(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 1525) M. Ansiau fait l'appel nominal à 2 heures et 1/2.
La séance est ouverte.
M. de Perceval lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
M. Ansiau présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.
« Le sieur Sohest, ancien militaire, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir un emploi ou une augmentation de pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Aulagnier, de Paris, fait hommage à chambre d'un exemplaire d'un ouvrage intitulé : Recherches sur l'administration du chemin de fer belge. »
- Dépôt à la bibliothèque.
M. Moreau, au nom de la commission des naturalisations, dépose plusieurs rapports sur des demandes de naturalisation.
M. Roussel, au nom de la commission spéciale qui a examiné le projet de révision des deux premiers livres du Code pénal, dépose le rapport sur ce projet.
- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports.
M. le président. - M. Jacques a déposé une proposition de loi très volumineuse sur l'organisation militaire. Toutes les sections en ont autorisé la lecture.
Le jour où les développements de cette proposition seront présentés sera ultérieurement fixé.
M. le président. - Une proposition de loi vient d'être déposée. Les sections seront convoquées demain pour autorisation de lecture.
M. le président. - L'ordre du jour appelle en premier lieu la discussion sur les amendements introduits par le sénat dans le projet de révision du régime hypothécaire.
En raison de l'absence de M. Lelièvre, rapporteur, la discussion est, à la demande de M. le ministre de la justice, renvoyée à demain.
M. Osy (pour une motion d’ordre). - J'ai déposé aujourd'hui sur le bureau un ouvrage très intéressant d'un de mes amis de Paris sur le chemin de fer. Je prie la chambre d'en ordonner le dépôt à la bibliothèque et de faire adresser par la questure des remerciements à l'auteur.
M. le président. - C'est déjà fait ; l'ouvrage a été analysé, et ce que vous demandez a été ordonné par la chambre.
M. Bruneau. - Messieurs, je ne demande pas la parole pour parler sur le budget des affaires étrangères proprement dit, mais seulement pour demander à M. le ministre des affaires étrangères des renseignements sur un objet qui rentre dans ses attributions.
Vous vous rappelez peut-être, messieurs, qu'il y a quelques mois une polémique assez vive s'est engagée dans les journaux, relativement à la manière dont les courtiers de commerce à Anvers exercent leurs fonctions.
Il paraît qu'à Anvers des courtiers de commerce, contrairement aux stipulations formelles du Code de commerce, se mêlent d'opérations commerciales pour leur propre compte.
S'il ne s'agissait ici que d'une affaire d'intérêt local ou de police, je n'en occuperais pas la chambre, mais il y a là un intérêt général. En effet, les courtiers de commerce doivent servir d'intermédiaire entre les vendeurs et les acheteurs, non seulement de la ville où ils résident, mais encore de tout le pays ; les courtiers de commerce forment la cote officielle des marchands. ; cette cote officielle sert de régulateur à tous les commerçants étrangers et du pays pour faire leurs achats.
C'est ainsi qu'un négociant qui doit acheter du café ou des épiceries se rapporte à la cote officielle pour faire la commande et pour se déterminer dans ses achats. Vous comprenez que du moment où les courtiers de commerce ont un intérêt direct et personnel dans ces opérations, ils peuvent former la cote sous l'influence de ces mêmes intérêts, parce qu'ils peuvent faire des achats plus ou moins considérables en vue des commandes qu'ils reçoivent de la part des maisons étrangères.
Ils connaissent d'avance leurs acheteurs et ils peuvent eux-mêmes former la cote en conséquence. C'est là un abus nuisible au commerce et aux négociants de tout le pays.
Je demande donc à M. le ministre des affaires étrangères si en effet cet abus existe, si son intention a été attirée sur ce point et s'il ne croit pas nécessaire de prendre des mesures pour le réprimer. Il faut supprimer les courtiers, ou bien il faut qu'on les fasse rentrer dans leurs attributions. Le Code de commerce interdit formellement aux courtiers de faire des opérations de commerce pour leur propre compte sous peine de destitution et d'amende.
Je prie M. le ministre des affaires étrangères de vouloir bien prendre les mesures qu'il croira nécessaires si l'abus que j'ai signalé existe en effet.
M. Osy. - Effectivement, comme on vient de le dire à la chambre, il y a quelques mois que les journaux d'Anvers se sont occupés de cette question. Mais la chambre de commerce d'Anvers s'en est occupée, et l'on a fait cette affaire plus grave qu'elle n'est. Les courtiers de commerce ne peuvent assurément exercer d'autres attributions que celles pour lesquelles le gouvernement les a nommés. Mais l'article que nous avons vu dans les journaux contient des accusations qui n'ont aucun fondement. On les a accusés de prendre des parts d'intérêts dans des société anonymes. Ce n'est pas contraire. S'ils étaient directeurs d'une société anonyme, ce serait contraire a la loi. Mais avoir une part dans une société anonyme, dans un navire sans être directeur, je ne vois là rien de contraire à la loi.
Nous a|ons vu un abus que le gouvernement a toléré longtemps, c'est, par exemple, un agent de change qui était trésorier d'une banque. Certainement cela était contraire à la loi ; mais s'intéresser comme bailleur de fonds dans une société anonyme, sans s'occuper en rien de la direction, je crois qu'il n'y a là rien de répréhensible, et que le gouvernement ne pourrait pas l'empêcher.
M. Bruneau se plaint que des courtiers auraient fait des affaires pour leur compte. De tout temps les affaires se sont faites ainsi : un courtier se charge, par exemple, d'une cargaison entière de café, c'est-à-dire qu'il prend l'engagement de trouver des acheteurs dans la journée ou dans la huitaine. Ce n'est pas là faire des affaires pour son compte, et je crois qu'il n'y a rien en cela qui soit contraire au Code de commerce. Or, c'est principalement sur ce point qu'ont porté les accusations.
L'attention de M. le ministre de la justice a été appelée sur cette affaire, et je crois qu'il pourra donner tous les éclaircissements désirables. Quant à moi, je demande que le gouvernement tienne la main à l'exécution des lois, mais je crois que les accusations formulées portent sur des faits qui ne sont nullement contraires au Code de commerce. J'attendrai du reste les explications de M. le ministre de la justice qui doit parfaitement counaître les choses.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - En effet, messieurs, le gouvernement a été informé, il y aplusieurs mois, qu'un courtier de commerce d'Anvers avait un intérêt dans un navire de mer. Je me suis empressé d'adresser une circulaire à toutes les chambres syndicales pour prémunir les courtiers contre les conséquences qui pourraient résulter d'une contravention de cette nature au Code de commerce, et, en même temps j'ai invité les chambres syndicales de veiller attentivement à l'observation des dispositions du Code de commerce.
Je crois que les dispositions du Code du commerce sont beaucoup plus strictes que ne vient de le dire l'honorable préopinant. L'article 85 du Code de commerce défend aux agents de change et courtiers de faire des opérations de commerce ou de banque et de s'y intéresser en aucune manière, et l'article 87 commine des pénalités, qui sont la destitution et une amende de 3,000 fr. ou plus contre les contraventions à l'article 85. Les courtiers qui contreviendraienl à l'article 85 sont donc dûment avertis et ils s'exposeront à toutes les conséquences prévues par l'article 87.
M. Bruneau. - Mon interpellation n'a pas porté spécialement sur le fait auquel vient de faire allusion M. le ministre des affaires étrangères. Je ne connaissais pas ce fait, et je déclare que je ne connais ni personnellement, ni même de nom, le courtier dont il s'agit. Mes observations ont une imporlance beaucoup plus grande, et ce que vient de dire l'honorable M. Osy le prouve.
L'honorable M. Osy croit qu'il n'est pas interdit aux courtiers d'acheter, par exemple, une cargaison de café, sauf à trouver ensuite des acheteurs dans les 8 ou 15 jours ou 3 semaines ; eh bien, ces opérations sont défendues par le Code de commerce et elles peuvent donner lieu aux plus graves abus.
En effet, messieurs, le courtier est institué par la loi pour servir d'intermédiaire entre l'acheteur et le vendeur ; c'est l'homme que la loi investit d'un mandat de confiance, pour garantir les intérêts des acheteurs étrangers. C'est parce que les acheteurs étrangers ne se trouvent pas dans la localité où le marché se fait, et que dès lors ils ne peuvent pas débattre leurs intérêts, que la loi leur a donné un intermédiaire qui pût débattre ces intérêts.
(page 1526) Vous comprenez, messieurs, que si le courtier se fait acheteur directement lui-même, il a intérêt à vendre le plus cher possible ; il joue toujours à coup sûr ; les acheteurs sont complètement à sa merci. En effet, la maison étrangère qui a confiance en lui, lui transmet ses ordres, et ses ordres portent toujours une certaine limite en plus et en moins, en laissant au courtier le soin d'obtenir le moindre prix possible.
Eh bien, lorsqu'il a des ordres suffisants pour acheter une cargaison, il achète pour son propre compte ; il est sûr d'avance d'avoir un acheteur à un prix déterminé, et son intérêt est de porter l'opération au prix le plus élevé.
C'est là, messieurs, l'origine d'un abus très grave. Et ce que vient de dire l'honorable M. Osy me prouve que les opérations illégales contre lesquelles je m'élève se font réellement à Anvers, parce qu'on ne les y considère pas comme contraires à la loi. Je prie M. le ministre des affaires étrangères de prendre des renseignements, et si l'abus existe, de prendre des mesures pour le réprimer sévèrement.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, le ministre de la justice n'est intervenu dans cette affaire qu'à raison de la question de savoir si un courtier de commerce pouvait ou non prendre une part d'intérêt dans l'armement d'un navire. Le ministre de la justice, consulté sur cette question, n'a pas hésité à déclarer que le courtier ne pouvait pas prendre une part d'intérêt dans l'armement d'un navire.
Aux termes de l'article 85, un agent de change ou un courtier ne peut, en aucun cas et sous aucun prétexte, faire une opération de commerce ou de banque pour son compte. Voilà le texte de l'article 85. Toute la question est donc de savoir si l'achat d'un navire constitue, oui ou non, un acte de commerce, si c'est un acte de commerce dans le sens de l'article 85. (Interruption.)
L'honorable M. Osy fait un signe négatif ; je pose d'abord, comme résultant du texte de la loi, que l'article 85 défend au courtier de faire des actes de commerce. Or, si l'affrètement, la vente ou l'achat d'un navire est un acte de commerce, une opération commerciale, il est évident pour moi qu'un courtier ne peut pas la faire. Or, que porte l'article 633 du Code de commerce :
« Art. 653. La loi répute pareillement actes de commerce : Tout entreprise de construction ou tous achats, ventes et reventes de bâtiments pour la navigation intérieure ou extérieure. Toutes expéditions maritimes.»
Après cela quel a été le but, quel est l'esprit de la loi ? Car c'est à cela qu'il faudrait recourir, si le texte offrait quelque obscurité.
Le courtier est l'homme de confiance obligé du public. La loi qui force le public a s'adresser à cet homme de confiance obligé, a voulu prendre des précautions pour que la solvabilité de cet agent restât à l'abri de toute espèce d'éventualité. C'est parce que les entreprises commerciales sont beaucoup plus chanceuses que toutes les autres, que la loi a voulu qu'il ne pût s'engager dans des opérations de cette nature. C'est comme garantie vis-à-vis du public que la loi a prononcé cette interdiction.
L'honorable M. Osy fait des signes négatifs ; a-t-il la prétention de connaître mieux l'esprit de la loi que ceux qui l'ont étudiée en raison même de la question dont il s'agit ?
Je ne recherche pas ce qui s'est passé à Anvers ; je traite la question de savoir si un courtier de commerce peut s'engager à prendre une part d'intérêt dans une affaire commerciale, et subsidiairement, j'examine si le fait de prendre une part d'intérêt dans l'achat d'un navire constitue un acte de commerce.
Il m'est démontré que c'est là un acte de commerce, que le courtier ne peut pas le faire, qu'il ne peut pas davantage acheter pour son compte, acheter pour revendre, une cargaison, car cela constitue bien un acte de commerce, et la loi lui interdit toute espèce d'acte de commerce. Cela me paraît à l'abri de toute discussion sérieuse.
M. Osy. - Si le courtier s'intéressait dans l'affrètement d'un navire, je conçois que ce serait un acte de commerce ; mais un courtier n'a rien à faire avec l'affrètement et l'expédition ; en prenant une part dans un navire, il ne fait pas un acte de commerce, il met ses capitaux dans cette affaire, c'est un placement, rien de plus. S'il était le directeur de cet armement, je conviens qu'il ferait acte de commerce ; mais il n'a rien à y voir que comme actionnaire. Si c'était une société anonyme dont les obligations fussent au porteur, ne pourrait-il pas avoir de ces obligations ? S'il fait partie d'une société en commandite de 8 ou 10 personnes, s'il a un huitième ou un dixième d'intérêt dans un navire, je crois qu'il ne fait pas un acte de commerce, je suis sûr que les tribunaux ne lui interdiraient pas un acte de cette nature.
Je termine en demandant qu'on exécute les lois telles qu'elles existent. Je ne veux favoriser aucun abus. La dénonciation qui a eu lieu n'était pas fondée. Dans l'affaire dont il s'agissait, l'affrétement n'avait pas été fait par un courtier, mais par un particulier ; l'abus dont on se plaignait n'existait pas.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ne puis pas accepter la doctrine de l'honorable M. Osy. Si je me lève de nouveau pour la combattre, c'est que je suis bien décidé à la soumettre aux tribunaux et à poursuivre tout courtier qui interviendra directement ou indirectement dans des actes de commerce. Ce qui donne à un acte le caractère d'un acte de commerce, c'est moins la qualité des individus qui y prennent part, que la nature de l'acte ; un courtier peut poser un acte qui n'est pas un acte de commerce, de même qu'un non commerçant peut poser des actes de commerce. C'est ainsi que moi, qui ne suis pas commerçant, si j'achetais un navire je ferais un acte de commerce et je serais justiciable des tribunaux de commerce.
M. Osy. - Je demande la parole sur un autre objet.
Messieurs, le gouvernement des Pays-Bas a accordé à une société le barrage de l'Escaut oriental. Une société vient de se former pour exécuter cette grande entreprise de barrer l'Escaut entre Balz et la terre ferme. Le commerce et la ville d'Anvers se sont émus en apprenant cette concession, ils ont craint que l'écoulement des eaux de l'Escaut ne fût entravé quand ce bras des eaux intérieures serait barré. Le gouvernement des Pays-Bas a donné à la société la concession d'un canal de Batz à l’île de Walcheren avec péage.
Cependant, depuis 1842, après la paix avec la Hollande, nous avons obtenu une convention internationale avantageuse qui nous permet de naviguer sans aucune espèce de péage. Si cette affaire réussit, si le barrage de l'Escaut oriental et le canal projeté s'exécutent, il est à craindre non seulement que l'écoulement des eaux soit entravé, mais que notre navigation soit soumise à un péage préjudiciable au commerce d'Anvers.
La chambre de commerce et la population d'Anvers ont demandé que le gouvernement nommât une commission pour examiner les deux points dont je viens de parler.
Je demanderai à M. le ministre de vouloir bien dire si la commission a achevé son travail, et s'il résulte de son examen que la convention internationale sera entièrement respectée et qu'il n'y a rien à craindre pour l'écoulement des eaux.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - L'affaire dont vient de vous entretenir M. Osy date de plusieurs années. Dès l'origine, le gouvernement s'en est préoccupé. Une commission a été instituée pour examiner cette question fort importante ; elle était présidée par le gouverneur de la province d'Anvers. Elle a adressé son rapport au ministre des travaux publics qui l'avait instituée à la demande du ministre des affaires étrangères. Une autre question a été soulevée, celle de savoir si, quand il s'agit de modifications apportées au régime des eaux intermédiaires entre le Rhin et l'Escaut, il ne faut pas qu'il y ait accord préalable entre les deux gouvernements. Cette opinion, nous l'avons soutenue ; elle a fait l'objet d'un échange de notes diplomatiques entre le cabinet de la Haye et le gouvernement belge.
Cette question n'est point résolue jusqu'à présent. Ainsi le gouvernement n'a pas attendu qu'on vînt éveiller sa sollicitude sur cet objet, pour instituer une commission et faire à la Haye les représentations qui lui semblent de nature à être faites en vertu du traité de 1839 et du traité de 1842.
- La discussion générale est close.
« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Traitement du personnel des bureaux : fr. 105,050. »
- Adopté.
« Art. 3. Premier terme des pensions éventuellement : fr. 2,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Secours à des fonctionnaires et employés, à leurs veuves ou enfants, qui, sans avoir droit à la pension, ont des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 1,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Matériel : fr. 37,600. »
- Adopté.
« Art. 6. Achat de décorations de l'Ordre de Léopold, sans que l'on puisse augmenter ce chiffre par des imputations sur d'autres articles : fr. 8,000. »
- Adopté.
« Art. 7. Missions en Allemagne : fr. 87,000. »
- Adopté.
« Art. 8. France : fr. 35,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Grande-Bretagne : fr. 52,000. »
- Adopté.
« Art. 10. Pays-Bas : fr. 32,000. »
- Adopté.
« Art. 11. Italie : fr. 32,000. »
- Adopté.
« Art. 12. Danemark, Suède et Hambourg : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 13. Espagne : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Portugal : fr. 15,000. »
- Adopté.
(page 1527) « Art. 15.Turquie : fr. 27,000. »
- Adopté.
« Art. 16. Etats-Unis : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 17. Brésil : fr. 18,000. »
- Adopté.
« Art. 18. Mexique : fr. 18,000. »
M. Osy. - Lorsque nous viendrons à l'article relatif aux agents diplomatiques en non-activité, je demanderai s'il ne conviendrait pas de charger l'un d'eux de nos intérêts au Mexique. La nomination d'un chargé d'affaires au Mexique est, je crois, chose décidée depuis la paix conclue entre les Etats-Unis avec le Mexique. Nous avons dernièrement conclue un traité de commerce avec cette dernière puissance, et le gouvernement a souvent fait ressortir les avantages que nous devons retirer de nos relations avec ce pays. Je crois que le gouvernement devrait s'occuper d'y envoyer un chargé d'affaires. Je regrette qu'il ne l'ait pas encore fait.
Je crois, je le répète, qu'il faudrait y envoyer, de préférence, un agent diplomatique en disponibilité. Ce serait le moyen de réduire la somme affectée à des traitements de non-activité.
Je demanderai donc au gouvernement de vouloir s'occuper le plus tôt possible de la nomination d'un chargé d'affaires au Mexique où nos affaires continuent à augmenter.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, j'ai déjà donné à la section centrale des explications en réponse aux observations qui viennent dêtre présentées par l'honorable préopinant. On trouve ces explications à l'article 12 du rapport de l'honorable M. Van Iseghem.
L'intention du gouvernement est de nommer bientôt un chargé d'affaires au Mexique. S'il ne l'a pas fait jusqu'à présent, c'est parce qu'il n'a pas cru qu'il y eût une très grande urgence.
Nous attendions un diplomate mexicain qui nous avait été annoncé. Mais jusqu'à présent des difficultés dans l'intérieur du Mexique ont sans doute empêché l'envoi de ce représentant. Dans tous les cas le gouvernement ne tardera pas à faire cette nomination, et chaque fois qu'un poste diplomatique sera vacant, il est évident que son attention se portera d'abord sur les diplomates qui sont en disponibilité, qui jouissent d'un traitement d'attente.
Cependant, il faut d'autres considérations. Il ne suffît pas d'être un diplomate pour convenir à tous les postes qui peuvent se présenter. La règle que j'ai constamment suivie dans toutes les nominations que j'ai faites jusqu'à présent, celle qui doit avoir la priorité sur toutes les autres, selon moi, c'est l'intérêt du pays, c'est l'intérêt de la position. Or, tel diplomate peut parfaitement convenir dans un pays, et ne point jouir des conditions qui pussent le rendre utile dans un autre pays. Il faut autant que possible connaître la langue, connaître les mœurs des habitants, avoir étudié le pays dans lequel on est accrédité.
Il y a un concours de circonstances qui doivent être prises en sérieuse considération, lorsqu'il s'agit de faire choix d'un agent pour lui confier l'honneur de représenter son pays à l'étranger.
Ainsi, je ne pense pas que quand il y aura un poste vacant dans la diplomatie, on doive nécessairement, obligatoirement en quelque sorte, prendre parmi les diplomates qui sont en disponibilité. Il faut avant tout que celui qui est désigné réunisse les conditions nécessaires et spéciales pour le poste qu'il doit remplir.
M. Osy. - Je suis loin d'exiger que le gouvernement nomme parmi les diplomates en disponibilité. J'ai dit simplement au gouvernement que s'il y avait moyen de trouver parmi les agents en disponibilité une personne qui convienne au poste, je l'engageais à faire cette économie.
Mais ma principale observation tend à engager M. le ministre à nommer un chargé d'affaires au Mexique. Lors de la discussion du traité de commerce avec ce pays, le gouvernement s'est appuyé, pour en demander l'approbation, sur l'extension que prenaient nos affaires avec le Mexique. C'est un motif pour que nous y ayons un agent. Voilà deux ans que le gouvernement nous fait des promesses sur ce point. Je l'engage à faire enfin cette nomination.
- L'article est adopté.
« Art. 19. Traitements des agents consulaires et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 75,000. »
M. Osy. - Messieurs, sur cet article le gouvernement nous demande une augmentation de 20,000 fr. La section centrale, dont je partage entièrement l'opinion, approuve cette augmentation de crédit.
Ici encore je dois demander au gouvernement de ne pas laisser cette somme oisive.
Après le traité de commerce conclu avec la Russie, cet empire s'est empressé de nous envoyer un consul général pour le représenter en Belgique. Ce consul général se trouve ici depuis 8 à 9 mois ; mais je regrette que le gouvernement belge n'ait pas usé de réciprocité en nous faisant représenter en Russie.
Je prie donc l'honorable minisire de vouloir nommer le plus tôt possible un agent qui puisse représenter commercialement la Belgique en Russie. Je cro's qu'avec la somme que demanle M. le ministre il pourra trouver un homme très capable de remplir ce poste.
L'année dernière lorsque nous avons voté le traité avec la Russie j'ai fait cette demande. Aujourd'hui que la Russie nous a fait des avances en envoyant un agent en Belgique, je crois que nous devons montrer un peu plus d'empressement à user de réciprocité à son égard.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Le crédit qui est demandé au budget a précisément pour but de satisfaire au désir exprimé par l'honorable préopinant ; c'est pour donner un traitement à un consul général qui serait nommé à St-Pétersbourg.
Déjà cependant les affaires commerciales de la Belgique ont eu un défenseur à St-Pétersbourg, puisque nous y avons un consul qui est un homme zélé et capable.
Cependant après l'acte spontané qui a été posé par le gouvernement impérial, je crois qu'il est indispensable d'avoir à St-Pétersbourg un consul général rétribué, ne fût-ce que par réciprocité.
Cette nomination ne tardera pas à avoir lieu lorsque le vote du budget aura donné au gouvernement les moyens de rétribuer cet agent.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art. 20. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'adminislraiion centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »
- Adopté.
« Art. 21. Indemnités pour un drogman, six cavasses, employés dans diverses résidences en Orient et pour un capou-oglan: fr. 6,030. »
- Adopté.
« Art. 22. Frais divers : fr. 73,970. »
- Adopté.
« Art. 23. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité : fr. 40,000. »
- Adopté.
« Art. 24. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 4,000. »
- Adopté.
« Art. 25. Ecole de navigation. Personnel : fr. 11,720.
- Adopté.
« Art. 26. Ecole de navigation. Frais divers : fr. 7,280. »
- Adopté.
« Art. 27. Chambres de commerce : fr. 12,000. »
M. Osy. - Messieurs, le rapport de la section centrale soulève à l'occasion de l'article 27 une question très importante.
La quatrième section, je crois, avait soulevé la question de savoir s'il ne serait pas convenable que les chambres de commerce fussent nommées par élection.
Vous savez que depuis 1848 on a introduit ce système en France.
Dans les Pays-Bas on se préoccupe beaucoup de cette question et je ne serais pas étonné qu'elle fût résolue affirmativement.
Je suis loin de vouloir dire dès aujourd'hui mon opinion sur cette question qui est très grave, mais j'engage le gouvernement, s'il n'a pas encore pris de résolution à ce sujet, de vouloir bien examiner avec attention la question de savoir s'il ne serait pas convenable d'introduire ce même système en Belgique.
Je voulais seulement dire en peu de mots les raisons qui militent en faveur d'un système pareil.
Dans toutes les chambres de commerce on sort par tiers et le tiers des membres sortants peuvent être réélus ; les deux autres tiers ne peuvent rentrer qu'après un an, mais souvent on les renomme lorsque ce délai est expiré. De cette manière les chambres de commerce pourraient représenter pendant un grand nombre d'années le même système commercial, alors même que l'opinion du commerce serait complètement changée, et il deviendrait impossible que le gouvernement s'eclairàt.
Maintenant si on faisait nommer les chambres de commerce par la voie de l'élection, jusqu'où irait-on pour le cens électoral des patentés ? Cet là une question très importante ; elle a ete soulevée en sections, et la section centrale l'a recommandée à l'attention du gouvernement ; je demanderai donc à M. le ministre des affaires étrangères que s'il n'a pas encore une opinion arrêtée sur ce point il veuille bien la mettre à l'étude et nous faire connaître, dans la discussion du budget prochain, le résultat de son examen.
Puisque j'ai la parole sur les chambres da commerce, je reproduirai une observation que j'ai déjà faite. La chambre de commerce a demandé avec instance à M. le ministre des affaies étrangères de permettre la (page 1528) cote des différents fonds étrangers qui se négocient à la bourse d'Anvers, entre autres les fonds russes et les fonds danois, dans lesquels on fait, depuis une couple d'années, beaucoup d'affaires. Le gouvernement a refusé, et les raisons qu'il a données pour motiver son refus, me paraissent très peu fondées. Depuis 60 ans peut-être on traite en Belgique beaucoup de fonds russes et de fonds danois, et l'on cote à la bourse le 3 p. c. danois et le 5 p. c. russe, tandis qu'on ne peut pas coter le 5 p. c. danois, ni le 4 1/-2 p. c. russe dans lequel beaucoup de nos banquiers sont intéressés.
M. le ministre dira que la chambre de commerce n'a pas insisté. Messieurs, quand le gouvernement a refusé une chose, la chambre de commerce n'y revient pas tous les jours. M. le ministre a dit qu'il ne permet la cote des fonds étrangers qu'autant que dans les pays auxquels ces fonds appartiennent on cote les fonds belges. Eh bien, messieurs, à Pétersbourg et à Copenhague, on ne fait aucune affaire en fonds étrangers quelconques, et cependant vous voyez les fonds russes et les fonds danois cotés à toutes les bourses étrangères, à Londres, à Paris, à Amsterdam, à Hambourg.
Il y a plus, messieurs, à Turin, on ne fait pas d'affaires en fonds belges et cependant depuis deux ans le gouvernement a autorisé la cote des fonds de Sardaigne dans notre pays. On y fait beaucoup d'affaires, et en ce moment même on s'occupe d'un emprunt pour lequel il y a beaucoup d'affaires, de même que pour les fonds russes et pour les fonds danois. Certainement vous n'empêcherez pas des capitalistes de placer leurs capitaux là où ils le trouvent convenable et je demande, dans l'intérêt de la moralité de la bourse d'Anvers, qu'on puisse coter les fonds qui y s'y traitent. Quand un négociant charge un banquier de négocier des fonds publics, il faut que le premier puisse s'assurer par la cote officielle que ses intérêts ont été fidèlement servis.
D'après ces considérations, je demande que le gouvernement veuille bien permettre de coter à la bourse d'Anvers les fonds qui sont solides. Je le demande d'autant plus que l'on cote les fonds en loterie, qui présentent un appât souvent fort chanceux pour les bailleurs de fonds, et je dirai, en passant, que l'autorisation de coter ces fonds-là n'est pas du tout en harmonie avec le projet de loi sur les loteries qui vient d'être déposé par M. le ministre de la justice.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - J'ai déjà donné des explications l'année dernière en réponse aux observations de l'honorable M. Osy relativement à la cote de certains fonds à la bourse d'Anvers.
Je dois lui dire, en effet, que depuis lors la chambre de commerce n'a plus insisté sur ce point ; si elle avait insisté, un nouvel examen aurait eu lieu et peut-être le ministère des affaires étrangères et le ministère des finances seraient-ils revenus sur leur première résolution. Je m'empresse de dire à l'honorable membre qu'il suffit de sa réclamation pour que je me fasse reproduire cette affaire, et que je l'examine de nouveau ; il ne peut y avoir rien de fortement arrêté dans l'esprit du gouvernement contre une semblable demande lorsqu'elle nous est adressée par les représentants de notre métropole commerciale.
L'honorable M. Osy a également exprimé le désir que le gouvernement examine s'il n'y a pas lieu de modifier l'organisation actuelle de nos chambres de commerce et de faire nommer par la voie de l'élection les membres qui les composent. La section centrale a appelé, en effet, l'attention du gouvernement sur ce point.
Mais il y a deux ans qu'un membre ayant déjà soulevé cette question, la section centrale a rejeté cette proposition.
Messieurs, le gouvernement trouve que les chambres de commerce, dans leur organisation actuelle, remplissent complètement l'importante mission qui leur est confiée ; il faudrait, pour changer ce mode d'organisation, que le gouvernement eût la conviction que l'organisation actuelle est vicieuse ; qu'un autre mode de nomination aura des avantages incontestables, qui l'emporteraient sur la nomination par le gouvernement, eh bien, jusqu'à présent nous n'avons pas cette conviction.
L'organisation actuelle, dit-on, a cet inconvénient, que les chambres de commerce ne se renouvellent pas suffisamment, que le même esprit continue à y dominer.
Eh bien, l'arrêté d'organisation a prévu cette difficulté ; car les chambres de commerce se renouvellent par tiers ; un tiers sort chaque année, et dans ce tiers, on ne peut nommer qu'un tiers des membres sortants ; dès lors les deux tiers des membres sortants ne peuvent pas être réélus.
Maintenant les chambres de commerce sont des corps purement consultatifs ; je crois qu'en principe de pareils corps sont en général formés par le gouvernement, et leur organisation n'est pas abandonnée à la voie de l'élection ; ainsi, les commissions d'agriculture, les commissions médicales, d'autres corps encore qui ne me reviennent pas en ce moment à l’esprit sont nommés directement par le gouvernement.
Les tribunaux de commerce, qui ne sont pas des corps consultatifs, sont formés par élection.
Eh bien, on éprouvait déjà une grande difficulté à réunir le nombre d'électeurs nécessaire... (Interruption.)
S'ils sont nommés par la voie de l'élection, c'est parce qu'ils ont des décisions à prendre, tandis que les chambres de commerce ne donnent que des avis.
N'est-il pas probable que si on abandonnait le choix des membres des chambres de commerce à l'élection, la politique s'introduirait dans ce mode d'organisation ? N’auriez-vous pas toujours une minorité qui ne serait pas satisfaite ? Et cet esprit politique serait-il un bien pour cette institution ?
D'ailleurs, si une chambre de commerce ne représentait pas précisément l'esprit qui domine dans le commerce dans son ressort, les autres commerçants ont la voie du pétitionnement ; ils peuvent s'adresser au gouvernement et même aux chambres ; et, en définitive, les questions se résolvent toujours par le gouvernement et par les chambres. Toutes les opinions, tous les vœux peuvent donc toujours se faire entendre.
Il faudrait donc des motifs plus sérieux que ceux donnés par l'honorable préopinant pour changer un mode d'organisation qui est adopté partout, sauf en France, où l'on a modifié depuis peu le mode de nomination ; mais jusqu'à présent, nous ne pouvons pas savoir si ce changement est heureux. Attendons et ne nous laissons pas guider par le seul exemple de nos voisins.
M. Cumont. - J'aurai l'honneur de soumettre à M. le ministre des affaires étrangères une observation au sujet des renseignements qu'on demande habituellement aux chambres de commerce.
Je pense qu'au lieu d'adresser des demandes de renseignement par correspondance, on obtiendrait un résultat plus avantageux si l'on convoquait au ministère les hommes compétents qui ont à traiter les objets sur lesquels on veut les consulter ; car en demandant simplement un avis par écrit, d'abord les opinions ne sont pas bien fixées sur les intentions du gouvernement, ensuite, il arrive peut-être des réponses divergentes qu'il faut examiner, tandis que si on convoquait les hommes spéciaux pour les objets qu'ils ont à traiter, les objections se produiraient ; du choc des opinions jaillit la lumière ; vous arriveriez ainsi à cette lumière et vous auriez un résultat beaucoup plus prompt que celui que l'on obtient par le mode qui est actuellement suivi.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Nous avons déjà suivi le mode que vous indiquez.
- Un membre. - Cela coûterait.
M. Cumont. - On me fait observer que cela coûterait ; il n'en est rien ; je suis persuadé qu'aucune chambre de commerce ne ferait difficulté à envoyer à ses frais le membre qui serait choisi pour se rendre à la convocation. Ce n'est donc pas là un motif pour repousser l'idée que je viens de mettre en avant.
M. Delfosse. - Messieurs, je suis surpris que M. le ministre des affaires étrangères se montre hostile à la composition des chambres de commerce par la voie de l'élection. Les raisons que M. le ministre des affaires étrangères vient de donner me paraissent extrêmement faibles ; il oppose à l'opinion de la section centrale de cette année l'opinion émise par une section centrale, il y a deux ans. Il me semble que l'opinion de la section centrale de cette année doit avoir plus de poids que celle d'une ancienne section centrale qui ne représente plus la chambre.
M. le ministre des affaires étraegères nous dit que tous les corps consultatifs sont nommés uniquement par le Roi. C'est une erreur, au moins. pour les commissions d'agriculture que M. le ministre des affaires étrangères a cités.
M. le ministre de l'intérieur, collègue de M. le ministre des affaires étrangères, a introduit le système électif dans la composition des commissions d'agriculture. Les comices agricoles, formés par la voie de l'élection, présentent, si je ne me trompe, des candidats pour le conseil d'agriculture.
Ce que M. le ministre de l'intérieur a fait pour l'agriculture, M. le ministre des affaires étrangères pourrait certes le faire peur le commerce.
M. le ministre des affaires étrangères argumente de ce que les chambres de commerce ne sont que des corps consultatifs. Mais c'est une raison en faveur de l'élection.
Pourquoi le gouvernement consulte-t-il les chambres de commerce ? C'est pour connaître l'avis des commerçants ; eh bien, qu'il laisse aux commerçants eux-mêmes le soin de donner cet avis ; si le gouvernement veut réellement être éclairé sur les vœux, sur les besoins du commerce, qu'il se garde bien de désigner ceux qui seront consultés, qu'il s'adresse aux délégués que les commerçants auront choisis pour répondre. C'est le seul moyen de connaître la vérité.
M. le ministre des affaires étrangères craint que la politique ne s'introduise dans les chambres de commerce ; M. le ministre de l'intérieur n'a pas eu la même crainte pour l'agriculture ; M. le ministre de l'intérieur n'a pas craint que la politique pénétrât dans les commissions d'agriculture.
Si vous craignez l'intervention de la politique, parce que le système de l'élection serait appliqué aux chambres de commerce, n'admettez pas les députations permanentes à présenter des candidats.
Vous avez admis les députations à présenter des candidats ; cela est bien, mais il est mieux encore de demander aux commerçants eux-mêmes quels sont leurs vœux, leurs besoins. Je n'y vois pas le moindre danger. Si les avis qui vous seront donnés ne sont pas bons, vous ne les suivrez pas. Le droit d'élire les corps consultatifs a les mêmes avantages et les mêmes inconvénients que la liberté de la presse ; toutes les opinions peuvent se produire par la presse, le gouvernement n'est pas tenu de se conformer à l'opinion exprimée par les journaux. Mais il est bon qu'il la connaisse ; le gouvernement se fait tort, il s'expose à l'erreur, en choisissant lui-même ceux qu'il consultera.
Dans l'intérêt du gouvernement, j'engage M. le ministre des affaires étrangères à faire pour les chambres de commerce ce que M. le ministre de l'intérieur a fait pour les commissions d'agriculture.
Le système électif est la base de nos institutions ; il ne faut pas s'en (page 1529) écarter par des raisons aussi futiles que celles données par M. le ministre des affaires étrangères.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je n'ai pas la moindre intentiun de porter atteinte au système électif, il m'est aussi précieux qu'à l'honorable préopinant, lorsqu'il s'agit de corps politiques ; mais on peut examiner si le mode actuel ne présente pas autant d'avantage que tout autre, notamment que celui qui aurait pour base l'élection. Ce que l'honorable préopinant a oublie de prouver, c'est que les chambres de commerce, telles qu'elles sont instituées, sont insuffisantes. Sont-elles au-dessous de leur mission ? Est-ce qu'elles ne représentent pas l'opinion du commerce ? Ne sont-elles pas composées des hommes les plus compétents ? Voilà ce qu'il faut examiner quand il s'agit de changer une institution. Voilà ce que vous n'avez pas démontré. Si elles ne remplissent pas leur mission, si les changements qu'on y apporterait les rendraient meilleure. Si M. Osy avait démontré que les chambres de commerce ne remplissent pas les conditions qu'on doit rechercher en elles, je concevrais qu'il en demandât la modification.
Il ne suffit pas de mettre un système en avant pour qu'on doive l'adopter immédiatement. Je n'ai pas de fétichisme pour le système électif, les raisons données nous conduiraient à remettre toutes les nominations à l'élection. L'honorable M. Delfosse a invoqué l'opinion de la section centrale, mais la section centrale n'a pas émis une opinion positive, elle s'est bornée à appeler l'attention du gouvernement sur cette question ; je pouvais donc m'armer de l'opinion d'une autre section centrale qui est aussi respectable. Du reste, je n'ai pas annoncé de résolution absolue, j'examinerai.
L'honorable M. Delfosse trouve mes raisons faibles ; je n'ai pas trouvé les siennes bien fortes. Il y a parité entre nous à cet égard. Ce que je puis dire c'est que les chambres de commerce, telles qu'elles sont composées, paraissent complètement suffisantes au gouvernement.
D'ailleurs, M. Osy a reconnu lui même qu'il y aurait des difficultés pratiques pour les soumettre à l'élection. Je ne sais jusqu'à quel chiffre il faudrait descendre pour les électeurs. Voilà des difficultés que présente ce mode d'organisation.
Maintenant, M. Delfosse a cité ce qui se passe pour les commissions d'agriculture. Eh bien, cela prouve que le gouvernement n'a pas contre le mode de nomination par élection, parti pris qui semblerait ressortir des paroles de l'honorable membre.
Le ministre de l'intérieur l'a adopte pour les commissions d'agriculture ; mais il y a beaucoup d'autres corps qui sont à la nomination du gouvernement. L'honorable membre me permettra de dire que cela mérite un sérieux examen. Il serait le premier à blâmer le gouvernement s'il était trop prompt à apporter des modifications dans des services dont la marche ne présente aucun inconvénient.
M. Lebeau. - Tout partisan que je sois du système électif, je ne pense pas cependant que toute organisation administrative doive lui être soumise.
Il vous souvient qu'à une époque d'engouement pour ce système, tous fut électif, y compris les juges de paix ; je crois même que dans la fièvre élective dans on était atteint, on a été jusqu'à y comprendre le clergé ; mais ce système a été abandonné,et c'est aux applaudissements de tout le monde qu'on a déféré la nomination des juges de paix au pouvoir exécutif.
Qui dit corps consultatif exclut en général l'élection, car s'il était élu, les avis qu'un tel corps émettrait recevraient de son origine une force qui pourrait peser d'une manière exorbitante sur les délibérations ultérieures d'autres pouvoirs qui sont aussi électifs et doivent l'être.
Je ne serais pas surpris qu'aujourd'hui encore, dans l'état actuel des esprits, parmi nos industriels, si les chambres de commerce étaient élues et choisies nécessairement dans le cercle restreint des fabricants, des producteurs, que leurs avis vinssent renforcer l'élément protecteur et peser sur nos délibérations en sens contraire aux tendances libérales que nous voulons faire prévaloir.
Je signale cet écueil à l'honorable député de Liège. Ce serait une pression à laquelle il serait difficile de se soustraire dans des temps d'agitation.
Je crois qu'il faut se mettre en garde contre tout engouement pour le système électif. J'en suis grand partisan.je me fais honneur d'avoir contribué à en élargir les bases dans notre Constitution ; mais il faut se garder de l'exagération dans un système qui est excellent, lorsqu'il est resserré dans des limites raisonnables.
M. Delfosse. - Je n'ai ni engouement ni fièvre pour le système électif, je ne veux l'appliquer ni aux juges de paix ni au clergé ; je crois n'avoir pas élé trop loin en demandant à M. le ministre des affaires étrangères un acte analogue à celui qui a été posé aux applaudissements de tous par M. le ministre de l'intérieur.
M. le ministre de l'intérieur a fait intervenir le système électif dans la formation des commissions d'agriculture ; je demande qu'on le fasse intervenir aussi dans la composition des chambres de commerce. M. le ministre des affaires étrangères a reconnu qu'il avait été trop loin, il a dit qu'il examinerait. C'est tout ce que je demande.
M. le ministre de l'intérieur a examiné et il a posé un bon acte, un acte utile ; je demande que M. le ministre des affaires étrangères examine d'abord et agisse ensuite à l'imitation de son collègue. M. le ministre des affaires étrangères dit que je n'ai pas donné de bonnes raisons ; mais j'en ai donné une excellente, je n'en connais pas de plus forte que la nécessité pour le gouvernement de consulter le commerce, afin de bien connaître ses besoins et ses vœux.
Le gouvernement, pour être à la hauteur de sa mission, doit connaître les voeux de toutes les classes de la société. Avant d'agir, le gouvernement doit connaître les vœux et les besoins de tous, sans cela il est exposèé à prendre de fausses mesures.
M. Lebeau. - Comment représentez-vous les consommateurs ?
M. Delfosse. - Les consommateurs seront aussi représentés.
M. Lebeau. - En quoi ?
M. Delfosse. - Il n'y a pas au fond opposition d'intérêts entre le consommateur et le producteur. Il y a, au contraire, solidarité. Il n'y a pas de producteur qui ne soit consommateur ; le gouvernement, qui consulte les chambres de commerce, les commissions d'agriculture, peut aussi consulter les conseils communaux, les conseils provinciaux, qui représentent traites les classes et tous les intérêts.
Le gouvernement ne doit pas se borner à prendre l'avis de quelques privilégiés, il doit entendre la voix de tous, de la nation entier..
M. le ministre des affaires étrangères assure que les chambres de commerce ne laissent rien à désirer, qu'elles sont à la hauteur de leur mission ; c'est là une affirmation qu'il nous est impossible d'apprécier, puisque les délibératiors des chambres de commerce ne sont pas publiées.
M. Coomans. - Messieurs, j'ai trop souvent proposé l'application du ressort électif à la composition des chambres de commerce pour que je ne fasse pas aujourd'hui acte d'adhésion aux justes et irréfutables remarques présentées par quelques honorables préopinants en faveur de la réforme demandée. J'ajouterai que c'est une grave question de savoir si la loi en vigueur est constitutionnelle, en ce qu'elle réserve aux notables la mission de représenter le commerce. Avons-nous encore, depuis 1830, des notables comme il y en avait sous le gouvernement des Pays Bas ? Quand est-on notable ? Quand le devient-on ? Quand cesse-t-on de l'être ? Voilà autant de questions qu'on peut poser et résoudre contre le régime en vigueur.
Puis, messieurs, les tribunaux de commerce ne sont-ils pas composés par voie d'élection, ces corps importants dont les membres doivent être plus instruits, plus éclairés encore que ceux des chambresde commerce ?
Est-il convenable de confier au gouvernement la nomination des membres des chambres de commerce, alors que ces corps doivent faire des présentations de candidats au gouvernement.
N'est-il pas vrai que l'esprit de coterie et de routine à envahir plusieurs chambres de commerce ?
Enfin, que signifie cet argument de l'honorable M. Lebeau : que les consommateurs ne seraient plus représentés, si les membres des chambres de commerce étaient élus ? Les consommateurs sont-ils mieux représentés aujourd'hui qu'ils ne le seraient dans notre hypothèse ? Evidemment non ; car, outre que chaque citoyen est un consommateur, les commerçants nantis d'une patente de 20 florins, par exemple, sauraient choisir leurs organes mieux que ne le font aujourd'hui deux ou trois fonctionnaires publics investis de cette tâche difficle.
J'appuie donc vivement la réforme sollicitée.
M. De Pouhon. - Ce que l'on doit principalement avoir en vue pour la composition des chambres de commerce, c'est d'y réunir des hommes qui aient suivi diffférentes branches d'affaires et d'industrie, et qui soient à même de répandre des lumières sur ces intérêts divers en rapport avec les intérêts généraux du pays. Ce n'est pas, messieurs, le système électif qui assurera ces bons choix.
Il faut voir comment se font les élections parmi les négociants. Ce sont eux qui élisent les juges consulaires. Ces choix les intéressent bien plus directement que ceux des membres de la chambre de commerce. Ils ne se rendent qu'en très petit nombre à l'élection, à peine y voit-on réunis dans les principales villes 15 à 20 négociants qui décident entre eux des nominations.
Il en serait de même pour les chambres de commerce. Mais ici les intérêts privés seraient plus actifs. Je suppose qu'une élection ait lieu à Anvers où il existe une chambre de commerce dont les avis ont toujours eu une influence légitime sur les déterminations du gouvernement et sur la législature même.
A Anvers il y a des négociants très intéressés dans des questions importantes, primes de construction de navires, raffineries de sucre, tarifs de douanes, système commercial du royaume.
Ceux-là ne sommeilleraient pas en présence de l'indifférence et de l'absence du grand nombre. Ils se remueraient pour faire élire des avocats de leur cause, des littérateurs, des savants, ceux dont la parole facile pourrait le mieux faire prévaloir leurs intérêts particuliers. L'esprit de parti pourrait même s'en mêler, et cet esprit gâte tout. On aurait ainsi des chambres de commerce qui rendraient peu de services.
Une députalion provinciale me paraît offrir plus de probabilités de bons choix ; elle ne fait d'ailleurs que les indiquer et les recommander au gouvernement. Je suis d'avis que plus l'autorité est élevée, plus il y a de garanties d'impartialité. Ce n'est pas toujours le cas, mais c'est généralement ainsi.
- L'article 27 est adopté.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Conformément aux engagements que nous avons pris, nous avons l'honneur de présenter les projets de loi ci-après :
1° Un projet de loi établissant un droit de débit sur la vente des tabacs ;
(page 1530) 2° Un projet de loi ayant pour objet de faire trancher une question controversée entre l'administration et les brasseurs relativement à la manière de calculer la capacité des cuves sujettes à l'impôt ;
3° Un projet de loi augmentant l'accise sur les distilleries.
Je dépose également un projet de loi relatif à l'exécution des travaux publics qui ont été annoncés. Si la chambre le désire, je donnerai lecture du projet. (Oui, oui !)
Je serai obligé de donner quelques explications à la chambre sur divers articles du projet.
Lecture du projet
« Paragraphe premier. Travaux à exécuter par des compagnies moyennant garantie par l'Etat d'un minimum d'intérêt.
« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à conclure avec les compagnies dites de l'Entre-Sambre et Meuse, du Luxembourg et de la Flandre occidentale, des conventions définitives basées sur les clauses et conditions mentionnées dans les conventions provisoires, annexées à la présente loi sous les lettres A, B et C.
« La convention avec la compagnie de l'Entre-Sambre-et-Meuse a pour objet de garantir un minimum d'intérêt sur une somme de 5 millions de francs, à la condition d'exécuter des travaux pour une autre somme de 5 millions .»
La garantie fixée à 4 p. c. pendant 50 ans, porterait sur les embranchements qui font partie de la concession de cette compagnie. Il resterait à retirer de la concession primitive certains travaux qui sont considérés comme étant trop onéreux.
La convention avec la compagnie du Luxembourg a pour objet de garantir à cette compagnie 4 p. c. d'intérêt pendant cinquante ans sur un capital de 22,500,000 francs, à la condition que la compagnie exécutera le canal de l'Ourthe et le chemin de fer direct de Bruxelles à Namur sans garantie d'intérêt.
La dépense du canal de l'Ourthe est estimé à 5 millions de francs ; celle du chemin de fer de Bruxelles à Namur à 20 millions de francs. Le chemin de fer de Namur à Arlon est évalué à 22,500,000 francs. C'est sur cette somme que porterait la garantie.
La convention avec la compagnie du chemin de fer de la Flandre occidentale a pour objet de garantir à cette compagnie un minimun d'intérêt au même taux de 4 p. c. pendant le même espace de temps que le précédent, sur un capital fixe de 10 millions de francs. Au moyen de cette garantie, la compagnie prend l'engagement d'exécuter un chemin de fer de Courtray à Menin, Wervicq, Ypres et Poperinghe, et le chemin de fer de Deynze à Thielt, se reliant au tronc principal vers Ingelmunster.
« Art. 2. Le gouvernement est également autorisé à concéder définitivement, au sieur Verrue-Lafrancq, concessionnaire provisoire, le canal de jonction de l'Escaut à la Lys, entre Bossuyt et Courtray. Cette concession sera octroyée aux clauses et conditions mentionnées dans la convention provisoire, annexée, sous la lette D, à la présente loi. »
D'après la convention, l'Etat s'engagerait à garantir un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur une somme de 5 millions au maximum jugée nécessaire pour l'exécution de ce travail d'utilité publique.
« Paragraphe II. Travaux à exécuter par voie de concession, sans garantie, de la part de l'Etat, d'un minimum d'intérêt.
« Art. 3. Le gouvernement est autorisé à accepter, aux conditions mentionnées dans la déclaration annexée, sous la lettre E à la présente loi, la renonciation faite en faveur des sieurs J.-A. Demot et consorts, par la société anonyme du chemin de fer et du canal de la vallée de la Dendre, qui lui a été octroyée par l'arrêté royal du 24 juin 1845, rendu en exécution de loi du 12 du même mois.
« Dans ce cas, la loi et l'arrêté royal précités sont rapportés. »
« Art. 4. Le gouvernement est, en outre, autorisé à concéder à la compagnie représentée par les sieurs J.-A. Demot et consorts, aux clauses et conditions stipulées dans la convention annexée, sous la lettre F. à la présente loi, l'établissement du chemin de fer de Dendre-et-Waes, d'Ath à Lokeren et du chemin de fer direct de Bruxelles vers Gand par Alost. »
La convention provisoire faite avec la compagnie qui est mentionnée dans les dispositions dont je viens de donner lecture à la chambre repose sur un système de concession nouveau. La condition dans lesquelles le chemin de fer direct de Bruxelles à Gand par Alost doit se trouver exigeait un système particulier, s'il n'était pas exécuté par l'Etat.
L'Etat possède, en effet, dès à présent les revenus que lui procureront les stations de Gand, de Termonde et de Bruxelles. Il fallait éviter pour l'Etat la perte des produits dont il est actuellement en possession.
Une compagnie a offert d'exécuter à la fois le chemin de fer d'Ath à Lokeren par Termonde et le chemin de fer direct de Bruxelles à Gand par Alost, en laissant à l'Etat la charge de l'exploitation, et sous la condition que la compagnie recevrait pour toute indemnité les trois quarts du produit des stations nouvelles à l'aller et au retour ; les trois quarts de tout ce que ces stations donneraient soit par l'expédition sur le chemin de fer de l'Etat, soit de ce qui serait procuré par toutes les expéditions vers les stations nouvelles, les produits des stations anciennes continuant à rester au profit de l'Etat.
Je me borne à énoncer la base fondamentale du système, pour que la chambre puisse reconnaître et apprécier l'objet de ces conventions.
« Paragraphe III. Travaux à exécuter par l'Etat, soit directement, soit avec le concours des provinces, des communes ou des particuliers.
« Art. 5. Le gouvernement est autorisé à affecter une somme de vingt-six millions de francs à l'exécution d'ouvrages d'utitilé publique ci-après désignés :
« A. Prolongement jusqu'à Anvers du canal de jonction de la Meuse à l'Escaut : fr. 4,500,000 ;
« B. Travaux à la Meuse ayant pour objet :
« 1° De mettre le bassin houiller de Chokier en communication directe avec le canal de Bois-le-Duc et l'Escaut, et 2° d'améliorer l'écoulement des eaux de cette rivière dans la traverse de la ville de Liège : fr. 8,000,000 ;
« C. Construction d'un canal destiné à mettre la ville de Hasselt et le Demer en communication avec la ligne de jonction de la Meuse à l'Escaut : fr. 2,650,000 ;
« D. Travaux destinés à compléter les moyens d'écoulement des eaux d'inondation de la Lys, soit en prolongeant le canal de Deynze à Schipdonck jusqu'à la mer du Nord, soit en modifiant le régime du canal de Gand à Bruges : fr. 3,500,000 ;
« E. Continuation des travaux destinés à améliorer l'écoulement des eaux de l'Escaut : fr. 1,000,000 ;
« F. Amélioration des ports et côtes : fr. 400,000 ;
« G. Travaux destinés à améliorer l'écoulement des eaux de la Sambre, dans les provinces du Hainaut et de Namur : fr. 650,000 ;
« H. Elargissement de la partie du canal de Bruxelles à Charleroy, comprise entre la neuvième écluse et la Sambre canalisée : fr. 1,000,000 ;
« I. Construction d'un embranchement de chemin de fer destiné à relier la ville de Lierre au réseau de l'Etat : fr. 500,000 ;
« K. Extension du matériel de l'exploitation du chemin de fer de l'Etat et doublement des voies : fr. 1,000,000 ;
« L. Construction de prisons suivant le système cellulaire : fr. 1,200,000 ;
M. Subsides pour travaux d'hygiène publique ayant spécialement pour objet l'assainissement des villes et communes dans les quartiers occupés par la classe ouvrière : fr. 600,000 ;
« N. Subsides pour construction et ameublement d'écoles : fr. 1,000,000.
« Total : fr. 26,000,000. »
« Paragraphe IV.
« Article 6. Le gouvernement est autorisé à réduire les péages actuellement perçus sur le canal de Pommerœul à Antoing, sans que, dans aucun cas, cette réduction puisse … »
« Paragraphe V
« Art. 7. Sont acceptées les offres faites par le conseil provincial et la ville de Liège de concourir à l'exécution des travaux à effectuer dans la vallée de la Meuse, savoir : par la province, à concurrence d'une somme de trois cent soixante et dix mille francs ; par la ville, à concurrence d'un million de francs. »
Les travaux à exécuter dans la vallée de la Meuse sont estimés à 9,300,000 fr. ; mais les subsides offerts par la province et par la ville ainsi que la vente des terrains qne ces travaux doivent laisser disponibles, réduiront la dépense à charge de l'Etat à 6,000,000 de fr. Cependant, comme la vente des terrains ne peut se faire qu'après l'achèvement des travaux, le crédit est porté à 8,000,000 de fr., comme on l'a vu à l'article 5.
« Paragrapge VI.
« Art. 8. Pour couvrir la dépense à résulter des travaux mentionnés à l'article 5, le gouvernement est autorisé à emprunter un capital effectif de vingt-six millions de francs. »
Nous demandons, messieurs, que la chambre veuille bien examiner ces projets aussi promplement que possible. Ils sont importants comme la chambre peut le constater.
Il est du plus haut intérêt, à noire avis, que les travaux projetés soient exécutés.
La première partie du projet aurait pour résultat de rendre à l'activité des capitaux qui sont actuellement improductifs et de doter le pays de voies de transport instamment réclamées.
Nous devons d'autant plus insister pour que les questions soumises à la chambre soient promplement examinées, qu'il nous serait impossible de retarder longtemps la nécessité d'emprunter une certaine somme pour couvrir la dette flottante. Les circonstances actuelles paraîtront à tout le monde, je pense, assez favorables pour que l'on puisse espérer de réaliser à des conditions satisfaisantes.
L'intention du gouvernement serait, si la chambre entend le suivre dans le système que je viens d'indiquer, si ces projets sont adoptés, le gouvernement emprunterait, au moment qui lui paraîtrait le plus favorable, la somme nécessaire pour l'exécution des ttavaux ; mais comme cette somme ne peut être dépensée que dans un espace de temps assez long, les fonds immédiatement réalisés serviraient à couvrir ce qui (page 1531) reste encore à amortir de la dette flottante. Il en résulterait que la dette flottante actuelle ne reparaîtrait qu'à mesure de l’exécution des travaux. Il nous a paru que ce mode était celui qui présentait le moins d'inconvénients, puisque le gouvernement aurait ainsi un placement dans sa propre dette, des sommes qu'il serait obligé d'emprunter et dont il n'aurait pas immédiatement l'emploi.
M. le président. - Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation de ces divers projets. Ils seront imprimés et distribués. La chambre sera sans doute d'avis de les renvoyer aux sections ?
M. Dumortier. - Messieurs, ce qui se passe dans cette séance a quelque chose de bien déplorable. Je me rappelle que, sous un ministère précédent, lorsque le chef du cabinet vint présenter un projet de loi comprenant plusieurs demandes de travaux publics, les bancs de la gauche se soulevèrent avec une extrême vigueur et, à mon avis avec beaucoup de raison, contre ce qu'ils appelaient la coalition des intérêts contre le trésor public.
Eh bien, messieurs, cette qualification, je puis l'adresser à bien juste titre au projet de loi dont il vient de vous être donné lecture ; c'est, dans toute la force de l'expression, une coalition d'intérêts contre le trésor public.
M. le président. - Le projet n'est pas en discussion. Le gouvernement a le droit d'user de son initiative ; la chambre examine, mais elle examine conformément au règlement. L'impression et la distribution sont de droit ; il s'agit seulement de savoir si on renverra les projets aux sections ou à une commission.
M. Dumortier. - C'est précisément sur ce point que j'ai demandé la parole, sur l'examen en sections et surtout sur ce que vient de dire M. le ministre des finances relativement à l'urgence. (Interruption.)
M. le ministre a demandé une prompte solution ; je crois que cela signifie bien l'urgence.
M. le président. - C'est en sections que ces observations devront être faites. Quant à l'ordre des travaux, c'est aux présidents des sections à le régler.
M. Dumortier. - Je crois qu'il y a quelque chose au-dessus de la volonté des présidents des sections, c'est la volonté de la chambre.
Je ne comprends pas que M. le ministre des finances puisse venir demander une prompte solution sur tous les projets de lois réunis en un seul qu'il vient de présenter, alors que nous sommes assemblés depuis le mois de novembre et qu'on a attendu jusqu'à ce jour pour nous saisir de ces projets. Mais si vous vouliez que nous les discutions dans la session actuelle, pourquoi ne les avez-vous pas déposés lorsque la chambre s'assemblait. Vous voyez que nous avons toutes les peines du monde à nous réunir ; aujourd'hui encore, c'est à peine si nous nous sommes trouvés en nombre, et vous espérez tenir la chambre assemblée pendant une année entière !
Je dis que venir présenter de pareils projets lorsque la session finit, ce n'est pas vouloir une discussion approfondie, c'est vouloir obtenir les dépenses qu'on propose sans que le projet ait subi l'examen nécessaire. Aussi, je demande, pour mon compte, qu'avant de prendre une résolution quelconque sur le renvoi en sections, le projet de loi nous soit distribué, afin que chacun de nous puisse au moins lire ce projet si grave dont on ne nous a donné qu'une légère analyse. Je demande que nous ayons le temps de prendre connaissance du projet, car la chambre a le droit d'en voter l'ajournement à la session prochaine, et, pour mon compte, il est possible que j'en fasse la motion lorsque j'aurai examiné le projet.
Mais si, dans quelques jours, le renvoi en sections était ordonné, je demanderais qu'elles examinassent fort sérieusement la question de savoir s'il n'y a pas lieu, comme la gauche l'a exigé en 1844, de faire autant de projets de lois qu'il y a de travaux publics différents.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je ne pense pas qu'il entre dans la pensée de quelqu'un de demander que la chambre vote les projets dont il s'agit, sans examen, les yeux fermés, sur-le-champ, à la minute. M. Dumortier aurait pu se dispenser de combattre une pareille proposition, que personne n'a mise en avant. Pour mon compte, je demande que la chambre examine attentivement, sérieusement les projets de loi présentés ; mais je demande que cet examen mûr, approfondi ait lieu aussi promptemont que possible, qu'il soit retardé le moins possible, afin notamment de ne pas aggraver l'inconvénient signalé par l'honorable M. Dumortier, celui d'avoir une session trop prolongée.
La chambre votera quand elle le trouvera convenable, je n'ai le droit de rien lui demander sous ce rapport, si ce n'est qu'elle examine le plus tôt possible. C'est ce que je fais. C'est mon droit et j'en use.
L'honorable M. Dumortier fait une première motion ; il demande qu'on imprime et qu'on distribue les pièces, et que la chambre statue ensuite s'il y a lieu de renvoyer aux sections ; il annonce qu'il fera une seconde motion d'ajournement...
M. Dumortier. - Je verrai.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je sais que vous ferez tout ce qui dépend de vous pour entraver l'examen de ces projets.
M. Dumortier. - Je ne veux pas ruiner le trésor public.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous ne voulez pas le ruiner, mais surtout vous ne voulez pas l'enrichir.
L'honorable M. Dumortier fera une seconde motion, relative à la question de savoir s'il faut diviser les projets ; mais l'honorable membre parviendra à ce résultat, en demandant lors du vote, la division des articles qui seront nécessairement discutés séparément.
L'honorable M. Dumortier aura le droit de demander que chaque article soit absolument isolé, séparé ; s'il le trouve bon, il pourra en faire la proposition dans sa section et ultérieurement dans la chambre.
L'honorable membre annonce une troisième motion consistant à faire renvoyer à la session prochaine l'examen de toutes les propositions du gouvernement ; je réclame dès à présent contre cette motion ; je crois qu'elle n'aurait d'autre résultat que de compromettre de très graves intérêts.
M. le président. Avant de donner la parole à un autre orateur, je crois devoir donner lecture de l'article 33 du règlement.
« Art. 33. Les propositions de lois adressées à la chambre par le Roi et par le sénat, après que la lecture en a été faite dans la chambre, sont imprimées, distribuées et transmises, soit aux sections, soit à une commission, pour y être discutées suivant la forme établie au chapitre V.
« La discussion ne pourra commencer dans les sections qu'au moins trois jours après la distribution, sauf les cas d'urgence dont la chambre décide. »
M. Cools. - Messieurs, l'honorable M. Dumortier demande qu'on imprime et qu'on distribue les pièces ; et que l'on se prononce plus tard sur la question du renvoi aux sections.
Il m'est assez indifférent qu'on se prononce pour ou contre la réserve faite par l'honorable membre, je crois qu'il est préférable d'adopter cette proposition ; cependant je n'y tiens pas ; seulement, j'annonce que demain, dès le début de la séance, je demanderai à la chambre de décider dans quel ordre les projets seront examinés.
M. le président nous a lu un article du règlement qui décide que toutes les propositions, après qu'elles sont imprimées et distribuées, doivent être renvoyées soit aux sections, soit à une commission. C'est l'article 33. Mais après cet article, il en vient un autre qui contient un commentaire précieux, c'est l'article 32. Cet article porte « « Chaque section examine les propositions et amendements qui lui sont renvoyés, suivant l'ordre indiqué par la chambre. » C'est en vertu de cet article du règlement que je ferai ma proposition.
Je ne me souviens pas qu'on ait jamais présenté un projet plus compliqué que celui-là. Il y est question de la création de deux impôts d'accise, d'un impôt de débit, de grands travaux publics à faire par le gouvernement, d'un principe nouveau à introduire dans notre législation, le principe d'une garantie d'intérêt ; il s'agit de plus du vote d'un emprunt. Moi, j'avoue que j'ai besoin de réfléchir sur l'ensemble d'un système aussi compliqué ; qu'on nous laisse au moins du temps jusqu'à demain ; nous aurons pu lire dans le Moniteur les paroles prononcées par M. le ministre, et alors seulement nous pourrons nous rendre compte de l'ensemble de son plan.
M. Delfosse. - Messieurs, je n'approuve pas tout ce qu'a dit l'honorable M. Dumortier ; il a eu tort, selon moi, d'anticiper sur la discussion ; je crois néanmoins qu'on peut adopter sa proposition ; on peut décider que les pièces seront imprimées et distribuées ; lorsque la distribution aura eu lieu, on fixera le jour de l'examen en sections ; il est bon que chacun sache quel jour les sections se réuniront pour l'examen de ces projets, il est bon que chacun soit averti, pour qu'il se trouve à son poste. J'espère que, bien que la session soit très avancée, les membres de la chambre regarderont comme un devoir d'être à leur poste, pour l'examen en sections de projets de cette importance.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je ne fais aucune objection sur le point qui vient d'être traité par l'honorable M. Delfosse ; on peut imprimer et distribuer les pièces ; puis la chambre fixera le jour auquel l'examen en sections aura lieu.
L'honorable M. Cools paraît supposer que les propositions d'impôt font corps avec les propositions de loi relatives aux travaux publics se trouvent comprises dans le projet relatif aux travaux publics ; il n'en est rien : Il y a trois projets d'impôt qui sont tout à fait séparés ; la chambre décidera si elle examinera d'abord le tabac ou bien le genièvre, etc. ; cela m'est indifférent. Quant aux projets de travaux publics, c'est un ensemble ; le gouvernement a usé de son droit, en présentant un seul projet de loi, il va de soi qu'il doit être examiné tel qu'il est proposé.
M. Mercier. - Je pense avec l'honorable M. Delfosse qu'il y a lieu d'abord d'imprimer et de distribuer les pièces ; puis quand nous les aurons en notre possession depuis quelques jours, la chambre statuera sur le renvoi aux sections.
Il s'agit de projets de la dernière importance ; je me rends toujours exactement dans les sections, mais je déclare que si je n'avais pas eu le temps d'étudier des projets semblables, je ne m'y rendrai pas cette fois.
M. le ministre des finances a fait observer que les projets de loi d'impôt ne font pas corps avec les projets de travaux publics ; cela est vrai ; mais évidemment il faut qu'on ait pu apprécier les travaux publics qui sont proposés, avait de se décider à voter les impôts. Par conséquent, vous ne pouvez examiner les projets d'impôt, sans avoir pris une connaissance exacte des projets de travaux publics.
M. Delfosse. - Il ne faut pas qu'on donne à ma proposition plus de portée qu'elle n'en a ; ma proposition ne préjuge rien ; je demande que l'on fasse imprimer et distribuer les pièces ; lorsqu'elles seront (page 1532) imprimées et distribuées, on verra ce qu’il y aura à faire. Le renvoi aux sections peut être prononcé dès à présent, personne n’a d’intérêt à s’y opposer ; ce qui importe, c’est qu’on ne fixe pas dès aujourd’hui le jour où l'on se réunira en sections, pour l'examen des projets qui viennent d'être présentés.
M. Bruneau. - Messieurs, il y a deux points : d'abord, le renvoi aux sections, puis la fixation du jour où l'examen en sections commencera. On peut décider aujourd'hui que les projets seront renvoyés aux sections, sauf à fixer plus tard le jour de cet examen.
- - Plusieurs membres. - On est d'accord !
M. le président. - Je répète que le règlement porte que toute proposition de loi faite au nom du gouvernement est imprimée, distribuée et transmise aux sections ou à une commission. Il s'agit de savoir si l'on veut, oui ou non, mettre de côté le règlement ; qu'on s'en explique.
M. de Renesse. - Je demanderai à M. le ministre des finances si aux différentes propositions de travaux publics qu'il vient de présenter à la chambre, sont joints tous les renseignements qui pourraient nous prouver l'utilité, la nécessité d'entreprendre actuellement ces travaux ; si, surtout les rapports du conseil supérieur de ponts et chaussées se trouvent annexés au projet de loi sur la dérivation de la Meuse, dont la grande utilité paraît être contestée.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La réponse est extrêmement simple. Les documents que demande l'honorable membre ont été imprimés et distribués à tous les membres de la chambre depuis 1848. Les membres nouveaux de la chambre, d'après les renseignements qui me sont transmis, ont reçu également ce document volumineux, contenant des plans, devis, cartes, estimations, rapports, en un mot toutes les pièces propres à éclairer la chambre.
Vous trouverez dans votre collection sous le n°132 de la session 1847-1848 le document dont je vous parle. Si quelque membre ne l'avait pas, il n'aurait qu'à le demander à la bibliothèque où il en reste 92 exemplaires. Si la chambre veut de nouveau faire la dépense de l'impression, pour moi je ne m'oppose pas à ce qu'on imprime une deuxième fois ce document.
M. Osy. - Cela suffit.
M. Malou. - Je n'ai pas d'autre observation à faire si ce n'est qu'il est bien entendu que l'examen ne commencera en sections que quand tous les projets auront été imprimés.
M. Cools. — Je n'ai rien à dire en ce moment quant à l'examen en sections. J'ai indiqué ce que je me proposais de faire à l'ouverture de la séance de demain. Je veux, à l'imitation de M. de Renesse, adresser au gouvernement une interpellation.
Nous savons que pour achever le chemin de fer de l'Etat, il faut encore dépenser 18 millions ; si j'ai bien entendu, on n'en demande qu'un...
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ce n’est pas le moment de parler de cela.
M. Cools. - Je demande si on trouvera dans les pièces tous les renseignements à cet égard.
M. le président. - Toute la question qui reste à décider, c’est celle de savoir si on renverra les projets aux sections ou à une commission, sauf à fixer ultérieurement le jour de l'examen s'il est renvoyé aux sections.
M. Mercier. - J'accepte la question telle qu'elle est posée par M. le président, à la condition que ce sera la chambre qui fixera le jour de la discussion en sections. (Oui ! oui !)
- Le renvoi en sections est ordonné.
« Art. 28. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 19,900. »
- Adopté.
« Art. 29. Encouragements pour la navigation entre les ports belges et ceux d'Europe, sans que, dans l'un ou l'autre cas, les engagements puissent obliger l'Etat au-delà du crédit alloué pour l'exercice 1852, et sans que les crédits puissent excéder 40,000 francs par service, sauf pour le service au-delà du cap Horn. Personnel : fr. 1,050. »
- Adopté.
« Art. 30. Idem. Frais divers : fr. 113,350. »
- Adopté.
« Art. 31. Primes pour construction de navires : fr. 20,000. »
M. Osy. - Je demande la parole.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - J'aurai l'honneur de faire observer que cette question se présentera à la session prochaine, puisque la loi relative à construction des navires expire le 1er janvier prochain. Il est dans les intentions du gouvernement de présenter des dispositions nouvelles.
L'affaire s'instruit, toute discussion maintenant serait prématurée. Si un chiffre est porté au budget, c'est qu'il y aura encore des primes à payer l'année prochaine. Tout débat qu'on entamerait maintenant ne pourrait aboutir à aucun résultat, tandis que l'occasion de l'engager se présentera naturellement quand nous soumettrons à la chambre les dispositions qui doivent remplacer la loi du mois de janvier 1837. Pourquoi entamer maintenant une discussion ? Je ne pourrai que répondre que l'affaire est en instruction.
M. Osy. - Les paroles que vient de prononcer M. le ministre des affaires étrangères me forcent de prendre la parole demain sur l'article 31.
Il annonce qu'il faut instruire l'affaire, c'est une question très importante, je ne renonce pas à présenter mes observations demain.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Pourquoi pas aujourd'hui ? Nous n'avons eu guère plus de 2 heures de séance.
M. Osy. - Je demande alors que la séance soit fixée à midi.
- Cette proposition est adoptée.
La séance est levée à 4 heures 3/4.