(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)
(Présidence de M. Delehaye.)
(page 527) M. Ansiau procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
- La séance est ouverte.
M. de Perceval donne lecture du procès-verbal de la séance de samedi, dont la rédaction est approuvée.
M. Ansiau fait connaître l'analyse des pétitions suivantes.
« Le sieur Auguste Berger, avocat à Arlon, né à Luxembourg, prie la chambre, si elle le jugeait déchu de la qualité de Belge, de lui accorder la grande naturalisation avec exemption du droit d'enregistrement ou la naturalisation ordinaire, si elle pouvait seule lui être conférée. »
- Renvoi au ministre de la justice.
« Le sieur Gustave Dubois prie la chambre de lui accorder, ainsi qu'aux autres intéressés, tout ou partie de la succession en déshérence d'Adrien Desrus dit Delville, décédé ab intestat. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Doorselaere, ancien gendarme, demande une augmentation, de pension. »
- Même renvoi.
« Le sieur Cottebant, huissier des contributions directes du canton de Grammont, prie la chambre de lui accorder un subside annuel. »
- Même renvoi.
« Art. 2. Traitement des employés civils : fr. 140,000.
« Charges extraordinaires : fr. 5,850.
« Total : fr. 145,850. »
- Adopté.
Art. 3. Supplément aux officiers et sous-officiers employés au département de la guerre : fr. 4,000.
« Charge extraordinaire : fr. 6,000.
« Total : fr. 10,000. »
M. Osy. - Messieurs, pendant plusieurs années la minorité avait réclamé la suppression de l'indemnité accordée aux officiers employés au ministère de la guerre. L'année dernière ou il y a deux ans, cette allocation a rencontré une opposition tellement forte qu'on a demandé l'appel nominal. Aujourd'hui que le gouvernement consent à faire toutes les économies possibles, nous pensons que celle-là est la première à effectuer.
A notre avis, les militaires employés au département de la guerre ont moins de fatigue, moins de dépense que ceux qui font le service dans des garnisons.
Nous croyons donc que le moment est venu de supprimer cette augmentation de traitement. Je ne demande pas le retranchement de la totalité des 10,000 fr. ; 4,000 sont destinés à des sous-officiers détachés au département de la guerre ; ces sous-officiers ne peuvent pas aller dans les casernes, ils sont obligés de se nourrir en dehors des casernes. Je demande donc la suppression des 6 mille francs compris dans les charges extraordinaires.
Le gouvernement a consenti, il y a deux ans, à supprimer cette dépense au fur et à mesure des vacatures ; le moment doit être venu de la faire disparaître du budget.
M. de Chimay, rapporteur. - Messieurs, l'honorable baron Osy vient de renouveler une proposition qu'il a faite à la section centrale. Ainsi qu'il vient de vous le dire, le gouvernement a admis en principe la réduction dont il vous a entretenus. Il est entendu que les officiers qui seraient détachés à l'avenir au département de la guerre n'auraient plus droit au supplément de traitement. Il y a un certain nombre d'officiers qui jouissent encore de ce supplément ; il a paru convenable à la section centrale de ne pas anticiper sur une réduction accordée en principe par le gouvernement. C'est une affaire temporaire ; nous pensons qu'il y a lieu d'allouer le crédit demandé par le gouvernement.
M. Thiéfry. - Quand un officier obtient un brevet, il reçoit des appointements pour remplir les fonctions qu'on lui donne. S'il est placé dans un régiment, il en fait le service sans aucun supplément de traitement. S'il est ensuite détaché au département de la guerre, il obtient une indemnité et cependant sa besogne est moindre, la fatigue n'est pas aussi grande, la garnison de Bruxelles est plus agréable que celle de province, et pendant qu'il prend ses aises, son camarade et collègue fait pour lui le service du régiment.
Le ministre a bien reconnu la justesse de cette observation, puisqu'il a décidé que l'on procéderait à l'extinction de ces indemnités par suite d'avancement : mais si ces suppléments de traitement ne sont pas dus, pourquoi ne pas les supprimer tout de suite ? Il peut y avoir des droits acquis pour les traitements, mais pour des indemnités, jamais.
Le ministre des travaux publics a-t-il réduit par extinction les majorations de traitement que recevaient des employés de son département sous le nom de frais de tournée ? Non, messieurs, il n'a pas attendu, il a déraciné immédiatement l'abus. Il doit en être de même ici.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la proposition de M. Osy a été faite dans la section centrale ; elle n'a pas été accueillie. Le principe du supplément de traitement accordé aux officiers détachés au département de la guerre n'est plus en question. Pour moi, je crois qu'il y avait des motifs pour accorder ce supplément de traitement ; mais la question a été résolue dans un sens contraire par arrêté royal du 15 août 1848. Cet arrêté a été appliqué à plusieurs officiers ; successivement les suppléments de traitement disparaîtront ; il s'agit de savoir si l'on veut en priver les officiers qui en jouissent.
Je crois que cela serait injuste. L'année dernière, la proposition en a été faite ; elle a été repoussée par un grand nombre de voix dans cette enceinte. Le même accueil doit être fait à la proposition renouvelée eu ce moment.
La chambre doit prendre en considération qu'il s'agit ici d'un budget transitoire proposé par un ministre qui n'est plus en fonctions, et pour notre part nous nous bornerons à le soutenir dans tous ses articles. L'examen auquel on va se livrer mettra le gouvernement à même de présenter un budget nouveau, établi sur des bases nouvelles, qui pourra donner lieu à un débat sérieux.
M. Lebeau. - Comme l'a dit le rapporteur de la section centrale, l'honorable prince de Chimay, cette proposition de réduction a été repoussée par la majorité de cette section. Comme on l'a dit aussi, ces suppléments aux officiers ont un caractère purement temporaire ; on ne pourrait les supprimer sans s'exposer à des injustices.
Un mot suffira pour le prouver.
Je demande si les officiers désignés comme fonctionnaires au département de la guerre ont été libres de décliner cette mission. Je ne le pense pas. Ils ont dû obéir. Ils n'ont pas agi de leur propre volonté ; ils n'ont pas eu l'option. D'autre part, leur nomination à ces fonctions a eu pour résultat nécessaire d'obliger ces officiers à certaines dépenses d'établissement. Ceux qui se sont établis ainsi ont dû transporter leur mobilier. Probablement ils ont fait des baux ; ils ont des loyers ; ils ont dû meubler leur maison. Il serait impossible que brutalement, d'un jour à l'autre, on détruisît leur position.
Je demande donc avec l'honorable prince de Chimay, rapporteur de la section centrale, qu'on passe outre et qu'on se contente, pour aujourd'hui, de la proclamation du principe.
M. Bruneau. - Dans la dernière séance, en approuvant la nomination d'une commission chargée de chercher à introduire des économies dans le budget de la guerre, la chambre a en quelque sorte renoncé à en introduire cette année dans les articles spéciaux du budget. La chambre n'a pas voulu procéder par voie générale. Je ne pense pas qu'elle veuille procéder aujourd'hui par voie de détails.
Je crois que, pour résoudre ces questions de détails, nous devons attendre le rapport de la commission qui sera nommée.
Je voterai les différents articles du budget, tels qu'ils ont été présentés par l'honorable général Brialmont.
M. de Chimay, rapporteur. - Je désire ajouter quelques mots à l'observation de M. le ministre.
Je dois rendre la chambre attentive à un point important. L'honorable ministre a dit que la plupart des questions sont renvoyées au budget de 1852. Il est vrai que nous sommes, et je le regrette à tous égards, dans une position essentiellement transitoire. Mais je dois faire remarquer que, d'après la loi de comptabilité, le budget de 1852 doit être présenté dans le courant du mois de février. Or, il est impossible que la commission, qui sera nommée, ait terminé son travail dans un aussi bref délai. Je pense par conséquent que la chambre ne doit pas passer trop légèrement sur les économies à réaliser sur le budget actuel.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si le budget de 1832 est présenté dans le terme voulu par la loi, il le sera sous toutes réserves de modifications ultérieures.
- L'article 3 est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 10,000 francs. En conséquence la proposition de M. Osy n'est pas adoptée.
« Art. 4. Matériel : fr. 40,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Dépôt de la guerre : fr. 26,000. »
- Adopté.
M. Osy. - Mes observations portent principalement sur l'article 6.
Dans la discussion générale, un honorable député de Bruxelles avait demandé des renseignements au gouvernement, au sujet de militaires qui se trouvent au service de la Belgique, et qui ne sont pas Belges, qui n'ont pas voulu demander la naturalisation. Je prierai M. le ministre de l'intérieur faisant fonctions de ministre de la guerre de vouloir examiner cette question et de faire rentrer ces militaires dans les conditions exigées par la Constitution. Il y a trop longtemps que beaucoup d'officiers non encore naturalisés continuent à servir la Belgique.
J'ai une autre observation à faire sur l'article 6.
Je ne parlerai pas du nombre de nos généraux, puisque ce sera une (page 528) question à examiner par la commission à nommer par le gouvernement. Mais j'ai fait observer a la section centrale que nous avions aujourd'hui un lieutenant-général qui recevait le traitement d'activité et qui n'avait pas d'emploi. On nous a répondu que ce lieutenant général avait l'emploi d'adjudant-général. Mais, messieurs, cet emploi n'existe pas dans l'armée.
Avant le changement du ministère du 12 août, cet honorable général commandait une division territoriale ; on a trouvé convenable d'en nommer un autre et on a voulu conserver à l'ancien titulaire sa position d'activité de service. Eh bien, messieurs, comme la loi ne permet pas de donner des traitements d'activité sans avoir un emploi, je demande au gouvernement d'examiner la question ; et si effectivement cet adjudant-général n'entre pas dans les cadres des employés de l'armée, je crois qu'il faut le mettre en disponibilité, ou tout au moins lui donner le traitement de non-activité.
Cet emploi d'adjudant-général, pendant nombre d'années, a été remplie par un autre général, qui voulait aussi conserver le traitement d'activité. Or, alors le gouvernement s'y est opposé. Il a dit : Vous ne pouvez pas avoir le traitement d'activité s'il n'y a pas d'emploi, et alors on a nommé cet officier inspecteur de la grosse cavalerie.
- L'article est mis aux voix et adopté. La discussion est close.
« Art. 6. Traitement de l'état-major général : fr. 673,000. »
- Adopté.
« Art. 7. Traitement de l'état-major des provinces et des places : fr. 269,804 70. »
- Adopté.
« Art. 8. Traitement du service de l'intendance : fr. 141,915 50. »
- Adopté.
« Art. 9. Traitement du service de santé et administration des hôpitaux : fr. 327,014 75. »
M. le ministre de la guerre a proposé, par amendement, de réduire le chiffre de cet article à 320,174 fr. 12 c.
- Le chiffre de 320,174 fr. 12 c. est mis aux voix et adopté.
« Art. 10. Nourriture et habillement des malades ; entretien des hôpitaux : fr. 435,150. »
- Adopté.
« Art. 11. Service pharmaceutique : fr. 110,000. »
- Adopté.
« Art. 12. Traitement et solde de l'infanterie : fr. 9,559,000. »
M. le ministre de la guerre a proposé, par amendement, de réduire ce chiffre à 9,510,000 fr.
M. de Chimay, rapporteur. - Je dois appeler l'attention de la chambre sur un fait qui m'a paru d'une nature assez grave. Dans la séance du 20 novembre 1850, vous avez reçu de M. le ministre de la guerre une communication ayant pour but de vous informer que, grâce à diverses recherches, il était parvenu à introduire dans son budget des réductions sur différents articles intitulés : « Articles permanents, » c'est-à-dire des économies permanentes et cela jusqu'à concurrence de 302,000 fr. En passant en revue les divers articles du budget, j'ai été à même de constater qu'une partie considérable de cette somme n'a pas été obtenue au moyen d'économies réalisées sur des chapitres permanents, mais qu'elle a été prise sur des chapitres essentiellement mobiles, entre autres sur la solde des troupes.
Ainsi, par exemple, au chapitre IV, j'ai vu figurer une somme de 21,000 francs pour congés et incomplets.
Eh bien, messieurs, ce n'est nullement là une économie permanente. Des congés de trois ou quatre jours et successifs et qui réduisent outre mesure l'effectif même des compagnies ne peuvent pas être considérés comme une mesure permanente.
Je tiens à rendre la chambre attentive à ce point parce que les différents chiffres dont il s'agit s'élèvent à une somme de 115,000 francs. Ce sont donc 115,000 francs qu'il faut, dès à présent, déduire des économies permanentes signalées par M. le ministre de la guerre. Cela concerne non seulement l'infanterie, mais la cavalerie, l'artillerie et le génie.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'honorable rapporteur de la section centrale a raison jusqu'à un certain point : les économies proposées par l'honorable général Brialmont peuvent n'être pas permanentes. Si l'on trouvait ultérieurement des inconvénients à renvoyer un certain nombre d'hommes en congé, 3 ou 4 par compagnie, si ce système n'est point permanent, les réductions ne seront point permanentes ; mais M. le général Brialmont n'a pas dit que les réductions seront permanentes ; il s'est borné à dire qu'elles portaient sur des articles permanents : je répète ses expressions sans vouloir leur donner une autre portée. Il a annoncé à la section centrale que les réductions portaient sur des articles permanents ; il ne veut pas dire par là qu'elles seront à toujours permanentes. Cela dépend des circonstances.
M. de Chimay, rapporteur. - Il m'est impossible d'admettre avec M. le ministre de l'intérieur que le crédit pour la solde des troupes soit un crédit permanent ; cela ne fait pas question ; mais ce qui est essentiellement variable, c'est le nombre d'hommes sous les armes. Or, nous savons tous que les cadres actuels sont maintenant très dégarnis, et l'honorable M. Thiéfry lui-même a été l'un des premiers à signaler ce fait ; c'est à peine si le nombre d'hommes actuellement sous les armes suffit aux exigences les plus impérieuses du service. L'économie qu'on a réalisée sur ce crédit ne peut donc nullement être considérée comme permanente, puisqu'elle disparaîtra dès le moment où M. le ministre de la guerre rappellera les hommes en congé.
J'insiste, de nouveau, sur ce fait ; car on peut remarquer que c'est à l'aide d'économies de cette nature qu'on est parvenu à constater une réduction de trois à quatre cent mille francs sur le budget de l'année dernière. En examinant avec attention les dernières modifications apportées au budget, on trouve, au contraire, qu'il se solde par un excédant de 100,000 fr. sur les prévisions de M. le général Chazal.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Quand nous arriverons à l'article fourrages, nous pourrons débattre l'opinion de l'honorable prince de Chimay. Nous ne demandons à la chambre ni plus ni moins que les crédits qui figurent au budget. Or, le budget de 1851 présente sur celui de l'exercice de 1850 une réduction de 300,000 francs ; c'est là un fait incontestable.
M. de Chimay. - C'est une erreur !
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je vous demande pardon ; votez le budget et la réduction sera votée.
J'ai répété l'expression dont s'est servi M. le général Brialmont. Je me suis borné à constater un fait ; c'est que les réductions proposées portent sur les dépenses permanentes. Voulez-vous supprimer le mot « permanente » ? Je n'y tiens nullement ; l'expression n'est pas de moi. Dites que la réduction porte sur l'un des articles 12, 13, 14 ou 15, peu importe ; il n'en est pas moins vrai que la réduction s'applique à des dépenses ordinaires ou permanentes.
M. Delfosse. - L'observation de M. le rapporteur de la section centrale n'a aucune espèce de portée. Il n'y a pas, en matière de dépenses, d'augmentations permanentes, comme'il n'ya pas de réductions permanentes. Le budget étant annuel, les divers crédits, soit ordinaires, soit extraordinaires, peuvent être modifiés chaque année par le vote des chambres.
- L'article 12 est mis aux voix et adopté.
« Art. 13. Traitement et solde de la cavalerie : fr. 3,115,400. »
M. Lebeau. — La majorité de la chambre a déclaré, après de longs débats, qu'elle agréait l'idée de la nomination d'une commission par le gouvernement. C'est là un fait accompli, et je ne viens pas me livrer à des récriminations tardives et qui seraient peu convenables.
L'attention du gouvernement va se reporter sur toutes les questions qui ne touchent pas, a-t-il dit, à la force organique de l'armée ; dès lors la commission sera appelée à examiner toutes les économies réalisables.
Je me plais à signaler à l'attention de M. le ministre de l'intérieur les recherches laborieuses et persévérantes d'un de nos anciens collègues, M. le colonel Eenens. M. le colonel Eenens, je le répète, avec cette persévérance qui annonce une conviction profonde, croit qu'on pourrait tirer un grand parti pour l'agriculture, et de manière à trouver, sous ce rapport, une compensation des dépenses que nécessite l'entretien de l'armée, de l'emploi de la cavalerie au défrichement de nos landes.
Ces idées ont paru, je dois en féliciter M. le minisire de l'intérieur, dignes d'être encouragées. Je pense qu'il a décidé qu'elles seraient soumises à l'examen du conseil général d'agriculture. Je crois qu'en effet, les propositions de M. le colonel Eenens rentrent partiellement dans les attributions du conseil d'agriculture ; mais je ne crois pas, que ces propositions soient indignes de l'examen de la commission dont la nomination a été annoncée par le gouvernement.
Je recommande donc cet objet à l'attention du gouvernement, pour être soumis à l'examen de la commission, comme une de ces questions qui n'affectent pas particulièrement l'organisation de l'armée, et je suis heureux de saisir cette occasion, pour témoigner au colonel Eenens ma sympathie pour ses louables efforts en faveur du maintien de notre organisation militaire.,
M. de Chimay. - Je m'associe aux observations qu'a présentées l'honorable M. Lcbeau ; mais je crois pouvoir dire à l'assemblée que ces essais ont été en partie réalises par les travaux qui sont exécutés, je crois, au camp de Beverloo. L'administration militaire a déjà appliqué ces essais à la culture ; les résultats qu'on a obtenus jusqu'à présent paraissent dépasser toutes les espérances. Il y a déjà plus de deux cents hectares mis en culture. J'appelle aussi sur ce point l'attention toute particulière du gouvernement.
M. Roussel. - Messieurs, le système du colonel Eenens n'est nullement réalisé, ni en tout ni en partie, par les essais qui ont été faits jusqu'à présent.
Le système de M. le colonel Eenens repose sur des bases beaucoup plus larges ; il s'agirait, dans un temps donné, d'arriver au défrichement complet de toutes nos bruyères par une espèce de colonisation intérieure, (page 529) de telle façon que l’on pourrait réaliser de grands bénéfices, et résoudre un des problèmes les plus importants de notre époque, celui de l'extinction du paupérisme. Sous ce rapport, il y a une notable différence entre ce système et les essais tentés au camp de Beverloo. M. le colonel Eenens a publié différents écrits dont j'ai pris lecture, et je dois me joindre à M. Lebeau pour demander à M. le ministre de l'intérieur de vouloir bien soumettre cette question à la commission. Il est peu d’idées aussi importantes. Le colonel Eenens s'appuie sur des faits positifs et qui concilieraient l'existence d'une armée permanente avec les éventualités beaucoup plus probables de la paix.
Généralement les militaires se font une idée inexacte du travail matériel. Le travail ennoblit l'homme ; il ennoblirait même les armes, car si les armes destructives ont, à certains yeux, leur utilité pour défendre la nationalité, elles ne trouveraient aucun amoindrissement dans le voisinage des armes pacifiques de l'industrie. Elles parviendraient de cette manière à réaliser deux buts : d'abord la sécurité dans la nationalité à l'extérieur et l'amélioration des conditions humaines à l'intérieur, gage beaucoup plus réel de nationalité que le précédent.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, le mémoire dont on a parlé m'a été renvoyé par le ministre de la guerre, il y a environ un mois. J'ai fait examiner ce mémoire ; je l'ai jugé digne d'être soumis à l'examen du comité supérieur d'agriculture qui doit être réuni incessamment. Je ne puis qu'applaudir aux travaux de tous les officiers qui recherchent les améliorations qu'on peut introduire dans notre système militaire. Je ne pourrais qu'encourager ces travaux, ces écrits, quand ils se renferment dans les limites des convenances et de la modération.
Le travail dont il s'agit sera examiné par le comité d'agriculture, et cela n'empêchera pas que la commission qui sera nommée par le gouvernement l'examine également, s'il y a lieu.
-L'article est adopté.
« Art. 14. Traitement et solde de l'artillerie : fr. 2,624,000. »
- Adopté.
« Art. 15. Traitement et solde du génie : fr. 721,900. »
- Adopté.
M. Osy. - Voici un article sur lequel la section centrale a été unanime pour dire qu'il y avait quelque chose à faire pour le moment ; elle a émis à l'unanimité l'opinion qu'il y aurait avantage à supprimer une des deux universités de l'Etat et à créer dans la ville, dont l'université serait supprimée, une école polytechnique qui comprendrait l'école militaire, l'école du génie civil et l'école des mines. De cette manière, les jeunes gens qui fréquenteraient ces trois cours pourraient choisir la carrière qu'ils voudraient suivre. Par là le gouvernement trouverait non seulement au budget de la guerre mais sur tous les budgets, sur celui des travaux publics et celui de l'intérieur, des économies assez importantes.
On sait qu'à l'occasion du budget de la guerre, il n'est pas possible de trancher cette question. Mais comme le gouvernement a depuis longtemps l'opinion de la section centrale sous les yeux, il pourrait, ce me semble, dire à la chambre ce qu'il en pense. En attendant, je lui demanderai de la faire examiner par une commission nommée dans le sein de la chambre, en dehors de la commission chargée d'examiner la question militaire ; cette commission pourrait réaliser de grandes économies.
Aujourd'hui votre école militaire compte 62 jeunes gens ; ces jeunes gens s'ils ont fait de bonnes études, vous êtes obligés de leur donner une place, nonobstant l'encombrement des cadres ; on accorde même des bourses pour l'école militaire ; sur 62 élèves il y a 12 boursiers ; je ne sais si toutes les bourses sont bien données à des personnes sans fortune. Nous avons demandé les noms et le nombre des boursiers. Nous avons seulement appris qu'il y avait 62 élèves dont 12 boursiers.
Je pense que vous avez vingt jeunes gens que tous les ans vous devez placer dans l'armée. Vous nommez des officiers de cavalerie, et quand il n'y a pas de place dans les cadres, vous les faites compter dans l'infanterie. Le nombre des jeunes gens de l'école que vous devez nécessairement placer, décourage les sous-officiers dont les chances d'avancement deviennent extrêmement minimes.
En créant une école polytechnique et en ne prenant pas d'engagement de placer les élèves qui en sortiraient, nous ferions des économies et nous pourrions offrir quelque perspective d'avancement aux sous-officiers de notre armée.
Je ne dirai qu'un mot de l'école militaire. Elle a pour directeur un général-major qui, outre le logement, a une indemnité de trois mille francs. Vous voyez l'avantage accordé au directeur de cette école.
Il me semble que ce serait bien assez de lui donner le logement sans y ajouter l'indemnité. Si le gouvernement n'entrait pas dans les vues de la section centrale, ce serait déjà une économie qu'on pourrait faire, et ce n'est probablement pas le seul abus que renferme cette école.
Je prie M. le ministre de nous dire si l'intention du gouvernement est d'examiner le vœu émis à l'unanimité par la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - La question soulevée par l'honorable préopinant a été examinée à plusieurs reprises, et en dernier lieu par une commission spéciale, dont les conclusions m'ont été envoyées : mais, je dois le dire, elles étaient très incomplètes, elles ne contenaient pas de solution. Quand on a créé l'école militaire, mes honorables amis et moi, nous avions pensé, dans un but d'économie et dans l'intérêt du haut enseignement, qu’il serait utile de l'attacher à l'un des deux universités. L'opinion contraire a prévalu ; on a décidé qu'outre les deux universités de Liège et de Gand, il y aurait une université militaire à Bruxelles ; ce qui a fait trois universités au compte de l'Etat. Quand la chambre s'est occupée du haut enseignement, j'avais émis l'opinion de créer une seule université centrale aux frais de l'Etat. J'étais guidé par des raisons d'économie et des raisons scientifiques, par l'intérêt du haut enseignement ; cette opinion n'ayant pas été partagée par la majorité, nous nous trouvons en présence de trois établissements de haut enseignement : deux universités et l'école militaire.
Je dois dire, en ce qui concerne l'école militaire, que cet établissement répond parfaitement à son but, qu'il a conquis, dans le pays et dans les pays étrangers, une haute réputation, qu'il fournit a notre armée un grand nombre d'officiers très distingués qui font honeur au pays et à l’armée et qui rendent dans cette position de très grands services.
Quant à l'élément scientifique, quant à l'élément savant de l'armée, s'il s'agissait de le restreindre, je n'y consentirai jamais. Je dirai un mot aussi de l'école de Lierre qu'on a attaquée dans une séance précédente ; elle rend un très grand service aux enfants de troupe. La plupart de ces enfants, qui ne reçoivent qu'une éducation incomplète dans les compagnies, quand ils n'y ont pas de mauvais exemples pour leur âge, sont soumis dans l'école de Lierre à un régime excellent qui les transforme et les détourne des mauvaises voies pour en faire de très bons soldats, de très bons caporaux, de très bons sous-officiers. Avant de toucher à ces deux institutions, extrêmement utiles, extrêmement recommandables, il faudrait y regarder de très près.
M. de Chimay, rapporteur. - L'honorable ministre vient de nous dire qu'une commission a déjà été saisie de l'examen de cette question, qui jusqu'à présent est restée sans solution. Je le comprends. Remarquez que, lorsqu'il s'est agi du transfert de l'école militaire, la question s'est présentée, non en connexité avec d'autres, mais isolée. Je conçois qu'en présence des intérêts de localité qui étaient en jeu, on ait hésité à porter la perturbation dans tel ou tel établissement important.
Mais la question qui a été soulevée dans la section centrale est celle de savoir s'il ne conviendrait pas de supprimer l'une des deux universités et de donner en compensation à la ville qui était le siège de l'université supprimée un autre grand établissement. Je crois qu'il y a lieu pour le gouvernement de s'occuper de cette question d'une manière sérieuse.
J'insiste donc, avec l'honorable M. Osy, pour la nomination d'une commission spécialement chargée d'examiner cette question en dehors des préoccupations actuelles.
M. Lebeau. - Comme j'ai pris part au vote de la section centrale, qui a été émis à l'unanimité, je tiens cependant à dire à la chambre comment je comprends ce vote.
Il est très facile de concevoir que la section centrale, mue par le désir d'entrer dans les vues du gouvernement, c'est-à-dire de réaliser des économies qui ne fussent pas de nature à porter atteinte à la force organique de l'armée, a cherché à atteindre ce but de toutes parts, de tous les côtés. Mais la section centrale s'est occupée transitoirement, fugitivement, de la question qui occupe la chambre. Elle n'a eu que la pensée d'offrir aux délibérations de la chambre un canevas. C'est ainsi que je l'ai compris, quant à moi.
Il faudrait que je me livrasse à des études bien autrement approfondies, pour attacher ma part de responsabilité à une décision soumise aux délibérations de la chambre. Je le répète, il s'est agi d'un véritable canevas.
Je crois qu'il y a quelque chose à faire. C'est ainsi que j'entends le vœu émis par la section centrale.
M. Delfosse. - Lorsque nous discuterons le budget de l'intérieur, on pourra faire des propositions relatives aux universités de l'Etat. Alors j'accepterai la discussion. Aujourd'hui je ne l'accepte pas. Je ne la crois pas opportune.
Je ferai seulement une remarque.
Je suis quelque peu surpris que ceux qui ne voulaient pas qu'on touchât à la loi de 1845, loi votée par l'ancienne chambre, viennent nous proposer de toucher à une loi faite par la chambre actuelle, à la loi sur l'enseignement supérieur votée, il y a deux ans, à une forte majorité.
M. Lebeau. - Ce n'est pas de gaieté de cœur que la section centrale s'est livrée aux considérations qui ont amené le vœu consigné dans son rapport. Si son attention n'avait pas été éveillée sur la nécessité de rechercher des économies qui ne pussent porter atteinte à la force organique de l'armée, elle ne se serait pas livrée à un pareil travail. Mais elle s'est demandé si, avant de sauvegarder certains intérêts de localité, il ne (page 530) convenait pas (l'honorable prince de Chimay l'a compris absolument comme nous) de rechercher des économies qui laissassent intacte la force organique de l'armée. Ce n'est donc pas de gaieté de cœur, c'est poussés pas notre sollicitude pour l'armée que nous avons été amenés à porter nos regards tout autour de nous dans toutes les branches de l'administration, pour voir s'il n'y a pas des superfluités, des dépenses de luxe, qui excitent un si vif émoi quand on croit les apercevoir dans l'armée, mais qui ne paraissent plus en général aussi gênantes quand il s'agit de certaines localités favorisées.
M. de Chimay, rapporteur. - L'honorable M. Delfosse paraît s'étonner de ce qu'il se soit agi de cette question, à propos du budget de la guerre. Mais comme l'a dit l'honorable M. Lebeau, nous n'avons nullement entendu examiner cette question à fond. C'est une idée que nous soumettons à l'appréciation du gouvernement, parce que, entre autres motifs graves qui militent pour son adoption, il en résulterait une économie de 250,000 à 300,000 fr., ce qui n'est pas à dédaigner.
Si l'honorable M. Delfosse s'étonne du vœu émis par la section, je lui demanderai la permission de m'étonner de ce qu'il s'insurge par avance contre une économie qui n'est même pas faite. L'honorable membre, si ardent d'économies à propos de l'armée, semblerait n'en plus vouloir lorsqu'il s'agit de certains intérêts de localité.
Je n'en dirai pas davantage. La chambre me comprendra.
M. Delfosse. - Je ne m'insurge contre rien du tout. Je dis seulement qu'il n'y a pas à discuter en ce moment, que la discussion serait inopportune.
Qui est-ce qui se préoccupe ici d'intérêts de localité ? Ce n'est pas moi, mais bien la section centrale, puisqu'elle propose d'indemniser celle des deux villes qui serait privée de son université. Les intérêts de localité ne viennent pour moi qu'en seconde ligne, je me préoccupe avant tout de l'intérêt général.
Si l'existence de deux universités n'est pas utile à l'enseignement, à la civilisation, supprimez-en une, sans vous inquiéter des intérêts de localité.
La question est d'un ordre plus élevé : l'existence de deux universités est-elle utile à l'enseignement, à la civilisation ? C'est une question qui a déjà été résolue. La chambre a consacré l'existence de deux universités par une loi votée à une grande majorité. (Interruption.)
Oui, la question a été décidée. La chambre n'a pas admis l'opinion de ceux qui voulaient supprimer une université.
Je le répète, du reste, nous avons à nous occuper du budget de la guerre, de l'armée, et non des questions relatives à l'enseignement supérieur.
M. Malou. - Je m'inquiète assez peu de savoir si l'honorable M. Delfosse accepte ou n'accepte pas le débat, C'est à la chambre à décider. Or elle accepte la discussion. J'ajoute que cette discussion est opportune. En effet il ne s'agit pas de savoir s'il y a des modifications à introduire dans les lois qui régissent l'enseignement supérieur et l'école militaire qui constitue l'une des branches de cet enseignement, mais s'il est opportun, utile d'examiner la question que la section centrale a soulevée. En effet, l'honorable M. Osy et ses collègues de la section centrale demandent au gouvernement s'il entre dans ses intentions de soumettre à un examen spécial les questions soulevées par la section centrale, et qui pourraient aboutir à une économie notable, sans nuire à l'un de nos plus grands intérêts, l'intérêt du haut enseignement.
On ne demande pas que cette question soit résolue. Mais on demande s'il entre dans les intentions du gouvernement d'en confier l'examen à une commission.
Et en effet, messieurs, cette demande me paraît toute naturelle. La commission, dont le principe a été adopté à la séance de samedi, ne peut évidemment pas s'occuper de cette question. Elle aura beaucoup à faire pour examiner et pour résoudre en temps utile, avant le budget de 1852, toutes les questions qui se rattachent à notre établissement militaire. Ici, au contraire, il s'agit d'une question mixte, d'une question qui ne touche à notre établissement militaire qu'à raison de l'existence de l'école militaire.
Messieurs, on a recherché avec soin des économies. S'il était reconnu possible d'introduire dans l'organisation du haut enseignement une économie de 300,000 fr., il est évident qu'une pareille économie réagirait sur l'opinion de la chambre en ce qui concerne la matière plus directe, plus grande de tout notre établissement militaire.
C'est à ce titre que j'insiste, comme d'honorables préopinants, pour que le gouvernement veuille bien prendre l'engagement de nommer une commission qui lui fasse un rapport, sauf à lui à examiner ce rapport, et à la chambre, lorsqu'une communication lui aura été faite à ce sujet, à prendre telle résolution qu'elle jugera utile à tous les intérêts.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, j'ai déjà eu l'honneur de faire connaître à la chambre (mon observation aura échappé à l'honorable préopinant) que la question avait été examinée tout récemment par une commission spéciale ; que cette commission avait fourni au gouvernement des conclusions, mais j'ai ajouté que ces conclusions n'avaient pas paru concluantes au gouvernement.
Nous ne reculons devant aucune espèce d'examen qui peut être fait utilement, qui peut conduire à un résultat pratique.
Si, en effet, sans faire courir aucune espèce de dangers à l'enseignement militaire, ni à l'enseignement universitaire qu'il faut, l'un et l'autre, maintenir intacts et florissants, il était possible de réunir ces enseignements en faisant une économie, le gouvernement serait le premier à venir proposer de mettre en pratique ce moyen.
Diverses combinaisons se présentent. Pourrait-on, par exemple, adjoindre à une de nos universités, l'école militaire avec sa discipline, son pensionnat tel qu'il est maintenant organisé. Ce système aurait l'avantage de réduire les dépenses tout en maintenant et l'école militaire et les deux universités.
Au surplus, cette question fort délicate, fort difficile, pourra être de nouveau examinée ; et si le gouvernement parvient à une solution pratique, il l'apportera à la chambre.
M. de Chimay, rapporteur. - J'ai hâte de déclarer à M. le ministre de l'intérieur qu'il n'est nullement entré dans l'esprit de la section centrale, pas plus que dans la pensée des orateurs qui se sont occupés de cette proposition, d'en faire une question d'enseignement supérieur ; c'est simplement une question d'économie.
M. le ministre de l'intérieur nous a dit qu'il avait par-devers lui le rapport d'une commission. Mais je fais remarquer à M. le ministre et à la chambre que cette commission ne s'est pas occupée de la question telle qu'elle est posée maintenant. On a pu examiner isolément la situation de l'école militaire et celle de telle ou telle université, mais non la question telle que nous la posons actuellement.
Je pense donc qu'il n'y a aucun inconvénient à ce que le gouvernement accepte la proposition de l'honorable M. Osy, et prenne l'engagement de nommer une commission spéciale qui s'occuperait du vœu de la section centrale tel qu'il est formulé. Je le répète, il n'y a ici aucune espèce de question d'enseignement. C'est une simple question économique qui se présente sous un jour nouveau, et qui mérite toute l'attention du gouvernement.
M. de Brouckere. - Messieurs, je viens d'entendre M. le ministre de l'intérieur nous dire qu'une commission ayait été chargée d'examiner je ne sais trop quoi ; qu'elle avait présenté des conclusions qu'on ne nous a pas fait connaître, et que le gouvernement n'avait pas admis ces conclusions. J'avoue que nous ne pouvons pas tirer grand parti des paroles de M. le minisire de l'intérieur.
Pour moi, je trouve l'école militaire admirablement organisée. C'est certainement un établissement que nous pouvons montrer avec orgueil ; mais il ne suffit pas d'avoir de bons et de beaux établissements. Il faut encore voir la question financière dans tout établissement. Or l'école militaire, comme elle est organisée, coûte, permettez-moi de me servir de cette expression, horriblement cher.
Pour 62 élèves, si l'on compte tout, la dépense s'élève à près de 300,000 fr. Cela fait par élève 5,000 fr. par an, et pour les quatre années d'étude 20,000 fr.
Voilà des jeunes gens qui coûtent, à l'Etat seulement, 20,000 francs, sans compter ce que leur éducation coûte à leur famille.
Supposez que les familles, pour les amener jusque-là et pour payer la pension à l'école militaire, pendant quatre ans, ne dépensent que 15,000 francs. Voilà 35,000 francs qui représentent, comme capital viager, un intérêt de 3,500 francs. Or, pour une dépense qui représente en viager une rente de 3,500 francs, vous leur ouvrez quoi ? Vous leur ouvrez une carrière qui leur donne 2,000 francs pendant 10 ans, 2,400 francs pendant dix autres années, pour arriver au chiffre de 3,700 francs, c'est-à-dire, au traitement de capitaine. C'est là, pour beaucoup, le point d'arrêt. Par conséquent, vous ne leur rendez pas la moitié du capital dépensé pour faire leur éducation. Eh bien, économiquement parlant, c'est le plus mauvais calcul que l'on puisse faire.
M. Delfosse. - Ce que j'ai combattu, ce n'est pas ce que M. le rapporteur de la section centrale propose en ce moment. M. le rapporteur se borne maintenant à demander que le gouvernement examine ou fasse examiner la question. Ce n'est pas là ce que j'ai combattu. Le gouvernement doit toujours examiner les questions importantes ; c'est son devoir. Ce que j'ai combattu, c'est le vœu unanimement émis par la section centrale de la suppression de l'une des deux universités ; la section centrale du budget de la guerre n'avait pas qualité, elle n'était pas compétente pour émettre un tel vœu.
M. Lebeau. - Je dois à mon tour m'insurger, puisque l'on a employé ce mot, contre la prétention de l'honorable M. Delfosse d'enfermer la section centrale dans une espèce de cercle de Popilius, qui désormais devrait se nommer le cercle de Delfosse. (Interruption.)
La section centrale, on le comprend très bien, n'a pas fait de proposition ; elle a émis un vœu. Mais si l'on veut considérer sous l'influence de quelles idées la section centrale a émis ce vœu, on reconnaîtra que ce n'était que sous l'influence d'idées économiques auxquelles elle était poussée par les circonstances. L'opinion qu'elle émettait, le vœu qu'elle énonçait, la formule même de ce vœu, tout cela ne pouvait être qu'un canevas. Il est impossible de penser que des hommes sérieux, des hommes sensés, aient eu la prétention de formuler une loi nouvelle sur l'enseignement. J'aurais cru qu'il était inutile que l'honorable prince de Chimay et moi, nous nous expliquassions davantage sur la portée de l'observation de la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, on vient de dire que l'école militaire coûte, pour répéter l'expression dont on s'est servi, horriblement cher.
Si l'on calcule les frais généraux de l'école militaire à raison de 300,000 fr., et si l'on compare cette somme au nombre d'élèves, on (page 531) peut trouver qu'en effet cette école est un établissentml qui occasionne de fortes dépenses.
Mais il faut tenir compte de deux faits importants. D'abord il faut déduire de cette somme la pension payée par les élèves et qui s'élève, je pense, à 25,000 fr. En outre, il faut déduire le traitement des professeurs militaires, qui sont des officiers qui sont détachés de leur corps. Si ces officiers n'exerçaient leurs fonctions spéciales à l'école militaire, ils rempliraient leurs fondions chacun dans son corps et dès lors la dépense se ferait également. Seulement elle se ferait dans les cadres de l'armée, tandis qu'elle se fait aujourd'hui dans les cadres de l'école militaire.
M. de Brouckere. - Il y aurait lieu de la supprimer.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Mais non, elle se fait dans les limites de la loi d'organisation, à laquelle on dit ne pas vouloir toucher.
M. de Brouckere. - Ce n'est qu'une loi de maximum.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il ne faut donc pas exagérer les dépenses de l'école militaire. Si, d'ailleurs, l'honorable M. de Brouckere trouve que la dépense de l'école militaire est trop forte et qu'au besoin il donne les mains à la suppression de cette institution…
M. de Brouckere. - On demande, non pas qu'elle soit supprimée mais qu'elle soit réunie à une aulre école.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si l'honorable membre se place à ce point au-dessus de l'intérêt local...
M. de Brouckere. - Nous ne sommes pas ici pour défendre des intérêts locaux.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'en félicite l'honorable membre.
M. Osy. - M. le ministre de l'intérieur nous parle de l'ancienne commission, mais véritablement nous ne savons pas ce que cette commission a fait.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Voulez-vous le rapport ?
M. Osy. - Aujourd'hui, la section centrale, à l'unanimité, a émis un voeu, et moi j'ai été plus loin : j'ai demandé que le gouvernement nommât, au sein de la chambre, une commission pour examiner la question. Il était impossible à la section centrale de faire une proposition à l'occasion du budget de la guerre, puisque la chose dépend également du ministère des travaux publics et du ministère de l'intérieur. Je demande formellement que le gouvernement veuille nommer une commission dans le sein de la chambre pour examiner cette question.
- Un membre. - En dehors de la chambre.
M. Osy. - Il faut que ce ne soit pas la commission dont il a été question samedi dernier. Il s'agit ici d'une affaire mixte. Je demande que le gouvernement nomme une commission spéciale en dehors de la commission militaire, pour examiner la question soulevée par la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la commission qui a examiné une première fois la question dont il s'agit, c'est-à-dire la question de la fusion de l'école militaire avec l'une ou l'autre université, ou l’adjonction de l’école militaire à l’une ou à l’autre université du royaume, cette commission n’est pas dissoute ; elle existe encore. Ses conclusions n’ont pas paru complètes. J’ai déjà dit que le gouvernement peut renvoyer la quesiton à la commission, et, dès lors, je pense qu’on peut mettre fin à cette discussion, qui ne mène à rien.
M. Jullien. - Messieurs, la section centrale a saisi la chambre d'une véritable proposition, car je lis dans le rapport :
« Un membre insiste sur le vœu émis par la deuxième section, de voir fondre en une seule les écoles scientifiques de l'Etat. Un autre membre appuie cette proposition mais il ajoute que, pour arriver à une économie plus importante sur les dépenses générales, on pourrait réunir en une seule les deux universités de l'Etat, et placer la nouvelle école polytechnique dans la ville que cette double mesure priverait de son université.
« La section centrale adopte cette proposition à l'unanimité. »
Voilà donc, messieurs, une proposition déférée à la chambre par la section centrale. Il ne faut pas que le vœu de la section cemtrale reste stérile ; on peut, ce me semble, disjoindre de la discussion du budget de la guerre, la proposition de la section centrale pour en faire l'objet d'un examen séparé. La question, messieurs, est des plus importantes, et s'il est vrai que nous puissions, au moyen de la fusion projetée, réaliser une économie de 300 à 400 mille francs, évidemment il est du devoir de la chambre d'enquérir sur ce point. Je crois donc qu'on ferait bien de considérer la proposition de la section centrale comme une proposition spéciale qui ferait l'objet d'un examen, soit de la part du gouvernement, si le gouvernement prend l'engagement de faire procéder à cet examen, soit de la part d'une commission instituée par la chambre elle-même et qui proposerait un projet de loi, s'il y avail lieu.
M. Verhaegen. - La section centrale a émis un vœu et j'en accepte ma part de responsabilité, puisque ce vœu a été émis à l'unanimité ; mais je ne pense pas que ce vœu puisse être considéré comme une proposition dans le sens de ce que vient de dire l'honorable M. Jullien.
C'est, messieurs, une question à examiner, et je crois que nous arriverions à un résultat si on renvoyait cet examen à une commission nommée par la chambre, en donnant à cette commission le pouvoir d'examiner la question dans son ensemble sans aucune restriction.
Je dis : en donnant à la commission le pouvoir d'examiner la question sans aucune restriction, car, si mes renseignements sont exacts, on a tant soit peu circonscrit les pouvoirs de la commission nommée naguère, quant à l'examen dont il s'agit. Elle n'aurait pas eu le pouvoir d'examiner, entre autres, s'il pouvait y avoir lieu à supprimer une des deux universités de l'Etat.
Si maintenant M. le ministre de l'intérieur laisse la commission libre d'examiner la question telle qu'elle est posée, je crois qu'alors nous arriverions à un résultat.
M. de Chimay, rapporteur. - Messieurs, je voulais précisément faire la déclaration qui vient d'être présentée par M. Verhaegen, c'est que jamais il n'est entré dans notre intention de formuler une proposition. C'est un vœu que nous avons émis, et pas autre chose.
Quant à l'opinion de M. le ministre de l'intérieur, de renvoyer la question à la commission qui l'a déjà examinée, je n'ai pas l'honneur de connaître les membres dont elle se compose, et par conséquent, je ne veux suspecter leur impartialité ; mais il suffit qu'elle se soit déjà prononcée pour que je croie qu'il convienne de nommer une commission nouvelle ; les membres de la première sont plus ou moins liés par les antécédents qu'ils ont posés ; d'ailleurs la question se présente sous un nouveau jour, et je ne vois pas pourquoi M. le ministre de l'intérieur recule devant l'idée de la renvoyer à une autre commission.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Puisque vous êtes si bien reconcilié avec les commissions, je vous en félicite. Quant à moi, je n'y suis pas opposé.
M. de Chimay. - Puisque vous m'interrogez sur mes convictions...
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai pas parlé de vos convictions, j'ai parlé de commissions.
M. de Chimay. - Je vais m'expliquer, et je suis charmé que vous m'en fournissiez l'occasion. Je n'ai jamais été contraire au système des commissions ; ce que j'ai combattu et ce que je combats encore, c'est votre changement d'opinion. Si M. le minisire de l'intérieur était resté, comme moi, fidèle au programme que nous avons suivi ensemble l'année dernière, j'aurais été le premier à l'appuyer.
M. Coomans. - Si nous ne nous trouvions pas devant le chiffre fixe de 25 millions qui est à la fois le maximum et le minimum des dépenses de l'armée, nous qui voulons une armée très forte et qui ne regardons pas à quelques centaines de mille francs, ni même à un ou deux millions pour atteindre ce but, nous insisterions moins sur l'économie à obtenir par le déplacement de l’école militaire ; mais s'il est vrai qu'une économie de deux à trois cent mille francs puisse résuller de cette mesure, il est bien naturel que nous y insistions. C'est un bataillon de plus dans l'armée belge, puisque nous ne pourrons pas sortir du chiffre fatal de 25 millions.
C'est dans le même but, je le suppose, que d'honorables membres ont recommandé, il y a un instant, l'examen approfondi du système de défrichement de M. le colonel Eenens. Si les idées de M. Eenens sont justes, et je les crois telles pour ma part, il en résulterait encore une économie ou plutôt une recette de plusieurs centaines de mille francs pour l'armée. M. Eenens veut faire exécuter par des troupes certains travaux de défrichements que le gouvernement fait exécuter aujourd'hui à très grands frais. Je ne m'oppose nullement à ces travaux ; je les crois jnsqu'à présent très utiles ; mais si le budget de la guerre recevait le montant des dépenses que le budget de l'intérieur supporte de ce chef, on trouverait là encore quelques centaines de mille francs dont la force organique de l'armée profiterait.
Un tel résultat n'est certes pas à dédaigner. C'esl pour cela que je me joins aux honorables membres qui ont insisté, non pas pour que la question soit tranchée immédiatement, mais pour qu'elle soit examinée mûrement dans le but d'obtenir les économies que je viens de signaler.
« Art. 16. Etat-major, corps enseignant et solde des élèves : fr. 131,693 07. »
M. Delehaye. - Le gouvernement propose d'une part une réduction de 1,500 fr. sur le littera A, et d'autret part une augmentation de 11,000 francs sur le littera C ; l'augmentation définitive est donc de fr. 9,500, ce qui porte le crédit à fr. 141,193 07.
- Ce chiffre est mis aux voix et adopté.
« Art. 17. Dépenses d'administration : fr. 23,606 93. »
- Adopté.
« Art. 18. Traitement du personnel des établissements : fr. 37,203. »
- Adopté.
« Art. 19. Matériel de l'artillerie : fr. 440,370.
« Dépenses extraordinaires : fR. 58,427.
« Total : fr. 498,979. »
- Adopté.
« Art. 20. Matériel du génie : fr. 750,000.
« Dépenses extraordinaires : fr. 300,000. »
M. Delehaye. - Le total de l'article 20 s'élève à 1,030,000 fr niais, par suite d'un amendement proposé par M. le ministre de la guerre ce chiffre doit être réduit de 100,000 fr. et porté à 950,000 fr.
M. Osy. - Le gouvernement nous propose une réduction de cent mille francs sur le matériel du génie. Pour ma part, je crois que ce n'est une économie réelle, mais seulement un ajournement de dépense.
A ce crédit se rattache la grande question des forteresses. Je ne veux pas la soulever aujourd'hui ; mais je crois que la commission qui va être nommée devrait connaître les vues du gouvernement sur la question de la démolition des forteresses. Au sein de la section centrale, M. le ministre de la guerre nous a fait comprendre que le gouvernement avait l'intention d'abandonner cinq de nos forteresses. Il importe donc que cette commission, qui sera chargée de procéder à l'examen de toutes les questions militaires, sache à quoi s'en tenir à cet égard, attendu que cela peut exercer une très grande influence sur les dépenses du département de la guerre. J'engage, par conséquent, le gouvernement à faire connaître son opinion sur la question des forteresses, à la commission qu'il nommera prochainement.
Puisque j'ai la parole, je dois dire un mot sur le crédit qui figure au littera E ; on nous y demande, pour différents loyers, une somme de 37,300 francs.
Dans ce chiffre, se trouvent 4,500 francs pour la location de l'hôtel affecté au gouverneur de la résidence.
Actuellement, il n'y a pas de gouverneur de la résidence ; je n'ai donc pas lieu de craindre d'exprimer mon opinion à cet égard.
Pour ma part, je crois que c'est un véritable abus, nous l'avons dit souvent, de donner un local au gouverneur de la résidence. Cette place est ordinairement accordée à des lieutenants-généraux en activité de service. Ces officiers supérieurs qui commandent, en province, des divisions territoriales, ont certainement beaucoup plus de dépenses à faire lorsqu'ils sont en province que lorsqu'ils sont appelés à remplir les fonction de gouverneur de la résidence dans la capitale, parce que, en province, ils sont les premiers fonctionnaires, ils priment même les gouverneurs civils. Ils sont donc astreints à des dépenses considérables en province ; tandis que dans la capitale, vous le savez, les gouverneurs militaires n'ont, pour ainsi dire, aucuns frais à supporter.
Je demande, en conséquence, que la somme de 4,300 francs, que personne ne touche actuellement, soit déduite du crédit que nous discutons en ce moment.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il ne peut pas être question dé faire disparaître cette somme du budget de 1851, attendu que l'hôtel est loué pour cette année. Nous verrons s'il est possible de faire droit à l'observation de l'honorable membre lorsque le budget de 1852 sera présenté.
M. Thiéfry. - Je viens appeler l'attention sérieuse du ministre et de la chambre sur les dépenses que l'on fait à Beverloo. 147,500 fr. sont demandés pour 1851.
Le camp doit servir pour les manœuvres, c'est-à-dire 4 à 5 semaines par an : or pour un camp de si courte durée, faut-il des casernes permanentes ? Faut-il surtout ce luxe de construction ? A-t-on besoin de tous ces ornements qui n'offrent à l'œil rien de militaire.
J'ignore ce que l'on a dépensé pour les divers établissements du camp de Beverloo ; le département de la guerre seul aurait pu nous le dire, puisqu'il conserve toutes les pièces de comptabilité en double expédition : la section centrale en avait réclamé la communication, mais M. le ministre nous a renvoyé à la cour des comptes. J'ai pu néanmoins établir des calculs approximatifs.
De 1835 à 1851, les budgets comprennent pour cet objet 2 millions : la dernière construction a été terminée en 1840 ; en 1846 on en a recommencé une nouvelle qui est bien loin d'être terminée, car l'on travaille seulement à la construction des casernes de l'infanterie. Si les budgets ne constatent qu'une dépense de 2 millions, on y a certainement employé 2,500,000 fr., ce qui est très facile, puisque les allocations pour le matériel du génie ne forment qu'un seul article à la cour des comptes. Il est à remarquer que le surplus que l'on emploie pour le camp de Beverloo ne peut être pris que sur les sommes destinées aux fortifications ou aux bâtiments militaires qui doivent nécessairement en souffrir.
Par exemple sur l’exercice de 1846, je connais des dépenses faites jusqu’à concurrence de 200,949 fr., et cependant la législature n’a accordé que 175,000 fr. Ainsi voilà près de 26,000 fr. que l’on n’a pu payer qu’en s'abstenant de faire des travaux indispensables aux fortifications ou aux bâtiments militaires. On en a agi de même en 1847, 1848, 1849 et 1850. Afin de vous convaincre, messieurs, de la mauvaise voie dans laquelle on est entré, je citerai quelques chiffres.
Le pavillon pour le commandant d'armes a coûté 14,600 fr.
Le pavillon pour le lieutenant général qui passe trois semaines au camp et pour les officiers d'etat-major, 28,322 fr.
Le pavillon pour le commandant du génie, 23,746 fr.
Si on eût fait des tentes en toiles, cette dépense de 66,668 fr. ne se serait élevée qu'à 2,445 fr.
Ces pavillons ont une durée fixée à 20 ans ; tandis que la partie extérieure d'une tente de général a une durée de 4 ans et la partie intérieure une durée de 7 ans.
En supposant que la tente entière dût être renouvelée tous les 4 ans, ce serait en 20 années une dépense de 12,225 fr., et les pavillons ont coûté 66,668 fr.
Quoique ces constructions soient terminées, j'en indique néanmoins le prix pour que l'on compare les dépenses que nous faisons, avec celles qui ont lieu pour les armées étrangères.
Voyons maintenant le coût du logement de la troupe ; cela concerne l'avenir.
Parmi les travaux en projet pour 1851, on a compris six casernes pour les sous-officiers et soldats d'un bataillon d'infanterie ayant des compagnies de cent hommes ; les précédentes ont coûté 63,452 fr.
Pour les tentes d'un bataillon, on dépenserait 6,284 ; comme elles n'ont qu'une durée de quatre ans, ce serait en vingt ans 31,420 fr., soit en moins 32,032 fr.
Le département de la guerre, voulant encore construire le logement de seize bataillons, ce sera une dépense de 1,015,232 fr., qui serait réduite au moyen de tentes, à 502,720 fr. Différence en moins, 512,512 fr.
Si l'on ajoute aux sommes que je viens d'indiquer celles que coûteront encore le logement des officiers, les bâtiments à construire pour l'artillerie et la cavalerie, le pavillon d'un général-major d'infanterie, les magasins, etc., on verra qu'il s'agit d'une dépense qui approchera de deux millions.
On sacrifie à des choses inutiles ce qui devrait être plutôt affecté au matériel qui est si défectueux.
Il est nécessaire, dans l'intérêt de la défense du pays que plusieurs millions soient dépensés à Anvers pour des bâtiments casemates, et pour les ouvrages permanents d'un camp retranché, et l'on néglige des travaux aussi essentiels à la sûreté de l'Etat, pour élever des casernes au milieu des bruyères !
On commence celles de l'infanterie ; c'est donc le moment convenable d'arrêter ce luxe de constructions pour un camp qui en définitive ne doit servir qu'un mois par an pour les manœuvres.
Si des tentes coûtaient aussi cher que des casernes, je serais encore d'avis d'en faire confectionner, parce qu'elles procurent l'avantage d'asseoir le camp partout où les circonstances l'exigent ; ainsi, en 1848, au lieu de l'avoir sur les frontières de la Hollande, il aurait pu être établi là où l'armée aurait dû occuper une position stratégique.
Si un jour le pays est envahi et qu'une partie de l'armée soit obligée de se mettre à l'abri sous le canon d'une place forte, des tentes pourraient être très utiles, tandis que les casernes de Beverloo ne serviront pas.
Ce qui prouve que mon raisonnement est juste, c'est qu'aucune puissance ne nous imite.
Par ces motifs, j'ai l'honneur de prier M. le ministre de vouloir bien me dire s'il ne consentirait pas à ne faire aucune construction nouvelle au camp de Beverloo, jusqu'à ce que la commission ait examiné si ce genre de castramétation sera maintenu, et si les fonds que l'on veut y employer ne devraient pas recevoir une meilleur destination dans l'intérêt de l'armée.
M. de Chimay, rapporteur. - A propos de cet article, matériel du génie, je dois reproduire l'observation que j'ai faite tout à l'heure ; c'est qu'il en est de l'économie de cent mille francs réalisés sur ce crédit comme de celle qui a été réalisés sur l'allocation destinée à la solde des troupes.
Lorsque la section centrale a été saisie de cette question, elle a désiré savoir comment le gouvernement était arrivé à faire cette économie sur le matériel du génie. Nous avons demandé des renseignements à M. le minisire de la guerre ; ceux qu'il nous a donnés ne nous ont pas paru très concluants ; nous sommes revenus à la charge, et, je dois le dire, les secondes explications n'ont pas été plus claires que les premières. Nous en avons conclu que le gouvernement refusait de s'expliquer. Pour ma part, j'ai voulu en avoir le cœur net ; j'ai voulu remonter à la source, j'ai cherché des renseignements plus précis, et j'ai acquis la conviction que, contrairement aux déclarations qu'on nous avait faites, dans cette somme de 100,000 fr., il y en a 80,000 qui s'appliquent à la seule forteresse de Diest. Ce n'est qu'un simple transfert de dépenses qui grèvera le budget de 1852.
Quant au camp de Beverloo, je crois que l’honorable M. Thiéfry ne s'est pas bien rendu compte de la destination nouvelle que ce camp avait reçue. En effet, les troupes ne se bornaient plus à passer quelques semaines au camp ; le camp était devenu, en quelque sorte, permanent. Ainsi lorsque tout à l'heure l'honorable M. Lebeau a parlé de la brochure de M. Eenens, j'ai signalé à la chambre ce qui avait été tenté déjà dans le sens du système préconisé par cet officier.
L'honorable M. Thiéfry a fait tantôt une observation contre la permanence des casernes.
Il a dit que, dans beaucoup de localités, les troupes logent sous des tentes ; cela est vrai, mais il faut tenir compte de certaines circonstances. Il peut y avoir un grand intérêt à ne pas laisser les soldats exposés aux intempéries de l'air pendant les nuits froides de l'automne. De plus, l'honorable général Chazal avait adopté un système que je crois très bon, c'est celui de diriger d'abord sur le camp de Beverloo les recrues au lieu (page 533) de les adresser à leurs différents corps, et de les exercer là en commun à toutes les manoeuvres ; et à ce point de vue, je crois qu'il peut être très utile de ne pas faire loger les troupes sous des tentes et de soumettre ainsi aux intempéries de l'air des jeunes gens sortant de leur famille, ce qui offrirait des inconvénients qui n'échapperont à personne.
Sans vouloir continuer les dépenses qui ont été entreprises sur un pied peut-être trop large, je crois qu'aujourd'hui ce serait faire acte de mauvaise administration que d'abandonner les différents travaux qui ont été commencés dans l'intérêt d'une colonisation utile à notre pays. Je crois que ce serait une mauvaise innovation au moment où de toutes parts on engage le gouvernement à tenter de nouveaux efforts en faveur des améliorations agricoles.
Pour ma part j'engage le gouvernement, tout en apportant la plus grande réserve dans les dépenses concernant le camp de Beverloo, à le maintenir dans un état convenable d'entretien et de progrès.
M. Servaes, commissaire du Roi. - Messieurs, le genre de construction adopté au camp de Beverloo, pour le logement de la troupe, n'est pas le résultat d'une décision prise à la légère. Après avoir successivement employé les tentes en toile, les baraques en paille, en planches, en torchis, en pièces de bois avec remplissage en briques, et reconnu, par l'expérience, le peu de durée de ces diverses constructions, on agita la question de savoir si des constructions permanentes ne seraient pas à la fois et plus saines et plus économiques.
Il s'établit, à ce sujet, entre les chefs de service et le ministre, une discussion qui prit naissance dès 1841 et qui ne finit qu'en 1846, par une décision favorable aux constructions d'un caractère permanent.
Il fut démontré, par des calculs faits avec tout le soin possible, que ce genre de construction l'emportait en économie sur tous les autres d'une manière assez notable.
Ce fut en conséquence de cette discussion que le général Prisse, alors ministre de la guerre, décida que la reconstruction du camp de cavalerie, qui était devenue nécessaire, se ferait suivant le système qui a été mis à exécution.
Les constructions permanentes présentent encore d'autres avantages. Les avantages hygiéniques sont trop patents pour qu'il soit nécessaire d'y insister ; nous nous bornerons à en faire ressortir un d'une autre nature qui pourrait échapper aux personnes qui ne se rendent pas bien compte de notre camp de Beverloo.
Ce camp est devenu aujourd'hui un centre de défrichement important où, à l'aide des disciplinaires et presque sans bourse délier, le gouvernement transforme rapidement en bois, en prairies et en excellentes terres, des plaines sablonneuses réputées les plus arides de la Campine et qu'il a acquises à vil prix. A l'heure qu'il est, on compte déjà plus de 200 hectares de défrichement et de boisement opérés, et tous ceux qui ont visité le camp savent avec quelle vigueur la végétation s'y développe.
Ces 200 hectares acquis, comme environ 1,373 autres, au prix de 55 fr. l'hectare, ont déjà dès à présent une valeur considérable et que l'on n'oserait presque pas estimer, dans la crainte d'être taxé d'exagération. Qu'il nous suffise de mentionner un seul fait bien établi et incontestable pour en donner une idée. En 1849, douze hectares de terres incultes ont été transformés en prairies. Ils ont coûté, en prix d'acquisition, en frais d'ensemencement et en dépenses de toutes sortes, une somme de 1,506 fr,
Dès 1850, ils ont fourni le vert à 69 chevaux de cavalerie pendant un mois et ont encore laissé un reliquat de 27,000 kilogrammes de foin qui sert cet hiver à la nourriture des chevaux du train. Enfin, laissant à part le prix du regain vendu par l'administration des domaines et qui couvre amplement les frais de fauchage et d'entretien, ils ont produit, en résumé, plus de 60,000 kilogrammes de foin qu'on peut sans exagération évaluer à 3,000 fr., produit net de ces 1,506 fr. dépensés par le gouvernement.
Cette situation et ces travaux que beaucoup de personnes ignorent, mais sur lesquels on ne saurait trop attirer l'attention publique, justifient plus encore, ainsi que nous l'avons dit plus haut, la mesure prise par le gouvernement relativement aux bâtiments destinés à loger la troupe et tout le personnel militaire du camp. Il est évident, en effet, que si par des circonstances imprévues, l'Etat voulait se défaire des terrains qu'il a acquis et défrichés ; ces constructions leur donneraient un accroissement de valeur que de mauvaises constructions provisoires ne sauraient en aucune façon leur procurer.
Il est généralement reconnu que le campement au moyen de tentes en toile est, de tous les systèmes de castramétation, celui qui est le plus contraire à l'hygiène de la troupe, puisque les hommes qui occupent ces tentes ne se tremvent pas à l'abri des intempéries de la saison, que les vents et les sables pénètrent partout, et que, dans les fortes chaleurs, il est impossible que les soldats se tiennent sous les tentes, sans s'exposer à contracter des maladies.
On prouvera, du reste, que le système des tentes, loin d'être le plus économique, est bien réellement le plus coûteux ; mais, avant d'entrer dans ces explications, il convient de faire remarquer que l'usage des tentes exige des magasins de construction permanente, spacieux et bien aérés, à l'abri de toute humidité, et dont l'étendue permet de pendre les toiles, en laissant entre elles des intervalles pour la circulation de l'air, afin de les préserver de la pourriture.
Le département de la guerre, avant de s'arrêter aux constructions permanentes, a cependant fait un essai du campement par tentes en toile, et voici quel en a été le résultat :
En avril 1835, le général Evain, ministre-directeur de la guerre, mit en adjudication publique la fourniture d'un certain nombre de tentes de 10 hommes, en forte toile à voile.
Des marchés furent passés en avril, mai et juin 1835, pour la fourniture de 1,311 tentes et 200 manteaux d'armes. Y compris la peinture et les manteaux d'armes, chaque tente revenait à 126 fr. Ces tentes furent mises en service lors du campement de 1835 ; mais en 1836 on fut obligé d'en mettre 332 hors de service, parce qu'il était tout à fait impossible de les faire encore servir à cause de leur vétusté, et aux autres on dut faire des réparations pour une somme de 3,936 fr. 68 c.
Après la période de campement de 1836, il ne restait plus, des 1311, que 684 tentes pouvant encore être utilisés pour le campement de 1837, avec les débris des autres et moyennant de fortes réparations qui s'élevèrent à fr. 16,083 60.
Après le campement de 1837 il ne restait plus, de ces tentes, que des lambeaux que l'on fut obligé de faire vendre par l'administration des domaines au profit de l'Etat.
Ainsi, des 1,311 tentes, 634 ont servi 3 ans, 275 ont servi 2 ans et 332 ont servi 1 an.
Chaque tente a donc servi en moyenne, 2 1/4 ans.
Les réparations se sont élevées à fr. 20,020-28, réparties entre les 1,311 tentes, fait fr. 15-27 par tente.
En prenant maintenant une période de 20 ans, pour comparer le système des tentes à celui des constructions permanentes, on revient à ce résultat que chaque tente de 16 hommes coûte, pendant 20 ans, pour achat et renouvellements périodiques, fr. 1,120
Et pendant le même espace de temps, pour entretien et réparations, fr. 135 73.
Comme les constructions permanentes sont faites au camp de Beverloo-pour servir chacune à un bataillon d'infanterie, il convient d'établir qu'il faut, 1° par bataillon, pour l'état-major 3 tentes, 2° par compagnie pour les sous-officiers 2 tentes, sous-officiers 1 tente, cantinière et lavandière 1 tente, soldats 8 tentes, soit 12 tentes, multipliées par 6, soit 72 tentes. Total par bataillon 75 tentes.
Ainsi, la dépense pour un bataillon est, en 20 ans, pour achat et renouvellement de 75 tentes, de 84,000 fr., pour entretien et réparations de 10,179 fr. 75.
Il est néanmoins positif que les constructions permanentes dureront plus que vingt ans, et que leur prix de revient est loin d'atteindre la somme mentionnée ci-dessus.
Lorsqu'on a des tentes en toile, il faut de grands magasins pour les conserver, nous n'avons pas de ces magasins et nous devrions en construire.
Je conçois que lorsqu'on doit camper tantôt d'un côté du pays, tantôt d'un autre, je conçois, dis-je, qu'alors on ait des tentes ; mais le camp de Beverloo est un camp permanent où l'on campe chaque année, et je pense que les constructions permanentes sont beaucoup plus avantageuses que les tentes en toile.
M. Thiéfry. - Dans tous les gouvernements les camps ont toujours servi, en temps de paix, pour des manœuvres qui ne durent que quelques semaines.
Depuis 1848 les recrues sont envoyées au camp de Beverloo avec une partie des cadres des bataillons auxquels ils appartiennent, tandis que ces bataillons restent dans leur garnison avec les anciens soldats et l'autre partie des cadres.
Cette dislocation est cause que les instructeurs ne sont pas en aussi grand nombre que si les recrues étaient dans leur régiment, et le service de place devient trop fatigant pour les sous-officiers et caporaux qui restent en garnison. Les recrues ne sont pas en contact avec les anciens soldats qui aident puissamment à les former à la discipline, à apprendre à démonter et remonter leur fusil, à leur enseigner les détails du service, à leur donner enfin cette confiance dans leur arme, qui fait la force du fantassin.
Cette séparation aurait peu d'inconvénients dans les troupes qui sont longtemps sous les drapeaux, et chez lesquelles on a l'occasion de fortifier l'esprit militaire ; tandis que pour des miliciens qui entrent au service malgré eux, qui sont si peu de temps dans leur régiment, cet isolement des anciens soldats les dégoûte du métier.
Les conséquences de ce système sont également déplorables pour les bataillons qui pendant tout l'eté sont réduits à l'effectif d'une compagnie ; ils ne peuvent faire ni l'école de bataillon, ni les évolutions de ligne ! On sacrifie le principal à l'accessoire, l'esprit militaire et la consistance de l'infanterie au simple maniement des armes.
Je reconnais, avec tous les militaires, les grands avantages des camps. Ils sont une véritable école de guerre. Je soutiens seulement que pour en obtenir de bons résultats, il faut que les régiments y soient réunis, que les officiers ne soient pas séparés de leurs soldats.
Tous tant que nous sommes, nous tenons à ce que le soldat soit bien (page 534) logé. Si sa santé devait s'altérer en couchant sous la tente, nous serions les premiers à proscrire ce mode de campement : pour nous éclairer voyons ce qui se pratique ailleurs.
Lorsque la troupe française a campé à Versailles, à Compiègne, à Metz, etc., elle avait des tentes : sous les Pays-Bas, il en était de même, il en est encore ainsi en Hollande. En Prusse, elle n'a pas toujours des tentes, souvent elle bivaque ; et, certes, nos hommes sont aussi robustes que les Français, les Prussiens et les Hollandais.
Le camp de Beverloo est un établissement militaire permanent. Je veux bien croire que l'intention du département de la guerre est d'en former un semblable ; mais si son utilité était telle que l'on pût se permettre d'y engloutir des millions, nos voisins en auraient certainement construit de pareils ; or, j'ai déjà dit qu'en Belgique seulement on élève des constructions aussi dispendieuses.
Pour engager la chambre à voter les sommes demandées, on veut nous faire considérer le camp comme devant offrir des ressources considérables ; on comprendra facilement que si les officiers et soldats couchent sous la tente ou dans une caserne, cela ne rendra pas la culture plus productive.
Plus tard les plantations augmenteront les produits ; eh bien, qu'on les continue, je ne m'y oppose pas. Ce sont les constructions que je critique et non les défrichements. Si, pour exécuter ces derniers travaux, il est nécessaire qu'une partie de la compagnie de discipline, un bataillon et un escadron séjournent au camp toute l'année, ceux-là seuls doivent être logés dans les casernes, et il y en a déjà beaucoup plus qu'il n'en faut ; les autres militaires, depuis le général jusqu'au soldat, n'ont besoin que de tentes. Au surplus, si l'on doit continuer des constructions en briques, on ferait encore très bien de les éparpiller de manière à pouvoir les convertir en petites fermes, c'est le seul moyen de les utiliser si un jour l'Etat abandonne l'exploitation des terres à l'industrie privée.
J'ai obtenu les premiers renseignements sur le coût des tentes dans l'Aide-mémoire du capitaine Laisné. il dit, page 491, qu'une tente pour 15 fantassins coûte environ 100 francs. Voulant avoir à ce sujet des données exactes, j'ai écrit à la Haye, et j'ai ici une pièce provenant du département de la guerre avec le prix de chaque objet et le temps de durée,
Une tente de général coûte 527 fr. 10, d'officier supérieur 342 fr. 85, d'officier subalterne 113 fr. 98, pour 16 soldats 103 fr. 35, pour 8 soldats 52 fr. 61.
J'ai pris, par conséquent, pour base de mes calculs le prix payé aujourd'hui en Hollande ; tandis que celui indiqué par M. l'intendant est le coût des tentes adjugées il y a quatorze ans.
Si les tentes dont nous avons fait usage n'ont dure que deux ans, cela tient, sans doute, à une excessive négligence ; il est plus que probable qu'elles ont été remises en magasin sans être bien sechées. Pourquoi les tentes dureraient-elles moins de temps en Belgique que dans d'autres pays ? Cela est inadmissible.
Les chiffres que j'ai donnés, dussent-ils même être majorés, suffisent pour apprécier l'économie. Comment pourrait-il en être autrement ? Ceux qui ont visité le camp auront été frappés comme moi de voir la pierre de taille, la forme des toitures, les dessins tracés dans les murs par des briques de différentes couleurs, etc., tous travaux qui occasionnent mal à propos de très grands frais.
L'entretien des tentes exige des dépenses, mais celui des bâtiments est également frayeux. La prévision des sommes à employer pour cet objet en 1851 est de 4,000 fr. ; cette dépense s'accroîtra tous les ans, parce que les constructions augmenteront, et que l'état de vétusté entraînera des réparations plus considérables : du reste, je répéterai encore que les tentes sont préférables aux casernes, même sans économie aucune, puisqu'elles peuvent servir partout.
On objecte que, pour employer des tentes, il y aurait des dépenses considérables à faire pour la construction des magasins : apprécions un peu la portée de cette objection.
Un régiment de trois bataillons avec des compagnies de 100 hommes, nombre égal à la contenance des casernes construites au camp, a besoin de 218 lentes, soit pour 6 régiments 1,308 tentes.
Une tente suspendue occupant un mètre carré, il faudra des magasins ayant 1,308 mètres carrés, plus l'espace nécessaire pour la circulation de l'air.
Une des nouvelles casernes d'une compagnie du camp de Beverloo se compose de quatre chambres pour soldats ; chaque chambre a 6 mètres sur 7 ou 42 mètres carrés, soit 168 mètres par caserne ; il y a 6 casernes pour un bataillon, ce qui représente 1,008 mètres carrés et pour 2 bataillons 2,016 mètres, soit 708 mètres de plus que l'espace occupé par les tentes.
On admettra facilement que ces 708 mètres joints à la surface des chambres des sous-officiers et des femmes de compagnie (qui recevront aussi des tentes), seront plus que suffisants pour laisser un certain espace afin que l'air circule entre les tentes.
Comme on a déjà construit les casernes de deux bataillons, il est évident que l'on emmagasinerait bien facilement toutes les tentes pour six régiments d'infanterie ; il y a d'ailleurs beaucoup d'autres bâtiments qui restent constamment vides pendant que le camp est inoccupé, et où l'on trouverait encore infiniment plus de locaux qu'il n'est nécessaire.
M. de Theux. - Messieurs, j'appellerai un instant l'attention des ministres de l'intérieur, de la guerre et des travaux publics sur une question de haute utilité, car elle exige le concours des trois départements, il s'agit d'économiser les frais de transport et d'approvisionnement pour le camp, de lui procurer les fourrages à meilleur marché et de faciliter le défrichement d'une grande étendue de terrain.
M. le commissaire du gouvernement a parlé de l'emploi des disciplinaires pour le défrichement. Je crois que le nombre de ceux qu'on y emploie pourrait être accru, afin d'exécuter un travail important qui consisterait à creuser la section du canal de la Pierre-Bleue au camp. Il n'y a pas une seule écluse à établir sur cette section, le canal serait en déblai et aurait une étendue de quatre lieues ; il traverserait le centre d'une immense bruyère ; il n'y aurait pas de terrain à exproprier.
Je pense que ce travail pourrait être fait exclusivement par les disciplinaires ; il n'y aurait qu'à combiner le travail avec les moyens d'empêcher la désertion. Il en résulterait que sur cette vaste étendue de terrain, on pourrait créer une assez grande quantité de prés irrigables ; au centre de cette bruyère, on pourrait, au moyen des disciplinaires, défricher le terrain nécessaire à l'établissement d'un hameau ; au moyen de quelques mille francs employés à construire des maisons de cultivateurs, on attirera une population qui fournira le camp des fourrages qui lui sont nécessaires, et par la voie navigable, il recevra les matériaux dont il a besoin.
Ce sera une immense économie, et au total, en quelques années on aurait des centaines d'hectares défrichés, ce qui serait un accroissement considérable de la richesse publique. Mais il faut pour cela le concert de trois départements que j'ai cités. En très peu de temps ce travail pourrait être exécuté. Je crois que l'augmentation des disciplinaires est subordonnée à l'adoption du projet de loi dont la chambre est saisie, concernant les pénalités militaires ; il serait utile que le gouvernement en demandât la mise à l'ordre du jour.
Le creusement du canal devrait s'arrêter au camp, car pour le pousser au-delà vers Hasselt la dépense serait trop considérable. Mais d'après le travail de l'ingénieur en chef Kummer, la partie entre Hasselt et l'embranchement de Turnhout peut se construire sans écluse.
Voilà ce que j'ai cru devoir signaler à l'attention de MM. les ministres de l'intérieur, de la guerre et des travaux publics.
Quant au camp, je pense que M. le rapporteur et M. le commissaire du gouvernement en ont justifié l'utilité. Je l'ai visité, j'ai trouvé que les travaux de casernement pour l'infanterie avaient un aspect agréable à la vue. Je ne pense pas que cela ajoute beaucoup à la dépense.
Quant à leur durée, je ne crois pas qu'on doive seulement l'estimer à 20 ou 25 ans ; les constructions me paraissent avoir été faites dans les conditions de tous les autres bâtiments, qui ont une tout autre durée. Je les trouve préférables à toute espèce de constructions provisoires, pour lesquelles il est de notoriété publique qu'on fait des dépenses considérables sans aucun résultat.
M. de Mérode. - Il est impossible que, dans une chambre, on décide s'il est plus utile d'employer des tentes que des baraques en briques et en bois. Mais ce qui paraît très probable, c'est qu'un camp permanent ne doit pas être établi avec des tentes, comme un camp qu'on ne forme que temporairement, tel que celui de Versailles qui, sans doute, pouvait être organisé avec des tentes, puisqu'il ne devait pas subsister l'année suivante, tel que celui de Saint-Omer ou celui de Wattignies près de Maubeuge qui n'étaient qu'accidentels. Or le camp de Beverloo est destiné à exercer l'armée belge à perpétuité ; c'est un établissement très utile, c'est un des meilleurs établissements militaires que nous puissions citer ; il serait extraordinaire qu'on y établît des tentes dont la toile se pourrit en trois ou quatre ans et ne laisse que des débris qui ne sont bons à rien ; tandis que les matériaux de construction, si dans un avenir inconnu le camp doit être abandonné, fourniraient les éléments pour construire un village.
Les tentes sont bonnes pour courir après les Arabes, en Algérie ; comme nous n'avons pas d'Arabes à poursuivre, nous devons maintenir le camp tel qu'il est. Si on trouve moyen de faire quelques constructions qui aient bonne mine au lieu d'en faire de laides, on aura raison ; quand on peut faire bien au lieu de faire mal, on ne doit pas hésiter.
M. Thiéfry. - Je suis heureux d'entendre l'honorable comte de Mérode défendre l'opinion que j'ai émise ; il dit, avec raison, que quand un camp est permanent il vaut mieux avoir des abris en briques, je suis entièrement de son avis ; mais il n'y a réellement, en permanence au camp, qu'un bataillon, un escadron, et une partie de la compagnie de discipline. Or, voici le plan émanant du département de la guerre ; il s'agit de la construction du logement de six régiments d'infanterie qui ne séjourneront qu'un mois au camp. Faut-il des casernes pour toute cette troupe ? Telle est la question.
M. de Mérode. - Par le mot permanent, j'ai entendu dire que le camp a lieu tous les ans à la même place, tandis que les camps de Versailles, Saint-Omer et Wattignies n'étaient que temporaires, ne devaient servir qu'une année.
- La discussion est close.
M. Delehaye ; - M. Osy a proposé une réduction de 4,300 fr.
M. Osy. - On objecte à ma proposition qu'il y a loyer pour l'hôtel du gouverneur de la résidence ; qu'il faut par conséquent continuer de payer pendant cette année. Mais un hôtel aujourd'hui vacant rue Ducale me paraît pouvoir être loué très facilement. Admettons qu'il y ait une perte de quelques centaines de francs, on la ferait couvrir par les dépenses imprévues. Il y a au dernier article du budget un crédit de 15,000 fr,, sur lequel on peut disposer pour les dépenses non prévues.
(page 535) En sous-louant l'hôtel de la rue Ducale, vous ne perdrez pas 1,000 fr. Je demande que l'allocation pour l'hôtel de la résidence soit ryjée du budget, et qu'on sous-loue cet hôtel ; s'il y a perte, on l'imputera sur l'article des dépenses imprévues.
- L'amendement présenté par M. Osy n'est pas appuyé.
L'article 20 est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 950,000 fr.
La chambre passe à la discussion sur le chapitre VIII. Pain, fourrages et autres allocations.
M. Jullien. Il y aurait des réclamations moins vives contre le budget de la guerre ; la charge en paraîtrait moins lourde, elle serait supportée avec moins de répugnance, si les sommes votées étaient dépensées dans toutes les parties du pays.
S'il en était ainsi, nos populations se montreraient moins hostiles au budget de la guerre.
Il dépend du gouvernement de préparer cette réaction si désirable en faveur du budget de la guerre en consacrant une répartition équitable des casernements dans les villes de garnison, et en veillant à ce qu'on n'achète pas à l'étranger ni les chevaux destinés à la remonte ni aucun autre produit nécessaire au service de l'armée.
Je demande la permission de citer quelques faits à la chambre, qui pourra ainsi apprécier jusqu'à quel point le gouvernement a suivi cette ligne de conduite.
En 1850, il y avait deux simulacres de garnison dans le Luxembourg : à Arlon et à Bouillon. Le département de la guerre jugea à propos de réduire le chiffre de ces deux garnisons, déjà extrêmement minime. Le conseil provincial du Luxembourg s'est ému de cette mesure, et par une résolution fortement motivée du 9 juillet 1850, il a décidé que : « Le gouvernement serait instamment prié de comprendre désormais le Luxembourg pour une plus large part dans la répartition des corps d'armée entre les différentes provinces du royaume, et notamment de pourvoir le fort de Bouillon d'un matériel de guerre, et la ville de Bouillon d'une garnison en rapport avec son importance militaire. »
Savez-vous quelle a été la réponse à cette résolution du conseil provincial du Luxembourg ? On a renvoyé quelques hommes à Arlon, et l'on a supprimé la garnison de Bouillon, ville qui toujours et sous tous les régimes avait eu une garnison.
M. de Man d'Attenrode. - On a bien fait.
M. Jullien. - S'il s'agissait de la ville de Louvain, l'honorable membre qui m'interrompt ne tiendrait pas le même langage.
M. de Man d'Attenrode. - Oui, si Louvain était Bouillon.
M. Jullien. - Je dis que la ville de Bouillon a toujours possédé une garnison, et qu'elle a des titres incontestables à en avoir une. En effet, cette ville a des casernes spacieuses avec de vastes cours, un château-fort renfermant de nombreux magasins convenablement appropriés.
M. le ministre de l'intérieur, qui a fait une excursion dans le Luxembourg, a visité Bouillon ; il a pu s'assurer par lui-même de ce que j'ai l'honneur d'annoncer à la chambre ; il a pu vérifier la situation triste et précaire faite à cette ville par le retrait de sa garnison ; il a dû se demander s'il était juste que Bouillon fût privé d'une garnison, alors que Philippeville et Mariembourg en étaient pourvues.
M. de Baillet-Latour. - C'est une erreur : on a retiré la garnison de Mariembourg.
M. Jullien. - Mais cee que ne dit pas l'honorable membre qui m'interrompt, c'est que, le jour de son élection, il est passé à Philippeville une compagnie pour se rendre à Mariembourg.
M. de Baillet-Latour. - Il y avait un mois que cela était fait.
M. Jullien. - La position topographique de Bouillon exige d'ailleurs qu'il y ait dans cette ville une garnison. Il est imprudent de laisser la frontière belge découverte de ce côté. Je pourrais fournir à cet égard des renseignements particuliers au département de la guerre.
Messieurs, le Luxembourg a à se plaindre non seulement de ce qu'on ne lui fait pas une part assez forte dans la répartition des garnisons, mais encore de sa non-participation à la fourniture des chevaux pour la remonte.
L'an dernier (et je prie la chambre de vouloir bien écouter attentivement les détails que je vais lui soumettre), lors de la discussion du budget de la guerre, M. le général Chazal avait fait distribuer, à l'appui de son budget, des développements, où je lis ce qui suit :
« Art. 28. Remonte. Le ministre emploiera tous les moyens qui sont en son pouvoir pour que cette remonte puisse s’effectuer dans le pays, et il n’aura recours à l’étranger qu’après avoir reconnu l’impossibilité de la compléter autrement. »
Je pris texte de cette promesse du département de la guerre pour féliciter l'honorable chef de ce département d'être entré dans une voie qui devait être éminemment profitable au pays.
Quelques jours après le vote du budget, et à la date du 28 février 1850, je lisais dans le Moniteur ce qui suit :
« Ministère de la guerre. - Remonte.
« Le ministre de la guerre fera adjuger publiquement le 7 mars 1850, à midi, à l'hôlel du ministère de la guerre, à Bruxelles, la fourniture de 130 chevaux de selle, de race indigène ou danoise pour la cavalerie légère, 97 pour les cuirassiers, 65 pour les guides. »
Vous l'entendez, messieurs, on annonçait une adjudication de 292 chevaux pouvant être achetés à l'étranger, et cela sur un effectif de 486 chevaux, pour lesquels vous aviez voté un crédit. Eh bien, messieurs, savez-vous combien de chevaux ont été achetés à l'étrange en 1850 ? Je m'en suis assuré ce matin (je ne serai pas désavoué par M. le commissaire du gouvernement), le département de la guerre a acheté, pour cet exercice, sur un effectif de 486 chevaux, 237 chevaux venant de l'étranger.
Je dénonce ce fait à la chambre, comme diamétralement en opposition avec l'intérêt de nos éleveurs. Aussi le Luxembourg a-t-il été, je le dirai, mystifié à cette occasion.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - On n'a pu trouver de chevaux dans le Luxembourg.
M. Jullien. - Il y en avait en grand nombre et de tres bons. Une commission a été envoyée dans le Luxembourg ; on lui a présenté environ 700 chevaux. Eh bien, sur ce nombre, le croiriez-vous ? la commission en a acheté en totalité 7. Sept chevaux sur environ 700 l !
M. Coomans. - Ce n'est pas flatteur pour les autres.
M. Jullien. - Messieurs, nos éleveurs se sont crus, je dois le dire, dupes d'une mystification. A ce sujet même, ils se sont livrés à des suppositions plus ou moins fondées, supposition que, pour ma part, je ne viens pas soutenir dans cette enceinte.
Mais enfin, nos éleveurs qui ont été conviés à présenter leurs chevaux, qui avaient fait des dépenses assez considérables dans ce but, nos éleveurs se disaient : La commission doit avoir reçu des instructions secrètes de ne pas acheter ! D'autres pensaient que c'était un acte de récrimination du gouvernement contre les députés du Luxembourg qui avaient été hostiles au budget de la guerre.
Il y avait dans ce langage quelque chose de désaffectueux pour le gouvernement. J'étais moi-même peiné de l'entendre. Toujours est-il que nos éleveurs, dans leur désappointement, détestaient cordialement le budget de la guerre. Voilà ce qu'il y avait de plus clair pour moi.
Je persiste à soutenir que le gouvernement doit travailler autant qu'il est en lui à ce que nos populations reviennent à d'autres sentiments envers le budget de la guerre ; je dis qu'il obtiendra ce résultat s'il tient la main à ce que les dépenses de ce budget retournent indirectement, et d'une manière proportionnellement équitable, aux contribuables qui les payent, en les appelant à profiter de leur emploi.
Messieurs, je viens de vous entretenir de quelques besoins de la province de Luxembourg. Il en est un autre que je crois pouvoir signaler à l'honorable ministre de l'intérieur, aujourd'hui ministre de la guerre.
L'honorable ministre de l'intérieur porte une sollicitude bien vive à l'agriculture. Tous nous lui savons grand gré de bien vouloir encourager, autant qu'il le fait, par tous les moyens qui sont en son pouvoir, nos malheureux cultivateurs. Eh hien, messieurs, la commission provinciale d'agriculture du Luxembourg vient d'indiquer à M. le ministre de l'intérieur un moyen sur lequel je me permets d'appeler son attention très sérieuse. Cette commission s'est demandé s'il n'y avait pas quelque chose de plus utile à faire pour le Luxembourg que d'y fonder des écoles d'agriculture.
Elle a demandé par une résolution récente, qui, sans doute, sera déjà parvenue au département de l'intérieur, que le gouvernement, appliquant les vues émises par le colonel Eenens, voulût bien envoyer dans le Luxembourg des troupes en campement ; elle a demandé, non que le gouvernement supprimât le camp de Beverloo et le camp de Braeschaet, mais que, tout au moins, il fît pour la province de Luxembourg ce qu'il fait pour la Campine, qu'alternativement, par exemple, il envoyât un camp dans le Luxembourg et dans la Campine.
Cette mesure serait infiniment utile pour le Luxembourg. Elle viendrait en aide à son agriculture. Il y aurait là, pour cette province, un élément puissant de fertilisation, un élément puissant de défrichement. D'un autre côté, le gouvernement y trouverait son compte.
Oui, le gouvernement y trouverait son compte, parce qu'il aurait là des produits à meilleur marché que partout ailleurs. Il y trouverait des céréales, des fourrages, du bétail à bien meilleur marché qu'il ne les trouve au camp de Beverloo même.
Le gouvernement procurerait ainsi à la province de Luxembourg un débouché tout naturel de ses produits, produits que nous ne pouvons exporter nulle part. Ces produits se livreraient et se consommeraient en quelque sorte sur les lieux mêmes de production ; le gouvernement réaliserait ainsi une économie notable, en même temps qu'il poserait un acte de justice envers le Luxembourg.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je tiens à répondre quelques mots à la partie du discours de l'honorable M. Jullienqui concerne le remonte de la cavalerie.
D'après l'honorable membre, le Luxembourg aurait été maltraité. Je retranche de son discours les allusions qu'il a pu faire à la position prise par les représentants du Luxembourg vis-à-vis du budget de la guerre, et dont le gouvernement aurait en quelque sorte été accusé de vouloir tirer vengeance.
M. Jullien. - J’ai dit que c'était le préjugé du Luxembourg.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est ce que je répète. Messieurs, voici ce qui s'est passé.
Le nombre de chevaux présentés par les cultivateurs de cette province n'a pas été de 600, comme on l'a dit, mais d'après l'état que j'ai sous les yeux il a été de 483. Parmi ces chevaux, il y en avait au-dessous de (page 536) quatre ans, 218 ; au-dessus de 7 ans, 17 ; n'ayant pas la taille moyenne, 195. Restait donc en tout 53 chevaux qui ont été jugés aptes à être présentés pour la remonte, et sur ces 53 il en a été acheté 7.
Ce qui est certain, c'est qu'il n'y a eu aucun parti pris de la part du le gouvernement, de ne pas acheter de chevaux dans le Luxembourg. J'ajoute qu'il ne s'agit ici que des chevaux de selle car pour les chevaux de trait, ils s'achètent presque tous dans le Luxembourg.
Je ferai observer en troisième lieu que particulièrement depuis trois ans et notamment sous le ministère de mon honorable ami, le lieutenant général Chazal, le nombre des chevaux indigènes achetés pour l'armée a été croissant d'année en année. C'est ce qui a été constaté encore dans la discussion du budget de l'intérieur.
Ainsi, messieurs, aucune préférence n'a été donnée aux chevaux étrangers ; mais il est évident que pour certaines armes il faut encore acheter des chevaux étrangers, attendu que le pays n'en produit pas d'une taille assez grande. Le gouvernement désire acheter le plus grand nombre possible de chevaux dans le pays, et c'est ce qu'il fait ; que le Luxembourg continue à perfectionner la race de ses chevaux, et il pourra en fournir alors pour la cavalerie, comme il en fournit aujourd'hui pour le trait. Nous ne demandons pas mieux, car les chevaux du Luxembourg ont des qualités très précieuses.
M. de Baillet-Latour. - L'honorable M. Jullien a dit que la garnison de Mariembourg s'est rendue à son poste le jour des élections ; on aurait pu le faire plus tôt. Le fait est vrai, et il a un côté fâcheux parce qu'on aurait pu croire que j'avais demandé cette garnison comme une affaire électorale, et je n'ai pas besoin de dire que rien de pareil ne m'est jamais venu à la pensée. Lorsqu'on a enlevé à Mariembourg sa garnison et son matériel, j'ai insisté vivement pour qu'on la lui rendît, parce que 20 communes avaient pétitionné dans ce sens, lesquelles communes vivaient du marché de Mariembourg. M. le ministre de la guerre a fini par faire droit à ma demande, mais il l’a fait un peu tard, ce que j'ai vivement regretté.
Maintenant je demanderai, messieurs, si le gouvernement peut autoriser la démolition de bastions d'une forteresse sans qu'une commission spéciale ait examiné la question et sans qu'un arrêté royal soit intervenu. C'est ce qui a eu lieu à Mariembourg, et je ne sais plus, en vérité, à quoi cette forteresse peut encore servir après cette mutilation.
La question des forteresses est pendante ; nous pouvons l'examiner mais vous ne pouvez pas donner l'ordre de démolir des bastions.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est fait.
M. de Baillet-Latour. - C'est fait, je le sais ; mais c'est une chose très fâcheuse et qui n'est pas dans la légalité.
M. Delehaye ; - M. Thibaut a déposé plusieurs amendements au projet de loi sur les hypothèques. J'en propose l'impression, la distribution et le renvoi à la commission.
- Cette proposition est adoptée.
La séance est levée à 5 heures.