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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 31 mai 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-1849)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1485) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à 2 heures et quart.

- La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dont la rédaction est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Les sieurs Briant et Lepine, fabricants de cordes, à Nivelles, prient la chambre de statuer sur leur demande tendant à faire réduire les droits d'entrée sur les écorces de tilleuls. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Quelques habitants de Tirlemont prient la chambre de statuer sur leur demande tendant à faire annuler la délibération du conseil communal de Tirlemont, concernant le budget de la garde civique. »

M. de Man d'Attenrode. - Les auteurs de cette réclamation demandent que la chambre veuille bien statuer sur une pétition qu'ils lui ont adressée, il y a quelques semaines. Le but de cette pétition est de se plaindre des dépenses exorbitantes qu'occasionne le service de la garde civique. Cette pétition, qui soulève même des questions de légalité, a été renvoyée à la commission des pétitions. Je demande qu'elle veuille bien faire un prompt rapport, car il paraît que la session ne se prolongera plus longtemps.

L'honorable M. Liefmans en est, je crois, chargé; il pourrait peut-être nous dire quand le rapport sera prêt.

M. Liefmans. - La commission a fixé un jour pour s'occuper de cette pétition, je pense que le rapport pourrait élie fait dans la séance de samedi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne vois là rien d'urgent ; la gai de civique de Tirlemont est très bien organisée.

M. de Man d'Attenrode. - Du moment que M. le rapporteur déclare que le rapport pourra être fait samedi, je suis satisfait.

- Le renvoi est ordonné.


M. Wyvekens fait hommage à la chambre de son ouvrage sur la Constitution belge et les lois organiques.

- Dépôt à la bibliothèque.


M. Dubus demande un congé illimité, motivé sur la maladie grave de son père.

- Accordé.

Projet de loi définitif sur le transit

Rapport de la section centrale

M. Loos. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le projet de loi relatif au transit.

Il y a quelques jours, M. le ministre des finances a déposé un nouveau projet de loi ayant pour objet de proroger pour un an la loi du 18 juin 1842. La chambre pourrait décider dès à présent s'il y a lieu de discuter le projet de loi nouveau ou le projet définitif. Je pense que le projet définitif pourrait être mis à la suite de l'ordre du jour et réservé pour la semaine prochaine.

- Le rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.


M. le président. - Le bureau a composé la commission pour examiner le projet de loi relatif à des changements de chef-lieu de justice de paix. Il a désigné MM. Toussaint, Orts, Van Hoorebeke, Thiéfry et de Man d'Attenrode.

Projet de loi portant le budget du département des affaires étrangères pour l’exercice 1850

Discussion des articles

Chapitre premier. Administration centrale

Articles 1 à 6

« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Traitement du personnel des bureaux : fr. 105,050. »

- Adopté.


« Art. 3. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 2,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Secours à des fonctionnaires et employés, à leurs veuves ou enfants, qui, sans avoir droit à la pension, ont des titres à un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 1,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Matériel : fr. 37,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Achat de décorations de l'ordre de Léopold, sans que l'on puisse augmenter ce chiffre par des imputations sur d'autres articles : fr. 8,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Traitement des agents politiques

Discussion générale

M. Osy - Il y a déjà plusieurs années qu'à l'occasion du budget de affaires étrangères, j'ai demandé au gouvernement s'il n’y aurait pas moyen de conclure une convention avec la Russie.

Les puissances qui ont fait des traités avec la Russie (la France et les Pays-Bas) sont favorisées d'une manière très considérable en comparaison des puissances qui n'ont pas de traités. Pour celles-ci les droits de douane sont augmentés de 50 p. c, de même que les droits de tonnage, de pilotage et de port.

On nous a dit, depuis deux ans, qu'on était en négociation à Berlin, avec l'ambassadeur de Russie, pour tâcher, au moins, d'obtenir un traité de navigation et de commerce.

Je demanderai si nous pouvons espérer obtenir bientôt ce traité qui devient très utile.

En 1840, il n'y a que deux navires belges qui ont pu aller en Russie, cause des droits élevés. Par contre il est entré dans nos ports, en 1846, 52 navires russes, et il en est sorti 55 ; savoir : ces 52 et 3 navires entrés en 1845.

Vous voyez qu'il est très onéreux pour nous de traiter la Russie comme les nations le plus favorisées, tandis que nous sommes traités d'une manière si désavantageuse.

Je demanderai donc si nous pourrons avoir bientôt un traité avec la Russie.

A l'occasion du chapitre II, comme on a jugé convenable de faire un changement dans une légation, d'y envoyer un officier du génie, je demanderai s'il est bien entendu que les officiers auront la faculté de poursuivre en même temps la carrière militaire et la carrière diplomatique. Je ne blâme pas la nomination qui a été faite. Mais je crois que, tant dans l'intérêt des militaires que des diplomates, il conviendrait qu'on optât, qu'on donnât la démission de son grade dans l'armée.

L'année dernière, le gouvernement a nommé gouverneur provincial un colonel d'artillerie qui a immédiatement donné sa démission. Je crois que dans le corps diplomatique il devrait en être de même.

L'intention du gouvernement serait de faire résider ce diplomate à Copenhague. Nous avons fait observer l'année dernière qu'il conviendrait que sa résidence fût plutôt fixée à Hambourg, parce qu'il est à croire que tôt ou tard les villes hanséatiques devront entrer dans le Zollverein ; nos relations avec le Zollverein ayant une grande importance, nous devrions avoir un agent à Hambourg plutôt qu'à Copenhague, où nous n'avons rien à espérer.

Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères s'il partage cette opinion.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je répondrai d'abord à la première question qui m'a été adressée par l'honorable M. Osy.

Il désire savoir s'il y a espoir d'obtenir la conclusion d'un traité de commerce et de navigation avec la Russie. Messieurs, le gouvernement n'a jamais perdu de vue cette question. J'ai donné à la section centrale des explications verbales assez étendues à ce sujet. La section centrale a jugé qu'il ne convenait pas de rendre ces explications publiques. En effet, la chambre comprendra que, quand une négociation est entamée, il est de l'intérêt de la négociation elle-même, pour le résultat qu'on cherche à obtenir, de ne pas rendre publics les détails de cette négociation. Cependant je puis ajouter, pour satisfaire l’honorable membre, que je crois que, dans le moment actuel, nous sommes en voie d'arriver à une solution.

L'honorable M. Osy vous a entretenue, messieurs, de la nomination récente d'un agent diplomatique à Copenhague.

Comme cet agent diplomatique appartient en même temps à l'armée, l'honorable M. Osy a demandé s’il pourrait suivre ces deux carrières à la fois. Je puis répondre à cet honorable membre, que cet agent diplomatique m’a envoyé sa démission de lieutenant-colonel du génie, grade qu’il occupait dans l’armée.

Quant à sa résidence principale, ainsi que je l’ai déclaré dans la discussion de mon budget pour l’exercice actuel, je crois que cette résidence principale doit être fixée à Copenhague. Copenhague étant au cœur de ces trois pays, il importe qu’il réside plutôt dans cette ville que (page 1486) dans une des deux autres capitales. Mais il ne s’ensuivra pas que, quand sa présence sera nécessaire à Hambourg, il ne s'y rende aussi souvent que cela sera nécessaire. Parce que sa résidence principale est fixée à Copenhague, il ne s'ensuit pas qu'il ne quittera jamais cette ville et ne se rendra jamais dans les autres capitales. C'est l'utilité qu'on pourra trouver dans un semblable voyage, qui guidera à cet égard le gouvernement.

Du reste, je crois que la présence permanente d'un agent diplomatique à Hambourg n'est pas indispensable. Ce sont des intérêts commerciaux que nous avons à traiter à Hambourg, et il y a là un consul qui n'est pas rétribué, il est vrai, mais qui met du zèle à remplir ses fonctions. S'il était reconnu que ce consul non rétribué ne suffit pas, le gouvernement pourra examiner s'il n'y a pas lieu d'y envoyer un consul rétribué. De cette manière, je crois que tous les intérêts que nous avons à sauvegarder, surveiller dans le Nord pourront trouver une suffisante protection.

Je crois donc qu'il faut que notre agent diplomatique continue à résider à Copenhague. Si sa présence devient indispensable à Hambourg, le gouvernement avisera. Il n'y a rien d'absolu à cet égard. Je crois que si les intérêts commerciaux exigent la présence d'un agent en permanence à Hambourg, ce sera principalement un agent commercial qu'il faudra y placer. Du reste, ce n’est que depuis peu d’années que nous avions un chargé d’affaires à Hambourg. Il y a quelques années, nous n’y avions d’un simple consul et personne n’avait adressé de réclamations à cet égard au gouvernement. La plupart des gouvernements n'ont que des consuls a Hambourg. Il n'y a guère que des nations du premier rang qui y ont accrédité des agents diplomatiques.

- La discussion est close.

Articles 7 à 10

« Art. 7. Missions en Allemagne : fr. 87,000. »

- Adopté.


« Art. 8. France : fr. 35,000. »

- Adopté.


« Art. 9. Grande-Bretagne : fr. 52,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Pays-Bas : fr. 32,000.e

- Adopté.

Article 11

« Art. 11. Italie : fr. 32,000. »

M. de Perceval. - Messieurs, la somme de fr. 32,000 qui nous est demandée par le gouvernement à l'article 11, Italie, est destinée à rétribuer notre légation, qui ne réside plus, vous ne l'ignorez point, à Rome, mais bien à Gaète.

Je déplore, sous deux points de vue, le départ, assez insolite selon moi, que tout un personnel a jugé convenable d'effectuer ; d'abord, parce qu’il abandonne nos nationaux à la défense plus ou moins active, plus ou moins énergique d'une légation étrangère, ensuite parce qu'il porte une atteinte à la dignité du pays.

L'honorable M. Deliége, dans la séance du 12 mai, a interpellé M. le ministre des affaires étrangères au sujet de certaines violences qui auraient été commises sur un de nos compatriotes, à Rome.

L'honorable chef du département des affaires étrangères n'a pas niè ce fait, et il est résulté de sa réponse que c'est le conseiller de la légation de Hanovre qui s'est chargé de défendre, d'aider et de protéger nos nationaux.

Permettez-moi de vous rappeler les paroles prononcées à ce sujet, par l'honorable ministre lui-même :

« Messieurs, j'ai eu connaissance, disait-il, comme l'honorable M. Deliége, du fait grave qu'il vient de signaler: mais jusqu'à présent, je n'ai pas reçu un rapport officiel qui me rende un compte exact des circonstances qui ont accompagné les violences dont il paraît qu'un de nos compatriotes a été victime. En l'absence de notre légation, qui a suivi, comme toutes les autres, le saint-père à Gaète, les intérêts belges à Rome sont confiés à un conseiller de légation du Hanovre, qui s'acquitte de ces fonctions avec la plus grande activité et le plus grand zèle. Je sais qu'il a fait toutes les démarches nécessaires pour obtenir la réparation due à notre compatriote; mais immédiatement après le fait dont il s'agit, l'intervention française a eu lieu, et on conçoit que dans les circonstances où se trouve la capitale du monde chrétien, il serait fort difficile d'obtenir aucune espèce de satisfaction. »

Et plus loin :

« Je suis intimement persuadé que le secrétaire de notre légation n'aurait pas mieux rempli les fonctions dont il est chargé que ne l'a fait le conseiller dont je viens de parler.....Ce diplomate était à Rome; il a bien voulu se charger de soigner les intérêts belges; et ii s'est acquitté de ce soin à l'entière satisfaction du département des affaires étrangères; des réclamations ont été faites par lui de la manière la plus instante. »

Il résulte donc clairement de la réponse de M. le ministre, que c'est le conseiller de la légation du Hanovre qui est chargé de défendre les intérêts de nos nationaux, et qui a bien voulu (et je l'en remercie) accepter cette mission, puisque tout le personnel de notre légation jugeait opportun de quitter Rome pour suivre le saint-père à Gaète.

La légation du Hanovre est donc devenue à Rome la légation de la Belgique.

J'admets que, dans les pays où la Belgique n'est pas représentée, le gouvernement charge une légation étrangère de protéger les Belges qui peuvent s'y trouver. Mais dans un Etat où nous avons une ambassade au grand complet, je soutiens qu'il y a quelque chose d'insolite, pour ne pas dire plus, de voir déposer notre pavillon dans des mains étrangères et de le voir confié à d'autres chefs de légation.

La chambre peut-elle, sans prononcer une parole de blâme, laisser passer, comme constituant un fait très ordinaire, très régulier, cette position prise par notre légation en Italie ? Je ne le pense pas.

Sans doute, un ambassadeur est accrédité auprès d'une puissance ; mais si, d'un côté, il a des devoirs à remplir comme chef de mission vis-à-vis de cette puissance, de l'autre, il en a aussi à remplir vis-à-vis du pays qu'il représente et des nationaux qui peuvent se trouver dans une capitale en révolution qu'il abandonne, et où ils sont exposés éventuellement à de grands dangers. Et, à mes yeux, ces derniers priment les premiers.

Voyez quelle position critique est faite aux Belges qui résident à Rome ! Tout notre personnel diplomatique payé par le pays, par nous, chargé par le gouvernement de protéger nos familles, nos intérêts, abandonne Rome et s'installe à Gaète. Comme si tout intérêt belge avait disparu de cette capitale avec le départ du souverain, pontife. Nos nationaux sont délaissés par leur protecteur naturel, par celui que la Belgique rétribue pour les défendre, pour les secourir. Pas un secrétaire, pas un attaché ne reste à Rome. Il leur dit de s'adresser, en cas de réclamations ou de péril, à une légation étrangère ? Est-ce là une conduite que le gouvernement, que la législature peuvent sanctionner? Quant à moi cela me serait impossible.

Nous avons un grand nombre de familles belges à Rome ;il était du devoir de notre ambassadeur d'y laisser un secrétaire pour les couvrir, en cas de besoin, de l'inviolabilité de son caractère officiel.

A quoi nous sert-il de voter une somme de 32,000 fr. pour rétribuer une semblable mission, si nous la voyons, en temps de troubles et de révolutions, abandonner le pays qui en est le théâtre ? C'est surtout dans des circonstances pareilles qu'un ambassadeur doit restera son poste, parce qu'avant de suivre les usages des cours, il doit se rappeler que les existences menacées de ses compatriotes lui commandent de plus impérieux devoirs. Ces devoirs, d'une certaine grandeur parée qu'ils sont difficiles, il doit avoir l'ambition de s'en acquitter lui-même à d'aide du personnel qu'il tient à sa disposition, au lieu de les confier au représentant d'une nation étrangère.

Je désire que M. le ministre des affaires étrangères veuille bien prescrire les mesures nécessaires pour que, au moins, le secrétaire de notre légation rentre dans Rome, et qu'il y continue à représenter notre pays, ne serait-ce que dans, le but de donner une protection efficace à ceux de nos nationaux qui en auraient besoin.

Je demanderai aussi à M. le ministre des affaires étrangères quelles sont les démarches qui ont été faites, au nom du gouvernement belge, par la légation de Hanovre pour obtenir la réparation due à un Belge octogénaire qui a eu son domicile violé, ses meubles brisés, etc., et si M. le ministre peut communiquer à la chambre le rapport officiel et détaillé sur cette affaire qu'il attendait de Rome depuis le 12 de ce mois.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - L'honorable préopinant, dans le discours que vous venez d'entendre, a attaqué d'une manière assez vive un fait qui n'a cependant été posé qu'à l'exemple de presque toutes les nations qui avaient des agents accrédités à Rome. Les instructions que nous avions données à notre chargé d'affaires à Rome, M. de Meester, étaient de suivre l'exemple des autres agents diplomatiques, et spécialement de ceux des grandes puissances, telles que la France, l'Espagne, la Prusse.

M. de Perceval. - Ils n'ont pas quitté avec tout le personnel.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Notre chargé d'affaires n'a fait que se conformer à ce qu'ont fait les représentants des autres puissances. L'honorable préopinant dit : « Mais il aurait dû rester à Rome. » Veuillez remarquer, messieurs, que notre légation n'est pas accréditée auprès de la ville de Rome, mais auprès du saint-père. Notre agent diplomatique a dû, dès lors, comme les agents de toutes les autres nations, suivre à Gaète le saint-père, sur l'invitation formelle qui lui en a été faite par le souverain pontife.

L'honorable préopinant dit que les intérêts de nos nationaux ont été délaissés par l'absence de notre légation. Mais, messieurs, notre agent diplomatique n'est pas seulement accrédité à Rome; il l'y est également à Naples, à Florence, à Turin ; eh bien, est-ce que l'honorable préopinant nous adresserait des reproches s'il arrivait quelque accident fâcheux à un de nos nationaux soit à Naples, soit à Florence, parce qu'il ne s'y trouvait pas un secrétaire d'ambassade? Si l'on veut que la Belgique soit représentée à la fois dans toutes les résidences, il faut que le budget puisse y pourvoir.

D'ailleurs si notre chargé d'affaires a quitté Rome, nous n'avons pas pour cela abandonné les intérêts de nos nationaux. Un agent étranger a été chargé de veiller à leurs intérêts et il s'en est acquitté aussi bien que le secrétaire belge aurait pu le faire.

Nous avons, en outre, invité M. de Meester à se transporter à Rome chaque fois que sa présence y serait nécessaire.

Je lui ai même transmis depuis de nouvelles instructions; je lui ai prescrit d'aller à Rome, et je lui ai demandé un rapport sur l'attentat populaire dont un de nos compatriotes a été la victime. Lorsque j'aurai connaissance de tous les détails sur ce point, je ne ferai pas la moindre difficulté d'en informer soit l'honorable préopinant, soit la chambre.

Dans tous les cas, messieurs, l'on a complètement tort de faire entrer dans cette question la dignité du pays; lorsque la Belgique suit l’exemple (page 1487) des grandes nations européennes, lorsqu'elle se conforme aux usages diplomatiques, la dignité du pays n'est nullement en cause.

D'ailleurs, messieurs, je suis persuadé que les violences qui ont eu lieu h l'égard de notre compatriote n'auraient pas pu être évitées, quand bien même toute notre représentation diplomatique se serait trouvée à Rome.

Je puis du reste déclarer à la chambre que des instructions ont encore été données récemment pour que tous les intérêts de la Belgique soient autant que possible sauvegardés dans les Etats Romains. Mais si, au milieu de ces événements si extraordinaires, de cette situation exceptionnelle, il se passe un fait aussi tout à fait exceptionnel, on ne peut pas en rendre responsable ni la diplomatie ni le gouvernement, Ce qui est arrivé à l'un de nos nationaux, est arrivé à des italiens mêmes. J'ignore encore toutes les circonstances qui ont motivé et accompagné le fait fâcheux auquel on a fait allusion. Lorsque je connaîtrai ces circonstances, je pourrai en parler en connaissance de cause, et mieux apprécier leur gravité. Dans le moment actuel je ne pourrais donner des détails précis sur cet accident fâcheux.

M. Lesoinne. - Messieurs, un honorable fabricant de Liège, dont le frère se trouve actuellement à Rome, lui avait écrit pour l'engager à revenir en Belgique; il lui a répondu que tous les Belges qui se trouvent à Rome sont forcés d'y rester; ils sont sans passeports et sans moyens de s’en procurer ; car, pas le plus petit employé de légation belge n’est resté à Rome, depuis deux à trois mois tout le monde est parti, et quoiqu'il se trouvé à Rome une quantité de Belges, ils y sont sans protection.

M. le ministre des affaires étrangères vient de dire qu'en partant de Rome, l'agent diplomatique belge avait prié un conseiller de légation du Hanovre de gérer ses affaires pendant son absence. Eh bien, il se trouve que les Belges qui sont à Rome ignorent complètement ce fait, puisque le signataire de la lettre recommande à son père de ne pas être inquiet sur son compte, parce qu'il a le choix entre le drapeau anglais et le drapeau américain pour s'abriter. Cela prouve donc qu'à la date du 1er mai (c'est la date de la lettre), les envoyés de ces deux puissances n'avaient pas quitté Rome.

Je pense qu'il serait convenable que les agents diplomatiques, que nous envoyons à l'étranger, restassent à leur poste ou du moins y laissassent un secrétaire pour protéger nos concitoyens pendant leur absence, car c'est précisément au milieu des commotions révolutionnaires qu'on a le plus besoin de protection.

Je pense donc que M. le ministre des affaires étrangères devrait donner les ordres les plus précis à nos agents diplomatiques de retourner à Rome, et d'y soigner les intérêts de nos concitoyens qui ne peuvent pas sortir de cette capitale, faute de pouvoir se procurer les papiers nécessaires.

M. de Perceval. - Messieurs, en présence du fait qui vient d'être signalé par mon honorable collègue et ami M. Lesoinne, je reproduis la question que j'ai eu l'honneur d'adresser à M. le ministre des affaires étrangères, et je lui demanderai s'il trouve quelque inconvénient à donner l'ordre au secrétaire de notre légation, M. de Meester, de rentrer dans Rome, afin qu'au moins nos nationaux puissent s'abriter derrière le pavillon belge et que ce pavillon soit porté par des mains belges.

Le gouvernement croit que c'est la légation de Hanovre qui prend nos nationaux sous son égide ; il résulte cependant de la lettre dont l'honorable préopinant a donné lecture, que nos concitoyens sont forcés d'opter entre le pavillon américain et le pavillon anglais ; il est évident, pour moi, que le gouvernement est mal informé.

Si le gouvernement sait pertinemment que la légation de Hanovre est chargée de défendre les intérêts des Belges, je demanderai que M. le ministre veuille déposer sur le bureau la dépêche officielle qu'il a dû recevoir de Rome, et par laquelle on lui annonce que dorénavant le pavillon de Hanovre représenterait le pavillon belge.

M. le ministre trouve-t-il quelque inconvénient à nous communiquer ce document?

Maintenant on vient nous dire : Notre ambassadeur a suivi l'exemple de tous les autres chefs de mission. Je vous l'accorde; l'ambassadeur est accrédité auprès du souverain, mais vous avez à côté de l'ambassadeur des secrétaires, des attachés qui ne sont pas accrédités aussi officiellement. Pourquoi nomme-t-on des secrétaires, des attachés et d'autres fonctionnaires subalternes? Pour qu'ils s'occupent de la besogne matérielle, administrative, de la diplomatie. Laissez à l'ambassadeur le soin de mener à la rigueur, la vie de cour près du souverain, mais chargez au moins un secrétaire ou un attaché du soin de défendre nos nationaux si l'ambassadeur ne juge pas convenable de s'en occuper lui-même d'une manière active.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je répondrai d'abord que le commerçant auquel l'honorable M. Lesoinne a fait allusion ne savait pas sans doute que l'agent du Hanovre pouvait délivrer des passeports.

Quoi qu'il en soit, j'ai donné de nouveaux ordres, et je suis persuadé qu'actuellement les inconvénients qu'on signale le pourraient plus se représenter. Le secrétaire de légation a été invité, il y a plus de 15 jours, à se rendre à Rome et à prendre des mesures pour que nos nationaux trouvent toute la protection qu'il est possible d’accorder dans les circonstances où se trouvent les Etats romains.

Ainsi pour les passeports non seulement l'agent diplomatique qui s'était chargé des intérêts belges avait le droit d'en délivrer, mais le secrétaire de légation doit se trouver actuellement à Rome. Tous les intérêts sont garantis dans le moment actuel ; des instructions ont été données dans ce sens.

L'honorable M. de Perceval est revenu avec une certaine vivacité sur un point...

M. Manilius. - Il n'y a pas mis de vivacité.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Il a parlé de la dignité du pays, il a dit que le pavillon belge doit être porté par des mains belges, et non par des mains étrangères.

Il ne s'agit, messieurs, que de remplir certaines fonctions administratives. C’'est à cela que se borneraient les fonctions diplomatiques de l'agent qui serait resté à Rome, car le secrétaire ne pourrait pas y porter le pavillon belge, il ne représenterait pas la Belgique près du gouvernement de Rome.

Je ne crois pas devoir donner plus d'explications sur ce point, mais je ferai remarquer de nouveau que des instructions ont été données, il y a environ 15 jours, pour que des mesures soient prises afin que les faits dont on se plaint ne se renouvellent plus, et que nos nationaux trouvent toutes les garanties nécessaires.

(page 1494) M. Le Hon. - Je ne donnerais pas suite à cet incident, si je ne croyais devoir relever ce qu'a dit M. le ministre des affaires étrangères sur les devoirs des chefs de mission, placés au milieu d'événements de la nature de ceux qui ont agité les Etats romains.

Je crois que lorsque le souverain , le chef du gouvernement près duquel un agent diplomatique est accrédité quitte sa résidence en des circonstances graves, et la transfère sur un autre point de ses Etats, le devoir du chef de mission est, en règle générale, de l'y suivre ; mais il ne faut pas que les prérogatives et les devoirs de protection qui appartiennent à la diplomatie, dans les principes du droit des gens, soient désertés ou suspendus ; ils restent confiés alors aux agents secondaires de la mission qui continuent de demeurer là où l'action protectrice est plus que partout ailleurs nécessaire et urgente, je veux dire au siège d'un nouveau gouvernement de fait.

La règle posée par M. le ministre des affaires étrangères et d'après laquelle le départ du personnel entier d'une légation serait légitime et régulier en semblable circonstance, est de nature à induire en erreur nos autres missions à l'étranger.

Pour moi, je pense qu'on ne pourrait renouveler la conduite que notre agent a tenue à Rome, lors du départ du souverain pontife, sans commettre une faute grave, sans confondre deux devoirs d'ordre différent.

Le chef de mission doit résider là où s'établit le souverain près duquel il est accrédité; il le doit surtout, s'il occupe le rang d'ambassadeur, investi du caractère représentatif. On sait en effet que ce titre place l'agent diplomatique dans des rapports plus directs, plus intimes, en quelque sorte, qu'aucun autre avec le chef de l'Etait. En présence de la position prise par la cour de Rome, l'ambassadeur belge a donc rempli le devoir imposé à son caractère: mais, dans aucun cas, la protection active, quoique officieuse, des intérêts nationaux, à Rome, ne devait être abandonnée vis-à-vis du gouvernement de fait ; et je ne saurais croire que tel ait jamais pu être le sens des instructions données par M. le ministre des affaires étrangères à notre légation d'Italie. Il y a une différence essentielle entre la politique passive et expectante du gouvernement belge à l'égard d'une révolution victorieuse et l'état d'hostilité proprement dit.

Il fallait donc qu'un secrétaire ou un attaché restât à Rome, ou bien que le chargé d'affaires ad intérim, après s'être associé à la politique des autres puissances, en suivant à Gaète les chefs de mission accrédités près le saint siège, retournât dans la métropole catholique aussitôt après l'arrivée de notre ambassadeur dans la résidence du gouvernement de droit.

Voilà, messieurs, les principes et les traditions que j'ai voulu rétablir, pour qu'il ne résultât pas des doctrines trop absolues de M. le ministre des affaires étrangères un précédent qui pût être suivi, comme autorité, par nos autres missions.

Nous pouvons invoquer, d'ailleurs, un exemple récent, tout contraire à ce qui s'est passé à Rome. Vienne a été aussi le théâtre d'une violente commotion et de désordres sanglants.

M. de Perceval. - Paris l'a été également.

M. Le Hon. - Cela est vrai. Vienne a vu la bataille des barricades et la lutte ardente de la population contre l'armée.

L'empereur Ferdinand a quitté sa capitale et transporté sa résidence dans une autre ville de l'empire. Le chef de la légation belge s'est rendu comme les autres diplomates, auprès du souverain ; mais le secrétaire est resté à Vienne, quelles que fussent les dangers qui l'entouraient.

Je ne sais si cet agent a eu à remplir activement les devoirs de protection dont je parlais tout à l'heure ; mais il était à son poste et c'est ce que j'appelle l'intelligence des devoirs de la position et de la règle diplomatique.

Je le répète, mon but, en prenant la parole, a été de prévenir les conséquences de la justification trop absolue faite par M. le ministre des affaires étrangères, de la conduite de notre légation d'Italie, dans les derniers événements de Rome.

(page 1487) M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Nous sommes d'accord sur un point avec l'honorable comte Le Hon; il reconnaît que, dans une circonstance semblable à celle qui s'est présentée à Rome, le chef de da légation doit suivre le souverain près duquel il est accrédité.

M. Le Hon. - Surtout quand il est ambassadeur.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Il y a, en effet, un motif de plus quand il est ambassadeur. Ainsi c'est là le point principal.

Si l'on venait blâmer le déplacement de l'ambassadeur, si l'on soutenait qu'il aurait dû rester à Rome, près du gouvernement nouveau, je comprendrais la grande importance de l'observation. Mais l'honorable comte Le Hon, ainsi que l'honorable préopinant, reconnaissent que l'ambassadeur devait suivre le souverain près duquel il est accrédité. Mais le secrétaire, dit-on, devait rester à Rome, Mais le secrétaire était seul à cette époque. J'ai dit qu'on avait donné au secrétaire l'ordre de s'y rendre aussi souvent que ce serait nécessaire. Depuis lors, je l'ai invité à y résider.

Mais indépendamment de ces instructions, un conseiller de légation avait été chargé de remplir tous les devoirs du secrétaire de légation. Que pouvait-on faire de plus?

M. Le Hon. - M. le ministre me permet-il de-lui adresser une question?

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Volontiers !

M. Le Hon. - Je voudrais savoir comment il est resté à Rome un conseiller dé légation de Hanovre et d'autres agents dé légations étrangères, si, comme M. le ministre, l'affirme, tout le personnel des missions diplomatiques s'était rendu en masse à Gaète; car enfin, si un conseiller de légation de Hanovre est resté à Rome, cela prouve que le chef de cette mission a jugé régulier et utile qu'il en fût ainsi.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je ferai remarquer d'abord qu'il ne s'agit pas du prince de Ligne qui ne s'est jamais rendu à Rome; il s'est rendu directement à Gaète où se trouvait déjà le saint-père quand le prince est arrivé en Italie. Il ne s'agit élans la question qui nous occupe, que du secrétaire de légation qui remplissait les fonctions de chef de mission, qui n'avait point d'attaché et qui a quitté Rome, comme l'ont fait les agents des principales puissances. Fallait-il qu'il restât à Rome, lorsqu'il représentait à lui seul toute la légation? Il avait reçu instruction de suivre l'exemple des principales puissances de l'Europe; c'est ce qu'il a fait. Le Hanovre, à la vérité, a laissé à Rome un conseiller de légation; mais nous lui avions donné pour instruction de suivre l'exemple, non du Hanovre, mais de la France principalement.

Il y avait en outre un consul belge à Rome. Ainsi nous avions non seulement un conseiller d'une légation étrangère que le chef de la mission belge avait chargé de le suppléer, mais un consul.

Dans tous les cas je le répète, la lacune que l'on signale sera bientôt complètement comblée; des ordres en ce sens sont partis depuis 15 jours ; mais, dans l'état actuel de l'Italie, les relations sont difficiles; les correspondances sont en retard.

L'honorable comte Le Hon a cité ce qui s'est passé à Vienne. Il est vrai qu'à l'époque des troubles qui ont éclaté dans cette ville, l'empereur a quitté cette capitale et s'est rendu à Olmutz; mais il n'avait pas demandé au corps diplomatique de l'y suivre; il avait même demandé qu'il ne l'y suivît pas. Il n'y a donc pas là d'exemple que l'on puisse invoquer.

Je crois, du reste, avoir adopté la seule ligne de conduite admissible en donnant pour instructions au prince de Ligne et à M. de Meester de suivre l'exemple des grandes puissances accréditées à Rome; car de si loin le gouvernement n'étant pas à même d'apprécier à l'avance les événements qui peuvent surgir impunément ne peut donner aux agents diplomatiques que des instructions générales.

M. Osy. - Je voulais parler dans le même sens que l'honorable M. Le Hon.

Je crois que dans les pays où il y a des troubles, où il y a la guerre, si le chef de mission s'absente, il faut au moins qu'il reste quelqu'un. Ainsi quand il y a la guerre entre le Danemark et Hambourg comment se fait-il que nous n'ayons pas là d'agent diplomatique? L'ancien agent est (page 1488) de retour depuis un mois ; son remplaçant n’est pas encore parti ; il aurait dû arriver à son poste le jour où son prédécesseur l’a quitté. Je crois que lorsque l’Ems et le Weser sont bloqués, nous avons intérêt à avoir un agent à Hambourg. Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères si nous pouvons espérer qu’il en sera bientôt ainsi.

MaedH. - Notre chargé d'affaires pour Hambourg et le Danemark est sur son départ; au premier jour il quittera Bruxelles.

En ce moment nous avons un consul à Hambourg; il est à même de nous informer de tous les incidents qui pourront se présenter dans cette ville commerciale.

- M. de Perceval renonce à la parole.

- L'article 11 est adopté.

Articles 12 à 18

« Art. 12. Danemark, Suède et Hambourg : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 13. Espagne : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 14. Portugal : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 15. Turquie : fr. 27,000. »

- Adopté.


« Art. 16. Etats-Unis : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Art. 17 : Brésil : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Att. 18. Mexique : fr. 18,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Consulats

Article 19

« Art. 19. Traitements des agents consulaires, et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 49,000. »

Chapitre IV. Frais de voyage

Article 20

« Art. 20. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »

- Adopté.

Chapitre V. Frais à rembourser aux agents du service extérieur

Articles 21 et 22

« Art. 21. Indemnités pour un drogman, sept cavasses, employés dans diverses résidences, en Orient, et pour un capou-oglan : fr. 5,700. »

- Adopté.


« Art. 22. Frais divers : fr. 74,300. »

- Adopté.

Chapitre VI. Missions extraordinaires, traitements d’inactivité et dépenses imprévuesArticles 23 et 24

« Art. 23. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Art. 24. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 4,000. »

- Adopté.

Chapitre VII. Commerce, navigation, pêche

Articles 25 à 33

« Art. 25. Ecoles de navigation. Personnel : fr. 11,720. »

- Adopté.


« Art. 26. Id. Frais divers : fr. 7,280. »

- Adopté.


« Art. 27. Chambres de commerce : fr. 12,000. »

- Adopté.


« Art. 28. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 19,900. »

- Adopté.


« Art. 29. Encouragements pour la navigation à vapeur entre les ports belges et ceux d'Europe, ainsi que pour la navigation à voiles, sans que, dans l'un ou l'autre cas, les engagements puissent obliger l'Etat au-delà du crédit alloué pour l’exercice 1850, et sans que les crédits puissent excéder 40,000 fr. par service, sauf pour le service au-delà du cap Horn. Personnel : fr. 1,450. »

- Adopté.


« Art. 30. Id. Frais divers : fr. 113,550. »

- Adopté.


« Art. 31. Primes pour construction de navires : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 32. Pêche maritime. Personnel : fr. 7,750. »

- Adopté.


« Art. 33. Pêche maritime. Primes : fr. 92,250. »

- Adopté.

Chapitre VIII. Marine

Article 34

« Art. 34. Pilotage. Personnel : fr. 169,410. »

M. Osy. - Messieurs, à l'occasion de l'article pilotage, j'aurai à demander un renseignement à M. le ministre des affaires étrangères.

Je vois qu'à l'article 40 le gouvernement demande 22,000 francs pour construire un bateau-pilote. Je ne m'oppose pas à cette dépense. Il est très utile que le pilotage ait des navires convenables. Mais je demanderai à M. le ministre si le navire qui sert, d'après le rapport, de bateau d'inspection aux commissaires permanents pour la navigation de l'Escaut, ne pourrait pas être employé comme navire-pilote. Aujourd'hui nous avons des départs journaliers pour Flessingue et l'Angleterre. Quand nous avons un commissaire à envoyer à Flessingue, il peut s'y rendre en bateau à vapeur. De cette manière le navire que nous possédons maintenant et qui a coûté beaucoup d'argent, pourrait être employé comme bateau-pilote et ferait une économie pour l'Etat.

J'ai vu à regret dans les renseignements qui ont été fournis à la section centrale par le département des affaires étrangères, des expressions qui pourraient être regardées comme offensantes pour plusieurs personnes d'Anvers. On paraît y dire que les capitaines belges et que les courtiers de navires font tout en faveur de la Hollande, contrairement aux intérêts de la Belgique.

Je sais pertinemment que tous nos courtiers de navires et nos capitaines font tout leur possible pour employer des pilotes belges et qu'ils ne prennent des pilotes hollandais que lorsqu'il leur est impossible de faire autrement. Je ne comprends donc pas qu'on lise dans la note dont je parle, ces mots: « défaut de protection de la part des capitaines belges, dont beaucoup sont loin de donner aucune préférence à leurs compatriotes, et manque de concours de la part des courtiers de navires qui, en général, gardent la neutralité entre les deux administrations alors qu'ils devraient prendre ouvertement parti pour l'administration belge.»

Je vous l'avoue, comme Anversois, j'ai vu avec regret une accusation pareille, Je suis persuadé que cette assertion n'est pas exacte, et j'ai dû la relever dans l'intérêt des personnes qui s'y trouvent attaquées.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, le bateau-pilote dont a parlé l'honorable M. Osy ne sert pas seulement au transport des commissaires, il sert souvent aussi à conduire les pilotes en mer. Il est indispensable qu'il y ait un bateau pour conduire les commissaires, lorsqu'ils font l'inspection qui leur est prescrite par les traités avec la Hollande. Les commissaires néerlandais ont également un bateau à leur disposition.

Il serait difficile de faire transporter les commissaires chargés d'une semblable inspection par un bateau-pilote ordinaire; on a mis à celui dont il s'agit quelques soins de plus. Cela n'empêche pas que lorsqu'il y a nécessité, i! est aussi chargé de conduire en mer les pilotes.

Je crois qu'il serait impossible de le substituer à celui dont je demande la construction, parce que, indépendamment de ce dernier, il est indispensable que pour soutenir une concurrence, qui devient de jour en jour plus redoutable, nous ayons un bateau de plus. C'est ce qui a été clairement expliqué dans une note adressée à la section centrale.

Si les honorables membres de la chambre ont pris connaissance de cette note, ils y auront trouvé exposées les considérations qui m'ont engagé à proposer une allocation extraordinaire.

Quant à l'observation dont a parlé l'honorable M. Osy, je regrette qu'il l'ait trouvée un peu vive. On y parle de la neutralité que garderaient certains capitaines alors qu'ils devraient favoriser les intérêts belges. Je ne vois là rien d'aussi offensant que le prétend l'honorable M. Osy. On ne nomme personne. Je ne crois pas qu'il faille attacher cette importance à une semblable observation.

M. Osy. - Il est facile à M. le ministre des affaires étrangères de dire que les personnes qui se trouvent attaquées dans la note ne doivent pas y attacher d’importance. Il est possible que le gouvernement n'y attache pas d'importance. Mais les personnes contre lesquelles on a lancé une semblable accusation ont intérêt à la voir repousser, d'autant plus que, comme je l’ai dit, les capitaines et les courtiers de navire prennent des pilotes belges aussi souvent que possible.

Quant au bateau employé pour l'inspection les commissaires, si mes renseignements sont exacts, il ne sert nullement à transporter des pilotes. Il sert uniquement à transporter d'une manière très confortable nos commissaires à Flessingue, et comme nous avons tous les jours des bateaux à vapeur qui passent devant cette ville, MM. les commissures pourraient très bien être transportés par ce moyen.

- L'article est mis aux voix et adopté.

Article 35

« Art. 35. Pilotage. Remises à payer aux pilotes : fr. 187,510. »

- Adopté.

Article 36

« Art. 36. Passage d'eau. Personnel : fr. 11,850. »

Articles 37 et 38

(page 1489) « Art. 37. Police maritime. Personnel : fr. 26,000. »

- Adopté.


« Art. 38. Police maritime. Primes d'arrestation aux agents et vacations aux experts chargés de la surveillance de l'embarquement des émigrants : fr. 2,800. »

- Adopté.

Article 39

« Art. 39. Sauvetage. Personnel : fr. 14,300. »

- Adopté.

Article 40

« Art. 40. Paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres, pour le transport des lettres. Personnel de la marine de l'Etat employé à ce service, et mécaniciens : fr. 82,236. »

M. Delfosse. - Messieurs, je regrette que M. le ministre des affaires étrangères n'ait pas déposé, avant la discussion du budget de 1850, le rapport qu'il nous avait promis sur les résultats de l'entreprise des paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres. M. le ministre a annoncé à la section centrale qu'il déposerait incessamment ce rapport, mais alors même qu'il le déposerait dans quelques jours, ce sera comme s'il le déposait l'année prochaine. Le rapport ne pourra servir que pour la discussion du budget de 1851 ; le dépôt, fait même dans quelques jours, sera tardif.

Je ne veux pas reproduire en ce moment les observations que j'ai présentées contre l'entreprise des paquebots à vapeur, faite pour compte de l'Etat, dans la discussion du budget de 1849 ; mais je persiste à croire que l'entreprise est onéreuse pour l’Etat et qu'il ferait bien de la céder soit à une compagnie soit à des particuliers. Si je suis bien informé, une compagnie anglaise a offert de se charger de l'entreprise à des conditions avantageuses; entre autres elle transporterait les dépêches gratis. J'appelle toute l'attention du gouvernement sur ce point.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Je regrette aussi, messieurs, que le rapport dont a parlé l'honorable M. Delfosse n'ait pas pu être présente avant la discussion du budget. Il me manque encore quelques renseignements. Du reste, je suis dans les termes de l'engagement que j'ai pris ; le rapport devait être présenté avant le 1er juillet, il le sera; j'avoue qu'il eût été préférable qu'il fut déposé avant la discussion du budget de 1850, et je l'eusse désiré tout le premier: car ce rapport exercera, je pense, une très grande influence sur l'opinion des membres de la chambre et même, je l'espère, sur l'opinion de l'honorable M. Delfosse. L'honorable M. Delfosse y trouvera la preuve que le service d'Ostende à Douvres est avantageux à l'Etat. C'est une discussion que je suis prêt à soutenir, mais je crois qu'il vaut mieux l'ajourner jusqu'au moment où nous nous occuperons du prochain budget. D'ailleurs aujourd'hui l'expérience n'est pas encore complète et pour le démontrer il me suffira de faire observer que la loi qui a créé le service, qui a ordonné l'acquisition de trois bateaux à vapeur, que cette loi qui est du 9 juillet 1845 n'a été mise complètement à exécution que depuis le mois d'avril de l'année dernière. Il n'y a qu'une année que nous avons trois bateaux à vapeur. Le service a donc commencé à fonctionner dans des circonstances extrêmement défavorables, lorsque les transports étaient réduits sur toutes les voies de communication. Nous en avons la preuve pour les chemins de fer. Or, on ne peut pas apprécier un service de cette importance d'après l'expérience d'une seule année, surtout lorsque cette année a été si défavorable. Cependant j'espère que les faits qui seront communiqués à la chambre exerceront, sans aucun doute, une grande influence sur sa détermination.

Je n'entrerai pas dans de plus longs développements. Je crois, je le répète, que nous pourrons beaucoup mieux examiner cette question l'année prochaine; alors l'expérience sera plus complète, les faits viendront donner une démonstration nouvelle de l'utilité de l'entreprise, et la chambre sera beaucoup plus à même d'apprécier cette question.

Je désire, quant à moi, que si jamais on pouvait se déterminer à la suppression d'un pareil service, ce ne fût qu'après de mûres délibérations, après en avoir apprécié tous les avantages, non seulement au point de vue des recettes directes, mais aussi au point de vue des avantages indirects, extrêmement nombreux, qui en résultent, par exemple, pour le chemin de fer et pour la poste, et nos relations commerciales avec l'Angleterre.

J'ai reçu, il est vrai, depuis deux jours une lettre qui m'annonce qu'une société anglaise est disposée à établir un service entre Ostende et Douvres; je n'ai pas encore pu examiner ce qu'il y a de sérieux dans cette proposition, mais il serait fort étrange que ce service fût avantageux pour une société, et qu'il fût extrêmement onéreux pour l'Etat, qui ne paye pas de droits de pilotage et qui doit tenir compte des avantages que le service procure au chemin de fer, à la poste et à nos relations commerciales avec l'Angleterre, relations si importantes et qui grandissent chaque jour.

Vous savez, messieurs, que l'on transporte maintenant en Angleterre une masse de produits agricoles, ce qui est un très grand avantage pour les Flandres. Eh bien ! les rapports journaliers qui s'établissent par notre service de bateaux à vapeur y contribuent puissamment. Je ne comprends pas, messieurs, que si, en présence de tous ces avantages indirects, le service était onéreux pour l'Etat, une société pût s'en charger.

Si une société s'en chargeait, elle l'abandonnerait peut-être au bout d'une année, vous n'auriez pas la moindre garantie à cet égard. Une société a déjà exploité un semblable service, mais elle a abandonné l'exploitation.

Je suis d'accord avec l'honorable M. Delfosse, que si l'on n'avait en vue que les résultats directs de l'entreprise, la balance entre les recettes et les dépenses, ce serait une mauvaise affaire; mais il faut tenir compte des avantages et des revenus indirects, de la facilité donnée à nos relations avec l’Angleterre. Nous avons maintenant un départ et une arrivée chaque jour, tandis qu'auparavant nous n'en avions que quatre par semaine. Il y a là un grand avantage que l'honorable M. Delfosse, avec son esprit si juste et si loyal, ne méconnaîtra pas.

M. Delfosse. - M. le ministre des affaires étrangères aurait pu se dispenser de présenter des considérations en faveur du service des paquebots, exploité pour compte de l'Etat. Il aurait pu se dispenser de dire qu’il est prêt à aborder la discussion, la discussion n'est pas possible en ce moment, puisque nous n'avons pas les pièces nécessaires pour qu'elle puisse amener des résultats sérieux.

M. le ministre des affaires étrangères nous dit qu'il n'a pas violé sa promesse, que le rapport ne doit être déposé qu'avant le 1er juillet. M. le ministre s'est tenu en effet à la lettre de sa promesse, mais il ne faut pas voir la lettre, il faut voir l'esprit : pourquoi a-t-on demandé un rapport? Pour qu'on pût apprécier, avant la discussion du budget de 1850, l'utilité ou l'inutilité de l'entreprise; voilà pourquoi le rapport a été demandé. Il est complètement inutile que le rapport soit déposé avant le 1er juillet, s'il ne doit servir que pour la discussion du budget de 1851 ; il suffira de le déposer au 1er janvier 1850.

M. le ministre des affaires étrangères demande comment il serait possible à une compagnie qui aurait des frais de pilotage à payer, de trouver plus d'avantages que l'Etat dans cette entreprise. Messieurs, la raison en est toute simple, c'est que l'Etat et ses employés n'ont pas le même intérêt qu'un particulier au succès d'une entreprise, c'est qu'ils ne sont pas stimulés par l'intérêt privé. M. le ministre des affaires étrangères connaît cette raison aussi bien que moi et je suis étonné qu'il la perde de vue en ce moment.

M. le ministre des affaires étrangères a très beau jeu lorsqu'il cherche à démontrer l'utilité du service des paquebots à vapeur; nous n'avons pas les pièces nécessaires pour bien apprécier les faits. (Interruption.) Vous avez donné plusieurs raisons pour démontrer que l'entreprise est bonne. Il nous est impossible de vous réfuter, puisque vous ne nous donnez aucun document.

Vous dites : « Le rapport sera concluant. » C'est possible, surtout si vous l'avez demandé à des employés qui profitent, qui vivent de l'entreprise. Nous examinerons ce rapport ; mais pour que nous puissions l'examiner, il faut qu'il soit déposé; en attendant ne dites pas que nous avons tort, ne cherchez pas à prouver que l'entreprise est bonne; abstenez-vous.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, j'ai exprimé mon opinion d'une manière générale, comme l'honorable M. Delfosse a exprimé la sienne; il croit l'entreprise mauvaise, moi je la crois bonne; je devais nécessairement exprimer cette opinion, car si le gouvernement avait gardé le silence, il aurait eu l'air d'adhérer à l'opinion de l'honorable M. Delfosse.

Quant à l'inconvénient qui résulte de ce que le rapport n'est pas encore présenté, je ferai remarquer que le vote que vous allez émettre ne résout pas définitivement la question. Si la chambre reconnaissait qu'il y a lieu de supprimer ce service, il serait encore temps de le faire avant le 1er janvier 1850; il suffirait de présenter une proposition dans ce sens ; c'est par un projet de loi qu'on a créé ce service; c'est par un projet de loi qu'il faut le démolir, si on le juge nécessaire.

- La discussion est close.

L'article 40 est adopté.

Article 41 (paquebots à vapeur entre Ostende et Douvres, pour le transport des lettres)

Article 41

« Art. 41. Traitement des courriers et agents : fr. 14,3000. »

- Adopté.

Articles 42 à 46. Bâtiments de l'Etat. Brick Duc de Brabant (désarmé). Canonnières n°5 et 11 (désarmées)

« Art. 42. Personnel : fr. 113,588 34. »

- Adopté.


« Art. 43. Vivres : fr. 54,385. »

- Adopté.


« Art. 44. Pensions : fr. 15,500. »

- Adopté.


« Art. 45. Magasin : fr. 2,000. »

- Adopté.


« Art. 46. Matériel des divers services.

« Charges ordinaires : fr. 319,300.

« Charges extraordinaires : fr. 22,600. »

- Adopté.

Vote de l'article unique et sur l’ensemble du projet

« Article unique. Le budget du ministère des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1850, à la somme de deux millions cent trois mille huit cent soixante-et-dix-neuf francs trente-quatre centimes (fr. 2,103,879 54), conformément au tableau ci-annexé.

- Adopté.

(page 1490) On passe à l'appel nominal sur l'ensemble du budget des affaires étrangères

Le budget est adopté à l'unanimité des 73 membres présents.

Il sera transmis au sénat.

Ont adopté: MM. Frère-Orban, Dumon (Auguste), Jacques, Jouret, Jullien, Julliot, Lange, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Mandais, Mascart, Mercier, Moreau, Moxhon, Osy, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Rolin, Rousselle, Schumacher, Tesch, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Toussaint, Dequesne, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Brande de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Vermeire, Veydt, Allard, Ansiau, Anspach, Boulez, Bruneau, Christiaens, Coomans, Cumont, Dautrebande, David, de Baillet (Hyacinthe), de Breyne, de Decker, Delehaye, Delescluze, Delfosse, d'Elhoungne, de Liedekerke, Deliége, de Luesemans, de Man d'Attenrode, de Mérode, de Perceval, De Pouhon, de Renesse, de Royer, Desoer, de Theux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dolez et Verhaegen.

Projet de loi portant le budget du ministère des finances de l’exercice 1850

Discussion générale

M. Moxhon. - Messieurs, je me permettrai une interpellation à M. le ministre des finances. Chacun sait que les ouvriers, les petites fortunes, les petits capitaux qui cherchent un emploi, se sont abondamment portés vers la Caisse d'épargne, patronnée de fait par la Banque de Belgique. Or, aujourd'hui la Caisse d'épargne ne rembourse qu'en 2 1 /2 p. c., c'est-à-dire que celui qui a déposé 100 fr. ne reçoit qu'une valeur actuelle de 62 fr. On sait aussi que, par une habile tactique financière, la Banque de Belgique a eu soin de donner une organisation particulière à la Caisse d'épargne, et par là elle ne se reconnaît avoir d'autre mission que celle de manier les fonds de cette caisse.

Je crois que le gouvernement, qui est venu largement au secours de la Banque de Belgique, peut et doit veiller aux intérêts des malheureux et à ce que les petites fortunes ne soient pas compromises davantage.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La caisse d'épargne annexée à la banque de Belgique est une institution indépendante de la banque; elle est régie par une commission spéciale et les dépôts sont réglés par des conventions particulières. L'une des conventions résultant des statuts porte que dans certaines éventualités la caisse d'épargne peut restituer aux déposants des fonds publics, parce que cette caisse opère l'achat de ces fonds au profit des déposants et non au profit de la banque de Belgique, celle-ci n'en tire aucun avantage, mais elle ne veut pas en subir les inconvénients, elle ne veut pas supporter les pertes qui peuvent en résulter.

Les déposants ont accepté ces conditions; au milieu de la crise elles leur ont été opposées. La banque ne pouvait pas supporter la perte notable qui résultait de la baisse des fonds. Des démarches ont été faites auprès du gouvernement pour qu'il intervint, mais son intervention ne pouvait avoir lieu qu'à la condition de se charger de la perte résultant de la différence entre le pair et le cours du jour. Le gouvernement n'avait pas de valeurs à sa disposition, et en eût-il eu qu'il aurait pu les employer mieux qu'à combler cette différence.

Il en est résulté des souffrances pour les déposants, car à un moment donné les fonds n'ont pas pu être réalisés ; mais la différence entre le cours et le pair va tous les jours s'affaiblissant, et on peut espérer qu'à une époque peu éloignée, les déposants pourront recouvrer sans préjudice les fonds déposés. Je ne pense pas que personne veuille convier le gouvernement à intervenir pour rembourser intégralement les dépôts.

M. Anspach. - J'avais demandé la parole parce que, appartenant à la Banque de Belgique, j'aurais pu éclairer la chambre sur la situation de la caisse d'épargne vis-à-vis de la banque; mais M. le ministre des finances ayant donné les explications que je me proposais de présenter, je ne pourrais que répéter ce qu'il a dit.

M. Coomans. - Cependant, messieurs, il reste quelque chose de l'observation de l'honorable M. Moxhon. Si la banque de Belgique était une institution privée, si elle agissait avec ses propres ressources et non avec celles de l'Etat, nous n'aurions pas à intervenir dans ses affaires; mais la banque de Belgique a reçu de grands avantages de l'Etat, et en compensation de ces avantages, elle aurait pu s'abstenir d'user rigoureusement de son droit à l'égard de la caisse d'épargne qu'elle patronne.

Ensuite je remarque qu'il y a deux poids et deux mesures , non dans la conduite du gouvernement, mais dans celle de la législature vis-à-vis des déposants des caisses d'épargne; l'Etat a remboursé les déposants de la Société Générale, il a cru que l'épargne était une vertu sociale qu'il fallait populariser. C'est très bien, mais en indemnisant les créanciers de la Société Générale, on aurait dû en faire autant pour ceux de la banque de Belgique. La disposition exceptionnelle qu'invoque la banque pour ajourner les payements, était ignorée de la plupart des déposants, surtout des petits.

M. Anspach. - C'est imprimé en tête de chaque livret.

M. Coomans. - C'est vrai, vous et moi savions cela, sans croire toutefois que cette disposition dût jamais être appliquée; mais beaucoup de déposants ne savent pas lire. (Interruption.) Messieurs, cela leur fait honneur d'avoir eu confiance dans des livrets qu'ils ne savaient pas déchiffrer. Au fond ils pensaient avoir affaire au gouvernement. J'ai vu chez moi de pauvres ouvriers des faubourgs venant le plaindre vivement d'avoir été trompés...

Ils se trompaient eux-mêmes, sans doute; je leur ai prouvé que la banque était dans son strict droit. Il n'en est pas moins vrai que ces gens étaient gênés, et que, selon moi, leurs réclamations sont fondées. On leur a répondu qu'ils ne seraient remboursés que quand les fonds publics seraient remontés au pair.

Est-ce leur faute si les fonds publics sont en baisse ? Faut-il les punir d'avoir en plus de confiance dans la solvabilité du gouvernement que dans celle de la Société Générale?

Est-il juste de rembourser jusqu'au dernier sou les créanciers de la Société Générale, alors que l'Etat abandonne ses propres créanciers, en quelque sorte, c'est-à-dire ceux qui ont échangé leur argent contre des fonds belges? Les déposants à la banque de Belgique auraient dû, ce me semble, être remboursés avant les déposants de l'autre banque.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je dois faire observer que la position des déposants n'était pas la même vis-à-vis de la Société Générale que vis-à-vis de la banque de Belgique ; là aucune condition n'était imposée, on n'avait pas eu la précaution de stipuler, comme à la banque de Belgique, que les dépôts seraient convertis en fonds publics et remboursables en fonds publics; on s'était engagé, au contraire, à opérer dans les délais ordinaires le remboursement intégral des fonds déposés. C'était une raison bien forte pour expliquer l'intervention de l'Etat. Si on avait pu opposer aux déposants de la Société Générale une stipulation comme celle que contenaient les statuts de la Caisse d'épargne de la Banque de Belgique, bien qu'on ait dit, ce que je ne veux pas examiner, qu'elle avait pu être ignorée d'un grand nombre de déposants, l'intervention de l'Etat n'aurait pas eu lieu, elle n'aurait pas été consentie, on aurait formellement opposé la stipulation aux déposants.

On fait valoir que la Banque de Belgique a reçu de l'Etat des avantages en retour desquels elle aurait pu faire des sacrifices en faveur de la caisse d'épargne. A cet égard il faut s'entendre. Au 24 février, les dépôts à la caisse d'épargne s'élevaient à 3 millions environ. Au moment où les sommes étaient réclamées le plus vivement, les fonds étaient à 50; c'était 1,500 mille francs de perte qu'elle aurait dû subir. A quel titre ? De droit elle n'y était évidemment pas tenue. En équité? Comment la banque de Belgique qui ne profite pas des fonds déposés à la caisse d'épargne qu'elle administre , à la différence de la Société Générale, qui emploie ces sortes de fonds à ses affaires ; comment, la Banque de Belgique qui se charge bénévolement de la gestion de la caisse d'épargne dans l'intérêt des déposants, qui achète pour eux, à leur profit, des fonds publics ; comment, la Banque aurait-elle pu équitablement être tenue à subir les conséquences des événements qui affectaient les fonds publics? L'équité ne la condamnait point, certes, à ne pas invoquer contre les réclamants les conditions du dépôt, Mais, dit-on, un sacrifice de la part de la Banque n'eût été qu'une compensation des avantages qui lui ont été faits par l'Etat. Quels étaient ces avantages? Ils ont consisté à donner cours forcé aux billets de la Banque de Belgique comme à ceux de la Société Générale.

Pour quelle somme lui a-t-on accordé le bénéfice du cours forcé? Pour une dizaine de millions; il aurait fallu lui dire : Sur ces 10 millions, vous allez prélever 1,500,000 fr. La banque aurait répondu que vous lui faisiez un cadeau extrêmement onéreux, car il lui aurait fallu longtemps pour trouver ces 1,500,000 fr. sur l'emploi des 10 millions de billets ayant cours forcé.

M. Coomans. - Si la Banque de Belgique n'avait pas obtenu pour ses billets le cours forcé elle n'aurait probablement pas pu résister. (Du tout !)

M. Anspach. - Je demande la parole.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable membre est ici complètement dans l'erreur. J'insiste là-dessus. A l'époque où l'intervention législative a eu lieu en faveur des banques, la banque de Belgique pouvait absolument se passer du secours de l'Etat.

Je ne prétends pas qu'à toute heure, depuis le 24 février, jusqu'au jour de l'intervention législative, la banque de Belgique n'ait pas eu besoin de l'intervention du gouvernement; mais au moment de l'intervention législative elle pouvait se passer de l'aide de l'Etat.

Le cours forcé a été donné aux billets de la Banque de Belgique parce qu'il était impossible de ne pas le faire du moment que vous aviez donné cours forcé aux billets de la Société Générale. Vous concevez que sans cela la Banque de Belgique, obligée de recevoir les billets de la Société Générale, et ne pouvant contraindre à recevoir les siens, ne pouvait plus se livrer à ses opérations. Or, l'intérêt public exigeait que la Banque de Belgique pût continuer d'une manière active ses opérations.

Je tenais à rectifier l'erreur de l'honorable préopinant qui m'explique pourquoi il aurait voulu que la Banque de Belgique vint en aide à la caisse d'épargne qu'elle ne fait qu'administrer et qu'elle administre même, je pense, gratuitement.

La Banque de Belgique s'est adressée plusieurs fois au gouvernement qui lui a répondu : Vous avez un intérêt moral à faire quelque chose pour la caisse d'épargne, parce que dans le public on ne sait pas bien exactement quelle est votre situation vis-à-vis de la caisse d'épargne. Bien que ce soit un acte purement volontaire auquel vous ne pouvez être contraint sous aucune espèce de raison, faites quelque chose pour les déposants qui sont le plus dans le besoin. Lorsqu’il y a nécessité pour les déposants de retirer leurs dépôts, faites un sacrifice. Je pense que la Banque de Belgique l'a fait.

(page 1491) M. Anspach. - Elle l'a fait; elle le fait tous les jours.

M. Coomans. - Pas tous les jours.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous demandez à la Banque de Belgique un acte de pure générosité; elle le fait. Vous ne pouvez rien exiger ni en droit ni en équité, je l'ai démontré. Que pouvez-vous demander de plus que ce qu'elle a fait?

M. Moxhon. - M. le ministre a dit que la Banque de Belgique faisait des opérations de bourse avec les fonds des déposants. C'est précisément là qu'est le danger. Si la Banque de Belgique a pu faire des opérations, elle a dû réaliser des bénéfices énormes, puisque le 2 1/2 p. c. est tombé à 24 fr. après les événements de février.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable préopinant n'a pas compris l'opération à laquelle se livre la Banque de Belgique pour la Caisse d'épargne. Celui qui fait un dépôt à cette Caisse d'épargne fait, à proprement parler, un achat de fonds publics, puisque les fonds qu'il dépose sont employés, suivant les conventions, à l'achat de fonds publics. Si les fonds sont achetés à des cours favorables, si par toute autre cause des bénéfices résultent des opérations, ces bénéfices profitent aux déposants. Tout cela est en dehors des opérations de la Banque de Belgique; les titres appartiennent à la Caisse d'épargne. La Banque de Belgique ne profite en aucune manière des opérations faites pour le compte de la Caisse d'épargne.

M. Anspach. - Je tiens à expliquer l'erreur dans laquelle a versé M. Moxhon. Il a l'air de croire qu'on spécule avec l'argent déposé à la caisse d'épargne; mais cet argent, dès qu'il s'élève à 5,000 fr., est employé à l'achat de fonds publics. Ces fonds sont achetés pour le compte du déposant. Ils n'entrent pas dans la caisse de la Banque de Belgique ; elle n'a pas à spéculer sur ces fonds. L'honorable M. Moxhon est dans l'erreur lorsqu'il dit qu'on spécule avec les fonds des déposants. Ces fonds, comme on vient de le dire, sont entièrement employés à l'achat de fonds publics.

Quoi qu'en dise l'honorable M. Coomans, la Banque de Belgique a montré une générosité sans égale; tous les petits déposants ont été remboursés. Il y en a d'autres qui avaient fait des versements un peu plus considérables et à qui on a prêté la moitié ou les trois quarts sur le dépôt de leurs livrets. La Banque de Belgique a fait cent fois plus qu'elle ne devait faire, puisqu'elle n'était obligée à rien.

M. De Pouhon. - Je crois devoir saisir cette occasion de faire remarquer la différence de traitement qu'ont subi les déposants aux caisses d'épargne de la Société Générale et de la Banque de Belgique. Les fonds déposés à la première reposaient sur un actif industriel irréalisable, tandis que ceux placés à la seconde avaient des fonds nationaux pour garantie. Si l'Etat devait intervenir pour assurer le remboursement des dépôts, ce devrait être d'abord au profit de la caisse d'épargne de la Banque de Belgique qui s'était fait l'intermédiaire entre les déposants et l'Etat. Le crédit public le commandait. C'est le contraire qui a été fait. Les déposants qui avaient l'Etat pour débiteur ont dû subir une perte de 50 p. c., tandis que ceux qui avaient confié leur pécule à un établissement privé, ont été remboursés intégralement par l'intervention de l'Etat.

Il me semble que le gouvernement aurait dû intervenir pour faire rembourser les artisans, les ouvriers, les domestiques qui n'avaient pu apprécier les conditions des statuts de la caisse d'épargne de la Banque de Belgique. Il aurait fait ainsi une chose très utile au point de vue du crédit public, de l'opinion qu'il y a intérêt à répandre que les placements en fonds de l'Etat sont les plus solides.

M. Mercier. - Aux explications données par M. le ministre des finances j'ajouterai que les fonds sont déposés dans un coffre dont un agent de l'administration des finances a la clef ; de manière qu'aucune spéculation n'est possible avec ces fonds.

M. de Mérode. - Je pense qu'il ne faut pas entretenir ces déposants dans l'idée que, quoi qu'il arrive, quels que soient les événements, les fonds placés seront immédiatement remboursés à tout le monde.

La Banque de Belgique a établi un principe parfaitement raisonnable, c'est qu'elle ne rembourserait les dépôts qu'au taux des fonds publics et qu'elle ne se chargeait pas de l'impossible.

Quant à faire intervenir le gouvernement dans tous ces arrangements entre les caisses d'épargne et les particuliers, c'est vouloir l'impossible, car le gouvernement est très embarrassé pour subvenir à toutes les nécessités de l'Etat, et par conséquent il ne pourrait se mêler des affaires privées.

Il me semble qu'il ne faut pas demander aux caisses d'épargne plus que ce qu'on peut raisonnablement réclamer d'elles et que la banque de Belgique a fait tout ce qu'on pouvait désirer dans les circonstances où nous nous sommes trouvés.

M. De Pouhon. - Le gouvernement aurait bien fait de s'abstenir envers une caisse d'épargne, s'il n'était pas intervenu au profit d'une autre. S'il avait des raisons pour intervenir en faveur d'une caisse d'épargne dont les fonds étaient confiés à une société particulière, il avait bien plus de motifs pour faire quelque chose en faveur des pauvres déposants, des ouvriers, des domestiques qui avaient placé leur argent sur des fonds de l'Etat. Il résulte de ce qui s'est passé, que ceux qui ont placé leur argent sur la dette nationale ont perdu jusqu'à 50 p. c. lorsqu'ils ne pouvaient attendre, tandis que ceux qui ont prêté à une société qui ne présentait que des actions industrielles en garantie, ont été indemnisés intégralement et cela avec le concours de l'Etat.

Dans une caisse, il y avait 20 millions de déposés; dans l'autre, c*était 5 millions, et avec 100,000 à 200,000 fr. on aurait pu rembourser les petits déposants.

M. de Theux. - L'honorable M. De Pouhon a raison de réclamer de la justice distributive à l'égard des deux caisses d'épargne. Je crois cependant que la chambre et le gouvernement ne se sont pas écartés, dans cette circonstance, des règles de la justice distributive, et voici comment :

On était certain que la Société Générale avait des ressources suffisantes pour payer en définitive tous les déposants à la caisse d'épargne. Seulement le gouvernement a ajouté sa garantie à celle de la Société Générale, de manière que les déposants ont pu être remboursés. Mais l'Etat n'éprouvera pas de perte du chef de la garantie qu'il a prêtée; tandis que si le gouvernement avait suppléé aux pertes que les déposants à la caisse d'épargne de Belgique ont subies par suite de la baisse des fonds publics, cette perte aurait été réelle, aurait été irrécupérable; et alors il y aurait eu inégalité de traitement ; puisque dans ce dernier cas le gouvernement aurait fait un sacrifice en écus et qu'à l'égard de la Société Générale il ne faisait qu'un sacrifice en promesses, sans s'exposer réellement à des pertes.

Toutefois, ce qui vient de se passer mérite attention. Je pense que cette institution de la banque de Belgique a été un grand avantage en attirant certains placements en fonds publics. Mais il y a un inconvénient qui se révèle dans la pratique, c'est à l’égard des petits déposants qui instantanément peuvent avoir besoin de retirer leurs capitaux. Ce sera une circonstance que l'administration devra prendre en considération pour l'avenir. Elle aura à voir si l'on ne pourrait pas éviter cet inconvénient, soit en n'acceptant pas des dépôts trop petits, soit en créant un fonds de réserve au moyen des bénéfices que l'on fait sur les placements en fonds publics. Mais pour le passé il n'y a rien à faire ; on ne peut rien réclamer de la banque de Belgique.

M. Toussaint. - Dans le sens des observations que vient de faire l'honorable M. de Theux, je ferai remarquer que déjà, dans l'institution de la caisse d'épargne de la banque de Belgique, il y a une réserve de bénéfices au profit des déposants qui ne retirent pas leurs fonds pendant un certain nombre d'années. Il y aurait là, selon moi, un germe pour créer un fonds de réserve à l'effet de venir au secours des petits déposants dans les moments de crise.

Je tenais à rappeler ce fait pour un autre motif; c'est qu'il prouve à toute évidence que les placements ont réellement lieu pour les déposants, puisque les bénéfices sont réservés pour une certaine classe d'entre eux.

Je me réunis aux honorables préopinants pour appeler l'attention du gouvernement sur cette question. Si le gouvernement trouvait que les conditions actuelles de la caisse d'épargne ne répondent pas à leur objet, il lui appartiendrait, par l'action qu'il exerce sur la banque de Belgique, de provoquer, pour l'avenir, des modifications aux statuts. C'est dans ce sens que j'espère que la discussion actuelle aura des résultats utiles.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La discussion qui vient d'avoir lieu n'aura certainement pas pour résultat d'amener le gouvernement à provoquer une modification dans les statuts de la caisse d'épargne de la Banque de Belgique.

La question relative aux caisses d'épargne est une question extrêmement difficile et presque insoluble. Le problème est celui-ci : rendre des fonds productifs et les tenir constamment disponibles. Comment voulez-vous qu'on arrive à un pareil résultat?

Il est incontestable que, quel que soit le mode que vous adoptiez, dans une circonstance donnée, dans les grandes crises, il sera impossible de faire face aux engagements. On ne peut recourir qu'au moyen employé par la Banque de Belgique. Elle transforme en fonds publics les fonds déposés par la caisse d'épargne, et, à un moment donné, elle offre des fonds publics à ceux qui réclament les dépôts qu'ils ont effectués.

Comment voulez-vous que l'on fasse autrement ? Quelle est la combinaison à l'aide de laquelle vous voudriez qu'une caisse d'épargne quelconque, administrée soit par une société, soit par une banque, soit par l'Etat, pût avoir constamment des fonds à sa disposition pour faire face aux remboursements demandés, c'est-à-dire au remboursement de la totalité des dépôts, et que ces fonds fussent en même temps productifs d'intérêts? Cela est impossible; vous n'arriverez toujours qu'à une mesure restrictive pour les moments de crise.

Je me suis beaucoup occupé de cette question. Mais je ne provoquerai certainement pas une modification dans les statuts de la caisse d'épargne de la Banque de Belgique. J'en provoquerais plutôt une dans les statuts d'autres sociétés pour amener une disposition de même nature.

M. Toussaint. - Je n'ai pas placé la question sur le terrain où vient de la porter M. le ministre des finances. Je n'ai pas entendu parler de la condition insoluble de garder des fonds disponibles et de les faire fructifier. J'ai parlé des petits déposants et des moments de crise, et j'ai signalé cette disposition particulière des statuts de la caisse d'épargne de la Banque de Belgique, qui réservent les bénéfices faits au-delà d'une certaine quotité, au moyen des actions qui sont achetées. J'ai dit que ces bénéfices pourraient servir à former un fonds de réserve pour rembourser dans certains moments de crises les petits déposants.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Cela n'est pas possible.

M. Toussaint. - Je crois qu'il y a possibilité de déterminer une (page 1492) affectation spéciale à cette différence d’intérêts. Il aurait pu arriver dans le cas présent que la Banque de Belgique n’eût pas été à même de faire les actes de générosité qu’on vous a signalés, ou que les actionnaires s’y fussent opposés. Eh bien, si les bénéfices faits par la différence d’intérêts, au lieu d'être distribués à certains déposants au bout d'une période de cinq ou six années, étaient réservés pour les cas dont nous nous occupons, elle pourrait servir à rembourser les dépôts qui ne dépassent pas un certain chiffre, sans perte ou avec moins de perte qu'aujourd'hui. C'est dans ce sens que j'ai dit qu'il pourrait être utile, non pas de transformer les statuts de la caisse d'épargne annexée à la Banque de Belgique, mais de modifier certains de ces statuts.

M. Coomans. - J'ai une dernière observation à faire en réponse à celle de l'honorable ministre des finances. Il a fait remarquer avec infiniment de raison, qu'il y avait un problème presque insoluble dans les caisses d'épargne, c'était de rendre productifs des fonds qui doivent rester constamment à la disposition du public. Mais ce moyen existe. Vous avez donné cours forcé aux billets de banque. Je ne vois pas pourquoi, dans un moment de crise, pour conserver aux pauvres leur bien, on ne leur rembourserait pas en billets de banque le montant des dépôts qu'ils ont faits à la caisse d'épargne. Ainsi au lieu de donner 10 millions à la caisse de Belgique (car à vrai dire c'est un don, provisoire, il est vrai), on aurait pu donner 5 millions à la caisse d'épargne et 7 millions à la Banque de Belgique. Il n'y aurait pas eu perte pour le gouvernement, et vous n'auriez pas compromis une institution aussi utile que celle des caisses d'épargne.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Le moyen qu'indique l'honorable membre peut toujours être employé ; vous pouvez donner cours forcé à un papier quelconque d'une institution de crédit. Je conviens qu'avec ce moyen on peut payer, à un moment donné, les fonds déposés à la caisse d'épargne.

Naturellement, dans mes objections je n'avais pas tenu compte de ce moyen. Il est tout simple que l'on puisse augmenter le nombre des billets de banque d'une certaine somme pour payer la différence entre le taux actuel des fonds publics et les fonds déposés à la Caisse d'épargne. Mais ce serait une perte pour l'Etat : en ce sens votre objection n'est pas fondée. L'Etat devrait nécessairement payer la différence.

M. Coomans. - Provisoirement!

- La discussion générale est close.

La chambre passe à la discussion sur les articles.

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Administration centrale

Articles 1 à 7

« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Traitement des fonctionnaires, employés et gens de service : fr. 468,050

« Travail extraordinaire, 4,000.

« Ensemble : fr. 472,050. »

- Adopté.


« Art. 3. Frais de tournées : fr. 7,000.’

- Adopté.


« Art. 4. Matériel : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Service de la monnaie ; fr. 17,200.’

- Adopté.


« Art. 6. Magasin général des papiers : fr. 133,500. »

- Adopté.


« Art. 7. Rédaction de documents statistiques : fr. 19,500. »

- Adopté.

Chapitre II. Administration du trésor dans les provinces

Articles 8 et 9

« Art. 8. Traitement des directeurs : fr. 69,000. »

- Adopté.


« Art. 9. Frais de bureau, de commis, de loyer, etc., des directeurs : fr. 17,550. »

- Adopté.

Article 10

« Art. 10. Caissier général de l'État : fr. 250,000. »

M. Veydt. - Messieurs, l'honorable rapporteur de la section centrale a présenté, sur le chapitre II du budget des finances, diverses observations, notamment en ce qui concerne le caissier de l'Etat.

Il n'y a pas longtemps que M. le ministre des finances a déclaré à la chambre qu'il présenterait, en temps opportun, un projet de loi pour l'organisation de ce service. Je sais parfaitement que ce n'est pas le moment d'ouvrir une discussion à ce sujet. Je m'en abstiendrai ; mais puisque c'est encore là une question réservée, il importe que des faits, que je regarde comme inexacts, ne s'accréditent pas par le silence que ceux qui ont connaissance de cette inexactitude auraient gardé. Je me renfermerai, messieurs, dans un très petit nombre de faits. Il peut être utile que vous en ayez aussi connaissance. Ce sont plutôt des renseignements que je viens fournir.

Le service du caissier général doit être organisé de la manière la plus avantageuse et la plus conforme aux intérêts de l'Etat. Je suis persuadé que c'est le point de vue auquel se placera M. le ministre des finances, et je forme des vœux pour que ce but soit atteint.

Voici ce qui concerne les erreurs que je trouve dans le rapport de l'honorable M. T'Kint de Naeyer.

Il exprime l'opinion que la somme de 250,000 fr. portée annuellement au budget pour l'indemnité de la Société Générale, faisant les fonctions de caissier général, a toujours été insuffisante.

J'ai devant moi les chiffres des années 1831 à 1848 inclusivement. Il n'y a que trois années pendant lesquelles la provision de 250,000 fr. n'a point suffi, ce sont les années 1840,1844 et 1848.

La moyenne pour les 18 années a été de fr. 239,023-89.

Je demande à la chambre de pouvoir insérer les chiffres à la suite de ce que j'ai l'honneur de lui dire. Il serait fastidieux d'en entendre la lecture.

Je mettrai en regard les frais des ports de lettres, dont il est rendu compte au département des finances et qui ne sont pas une dépense réelle pour l'Etat; car il rembourse à la Société Générale les sommes qu'elle a payées aux divers bureaux de postes. Il rend d'une main ce qu'il a reçu de l'autre ; si le gouvernement faisait lui-même toutes ses recettes et toutes ses dépenses, il resterait, sous ce rapport, absolument dans la même position. Quant au résultat financier, les ports de lettres ne doivent donc pas être comptés dans le chiffre de la provision annuelle. Il en est autrement du transport des espèces, qui est à la charge de la Société Générale et qui s'élève aussi à des sommes considérables.

(Ce tableau, insérés dans les Annales parlementaires, n’est pas repris dans la présente version numérisée.)

Jamais le service du caissier général n'a été envisagé comme devant être un objet de spéculation, ni une source de bénéfice pour la Société Générale. Elle en a été chargée en 1823, et lorsqu'après les événements de 1830, on cherchait, comme aujourd’hui, à faire des économies partout où elles étaient réalisables, la direction répondit, le 31 mars 1831, à M. le ministre des finances que s'il ne jugeait pas convenable d’acquiescer au taux d'un quart pour cent de commission, le service du caissier général serait continué, moyennant le seul remboursement des frais qu'il occasionnerait et dont un état exact serait mensuellement fourni. La Société Générale se bornait à vouloir être tenue indemne des dépenses de toute nature auxquelles ce service donne lieu. Ces dépenses étant variables d'un trimestre à l'autre, le département (page 1493) des finances se prononça en faveur d'une provision dont il fixa le chiffre à 1/4 p. c. Quelques années plus tard il fut réduit à 1/5, 1/8 et 1/16, suivant les diverses natures de recettes.

Dans un autre passage du rapport de la section centrale il est dit qu'en admettant que l'allocation de 250,000 francs fût normale, elle serait trop élevée, parce que les frais des virements de fonds doivent être compensés par l'emploi du solde en caisse, dans des moments d'abondance.

Ceci tendrait à faire croire qu'il est fait usage des fonds de l'Etat autrement que pour son service spécial. L'honorable ministre des finances actuel, comme tous ses prédécesseurs, savent à quoi s'en tenir à cet égard.

Le solde en caisse du trésor doit être réparti sur vingt-sept points différents du royaume, et cette condition, strictement observée pour faire face à tous les besoins, exige que le solde reste toujours intact et disponible. C'est un véritable dépôt.

Je m'arrête, messieurs ; j'évite tout ce qui touche à la question même et j'attends la présentation du projet de loi.

M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - Je dois faire remarquer à l'honorable préopinant que les observations, contenues dans le rapport, émanent de la section centrale. C'est au nom de la section centrale que le rapporteur s'est exprimé.

M. Veydt. - C'est donc à la section centrale que j'ai répondu.

M. T'Kint de Naeyer. - La plupart des sections ont insisté sur la nécessité d'introduire des réformes dans l'administration du trésor public.

La section centrale n'a rien voulu préjuger, relativement au système qu'il conviendrait d'adopter définitivement pour se conformer au vœu de la loi de comptabilité. Elle a pensé que lorsqu'il s'agissait d'une réorganisation devant laquelle on a reculé depuis un grand nombre d'années, ce n'était pas trop du concours du gouvernement et des spécialités financières du pays.

On ne doit pas, en effet, messieurs, examiner la question uniquement au point de vue administratif. Il y a des considérations d'intérêt général dont il faut tenir compte, et il serait imprudent d'exclure d'une manière absolue une combinaison qui rattacherait le service du caissier de l'Etat à une grande institution de crédit.

Quoi qu'il en soit, et quel que soit le système auquel on s'arrête, nous pensons que le gouvernement doit exercer une action plus directe sur son caissier, et que ce service doit être moins onéreux qu'il ne l'est aujourd'hui.

En supposant que l'organisation actuelle soit provisoirement maintenue, et cela paraît résulter des explications qui ont été données par M. le ministre des finances dans la séance du 25 avril....

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'ai rien dit de semblable.

M. T'Kint de Naeyer. - Dans cette supposition, il n'en est pas moins vrai que des économies peuvent être réalisées. La convention qui a été faite avec la Société Générale a été dénoncée; si le gouvernement juge convenable de prendre de nouveaux engagements, il sera à même d'exiger de la banque des conditions plus équitables.

Messieurs, nous ne pouvons que répéter ce que nous avons eu l'honneur de vous dire dans le rapport de la section centrale : il ne peut pas être question, pour l'établissement qui sera chargé du service du caissier de l'Etat, de faire un bénéfice ; il ne peut être question que d'une indemnité, car il faut bien remarquer que les agents dans les provinces font les affaires de la Banque tout aussi bien que les affaires de l'Etat. L'indemnité doit être fixe et non indéterminée ; car si le chiffre des recettes varie, s'il tend à s'élever d'année en année, ce n'est pas au point d'exercer de l'influence sur les frais d'administration. Que le caissier de l'Etat reçoive 100 millions, qu'il reçoive 110 millions, il ne devra ni plus ni moins payer ses agents, et les frais de bureau seront les mêmes. Serait-il juste, d'ailleurs, que l'Etat supportât seul les frais des agences ? Nous payons annuellement en moyenne plus de 280,000 francs pour le service du caissier. L'honorable M. Veydt conteste ce chiffre. Mais je demanderai alors ce que sont les crédits supplémentaires qui ont été réclamés par l'honorable M. Veydt lui-même en 1848, et qui, si je ne me trompe, s'élevaient à la somme de fr. 119,000; j'ai sous les yeux les crédits supplémentaires que M. le ministre des finances vient de soumettre à la chambre, et j'y vois figurer pour l'année 1845 un supplément de. 29,055 fr. 05, pour 1846 de 1,510 fr. 65, pour 1847 de 23,957 77 et pour 1848 de 71,243 18.

Il est possible que cette augmentation de frais résulte principalement de ports de lettres ou de remboursements de port d'argent ; je ne le conteste pas; mais ce qu'il m'importe d'établir, c'est que la somme que nous payons à la Société Générale pour le service qu'elle nous rend est trop élevée.

Maintenant, puisqu'on a soulevé la question de ces crédits supplémentaires, je dirai que, quand le rapport a été imprimé, nous ne connaissions pas le crédit supplémentaire pour 1848 ; ce crédit s'élève, comme nous l'avons déjà dit, à fr. 71,243,18. Ce ne sont pas uniquement des ports de lettres; les emprunts forcés ont nécessairement exercé de l'influence sur ce chiffre. Mais sur quel pied la commission a-t-elle été calculée? Est-ce 1/5,1/8 ou 1/16 p. c. ? A-t-on eu soin de distinguer les versements? L'organisation actuelle de la trésorerie pourrait laisser des doutes à cet égard.

Dans tous les cas, ce que je ne crains pas d'affirmer c'est que la recette extraordinaire do 35 millions n'a eu aucune influence sur le traitement alloué aux agents du caissier. Le principe des indemnités proportionnelles est une source de bénéfice pour la Banque, aucun maximum ne peut en arrêter le développement.

Vous voyez donc, messieurs, tous les inconvénients, tous les vices de la convention qui existe aujourd'hui entre le gouvernement et la Société Générale. Tout ce que nous demandons, c'est que dans le cas où un nouvel engagement serait contracté, même temporairement, la provision soit mieux en rapport avec l'importance du service que la Banque rend à l'Etat.

N'est-ce donc rien que de confier à un établissement de crédit le service de caissier de l'Etat? N'y a-t-il pas là un immense prestige? N'est-ce pas le moyen le plus efficace, le plus actif de faciliter la circulation des billets dans un temps normal?

L'expérience l'a démontré. Lorsque les billets n'avaient pas de cours forcé, ceux de la Société Générale étaient toujours préférés, parce que c'était le papier du caissier de l'Etat. Le public croyait y trouver une garantie supplémentaire.

Il n'est pas exact de dire que la Banque ne peut tirer aucun avantage du dépôt des fonds de l'Etat; car il y a toujours un intervalle assez long entre les payements et les recettes. Le payement des intérêts de la dette publique et des traitements des fonctionnaires a lieu à des époques fixes.

Dans d'autres pays, les banques sont, avant tout, destinées à rendre des services à l'Etat. La banque d'Angleterre, dit Adam Smith, ne fonctionne pas seulement comme une banque ordinaire, c'est un des engins les plus actifs, les plus puissants de l'Etat: la banque d'Angleterre fait le service de la dette publique, elle escompte les billets de l'échiquier, elle avance le montant de certains impôts qui ne rentrent souvent que deux ou trois ans plus tard. Chaque fois que la charte de la banque d'Angleterre a été renouvelée, le denier de recette que cette banque perçoit pour le payement des intérêts de la dette publique a été diminué ; et d'après l'acte du 31 août 1844, si je ne me trompe, la banque d'Angleterre doit bonifier à l'Etat une somme annuelle de 180,000 livres en compensation des avantages et des privilèges qui lui ont été conférés.

En Hollande, la banque d'Amsterdam se charge sans indemnité du dépôt des fonds de l'Etat.

J'ai sous les yeux le budget des finances des Pays-Bas pour l'année 1849, je n'y trouve aucune indemnité allouée à cet établissement de crédit, du chef des services qu'il rend à l'Etat; je remarque un chiffre de 8,000 florins pour frais de transport de fonds.

L'honorable M. Veydt nous disait tout à l'heure que, si le chiffre de 250,000 fr. avait été dépassé, cela résultait des ports de lettres et des frais de transports d'argent.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Les transports d'argent sont à la charge de la société.

M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - Soit; de ports de lettres seulement ; mais alors cette dépense me paraît très considérable.

Si vous additionnez les crédits supplémentaires qui ont été demandés par l'honorable M. Veydt, et ceux que son honorable successeur est venu nous proposer pour l'indemnité à payer au caissier de l'Etat, vous arriverez, quoi que vous fassiez, à une moyenne qui dépassera 280,000 fr. Sur ce chiffre, 30,000 fr. seraient alloués pour ports de lettres. C'est deux fois plus que la somme qui figure au budget hollandais pour le transport des espèces.

On me fera peut-être une objection, c'est qu'il y a en Hollande un crédit spécial pour le service du payement des intérêts de la dette publique.

Je veux bien l'admettre, mais la dette publique des Pays-Bas n'est pas à comparer à la nôtre.

Les intérêts ne se payent ni à Londres, ni à Paris, c'est à Amsterdam que tout le service est concentré. Il n'y a aucune commission à payer à des banquiers étrangers.

Et tenant compte d'ailleurs de cette allocation, toute proportion gardée, nous pensons (et déjà la section centrale qui a examiné le budget de 1849, l'a fait observer) que le service de la trésorerie est mieux organisé dans les Pays-Bas qu'en Belgique, il présente plus de garanties de bonne gestion et d'économie.

En résumé, messieurs, la section centrale n'a rien voulu préjuger en ce qui concerne la nouvelle organisation. Si le service du caissier de l'Etat était confié à un établissement de crédit, nous pensons que le gouvernement devrait exiger, indépendamment des garanties de bonne gestion, des conditions moins onéreuses pour le trésor public.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, j'aurai été probablement mal compris par l'honorable préopinant, lorsque, dans une séance précédente, j'ai répondu à une interpellation qui m'avait été faite sur le point de savoir quelles étaient les intentions du gouvernement quant à la réorganisation du service du caissier de l'Etat ; j'avais cru suffisamment faire entendre que je ne voulais pas faire connaître quelles étaient à cet égard les intentions du gouvernement. Je crois qu'il est de l'intérêt public que je ne fasse pas connaître l'opinion à laquelle je me suis arrêté.

J'ai à cet égard une opinion, je la crois bonne, j'essayerais de la faire prévaloir, mais je crois que pour y bien réussir, je ne dois pas, quant à présent, la rendre publique. J'ai pour cela des motifs tout spéciaux. Quant au point de savoir si le service tel qu'il est actuellement organisé est bon, ou si le service ne coûte pas trop cher, ce sont là des questions qui (page 1494) ont été fort souvent débattues. Le service, au point de vue d'une bonne comptabilité, n'est pas suffisant tel qu'il est organisé; mais coûte-t-il trop cher? C'est ce que je ne veux pas examiner. Mais a-t-on raison de prétendre que l'organisation nouvelle doit être nécessairement moins onéreuse à l'Etat? C'est certainement ce que je ne dis pas.

Ce service coûte aujourd'hui moins de 250 mille francs à titre de provision sur les recettes ; cette somme n'a presque jamais été atteinte.

Pour les années à l'égard desquelles des crédits supplémentaires ont été demandés, voici quelle est la dépense réelle : 1845 247,253 06, 1846 219,161 44, 1847 240,123, 1848 285,136 90.

La moyenne est donc de 247,918 62. Et cette moyenne sera encore moins élevée, car la provision pour 1848 ne doit être que d'un 16e sur les emprunts, et elle figure pour un cinquième dans le chiffre ci-dessus, mais provisoirement, jusqu'à ce que le chiffre des versements à titre d'emprunt ait été définitivement arrêté.

A la vérité, des crédits plus élevés sont sollicités. C'est qu'il faut rembourser au caissier les ports de lettres et paquets. Il y a de ce chef à rembourser pour 1845 31,801 99, pour 1846.32,348 61, pour 1847 33,834 66 et pour 1848 36,106 28.

Il est clair que le remboursement de ces ports de lettres ne constitue pas une dépense proprement dite, c'est la restitution de sommes perçues par l'Etat, pour un service qui est fait spécialement pour lui. Ce n'est pas une véritable dépense; c'est une simple opération de comptabilité.

L'Etat pourrait-il faire son service à des conditions plus favorables?

Supposons que l'Etat fasse lui-même sa caisse, il sera obligé d'avoir des agents dans tous les arrondissements; il lui faudra par conséquent 27 agents ; supposons que la dépense de chaque agence soit en moyenne de 10 mille francs, nous arrivons à 270 mille francs. L'Etat a, en outre, une autre dépense dont il faut tenir compte, c'est la dépense pour les directions du trésor. Il faut l'ajouter à la somme qu'il paye à la Société Générale pour trouver ce que lui coûte à présent le service de sa caisse.

Mais pour l'organisation du nouveau service, il y aura d'autres dépenses que celles qui se font actuellement ; la dépense s'accroîtra même dans une proportion assez forte; il faudra exécuter l'article 4 de la loi de comptabilité. Cet article ordonne, pour le contrôle des recettes, la délivrance de récépissés à talon ; il exige que ces récépissés soient visés ; vous comprenez que toutes ces opérations nouvelles ne se feront pas sans dépenses nouvelles.

Je ne crois pas devoir entrer dans d'autres détails, je me borne à ce simple aperçu pour faire voir qu'on ne doit pas s'attendre, si un service nouveau est complètement organisé, à une dépense moindre. Lorsque le gouvernement viendrait présenter son projet, on ne manquerait pas de se prévaloir de son silence à cet égard pour lui reprocher de substituer à l'ancien système un système plus onéreux.

Maintenant les mouvements de fonds ont été signales comme extrêmement avantageux à la Société Générale qui fait le service de caissier. Mais si le dépôt des fonds de l’Etat dans les caisses de la Société Générale profite à la société, il ne profiterait pas à l'Etat, sans de nouvelles combinaisons. Il serait difficile que le service de la caisse fût profitable à l'Etat. On le comprend, si l'on considère qu'un encaisse de quelques millions doit être répartie entre tous les agents. Que représente cette somme pour chaque agent? (Interruption.)

Il y a des observations présentées sur ce point dans le rapport de la section centrale, on insiste sur cette idée que la Société Générale profite des fonds de l'Etat ; je suis obligé de rencontrer cela et de démontrer que l'on se trompe, si l'on veut en induire que le gouvernement pourrait obtenir cet avantage en faisant la caisse lui-même.

M. T'Kint de Naeyer. - Pourquoi la Banque de Belgique paye-t-elle?

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il s'agit là de simples dépôts et non de versement de fonds, sous la condition de les mettre à la disposition de l'Etat sur tous les points du territoire. Il faut tenir compte de la dépense.

Croyez-vous possible de faire arriver chez les vingt-sept agents, sur l'ordre du ministre, toutes les sommes dont on pourra disposer sans aucune espèce de dépense? Croyez-vous qu'il n'y a pas une compensation forcée par les obligations que contracte la Société qui prend l'engagement de faire ce service sur tous les points du territoire? C'est pour prémunir la chambre contre les erreurs contenues dans le rapport de la section centrale, que je fais ces observations.

Le service de la caisse de l'Etat doit être réorganisé avant le 1er janvier 1850. Je n'ai pas dit, comme le suppose la section centrale, que je prendrai des dispositions pour maintenir l'état de choses actuel. J'ai dit que des communications seraient faites à la chambre en temps utile. J’ai dit aussi, dans la séance du 25 avril, que les circonstances étaient extrêmement fâcheuses pour s'occuper ne cet objet, car nous avions la complication de la situation des banques, du cours forcé des billets, et il est impossible d'examiner la question du caissier de l'Etal sans la rattacher à la situation des banques. Il est plus difficile que jamais de s'occuper de cette question maintenant. Comme c'est seulement avant le 1er janvier qu'elle doit être résolue, avant cette époque nous ferons des communications à la chambre; nous présenterons alors le système que nous croirons le plus conforme aux intérêts du pays.

Projet de loi accordant un crédit extraordinaire au budget du ministère de l’intérieur

Rapport de la section centrale

M. Moncheur. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur la demande de crédit extraordinaire d'un million pour le département de l'intérieur.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.

La séance est levée à cinq heures.