(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)
(Présidence de M. Desoer, doyen d'âge.)
(page 5) M. de Mérode-Westerloo, secrétaire provisoire, fait l'appel nominal à une heure 1/4.
M. Auguste Dumon, secrétaire provisoire, lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
MM. de La Coste, Moncheur et Tremouroux, admis comme membres de la chambre dans la séance précédente, prêtent serment.
M. le président fonne lecture de la lettre suivante :
Bruxelles, le 13 novembre 1850.
« M. le président,
« J'apprends par les journaux que les opérations électorales du district de Dixmude, qui m'a fait l'honneur de me nommer membre de la chambre des représentants, sont signalées comme entachées de fraude, et que cette accusation repose sur une enquête ordonnée par M. le ministre de l'intérieur et dirigée par ses agents.
« Par lettre du 12 septembre, j'ai demandé à M. le ministre une copie du procès-verbal, ainsi que de toutes autres pièces y annexées.
« Par dépêche du 11 suivant, ce haut fonctionnaire m'a répondu que les procès-verbaux et les pièces qui les accompagnent n'étant qu'en dépôt au ministère de l'intérieur, il ne pouvait m'en être délivré de copie jusqu'à ce que ces documents eussent été transmis à la chambre des représentants.
« M. Rogier ajoutait néanmoins qu'il ne voyait pas d'inconvénient à me communiquer sans déplacement le procès-verbal de l'élection, si je voulais bien me rendre à la première division du ministère.
« Le 20 septembre, je suis allé au déparlement de l'intérieur, où j'ai eu la faveur de pouvoir examiner le procès-verbal en présence de M. Bivort, chef de division. Après une inspection rapide de cette pièce, je demandai à M. Bivort s'il existait contre mon élection une autre opposition quelconque que celle consignée au procès-verbal par les quatre scrutateurs du bureau principal. M. Bivort a répondu qu'il n'y en avait point.
« J'ai donc lieu, M. le président, d'être étonné qu'on veuille opposer aujourd'hui à mon élection une enquête ordonnée, dirigée et conduite par des agents administratifs et dont l'existence m'a été soigneusement celée jusqu'à présent.
« Je suis convaincu, M. le président, que les membres du collège électoral de Dixmude qui m'ont honoré de leurs suffrages, se sont conduits avec une loyauté parfaite et que ce n'est pas à ceux qu'on pourrait attribuer des tentatives de violence ou de fraude.
« Je désire aussi vivement que qui que ce soit, M. le président, que la lumière se fasse et que chacun ait sa véritable part de responsabilité. Je viens donc avec une entière confiance prier la chambre de vouloir ordonner une enquête contradictoire et impartiale à l'effet de constater d'une manière certaine tous les faits relatifs à cette élection.
« Veuillez, M. le président, agréer l'expression de ma considération respectueuse,
« L. Desmaisieres. »
- Plusieurs membres. - Dépôt sur le bureau.
M. Dumortier. - Je demande l'impression.
- Des membres. - Au Moniteur.
- D'autres membres . - C'est de droit.
- La chambre ordonne le dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport concernant l'élection de Dixmude.
M. Delehaye, au nom de la quatrième commission, dépose le rapport sur l'élection de l'arrondissement de Dixmude.
- La chambre décide que ce rapport sera imprimé et distribué.
M. Dumortier. - Messieurs, un événement douloureux a frappé la Belgique. Le pays entier a éprouvé une des pertes les plus sensibles qui pouvaient lui arriver. La Providence a appelé à elle notre Reine bien-aimee Louise-Marie. Vous avez pu voir, messieurs, combien cette mort avait affligé le pays entier et comment elle a été accueillie par le deuil public de la Belgique. Le pays a montré dans cette circonstance tant de sentiment pour la monarchie, tant de sentiment pour la dynastie de son choix, que son attitude a fait l'admiration de l'Europe entière. Le pays attend de nous une manifestation près du Roi. Je propose doue à la chambre de voter une adresse à Sa Majesté pour lui exprimer la douleur que la nation et la chambre ont ressentie à cette occasion.
Je pense que la chambre devrait nommer une commission pour rédiger cette adresse.
- Plusieurs membres. - Après la composition du bureau définitif.
M. Manilius. - Il n'y a pas la moindre opposition. Mais il faut attendre la composition du bureau.
M. le président. - Le bureau a reçu une lettre de M. le maréchal du palais qui informe la chambre de l'événement douloureux auquel M. Dumortier vient de faire allusion.
M. Coomans, au nom de la troisième commission de vérification des pouvoirs, fait rapport sur l'élection de M. Pierre par le district de Virton ; il conclut à son admission.
- Ces conclusions sont mises aux voix et adoptées.
En conséquence, M. Pierre est proclamé membre de la chambre des représentants.
Un scrutin est ouvert pour la nomination du président.
Nombre des votants, 79.
Majorité absolue, 40.
M. Verhaegen a obtenu 69
M. Delehaye, 1
Billets blancs, 9.
En conséquence, M. Verhaegen, ayant obtenu plus de la majorité absolue des suffrages, est proclamé président de la chambre des représentants pour la session de 1850-1851.
Un second scrutin est ouvert pour la nomination des deux vice-présidents.
M. Delehaye a obtenu 68 voix.
M. Delfosse, 62
M. Vilain XIIII, 17.
M. de Man d'Attenrode, 1.
M. Dechamps, 1.
M. de Theux, 1.
M. Le Hon, 1.
En conséquence, MM. Delehaye et Delfosse, ayant obtenu le plus de suffrages, sont proclamés vice-présidents de la chambre des représentants.
Il est ouvert un troisième scrutin pour la nomination des secrétaires.
Nombre des votants, 78.
Majorité, 40.
M. T'Kint de Naeyer a obtenu 67.
M. Vandenpeerebom (Alph.), 62.
M. de Perceval, 47.
M. Ansiau, 44.
M. Dumon (Auguste), 23
En conséquence, MM. T'Kint de Naeyer, A. Vandenpeereboom, de Perceval et Ansiau sont proclamés secrétaires.
M. le doyen d'âge (M. le président). ) Messieurs et chers collègues, avant de quitter le fauteuil, permettez-moi de vous remercier du concours que vous avez bien voulu accorder à mon inexpérience.
J'invite M. le président à venir occuper le fauteuil, et MM. A. Vandenpeereboom et de Perceval à venir siéger au bureau, en qualité de secrétaires.
- M. Verhaegen monte au fauteuil.
MM. A. Vandenpeereboom et de Perceval, secrétaires, prennent place au bureau.
M. le président s'exprime en ces termes. - Messsieurs et chers collègues, je vous remercie de la nouvelle marque de confiance que vous venez de me donner, en m'appelant, pour la quatrième fois, à la présidence de la chambre. Cette confiance, j'aime à le dire, je crois l'avoir justifiée dans le passé et je m'efforcerai de la justifier dans l'avenir, par une impartialité et une fermeté à toute épreuve, par un zèle et une assiduité auxquels ma santé seule pourrait faire défaut.
Messieurs, comme président de la chambre, dirigeant vos travaux, j'ai toujours fait, je ferai toujours abstraction de mes opinions personnelles. Mais, comme représentant, comme simple citoyen, je tiens à honneur de ne faire en aucune circonstance le sacrifice de mes convictions, de rester ce que je suis, ce que j'ai toujours été ; car ainsi que j'ai eu l'occasion de vous le dire, dans une occurrence dont je conserverai toujours le souvenir avec bonheur, le respect des autres et de soi-même est le premier devoir de l'homme politique. (Applaudissements.)
Je crois remplir vos intentions en vous priant de voter des remerciements à notre respectable doyen d'âge et aux autres membres du bureau provisoire. (Nouveaux applaudissements.)
La chambre est constituée ; il en sera donné connaissance au Roi et au sénat.
M. le président. - Depuis notre séparation, une perte cruelle a frappé la Belgique : notre Reine bien-aimée, que nous avions espéré voir conservée longtemps encore à notre affection, a cessé d'exister ; sa mort est un sujet de deuil général.
Les grands corps de l'Etat, les administrations communales ont (page 6) dignement interprété les regrets amers des citoyens ; les adresses qu'ils ont votées sont les témoignages les plus honorables que l'on puisse donner à une Reine, à un Roi.
Que le premier acte de la chambre qui vient de se constituer soit une adresse solennelle, qui résume les sentiments de la nation entière, et qui manifeste l'intention de tous de reporter sur Sa Majesté et sur ses enfants la part d'affection et de respect qu'on avait vouée à la Reine. (Adhésion générale.)
Pour donner à cette adresse toute l'importance qu'elle mérite, j'ai l'honneur de vous proposer de nommer une commission de sept membres qui serait invitée à rédiger un projet d'adresse de condoléance au Roi et de vous le communiquer à l'ouverture de la séance de demain.
M. Dumortier. - Messieurs, je viens me joindre à M. le président pour appuyer la proposition qu'il vous fait, et qui est d'ailleurs conforme à celle que j'avais soumise à la chambre au commencement de la séance.
Mais je ferai remarquer que lorsque j'ai appelé l'attention de la chambre sur la perte si douloureuse que le pays et le Roi ont éprouvée, M. le président d'âge nous a fait connaître qu'une missive avait été adressée à la chambre, par M. le grand maréchal du palais, pour l'informer du triste événement. Je pense qu'il serait convenable de nous donner lecture de cette pièce.
D'un autre côté, M. le président nous propose de nommer une commission de sept membres. Il me semble que le président de la chambre est président de droit de la commission. Celle-ci ne doit donc être composée que de six membres.
M. Devaux. - Messieurs, en appuyant la proposition qui nous est faite par M. le président, je viens demander en même temps que la chambre, comme marque de sympathie pour cette proposition, décide que l'adresse sera présentée à Sa Majesté, non par une députation, mais par la chambre entière. (Appuyé ! appuyé !)
- La chambre décide qu'une commission de six membres sera nommée pour rédiger un projet d'adresse de condoléance à Sa Majesté, et que l'adresse sera présentée au Roi par la chambre, en corps.
M. le président. - Par qui la commission sera-t-elle nommée ?
- Plusieurs membres. - Par le bureau.
M. Manilius. - L'honorable M. Devaux, qui tient le règlement en main, me fait observer qu'il s'oppose à ce que les commissions chargées de rédiger les projets d'adresse soient nommées par le bureau.
M. Devaux. - Je crois me souvenir que le règlement exige que les commissions chargées de rédiger les projets d'adresse soient nommées par la chambre.
M. le président. - L'article du règlement auquel on fait allusion est l'article 67, ainsi conçu :
« Les projets d'adresse sont rédigés par une commission composée du président et de six membres choisis à la majorité absolue par la chambre ou par les sections. Ces projets sont soumis à l'approbation de la chambre, et transcrits, dès qu'ils sont approuvés, aux procès-verbaux des séances.
M. Rodenbach. - Cet article ne me paraît pas applicable en cette circonstance. Le règlement s'occupe d'adresses politiques. Ici il s'agit d'une adresse de condoléance, d'une manifestation de douleur de la chambre entière. Je crois donc que la commission peut être nommée par le bureau, sauf ensuite à la chambre à aller en corps la présenter à Sa Majesté.
- La chambre décide que la commission sera nommée par le bureau.
M. le président. - Plusieurs pièces ont été adressées à la chambre. Voici d'abord celle à laquelle M. Dumortier vient de faire allusion.
« Monsieur le président,
« Je m'acquitte du pénible devoir de vous faire connaître le triste événement qui vient de frapper le Roi et la famille royale dans leurs plus chères affections.
« Sa Majesté Louise-Marie-Thérèsc-Charlolle-Isabelle d'Orléans, Reine des Belges, est décédée à Ostende aujourd'hui, 11 octobre 1850, à huit heures et demie du matin, dans la plus sainte résignation.
« Veuillez agréer, Monsieur le président,
« les assurances de ma haute considération.
« Le maréchal de la cour,
« Ch. de Marnix.
« Bruxelles, 11 octobre 1850. »
M. le président. - De son côté, M. le ministre de l'intérieur a adressé à chacun des membres de la chambre une circulaire par laquelle il leur donnait connaissance du douloureux événement qui avait frappé le pays.
Voici cette circulaire :
« Bruxelles, le 12 octobre 1850.
« M. le représentant,
« Je remplis le douloureuf devoir de vous annoncer la mort de Sa Majesté la Reine, décédée hier, à 8 heures 10 minutes du matin, au palais d'Ostende.
« La translation des restes de Sa Majesté dans l'église de Laeken aura lieu le 14 de ce mois.
« Un service funèbre sera célébré solennellement à Sainte-Gudule le mardi, 22 octobre, à onze heures.
« Agréez, M. le représentant, l'assurance de ma haute considération,
« Le ministre de l'intérieur,
« Ch. Rogier. »
Il va être procédé à la nomination des questeurs.
M. Lebeau. - M. le président, si l'on veut que la commission d'adresse puisse soumettre demain son travail à la chambre, il est indispensable que la commission soit nommée aujourd'hui. Elle doit d'abord se réunir ; puis elle doit nommer son rapporteur. Chacun comprend très bien les raisons de convenance pour lesquelles il faut se hâter ; il est inutile d'y insister, car je m'adresse à un sentiment qui est dans tous les cœurs.
M. le président. - Je proposais de nommer les questeurs parce que pendant cette opération le bureau pourra composer la commission.
Nombre des votants 72
Majorité absolue, 37
MM. Thiéfry obtient 69 suffrages.
De Baillet-Latour 68 .
En conséquence, MM. Thiéfry et de Baillet-Latour sont proclamés questeurs de la chambre.
MpM. - Voici la composition de la commission chargée de rédiger le projet d'adresse à Sa Majesté : MM. Devaux, de Theux, Loos, Deliége, Dumortier et Dolez.
Nous avons maintenant à procéder à la nomination des commissions permanentes des finances, de l'industrie et des naturalisations.
L'année dernière la chambre a décidé que les deux premières commissions, celles des finances et de l'industrie, seraient composées de neuf membres, et la commission des naturalisations de sept membres : elle a décidé en outre que les trois commissions seraient nommées par un seul scrutin et que la commission de comptabilité serait nommée par les sections. Je proposerai à la chambre de procéder de la même manière.
- Cette proposition est adoptée.
La chambre décide ensuite que les commissions des finances, de l'industrie et des naturalisations seront nommées dans la séance de demain.
M. de Theux. - Il faudra faire connaître les noms des membres des anciennes commissions.
M. le président. - Ils seront insérés au Moniteur.
Maintenant, messieurs, plusieurs commissions et sections centrales sont devenues incomplètes ; de quelle manière la chambre entend-elle-qu'elles soient complétées ?
- Plusieurs membres - Par le bureau.
- Cette proposition est adoptée.
M. Malou. - Parmi les projets dont la chambre est saisie, il en est deux qui n'ont encore subi aucune espèce d'examen de la part des sections ; c'est le projet de loi sur le crédit foncier et celui qui concerne le régime des warrants. Je demanderai, dans l'intérêt des travaux de la chambre, que ces deux projets soient renvoyés aux sections de novembre.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président. - Nous avons encore à régler l'ordre du jour de demain. Nous pourrions nous occuper, après la nomination des commissions permanentes, de la discussion du rapport sur l'élection de Dixmude. Nous aurons probablement aussi le rapport de la commission d'adresse. Enfin nous ayons le budget des affaires étrangères et le budget de la justice.
M. Orts. - Je ne pense pas que le rapporteur du budget des affaires étrangères, M. de T'Serclaes, soit ici pour le budget de la justice, je suis prêt.
M. le président. - Si M. de T'Serclaes n'était pas présent demain, on pourrait s'occuper en premier lieu du budget de la justice. (C'est cela !)
- Le budget des affaires étrangères et celui de la justice sont mis à l'ordre du jour.
Il est procédé au tirage au sort des sections du mois de novembre.
- La séance est levée à 4 heures.