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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 24 décembre 1847

(Annales parlementaires de Belgique, session 1847-1848)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 413) M. T’Kint de Naeyer procède à l'appel nominal à midi et demi.

M. Troye lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. T’Kint de Naeyer présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Louis-Joseph Marcour, brigadier des douanes à Aelbeke, né à Saint-Nicolas, de parents étrangers, demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


» Plusieurs habitants de la commune de Tavigny prient la chambre de rejeter le projet de loi relatif au droit de succession et toute aug-mentation de dépenses ou d'impôt qui lui serait proposée. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur la matière, et dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des voies et moyens.


« Plusieurs cultivateurs à Nederboulaere demandent une augmentation des droits d'entrée sur le tabac. »

« Même demande de plusieurs cultivateurs, fabricants et négociants de labac à Grammont. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des voies et moyens.


« Le sieur Raikem, légiste à Liège, demande l'abolition de la peine de la bastonnade et d'autres peines du même genre en usage dans la marine.»

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les avoués près le tribunal de première instance de Charleroy demandent la révision des tarifs en matière civile. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à cet objet.


« Les sieurs Bourqueau, Coghen et autres membres du comité houiller du bassin du centre, demandent une réduction de 75 p. c. des péages sur le canal de Charleroy, l'établissement d'un tarif proportionnel à la distance parcourue et l'élargissement des écluses depuis la Sambre jusqu'aux canaux, embranchements et, en attendant l'exécution de ces travaux, remise d'une partie des droits. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des voies et moyens et du budget des travaux publics.


(page 414) Par divers messages, en date du 22 et du 23 décembre, le sénat informe la chambre qu'il a adopté :

1° Le budget du département des affaires étrangères, pour l’exercice 1848 ;

2° Le projet de loi qui modifie le régime de la poste aux lettres ;

3° Le projet de loi, ouvrant aux département de la guerre un crédit supplémentaire de 27,344 fr. 60 c.

- Pris pour notification.

Projet de loi portant le budget des dotations de l'exercice 1848

Rapport de la section centrale

M. Mercier. - Messieurs, dans notre séance d'hier, vous avez renvoyé à la section centrale qui a été chargée d'examiner le budget des dotations une nouvelle note fournie par la cour des comptes, pour justifier la nécessité d'une nouvelle allocation pour son personnel. La section centrale s'est réunie ce matin pour l’examen de cette note, et elle m'a chargé de rédiger un nouveau rapport que je dépose sur le bureau.

M. Lebeau. - Les conclusions ?

M. Mercier. - Les conclusions sont d'accorder les 10,000 fr. demandés par la cour des comptes, mais sous la double réserve, qu'au moyen de ce complément la cour pourvoira à l'organisation définitive de ses bureaux, et que. sauf une exception indiquée par elle, la nouvelle allocation sera affectée aux traitements des employés à nommer pour les nouveaux services qui doivent être créés.

- La chambre décide que l'impression et la distribution des rapports n'auront lieu que pour le cas où le budget des dotations ne viendrait pas à l'ordre du jour d'aujourd'hui ; dans le cas contraire, on se contentera de la lecture du rapport.

Motions d'ordre

Rendement des droits de succession

M. Rousselle (pour une motion d’ordre). - Je demanderai à M. le ministre des finances s'il pourrait déposer sur le bureau, afin qu'on l'imprime et distribue à tous les membres, avant la discussion de la loi sur le projet de majoration des droits de succession, un état récapitulatif, pour les cinq dernières années, de tous les droits fixes d'enregistrement et par classes.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - Messieurs, le département des finances possède ces renseignements, il en dresse, tous les ans, le tableau. Il ne sera donc pas difficile d'en faire la récapitulation en remontant à cinq années. Ce travail, je le déposerai d'ici à peu de temps.

Rendement de l'accise sur le sucre

M. Mercier (pour une motion d’ordre). - Je demande que M. le ministre des finances veuille bien se mettre en mesure de faire distribuer à la chambre, dans les premiers jours du mois de janvier, un tableau présentant le chiffre des importations et des déclarations des mises en consommation de sucre brut, celui des quantités de sucre raffiné exportées et enfin le montant exact des droits perçus séparément sur le sucre exotique et sur le sucre indigène, pendant l'année 1847 ; il sera facile de recueillir ces renseignements en les réclamant dès à présent.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - Messieurs, les demandes de renseignements deviennent fort nombreuses. Je pense cependant que je pourrai satisfaire à la demande de l'honorable membre. Je ferai ce qui dépendra de moi pour que le rapport me parvienne le plus tôt possible, le rapport s'appliquera aux années 1846 et 1847.

Projet de loi portant le budget des voies et moyens de l'exercice 1848

Discussion du tableau des recettes (II. Péages)

Postes

M. le président. - La chambre est arrivée à l'article Postes.

M. Rodenbach. - Messieurs, je n'ai demandé la parole sur l'article 7 que pour renouveler une interpellation que j'ai faite précédemment à M. le ministre des travaux publies. Si j'ai bonne mémoire, c'est le 20 novembre dernier que M. le ministre nous a promis une réforme postale.

Il ne nous a pas promis une réforme radicale comme en Angleterre ; mais il a dit qu'il présenterait un projet de loi tendant à soumettre les lettres à une taxe uniforme de 20 c. pour tout le royaume, sauf que la taxe serait réduite à 10 c. sur les lettres remises et distribuées dans le ressort du même bureau.

Je suis persuadé que, dans un gouvernement éminemment libéral comme le nôtre, M. le ministre s'empressera de présenter un commencement de réforme postale ; car ce n'est qu'un commencement ; il est question de fixer la taxe uniforme à 10 c. au lieu de 20 c. comme en Angleterre.

Je comprends qu'en présence d'un déficit on devra être circonspect, quand il s'agit de réduire les impôts. Mais la réforme postale fait le tour du monde : les gouvernements les plus absolus sont plus avancés que nous en fait de réforme postale. En Russie, une lettre, pour faire mille lieues paye précisément la même taxe que paye une lettre en Belgique pour faire 25 lieues. Nous sommes donc tout à fait arriérés. Il est temps enfin, de doter, sans plus de retard, la Belgique d'une réforme éminemment libérale.

M. le ministre a promis un projet de loi. J'espère qu'il en saisira la chambre à sa rentrée.

J'ai déjà eu l'occasion de le dire, notre pays est le premier qui ail adopté un système général de chemin de fer.

Je ne puis croire que notre gouvernement constitutionnel soit le dernier pour la réforme postale.

M. Nothomb. - On a souvent entretenu la chambre (l'honorable préopinant vient de le faire encore) de la réforme postale, en ce qui concerne le tarif, réforme que j'appellerai financière. Il y a une autre réforme que j'appellerai administrative, dans ses rapports surtout avec le chemin de fer. D'après moi. l'administration des postes n'a pas assez tenu compte de l'existence du chemin de fer. Il faudrait changer la circonscription administrative des perceptions ; chaque station du chemin de fer devrait être un bureau de poste.

Je sais qu'il en résultera que les bureaux voisins existant depuis longtemps, changeront de nature, disparaîtront ou deviendront des succursales du bureau établi à la station. Mais ce changement est inévitable ; c'est une conséquence de l’établissement du chemin de fer. Je crois que, dans toutes les stations secondaires le receveur du chemin de fer devrait être en même temps percepteur des postes. C'est ce qui avait été prescrit par arrêté royal du 28 août 1837, rendu sur ma proposition, à la suite d'un voyage que j'avais fait en Angleterre. Cet arrêté est resté sans exécution.

Il y a plus : j'avais, dans plusieurs stations, réuni les deux services ; on les a séparés de nouveau.

J'appellerai l'attention du gouvernement sur cette réforme. N'est-il pas singulier que, pour faire arriver le plus promptement possible une lettre à destination, il faille en charger quelqu'un ? Défailles lettres vont beaucoup moins vite que les voyageurs.

Il y aurait aussi beaucoup moins de fraudes. Je sais que cette réforme soulève des questions très graves, très délicates ; il s'agit de toucher à des positions personnelles, à des positions acquises ; mais il y a là un grand moyen d'augmenter les produits de la poste.

En Allemagne, là où le gouvernement n'est pas propriétaire des chemins de fer, on cherche autant que possible à faire coïncider le service des postes avec le service des chemins de fer ; mais là où le gouvernement est propriétaire des chemins de fer, on peut dire que les deux services sont complètement confondus. J'engage M. le ministre des travaux publics à se faire rendre compte du mode d'administration qui existe notamment dans le grand-duché de Bade. Dans le grand-duché de Bade, le gouvernement est, comme en Belgique, propriétaire des chemins de fer. Eh bien, les deux services sont fondus l’un dans l'autre, Le bureau des postes est le plus souvent à la station et c'est de la station que partent les facteurs.

Il faut que nous en venions à ce système ; il faut qu'à Bruxelles, par exemple, ce que nous appelons la « grande poste » ne soit qu'une succursale des deux stations. Il doit en être de même à Anvers, il faut que les dépêches s'ouvrent à la station, et de là partiront les facteurs pour l'intérieur de la ville ; de cette manière les lettres arriveront aussi vite que les voyageurs. (Interruption.)

Je sais que là où il y a une station intérieure la chose est beaucoup plus facile encore. Il est évident qu'à Bruges, par exemple, où il y a une station intérieure, tout le travail devrait se faire dans un bureau établi à la station même.

Je ne vais pas jusqu'à demander que les services soient partout remis entre les mains d'une même personne ; je crois que dans les grandes villes, cela serait impossible, qu'il en résulterait de la confusion ; dans les grandes stations on a été forcé de séparer même le service des marchandises et le service des voyageurs ; mais je n'hésite pas à dire que la réunion, la centralisation de tous les services doit se faire dans les stations secondaires du chemin de fer, et cela dans l'intérêt de la rapide expédition. Le temps est tout ici, et si le gouvernement peut opérer l'amélioration que j'indique, il en résultera une augmentation notable du produit des postes et un grand bienfait pour le public.

M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Il est très vrai, messieurs, qu'il n'y a pas beaucoup d'harmonie dans les services des transports qui s'opèrent par l'Etat et par le même département, soit par la poste, soit par le chemin de fer. Il y a une foule de bizarreries résultant du défaut d'unité dans l'administration de ces deux modes de transport. Il y a des bizarreries dans les prix, des bizarreries dans les conditions auxquelles les transports sont effectués. Il y en a de non moins graves sous le rapport de la rapidité de la circulation des personnes et des dépêches par le chemin de fer.

J'ai été frappé de tous ces inconvénients ; il me parait réellement absurde que, par exemple, 5 kilog., une pierre qui accompagne une lettre et qui est transportée par le chemin de fer, arrive plus tôt et, dans lois les cas, à un prix moindre qu'une simple lettre pesant beaucoup moins et qui est également transportée par le chemin de fer. Cette anomalie, messieurs, disparaît en partie par les modifications qui viennent d'être introduites dans le régime des postes quant à la taxe des lettres ; mais, comme le dit l'honorable M. Nothomb, il y a une foule d'autres réformes à opérer. J'en ai été frappé, je m'en suis occupé, j'ai médité cette affaire, et je l'ai ensuite renvoyée dans mes bureaux pour qu'elle y devînt l'objet de l'examen le plus attentif, le plus scrupuleux ; mais on comprendra qu'il m'a été impossible, depuis que je suis au ministère des travaux publics, d'introduire les réformes dont il s'agit, de modifier dans leur essence des administrations qui fonctionnent depuis longtemps, d'y introduire des modifications radicales et qui, de l'aveu de l'honorable préopinant, sont de nature à soulever de sérieuses difficultés.

D'ailleurs, je désire n'introduire de réformes qu'après les avoir mûrement méditées. Je tiens moins à aller avec une grande rapidité, qu'à aller avec sécurité. Je ne veux mettre en pratique les réformes qui me sembleraient les plus utiles qu'après avoir acquis la conviction qu'elles peuvent en réalité donner de bons résultats.

Je sais qu'il y a d'excellents enseignements à puiser dans ce qui se (page 415) pratique notamment en Allemagne et plus particulièrement dans le pays de Bale. Là une organisation complète existe ; il y a fusion de l'administration des chemins de fer et de l'administration des postes. La même administration opère le transport des grands et petits colis à des conditions qui sont les mêmes, et on évite les inconvénients que j'ai tantôt signalés.

En outre, sous le rapport de la prompte distribution, sous le rapport des avantages à retirer des chemins de fer, ils sont à peu près complets, tandis qu'ici ils ne le sont pas. On sent assez que ce sont là des objets qui ne peuvent être un seul instant oubliés. Quant à la réforme postale, dont a parlé l'honorable M. Rodenbach, j'ai déjà eu l'honneur de dire à la chambre que c'est une question d'impôt. On demande une réduction de ce chef, comme on demande l'abolition de l'impôt du sel et d'autres impôts. Il est incontestable qu'il y aurait avantage à les faire disparaître ; mais il faut qu'on puisse offrir, à côté des découverts que l'on crée, de nouvelles ressources. On ne peut demander deux choses inconciliables, celle de faire disparaître des impôts et celle de refuser les moyens de couvrir le déficit.

J'ai dit que l'intention du gouvernement était de proposer non pas pour 1848, mais avant la discussion du budget de 1849 et pour être mise en pratique en 1849, une réforme postale que l'honorable membre ne considère pas comme radicale, mais que je considère, quant à moi, comme la seule possible et la seule convenable dans l'état actuel de nos finances, et même pour longtemps. La réforme postale à 10 c. causerait dans nos finances un déficit que l'on ne peut estimer à moins de 1,500,000 fr. et ce déficit subsisterait très probablement, en admettant la progression la plus considérable dans le transport des lettres par suite de la réforme, subsisterait pendant une dizaine d'années.

La réforme à 20 c, qui me paraît répondre aux exigences de la situation, ne laisserait au contraire qu'un déficit, d'environ 600,000 fr. qui serait couvert probablement après la troisième année.

La prudence indique donc que la réforme à 20 c. doit être faite, et non la réforme à 10 c. Et au demeurant, après avoir fait la réforme à 20 c, après en avoir expérimenté les résultats, rien ne s'opposerait à ce qu'on fît ultérieurement une réforme plus large, si on le trouve convenable, tandis que si l'on commençait par une réforme à 10 c, on se trouverait dans l'impossibilité de revenir à un taux supérieur, et il faudra chercher de nouvelles ressources pour combler le déficit qui en résulterait.

Je persiste à déclarer au nom du gouvernement que son intention est de présenter, dans les premiers mois de l'année prochaine, un projet sur la réforme postale ; mais il ne sera applicable, comme je l'ai dit, qu'à dater de 1849.

M. Loos. - Messieurs, je ne crois pas que le moment soit venu de demander la réforme postale ; cependant il est un argument de M. le ministre des travaux publics que je ne puis laisser passer sans observation.

M. le ministre vient de vous dire que la réforme postale à 10 centimes amènerait un déficit de l,500,000 fr. dans les finances de l'Etat. Je crois que cette assertion repose sur une erreur.

Cette erreur, je l'ai déjà signalée, lorsque dans une autre discussion il a été question de la réforme postale. Elle a été commise par un fonctionnaire du département des travaux publics, dans une note qui a été publiée dans le temps.

L'erreur provient de ce qu'on a établi les calculs sur toutes les lettres en général, et qu'on a perdu de vue que les lettres venant des pays étrangers ne tomberaient pas sous la réforme à 10 centimes.

Les lettres venant de l'étranger ou expédiées vers l'étranger, en Angleterre, en France, et dans d'autres pays où la réforme a commencé, ces lettres, à moins que ce ne soit par le fait d'un traité postal avec ces pays, ne jouissent pas de toute la réduction établie pour les lettres ne voyageant qu'à l'intérieur du pays. Je crois donc que le chiffre de 1,500,000 fr., indiqué par M. le ministre des travaux publics, n'est pas un chiffre exact.

J'ai établi, dans une discussion précédente, que, si le nombre des lettres n'augmentait en aucune façon, le maximum du déficit ne dépasserait pas, n'atteindrait pas 1,500,000 fr., c'est sur ce chiffre de 1,500,000 fr. que nous avons à discuter, pour savoir jusqu'à quel point ce déficit serait comblé par l'augmentation de la correspondance.

Puisque j'ai la parole, je me permettrai encore de dire quelques mots sur l'article Postes. L'honorable M. Rodenbach a parlé de la réforme de la taxe, l'honorable M. Nothomb vous a entretenus d'une autre réforme ; il existe une troisième réforme à introduire. Jusqu'à présent, les chemins de fer n'ont pas rendu à la poste tous les services qu'ils sont susceptibles de lui rendre, ou plutôt la poste n'a pas profité de toutes les occasions que le chemin de fer lui offrait, de rendre des services au pays. Je crois que quand il s'agira de la réforme, M. le ministre des travaux publics devrait examiner quelles nouvelles dispositions il y aurait lieu d'introduire sous ce rapport. La fréquence des occasions est une des grandes facilités qu'il est utile de donner au commerce, et jusqu'à présent, sous ce rapport, la poste ne rend pas tous les services qu'elle est à même de rendre et qu'elle rendrait, sans doute, s'il y avait meilleure entente entre cette administration et celle du chemin de fer.

M. Mercier. - Messieurs, je ne veux pas aujourd'hui traiter la question de la réforme postale ; mais je me borne à faire mes réserves pour le cas où les paroles de l'honorable préopinant exerceraient de l'influence sur l'opinion de M. le ministre des travaux publics. Dans les circonstances actuelles, je proteste contre toute réforme plus radicale que celle qui est annoncée par le gouvernement ; et quant à celle-ci, je trouverais très inopportun et très fâcheux qu'elle fût discutée avant que nous n'eussions établi les ressources nécessaires pour couvrir nos dépenses.

M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Messieurs, l'honorable M. Loos est dans l'erreur, quand il suppose que la réforme à 10 centimes ne produirait pas un découvert de l,000,000 fr. Les calculs qui ont passé sous mes yeux m'en ont donné la conviction ; c'est en se rendant compte de toutes les circonstances, de l'accroissement probable dans la circulation des lettres, que ce déficit de 1,500,000 fr. a été constaté.

Lorsque l'occasion se présentera de discuter ce point, je parviendrai, j'en ai la conviction, à démontrer à la chambre, de la manière la plus évidente, que le déficit que je viens d'indiquer serait nécessairement atteint, si l'on adoptait une réforme à 10 centimes.

Il faut donc éviter de répandre l'idée, que la réforme à 10 centimes serait une chose réalisable ; cela n'est réellement pas possible dans l'état actuel de nos finances.

- La discussion est close.


« Taxe des lettres et affranchissements : fr. 3.500.000. »

- Adopté.


« Port des journaux et imprimés : fr. 135,000. »

- Adopté.


« Droits sur les articles d'argent : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Remboursements d'offices étrangers : fr. 115,000. »

- Adopté.


« Emoluments perçus en vertu de la loi du 19 juin 1842 : fr. 50,000. »

- Adopté.

Marine

« Produits du service des bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres : fr. 312,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des recettes (III. Capitaux et revenus

Discussion générale

M. le président. - Nous arrivons au chapitre : Capitaux et revenus.

M. Verhaegen. - Messieurs, l'article 48 sur la loi de comptabilité de l'Etat veut qu'un tableau des propriétés et rentes soit remis à la cour des comptes.

Il serait utile que la cour des comptes pût avoir sous les yeux un état des propriétés qui appartenaient à la nation en 1831. Elle pourrait voir alors quels sont les immeubles et les rentes que le gouvernement a depuis cédés au clergé, soit par des arrêtés royaux soit par des décisions ministérielles. Elle verrait encore si certains fonctionnaires n'ont pas laissé prescrire des rentes domaniales pour que la révélation pût en avoir lieu au profit des fabriques d'églises, et si quelques-uns de ces fonctionnaires n'ont pas été bien placés quelque temps après à l'administration centrale. Enfin elle verrait si le gouvernement, pour se créer quelques petites ressources de plus, n'a pas autorisé le rachat de rentes domaniales à un taux inférieur au capital déterminé par la loi au denier 15 et au denier 18 par exemple.

Je demanderai donc à M. le ministre des finances s'il ne voit pas d'inconvénient à fournir à la chambre et à la cour des comptes un tableau complet de tous les biens et rentes qui appartenaient à l'Etat en 1831.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - Messieurs, je ne puis pas répondre d'une manière précise et immédiate à la demande de l'honorable M. Verhaegen ; je pense qu'il est prudent que j'examine moi-même la nature des renseignements qu'il a réclamés, avant de m'engager à déposer ces renseignements statistiques.

Toutefois, si je ne puis pas satisfaire à sa demande, je m'en expliquerai devant la chambre.

M. Malou. - Messieurs, les renseignements demandés par l'honorable M. Verhaegen doivent nécessairement faire partie de la publication statistique pour laquelle la chambre a alloué des fonds au budget des finances. Je ne comprendrais pas qu'on pût faire une bonne statistique financière depuis 1830, sans y renseigner toutes les transformations qu'a subies le domaine national depuis celle époque.

M. Verhaegen. - Je m'étonne que M. le ministre des finances ne puisse pas s'expliquer immédiatement sur la demande que je viens de lui adresser ; je m'en étonne d'autant plus que l'honorable M. Malou répond à mes observations en prétendant que les détails du tableau que je réclame devront faire partie de la statistique financière, ce qui n'est pas d'accord avec la réserve qu'apporte sur cette question l'honorable M. Veydt.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - L'honorable membre me justifie lui-même en disant qu'il ne demande pas que je réponde immédiatement.

M. Mercier. - J'ai demandé la parole pour présenter une simple observation qui me semble justifier la réserve dans laquelle M. le ministre des finances désire se renfermer.

Chaque année la section centrale demande le tableau des avances faites avant 1830 à des industriels sur le million Merlin ; jusqu'ici, aucune (page 416) section centrale n'a cru convenable de faire publier ce tableau. Je ne pense pas qu'il serait convenable de le faire imprimer à l'avenir.

M. Verhaegen. - C'est une très minime partie.

M. Mercier. - C'est une des causes de la réserve que M. le ministre a voulu garder.

M. de Corswarem. - Je vois, avec plaisir, au budget de cette année, une nouvelle ressource à retirer du chemin de fer, au moyen du produit des cartes de circulation. Jusqu'ici ces cartes se délivraient gratis à des personnes plus ou moins privilégiées, si on pouvait considérer cela comme un privilège. Je trouve plus équitable de les donner à prix d'argent, car, de cette manière, il y a égalité pour ceux qui veulent circuler dans les stations et sur le chemin de fer, et l'Etat en retirerait une ressource.

Il est une question pratique, que je veux soumettre à M. le ministre des travaux publics. Je lui demanderai s'il ne vaudrait pas mieux délivrer des permis timbrés pour circuler sur le chemin de fer, comme on en délivre pour circuler à l'intérieur ou à l'extérieur du royaume.

Dès que ces permis sont, délivrés par l'administration du timbre, il en est tenu un compte régulier et il y a un contrôle régulier tout organisé ; tandis que si les cartes sont délivrées par l'administration du chemin de fer, il faudra organiser une comptabilité et un contrôle séparés et spéciaux qui, en occasionnant une dépense nouvelle, diminueront le :produit. J'indique ce moyen parce qu'il me paraît plus régulier de faire distribuer les cartes de circulation par l'administration du timbre.

J'ai encore une autre observation à présenter. Je voudrais que tous les produits du chemin de fer figurassent au budget sous la même rubrique. Ainsi, nous avons vu qu'on a loué des cantines dans certaines stations. Je pense que le produit de ces locations figure avec les fermages de biens-fonds et bâtiments du domaine. Je voudrais que les produits des cantines figurassent sous la rubrique des produits du chemin de fer ; bientôt nous aurons d'autres produits, tels que ceux des coupes de bois, de genêts, d'osiers et peut-être d'herbes. Si on fait figurer ces produits sous la rubrique : Produits d'arbres et des plantations appartenant au domaine, nous ne saurions pas ce que rapporte le chemin de fer. Sous ce rapport, il serait plus régulier de connaître tout ce que nous retirons du chemin de fer ; nous savons tout ce qu'il coûte, nous saurions également tout ce qu'il produit.

Je voudrais aussi qu'on tînt compte des transports faits pour l'Etat, je désirerais qu'ils fussent portés pour ordre en dépense d'un côté et en recette de l'autre, de manière à bien constater tous les produits et les services retirés du chemin de fer.

M. Brabant. - L'honorable M. de Corswarem vient de présenter quelques observations sur l'exécution d'une mesure qui, pour la première fois, figure au budget, relativement à la circulation sur les chemins de fer. Jusqu'à présent on a distribué gratuitement des permis de circulation ; il s'agirait de percevoir sur ces permis un impôt à déterminer par arrêté royal.

Je crois, messieurs, qu'il y aurait mieux à faire que d'établir un misérable impôt de 10 mille francs sur ces cartes, ce serait de supprimer ces cartes.

De tous les pays européens où il y a des chemins de fer, la Belgique est le seul où la circulation soit autorisée.

En France ou en Allemagne qui que ce soit étranger à l'administration n'est autorisé à circuler sur le chemin de fer, et on agit en cela très prudemment : Si vous voulez recourir au tableau des accidents du chemin de fer contenu dans les comptes rendus, vous verrez qu'une grande partie de ces accidents résulte de cette circulation qu'on ne devrait pas permettre. Je voudrais qu'elle fût interdite partout où une double voie est livrée à l'exploitation. Nous avons eu un accident terrible entre Tubize et Braine-le-Comte par suite de cette circulation qu'on permet sur nos chemins de fer.

Je voyage souvent sur le chemin de fer ; eh bien, je n'y passe pas une fois sans trembler en voyant avec quelle imprudence certaines personnes circulent sur la voie.

. Je réclamerai de l'humanité du gouvernement de vouloir supprimer ces cartes. Ce n'est pas pour un revenu de dix mille francs qu'on peut maintenir une chose aussi dangereuse que la circulation dans les stations ou sur les chemins de fer. Il serait de 160 mille francs que je voudrais qu'on y renonçât.

J'ai vu à peu près toutes les stations du chemin de fer et j'ai remarqué que l'encombrement des curieux est un assez grand obstacle à la bonne manutention de la station. Je conçois qu'on permette à certaines personnes, pour leur instruction, de fréquenter les stations. Il y a beaucoup à apprendre à examiner comment les choses se passent dans les stations du chemin de fer. Ce ne sont guère les gens qui vont dans les stations pour leur instruction qui forment la multitude. On peut remarquer de plus que les stations des villes industrieuses, sont les moins fréquentées.

Ainsi à Liège, à Gand, à Anvers, on ne voit personne dans les stations si ce n'est les voyageurs qui arrivent ou parlent. Dans d'autres villes on voit dans les stations une foule de personnes qui n'y ont que faire, si ce n'est de satisfaire leur curiosité. Le plus souvent ce sont des dames qui n'ont guère besoin de notions sur l'administration des stations ou sur l'action des locomotives. Je prierai le gouvernement de supprimer les cartes de circulation et de renoncer à son revenu ; il rendra un grand service à la réputation du chemin de fer.

J'ai dit qu'un grand nombre d'accidents constatés sur le chemin de fer étaient dus à la circulation qu'on y autorisait.

D'après la Revue Britannique, le chemin de fer belge, qu'on considère comme celui qui présente le plus de sécurité, serait, au contraire, celui de tous les chemins de fer sur lequel il y aurait le plus d'accidents.

Je n'ai pas examiné si c'était vrai ou non ; mais je pose, en fait que ce ne sont pas les voyageurs qui sont victimes des accidents signalés par la Revue d'Edimbourg et la Revue Britannique. On prend la somme des accidents rapportés dans le compte rendu, et on en rend le chemin de fer responsable. Je suis convaincu que plus de la moitié de ces accidents sont dus à cette circulation ; je crois qu'il est de l'intérêt de l'humanité de la supprimer.

M. Osy. – Je partage en partie l'opinion de l'honorable M. Brabant. Je crois qu'il est dangereux de permettre la circulation des individus sur les chemins de fer, mais il est bon de laisser circuler dans les stations. En effet, pourquoi y va-t-on ? Pour rencontrer des personnes auxquelles on a donné rendez-vous ou qu'on vient chercher. Je demanderai qu'on efface les derniers mots : et sur le chemin de fer. De cette manière il n'y aura de cartes que pour les stations ; on atteindra le but que se propose l'honorable M. Brabant. C'est en circulant sur les routes qu'il arrive le plus d'accidents.

A Malines où il arrive des convois de tous les côtés, quand un convoi arrive dans la station, un commissaire public va au-devant pour faire faire place ; je ne sache pas qu'il y soit arrivé de malheur.

M. Brabant. - Il y a eu un homme tué l'année dernière.

M. Osy. - Je crois qu'on ferait bien d'accorder des cartes pour les stations et en même temps de défendre à l'avenir la circulation sur le chemin de fer.

(page 425) M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Messieurs, un arrêté royal du 4 août 1845 avait décidé que les permis de circulation dans les stations et sur les chemins de fer seraient frappés d'un droit perçu au profit de la caisse de secours des employés de l'administration. Cet arrêté n'a pas été exécuté. Je crois que trois raisons se sont opposées à la mise en pratique de la mesure décrétée.

D'abord la redevance établie par arrêté royal au profit d'une caisse particulière était inconstitutionnelle ; puisque, suivant la Constitution, aucun impôt ne peut être perçu qu'au profit de l'Etat, de la province ou de la commune ; ensuite, un impôt ne peut être perçu qu'en vertu d'une loi, et non par simple arrêté royal. Enfin, la caisse de secours étant dans un état satisfaisant, il n'y avait aucune raison de lui faire une dotation. J'ai pensé dès lors qu'il serait convenable de demander aux chambres l'autorisation de percevoir un droit sur les permis de circulation.

C'est ce motif qui m'a fait porter au budget des voies et moyens la somme de 10,000 fr. comme produit probable de cette recette. Je ne supposais pas, je l'avoue, que l'on contesterait l'utilité, la nécessité de faire payer ces permis de circulation.

L'honorable M. Brabant voudrait qu'on les supprimât par la raison que la plupart des accidents qui arrivent sur le chemin de fer sont causés par les personnes qui circulent sur la voie. Il a dit que plus de la moitié des accidents peuvent être attribués à cette cause unique, c'est une erreur.

Voici le relevé des accidents qui ont eu lieu en 1844, 1845 et 1847. Je n'ai pas le relevé des accidents de 1846. Si l'on consulte cette statistique, on reste convaincu que les motifs que fait valoir l'honorable M. Brabant ne peuvent pas être accueillis.

En 1844, il y a eu 23 accidents, dont 7 morts d'individus étrangers à l'administration. Dans ce nombre figurent les victimes de l'accident du 3 mai 1844 sur la ligne de l'Est, arrivé entre Gingelom et Waremme, au nombre de quatre ; les trois autres ont été atteints en traversant la voie, ils ont été victimes de leur imprudence ; il n'y a rien à imputer aux permis de circulation.

Ainsi, pour l'année 1844, les renseignements que donne l'honorable M. Brabant manquent d'exactitude.

En 1845, 35 accidents ont eu lieu. Six morts étaient étrangers à l'administration. L'un a péri, parce qu'il s'était endormi sur la voie. Un s'est tué volontairement. Les 4 autres ont été accrochés par la locomotive : le premier en ramassant sa casquette, les trois autres en traversant la voie.

En 1847, il y a eu 34 accidents, 9 morts étaient étrangers à l'administration : trois se sont suicidés ; un homme a été trouvé sur la voie ; les autres ont été atteints par la locomotive, en traversant la voie ; la mort doit être attribuée à leur imprudence. Un dernier a été atteint en voulant retenir son chien qui était menacé.

Il ne faut donc pas attribuer les accidents aux permis de circulation. Il ne faut pas croire qu'ils sont dus à la facilité avec laquelle on accorde les cartes que l'on donne aujourd'hui. L'impôt sur les cartes aura d'ailleurs pour résultat d'empêcher qu'on n'en délivre en aussi grand nombre qu'on ne l'a fait jusqu'à présent.

On estime à dix mille environ les cartes distribuées en ce moment. Je suis bien loin de supposer qu'en les vendant on en place encore dix mille.

En effet en admettant que le prix des cartes soit de 5 francs, et le nombre de ces permis de dix mille, on devrait porter au budget une somme de 50,000 fr. Or, on n'y porte que 10,000 fr. Il suffit qu'on annonce que les permis de circulation seront vendus pour que le nombre des demandes soit considérablement réduit ; on ne peut en douter. Ainsi il n'y a pas de motif pour accueillir la proposition de l'honorable M. Brabant. La recette, dit-on, sera minime ; mais les petits ruisseaux font les grandes rivières ; plusieurs impôts rapportant chacun 10,000 fr. amélioreraient l'état de nos finances.

Il vaut mieux, d'ailleurs verser 10,000 fr.au trésor, que de délivrer ces cartes gratis. En les supprimant, quoi qu'on fasse, elles ne le seront que nominalement. Il y aura dans les stations une foule de tolérances, beaucoup de personnes continueront d'être admises dans les stations. Pourquoi priver certaines personnes, qui y trouvent de l'attrait, d'un droit qu'elles acquerraient en payant ? Dans plusieurs localités, c'est un véritable plaisir d'aller dans les stations à l'arrivée des convois. La station de Matines est un lieu de récréation pour les habitants. Dans la plupart des autres stations, il en est ainsi.

Dans les villes industrielles, a dit l'honorable M. Brabant, il y a moins de monde à la station que dans les autres villes. Cela est vrai.

Dans ces villes, sauf le dimanche, les promenades sont toujours beaucoup moins fréquentées que dans les villes où le commerce et l'industrie absorbent tous les loisirs des habitants.

Il n'en est pas moins vrai que beaucoup de personnes tiennent à plaisir d'aller dans les stations à l'heure de l'arrivée des convois. Ces personnes trouveront également convenable de payer une rétribution pour jouir du même avantage. En tous cas ces cartes sont recherchées et continueront à être recherchée par les voyageurs. Quant à supprimer tout au moins les autorisations de circuler par le chemin de fer comme le propose l'honorable M. Osy, j'ai prouvé, je crois, que cela n'est pas nécessaire.

Ce serait nécessaire s'il y avait danger ; mais les faits établissent que les inconvénients que l'on redoutent n'existent pas. Les dangers seront encore moindres à l'avenir puisqu'en faisant payer les permis on en diminuera de beaucoup le nombre.

J'ajouterai qu'il y a presque nécessité de délivrer des permissions de circuler sur le railway, pour abréger le parcours, pour donner plus de facilité aux habitants de communiquer avec les localités voisines.

Récemment, depuis l'ouverture du chemin de fer de Saint-Trond à Hasselt, des autorisations de ce genre ont été demandées pour faciliter les communications entre les habitants d'une paroisse, et pour qu'un prêtre pût desservir plus convenablement toutes les parties de sa paroisse. Il y a donc nécessité de maintenir la faculté qui existe d'autoriser à circuler sur le chemin de fer. On donnait des cartes gratis, on les fera payer. Je propose de les imposer d'une somme minime ; s'il y a convenance, utilité ou plaisir, personne ne se refusera à payer 5 francs pour jouir d'un avantage qui, sans cela, pourrait être refusé.

L'honorable M. de Corswarem a dit tout à l'heure qu'il désirait de voir figurer au budget des voies et moyens tous les produits du chemin de fer. Je tiendrai note de cette observation. Je m'entendrai à ce sujet avec M. le ministre des finances. Les produits du chemin de fer figurent au budget in globo. L'honorable membre désire que certaines catégories de recettes soient spécialement indiquées, je ne pense pas qu'il y ait à cela le moindre inconvénient.

Il a demandé en outre que l'on fît figurer pour mémoire au budget les transports opérés pour le compte de l'Etat. Il ne me paraît pas que ce soit nécessaire ; le renseignement se trouve dans le compte rendu du chemin de fer.

On y voit quelle est la nature et l'importance des transports effectués pour le compte de l'Etat. L'honorable membre a demandé aussi que les permis de circulation fussent délivrés par l'administration du timbre, donnant pour motif qu'il y aurait plus de facilité de contrôle. Je ne partage eu aucune façon cet avis. Il faut éviter de rompre l'unité dans les administrations. L'administration du chemin de fer est obligée, pour la délivrance des coupons, d'avoir des moyens de contrôle, de surveillance complets. La délivrance de quelques permis de plus ne donnera lieu à aucun accroissement de dépense. Il n'en serait pas de même si la délivrance des permis de circulation était transférée à l'administration du timbre.

Je persiste donc à demander que l'on porte en recettes le produit des cartes et que l'administration conserve le droit de délivrer des cartes non seulement pour pénétrer dans les stations, mais aussi pour circuler sur le chemin de fer.

(page 416) M. de Mérode. - D'après ces observations de M. le ministre des travaux publics qui ont parfaitement justifié la mesure de la délivrance des permis de circulation sur le chemin de fer, je n'ai rien à ajouter.

M. Osy. -Je vois, par ce que vient de dire M. le ministre des travaux publics, qu'il y a des localités où il est absolument nécessaire de délivrer des permis de circulation pour abréger la route. Puisqu'il en est ainsi, je retire mon amendement.

Mais j'appuie de toutes mes forces l'observation de l'honorable M. de Corswarem. Pour les ports d'armes et les passeports, nous avons le contrôle de l'administration du timbre ; il serait très avantageux qu'il en fût de même pour les permis de circulation. Je n'y vois dans l'exécution aucune difficulté. J'appuie donc cette proposition.

M. Dedecker. - Messieurs, je rends justice aux sentiments d'humanité qui ont inspiré les observations que vient de vous présenter l'honorable M. Brabant, mais je crois que ces sentiments sont un peu exagérés dans la circonstance actuelle.

Je ne crois pas que les dangers que vous a signalés l'honorable membre soient aussi réels, soient aussi imminents qu'il le croit, Les explications dans lesquelles vient d'entrer M. le ministre des travaux publics doivent avoir complètement rassuré la chambre sur ce point.

Si nous étions encore au début de l'exploitation de nos chemins de fer, alors on pourrait peut-être empêcher complètement la circulation dans les stations et le long du chemin de fer. Mais depuis treize ans, des habitudes ont été contractées. Ainsi que vous l'a dit M. le ministre des travaux publics, dans la plupart de nos villes, les stations sont devenues des promenades publiques ; la circulation dans ces stations est devenue un véritable besoin pour une partie de la population. On considérerait l'interdiction de circuler comme une espèce de vexation.

Mais puisque nous sommes d'accord que la circulation le long des chemins de fer ne présente pas autant d'attrait ; que, de l'autre côté, elle présente plus de danger que la circulation dans les stations, ne pourrait-on établir deux espèces de cartes, des cartes de circulation dans les stations et des cartes de circulation le long des routes ? Il me semble que si l’on fixait à 5 francs le prix des cartes pour la circulation dans les stations et à 10 francs le prix des cartes pour la double circulation dans les stations et le long des chemins de fer, nous aurions d'un côté plus de produits, et d'un autre côté il y aurait moins de personnes qui circuleraient le long de la route et par conséquent moins de chances d'accidents.

M. Delfosse. - La section centrale, chargée de l'examen du budget des travaux publics, s'est occupée de la question soulevée par l'honorable M. Brabant ; un membre de cette section avait présenté des observations dans le sens de celles qui viennent d'être faites par l'honorable M. : Brabant, mais la section centrale n'a pas cru devoir les accueillir.

Elle a pensé que si la circulation du public dans les stations et sur les voies du chemin de fer offre quelque danger, il est facile d'y obvier en renforçant la surveillance et que, s'il résulte de ce fait un accroissement de dépenses, il y aura compensation, d'abord dans le prix des cartes, ensuite dans le plaisir que les populations, surtout celles des petites villes, trouvent à se promener dans les stations et sur la voie du chemin de fer.

Le danger, s'il y en a eu jusqu'à présent, disparaîtra d'ailleurs par le fait que les cartes seront payées au lieu d'être délivrées gratis ; comme on (page 417) vous l'a fort bien dit, le nombre des permis de circulation sera considérablement réduit.

Je ne puis admettre l'opinion de MM. de Corswarem et Osy, que les permis de circulation devraient être délivrés par l'administration du timbre ; il n'y a pas de comparaison à établir entre ces permis et les ports d'armes ou les passeports. Si les ports d'armes et les passeports sont délivrés par l'administration du timbre, c'est qu'il n'y a pas, dans les bureaux des gouverneurs, une administration spécialement chargée des recettes. Les employés du chemin de fer peuvent tout aussi bien recevoir le prix des cartes de circulation que le prix des coupons délivrés aux voyageurs.

L'observation de l'honorable M. de Corswarem se rattache à la grande question de savoir si les recettes du chemin de fer doivent être contrôlées par le département des finances, question qui n'est pas tranchée et sur laquelle le gouvernement doit, aux termes de la loi de comptabilité, vous soumettre une proposition spéciale.

Ce n'est pas incidemment, à l'occasion d'une recette de dix mille francs, qu'on doit la trancher.

- La discussion est close.

Travaux publics

M. le président. - La discussion ayant principalement porté sur les cartes de circulation, je mets d'abord en discussion l'article qui y est relatif.

« Produits des cartes de circulation dans les stations et sur le chemin de fer : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Chemin de fer : fr. 16,000,000. »

M. Osy. - Messieurs, l'honorable M. Malou, dans le projet de budget, avait porté une recette de 16,500,000 francs. Dans la section centrale, M. le ministre des travaux publics nous ayant fait connaître les motifs pour lesquels il demandait qu'on ne fît figurer en recette qu'une somme de 16.000,000, nous avons été convaincu qu'il y avait eu erreur de la part de l'honorable M. Malou.

L'honorable M. Malou avait calculé que la recette de 1847 s'élèverait à 15,600,000 francs. Il est prouvé aujourd'hui, par les résultats des onze premiers mois de l'année, que la recette totale n'ira pas au-delà de 14,800,000 fr.

Il est vrai que l'exploitation des embranchements de Jurbise et de Hasselt augmentera la recette ; mais nous calculons aussi sur une augmentation de recette de 1,200,000 fr. Il serait donc imprudent de porter les prévisions au-delà de 16,000,000 de fr.

M. Malou. - Je ne puis admettre qu'il y ait eu erreur dans la manière dont les prévisions de 1848 ont été établies. Seulement, lorsque le budget a été fait, les éléments d'appréciation qui existent aujourd'hui n'existaient pas. Mais la manière dont les prévisions ont été calculées au mois d'avril, me paraît encore légitime d'après les faits connus à cette époque.

- L'article est adopté.

Enregistrement et domaines

« Rachat et transfert de rentes, y compris l'aliénation des renies constituées : fr. 19,000. »

- Adopté.


« Capitaux du fonds de l'industrie : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Capitaux de créances ordinaires : fr. 565,000. »

- Adopté.


« Prix de vente d'objets mobiliers ; transactions en matière domaniale ; dommages et intérêts ; successions en déshérence ; épaves : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Prix de vente de domaines, en vertu de la loi du 27 décembre 1822, payés en numéraire en suite de la loi du 28 décembre 1835, pour l'exécution de celle du 27 décembre 1822 et des lois des 30 juin 1840, 18 mai 1845 et 27 février 1846 ; fr. 800,000. »

- Adopté.


« Prix de coupes de bois, d'arbres et de plantations ; vente d'herbes ; extraction du minerai de fer, de terre et de sable : fr. 1,100,000. »

M. Verhaegen. - Il y aurait moyen pour le gouvernement d'augmenter le chiffre du revenu mentionné à cet article de 40 à 50,000 fr., tout en posant un acte de justice et de bonne économie forestière.

Plusieurs fois déjà, sous l'ancien ministère, j'ai eu l'honneur, messieurs, de vous parler de certain usage qui existait de temps immémorial, au profil des habitants des communes limitrophes de la forêt de Soignes ; cet usage consistait à faire paître leurs bestiaux et à couper les herbes dans les parties défensables de la forêt, moyennant une rétribution annuelle, qui était exactement payée et qu'on aurait pu doubler sans donner lieu à la moindre réclamation.

L'usage que j'invoque a existé de temps immémorial et sous tous les gouvernements qui se sont succédé ; il a même été respecté sous l'administration de la Société Générale, qui délivrait, contre le payement d'une faible indemnité, des cartes de pacage et de faucillage. A toutes ces différentes époques les habitants des communes limitrophes de la forêt, les journaliers surtout, trouvaient des moyens de subsistance dans la possession d'une ou deux bêtes à cornes qu'ils nourrissaient exclusivement des herbages qu'il leur était permis de recueillir dans leur voisinage.

Malheureusement cet état de choses est venu à cesser depuis que l'Etat est venu prendre la place de la Société Générale.

Alors certains employés de la foresterie, considérant la forêt comme leur domaine et les habitants des communes voisines comme leurs vassaux, pensèrent que s'ils parvenaient à empêcher désormais les droits de pacage et de faucillage dans les parties défensables des bois, ils augmenteraient considérablement l'importance de la chasse, dont ils jouissaient à cette époque et que les gardes-bois, ayant moins à surveiller, leur serviraient d'autant mieux de porte-carnassière ; dès lors, sous divers prétextes, les uns plus futiles que les autres, ils engagèrent le gouvernement à retirer aux habitants de Boitsfort et d'autres communes voisines la faculté dont eux et leurs ancêtres avaient toujours joui à titre onéreux, ce qui fut faite au détriment d'un grand nombre de pères de famille, qui furent inopinément contraints à vendre leurs bestiaux à vil prix, et par suite se trouvèrent réduits à la plus affreuse misère.

Les communes limitrophes de la forêt de Soignes présentèrent successivement au gouvernement différentes suppliques aux fins d'obtenir à l'amiable ce qu'en définitive ils obtiendront de l'autorité judiciaire si le recours aux tribunaux devenait indispensable. Mais, comme il arrive toujours, ces suppliques furent renvoyées à l'avis des fonctionnaires locaux intéressés dans la question, et dès lors on pouvait s'attendre d'avance au sort qui leur était réservé.

J'ai cru, messieurs, qu'il était de mon devoir de venir au secours du faible et de l'opprimé et de soutenir les droits de ceux dont je connaissais les besoins plus que tout autre, puisque je vivais au milieu d'eux pendant une grande partie de l'année ; je résolus donc de saisir la première occasion qui pourrait s'offrir pour faire cesser cet état de choses que je considérais comme désastreux.

La discussion de la loi sur la chasse m'a paru fournir cette occasion ; l'amendement que j'ai présenté à certain article de cette loi et qui a été adopté à la presque unanimité des membres de cette chambre avait pour objet de défendre la chasse à tous les employés forestiers supérieurs et inférieurs dans les forêts dont la surveillance leur était confiée ; j'espérais que l'effet cesserait avec la cause ; malheureusement mon espoir a été déçu.

Mon amendement a bien fait cesser l'intérêt que l'on avait naguère à favoriser la chasse dont certains personnages jouissaient alors presque exclusivement, mais il n'a pas mis fin aux petites passions, aux amours propres froissés et aux animosités si communes aux chasseurs désappointés. Aussi toutes les requêtes qui ont été présentées depuis l'adoption de la loi sur la chasse, au ministre précédent, par les habitants voisins de la forêt de Soignes, pour être réintégrés dans un droit d'usage dont ils avaient été injustement dépouillés, ont-elles subi le même sort que celles présentées antérieurement, après avoir été renvoyées à l'avis des employés forestiers que la chose concerne.

Dans ces circonstances il ne me reste qu'à faire un appel au cabinet nouveau et à supplier M. le ministre des finances d'ouvrir une enquête sévère sur les faits que je viens de signaler ; il est bien entendu que cette enquête devrait se faire par des hommes impartiaux et complètement désintéressés dans la question, c'est-à-dire par des agents étrangers à l'administration de la forêt de Soignes.

Cette enquête ainsi faite démontrerait, j'en ai la conviction, d'abord qu'en respectant l'usage dont ont joui de temps immémorial les communes limitrophes de la forêt, on procurerait une ressource nouvelle au trésor de 40 à 50,000 fr., ensuite que l'économie forestière est intéressée dans la solution de la question : en effet, si les herbages croissant dans les parties défensables de la forêt, au lieu de profiter aux habitants qui en ont toujours joui et qui demandent à continuer à en jouir moyennant une juste indemnité, sont condamnés à périr sur pied, savez-vous, messieurs, ce qui résulte de cet état de choses ? C'est que des tas d'ordures, je dirai même de pourriture, attirent une grande quantité d'insectes et de souris entre autres, qui attaquent l'écorce des arbres et finissent par pénétrer dans les parties non défensables et par détruire les jeunes plants. Déjà sur plusieurs points de la forêt les faits constatent que mes craintes sont loin d'être exagérées.

Et qu'on ne dise pas, qu'en accordant l'entrée de la forêt aux habitants des communes voisines pour y exercer des droits de pacage ou au moins de faucillage, on facilite les délits de maraudage, au grand détriment de l'Etat, car je soutiens que c'est justement le contraire. Il est évident que si vous mettez les habitants des communes limitrophes de la forêt au-dessus du besoin, en leur donnant le moyen de nourrir une ou plusieurs bêtes à cornes, par cela même vous rendrez les délits de maraudage beaucoup plus rares ; j'ajouterai, qu'en rendant justice à ceux qui la réclament en vain depuis plusieurs années, vous ferez chose utile à la généralité, et vous sauvegarderez d'autant mieux la propriété nationale.

Je supplie donc itérativement M. le ministre des finances de donner toute son attention à une question dont la solution, tout en réparant une injustice, peut fournir au trésor une ressource nouvelle de 40 à 50 mille francs.ee qui n'est pas à dédaigner dans la position de nos finances.

M. de Garcia. - Messieurs, je n'ai pas demandé la parole pour combattre l'idée émise par l'honorable M. Verhaegen ; mais s'il réduisait sa pensée à la seule forêt de Soignes, il manquerait son but, et dès (page 418) lors je ne sais pourquoi l'honorable membre, en parlant d'un usage immémorial, n'a parlé que de la forêt de Soignes.

M. Verhaegen. - J'ai parlé de ce que je savais.

M. de Garcia. - Dans toutes les forêts de l'Etat, il est défendu d’aller recueillir l'herbe, les feuilles et les bois morts. Et le motif en est bien simple ; c'est qu'en allant couper l'herbe, c'est qu'en allant ramasser les feuilles, on enlève les jeunes plants qui doivent servir à repeupler la forêt.

Cependant quand les bois sont déclarés défensables, il est possible qu'il n’y ait pas grand inconvénient à autoriser l'usage dont il s'agit ; mais alors, permettez-moi de l'observer : de ce chef, le revenu de l’Etat serait insignifiant, parce qu'on déclare un bois défensable, lorsqu'il n'y vient presque plus d'herbe, c'est-à-dire lorsque les bois out déjà acquis une grande élévation.

Au surplus, je le répète, je ne m'oppose pas à ce que les considérations émises par l'honorable M. Verhaegen soient méditées par le gouvernement.

J'ajouterai pourtant que dans ma pensée, quoi qu'on fasse a cet égard, la proposition de l'honorable membre sera bien plus loin d'atteindre le but qu'il se propose.

Son adoption n'aura qu'un résultat nul ou au moins insignifiant.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - L'honorable M. Verhaegen a présenté la proposition d'une manière vraiment séduisante. Il a dit qu'il obtiendrait un revenu de 40 ou 50,000 fr. de plus, qu'on ferait à la fois un acte de justice et en même temps de bonne économie forestière. Si de pareils avantages doivent être la conséquence des mesures qu'il a indiquées, il faut qu'il y ait d'autres considérations qui aient empêché l'administration de faire droit à ce que l'honorable député de Bruxelles croit que l'on devrait faire ; car il m'est impossible d'admettre que des vues d'intérêt personnel ou un but d'agrément aient jusqu'à présent contrebalancé les intérêt de l'administration. J'ai pris uniquement la parole pour ne pas laisser peser, sans réponse de ma part, des soupçons sur les fonctionnaires et agents du département des finances qui ont cette branche de service dans leurs attributions.

M. Mercier. - Je dois d'abord déclarer, messieurs, que j'ai la conviction que l'honorable M- Verhaegen est dans l'erreur, lorsqu'il suppose que l'administration se serait laissé guider par la passion ou par quelque motif étranger à l’intérêt public. On peut supposer que les agents de l'administration se soient trompés, ce que, toutefois, je ne crois aucunement ; mais leurs intentions ne peuvent pas être suspectées. Je connais leur impartialité et leur entière probité administrative. Les raisons indiquées par l’honorable M. de Garcia sont précisément celles qui ont porté le gouvernement à prendre la mesure dont se plaint l'honorable membre. Du reste, puisqu'une nouvelle information est demandée, je ne m'oppose nullement à ce que le ministère actuel s'enquière avec soin de l'état des choses.

M. Malou. - Messieurs, j'ai été appelé à statuer deux fois sur des réclamations du genre de celles dont l'honorable M. Verhaegen vient de nous entretenir. J'ai examiné avec le plus grand soin les observations produites de part et d’autres, et j'ai cru devoir résister à la demande des réclamants. Le premier motif de refus est celui-ci : en coupant l'herbe-on coupe les jeunes plants et on empêche le repeuplement de la forêt ; la deuxième raison, qui s'applique plus spécialement à la forêt de Soignes, c’est qu'en laissant entier dans la forêt beaucoup de personnes qui viennent y couper de l'herbe, on multiplie nécessairement les délits de maraudage. Des personnes qui s'introduisent dans la forêt pour couper de l'herbe, peuvent emporter, par distraction sans doute, de jeunes chênes ou d'autres arbres, et nuire ainsi considérablement aux produits futurs de la forêt de Soignes.

Cette deuxième raison s'applique plus spécialement à la forêt de Soignes parce que les autres forêts sont entourées de populations peu nombreuses, tandis que la forêt de Soignes, par suite des défrichements et à cause du voisinage de la capitale, se trouve entourée de populations assez agglomérées.

Je ne crois pas, messieurs, que le but des pétitionnaires serait atteint si l'on permettait de prendre de l'herbe dans les parties défensables. car dans les parties défensables il n'y a pas d'herbe.

On a invoqué la grande pénurie de terres dans les environs ; je comprends, jusqu'à un certain point, que l'usage dont il s'agit ait été toléré autrefois lorsque l'étendue de la forêt de Soignes était le triple de ce qu'elle est aujourd'hui, mais je ne pense pas qu'une semblable considération puisse encore avoir quelque valeur maintenant.

Les motifs que j'ai indiqués sont les seuls qui aient déterminé l'opinion des agents de l'administration. Je puis au moins affirmer, en ce qui me concerne, que ce sont les seuls qui aient déterminé la décision prise par le gouvernement.

M. de Mérode. - Je suis loin de vouloir critiquer l'administration de la forêt de Soignes, mais je ne puis pas admettre que dans les parties défendables il n'y ait plus d'birbe. Je connais des endroits où les habitants ont le droit d'usage dans les partira défensables, et où il y a certainement de l'herbe dans ces parties ; car, sans cela, on n'y mènerait pas les animaux. Si les usages qui existaient sous le gouvernement autrichien, sous le gouvernement des Pays-Bas, et sous l'administration de la Société Générale ont été changés, il en résulte nécessairement une perturbation dans la vie des habitants des communes qui se trouvait autour de la forêt.

Sans rien préjuger, je recommanderai à M. le ministre des finances de vouloir bien examiner s'il y a un inconvénient grave à laisser les choses comme elles étaient dans les temps précédents.

Il faut aussi, tout en considérant l'intérêt de la forêt, considérer l’intérêt des habitants qui l'entourent, et d'anciennes habitudes qui n'ont pas été considérées comme nuisibles à la croissance du bois dans ces forêts, puisqu'elles ont été tolérées par toutes les administrations précédentes. Il ne faut pas non plus exagérer certaines mesures pour faire gagner une bagatelle à la forêt tout en causant un préjudice considérable aux habitants.

M. David. - Il me paraît que ce qui fait du mal dans une localité doit également en faire dans d'autres. Je sais pertinemment, puisque j’habite le voisinage de l’Hertogenwald. que dans cette forêt on fait des coupes de foin. Si ces coupes font du mal dans la forêt de Soignes, elles doivent également en faire dans la forêt d'Hertogenwald et dès lors je ne comprends pas qu'on les permette plus dans l'une que dans l'autre. Ce qui fait du mal dans l’Hertogenwald, c'est la grande quantité de gibier qui s'y trouve. Le gibier détruit tous les jeunes mélèzes, à tel point qu'il devient complètement inutile d'en planter.

M. Verhaegen. - Qu'on ne perde pas de vue que la réclamation que je soumets au gouvernement ne concerne que le droit de pacage ou tout au moins le droit de faucillage à exercer dans les parties défensables de la forêt, ce qui répond suffisamment aux objections de l'honorable M. Malou. L'honorable M. de Mérode et moi, qui connaissons parfaitement les localités, nous savons très bien que dans les parties défensables de la forêt de Soignes, il y a de l'herbe et par suite, quoi qu'on en dise, ma réclamation a un objet réel et déterminé.

Qu'on n'oublie pas d'ailleurs que le droit que je réclame est un droit à titre onéreux, et que si le gouvernement restait silencieux à l'égard d'une réclamation si juste et si bien fondée, il ne resterait aux intéressés que le recours aux tribunaux.

M. Malou. - Messieurs, le domaine de l'Etat est administré, comme le domaine d'un bon père de famille, en vue du revenu. Jamais je n'ai rencontré, ni pu suspecter des motifs analogues à ceux que l'honorable M. Verhaegen persiste à attribuer aux agents supérieurs de l'administration. La preuve que ces motifs n'ont pu les diriger résulte de l'exposé de l'honorable M. Verhaegen lui-même ; s'ils avaient eu seulement des motifs, ils n'eussent pas persisté dans leur opposition, depuis la nouvelle loi sur la chasse.

Je ne puis pas m'opposer à ce que le gouvernement fasse un nouvel examen de la question. Mais je tenais à ce qu'il fût bien constaté que ce sont exclusivement les intérêts d'une bonne administration de nos forêts qui ont déterminé les actes des agents de l'administration, actes que j'ai approuvés, en n’accueillant pas les pétitions.

On objecte qu'il s'agit d'un droit pour les malheureux ; il ne peut pas s'agir d'un droit, car s'il s'agissait d'un droit d'usage, on ne s'adresserait pas au gouvernement, mais aux tribunaux, et l'on obtiendrait gain de cause.

On convie donc en réalité le gouvernement à entrer dans une voie différente de celle qu'il a suivie pour l'exploitation d'une partie du domaine national, et dont il n'a pas cru pouvoir s'écarter jusqu'à présent, pour ne pas nuire aux intérêts de l'Etat.

On objecte ce qui se fait dans la forêt de Hertogenwald ; mais pour autant que je sois bien informé, la position n'est pas la même ;on y met chaque année en adjudication le foin des éclaircies ; mais il s'agirait, au contraire, ici de permettre aux populations voisines de la forêt de Soignes d’entrer dans cette forêt pendant une partie de l'année, et d'y couper les herbes dans les taillis.

M. de Garcia. - Messieurs, je serai très court dans les observations que j'aurai à présenter à la chambre, relativement à la dernière considération qu'a fait valoir l'honorable M. Verhaegen.

L'honorable membre avance que de temps immémorial on a concédé aux habitants voisins des forêts de l'Etat le droit d'y aller cueillir l’herbe et ramasser le bois mort, et ce moyennant une rétribution.

Je dois déclarer que, dans la province que j'ai l'honneur de représenter dans cette enceinte, un pareil usage n'a jamais existé.

Quant à la forêt de Soignes, l’honorable M. Verhaegen affirme que de temps immémorial l’usage qu'il réclame a été exercé. C'est ce dont il me doit être permis de douter, à moins de supposer que l'administration générale des forêts ait eu deux poids et deux mesures.

Tout ce qui est constant à cet égard, c'est que l'administration delà Société Générale, lorsque la forêt de Soignes était sa propriété, en agissait comme l'a indiqué l'honorable M. Verhaegen. Mais cela ne prouve rien, puisqu'alors la Société Générale n'exerçait qu'un droit de propriété comme peut faire tout citoyen sur sa propriété privée.

En principe je pense que toutes les forêts nationales ont été et doivent rester soumises à la règle générale qui consiste à empêcher les particuliers à aller ramasser l'hiver les feuilles et le bois mort dans ces forêts. Il est sans doute à regretter, dans l'intérêt d'une classe peu aisée de citoyens, que cette mesure existe ; mais dès qu'elle est pratiquée dans une localité, elle doit l'être partout.

Au surplus, si l'usage invoqué par l'honorable M. Verhaegen existait comme il le dit, la question qu'il a soulevé serait du domaine des corps judiciaires.

Il y aurait droit acquis ; ce serait dès lors aux tribunaux à décider le temps et à déclarer les conditions sous lesquelles les habitants des communes pourront exercer le droit et l'usage qu'on invoque.

(page 419) Il ne faut pas perdre de vue aussi que le décret de nivôse an XIII a singulièrement modifié les droits de la nature de ceux dont nous nous occupons. Celle loi déclare formellement que, nonobstant tout titre contraire, l'exercice de certains droits d'usage, dans les forêts est soumis à la condition que les bois soient déclarés défensables. Or, cette déclaration devant être faite par l'administration forestière, cette dernière ne la fait guère que lorsque des bois ont atteint une hauteur de 10 à 12 pieds et qu'il ne croît plus qu'une herbe insignifiante à ces pieds.

Cette considération répond de nouveau à l'observation de M. Verhaegen qui vient d'être appuyée par M. le comte de Mérode.

- L'article est adopté.


« Fermages de biens-fonds et bâtiments, de chasses et de pêches ; arrérages de rentes ; revenus des domaines du département de la guerre : fr. 400,000. »

- Adopté.


« Produits de l'école vétérinaire et d'agriculture : fr. 60,000. »

- Adopté.


« Intérêts de créances du fonds de l'industrie et de créances ordinaires : fr. 180,000. »

- Adopté.


« Restitutions et dommages-intérêts en matière forestière : fr. 100. »

- Adopté.


« Restitutions volontaires : fr. 100. »

- Adopté.


« Abonnements au Moniteur et au Recueil des Lois : fr. 29,000. »

- Adopté.

Trésor public

« Produits divers des prisons (pistoles, cantines, vente de vieux effets : fr. 85,000. »

- Adopté.


« Intérêts de 13,438 obligations de l'emprunt de 30,000,000 de francs, à 4 p. c., provenant de l'emploi de l'ancien caissier général, sans préjudice aux droits envers le même caissier, dont il est fait réserve expresse : fr. 537,520. »

M. Nothomb. - Messieurs, l'encaisse de 1830 se compose de fonds de l'Etat et de fonds provinciaux. La province de Luxembourg n'a obtenu sa part qu'en 1845 ; elle n'a pu, à raison de sa position spéciale, l'obtenir plus lot.

Le gouvernement a cru en 1845 pouvoir se borner à remettre à la province de Luxembourg le capital de sa part afférente ; il a retenu les intérêts qu’il avait perçus.

Je demande la permission à la chambre d'appeler un moment son attention sur la question que le refus du gouvernement soulève.

D'après moi, la question peut être ramenée à des termes très simples.

Le gouvernement a perçu les intérêts ? à quel titre les a-t-il perçus ? Il les a perçus comme negotiorum gestor de la province de Luxembourg. Il y avait doute. On traitait avec la conférence de Lombes, avec le gouvernement des Pays-Bas, soit à Utrecht, soit à la Haye ; et dans l'intervalle, la province de Luxembourg a été privée d'abord du capital qui lui revenait, capital dont il était impossible de constater le montant, faute de documents nécessaires ; elle a été privée eu outre, par une conséquence nécessaire, des intérêts que le gouvernement à Bruxelles percevait en son nom. J'insiste sur ce point, c'est sous ce point de vue qu'il faut envisager la question.

L'encaisse de 1830 était devenu productif d'intérêts par la convention du 8 novembre 1855 conclue avec la Société Générale. L'encaisse est devenu productif d'intérêts dans toutes ses parties, non seulement quant aux fonds de l'Etat, mais aussi quant aux fonds provinciaux confondus avec les autres. La province de Luxembourg n'a pas pu indiquer sa pari afférente, néanmoins l'Etal, constitué gérant des affaires de cette province, percevant les fruits de la chose déposée, n'a pu percevoir ces fruits qu'au nom de la province qui malheureusement ne pouvait pas indiquer quelle part lui revenait.

Le département des finances a donc tort de se considérer comme un débiteur ordinaire, contre lequel la province de Luxembourg aurait eu longtemps une créance douteuse, et de «lire : Le procès a cessé en 1845 ; le, jour où le litige a cessé, j'ai remis à la province de Luxembourg ce qui lui revenait.

Le gouvernement n'est pas, vis-à-vis de la province de Luxembourg, dans le cas d'un débiteur avec lequel la province aurait eu un procès. La province de Luxembourg, par la force des choses, avait un mandataire dans la personne du gouvernement ; c'est ce mandataire qui a défendu ses intérêts à Utrecht et à la Haye. La province doit lui en savoir gré ; mais au jour où la contestation internationale a été décidée le gouvernement devait lui remettre non seulement le capital, mais les intérêts perçus par lui au nom de la province.

Lu département des finances prend le change sur le titre en vertu duquel l’Etat belge est resté indirectement détenteur des fonds. Le gouvernement a été, pour le caissier de l'Etat, détenteur des fonds comme negotiorum gestor, il a représenté les intérêts de la province comme les intérêts de l’Etat, vis-à-vis des puissances étrangères dans la contestation dont il s’agissait.

Le département des finances se trompe aussi sur la portée de la loi du 25 mai 1838. La législature a porté une loi en un article unique ainsi, conçu : (L’honorable membre donne lecture de cette loi.)

En vertu de cette loi, le gouvernement à partir de 1838, a dû remettre aux provinces qui se présentaient munies des documents nécessaires les capitaux qui leur revenaient dans l'encaisse ; mais il n'a pas pu faire cette remise aux provinces qui, par des circonstances en dehors de leur volonté, ne pouvaient produire les documents nécessaires. La province de Luxembourg se trouvait dans ce cas ; conséquemment, elle a été privée jusqu'en 1845 de sa quote-part de l'encaisse. Depuis 1838 le gouvernement a continué à comprendre annuellement dans les intérêts renseignés au budget la part qui revenait à la province de Luxembourg.

En 1845, quand la question a été éclairée, quand les documents qui manquaient ont été produits, le gouvernement devait remettre à la province de Luxembourg non seulement les capitaux, mats les fruits perçus par lui dans l'intervalle au nom de cette province.

Il ne pouvait pas dire : Il fallait me constituer en demeure. C'est un langage qu'on peut tenir à un créancier ordinaire ; il n'y avait pas litige entre le gouvernement et la province, mais entre l'Etat belge et la Hollande.

Le gouvernement belge était le gérant des affaires de la province de Luxembourg, le représentant de cette province dans la contestation internationale dont il s'agissait. A mes yeux, il n'y avait aucun motif, même en droit, pour ne pas lui remettre et le capital et les intérêts perçus ; à plus forte raison n'y en avait-il pas en équité.

Pour faire fléchir les considérations d'équité, il faudrait avoir un texte formel à invoquer. Or, il n'y en a pas et les considérations d'équité sont évidentes. L’Etat belge a touché les intérêts depuis 1833 ; dès lors, il doit, aux termes des principes inscrits au code civil, tenir compte des fruits perçus comme dépositaire, ou comme mandataire, la position reste la même ; les principes du droit commun sont là ; la province peut les invoquer.

Je désire que M. le ministre ne considère pas la première réponse qui a été faite par l'honorable M. Malou comme un rejet définitif, et qu'il examine de nouveau cette question. Il s'agit d'une somme de 30 mille francs ; peut-être la province serait forcée d'intenter au gouvernement un procès qui parcourrait tous les degrés de juridiction. La somme n'est pas assez importante pour qu'il faille en venir là.

M. de Theux. - Les motifs invoqués par l'honorable préopinant en faveur du Luxembourg, existent pour le Limbourg. Il s'agit d'une perte d'intérêts de 1835 à 1845. Les autres provinces ont récupéré en 1838 la part qui leur revenait de l'encaisse de 1830. Le Limbourg et le Luxembourg ne l'ont eue qu'en 1845. Il y a donc une différence de sept années.

L'honorable M. Nothomb a parfaitement développé tous les motifs de droit qui militent en faveur de ces provinces, je ne prends la parole que pour ajouter une considération spéciale. Il serait souverainement injuste que le gouvernement profilât de la difficulté qu'ont eue à faire valoir leurs droits les provinces qui ont eu le plus à souffrir des événements politiques et qui sont les plus dénuées de ressources, pour retenir ce qui leur est légitimement dû.

Si le Limbourg et le Luxembourg n'ont pas récupéré leur part en 1838, c'est aux circonstances politiques qu'il faut l'attribuer. Ces provinces ont fait les frais de la paix, il n'est pas juste d'aggraver leur situation en les privant pendant sept ans des intérêts, quand les autres provinces en ont joui.

S'il y avait quelque chose à objecter au point de vue du droit, au point de vue de l'équité, on ne peut pas du moins leur refuser les intérêts de 1838 à 1845.

C'est une autre manière d'envisager la question. Si la chambre ne croyait pas pouvoir admettre dans toute leur étendue, la réclamation des intérêts de 1835 à 1845, elle ne peut pas se refuser à l'admettre de 1838 à 1845.

M. Malou. - Tous les motifs que les honorables MM. Nothomb et de Theux viennent de faire valoir en faveur des provinces de Luxembourg et de Limbourg sont également applicables à d'autres provinces du royaume, et notamment à la Flandre occidentale. Voici les faits :

Dans l'encaisse de 1830, se trouvaient des fonds appartenant aux provinces. L'encaisse a été improductif pour l'Etat de 1830 à 1833. De 1833 à l'époque des remboursements faits successivement, il a produit des intérêts.

.. Une loi de 1838 a autorisé la restitution des capitaux compris dans l'encaisse. Cette restitution a eu lieu dès 1838, pour les provinces autres que celles de Luxembourg et de Limbourg. En vertu de la même loi, la restitution a été faite à ces dernières provinces, après les arrangements conclus avec la Hollande. Vous le voyez donc, si la réclamation des provinces de Luxembourg et de Limbourg est fondée, quant à toute la durée de la privation de leur jouissance, elle l’est par le même motif, pour les autres provinces, en ce qui concerne l'intervalle du 8 novembre 1833 à l'époque de la restitution, en 1838 ou 1839.

Lorsque la question m'a été posée par la députation permanente du Luxembourg, j'ai répondu que la loi de 1838 concernait exclusivement des capitaux, et qu'en restituant aux provinces de Limbourg et de Luxembourg ce qui leur appartenait dans l'encaisse, comme aux autres (page 420) provinces, on exécutait entièrement la loi, que les autres provinces n avaient également reçu que le remboursement de capitaux.

Je ne pense pas que cette première réponse, faite en avril 1846, ait été suivie d'une réplique motivée de la part de la députation permanente.

Du reste, cette question, au point de vue nouveau auquel se sont placés les honorables MM. Nothomb et de Theux, mérite un examen, elle est digne de fixer l'attention du gouvernement. Mais si le gouvernement croit devoir soumettre une proposition à la chambre, il ne doit pas la restreindre aux provinces de Luxembourg et de Limbourg. En vertu du même principe, la disposition devrait comprendre les provinces qui ont eu une part dans l'encaisse.

M. Orban. - Cette question est la même que celle que j'ai soulevée lors de la discussion du budget des voies et moyens, l'année dernière et l'année précédente.

L'honorable M. Malou m'a répondu alors qu'il n'avait pas reçu de réclamation de la part de la députation permanente de la province de Luxembourg. cette réclamation existait. Mais l'honorable M. Malou ne la connaissait pas. Elle a été renouvelée depuis cette époque ; le gouvernement en est maintenant légalement saisi.

Nous ne demandons pas à être mis en possession des intérêts depuis 1830 ; en d'autres termes, nous ne demandons pas, comme l'a prétendu l'honorable M. Malou, les intérêts de la somme pendant tout le temps qu'a duré la privation de la jouissance du capital.

Cette demande ne serait nullement fondée ; car nous demanderions au gouvernement lui-même de payer des intérêts qu'il n'a pas reçus. Pour qu'il dût le faire, il faudrait qu'il eût été constitué en demeure, ce qui n'a pas été fait.

Mais nous demandons au gouvernement de payer les intérêts depuis 1833, c'est-à-dire depuis qu'il les a perçus lui-même. Il ne peut les avoir perçus que pour le compte des provinces, et il en doit la restitution aux termes de l'article 1376 du Code civil ainsi conçu :

« Art. 1376. Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû, s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu. »

L'honorable M. Malou ajoute que si les provinces de Luxembourg et de Limbourg ont des droits, les autres provinces en ont également.

Je suis parfaitement d'accord avec lui sur ce point. Seulement, le droit des provinces de Luxembourg et de Limbourg est beaucoup plus étendu que celui des autres provinces. En d'autres termes, les autres provinces n'ont été privées des intérêts reçus par le gouvernement que depuis 1833 jusqu'en 1838, tandis que les provinces de Luxembourg et de Limbourg, par des circonstances indépendantes de leur volonté, n'ont été remboursées qu'en 1845.

Voilà la seule différence entre les provinces. Aussi nous n'avons pas contesté les droits des provinces autres que celles de Limbourg et de Luxembourg.

Toutefois il en est qui n'avaient presque rien à prétendre dans l'encaisse.

Les provinces de Luxembourg et de Limbourg et après elles la Flandre occidentale et le Hainaut sont les seules qui aient dans cette affaire un intérêt majeur quelque peu considérable.

M. Donny. - La province de Luxembourg avait des fonds provinciaux chez le caissier général résidant à Bruxelles, et chez son agent résidant à Luxembourg. Quant aux fonds provinciaux qui se trouvaient à Bruxelles, qui ont été attribués par traité au gouvernement belge et sur lesquels ce gouvernement a reçu des intérêts depuis le 1er novembre 1833, il ne peut y avoir aucun doute, me paraît-il. L'Etat ne peut s'enrichir aux dépens d'une province. Ce que l'Etat a reçu d'intérêts sur des capitaux provinciaux, il faut qu'il le restitue aux provinces, et si la loi qui a ordonné le remboursement de ces fonds provinciaux n'est pas de nature à autoriser le remboursement des intérêts, il faut à mon avis que le ministre des finances propose une loi nouvelle qui permette au trésor de payer cette dette que je considère comme sacrée.

Quant aux fonds qui se trouvaient chez l'agent du caissier général à Luxembourg, la question est moins simple. Il s'est élevé des difficultés entre le gouvernement des Pays-Bas et le gouvernement belge, au sujet de la restitution de ces fonds. J'ignore quel a été en définitive le résultat de cette contestation. M. le ministre des finances pourra se faire remettre le dossier de l'affaire, voir si le gouvernement belge a reçu ces fonds et en a perçu des intérêts.

Si des intérêts ont été perçus, ce que je viens de dire pour les fonds qui se trouvaient à Bruxelles est également applicable aux fonds restés à Luxembourg.

Pour la province de Limbourg, il en est absolument de même. Elle aussi avait des fonds qui se trouvaient à Bruxelles et d'autres au chef-lieu de la province.

Quant aux provinces qui ont reçu leurs capitaux, et qui n'ont pas reçu les intérêts que le gouvernement a perçus pour leur compte, il va de soi que le gouvernement doit les leur restituer.

Telle est du moins mon opinion.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - Messieurs, les explications de mon honorable prédécesseur ont mis la chambre à même d'apprécier quelle est la situation de cette question.

On a dit que les remboursements avaient été faits à un grand nombre de provinces et de communes, sans aucune réserve de leur part en ce qui concerne les intérêts. Il s'agirait de savoir si ces provinces et ces communes ont encore des droits à faire valoir.

La province qui a fait des réclamations est le Luxembourg. Tout récemment sa députation permanente a adressé une lettre à ce sujet au département des finances. J'étais occupé à examiner de nouveau cette question lorsqu'elle a été soulevée dans cette chambre. Les observations qui ont été faites me mettront à même de l'apprécier d'autant mieux.

Mais les conséquences de cet examen seront celles-ci : C'est que si les réclamations sont fondées, il faudra que je présente à la chambre un projet de loi, car il n'y a pas de crédit pour payer.

Je me borne à ces observations et je promets un prompt et mûr examen de la question.

M. Orban. - J'ai demandé la parole pour rectifier un point de fait énoncé par l'honorable M. Donny, qui faisait, je crois, partie de la commission d'Utrecht.

On a cru, en effet, à Utrecht, qu'une partie des fonds de l'encaisse provincial du Luxembourg était restée dans la caisse de l'agent de la Société Générale à Luxembourg. Mais c'était une erreur. Le caissier de la Société Générale à Luxembourg avait transféré sa caisse à Arlon à l'époque de la révolution, de manière que la totalité des fonds constituant cet encaisse était réellement dans la caisse de la Société Générale, et que le gouvernement a reçu l'intérêt sur cette totalité.

Ce point a été ultérieurement constaté, et je pourrais en donner la preuve au moyen de l'exposé de la situation administrative de la province de Luxembourg qui renferme l'exposé complet de cette affaire que j'ai à la main.

M. de Muelenaere. - Messieurs, la question qu'on a soulevée dans l'intérêt du Luxembourg et du Limbourg est la même pour plusieurs autres provinces du royaume, et notamment elle concerne la Flandre occidentale et le Hainaut.

Je pense que M. le ministre des finances est dans l'erreur, lorsqu'il croit qu'aucune réclamation n'a été faite de la part de ces provinces.

Chaque année, la Flandre occidentale, et je crois que le Hainaut est dans la même position, chaque année, ces deux provinces ont réclamé le payement des intérêts qui leur étaient dus sur l'encaisse du trésor.

Dès lors, messieurs, il me semble que le gouvernement doit examiner la question dans son entier, qu'il ne suffît pas de faire droit aux réclamations du Limbourg et du Luxembourg, mais qu'il faut également faire droit aux réclamations des autres provinces, si ces réclamations. sont reconnues fondées.

M. Nothomb. - Messieurs, en un mot, il y a trois périodes : la première, de 1830 à 1833 ; la seconde, de 1833 à 1838 ; la troisième, de 1838 à 1845.

Pendant la première période, l'encaisse a été improductif ; aussi les provinces ne demandent-elles rien au gouvernement.

Pendant la deuxième période, de 1835 à 1838, l'encaisse était devenu productif. En 1838, le gouvernement a été autorisé à prélever les capitaux, dit la loi du 25 mai, au profit des provinces qui réclameraient. Mais pour réclamer il fallait être en mesure de faire les justifications nécessaires. Sept provinces se rencontrent dans cette deuxième période. Il est évident que si ces provinces avaient négligé de faire les réclamations nécessaires, ayant tous les documents qu'il fallait, elles devraient s'en prendre à elles-mêmes si, à partir de 1838, elles n'avaient pas obtenu le remboursement ; néanmoins leurs droits restent intacts quant aux intérêts pour la période de 1833 à 1838 ; elles n'avaient pas de réserve à faire.

Enfin la troisième période ne semble concerner que les provinces de Luxembourg et de Limbourg, qui seules, par la force des circonstances, étaient dans l'impossibilité de faire les justifications nécessaires, de jouir du bénéfice de la loi du 25 mai 1838.

Voilà comment la question se présente, et il me semble qu'elle est claire.

- L'article est mis aux voix et adopté.


La section centrale propose de porter au budget l'article nouveau suivant :

« Intérêts des capitaux tenus en réserve jusqu'à la liquidation définitive des créances mentionnées à l'article 64 du traité conclu entre la Belgique et le royaume des Pays-Bas, le 5 novembre 1842 : fr. 299,500. »

M. Osy. - Messieurs, c'est une nouvelle recette que porte au budget des voies et moyens ,la section centrale d'accord avec le gouvernement.

Nous portons en recette une somme de 300,000 fr. qui représente un capital de 12 millions environ, provenant des restes du forfait de 7,000,000 de florins fait avec les Pays-Bas. Jusqu'ici on n'a liquidé que pour près de 3 millions de francs sur ce forfait.

Messieurs, longtemps avant le traité de 1839, il se trouvait au ministère des finances des réclamations que je crois très légitimes et qui me paraissent devoir être liquidées sur cette somme. En peu de mots, je vous ferai la narration de ces réclamations. Pendant notre réunion avec la France, toutes les dettes des Etats de la Belgique ont été liquidées et portées à la charge du gouvernement français. En 1814, lors de la paix avec la Hollande, on a fait payer à la France une contribution de guerre au profit des Pays-Bas, et on a fait une liquidation générale. La France a dit : J'ai liquidé vos dettes, il est donc juste que vous repreniez à votre charge les dettes liquidées des anciens Etats de Belgique. Mais les liquidateurs des Pays-Bas ont dit : (page 421) Vous n'avez pas payé pendant cinq ans les intérêts : ces cinq années d'intérêt doivent être déduites du capital dont les Pays-Bas ont à tenir compte à la France. La France a reconnu la justice de cette réclamation, et a tenu compte aux Pays-Bas des cinq années d'intérêts.

Les administrations qui avaient de la rente française ont toujours réclamé ces cinq années d'intérêt. En 1837, quand on voyait approcher le moment de la paix avec la Hollande, un ancien membre de la commission de liquidation de 1814 et 1815, a donné à cet égard tous les renseignements nécessaires à l'honorable M. d'Huart. C'est l'honorable M. de Peneranda, qui habile Bruges.

Le gouvernement des Pays-Bas a liquidé quelques-unes de ces rentes, mais il en est beaucoup qui ne le sont pas. Plusieurs de nos administrations, des hospices, des bureaux de bienfaisance ont encore leurs rentes originaires de cette liquidation. Je sais que les hospices d'Anvers ont entre autres pour 20,000 fr. de rentes sur le trésor français, provenant de cette liquidation.

L'honorable M. d'Huart ayant reçu à cet égard tous les renseignements nécessaires, je pense que nos liquidateurs à Utrecht auront fait valoir ces réclamations, et que c'est en partie pour y faire droit que le gouvernement des Pays-Bas a accordé une somme aussi forte, somme sur laquelle on n'a encore liquidé que pour trois millions.

Je crois, messieurs, que cette réclamation est de toute justice et je ne conçois pas que le gouvernement ait pu se refuser à l'admettre. Je ne demande pas qu'on donne ces intérêts à tous ceux qui avaient des rentes françaises mais je demande qu'on les donne à ceux qui ont toujours possédé ces rentes, qui n'ont pas fait de mutations ; et beaucoup d'administrations de bienfaisance se trouvent dans ce cas. Il en est notamment dans la Flandre occidentale, et l'honorable M. de Muelenaere doit les connaître. Je me suis rendu à Bruges, j'y ai examiné, avec M. de Peneranda, des réclamations de ce genre et je dois dire que je les ai trouvées entièrement fondées ; c'est véritablement une affaire de conscience pour la Belgique.

Je ne demande pas que M. le ministre des finances réponde immédiatement ; mais on lui a renvoyé hier une réclamation d'un M. Pasque de Liège, réclamation qui a quelque rapport avec celles dont il s'agit en ce moment, je prierai M. le ministre de vouloir bien examiner les deux affaires et de nous donner ensuite des explications sur l'une et sur l'autre en même temps.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - Je ne crois pas, messieurs, qu'il faille en ce moment-ci approfondir la question ; mais il me serait facile de répondre d'une manière décisive, si je savais en fait que la commission de liquidation a statué sur les réclamations que l'honorable député d'Anvers a en vue. Dans ce cas, il n'y aurait plus à revenir, car les résolutions des commissaires délégués sont souveraines. Toute recherche, tout examen ultérieur serait sans résultat possible. Ce caractère d'irrévocabilité, contesté d'abord, est reconnu par les tribunaux, et notamment par un arrêt de la cour d'appel de Bruxelles fortement motivé.

S'il s'agit de réclamations qui peuvent être produites dans les conditions, auxquelles les intéressés ont dû se soumettre, ce serait autre chose. Mais je ne crois pas qu'il en existe. Deux de mes prédécesseurs ont approuvé des décisions qui écartaient le payement des intérêts pour plus de cinq ans. Je n'y puis rien changer.

Quant à la requête du sieur Pasque, déposée hier sur le bureau, si la chambre le désire je puis immédiatement lui fournir les explicitions demandées.

Plusieurs membres. - Non ! non ! pas maintenant.

M. Donny. - Je pense, messieurs, qu'il y a erreur et dans ce que vous a dit l'honorable M. Osy et dans ce que vous a dit l'honorable ministre des finances.

L'honorable M. Osy pense que si le gouvernement des Pays-Bas a concédé à la Belgique une somme aussi forte que celle que nous avons reçue, cela provient en partie de ce que l'on a eu égard à la réclamation provoquée par M. de Peneranda. Eh bien, je dois dire à l'honorable membre et à la chambre qu'il n'en est rien. Les pièces diplomatiques déposées au département des finances et au département des affaires étrangères font foi que les commissaires belges à Utrecht ont fait inutilement des efforts pour faire adopter le système préconisé par M. de Peneranda, et qu'ils ont dû y renoncer pour ne pas s'exposer à une suspension, peut-être même à une rupture des négociations. Ainsi le système présenté par M. de Peneranda n'a exercé aucune influence sur les résultats obtenus. La somme que la Hollande a concédée à la Belgique à titre de forfait pour la liquidation des anciennes créances, a été accordée par des considérations d'une nature toute différente.

J'ai dit que, selon moi, l'honorable ministre des finances était également tombé dans une erreur. Voici de quelle manière. L'honorable ministre des finances nous a dit, messieurs, que les commissions de liquidation rendaient des décisions souveraines ; oui, leurs décisions sont souveraines en ce sens que, d'après les traités et d'après toute la législation sur la liquidation des anciennes créances, l'intervention des tribunaux est complètement exclue de cette liquidation ; de manière qu'une décision rendue par une commission de liquidation ne puisse en aucun cas être réformée par un tribunal quelconque et que l'ordre judiciaire ne peut être saisi d'aucune de ces questions ; mais suit-il de là que tout ce que décident les commissions de liquidation doive passer de plein droit en force de chose jugée ? Je ne le pense pas, messieurs. D'après les traités, les commissions de liquidation belges se trouvent subrogées aux commissions de liquidation des Pays-Bas et ces commissions de liquidation du royaume des Pays-Bas rendaient aussi des décisions à l'exclusion du pouvoir judiciaire, mais leurs décisions n'étaient pas irrévocables : car on en rappelait au roi et le roi en ordonnait quelquefois la révision. Ce qui était permis alors doit être permis aujourd'hui.

Je pense donc que si les personnes ou les administrations dont l'honorable M. Osy a parlé, croient devoir réclamer contre les décisions d'une commission de liquidation, ces réclamations peuvent encore être adressées au roi. Peut-être même, messieurs (la question est difficile, et je ne veux pas la trancher), peut-être même y aurait-il possibilité d'un recours devant la législature.

Quant à la question en elle-même, ces anciennes liquidations, les fonds qu'on a reçus de la Hollande et l'usage qu'il faut en faire, (tout cela peut donner lieu à deux questions : une question de droit et une question d'équité. La question de droit est celle de savoir, non pas si l'ancien royaume des Pays-Bas a jamais été obligé au payement de telle ou de telle créance, mais jusqu'à quel point la Belgique actuelle est obligée à ce payement. Cette question doit être décidée, non pas seulement d'après les traités, conventions et autres actes diplomatiques de 1815 et de 1818, mais encore et surtout d'après les termes des traités de 1839 et de 1842, car c'est par ces traités seuls que la Belgique a pris à sa charge la dette dont il s'agit.

La question d'équité est d'une toute autre nature. Il s'agit de savoir si, par des considérations d'équité et de loyauté, il convient d'accorder à certains réclamants, qui, en droit rigoureux, ont dû être repoussés par le conseil de liquidation, quelque chose à prendre sur l'excédant si considérable que la Belgique a reçu de la Hollande, et que la Belgique a reçu, non pas pour être versé dans son trésor, mais pour être employé au profit des anciens créanciers des Pays-Bas. Cette question est encore une question grave qu'on ne peut pas décider aujourd'hui et qui, je pense, sera soumise tôt ou tard à l'appréciation de la législature.

- La clôture de la discussion est mise aux voix et prononcée.

L'article nouveau est mis aux voix et adopté.


« Produits de l'emploi des fonds de cautionnements et consignations : fr. 570,000. »

- Adopté.


« Produits des actes des commissariats maritimes : fr. 35,800. »

- Adopté.


« Produits des droits de pilotage et de fanal : fr. 625,000. »

- Adopté.


« Produits de la fabrication de pièces de cuivre : fr. 145,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des recettes (IV.Remboursements)

Contributions directes, etc.

« Prix d'instruments fournis par l'administration des contributions, etc. : fr. 1,000. »

- Adopté.


« Frais de perception des centimes provinciaux, communaux : fr. 90,000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

Enregistrement et et domaines

« Recouvrements de reliquats de comptes arrêtés par la cour des comptes : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Bénéfice éventuel produit par la fonderie de canons à Liège, sur la fabrication d’armes de guerre à exporter pour l'étranger : fr. 25,000. »

- Adopté.

Avances faites par le ministère des finances

« Frais de poursuites et d'instances : fr. 5,000. »

- Adopté.


« Recouvrement sur les communes, les hospices et les acquéreurs de bois domaniaux, pour frais de régie de leurs bois : fr. 145,000. »

- Adopté.


« Frais de perceptions faites pour le compte de tiers : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Frais de perceptions faites pour le compte des provinces : fr. 7,000. »

- Adopté.

Avances faites par le ministère de la justice

« Frais de justice en matière criminelle, correctionnelle, de simple police, etc. : fr. 160,000. »

- Adopté.


« Frais d'entretien et de transport de mendiants, d'indigents et d'enfants trouvés, etc. : fr. 1,000. »

- Adopté.

Avances faites par le ministère de l’intérieur

« Frais de justice devant les conseils de discipline de la garde civique : fr. 100. »

- Adopté.


(page 422) « Pensions à payer par les élèves de l'école militaire : fr. 47,600. »

- Adopté.


« Annuités à-payer par, les propriétaires riverains du canal de la Campine, première et deuxième sections, du canal d’embranchement vers Turnhout, et de la première section du canal de Zelzaete : fr. 80,000. »

- Adopté.

Trésor public

« Recouvrement d'avances faites par le ministère de la justice aux ateliers des prisons, pour achat de matières premières : fr. 978,400. »

- Adopté.


« Recettes accidentelles : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Versements à faire par les concessionnaires de chemins de fer. et de routes, pour frais de surveillance : fr. 140,500. »

La section centrale propose de libeller cet article comme suit :

« Versements à faire par les concessionnaires de chemins de fer, de roules, de canaux et de ponts : fr. 198,600.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - Le gouvernement se rallie à ce libellé.

M. Manilius. - Messieurs, je crois qu'il y a lieu d'ajouter quelque chose à ce libellé : il ne s'agit pas seulement de versements à faire par les sociétés anonymes qui ont obtenu des concessions de chemins de fer, il y a encore d'autres sociétés anonymes qui ont également des versements à faire.

Je proposerai de rédiger le libellé ainsi qu'il suit :

« Versements à faire par les sociétés anonymes et par les concessionnaires de chemins de fer, de routes, de canaux et de ponts, pour frais de surveillance. »

De cette manière, le libellé embrassera et toute la surveillance présente et toute celle qui devra être exercée éventuellement.

Nous avons d'autres sociétés anonymes qui doivent être surveillées ; nous avons des sociétés financières, des. sociétés industrielles ; nous aurons peut-être bientôt des sociétés commerciales. Eh bien, d'après la loi de comptabilité, il y a nécessité que tout ce qui doit être payé de ce chef passe au trésor, et que désormais aucun agent nommé par le gouvernement ne reçoive un traitement des mains des concessionnaires.

M. le ministre des finances se ralliera sans doute à cet amendement qui n'est qu'un changement au libellé, changement dont l'exécution de la loi de comptabilité nous fait un devoir.

M. Osy. - Messieurs, l'année dernière, lors de la discussion du budget des voies et moyens, j'avais proposé à l'honorable M. Malou de porter en recette tout ce que les sociétés concessionnaires ont à payer au gouvernement pour la surveillance des chemins de fer ; l'honorable M. Malou n'y a trouvé aucun obstacle, et cela a été porté en recette : aujourd'hui, l'honorable SI. Manilius va plus loin, et je trouve qu'il a raison.

Il est prescrit par la loi de comptabilité que tout ce que le gouvernement reçoit pour les actes qu'il fait, doit rentrer au trésor de l'Etat.

C'est le gouvernement seul qui doit payer. Voyons ce qui arrive, s'il n'en est pas ainsi : le gouvernement nomme, par exemple, un membre de la législature aux foncions d'inspecteur d'un chemin de fer, et on dira qu'il n'est pas rééligible, parce que ce n'est pas l'Etat qui paye. Eh bien,, par l'amendement que j'ai proposé l'année dernière, c'est l'Etat qui paye et non pas la société concessionnaire, l'Etat reçoit les fonds de la société, et il paye ceux que le gouvernement nomme pour surveiller. Eh bien, on ne pourra plus dire que les nominations de ce genre que l'on fait, ne tombent pas sous l'application de l'article de la Constitution, relatif à l'a rééligibilité, parce que c'est le gouvernement qui paye. Voilà le but de mon amendement de l'année dernière, et même je crois que toutes les personnes, membres de cette chambre, qui ont été nommées aux fonctions de surveillant, doivent être soumises à réélection.

Messieurs, il y a des sociétés anonymes, comme la banque de Belgique, qui payaient des sommes assez fortes à des commissaires nommés par, le gouvernement, pour surveiller les opérations et pour la garantie des intérêts du gouvernement. La société payait ces commissaires, tandis que, d'après le principe adopté l'année dernière, les sommes devraient être versées au trésor, qui payerait les commissaires.

Nous ne changeons rien à la somme ; nous ne faisons que modifier le libellé. Nous appliquons ce principe que les sociétés ne peuvent pas payer directement les commissaires-nommés par le gouvernement, mais qu'elles payent au gouvernement les frais de surveillance, et que le gouvernement paye lui-même les commissaires chargés de la surveillance.

J'appuierai l'amendement de M. Manilius, car il rentre dans les termes de la loi de comptabilité qui va bientôt être mise à exécution.

Le gouvernement aura à examiner si les nominations faites ne l'obligent pas à convoquer les collèges électoraux.

M. Manilius. - Je demanderai à M. le ministre s'il se rallie à mon amendement ; car s'il s'y ralliait, je bornerais là mes observations ; sinon je devrais entrer, dans d'autres développements, non seulement relativement aux recettes des frais de surveillance, mais encore quant au payement des commissaires ; ce que je me propose d'ailleurs de faire quand nous nous occuperons du budget des travaux publics et des autres budgets qui pourront concerner des payements de commissaires. Je désire avoir si M. le ministre se rallie à mon amendement, qui ne porte que sur le libellé ; car il n'est pas obstatif à ce que l'on reçoive une somme plus forte que celle portée au budget.

(page 425) M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Je trouve qu'il est parfaitement régulier que tous les fonds qui sont dus en venu de contrats de concessions quelconques soient versés au trésor de l’Etat, sauf à l'Etat à rétribuer ensuite les agents, commissaires, directeurs ou autres qu'il peut nommer pour exercer la surveillance qui lui est dévolue. C'est dans ce sens que je comprends l'amendement de l'honorable M. Malou. Ainsi entendu, je ne vois aucune espèce d'inconvénient à l'accueillir. Peut-être reconnaîtra-t-on, dans la pratique, la nécessité de faire certaines exceptions, mais la législature sera avertie des motifs pour lesquels telle ou telle recette ne serait pas versée au trésor. Toute somme payée à une personne nommée par le gouvernement ne doit pas nécessairement être versée au trésor de l'Etat. Ainsi, pour citer un exemple, le directeur, le gouverneur de la Société Générale est nommé par le gouvernement ; est-ce que l'on entend que la redevance, l'indemnité qui lui est attribuée en cette qualité soit versée au trésor et lui soit payée par le gouvernement ? Il est évident, selon moi, que l'amendement n'a pas cette portée.

M. Dolez. - Non, c'est seulement aux commissaires du gouvernement chargés d'exercer une surveillance qu'il s'applique.

M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Dans les actes des concessions de chemin de fer, le contrat stipule que le gouvernement aura des commissaires auprès des compagnies et que, pour indemnité des frais de surveillance, les concessionnaires verseront une somme de..... L'honorable M. Manilius fait allusion à ces versements stipulés dans la convention pour rétribuer les commissaires à la nomination du gouvernement, il entend que ces versements soient faits au trésor et que l'agent nommé par le gouvernement soit rétribué par l'Etat.

Il y a une certaine analogie entre la position de ces agents du gouvernement et la position du gouverneur de la Société Générale. Cependant il ne faut pas les confondre. Dans le premier cas, la surveillance s'exerce uniquement, exclusivement au point de vue de l'intérêt général ; c'est une véritable fonction gouvernementale ; dans le deuxième cas, l'élément qui domine est l'intérêt privé. Le gouverneur d'une banque, quoique choisi par l'Etat, gère dans l'intérêt des associés. Mais ces observations prouvent qu'il ne faut pas étendre outre mesure la portée de l'amendement. Il est des hypothèses où des sommes sont payées à des personnes choisies par le gouvernement, sans que pour cela on puisse considérer ces personnes comme de véritables agents de l'Etat.

En un mot, c'est aux indemnités stipulées dans des contrats, concessions ou autorisations et destinées à de véritables agents de l'Etat que s'applique l'amendement, et dans ce sens, le gouvernement s'y rallie.

(page 422) M. Manilius. - Mon amendement ne tend qu'à établir la règle ; je ne préjuge rien de la condition de surveillance établie dans les contrats de concession ou de constitution de société anonyme. Ces contrats ont toujours une clause portant que la surveillance sera exercée par le gouvernement. Les agents délégués à cet effet par le gouvernement ne sont pas les fonctionnaires dont vient de parler M. le ministre ; ce n'est ni le directeur de la société, ni un administrateur, ni un membre quelconque de l'administration : ce sont des agents spéciaux nommés par le gouvernement ; et c'est à ces agents seuls que mon amendement s'applique. Il a pour objet de les faire payer à l'avenir, non plus par les sociétés près desquelles ils exercent leurs fonctions, mais directement par le trésor public.

Ce gouvernement ayant le droit de refuser ou d'autoriser une société anonyme, quand il l'autorise, il prend une précaution pour qu'on n'abuse pas de l'autorisation donnée, il nomme un agent de surveillance. cet agent devrait recevoir son traitement du trésor.

Comme dans toute convention préliminaire d'autorisation de société anonyme figure une clause portant que la société payera telle somme pour l'agent de surveillance, la somme stipulée au lieu d'être payée à l'agent, serait versée au trésor public.

Cette proposition est en parfaite concordance avec la loi de comptabilité.

M. Malou. - Si cet amendement devait être mis aux voix, je croirais devoir m'abstenir. Je désire qu'à l'avenir dans toutes les nominations du gouvernement, quand il autorise des sociétés anonymes, on fasse prévaloir le principe qu'on invoque ; mais avant de me prononcer sur l'amendement, je désirerais connaître tous les contrats en vertu desquels pareilles nominations ont eu lieu jusqu'aujourd'hui. Il serait plus prudent de laisser la loi de comptabilité produire ses effets naturels et complets. L'attention du gouvernement serait appelée sur cette question non seulement quant aux nominations futures, mais quant à le régularisation de certaines nominations antérieures à la loi actuelle. D'ici au prochain budget le principe de la loi de comptabilité recevrait son application. Nous verrons ce qu'il sera possible de faire. Et, veuillez le remarquer, déjà l'on vous indique des exceptions nécessaires au principe qu'on pose. Ces exceptions se feront jour par l'application éclairée, raisonnable, que le gouvernement est appelé à faire du principe de la loi de comptabilité.

Je crois qu'on peut, sans inconvénient, laisser le libellé tel qu'il est, sauf au gouvernement à examiner cette question assez grave d'ici à la présentation du budget de 1849, qui doit avoir lieu dans les premiers mois de l'année prochaine.

Quant à moi, je le répète, je ne puis comprendre la portée du vote que j'aurais à émettre sur cette affaire.

M. Osy. - Cette affaire est extrêmement claire : dans toutes les sociétés où le gouvernement veut avoir un commissaire, il est dit qu'il a le droit de le nommer, et la société s'engage à payer une somme de tant. Le gouvernement nomme son commissaire ; la somme que la société s'est engagée à payer est versée au trésor, et c'est au gouvernement à payer la personne qu'il nomme.

M. le minière des travaux publics a parlé du gouverneur de la Société Générale et du directeur de la Banque de Belgique qui sont nommés par le gouvernement. Mais il n'y a pas à s'arrêter à cela ; car ce n'est pas le gouvernement qui les paye ; ils sont payés par les établissements qu'ils dirigent.

Je demande seulement, comme l'honorable M. Manilius, que les commissaires du gouvernement près des sociétés anonymes soient payés par le gouvernement, au moyen des fonds versés directement au trésor par ces sociétés. Nous ferons bien d'admettre dès à présent cette disposition. La cour des comptes veillerait immédiatement à son exécution, puisque la loi sur la comptabilité de l'Etat sera en vigueur à dater du 1er janvier.

(page 426) M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Les termes dans lesquels les arrêtés d'autorisation sont conçus ne peuvent évidemment pas influer sur la nécessité légale qu'il y aurait de verser les fonds au trésor de l'Etat. C'est la nature même de l'acte ou de la fonction qu’il faut considérer. Sans quoi, il y aurait un moyen simple d'éluder la disposition de la loi. Ainsi l'on dirait que le gouvernement se réserve de nommer les directeurs, ou commissaires, sauf à la société à leur payer une somme déterminée. Mais on ne pourra s'affranchir de l'obligation de verser directement cette somme au trésor, si le directeur ou le commissaire est en réalité investi de la qualité d'agent de l'Etat. Il ne faut pas que le gouvernement puisse éluder la loi ; il ne faut pas qu'il puisse nommer à des fonctions rétribuées des personnes, investies de fonctions électives et les affranchir par un moyen indirect de l'obligation de se soumettre aie réélection..

Quoi qu'en ait dit l'honorable M. Malou, je ne vois pas d’inconvénient à admettre l'amendement de l'honorable M. Manilius. Voici pourquoi : ou les conventions, les concessions, les autorisations font obstacle par leur nature à ce que les fonds soient versés au trésor de l'Etat (alors elles seront respectées) ; ou elles n'y font pas, obstacle, et alors il y aura lieu de verser les fonds dans la caisse de l’Etat ; et on le fera.

Il n'y a donc pas d'inconvénient à adopter cet amendement.

(page 422) M. de Theux. - La question n'est pas aussi simple qu'elle le paraît au premier abord, car de sa solution dépend une autre, celle des pensions. Si les fonctionnaires employés en vertu des statuts des sociétés anonymes (il y en a, non seulement dans les compagnies de chemin de fer, mais, encore près de la banque de Belgique et peut-être ainsi près de la banque de Flandres), si ces fonctionnaires sont réellement des employés de l'Etat, il en résultera pour eux un droit à la pension.

Dans tous les cas, comme il s'agit de contrats que nous n'avons pas sous les yeux, il est impossible de se prononcer avec connaissance de cause.

Si la loi de comptabilité le comporte, qu'on l'exécute en ce sens ; mais je ne pense pas qu'on puisse en étendre les dispositions par la loi du budget des voies et moyens.

M. Lebeau. - Il me semble que la question est extrêmement claire. Si elle pouvait laisser le moindre doute, je serais le premier à en d, mander le renvoi au prochain budget.

Envers qui les commissaires sont-ils obligés ? Evidemment envers l'Etat. Qui a action contre eux en vertu des statuts ? Evidemment l'Etat, nul autre que l'Etat. Vous voyez la différence entre la positon de ces (page 423) hommes et celle des directeurs, des gouverneurs de banque. Ceux-ci étant payés sur des fonds qui appartiennent aux sociétés mêmes et qui n'entrent pas dans les caisses de l'Etat. Il est naturel qu’il en soit ainsi puisqu'ils ne sont pas les hommes du gouvernement, mais les hommes de ces établissements. Tandis qu'ici, les commissaires sont réellement les hommes du gouvernement chargés de contrôler l'administration des établissements auxquels ils sont préposés et, dans plusieurs circonstances, d'être ses contradicteurs dans l'intérêt du gouvernement. Vous voyez qu'il n'y a pas d'analogie entre ces commissaires et les gouverneurs des banques, par exception nommés par le gouvernement et exclusivement les hommes des établissements à la tête desquels ils sont placés.

Par ces motifs, abstraction faite de toute considération personnelle et politique, je n'hésiterai pas à donner une pleine et entière adhésion à l’amendement de la section centrale. Je le regarde comme l'exécution littérale de la disposition que nous avons admise quant à la comptabilité de l'Etat.

La circonstance de la pension ne m'arrête pas. S'il y avait des droits à la pension, si cette question état résolue par le gouvernement, il serait facile de stipuler (les concessionnaires ne reculeraient pas devant cette obligation) que des fonds devraient versés à ce titre par les concessionnaires des sociétés.

M. Lejeune, rapporteur. - Messieurs, je crois que l'honorable M. Lebeau vient d'attribuer l'amendement à la section centrale.

M. Lebeau. - Je me suis trompé.

M. Lejeune. - La section centrale n'en a pas été saisie, et je regrette qu'elle n'ait pas pu l'examiner.

Je désire faire une observation de rédaction.

L'article présenté par le gouvernement se terminait par les mots « pour frais de surveillance ». Ces mots ne se trouvent pas reproduits dans l’article de la section centrale. Je ne me rappelle pas qu'on ait eu des motifs pour les supprimer. Ils ne sont pas absolument nécessaires, mais il n'y aurait aucun inconvénient à les rétablir.

M. le ministre des travaux publics (M. Frère-Orban). - Ce sont des mots surabondants et complètement inutiles.

- L'amendement proposé par M. Manilius est mis aux voix et adopté.

L'article proposé par la section centrale, ainsi amendé, est adopté.


« Abonnement des provinces pour réparations d'entretien dans les prisons : fr. 19,600. »

- Adopté.


« Chemin de fer rhénan, dividende de 1848 : fr. 160,000. »

- Adopté.

Fonds spécial

« Produit des ventes de biens domaniaux autorisées par la loi du 3 février 1843 : fr. 800,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des crédits (V. Recettes pour ordre)

Chapitre premier. Trésor public

Articles 1 à 7

« Art. 1er. Cautionnements versés en numéraire dans les caisses du trésor public de Belgique, par des comptables de l'Etat, par des receveurs communaux, des receveurs de bureaux de bienfaisance, des préposés aux bureaux de station de l’administration du chemin de fer, etc., pour garantie de leur gestion, et cautionnements fournis par des contribuables pour garantie du paiement de leurs redevabilité en matière de douanes, d'accises, etc. : fr. 1,300,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Caisses des veuves des fonctionnaires civils : fr. 850,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Caisses «les veuves et orphelins des officiers de l'armée : fr. 160,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Caisses de prévoyance des instituteurs primaires : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Masse d'habillement et d'équipement de la douane : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Subsides offerts pour construction de routes : fr. 400,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Parts des communes dans les frais de confection des atlas des chemins vicinaux : fr. 30,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Contributions directes, douanes et accises

Articles 1 à 8

« Art. 1er. Produit des amendes, saisies et confiscations opérées par l’administration des contributions : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Expertise de la contribution personnelle : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Produit d'ouverture des entrepôts : fr. 14,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Recouvrement d'impôts en faveur des provinces : fr. 6,734,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Recettes en faveur des communes : fr. 1,950,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Taxe provinciale sur les chiens : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Taxe provinciale sur le bétail : fr. 125,000. »

- Adopté.


« Art. 8. 4 et 5 p. c. au profit des villes de Liège et Verviers, pour pillages : fr. 18,500. »

- Adopté.

Chapitre III. Enregistrement et domaines

Fonds de tiers
Articles 1 à 3

« Art. 1er. Amendes diverses et autres recettes soumises aux frais de régie : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Amendes de consignations et autres recettes non assujetties aux frais de régie :fr. 750,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Recouvrement de revenus pour compte de provinces. : fr. 470,000. »

- Adopté.

Consignations
Article 4

« Art. 4. Consignations de toute nature : fr. 1,500,000. »

- Adopté.

Vote des articles

Article premier

M. le président. - Nous arrivons au projet de loi.

M. Osy. - Avant d'en venir au projet de loi, je crois qu'il faudrait décider si vous discuterez immédiatement le projet définitif sur la péréquation cadastrale. Si vous vous prononciez pour la négative, il me paraît que le gouvernement pourrait nous proposer un amendement au projet de budget des voies et moyens pour l'autoriser à continuer à recevoir l'impôt foncier sur l'ancien pied.

M. Lejeune, rapporteur. - J'ai déjà proposé à rassemblée d'insérer dans la loi des voies et moyens, soit comme amendement à l'article 1er soit comme article nouveau, une disposition qui serait a peu près l'article du projet définitif sur la péréquation cadastrale. Je dépose cette disposition sur le bureau. Elle est ainsi conçue :

« La somme de quinze millions cinq cent mille francs, formant le principal de la contribution foncière, pour l'exercice 1848, est répartie entre les neuf provinces du royaume, d'après les résultats du cadastre, comme suit :

« Anvers : fr. 1,346,103.

« Brabant : fr. 2,817,373.

« Flandre occidentale : fr. 2,352,033.

« Flandre orientale : fr. 2,606,153.

« Hainaut : fr. 2,637,527.

« Liège : fr. 1,520,525.

« Namur : fr. 977,978.

« Limbourg : fr. 686,156

« Luxembourg : fr. 256,152.

« Total : fr. 15,500,000.

M. le président. - Cette disposition formera le second paragraphe de l’article premier. On m'a interrompu au moment où j'allais eu donner lecture. Il est ainsi conçu :

« Art. 1er. Les impôts directs, existants au 31 décembre 1847, en principal et centimes additionnels ordinaires et extraordinaires, tant pour le fonds de non-valeurs qu'au profit de l'Etal, ainsi que la taxe des barrières, seront recouvrés, pendant l'année 1848, d'après les lois et les tarifs qui en règlent l'assiette et la perception. »

M. Lejeune propose d’ajouter le paragraphe dont il vient de donner lecture.

M. le ministre des finances (M. Veydt). - L'adoption de l'amendement de l'honorable M. Lejeune emporte, de la part de la chambre, la décision qu'elle ne s'occupera pas immédiatement du projet de loi définitive sur la péréquation cadastrale. Ce point jusqu'à présent n'a pas encore été résolu.

Je suis prêt, messieurs, à la discussion. Cependant je dirai à la chambre qu'au sénat les budgets de la dette publique et des finances ont été portés à l'ordre du jour et que de nouveau, en attendant que je puisse être présent, ces budgets figureront à l'ordre du jour de lundi. Si la loi sur la péréquation cadastrale donnait lieu dans cette enceinte à des débats un peu prolongés, il me serait difficile de concilier les choses.

Je crois en conscience qu'eu égard à l'époque avancée de l'année dont ce qui nous reste de temps serait mieux consacré aux budgets, il serait préférable d'adopter l'amendement de l'honorable M. Lejeune. Si c'est l'avis de la chambre, je proposerai, par sous-amendement, de rédiger la disposition conformément à celle des années précédentes, en ces termes :

« Le principal de la contribution foncière est réparti entre les provinces pour l'année 1848, conformément à la loi du 7 février 1845 (Bull. offic., n°4). »

M. le président. - M. Lejeune se rallie-t-il à cette rédaction ?

M. Lejeune, rapporteur. - Oui, M. le président.

(page 424) - L'article ainsi amendé est adopté.

Articles 2 à 4

« Art. 2. D'après les dispositions qui précèdent, le budget des recettes de l'Etat, pour l'exercice 1848, est évalué à la somme de cent dix-sept millions six cent douze mille deux cent cinquante francs (117,612,250 fr.) ; les recettes spéciales, provenant des ventes de biens domaniaux, autorisées en vertu de la loi du 3 février 1843, à la somme de huit cent mille francs (800,000 fr.), et les recettes pour ordre, à celle de quinze millions cent soixante et onze mille cinq cents francs (15,171,500fr.), le tout conformément aux tableaux ci-annexés. »

- Adopté.


« Art. 3. Pour faciliter le service du trésor, pendant le même exercice, le gouvernement pourra, à mesure des besoins de l'Etat, mettre en circulation des bons du trésor jusqu'à concurrence de la somme de vingt-cinq millions de francs (25,000,000 de fr.).

- Adopté.

« Art. 4. La présente loi sera obligatoire le 1er janvier 1848. »

- Adopté.

Second vote des articles et vote sur l’ensemble du projet

La chambre décide qu'elle procédera immédiatement au vote définitif. L'amendement qui a été introduit dans le projet est définitivement adopté.

M. Osy. - Avant qu'on ne procède au vote par appel nominal, je dois engager les membres de la chambre à ne pas se retirer, car il y a encore une loi très urgente à voter, c'est la loi relative au transit.

M. le président. - L'observation de M. Osy semblerait faire supposer que la chambre pourrait s'ajourner après le vote du projet qu'il a indiqué. Or il y a autre chose à faire que cela ; il y a plusieurs départements dont les budgets ne sont pas votés et pour lesquels il n'existe pas de crédits provisoires ; il est donc indispensable que la chambre continue à siéger.

De toutes parts. - Oui ! oui !


- Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget des voies et moyens, qui est adopté à l'unanimité des 78 membres présents.

Ce sont : MM. Anspach, Biebuyck, Brabant, Bricourt, Broquet-Goblet, Cans, Clep, Cogels, d'Anethan, Dautrebande, David, de Bonne, de Breyne, Dechamps, de Denterghem, de Garcia de la Vega, de Haerne, de La Coste, Delfosse, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Mérode, de Muelenaere, Desaive, de Terbecq, de Theux, de Tornaco, d'Hane, d'Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dumont, Eenens, Fallon, Frère-Orban, Henot, Herry-Vispoel, Huveners, Jonet, Lange, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Lys, Malou, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Moreau, Nothomb, Orban, Osy, Pirmez, Pirson, Raikem, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Scheyven, Sigart, Simons, Thienpont, Tielemans, T Kint de Naeyer, Tremouroux, Troye, Van Cleemputte, Van Cutsem, Vanden Eynde, Van Huffel, Van Renynghe, Verhaegen, Veydt, Vilain XIIII et Zoude.

Projet de loi portant le budget des dépenses pour ordre de l'exercice 1848

Discussion du tableau des crédits

La chambre adopte successivement, sans discussion, les divers articles du tableau du budget des dépenses pour ordre. Ils sont ainsi conçus :

Chapitre premier. Administration du trésor public

Articles 1 à 7

« Art. 1er. Remboursement de cautionnements versés en numéraire dans les caisses du gouvernement, pour garantie de leur gestion, par des receveurs communaux, des receveurs de bureaux de bienfaisance, des préposés de l'administration du chemin de fer, par des courtiers, des agents de change, etc., et par des contribuables, négociants ou commissionnaires, pour garantie du payement de droits de douanes, d'accises, etc. : fr. 1,300,000.

(Le chiffre indiqué à cet article n'est point limitatif. Il pourra s'élever, le cas échéant, jusqu'à concurrence de la somme qui demeure encore à rembourser du chef des cautionnements versés en numéraire antérieurement au 1er octobre 1830, et qui sont remis à la Belgique en exécution du traité du 5 novembre 1842).


« Art. 2. Remboursement de fonds perçus au profit de la caisse des veuves et orphelins des fonctionnaires civils : fr. 850,000. »


« Art. 3. Remboursement de fonds perçus au profit de la caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée : fr. 160,000. »


« Art. 4. Remboursement, de fonds perçus au profit de la caisse de prévoyance des instituteurs primaires : fr. 100,000. »


« Art. 5. Remboursement de fonds versés au profit de la masse d'habillement et d'équipement de la douane : fr. 300,000. »


« Art. 6. Emploi des subsides offerts pour la construction des routes : fr. 400,000. »


« Art. 7. Attribution des parts des communes dans les frais de confection des allas des chemins vicinaux : fr. 30,000. »

Chapitre II. Administration des contributions directes, douanes et accises

Articles 1 à 8

« Art. 1er. Attributions d'amendes, saisies et confiscations opérées par l'administration des contributions : fr. 120,000. »


« Art. 2. Frais d'expertise de la contribution personnelle : fr. 30,000. »


« Art. 3. Frais d'ouverture des entrepôts : fr. 14,000. »


« Art. 4. Remboursement de fonds recouvrés pour les provinces : fr. 6,734,000. »


« Art. 5. Remboursement de fonds recouvrés pour les communes : fr. 1,950,000. »


« Art. 6. Remboursement de la taxe provinciale sur les chiens : fr. 200,000. »


« Art. 7. Remboursement de la taxe provinciale sur le bétail : fr. 125,000. »


« Art. 8. Remboursement des 4 et 5 p. c. perçus au profit des villes de Liège et de Verviers, pour pillages : fr. 18,500. »

Chapitre III. Fonds des tiers

Administration de l’enregistrement, des domaines et forêts
Articles 1 à 3

« Art. 1er. Recettes diverses et amendes attribuées, soumises aux frais de régie : fr. 120,000. »


« Art. 2. Recettes diverses et amendes de consignations soumises aux frais de régie : fr. 750,000. »


« Art. 3. Remboursement de revenus perçus pour compte de provinces : fr. 470,000. »

Consignations

Article premier

« Art. 4. Remboursement de consignations de toute nature : fr. 1,500,000. »

Vote de l’article unique et sur l’ensemble du projet

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'article unique du projet de loi de budget, qui est ainsi conçu :

« Article unique. Le budget des dépenses pour ordre est fixé, pour l'exercice 1848, à la somme de quinze millions cent soixante et onze mille cinq cents francs (15,171,500 fr.) conformément au tableau ci-annexé.»

Voici le résultat du vote :

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 73 membres qui ont répondu à l'appel nominal. Il sera transmis au sénat.

Ont répondu à l'appel nominal : MM. Vanden Eynde, Van Huffel, Van Renynghe, Verhaegen, Veydt, Vilain XIIII, Zoude, Anspach, Biebuyck, Bricourt, Cans, Clep, Cogels, d'Anethan, Dautrebande, David, de Bonne, de Breyne, Dechamps, de Denterghem, de Garcia de la Vega, de La Cose, de Liedekerke, de Mérode, de Muelenaere, Desaive, de Terbecq, de Theux, de Tornaco, d'Hane, d'Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dumont, Eenens, Fallon, Frère-Orban, Henot, Herry-Vispoel, Huveners, Jonet, Lange, Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Loos, Lys, Malou, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Moreau, Nothomb, Orban, Osy, Pirmez, Pirson, Raikem, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Scheyven, Sigart, Simons, Thienpont, Tielemans, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Troye, Van Cleemputte, Van Cutsem et Liedts.

- Sur une observation de M. le président, la chambre ajourne à lundi la discussion du budget des dotations.

Projet de loi prorogeant le terme de la loi du 18 juin 1842, relative au régime d'importation en transit direct et par entrepôt

Vote de l'article unique

L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Article unique. Le terme de la loi du 18 juin 1842 (Bulletin officiel, n° 400), qui autorise le gouvernement à modifier le régime d'importation et de Transport de marchandises en transit direct et en transit par entrepôt, est prorogé jusqu'au 31 décembre 1848. »

Personne ne demandant la parole, ou passe à l'appel nominal.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 72 membres qui ont répondu à l'appel nominal. Il sera transmis au sénat.

Projet de loi prorogeant le délai fixé par l'article 59, paragraphe 2, de la loi de comptabilité, relative aux récepissés des versements faits à l'Etat

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Veydt) présente un projet de loi ayant pour objet d'ajourner l'exécution d'une disposition de la loi de comptabilité.

Il est donné acte à M. le ministre de la présentation du projet de loi dont il a donné lecture.

Ce projet et les motifs qui l'accompagnent seront imprimés et distribués.

M. Osy. - Je propose de renvoyer ce projet de loi à la commission de comptabilité et de charger le bureau de compléter cette commission s'il y a lieu.

- Cette proposition est adoptée.

La séance est levée à 4 heures.