exposés à la chambre. Votre ancien et honorable président lui-même ne voudrait pas, j'en suis sûr, d'une pareille solidarité.
Nous ne voulons nullement nous abriter derrière la nomination du président. Si le président est nommé, nous ne voulons pas nous en prévaloir quant aux votes ultérieurs que nous provoquerons de la part de la chambre. Nous demanderons à la chambre d'exprimer sa confiance on sa défiance en termes formels et nullement d'une manière ambiguë.
Voici en quel sens on a pu dire que nous faisions de la nomination du président une question de cabinet.
Si la majorité fait défaut au président, je le répète, cette majorité doit faire également défaut au cabinet et dès lors notre ligne de conduite est toute tracée. Si, au contraire, la majorité qui autrefois nommait le président et qui, je le reconnais, se trouve amoindrie par le résultat des dernières élections, si cette majorité est encore suffisante pour la nomination du président, nous continuerons de chercher à marcher avec l'appui de cette majorité.
M. de Theux. - Je désire seulement faire une réserve relativement à ce qui vient de se passer. Il est parfaitement dans les usages parlementaires que lorsque le candidat du ministère qui est porté à la présidence ne réunit pas la majorité des suffrages, le ministère croit devoir se retirer ; nous en avons vu plusieurs exemples. Mais ce qui est tout à fait contraire aux usages parlementaires, et ce que je désire ne plus voir se reproduire, c’est une discussion préalable au vote sur la personne à élire.
Nombre des votants, 103.
Billets blancs, 3.
Bulletins valables, 100.
Majorité absolue, 51.
M. Delehaye obtient 54 voix.
M. Verhaegen obtient 46 voix.
En conséquence, M. Delehaye est proclamé président.
M. Delehaye. - Messieurs, je suis extrêmement touché de la marque de sympathie que vous venez de me donner. En toute autre circonstance, j'accepterais ce témoignage avec une profonde gratitude ; mais en présence de la candidature d'un ami, dont la chambre à constamment applaudi l'impartialité, vous comprenez que je ne puis pas accepter. Je vous remercie de nouveau de cette marque de confiance, mais je ne puis pas accepter l'honneur que vous venez de me faire.
M. le président. - M. Delehaye, dont vous avez entendu les touchantes paroles, renonce à l'honneur que la chambre lui avait conféré. Maintenant, que doit faire le bureau, relativement à la nomination du président ?
- Plusieurs membres. - A demain !
- D'autres membres. - Non ! non ! de suite ! de suite !
M. Rodenbach. - Je demande qu'on remette le vote à demain.
M. Orts. - Je ne vois pas le moindre motif pour remettre les opérations électorales à demain. Il est incontestable que la majorité qui a porté l'honorable M. Delehaye, comme tous ceux qui siègent dans cette enceinte, ne pouvaient avoir le moindre doute sur le résultat qui vient de se produire.
M. de Mérode. - Messieurs, je ne suis pas du tout de l'opinion de l'honorable préopinant. Lorsque je nomme quelqu'un président, je suppose qu'il acceptera. Sans cela je ne le nommerais pas. Ce n'est pas une parade que l'on doit faire.
Maintenant, comment pourrait-on s'entendre pour nommer une autre personne ? Il est impossible, à l'instant même, de combiner une nomination quelconque. (Interruption.) Il est nécessaire que l'on cherche à s'entendre pour la nomination d'un président. (Nouvelle interruption.) Il est impossible de faire autrement, car vous seriez plusieurs jours à procéder à une nomination, si vous ne vous entendiez pas d'avance : il y aurait 10 voix d'un côté, 5 d'un autre, 8 d'un autre, et vous seriez obligés de recommencer indéfiniment.
Je dis qu'il est impossible de se décider en ce moment pour un président quelconque. Quant à moi, si on me force de voter aujourd'hui, je mettrai un billet blanc.
M. Manilius. - Messieurs, notre honorable président ne doit certainement pas être rappelé au règlement ; mais lorsqu'on entend d'honorables membres de cette chambre, entre autres l'honorable députe de Nivelles dire qu'il faut s'entendre pour la nomination d'un président, je dis que c'est aller au-delà du règlement. L'article 9 du règlement ne dit nullement qu'il faut s'entendre ; le règlement dit que... (interruption), (page 5)
Nous devons former immédiatement le bureau,et je prie notre honorable président d'âge de vouloir bien faire procéder à un nouveau serutin, comme l’exige le règlement, car il va de soi que l'on est libre de refuser un mandat.
Je demande done que toute discussion cesse.
- Il est procédé à un second scrutin pour la nomination du président.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre des votants, 102.
3 billets blancs, ce qui réduit à 99 le nombre des billets valables.
Majorité absolue, 50.
M. Verhaegen a obtenu 50 suffrages.
M. Delehaye a obtenu 48 suffrages.
M. Ch. de Brouckere a obtenu 1 suffrage.
En conséquence, M. Verhaegen, avant obtenu la majorité absolue des suffrages, est proclamé président de la chambre des représentants.
M. Verhaegen. - Messieurs, lorsque pour la sixième fois, quoique déjà très fatigué, j'ai accepté la candidature que mes amis politiques m'avaient fait l'honneur de m'offrir, j'ai obéi aux exigences de mon parti.
C'est à mon grand regret et sans ma participation que le ministère a posé la question de cabinet au sujet de ma réélection, et j'allais m'en expliquer devant la chambre lorsque M. le ministre de l'intérieur vint nettement déterminer la nature de la lutte qui se préparaît. Ce n'était plus alors la personne du président qui était en jeu, c'était une question de principe que l'on voulait agiter. On voulait s'assurer si le libéralisme personnifié dans l'ancien président avait encore une majorité dans l'assemblée.
Ce principe vient d'être gravement entamé par le premier vote.
Un second vote m'appelle de nouveau à la présidence ; mais comme je ne veux pas laisser entamer mon individualité, je refuse. (Interruption.)
M. le président. - J'invite les tribunes à ne pas faire de manifestations.
M. de Steenhault. - Je demande qu'on suspende la séance pendant une heure ou une demi-heure et qu'on procède ensuite à un nouveau scrutin pour la nomination du président.
M. Orban. - Je m'oppose à la proposition de l'honorable préopinant. Il n'y a qu'un instant, quand après la non-acceptation de M. Delehaye, nous étions sans candidat, nous avons demandé l'ajournement du scrutin, la chambre n'a pas voulu y consentir ; admettre maintenant la proposition de M. de Steenhault serait avoir deux poids et deux mesures.
M. de Steenhault. - Je n'ai ;pas demandé d'ajournement, mais seulement une suspension d'une demi-heure, ce qui est bien différent.
M. Lelièvre. - Je pense qu'il est important de continuer les opérations ; il est impossible de laisser tout en suspens, et la dignité de la chambre est intéressée à ce qu'il soit pris immédiatement une décision. Je pense donc qu'il convient de procéder immédiatement à l'élection du président ; tout retard me semble devoir donner lieu à des inconvénients réels qui doivent être évités.
M. Roussel. - Tous les amis du régime parlementaire doivent gémir de ce qui se passe dans cette enceinte ; une grave responsabilité pèse sur ceux qui ont commencé cette situation. En combattant parfois mes propres amis afin de les forcer à rester dans les bornes de la justice et de l'impartialité à l'égard de la droite, je me suis exposé à une sorte de discrédit dans mon propre parti ; mais, je dois le déclarer, cette fois, j'ai désapprouvé, comme je désapprouve formellement ce qui vient de se passer. M. Verhaegen ne méritait pas ce qui lui est arrivé.
Il faut que le pays sache que le motif qui a déterminé certains membres à ne plus donner leur voix à M. Verhaegen est un motif extra-parlementaire.
C'est un fâcheux précédent de voir certaines considérations extra-parlementaires influer sur les décisions de la chambre. Si l'on n'avait pris pour point de départ que les faits qui se sont passés au sein même de la chambre, il est certain que M. Verhaegen aurait eu une immense majorité, puisque tout le monde est obligé de reconnaître qu'il a siégé au fauteuil avec impartialité et convenance.
M. de Theux. - La loi électorale défend toute discussion dans les bureaux préalablement à l'élection, et c'est la chambre des représentants qui a fait la loi électorale qui donnerait le scandale d'une discussion préalablement au vote pour la nomination de son président ! Je demande qu'il n'y ait plus de discussion: s'il s'en élève de nouveau, je demanderai le rappel au règlement.
M. Roussel. - Ce n'est pas sur une élection à faire que j'ai pris la parole, car il n'est plus question de l'élection de M. Verhaegen. C'est pour la justification de la minorité, c'est pour exprimer le regret de la position cruelle qu'on a faite à la chambre, que j'ai pris la parole.
M. Devaux. - On vient de dire qu'aucune discussion ne peut avoir lieu sur et avant une élection ; mais ce qui est en cause, c'est la question de savoir si nous continuerons les opérations pour la nomination du bureau définitif. Il est de l'intérêt de toutes les opinions qu'on ne fasse que des choses sérieuses ; or il est impossible, dans l'état actuel, de faire quelque chose de sérieux. Que va-t-il arriver ? On va continuer à porter d'un côté M. Delehaye qui a refusé, et de l'autre M. Verhaegen qui vient de refuser aussi.
Voilà ce qu'on va faire de part et d'autre ; est-ce là une chose sérieuse faite pour conserver la considération du gouvernement parlementaire ? Ne doit-elle pas avoir pour effet de la déconsidérer ? Laissons à ebaena le temps de la réflexion et ajournons les affaires à demain.
- Le renvoi à demain est prononeé.
La séance est levée à 4 heures et demie.