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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 18 mai 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-1849)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1371) M. A. Vandenpeereboom fait l'appel nominal à 2 heures et quart.

- La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur G.-F. Sainctelette, régisseur de la société, anonyme des embranchements du canal de Charleroy à Julémont, né à Aix-la-Chapelle, demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Quelques couteliers à Aerschot demandent une réduction sur l'impôt patente des fabricants de couteaux communs. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« L'administration communale d'Houffalize prie la chambre d'accorder à la compagnie du Luxembourg, les modifications qu'elle demande de pouvoir apporter au contrat primitif. »

- Même renvoi.


« Les membres du conseil communal et plusieurs habitants de Carnières demandent qu'il n'y ait qu'une seule classe de notaires, qu'ils puissent exercer dans toute l'étendue de leur arrondissement judiciaire, ou au moins dans les cantons contigus à celui de leur résidence. »

- Même renvoi.


« Le sieur Nameche, membre du conseil communal de Namur, prie la chambre d'annuler la délibération du conseil communal, en date du 22 janvier dernier, qui approuve un contrat intervenu entre l'administration des hospices civils de Namur et l'institut des frères de la doctrine chrétienne. »

- Même renvoi.


« Plusieurs distillateurs, négociants et débitants de boissons distillées à Gand, demandent l'abrogation de la loi du 18 mars 1838 et prient la chambre de rejeter toute modification qu'on proposerait d'y introduire.»

- Dépôt sur le bureau, pendant le vote définitif du projet de loi sur le débit des boissons distillées.


Par dépêche en date du 15 mai, M. le ministre de l'intérieur adresse à la chambre 2 exemplaires de la première livraison du Bulletin administratif du ministère de l'intérieur.

- Dépôt à la bibliothèque.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du département de l’intérieur

Rapport de la section centrale

M. Osy. - J'ai l'honneur de déposer le rapport sur la demande de crédit supplémentaire pour le budget de l'intérieur.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.

Rapport sur une pétition

M. Loos. - Messieurs, la commission permanente d'industrie m'a chargé de vous présenter le rapport sur la pétition des habitants d'Auzy qui demandent une aggravation de droit d'entrée sur les tabacs. La commission propose l'ordre du jour.

Si la chambre le désire, je lui donnerai lecture du rapport.

- Plusieurs voix. - Non ! non? l'impression.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi portant le budget du ministère de la justice de l’exercice 1850

Rapport de la section centrale

M. Lebeau. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le budget de la justice pour 1850.

Quelques pétitions qui ont été renvoyées à la section centrale resteront déposées sur le bureau pendant la discussion.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi portant le budget de la dette publique de l’exercice 1850

Rapport de la section centrale

M. Mercier. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le budget de la dette publique pour 1850.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la cuite de l'ordre du jour.

Projet de loi sur le recours en cassation en matière de milice

Rapport de la section centrale

M. Tesch. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner la proposition faite par M. Lelièvre, tendant à soumettre au recours en cassation les décisions des députations en matière de milice.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1850

Rapport de la section centrale

M. Jacques. - J'ai l'honneur de déposer le rapport sur le budget de l'intérieur de 1850, ainsi que diverses pétitions qui resteront déposées sur le bureau pendant la discussion.

- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi établissant le code disciplinaire et pénal pour la marine marchande et la pêche maritime

Second vote des articles

Article 3

M. le président. - Les articles 1 et 2 n'ont pas été amendés; le dernier paragraphe de l'article 3 a été amendé de la manière suivante :

« Toutefois les passagers ne pourront être assujettis à la présente juridiction que pendant le temps de leur séjour à bord, qu'ils seront toujours libres de quitter dès leur arrivée au port de destination, comme aussi dans un des ports où le navire viendrait à relâcher. »

M. Delfosse. - Cet amendement a été présenté par l'honorable M. Loos; je l'approuve au fond, mais je crois qu'on devrait retrancher les derniers mots : « dès leur arrivée au port de destination, comme aussi dans un des ports où le navire viendrait à relâcher ».

Il suffit de dire que les passagers seront toujours libres de quitter le bord. Il peut arriver qu'on fasse rencontre en mer d'un autre navire, il faut que les passagers puissent passer à bord de ce navire si cela leur convient et si on consent à les y recevoir.

La liberté de quitter le navire doit être entière; l'amendement, tel qu'il a été formulé par l'honorable M. Loos, la restreint en cas de l'arrivée au port de destination, comme aussi dans un des ports où le navire viendrait à relâcher.

Je propose de supprimer cette partie de l'amendement et d'ajouter : « A moins qu'ils n'y soient retenus pour être livrés à la justice comme auteurs d'un crime ou d'un délit. »

Cette disposition additionnelle est nécessaire pour empêcher les coupables d'un crime ou d'un délit de se soustraire à l'action de la justice.

M. Rodenbach. - L'amendement de l'honorable M. Loos, adopté au premier vote, avait pour but de soustraire les passagers à la juridiction du capitaine du navire et aux peines qu'il aurait pu leur infliger. Cet honorable membre a voulu que du moment que le navire était arrivé au port de destination, les passagers ne fussent plus soumis à cette juridiction spéciale.

Il a supposé des cas où des capitaines auraient pu faire usage de leur autorité pour retenir, au dernier moment, des passagers dont ils auraient eu à se plaindre pendant le voyage. C'est là ce que l'honorable M. Loos a cherché à prévenir. Il n'a pas eu d'autre but. Or, je pense que pour l'atteindre il faut rédiger le paragraphe de l'article 3 comme suit : a Toutefois les passagers ne pourront être assujettis à la juridiction et aux peines en matière de discipline que pendant le temps de leur séjour à bord, etc. »

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Il ne s'agit pas ici de juridiction, mais des règles d'ordre de service et de discipline. Je pense donc qu'il faudrait substituer les mots « ces règles » aux mots « la présente juridiction ».

Quant à l'amendement de l'honorable M. Delfosse, je crois qu'il doit être accepté. Mais il me paraît inutile d'y ajouter le sous-amendement qu'il vient d'indiquer, parce que cela est de droit. Il suffit pour rendre sa pensée de dire que le passager est toujours libre de quitter le navire.

M. Delfosse. - J'admets le léger changement proposé par M. le ministre de la justice, mais il est nécessaire d'insérer à la fin de la disposition les mots suivants : « A moins qu'ils ne soient retenus pour être livrés à la justice comme auteur d'un crime ou d'un délit. » Puisque vous dites que les passagers seront toujours libres de quitter le bord, il faut une exception pour le cas de crime ou de délit. Si vous n'insérez pas cette exception dans la loi, les passagers auteurs d'un crime ou d'un délit pourront échapper à la justice.

M. Lebeau. - Les mots : « qu'ils seront toujours libres de quitter », sont inutiles.

M. Delfosse. - Pardonnez-moi ; il faut laisser ces mots dans la loi ; car les passagers peuvent être condamnés à huit jours d'arrêts pour faute disciplinaire, et le capitaine pourrait leur dire : Vous n'êtes pas libres de quitter le bord, vous devez achever votre peine. C'est pour que les passagers puissent quitter le bord dans ce cas, que l'honorable M. Loos a présenté l'amendement.

Il faut donc commencer par dire que les passagers sont toujours libres de quitter le bord, et formuler une exception pour le cas où ils seraient auteurs d'un crime ou d'un délit. C'est pourquoi je propose d'ajouter : « A (page 1372) moins qu'ils ne soient retenus pour être livrés à la justice comme auteurs d'un crime ou d'un délit.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - J'admets l'amendement de l'honorable M. Delfosse, lorsqu'il s'agit d'un crime. Mais lorsqu'il s'agit d'un délit, dire que le passager pourra être retenu à bord, c'est établir en règle générale l'emprisonnement préventif pour de simples délits. Or, je crois qu'il serait trop rigoureux qu'un passager, arrivé au port de destination, fût retenu prisonnier à bord, parce qu'il serait prévenu d'un simple délit. L'emprisonnement préventif en matière de délit ne peut avoir lieu qu'exceptionnellement. Je pense donc qu'il faudrait restreindre la disposition au cas où le passager serait accusé d'un crime.

En effet, messieurs, qui ordonnerait d'abord cet emprisonnement préventif? Ce n'est que lorsque le navire serait revenu dans le pays que le juge pourrait lancer un mandat de dépôt et constituer le passager prisonnier. Ce serait donc le capitaine qui de son autorité le retiendrait à bord et s'opposerait à ce qu'il quittât le navire, parce qu'il aurait commis un délit. Je crois que cela serait par trop rigoureux et pourrait donner lieu à de graves abus.

M. Lebeau. - Je suis au fond d'accord avec l'honorable M. Delfosse. Mais je ne puis m'empêcher de trouver cette formule assez étrange. Je ne vois pas pourquoi il serait nécessaire de dire que celui qui voyage est libre de quitter sa voiture. Je crois que vous ne trouverez l'équivalent de cela dans aucune loi.

Vous commencez par poser un principe qui est incontestable, pour formuler ensuite l'exception. Je dis que cela est inutile; je dis qu'il est inutile de déclarer qu'un homme qui voyage et qui change d'avis, a besoin de la permission de la loi pour quitter le bord.

Je désirerais qu'on trouvât un autre moyen de modifier, dans le sens de l'amendement de M. Delfosse, l'article en discussion.

M. Delfosse. - Il est évident que si l'on ne dit pas que le passager aura toujours la liberté de quitter le bord, excepté dans les cas que j'ai indiqués, le capitaine pourra le retenir, en lui disant : Vous étiez sous ma juridiction; je vous ai condamné aux arrêts; vous ne quitterez le bord que lorsque vous aurez subi cette peine.

M. le ministre de la justice n'admet mon amendement qu'en partie, M. le ministre admet que le passager puisse être retenu à bord dans le cas où il aurait commis un crime, mais non dans le cas où il aurait commis un délit. Je prie M. le ministre de la justice de faire attention à l'article 56, qui a été voté sans observation, et qui porte que le prévenu d'un crime ou d'un délit pourra être retenu à bord. Voici le texte de cet article :

« Art. 56. Tout prévenu d'un délit grave ou d'un crime, tout homme dangereux et difficile à contenir, qui, de l'avis du capitaine, des officiers et principaux marins, devra être séparé du reste de l'équipage, pour être mis hors d'état de s'évader ou de nuire, pourra être retenu aux fers, en amarrage ou au cachot, jusqu'à l'arrivée du navire au premier port de relâche ou de destination, ou jusqu'à la rencontre d'un bâtiment de l'Etat.

« Cette disposition est applicable aux officiers et aux passagers.

« Mention sera faite de l'avis sur le registre de bord. »

Vous voyez, messieurs, que d'après cet article le passager, auteur non seulement d'un crime mais même d'un délit, peut être mis en état d'arrestation jusqu'au moment où il est livré aux autorités du pays.

Je maintiens donc mon amendement.

M. Loos. - Dans l’une comme dans l'autre des propositions faites par MM. Delfosse et Veydt, le principe de mon amendement est maintenu, c'est-à-dire que l’on reconnaît la nécessité d'introduire dans la loi une exception pour les passagers, de leur permettre de quitter le navire. J'avais demandé la parole quand je l'avais entendu contester par l'honorable M. Lebeau...

M. Lebeau. - Je n'ai pas contesté cela.

M. Loos. - Non, mais vous avez pensé qu'il était inutile de l'inscrire dans la loi. Or, comme l’a dit M. Delfosse, la loi autorisant le capitaine à retenir le passager, il faut également dire dans la loi que le passager sera libre de quitter le navire.

Quant à l'amendement de M. Delfosse, j'admets que le passager qui a commis un crime, ne soit pas libre de quitter le navire; mais quant à celui qui n'a commis qu'un délit, je crois qu'il doit être mis en liberté du moment que le navire touche à un port belge, à moins que la justice n'ordonne son arrestation et ne le fasse incarcérer dans une prison ordinaire.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Messieurs, l'article 56, qui a été cité par M. Delfosse, ne dit pas ce que l'honorable membre a cru y voir. Il dit d'abord que tout prévenu d'un délit grave ou d'un crime, tout homme dangereux et difficile à contenir, qui devra être séparé du reste de l'équipage pour être retenu aux fers, etc., mais il ajoute : « jusqu'à l'arrivée du navire au premier port de relâche ou de destination. » Il ne s'oppose donc nullement à ce que le prévenu d'un délit soit mis en liberté à l'arrivée au port; ainsi rien n'empêche de dire, dans l’article 3, que le prévenu ne pourra pas, à l'arrivée au port, être retenu à bord; au contraire, si on ne le disait pas, il y aurait contradiction entre les deux articles.

M. Delfosse. - Je propose d'ajouter le mot « grave » au mot « délit », mon amendement sera ainsi en concordance avec l'article 56.

Remarquez, messieurs, qu'il est des délits qui peuvent être punis d'un emprisonnement de 5 ans; il ne faut pas que celui qui a commis un délit aussi grave puisse s'évader, il faut qu'il soit livré à la justice du pays.

M. Veydt. - Je dois croire, messieurs, que je n'ai pas été compris. L'honorable ministre de la justice veut se borner à dire : « ne pourront être assujettis à ces règles », cela ne suffit pas, car les passagers pourront encore être sous l’application d’une peine infligée par le capitaine, et il faut, dans l’esprit de l’amendement que, dans ce cas même, ils puissent quitter le navire, lorsqu’il est arrivé dans un port. C’est uniquement la juridiction et les peines en matière disciplinaire que nous devons avoir en vue. Pour les crimes et délits, les passagers, même après avoir quitté le bord, restent soumis au droit commun; il en est encore ainsi pour les simples contraventions en matière ordinaire de police. Le fait d'avoir quitté le navire ne changera pas la position des passagers. La justice aura son cours.

Dans la rédaction que j'ai proposée, le but de l'amendement est atteint. Voici de nouveau cette rédaction. Je propose de dire : « Toutefois, les passagers ne pourront être assujettis à la juridiction et aux peines en matière de discipline que pendant, etc. »

- La discussion est close.

L'amendement de M. Delfosse est mis aux voix et adopté.

L'amendement de. M. Veydt est ensuite mis aux voix et également adopté.

Article 4

M. Delfosse. - Messieurs, l'amendement qui a été adopté à l'article 1$ nécessite un léger changement à l’article. 4. Au lieu de dire : « Elles continuent, etc. », il faut dire : « Les personnes mentionnées au paragraphe premier de l'article précédent continueront, etc. »

- Ce changement de rédaction est adopté.

Articles 9 et 10

Les amendements introduits aux articles 9 et 10 sont confirmés sans discussion.

Article 12

Art. 12. Le dernier paragraphe de cet article a été amendé delà manière suivante :

« Ces délits seront punis séparément ou cumulativement des peines spécifiées à l’article 7, au choix du juge, excepté dans les cas prévus par les articles suivants »

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - A l’avant-dernier paragraphe il faudrait ajouter, après les mots « les officiers » ceux-ci : « et les passagers » compris. Le même amendement a été introduit à l’article 37 du projet, c'est pour mettre en rapport ces deux dispositions que je fais cette proposition.

Le paragraphe serait ainsi conçu :

« La rébellion envers le capitaine, quand elle aura lieu en réunion de deux ou d'un plus grand nombre de personnes, n'excédant pas le tiers des hommes de l'équipage, les officiers et les passagers compris. »

- Cet amendement est adopté et l'amendement introduit au premier vote est confirmé.

Article 15

A l’article 15, deux amendements ont été introduits.

« Tout marin qui aura refusé formellement d'obéir aux ordres donnés par le capitaine, ou un officier du bord, pour assurer la manœuvre du bâtiment, ou maintenir le bon ordre, sera puni d'un emprisonnement de six jours à six mois; le juge pourra y joindre une amende de 16 à 100 francs. »

« L'emprisonnement pourra être porté jusqu'à 5 ans et l'amende jusqu'à 300 fr., si les ordres ont été donnés pour le salut du navire ou de la cargaison. Cette dernière disposition est également applicable aux passagers. »

M. Bruneau. - La disposition de cet article est extrêmement sévère ; 5 ans de prison pour désobéissance aux ordres donnés pour le salut de la cargaison ! Pourra-t-on forcer un passager à se faire matelot, à monter dans les cordages et les vergues pour assurer le salut de la cargaison? Je conçois qu'on puisse le faire quand il s'agit du salut du navire, mais non pour sauver la cargaison.

Je proposerai de borner cette exigence aux cas où il s’agit du salut du navire.

M. Delfosse. - D'après la législation française, la peine est la réclusion. C'était aussi la peine comminée par le projet du gouvernement. La commission n'a pas voulu d'une peine aussi forte pour le simple refus d'obéir aux ordres donnés pour le salut du navire ou de la cargaison. C'était un crime d'après le projet ; la commission moins sévère en a fait un délit. Dans certains cas la peine de cinq années d'emprisonnement pourra encore être trop sévère, mais nous avons donné au juge le pouvoir d'atténuer les peines, et l'emprisonnement de 5 ans n'est d'ailleurs qu'un maximum.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je prends la parole pour appuyer les observations de l'honorable M. Delfosse.

Il ne faut pas perdre de vue que ce sont les juges ordinaires qui appliqueront la disposition ; et bien, certainement ils ne seront pas trop rigoureux envers des passagers qui donneront à leur refus d'obéir des motifs légitimes d'excuse ou qui auront été dans l'impossibilité physique d'obéir. Il faut s'en rapporter, à cet égard, à l'appréciation de la magistrature.

M. Bruneau. - Je n'insiste pas.

- L'article 15 est confirmé tel qu'il a été adapté au premier vote.

Article 16

L'article 16 est également confirmé.

Les articles 17, 18 et 19 n'ont pas subi de modification.

Article 20

« Art. 20. Les complices de la désertion, marins ou passagers, seront punis d'un emprisonnement d'un mois à un an.

« Tous autres complices seront punis d'une amende de 16 à 500 fr. »

M. Delfosse. - Si cette disposition était maintenue, certains (page 1373) complices de la désertion seraient punis plus sévèrement que les déserteurs eux-mêmes. Cela ne peut pas être. Il est des cas où la désertion ne donne lieu qu'à une peine excessivement légère.

Il est des cas où la peine consiste uniquement dans la retenue de la moitié du salaire ou de la part auxquels le marin aurait droit s'il n'avait pas déserté.

Lorsque le déserteur n'encourt que cette peine, vous ne pouvez punir son complice (fût-il marin ou passager) d'un emprisonnement d'un mois à un an.

Une disposition spéciale serait inutile, si la peine encourue par le déserteur pouvait être appliquée à tous les complices.

Mais la peine d'embarquement sur un bâtiment de l'Etat qui est, dans certains cas, comminée contre les déserteurs, ne peut être appliquée qu'aux gens de mer. Voilà pourquoi il faut une disposition spéciale pour les autres complices; sans cela on se référerait au droit commun qui veut que les complices d'un crime ou d'un délit soient punis des mêmes peines que l'auteur principal.

Je propose de rédiger l'article comme suit. Ceux qui trouveraient insuffisante l'amende de 16 à 500 francs, qui a été admise sur la proposition de l'honorable M. Jullien, pourront demander une aggravation de peine :

« Les gens de mer, complices de la désertion, seront punis de la même peine que le déserteur.

« Les autres complices seront punis d'une amende de 16 à 500 fr. »

Je ne me prononce pas sur cette dernière peine. Elle peut paraître trop légère. L'essentiel est qu'on ne s'écarte du droit commun en matière de complicité que pour les complices, auxquels il est impossible d'appliquer la même peine qu'aux déserteurs.

M. Jullien. - Lorsque la chambre s'est prononcée sur l'article 20, il n'est entré dans sa pensée (erratum, page 1387) de n'appliquer aucune peine aux complices de la désertion prévue par l'article 16. Cet article prévoit la désertion d'un homme de l'équipage, qui refuse de se rendre à bord, mais dont l'arrestation a lieu avant le départ du navire; dans ce cas la désertion n'a pas de suite et n'est atteinte que d'une peine légère.

L'article 20, qui commine des peines plus sévères, n'a été voté que pour réprimer la complicité de la désertion qui fait l'objet des articles 17, 18 et 19. Là, la désertion revêt un caractère plus grave; c'est ce motif qui a été pris en considération pour statuer les peines de la complicité énoncées en l'article 20.

Je pense donc que, pour satisfaire aux scrupules de l'honorable M. Delfosse, on pourrait commencer l'article 20 par ces mots : « dans les cas prévus par les articles 17, 18 et 19. »

M. Delfosse. - L'amendement de l'honorable M. Jullien est inacceptable. Vous ne pouvez punir le marin complice de la désertion d'une autre peine que le déserteur. Quelle est la peine que comminent les articles auxquels l'honorable M. Jullien voudrait limiter l'article 20 ? C'est, outre la perte des salaires dus et un emprisonnement de 15 jours, l'embarquement sur un bâtiment de l'Etat. Je dis que si le complice est marin, il faut lui appliquer cette dernière peine comme au déserteur.

Quand le complice a la même qualité que le déserteur, pourquoi lui appliquer une peine différente? Vous ne devez sortir du droit commun que quand le complice n'est pas marin ; la peine de l'embarquement sur un bâtiment de l'Etat ne peut alors lui être appliquée.

Je persiste à demander que les gens de mer complices de la désertion soient punis des mêmes peines que le déserteur.

Mais il faut une peine spéciale pour le complice qui, n'étant pas marin, ne peut être contraint à s'embarquer sur un bâtiment de l'Etat. C'est l'objet du deuxième paragraphe de mon amendement, ainsi conçu : a Les autres complices seront punis d'une amende de 16 à 500 fr. »

Mais, comme on me le fait observer avec raison, il peut arriver que la complicité ait un caractère de gravité telle qu'une amende seule ne serait pas une peine suffisante. Il est bon que le juge puisse, d'après les circonstances, condamner à l'amende et à la prison séparément ou cumulativement; je propose donc de rédiger le dernier paragraphe comme suit :

« Les autres complices seront punis séparément ou cumulativement d'un emprisonnement de 15 jours à 6 mois, et d'une amende de 16 à 500 fr. »

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - On pourrait dire: « Tous les autres complices seront punis, soit séparément, soit cumulativement, d'une amende de 16 à 500 francs et d'un emprisonnement de 15 jours à 6 mois. »

M. Orts. - Messieurs, l'honorable M. Delfosse a perdu de vue que l'amendement qu'il propose au paragraphe final de l'article 20 tombe dans le même inconvénient que celui qu'il a voulu prévoir en modifiant le paragraphe premier ; c'est-à-dire qu'il va donner au juge la faculté de punir plus fortement le complice que l'auteur principal. Il introduit dans ce paragraphe final un emprisonnement facultatif de 15 jours à 6 mois. Or, la peine de l'emprisonnement pour le déserteur ne peut excéder un mois.

M. Delfosse. - Plus l'embarquement. L'emprisonnement tiendra lieu de l'embarquement.

M. Orts. - Je ne sais si l'on peut considérer l'embarquement comme une véritable peine; c'est plutôt une mesure de discipline.

Quant au premier amendement de l'honorable M. Delfosse, je crois devoir m'y opposer par un autre motif.

Je crois qu'il serait dangereux de punir aussi fortement le complice de la désertion que le déserteur même ; qu'il y a des motifs pour mitiger la peine du complice en matière de désertion contrairement au droit commun. En matière de désertion maritime, il est un point de vue auquel le législateur doit se placer, lorsqu'il traite de la répression. Il ne doit pas oublier qu'il est utile de ne pas punir le complice de la désertion, de manière à l'engager à déserter lui-même. Or, en plaçant le complice sur le même pied que l'auteur de la désertion, vous l'engager lui-même à déserter; car il trouvera une chance de se soustraire éventuellement à la peine en accompagnant le délinquant, et sera puni exactement de même dans les deux cas.

La désertion pour la marine a un inconvénient très grave. Il faut tâcher que l'équipage soit intéressé à rester dans toutes circonstances à bord. La désertion est dangereuse, surtout en pays étranger, où il serait difficile de compléter l'équipage. A mon sens, la chambre ferait chose utile en disant simplement : « Les complices de la désertion marins, ou passagers, seront punis du même l’emprisonnement que l'auteur principal. »

M. le président. - Voici l'amendement de M. Delfosse : « Les gens de mer, complices de la désertion, seront punis de la même peine que le déserteur. Les autres complices seront punis séparément ou cumulativement, d'une amende de 16 à 500 fr. et n'ira1 emprisonnement de 15 jours à 6 mois. »

M. Veydt. - Messieurs, la chambre n'a pas oublié la longue discussion à laquelle cet article 20 a donné lieu, et c'est pour concilier, en quelque sorte, toutes les opinions, que l'on est arrivé à le rédiger tel qu'il existe. Il est probable que le second paragraphe n'aurait pas été adopté, si l'on avait joint l'alternative de l'emprisonnement à la pénalité de l'amende de 16 à 500 francs. Nous avons compris que cette pénalité est suffisamment forte pour les complices de la désertion, lorsqu'ils ne sont pas marins ou qu'ils ne se trouvent pas embarqués sur le navire, avec les matelots déserteurs.

Quant au paragraphe premier, je suis d'avis que c'est la rédaction proposée par l'honorable M. Jullien que nous devons préférer. D'après cet honorable membre, les complices ne seront punissables que lorsque le marin déserteur ne pourra pas être remis au capitaine ou lorsque la désertion sera concertée à l'étranger (article 17, 18 et 19 du projet).

Quant à la différence de la peine, il y a d'autres exemples dans nos lois pénales, où la peine appliquée au complice, n'est pas absolument la même que celle qui atteint l'auteur du délit. Nous ne devons, d'ailleurs, pas chercher à multiplier cette peine de l'embarquement sur un navire de l'Etat. Il se présentera déjà beaucoup de circonstances où elles ne pourront être appliquées, car la marine de l'Etat n'a l'emploi que d'un très petit nombre de matelots. Par ces considérations il n'y a pas lieu, suivant moi, d'adopter les amendements de l'honorable M. Delfosse sur les deux paragraphes de l'article 20.

M. le président. - Voici l'amendement de M. Orts : « Les complices de la désertion, marins ou passagers, seront punis du même emprisonnement que l'auteur principal. »

- La discussion est close.

L'amendement présenté par M. Delfosse est mis aux voix et adopté.

Article 19

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Messieurs, l'on a retranché de l'article 19 le troisième paragraphe, et par cette suppression, l'article a été amendé.

Si je demande la parole, ce n'est pas pour proposer de rétablir le paragraphe supprimé, mais pour faire observer qu'il faudrait introduire un changement de rédaction dans le second paragraphe. Il faudrait dire : « La condamnation à l'emprisonnement sera portée à un mois et l'embarquement au maximum, si la désertion, le refus ou la négligence dé se rendre à bord ont lieu hors d'Europe. »

Ces mots, « ou la négligence », me semblent devoir être introduits, pour mettre l'article 19 en rapport avec l'article 18, qui dit que ceux qui déserteront à l'étranger, qui refuseront ou négligeront de se rendre à bord, achèveront, s'ils sont arrêtés, le voyage à demi-salaire, etc. La négligence est donc qualifiée délit, et dès lors, il conviendrait que ce mot fût répété dans le deuxième paragraphe de l'article 19.

M. Delfosse. - La négligence de se rendre à bord doit être punie. Mais dans le paragraphe que M. le ministre de la justice veut modifier, il s'agit d'appliquer le maximum de la peine.

Il serait très dur d'appliquer le maximum de la peine dans le cas de négligence. Qu'on applique le maximum dans le cas de désertion ou de refus de se rendre à bord ; mais quand il n'y a que négligence, les autres dispositions sont assez sévères.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je crois que telle n'a pas été l'intention des auteurs du projet et de la commission de la chambre, et que l'on a voulu que la négligence fût punie du maximum de la peine dans le cas prévu par le second paragraphe de l'article 19. Que le délit de désertion ait été commis d'ailleurs par refus ou par négligence de se rendre à bord, ses conséquences n'en sont pas moins graves.

Je ferai observer, quant à l'amendement, qu'il y avait un troisième paragraphe, qui a été retranché, de sorte que l'article a été réellement amendé.

M. Delfosse. - Remarquez bien que dans les autres cas le juge peut réduire la peine, il a le choix entre un maximum et un minimum; mais ici le juge est obligé d'appliquer le maximum de la peine et, dès (page 1374) lors, il serait trop rigoureux d'assimiler la simple négligence à un refus formel. J'engage M. le ministre de la justice à ne pas insister.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je n'insisterai pas, mais je ferai remarquer que la commission considérait la négligence comme étant un délit aussi grave que le refus.

Article 22

La suppression de l'art. 22 du projet primitif est mise aux voix et définitivement prononcée.

Article 27

« Art. 27. Sera puni d'une amende de 50 à 300 francs tout capitaine qui aura mis en mer sans rôle d'équipage, qui se sera soustrait aux obligations que lui imposent les règlements sur la police maritime, ou qui aura négligé l'exécution des mesures prescrites par les articles 224, 225, 226, 227 et 242 du Code de commerce. »

« La peine d'emprisonnement de six à quinze jours pourra de plus être prononcée. »

- Adopté.

Article 31

« Art. 31. Tout capitaine ou pilote chargé de la conduite d'un navire ou autre bâtiment de commerce ou de pêche, qui, volontairement et dans une intention criminelle, l'aura échoué, perdu ou détruit par tous moyens autres que celui du feu ou d'une mine, sera puni des travaux forcés à temps.

« S'il y a eu homicide par le fait de l'échouement, de la perte ou de la destruction du navire, la peine énoncée en l'article 437,paragraphe 2, du Code pénal, sera appliquée.

« Les officiers et gens de l'équipage, coupables de ces crimes, encourront les mêmes peines. »

M. Delfosse. - Messieurs, pour plus de clarté il serait bon d'ajouter après les mots : « L'article 437, paragraphe 2 », ceux-ci : « Premier alinéa. » Le paragraphe 2 commine deux peines; il ne peut être question que de la première, mais en matière pénale on ne saurait être trop clair.

M. Loos. - Messieurs , je désirerais présenter une observation essentielle sur l'article 27, qui vient d'être adopté. Je voulais demander le retranchement de la mention de l'article 242 du Code de commerce. Cet article impose une obligation civile, mais il ne peut pas être inséré dans une loi pénale. Il est une foule de circonstances où l'exécution de cet article...

- Des membres. - L'article n'a pas été amendé.

M. Loos. - La mention de l'article 242 a été ajoutée par la section centrale.

M. Delfosse. - Oui, mais la discussion a été ouverte sur le projet de la section centrale.

M. Loos. - Je pense que si la chambre trouve que mon observation est fondée, elle ne refusera pas d'y faire droit.

L'article 242 du Code de commerce impose au capitaine l'obligation de déposer son registre et de faire son rapport dans les 24 heures de l'arrivée, à défaut de quoi le capitaine est responsable envers les tiers. C'est là une obligation purement civile, et je crois que ce serait aller trop loin que de l'insérer dans un Code pénal.

Il est une foule de circonstances où le capitaine ne pourra pas remplir cette obligation. Je citerai, par exemple, les bateaux à vapeur, qui arrivent à une heure où il est impossible de déposer un registre de bord.

Il en est de même de certains petits navires, entre autres ceux qui arrivent sur lest, en ce moment-ci à Anvers : les capitaines de ces navires n'ont contracté avec personne en Belgique ; ils sont envoyés pour prendre un chargement, et leur rapport de mer est fort peu important. Je le répète, messieurs, l'article 242 du Code de commerce impose au capitaine des obligations civiles; il le rend responsable envers les tiers, mais je crois que la législation pénale n’a pas à intervenir. Ce serait imposer une gêne à la navigation, sans aucun profit pour la société, pour l'ordre public.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Nous avions d'abord pensé, messieurs, qu'il pouvait être utile d'insérer l’article 242 du Code de commerce dans la nomenclature des articles de ce Code dont il importe d'assurer l'exécution par une pénalité; mais, d'après les observations de l'honorable M. Loos, je crois qu'on pourrait, en effet, le retrancher. Il faut laisser au capitaine le soin d'apprécier si, pour sa responsabilité et dans l'intérêt de l'armateur, il doit remplir la formalité prescrite par l'article 242; lui imposer l'accomplissement de cette formalité sous peine d'amende et même d'emprisonnement, ce serait établir d'une manière trop absolue une prescription rigoureuse et gênante et assez dispendieuse. S'il ne s'agissait que de voyages de long cours, la mesure ne présenterait pas sans doute d'inconvénient; mais il est un grand nombre de navires qui ne font que le cabotage, qui naviguent à de très petites distances et qui reviennent encore deux fois par semaine au port d'armement ; ceux-là devraient donc remplir à chaque instant des formalités qui seraient complètement inutiles en ce qui les concerne.

Je pense donc, messieurs, qu'il vaut mieux retrancher dans l'article 27 la mention de l'article 242 du Code de commerce et laisser les choses dans le statu quo et sans innover à cet égard. Le capitaine et l'armateur apprécieront dans quelles circonstances ils doivent déposer le rapport de mer ; s'ils ne le font pas, eux seuls peuvent en être victimes, puisqu'ils ne peuvent alors, en cas d'avaries, exercer leurs droits à charge des assureurs.

M. Orts (pour un rappel au règlement). - Messieurs, les honorables préopinants peuvent avoir parfaitement raison; mais le règlement s'oppose formellement à ce que l’on revienne sur l'article dont il s'agit, alors même que ce serait pour réparer une bévue. Or le règlement doit être respecté : c'est le droit des minorités. L'article 45 du règlement porte :

« ... Seront soumis à une discussion et à un vote définitif les amendements adoptés et les articles rejetés. » Il ne s'agit ici ni d'un amendement adopté, ni d'un article rejeté. L'article ajoute :

« Il en sera de même des nouveaux amendements qui seraient motivés sur cette adoption ou ce rejet. Tous amendements étrangers à ces deux points sont interdits. »

Je conviens qu'il peut être très dur qu'au second vote on ne puisse pas réparer ce qu'on peut juger utile de réparer. Jamais la chambre, dans des circonstances analogues, n'a voulu enfreindre son règlement. Je ne citerai qu'un précédent. Lors du second vote de la loi sur la chasse, M. le ministre de l'intérieur est venu faire remarquer qu'une disposition contraire à l'esprit de la loi s'était glissée dans le projet lors du premier vote, et la chambre n'est pas revenue sur cette disposition.

Je demande que la chambre observe son règlement; le cas actuel a peu d'importance ; mais il s'agit de sauvegarder le principe.

M. Veydt, rapporteur. - Messieurs, je pense que la stricte application du règlement dans le cas actuel serait une mesure bien rigoureuse. Ce n'est pas sans de justes motifs que la chambre a consenti à remettre l’article 27 en délibération. Si on ne supprime pas la mention de l’article. 242 du Code de commerce, les observations dans le sens de celles qu'a faites l'honorable M. Loos, et que M. le ministre de la justice vient de corroborer, ne manqueront pas d'être reproduites au sénat; et si, comme tout porte à le croire, cette assemblée y fait droit, nous aurons à nous occuper une seconde fois du Code disciplinaire et pénal que nous discutons et que nous pouvons, aujourd'hui même, adopter définitivement.

Les dispositions du règlement sont-elles tellement absolues, qu'il soit interdit à la chambre de prendre en considération, au second vote, une observation reconnue fondée ? Ce serait vouloir trop lier la chambre. Je crois qu'on pourrait citer maintes circonstances où elle en a décidé autrement. Si j'ai insisté pour qu'on réimprimât toute la loi, c'était dans le but d'en revoir l'ensemble et de faire disparaître les légères erreurs ou incorrections qui auraient pu s'y glisser.

Je demande, messieurs, que vous n'admettiez pas le rappel au règlement proposé par l'honorable M. Orts. Comme on me le fait encore observer avec raison, il y a eu amendement à un paragraphe de l'article 27.

Je me renferme dans l'incident soulevé; je demanderai ensuite à dire quelques mots sur la suppression de la mention de l’article 242 du Code de commerce.

M. Loos. - Je répète que la disposition dont il s'agit est un amendement de la section centrale.

M. le président. - La discussion s'est ouverte sur le projet de la section centrale.

- Des membres. - Aux voix ! aux voix !

M. le président. - La proposition de M. Orts est qu'il n'y a pas lieu à délibérer.

M. Lebeau. - Messieurs, je fais tant de cas de l'exécution rigoureuse du règlement et du maintien de l’ordre qu'il prescrit pour nos délibérations, que j'appuierais avec empressement la proposition de l’honorable M. Orts, si nous étions en ce moment dans les véritables termes du règlement. Il est évident qu'il y a eu un amendement à la proposition ministérielle. (Interruption.)

On me fait observer que M. le ministre de la justice s'y était rallié avant la discussion ; mais cette manière d'entendre le règlement ne résulte que des précédents de la chambre, et c'est ce que le règlement n'a pas prévu. On peut donc, je pense, sans violer le règlement, rouvrir la discussion, à l'aide de cette circonstance, que ce n'est pas le projet ministériel, mais le projet amendé de la section centrale qui a été adopté au premier vote. S'il n'y avait cette considération, je me rallierais à la proposition de l'honorable M. Orts, quelque inconvénient que dût entraîner d'ailleurs l'exécution rigoureuse du règlement.

M. Orts. - L'honorable M. Lebeau se trompe quant au paragraphe sur lequel porte la rectification demandée par l'honorable M. Loos.

- La proposition de M. Orts, tendant à ne pas rouvrir la discussion, est mise aux voix et n'est pas adoptée.

En conséquence, la chambre rouvre la discussion sur l'article 27.

Personne ne demandant la parole, le retranchement dans l'article 27, de la mention « article 242 du Code de commerce » est mis aux voix et adopté.

Article 31

M. le président. - Nous revenons à l’article 31.

M. de Luesemans. - Pour faire droit à une observation de l'honorable M. Delfosse, on pourrait rédiger le second paragraphe comme suit :

« S'il y a eu homicide par le fait de l'échouement, de la perte ou de la destruction du navire, la peine, énoncée, pour le cas d'homicide, à l’article 437, paragraphe 2 du Code pénal, sera appliquée. »

- L'amendement, avec le sous-amendement, est mis aux voix et définitivement adopté.

Article 37

« Art. 37. L’attaque ou la résistance avec violence et voies de fait envers le capitaine, commise par plus du tiers de l'équipage, officiers et passagers compris, sera punie de la réclusion.

« Si les rebelles sont armés, ils seront punis des travaux forcés à temps.

(page 1375) « La réunion des rebelles est réputée armée du moment qu'il s'y trouve un homme porteur d'une arme ostensible.

« Les couteaux de poche entre les mains de marins rebelles seront réputés armes, par le fait seul du port ostensible . »

- Définitivement adopté.

Article 38

L'article 38 du projet primitif a été supprimé lors du premier vote. La chambre vote définitivement cette suppression.

Articles 57 et 58

« Art. 57. Dans tous les cas où la présente loi prononce la peine d'emprisonnement ou l'amende, les tribunaux, si les circonstances sont atténuantes, sont autorisés à réduire l'emprisonnement au-dessous de six jours et l'amende au-dessous de seize francs, sans qu'en aucun cas ces peines puissent être au-dessous de celles de simple police. »

- Définitivement adopté.


« Art. 58. Dans tous les cas où la présente loi prononce la peine des travaux forcés à temps ou celle de la réclusion, la cour d'assises pourra, si les circonstances sont atténuantes, et en exprimant ces circonstances, exempter le coupable de l'exposition publique, ou même commuer les travaux forcés, soit en réclusion, soit en un emprisonnement dont le minimum est fixé à six mois, et la réclusion en un emprisonnement qui ne pourra être au-dessous de huit jours. »

- Définitivement adopté.

Article 59

« Art. 59. Dans tous les cas où il y aurait lieu de ne prononcer qu'une peine correctionnelle, à raison soit d'une excuse, soit de circonstances atténuantes, et dans le cas où il y aurait lieu d'appliquer les articles 66 et 67 du Code pénal, la chambre du conseil pourra, à l'unanimité de ses membres, et par une ordonnance motivée, renvoyer le prévenu au tribunal de police correctionnelle.

« La chambre des mises en accusation pourra, à la simple majorité, exercer la même faculté.

« Le ministère public et la partie civile pourront former opposition à l'ordonnance de la chambre du conseil, conformément aux dispositions du Code d'instruction criminelle. »

M. Lelièvre propose de rédiger l'article ainsi qu'il suit :

« Dans tous les cas où il y aurait lieu de ne prononcer qu'une peine correctionnelle à raison de circonstances atténuantes, et dans le cas où il y aurait lieu d'appliquer les articles 66 et 67 du Code pénal, la chambre du conseil, etc. »

M. Lelièvre. - Mon amendement se rattachant à l'article 60, je prierai la chambre de vouloir discuter l'article 60 en même temps que l'article 59.

- Adopté.

Article 60

« Art.60. Le tribunal de police correctionnelle, devant lequel le prévenu sera renvoyé, ne pourra décliner sa compétence en ce qui concerne l'âge, l'excuse et les circonstances atténuantes.

« Il pourra prononcer un emprisonnement qui ne sera pas au-dessous des minimum fixés par l'article 57, et suivant les distinctions établies par cet article.

« Toutefois, dans le cas de l'article 67, paragraphe premier, du Code pénal, il statuera conformément à cette disposition.

« Dans tous les autres cas prévus par le même article et dans ceux de l'article 326 du même Code, il pourra prononcer un emprisonnement qui ne pourra être au-dessous de huit jours. »

M. Lelièvre. - L'article 59 et les paragraphes premier et 4 de l'article 60 supposent que les cas d'excuse définis par le Code pénal ordinaire s'appliquent aux crimes prévus par la loi dont nous nous occupons.

Cependant la lecture des articles 321, 322, 323, 324 et 325 du Code de 1810 démontre qu'il n'en est pas ainsi.

L'article 321 porte que le meurtre, ainsi que les blessures et les coups sont excusables s'ils ont été provoqués par des coups ou des violences graves envers les personnes.

Or, cet article n'est relatif à aucune disposition de la loi spéciale que nous traitons.

L'article 322 s'applique à l'hypothèse où l'on a repoussé l'escalade ou l'effraction.

L'article 323 concerne le parricide.

L'article 324 prévoit le cas de meurtre sur l'un des époux, alors que la vie de l'agent a été mise en péril, et celui où l'épouse a été surprise en flagrant délit d'adultère.

L'article 325 est relatif à une hypothèse qui n'a rien de commun avec le Code que nous rédigeons.

Il est donc évident que les cas d'excuse admis en matière ordinaire sont étrangers à la loi soumise à vos délibérations et qu'en conséquence on ne peut sous ce rapport adopter les dispositions législatives que nous avons sanctionnées récemment et qui sous peu doivent être promulguées.

On se convainc, du reste, en examinant les divers crimes que prévoit la loi en discussion, qu'il est impossible d'admettre, comme le suppose l'article 60 du projet, que les faits que celui-ci frappe de la peine de mort, des travaux forcés à perpétuité, ne peuvent être excusés d'après le droit commun, et qu'il est possible à leur égard de mitiger la peine en conformité de l'article 326 du Code pénal ordinaire.

Tels sont, messieurs, les motifs qui m'engagent à proposer les modifications que je vous soumets.

M. Delfosse. - Au troisième paragraphe de l'article 60, au lieu du paragraphe premier article 67 du Code pénal, il faut dire « paragraphe 2 ». (Adhésion.)

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - C'est l'honorable M. Lelièvre qui a proposé d'introduire dans la loi les articles 57, 58, 59 et 60. Il propose maintenant de les modifier; il me serait difficile de dire s'il n'y a pas d'inconvénient A retrancher tous les cas d'excuse; l'honorable membre prétend que parmi les crimes et délits prévus par la présente loi, il n'en est pas qui pussent, dans certaines conditions, être déclarés excusables d'après les dispositions du Code pénal.

Je ne pourrais pas répondre immédiatement à cette question. En laissant subsister en termes généraux les dispositions empruntées à la loi sur la composition des cours d'assises qu'on a insérées dans le projet actuel, si quelques crimes ou délits peuvent être déclarés excusables le juge appliquera ces dispositions; s'il était vrai, au contraire, que le cas de les appliquer ne put pas se présenter il n'en pourrait jamais résulter aucun inconvénient.

Il me paraît donc qu'il est préférable de laisser subsister ces articles extraits de la loi sur les cours d'assises dans les termes généraux dans lesquels ils ont été votés.

M. Lelièvre. - Un examen plus attentif m'a convaincu de la nécessité de soumettre à la chambre la légère modification que je propose, et cela pour ne pas admettre la supposition inadmissible que les cas d'excuse définis par le droit commun s'appliquent tous aux crimes prévus par la loi que nous discutons. Cependant, messieurs, telle est nécessairement la portée du paragraphe 3 de l'article 60, comme le prouvent les expressions et dans ceux de l'article 326 du même Code,

Il me semble donc convenable d'adopter la rectification énoncée en mon amendement et que je vous soumets parce qu'à mon avis elle améliore la disposition admise en premier lieu.

- Les amendements proposés par M. Lelièvre ne sont pas appuyés.

Les articles 57, 58, 59 et 60 sont confirmés.

Article 61

L'article 61 est également confirmé.

Article 67

« Art. 67. Dans les cas prévus par la présente loi, et par dérogation à l'article 638 du Code d'instruction criminelle, l'action publique et l'action civile ne se prescriront qu'après cinq années révolues, à compter du jour où le délit a été commis. »

M. Orts. - Le projet détermine les délais de la prescription pour les délits, mais non pour les crimes ; or, la loi s'occupe non seulement de délits, mais aussi de crimes; et le terme de cinq ans, convenable pour la prescription d'un délit, serait évidemment insuffisant pour la prescription d'un crime. Je pense donc que le projet, sous ce rapport, devrait être complet.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - L'article 43 répond à l'observation de M. Orts.

L'article 43 porte que « les tribunaux correctionnels et les cours d'assises connaîtront des délits et crimes maritimes d'après les prescriptions des lois en vigueur. »

Il résulte donc de cet article que les règles ordinaires du droit commun en matière de prescription seront applicables aux crimes maritimes, puisqu'il n'y est pas dérogé. Si nous avons prolongé le délai de la prescription pour l'action résultant d'un délit, délai qui, d'après le Code d'instruction criminelle est de trois années c'est que ce délai, dans certaines circonstances aurait pu n'être pas suffisant; pour les crimes, au contraire, le délai est de dix ans, il était donc inutile de l'étendre.

M. Lelièvre. - Lors de la discussion, j'avais proposé le même amendement que celui annoncé par l'honorable M. Orts, en énonçant que les dispositions du Code d'instruction criminelle, relatives à la prescription des crimes et délits, seraient applicables aux faits de même nature prévus par la présente loi.

M. le ministre de la justice et la section centrale ont pensé que cet amendement était inutile et que le projet actuel, ne dérogeant pas sur ce point aux principes du droit commun, les adoptait nécessairement.

La chambre en admettant cet avis, lors du premier vote, a donc reconnu la doctrine que M. Orts vous propose de consacrer.

D'un autre côté, j'avais pensé qu'il était impossible de faire courir la prescription à partir de l'acte incriminé, par la raison que la poursuite ne pouvait être immédiatement exercée, et que dès lors un autre point de départ du cours de la prescription devant être fixé, la section centrale a fait droit à cette observation, en proposant l'article tel qu'il a été admis au premier vote et prolongeant à cinq années le terme pendant lequel l'action pour délit peut être introduite.

Le délai de la prescription pour les crimes étant de dix années, on a pensé que cet intervalle était suffisant dans toutes les hypothèses quelconques.

Il me semble que les dispositions admises ne laissent rien à désirer et satisfont à toutes les exigences ; elles confirment, du reste, le principe que le droit commun doit être observé en règle générale, puisque l'article que nous discutons en ce moment est déclaré formellement constituer une exception.

M. Orts. - D'après ce qu'a dit M. le ministre de la justice, et du moment que c'est entendu, je n'insiste pas.

- L'article 67 est adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

Il est procédé au vote par appel nominai sur l'ensemble du projet.

En voici le résultat :

Nombre des votants, 85.

81 votent pour l'adoption :

4 votent contre.

La chambre adopte.

Ont voté l'adoption : MM. Delfosse, de Liedekerke, Deliége, de Luesemans, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, de Perceval, de Pilleurs, De Pouhon, de Renesse, de Royer, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dolez, Dubus, Dumont, Faignart, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Jullien, Julliot, Lange, Lebeau, Le Hon, (page 1376) Loos, Manilius, Mascart, Mercier, Moncheur, Orts, Osy, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Schumacher; Sinave, Tesch, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Van den Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, Anspach, Boulez, Bruneau, Cans, Christiaens, Cools, Coomans, Cumont, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, Debroux, Dechamps, de Chimay, Dedecker, de Haerne et Verhaegen.

Ont voté contre : MM. Lelièvre, Lesoinne, Moxhon et H. de Brouckere.

Propositions de loi relatives au droit sur les sucres

Second vote des articles

Article premier

La discussion est ouverte sur l'article premier, ainsi conçu :

« Art. 1er. Le droit d'accise est fixé à 45 francs par 100 kilogrammes de sucre brut de canne, et à 3 fr. par 100 kilogrammes de sucre brut de betterave. »

M. De Pouhon lit un discours où il donne les motifs de son vote qui sera défavorable au projet de loi.

M. le président interrompt cette lecture en faisant remarquer qu'il n'y a eu d'amendement dans l'article premier que sur la quotité du droit, et que le discours embrasse l'ensemble du projet.

- La chambre autorise l'insertion du discours dans les Annales parlementaires.

- L'article premier est mis aux voix et adopté.

Article 2

« Art. 2. A partir du 1er janvier de chaque année, les raffineurs jouiront d'un crédit de 6 mois pour les droits résultant des quantités de sucre brut de canne ou de betterave inscrites à leurs comptes, si elles restent au-dessous de 500,000 kilogrammes.

« Pour toutes les quantités supérieures, ce crédit sera réduit à quatre mois.»

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je propose de supprimer les mots : « A partir du 1er janvier de chaque année ». Plusieurs membres de la chambre font une observation sur ces mots. Ils ne prêtent pas à l'équivoque; mais ils ne sont pas utiles non plus. On peut commencer l'article par ces mots : « Les raffineurs jouiront, etc. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 3

« Art 3. Sont admis à l'exportation :

« a. Les sucres en pains, mélis ou lumps blancs, bien épurés et durs, sans teinte rougeâtre ou jaunâtre et dont toutes les parties sont adhérentes et non friables, et le sucre candi à larges cristaux clairs et secs.

« Les sucres raffinés en pains, mélis et lumps, destinés à l'exportation, pourront être piles ou concassés dans les entrepôts publics désignés à cet effet. La quantité et la qualité des sucres à piler ou à concasser seront vérifiées avant leur admission dans les entrepôts. Ceux qui ne réuniraient pas les qualités spécifiées ci-dessus ne seront pas emmagasinés.

« b. Tous autres sucres raffinés, tels que sucre raffiné en poudre, dit cassonade, sucre candi, dit manqué, à petits cristaux, humides, revêtus de croûtes, et sucre en pains de teinte rougeâtre ou jaunâtre.

« c. Les sirops provenant du raffinage du sucre brut de canne ou de betterave, à l'exclusion des mélasses. »

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, on paraît d'accord pour considérer tout le projet comme amendement; car il est entièrement imprimé en italique. C'est, je pense, une erreur; il n'y a pas eu d'autre projet soumis à vos délibérations que celui qui est actuellement présenté.

Mais enfin, puisqu'il en est ainsi, je demande qu'on veuille bien placer au paragraphe a le mot « raffinés », et dire : « Les sucres raffinés, etc. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 4

« Art. 4. Les morceaux, dits croûtes, provenant de la fabrication du sucre candi, seront cependant admis dans la catégorie A, pourvu que la quantité ne dépasse pas le tiers de la partie intégrale déclarée à l'exportation, et sous la condition que les croûtes renfermées dans une même caisse soient reconnues provenir d'une même fabrication et soient d'une même teinte et qualité que le sucre sans croûtes que contient le restant de la caisse. »

M. Veydt. - Le mot « intégrale » peut être supprimé ; il est inutile, et, déplus, il a l'inconvénient de n'être pas français dans l'acception qu'on lui a donnée.

- La suppression est adoptée.

L'article, ainsi modifié, est complètement adopté.

Article 5

« Art. 5. La décharge de l'accise à l'exportation, en apurement des prises en charge inscrites aux comptes à partir du 1er juillet 1849, est fixée par 100 kilogrammes comme il suit :

« 1° A 66 fr. pour les sucres candis;

« 2° A 64 francs pour les sucres de la catégorie A, provenant de sucre brut de canne ou de betterave ;

« 3° Au moulant de l'accise pour les sucres de la catégorie B, provenant de sucre brut de canne ou de betterave ;

« 4° A 15 fr. pour les sirops provenant de sucre brut de canne, et à 15 fr. pour les sirops provenant de sucre brut de betterave.

« Toutefois, la décharge sera réduite de la manière suivante :

« 1° Pour les sucres candis, de 66 à 65 francs au 1er juillet 1850 et à 64 francs au 1er juillet 1851;

« 2° Pour les sucres mélis ou lumps, de 64 à 63 francs au 1er juillet 1850, et à 62 francs au 1er juillet 1851.

« Elle ne sortira ses effets que pour les prises en charge inscrites aux comptes, respectivement à partir de chacune de ces époques. »

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il y a lieu de faire quelques modifications à l'article 5 Je propose de dire :

« 1° A 66 fr. pour les sucres candis, et à 64 fr. pour les sucres de la catégorie a, provenant du sucre brut de canne ou de betterave;

« 2° Au montant de l'accise, etc.

« 3° A 15 fr. pour les sirops, etc. »

M. Loos. - Messieurs, depuis le vote émis sur l'article 8, par lequel on assure les droits du trésor d'une manière plus complète encore que ne le fait l'article 7, je crois que le but fiscal du dernier paragraphe de l’article 5 vient à disparaître. La chambre ne pouvait donc avoir en vue, en maintenant le paragraphe, qu'un but industriel, c'est-à-dire d'élever le rendement d'une manière définitive, quels que soient les événements qui puissent surgir et qui pourraient influer sur l'industrie; la chambre a voulu une progression du rendement d'abord à dater du 1er juillet 1850, et ensuite à dater du 1er juillet 1851.

Je conçois que beaucoup de membres de cette chambre se soient réunis pour adopter ce dernier paragraphe, alors qu'il pouvait avoir pour effet d'assurer le produit de l'impôt. Mais depuis que, sur la proposition de la section centrale, la chambre a voté l’article 8, ce but vient complètement à disparaître; il ne reste plus que le but industriel.

Sous ce rapport, je crois qu'il y aurait imprudence à se lier les mains par la loi, à rendre obligatoire l'élévation du rendement à partir du 1er juillet 1850, pour l'élever encore au 1er juillet 1851.

J'ai déjà dit qu'à mon point de vue, il y avait contradiction à vouloir forcer d'une part les industriels à établir des perfectionnements dans leurs usines et à leur faire d'autre part entrevoir le bouleversement de la loi dans un temps peu éloigné. Il y a là une obligation à laquelle les industriels ne peuvent satisfaire sans s'exposer à se ruiner. Car ils ne peuvent prévoir quels seront les sentiments de la chambre d'ici à deux ans ; c'est à peu près le terme qu'on assigne à la durée de la loi. La plupart des orateurs qui ont parlé dans cette discussion et qui voulaient aggraver la position de l'industrie des sucres, ont dit que c'était une loi en quelque sorte transitoire. Eh bien, je dis que vouloir forcer les industriels à opérer des perfectionnements dans leurs usines alors qu'ils ne savent pas si ces perfectionnements leur seront utiles dans deux ans, c'est leur faire violence sans profit pour personne.

Je dis sans profit pour personne, Car en définitive ce sont les industriels qui sont les premiers juges de ce qui convient à leurs intérêts.

Le gouvernement voulait élever le produit de l'accise, la chambre a adopté un chiffre plus élevé encore que celui qui avait été proposé par le gouvernement; je comprends fort bien que pour faire rentrer le chiffre adopté, on ait recours à différents moyens, et le dernier paragraphe de l’article 5 est un de ces moyens; mais il n'est plus nécessaire aujourd'hui, que vous avez les articles 7 et 8.

Cela se réduit donc, comme je l'ai dit, à une question industrielle. Eh bien, je crois que c'est la première fois que la chambre aura voulu régler l'industrie et ce n'est pas là ce que doit faire le législateur. C'est aux industriels de savoir s'il leur convient, dans leur intérêt, de changer, d'améliorer leur fabrication. Vous pouvez leur imposer des droits plus élevés, vous pouvez leur dire par exemple: « D'ici à 2 ans vous payerez 4 millions » mais dire aux industriels : «Vous dépenserez des sommes considérables pour perfectionner votre travail, quelles que soient les circonstances qui peuvent se présenter en Europe, » c'est ce que la chambre ne peut pas faire. Pouvez-vous, messieurs, ordonner aux industriels de faire une dépense de 100,000 ou 150,000 fr. dans leurs usines, alors qu'ils pourraient n'être pas rassurés seulement sur leur propriété? Je dis qu'il y a là quelque chose d'inique, quelque chose qui n'a pas d'antécédent, et j'espère que la chambre voudra bien revenir sur son premier vote et retrancher le dernier paragraphe de l’article 5.

M. Cools. - Messieurs, les paroles de l'honorable membre reviennent au langage que vous avez entendu chaque fois que la question des sucres a été agitée. Que vous a-t-on dit dans toutes les discussions qui ont eu lieu sur cette matière? Donnez-nous la prime la plus forte; sans cela, nous ne pouvons pas exister. Heureusement que le nombre des personnes qui soutiennent cette thèse va tous les jours en diminuant, et nous avons déjà remarqué qu'elle est abandonnée par MM. les représentants de Gand.

Vous avez entendu, en effet, au premier vote, les députés de Gand, MM. Manilius et Delehaye, venir dire l'un après l'autre: « Maintenant que vous voulez une recette de 3,500,000 fr., il faut une faible décharge, en d'autres termes, le rendement le plus élevé possible; il faut passer par là, car c'est à présent une condition de progrès pour le sucre. » C'est une déclaration que j'ai acceptée avec plaisir : il n'y a, en effet, qu'un moyen de faire faire des progrès à l'industrie, c'est de forcer tout le monde à marcher, c'est de mettre les fabricants dans la nécessité d'introduire dans leur travail toutes les améliorations possibles.

Cette vérité est parfaitement comprise par le gouvernement, car c'est lui qui a présenté cette disposition, que je considère comme la meilleure de tout le projet. Le gouvernement dit : « Nous commencerons par la décharge de 64 fr., mais plus tard nous irons plus loin; nous vous donnerons du temps, vous avez deux années devant vous, avant que nous arrivions au rendement de la Hollande, mais il faut que vous y arriviez.

(page 1377) Nous ne réduirons maintenant la décharge que de deux francs, mais d'ici à deux ans elle sera encore réduite successivement de deux autres francs.

Messieurs, on veut revenir sur ce système, et que nous demande-t-on? On nous demande tout bonnement une impossibilité. Je vais le démontrer.

Vous auriez beau adopter la proposition. que vous n'auriez encore rien décidé du tout. Qu'est-ce que c'est que cette décharge de fr. 64 pour produire 3,500,000 fr.? Vous avez aujourd'hui une décharge de 66 fr. et jamais vous n'avez pu produire avec une pareille décharge, d'une manière normale, une recette de 3 millions, car il est reconnu que cette recette n'a été produite qu'au moyen d'anticipations.

J'ai encore fait des calculs pour les trois derniers trimestres connus et il en résulte que si le quatrième trimestre, celui dans lequel nous nous trouvons, répond aux trois autres, vous n'aurez encore une fois au 1er juillet prochain qu'une recette de 2 millions et 4 ou 5 cent mille fr. Tout cela ne présente plus aucun danger, parce qu'il y est mis ordre par le système qui a prévalu. Mais il n'en est pas moins vrai qu'avec une décharge de 64 fr. vous pourrez à peine obtenir d'une manière régulière 3,000,000 de fr. Et cependant que vous demande-t-on? De maintenir une décharge de 64 fr. pour obtenir une recette de 3,500,000 fr. Quelle serait la conséquence de ce système? C'est que d'ici à un terme très rapproché, un an ou 18 mois, vous n'auriez plus de quoi compléter la somme de 3,500,000, Je ne veux pas assigner une époque fixe, mais il est évident qu'en couvrant tous les déficits successifs par des répartitions, vous n'auriez plus d'ici à très peu de temps le moyen de parfaire les 3,500,000 fr.

Si la motion de l'honorable M. Loos passait, il devrait venir immédiatement après: proposer la suppression de la garantie que l'article 8 donne au trésor ; mais je ne pense pas que cette proposition serait faite, parce que l'on saurait d'avance qu'elle n'obtiendrait pas d'accueil. L'article 8 restera donc entier et dès lors ce que vous auriez décidé ici n'aurait aucun effet : vous auriez beau dire : « La décharge ne descendra pas régulièrement, » la force des choses nous forcerait toujours de faire usage de l'article 8 et de la faire descendre au-dessous du taux que vous auriez fixé à l'article 5.

Je pense en avoir dit assez, messieurs, pour démontrer que la proposition de l'honorable M. Loos ne peut pas être admise.

M. Loos. - Messieurs, l'honorable M. Cools est venu confirmer tout ce que j'ai dit. L'honorable M. Cools a dit qu'il ne comprendrait pas la suppression du dernier paragraphe de l'article 5, A moins qu'on ne vînt aussi demander l'abrogation de l'article 8. Mais, messieurs, ce serait un piège que j'aurais tendu à la chambre. Comment ! je viendrais demander la suppression du dernier paragraphe de l'article 5 en m'appuyant sur l'article 8 et je viendrais ensuite demander la suppression de cet article comme une conséquence de l'adoption de ma première proposition! La chambre sans doute ne me croit pas capable d'une semblable manière de procéder. Je dis que le dernier paragraphe de l'article 5 est complètement inutile depuis qu'on a adopté l'article 8. M. Cools veut prouver qu'il est impossible d’obtenir une recette de 3,500,000 fr. avec les dispositions adoptées, si l'on ne maintient pas en même temps le dernier paragraphe de l'article 5. Mais je réponds : en ce cas, d'après l'article 8, vous abaisserez la décharge de 25 centimes par chaque somme de 25,000 fr. au moins; pour chaque centaine de mille francs qui manquera vous réduirez la décharge d'un franc. Vous arriverez ainsi, pour autant que M. Cools puisse avoir raison, à l'application réelle des dispositions du paragraphe final de l'article 5.

Ainsi, je ne demande pas à la chambre de revenir sur l'article 8. L'article 8 opérera si l'honorable M. Cools est dans le vrai, c'est-à-dire si les 3,500,000 fr. ne sont pas produits ; l'article 8 n'opérera pas, si, contrairement aux prévisions de l'honorable M. Cools, les 3,500,000 francs sont produits.

Dès lors, d'une part, garantie pour le trésor que, dans tous les cas, les 3,500,000 francs seront produits; mais d'un autre côté, si l'industrie ne s'arrangeait pas de manière que la loi, fonctionnant dans des conditions normales, produisît 3,500,000 francs, l'article est là comme correctif; on élèvera le rendement ou l'on abaissera la décharge, comme je l'ai dit.

Je m'attendais à ce que l'honorable M. Cools aurait combattu les observations que j'ai eu l'honneur de présenter; mais comme il n'a nullement rencontré les arguments que j'avais posés devant la chambre pour demander la suppression de l'article, je crois inutile d'y revenir.

- Des membres. - Aux voix ! aux voix !

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je serai très bref.

Je ne puis partager l'opinion exprimée par l'honorable M. Cools, qui se place à un point de vue essentiellement faux, lorsqu'il suppose que le dernier paragraphe de l'article 5 a pour objet exclusif de mieux assurer la recette dans le système de la proposition du gouvernement qui a été adopté.

Il n'en est pas ainsi. Il est indubitable qu'avec la réduction successive de la décharge ou le maintien de la décharge au taux fixe de 64 francs, la recette de 3,500,000 francs sera assurée par les moyens écrits dans les articles 6, 7 et 8. Il n'y a donc pas à s'arrêter aux craintes manifestées par l'honorable membre mais le gouvernement, lorsqu'il a proposé une décharge successive, s'est préoccupé d'un intérêt non moins important que celui du trésor: c'est celui d'assurer l'effet complet de la loi; or, l'effet de la loi ne serait pas complet, si la réduction de la décharge n'était pas successive, parce que le mouvement commercial qu'on veut obtenir ne serait pas aussi considérable; on élève le mouvement commercial, à mesure qu'on diminue la décharge. C'est pour ce motif que la disposition a été insérée dans le paragraphe, et c'est pour ce motif aussi que je ne puis pas me ralliera l'amendement de l'honorable M. Loos.

M. le président. - Personne ne demandant plus la parole, nous passons au vote.

M. le ministre des finances a proposé à l'article 5 un simple changement consistant à comprendre les n°1° et 2° dans un seul n°.

- Adopté.

M. Loos. - J'ai demandé la suppression du dernier paragraphe de l'article 5.

- Cette proposition, qui est appuyée, est mise aux voix et n'est pas adoptée.

M. Loos. - J'ai à présenter un autre amendement.

- Des membres. - Il est trop tard ; la clôture a été prononcée.

M. H. de Brouckere. - Messieurs, il s'agit d'un article auquel bon nombre d'industriels attachent une haute importance. Est-ce trop que de demander un moment d'attention à la chambre? Le vote suivra immédiatement les paroles de l'honorable membre.

M. Loos.-— Je me borne à présenter le nouvel amendement-qui est ainsi conçu :

« Le gouvernement pourra, à raison des circonstances, suspendre l'effet du dernier paragraphe de l'article 5, sauf à en rendre compte aux chambres, dans leur première réunion. »

- L'amendement, qui est appuyé, est mis aux voix et n'est pas adopté.

L'article 5 est définitivement adopté.

Article 6

« Art. 6. Le produit de l'accise sur le sucre de canne et sur le sucre de betterave est fixé au minimum à 875,000 fr. par trimestre.

« Si à l'expiration de chaque trimestre, à partir du 1er octobre 1849, ce minimum n'est pas atteint, la somme composant le déficit sera répartie par le ministre des finances au marc le franc des termes ou des fractions des termes de crédits ouverts aux comptes des raffineurs et fabricants-raffineurs et non échus au dernier jour du trimestre.

« Ne sera point comprise parmi les éléments de la répartition la décharge afférente aux quantités de sucre raffiné ou de sirop, pour lesquelles il aura été délivré, pendant le trimestre, des permis d'exportation ou de dépit de sucres raffinés en entrepôt public, alors même que ces documents ne seraient pas rentrés, dûment déchargés, au dernier jour dudit trimestre. »

M. Jacques. - Messieurs, je trouve que la rédaction de l'article 6 laisse à désirer sous plusieurs rapports, et je crois devoir déposer sur le bureau une nouvelle rédaction pour les deux premiers paragraphes.

D'abord au second paragraphe, on dit : « Si à l'expiration de chaque trimestre, à partir du 1er octobre 1849; » on pourrait croire, par cette indication « à partir du 1er octobre 1849, » que le minimum n'est exigé que pour le quatrième trimestre de l'année courante, tandis que, dans la pensée de tout le monde, il doit être exigé pour le trimestre qui commence le 1er juillet prochain. Je crois donc qu'il vaudrait mieux commencer l'article par ces mots : « A partir du 1er juillet 1849, le produit, etc. »

Je propose aussi de dire : « Le produit de l'accise sur les sucres, » sans indiquer le sucre de canne et de betterave, parce que la loi de 1843 a prévu qu'on pourrait percevoir des droits d'accises sur des sucres fabriqués avec d'autres substances que la betterave. En disant le droit d'accise sur les sucres, on n'exclura pas l'application de la loi de 1843, si tant est qu'on arrive à cette application.

Dans l'article 6 rien n'explique d'une manière claire et positive que les sommes réparties viennent en déduction des crédits dont les raffineurs restaient chargés : c'est une lacune qu'il est bon de faire disparaître.

On dit aussi dans l'article, « le déficit sera reparti par le ministre des finances au marc le franc des termes ou des fractions des termes de crédits ouverts aux comptes des raffineurs, etc. »

Or, il est de règle que quand on fait une répartition au marc le franc, on peut élever la répartition même au-dessus des sommes que l'on prend pour base; c'est ce qui arrive nécessairement lorsque la somme à répartir est plus forte que celles qui servent de base à la répartition.

Cependant, d'après les explications données dans les dernières séances, l'on doit prévoir le cas où tous les crédits ouverts ne seraient pas aussi élevés que le déficit à répartir. Il importe dès lors de ne pas s'exposer, par une rédaction incomplète, à devoir répartir sur les raffineurs des sommes qui dépassent leurs redevances. Je pense que la rédaction suivante satisfera à ces diverses observations et qu'elle a le mérite de faire connaître d'une manière claire que les sommes à payer par les raffineurs seront imputées sur leurs comptes.

Voici l'amendement que je dépose sur le bureau :

« Art. 6. A partir du 1er juillet 1849, le produit de l'accise sur les sucres est fixé au minimum à 875,000 francs par trimestre.

« Si, à l'expiration de chaque trimestre, ce minimum n'est pas atteint, la somme composant le déficit sera recouvrée par anticipation sur les crédits ouverts aux raffineurs et fabricants-raffineurs : cette somme sera répartie par le ministre des finances au marc le franc des termes ou des fractions des termes de crédits qui n'étaient ni apurés ni échus au dernier jour du trimestre.

« Ne sera point comprise, etc..... »

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban) - Je trouve cet amendement (page 1378) inutile. Je pense que pour personne il ne peut y avoir le moindre doute sur le sens de la disposition; elle ne prête à aucune équivoque.

Une disposition de la loi fixe la décharge à partir du 1er juillet 1849 ; l'article 6 dit que si, à l'expiration de chaque trimestre, à partir du 1er octobre 1849, le minimum n'est pas atteint, etc.; il est clair que le 1er octobre 1849 indique l'expiration du premier trimestre.

Il n'y a aucune espèce de raison pour admettre la modification proposée.

- L'amendement proposé par M. Jacques est mis aux voix. Il n'est pas adopté.

L'article 6 est définitivement adopté.

Article 7

« Art. 7. La quote-part assignée, dans la répartition prescrite par l'article 6, à chaque raffineur ou fabricant-raffineur, devra être acquittée, nonobstant toute opposition, dans les dix jours, au plus tard, qui suivront l'avertissement à délivrer par le receveur du bureau où les comptes sont établis.

« Sans préjudice des poursuites ordinaires en recouvrement de cette redevabilité, aucun permis d'exportation ou de dépôt de sucres raffinés en entrepôt public ne pourra être délivré aux raffineurs et fabricants-raffineurs, après l’expiration du délai fixé par le paragraphe précédent, aussi longtemps qu'ils ne se seront pas libérés.

« Les droits payés par les raffineurs ou fabricants-raffineurs, entre le premier jour du trimestre et la date de l'avertissement, viendront en déduction de leur quote-part. »

- Adopté.

Article 8

« Art. 8. Dans le cas où le montant des termes ou des fractions de termes de crédit ouverts aux comptes des raffineurs et fabricants-raffineurs, et non échus au dernier jour du trimestre ne couvrirait pas le déficit constaté dans les recettes du même trimestre, le gouvernement réduira la décharge pour les sucres de la catégorie A, de 25 centimes pour chaque somme de 25,000 francs existant en moins dans les comptes comparativement au déficit, sans avoir égard aux taux établis par le dernier paragraphe de l'article 5.

« Quand la décharge aura été réduite au-dessous de 62 fr., elle sera portée à ce taux, si la moyenne des recettes constatées pendant 2 années consécutives s'élève à plus de 4,000,000 de fr. »

M. Cools. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

Je crois que la chambre a assez fait connaître son intention de ne pas revenir sur le principe que cet article consacre. Loin de moi l'idée de le lui proposer. Cependant, après avoir examiné le texte à tête reposée, j'ai reconnu qu'avec sa rédaction actuelle, il présente pour le commerce d'exportation de certains dangers qui n'apparaissent pas au premier abord, mais qui se révéleront peut-être, quand on en viendra à l'exécution.

Il est 4 heures et demie... (Interruption.)

Je crois qu'on peut faire disparaître ces dangers éventuels par un simple changement de rédaction ; mais j'aurais besoin d'entrer dans quelques développements pour en faire apprécier les motifs par la chambre. Je préférerais que la discussion fût renvoyée à demain. (Nouvelle interruption.) Si on le désire, je donnerai immédiatement quelques explications, mais je réclamerai alors pour quelques instants l'attention de la chambre.

- Plusieurs voix. - Proposez vos changements.

M. Cools. - Voici la rédaction que je propose de substituer à celle du projet :

« Dans le cas où le montant des termes de crédits, ouverts aux comptes des raffineurs et fabricants raffineurs, et non échus au dernier jour du trimestre, ne couvrirait pas le déficit constaté dans les recettes du même trimestre, mais laisserait subsister dans les comptes une différence en moins d'une somme égale ou supérieure à 25,000 francs, comparativement à ce déficit, le gouvernement réduira la décharge de 25 centimes pour les sucres de la catégorie A.

« Si la différence en moins dépassait le chiffre de 25,000 francs d'une somme qui fût au moins égale à ce chiffre, l'excédant sur la première somme de 25,000 francs sera dans ce cas réparti sur le trimestre suivant et servira à établir les comptes de ce trimestre. »

Si cet amendement était adopté, il y aurait lieu d'introduire également un article dans les dispositions transitoires. (Aux voix! aux voix!)

Je conçois l'impatience de la chambre de terminer cette longue discussion ; mais je crois de mon devoir de lui faire remarquer qu'il faut de toute manière introduire un changement dans l'article 8.

Cet article ne dit pas ce qu'on fera quand nous serons arrivés au rendement hollandais, au rendement de 72 1/2, et c'est là une lacune. Je suppose qu'en ce moment-là, il y ait une différence de 400,000 fr,. vous devez tout d'un coup descendre la décharge d'un franc pour un seul trimestre, sans même essayer de marcher avec le rendement de 72 et demi.

Je dis qu'il y a là un danger. Si la chambre veut passer outre, libre à elle.

- L'amendement n'est pas appuyé.

L'article 8 est adopté.

Articles 9 et 10

« Art. 9. Seront soumises au taux de la décharge réglée en exécution de l'article 8, les prises en charge ouvertes aux comptes des raffineurs au moment de la publication de l'arrêté royal.

« Toutefois, le montant de l'accise à porter en décharge aux comptes, du chef des permis d'exportation ou de dépôt en entrepôt, levés avant la date de l'arrêté, sera calculé d'après le taux de la décharge précédente, si l'exportation a été consommée ou le dépôt effectué avant ladite publication. »

- Adopté.


« Art. 10. Lorsque la moyenne des prises en charge de sucre brut de betterave inscrites aux comptes des fabricants pendant deux années consécutives, du 1er juillet d'une année au 1er juillet de l'année suivante restera au-dessous de 4,300,000 kilogrammes, le droit d'accise sera diminué d'un franc pour chaque quantité de 100,000 kilogrammes produite en moins, sans qu'il puisse, en aucun cas, être inférieur à 33 francs par 100 kilogrammes. Ce droit sera augmenté annuellement dans la même proportion pour chaque quantité de 100,000 kilogrammes excédant celle de 3,900,000 kilogrammes jusqu'à ce qu'il ait atteint de nouveau le maximum de 37 francs par 100 kilogrammes.

« Le montant des prises en charge sera constaté, à l'expiration du premier semestre de chaque année, par un arrêté royal qui fixera le taux de l'accise et dont les dispositions seront appliquées aux prises en charge inscrites aux comptes des fabricants le lendemain de sa publication. »

- Adopté.

Articles 11 à 14 (Dispositions transitoires)

« Art. 11. Les sucres bruts de betterave, placés sous le régime de l'entrepôt fictif au 1er juillet 1849, seront passibles de l'impôt établi au moment où ils ont été emmagasinés, quelle que soit l'époque à laquelle ces sucres seront déclarés en consommation. »

- Adopté.


« Art. 12. Par dérogation à la loi du 26 mai 1848 (Moniteur du 30, n°151), le gouvernement soumettra aux chambres législatives, dans leur session ordinaire de 1851-1852, les mesures de surveillance en vigueur aujourd'hui pour assurer l'efficacité des prises en charge aux comptes des fabricants de sucre de betterave et de glucoses, et celles qu'il établira pour la vérification et la justification des sucres et sirops de canne et de betterave, présentés à l'exportation avec décharge de l'accise.

« Les autres dispositions de l'article premier de la loi du 16 mai 1847 (Moniteur du 20, n°140) sont maintenues. »

- Adopté.


« Art. 13. Si les recettes perçues sur le sucre de canne et sur le sucre de betterave, du 1er juillet 1848 au 30 juin 1849, n'atteignent pas la somme de 3,000,000 de francs, la somme composant le déficit sera recouvrée de la manière indiquée aux articles 6, 7, paragraphes 1, 2 et 8. »

- Adopté.


« Art. 14. Les dispositions de l'article 2 de la présente loi recevront leur exécution à partir du 1er juillet 1849. Les quantités inscrites aux comptes des raffineurs depuis le 1er janvier, même année, serviront à déterminer le crédit de 6 ou de 4 mois qui pourra leur être accordé.»

- Adopté.

Article 15

« Art. 15. Le paragraphe 2 de l'article 43 de la loi du 4 avril 1843 (Bulletin officiel, n°22), et la loi du 17 juillet 1846 (Moniteur du 18, n°199), sont rapportés. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

En voici le résultat :

84 membres prennent part au vote.

68 votent pour l'adoption ;

16 votent contre.

La chambre adopte.

Ont voté pour l'adoption : MM. Delfosse, de Liedekerke, Deliége, de Luesemans, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, de Pilleurs, de Renesse, de Royer, d’Hoffschmidt, d'Hont, Dolez, Dubus, Dumont, Faignart, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Jullien, Lange, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Manilius, Mascart, Mercier, Moncheur, Moxhon, Orts, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Schumacher, Tesch, Thibaut, Thiéfry, Toussaint, Tremouroux, Van Cleemputte, Van den Berghe de Binckum, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, Anspach, Boulez, Bruneau, Christiaens, Cools, Cumont, de Baillet-Latour, de Breyne, de Brouckere (Henri), Debroux, Dedecker, de Haerne et Verhaegen.

Ont voté contre : MM. de Perceval, De Pouhon, Julliot, Loos, Osy, Reyntjens, Sinave, T'Kint de Naeyer, Van den Branden de Reeth, Veydt, Cans, Coomans, David, de Baillet (Hyacinthe), de Brouckere (Charles) et de Brouwer de Hogendorp.

- La séance est levée à 5 heures.