(Annales parlementaires de Belgique, session 1847-1848)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 141) M. T’Kint de Naeyer procède à l'appel nominal à 2 heures un quart. Il lit le procès-verbal de la séance précédente, dont la rédaction est adoptée ; il présente l'analyse des pièces adressées à la chambre :
« Le sieur Willain, membre du conseil communal de Forges, demande que le bourgmestre de cette commune se conforme à l'article 62 de la loi communale et que les décisions du conseil soient respectées. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Wouters, ancien sous-officier, demande un secours. »
- Même renvoi.
« Les secrétaires communaux de l'arrondissement de Saint Nicolas demandent une loi qui améliore leur position. »
M. de T'Serclaes. - Je demande que la commission des pétitions soit invitée à faire un rapport sur cette pétition, avant la discussion du budget de l'intérieur.
- Adopté.
« Le sieur Bansart, directeur du dépôt de mendicité de Hoogstraeten, prie la chambre de décider si les directeurs des dépôts de mendicité ont droit à la pension de retraite sur les fonds de l'Etat. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« L'administration communale de Saint-Arnaud, demande que les communes linières de la province d'Anvers puissent participer au crédit de 500,000 fr. demandé pour le département de l’intérieur. »
M. Scheyven. - Messieurs, cette pétition se rapporte au projet de crédit : de 500,000 fr. pour les districts liniers ; comme ce projet est à l'ordre du jour, je demande qu'il plaise à la chambre d'ordonner le dépôt de cette pétition sur le bureau pendant la discussion, du projet.
- Cette proposition est adoptée.
« Les notaires de la ville de Courtray présentent des observations concernant le projet de loi sur l'organisation du notariat. »
(page 142) - Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
« L'administration communale de Renaix propose des modifications au projet de loi sur la réunion du deuxième au premier canton de justice de paix de la ville d'Audenarde. »
- Renvoi à la commission des circonscriptions cantonales.
M. Tremouroux informe la chambre qu'une indisposition de sa mère l'empêchera d'assister pendant quelques jours aux travaux de l'assemblée.
- La chambre accorde un congé à M. Tremouroux.
M. le ministre des finances (M. Veydt) dépose un projet de loi ouvrant au département des affaires étrangères (marine) un crédit supplémentaire de 10,000 fr., exercice 1846.
- Ce projet sera imprimé et distribué.
La chambre le renvoie à la section centrale qui a examiné le budget des affaires étrangères et de la marine.
M. le ministre des finances (M. Veydt). - J'ai l'honneur de déposer un second projet de loi. En voici l'objet :
La loi du 21 mars 1846, par son article 2, autorise le gouvernement à assimiler, pour l'application du droit de douane, les marchandises non dénommées au tarif aux marchandises avec lesquelles elles présentent le plus d'analogie.
Il a été fait usage de cette autorisation par arrêté royal du 30 juin 1847. Cet arrêté doit être soumis à l'approbation des chambres. Le projet de loi que j'ai l'honneur de déposer, de concert avec M. le ministre des affaires étrangères, tend à ce but.
- Ce projet sera imprimé et distribué.
La chambre en ordonne le renvoi à la commission permanente d'industrie.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau les pièces qui m'ont été demandées hier par l'honorable M. Sigart.
M. Sigart. - Je remercie M. le ministre du dépôt de ce rapport ; j'en prendrai connaissance, et je ferai connaître ensuite mon avis à la chambre.
« Art. 5. Pays-Bas : fr. 50,000. »
M. Lejeune. - Messieurs, je dois reproduire quelques observations que j'ai faites, l'année dernière, concernant l'exécution de quelques points du traité conclu avec la Hollande. Par ce traité, nous nous sommes, obligés à payer une rente annuelle de 50,000 fl. pour l'usage, en quelque sorte exclusif, pour la manœuvre à la convenance de la Belgique, des écluses du canal de Terneuzen ; la Hollande s'est obligée, de son côté, à isoler complètement ce canal de tous les affluents qui y amenaient les eaux des terres basses. C'est en raison des dépenses à faire par les Pays-Bas que la rente est payée, du moins en grande partie. Ces travaux ont été exécutes, à la droite du canal de Terneuzen, d'une manière convenable ; je le pense ; du moins, je ne connais aucune réclamation à ce sujet.
Il n'en est pas de même des travaux exécutés à la gauche du canal ; cette partie du territoire m'est plus particulièrement connue, elle fait partie du district d'Eecloo, qui est extrêmement intéressé à l'exécution des travaux mis à la charge de la Hollande. Ces travaux, tels qu'ils ont été exécutés, sont insuffisants ; ils ne répondent pas à leur destination.
La Hollande prétend que les travaux sont bons ; nous de notre côté, nous disons, et nous sentons encore mieux, qu'ils sont insuffisants : car nous souffrons sur ce point du pays, et si nous n'avions pas des moyens secondaires et temporaires pour suppléer à l'insuffisance du canal latéral nouvellement construit, nos souffrances seraient intolérables.
L'année dernière j'ai appelé l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur ce point.
Pour couper court aux discussions qui naissent des prétentions contraires des deux gouvernements, j'ai suggéré un moyen de conciliation qui pourrait convenir aux deux pays.
Je ne sais jusqu'à quel point on l'a pris en considération ; je le répète aujourd'hui. Nous pourrions renoncer à l'usage des travaux faits par la Hollande à la gauche du canal de Terneuzen ; ces travaux seraient utiles pour le territoire hollandais, ils sont insuffisants quand on y réunit le territoire belge ; nous pourrions renoncer à cette partie de nos droits, moyennant une diminution de la rente à payer, et avec le capital représentant la diminution obtenue sur la rente, nous ferions sur notre propre territoire et à nos propres frais des travaux pour écouler les eaux qui doivent maintenant être dirigées par le canal latéral au canal de Terneuzen.
Messieurs, il y a un second point sur lequel je désire appeler l'attention de M. le ministre des affaires étrangères : c'est la pêche des moules dans le Braakman. cette industrie vous paraîtra peut-être bien petite, elle a cependant une grande importance. Dans ces jours de calamité, où l'on fait des efforts louables de tous les côtés pour introduire dans les Flandres des industries nouvelles, quelque petites qu'elles soient, il est sans doute à désirer qu'on ne néglige pas les industries existantes. La pêche des moules a peut-être une importance plus grande qu'on ne le croit. Je n’ai pas de données statistiques exactes ; mais si nous fixions seulement à 500 fr. par jour la valeur des moules et des salicoques (crevettes) que les Belges pèchent dans le Braakman, ce serait déjà pour une localité rurale une ressource très considérable.
Mais si vous considérez que la valeur de ces subsistances prises sur place est décuplée avant d’arriver à la consommation et que toute cette valeur passe dans les mains d'hommes de peine, d'ouvriers des deux sexes qui gagnent leur pain à la sueur de leur front, on ne dira pas sans doute que cette petite industrie n'a pas d'importance.
Il a été fait aussi une convention au sujet de cette pêche de moules dans le Braakman ; mais dans l'exécution, les pêcheurs de moules sont extrêmement gênés.
De tout temps il y a eu plusieurs points de déchargement et d'amarrage dans le Braakman. Même pendant la période de l'état d'hostilité avec les Pays-Bas, nos voisins ne faisaient pas la moindre opposition aux débarquements qui avaient lieu aux endroits ordinaires de la côte. Il est bien certain que quand on a fait le traité de paix et d'amitié, c'était tout au moins pour maintenir le statu quo, quant aux intérêts industriels. Eh bien, la paix était à peine signée que l'état des choses a changé, et que les pêcheurs de moules ont été privés des points de débarquement consacrés par l'usage de plus d'un siècle, et conservés sans opposition jusqu'en 1843. Depuis lors, arrivés à quelques pas de leurs demeures on les oblige à faire un détour de deux lieues.
La convention s'oppose-t-elle à ce que la Hollande accorde les mêmes points de débarquement ? Non. Mais les négociateurs belges, croyant peut-être que la Belgique touchait au Braakman, ont admis dans la convention une stipulation générale d'après laquelle le pays, sur le territoire duquel la côte est située, pourra indiquer les points de débarquement.
Une prudence ordinaire aurait dû faire conserver les points de débarquement existants. Cela n'a pas été fait, soit par suite d'une erreur sur les localités, ce qui est le plus probable, soit par suite d'un excès de bonne foi.
Depuis lors la Belgique a réclamé les anciens points de débarquement ; mais infructueusement, paraît-il.
Dans le dernier traité qui a été conclu,, on est simplement convenu d'une disposition en ce qui concerne le débarquement des salicoques. Le gouvernement hollandais a permis que, pour ce seul objet, le débarquement se fît au lieu ordinaire. Pour le reste, il nous a été dit, et j'ai ici en main le rapport qui a été fait sur ce traité, il nous a été dit : « Le gouvernement néerlandais s'est constamment refusé à consentir à une dérogation aux règlements et traités conclus entre les deux pays, plus étendue que celle stipulée au paragraphe 4 du protocole annexé au traité.»
Le paragraphe 4 du protocole est ainsi conçu :
« Le gouvernement des Pays-Bas désignera, près de l'écluse Isabelle, un lieu d'embarquement et de déchargement où les bateaux belges et néerlandais pour la pêche dans le Braakman, pourront débarquer les salicoques, sauf à se conformer aux mesures de police établies pour prévenir les abus.»
Pour cet avantage qui nous a été donné par ce protocole, nous en avons donné à la Hollande un autre tout au moins aussi considérable : nous avons admis les salicoques cuites comme les salicoques bouillies. Cela paraîtra peu de chose au premier abord ; mais c'était une question de vie ou de mort pour l'industrie hollandaise, de sorte que nous avons rendu plus que nous n'avons reçu. Nous ne nous en plaignons pas.
La Hollande a fait construire un port au point de débarquement que nous désirons obtenir. On a cru naturellement que ce port était fait pour qu'on pût y venir débarquer et y être, en quelque sorte, sous les auspices de l'autorité hollandaise. Les pêcheurs belges y ont donc conduit leurs barques ; mais on les a poursuivis, on a saisi leurs barques, on les a condamnés à l'amende.
Cette question est donc toujours pendante, et, je le répète, elle a une certaine gravité pour une industrie qui est importante, non seulement pour une commune, mais pour toutes les communes qui sont à une assez grande distance des côtes. On y trouve une subsistance à bon marché et un grand nombre de gens sans ouvrage y trouvent de l'occupation.
J'insiste donc de nouveau pour que M. le ministre des affaires étrangères veuille bien ne pas perdre de vue cette question ; et j'insiste à l'occasion de cette discussion, parce que je suis persuadé que le gouvernement hollandais a encore à nous demander des concessions, à nous demander des facilités que nous pouvons peut-être, en bons voisins, lui accorder ; mais, par réciprocité, nous pouvons aussi réclamer, à notre tour, un traitement moins rigoureux ; ce que nous demandons et ce qui peut nous être accordé sans que la Hollande en éprouve le moindre préjudice.
Nous ne demandons pas même une dérogation à la convention, nous demandons qu'on l'exécute, non selon ses termes rigoureux, mais selon son esprit.
(page 143) M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, les observations de l'honorable préopinant ont rapport à deux questions qui se rattachent à l’exécution des traités conclus avec le gouvernement des Pays-Bas. La première observation qu'il a présentée a pour objet l'exécution des articles 20 et 23 du traite du 5 novembre 1842. D'après ces dispositions, le gouvernement des Pays-Bas s'est engagé à faire au canal de Terneuzen et à ses affluents les travaux nécessaires pour assurer l'entier écoulement des eaux des Flandres. De son côté, le gouvernement belge s'est engagé à payer de ce chef à la Hollande une indemnité annuelle de 50,000 florins.
Jusqu'à présent, messieurs, cette indemnité n'a point encore été intégralement payée ; la moitié seulement a été mise à la disposition du gouvernement néerlandais, parce que le gouvernement du Roi n'a pu encore acquérir la conviction que les travaux sont exécutés d'une manière suffisante. Aujourd'hui, le gouvernement des Pays-Bas prétend que tous les travaux ordinaires sont achevés ; il réclame, en conséquence, le payement de la totalité des 50,000 florins. J'ai demandé, tout récemment, sur cette question l'avis de mon honorable collègue des travaux publics, qui peut seul faire constater par les ingénieurs de l'Etat la véritable situation des choses.
C'est donc là, messieurs, une question de fait qu'il s'agit de résoudre. Le gouvernement néerlandais prétend que les travaux exécutés jusqu'à présent sont suffisants ; le gouvernement belge répond : Jusqu'à ce que cette suffisance soit dûment constatée, nous ne croyons pas devoir payer intégralement la somme de 50,000 florins.
Le second point dont s’est occupé l'honorable M. Lejeune est relatif à la pêche qui s'exécute dans le Braakman. Des difficultés se sont élevées à la vérité, messieurs, en ce qui concerne le débarquement des pêcheurs belges. Ces difficultés proviennent de ce que jusqu'à présent l'une des dispositions d'une convention conclue en 1843 n'a pas été réellement mise à exécution. Il faut, d'après cette convention, si je ne me trompe, que les points d'amarrage soient indiqués de commun accord...
M. Lejeune. - Je pense que c'est le gouvernement hollandais qui a le droit de les indiquer.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Voici comment est conçu l'article 21 :
« II est défendu aux patrons ou conducteurs de bateaux pêcheurs, hors le cas de force majeure dûment constaté, de prendre terre ou d'amarrer sur les côtes ou rives du fleuve, ailleurs qu'aux lieux ou ports désignés par les gouvernements respectifs, sous peine d'une amende de 20 francs. »
Eh bien, messieurs, la désignation de ces points d'amarrage n'a pas encore été régulièrement notifiée ; mais je puis assurer à l'honorable M. Lejeune que le gouvernement s'occupe de cet objet, et qu'il croit d'ici à peu de temps pouvoir faire disparaître les difficultés que rencontrent parfois maintenant les pêcheurs belges dans ces parages.
L'attention du gouvernement est donc déjà portée sur les faits que vient de signaler l'honorable préopinant, et j'aurai bien soin d'avoir tout l'égard possible aux observations qu'il a présentées.
M. Lejeune. - Messieurs, l'honorable ministre des affaires étrangères vient de nous dire que la rente annuelle de 50,000 florins n'est pas payée intégralement, parce que le gouvernement belge n'est pas convaincu que les travaux soient suffisants.
Cela vous paraîtra une garantie d'exécution ; mais la disposition du traité, tel qu'il a été conclu, nous en sommes contents, et nous n'hésitons pas à dire même qu'elle nous est favorable. C'est donc l'exécution du traité qui aurait dû avoir lieu depuis deux ans, que nous devons désirer et que nous réclamons. Peu nous importe qu'on ait une garantie pécuniaire, qu'on ne paye pas quelques mille francs ; cela ne nous sauvera pas, si le traité n'est pas exécuté.
J'insiste donc pour que M. le ministre des affaires étrangères veuille terminer cette affaire le plus tôt possible, et pour qu'il y ait ou exécution du traité, ou modification du traité de commun accord, soit sur les bases que j'ai indiquées, soit sur d'autres.
Quant à l'affaire de la pêche des moules dans le Braakman, je serais fort heureux de pouvoir comprendre la convention de 1843, comme M. le ministre des affaires étrangères. Si les points d'amarrage doivent être fixés de commun accord entre les deux gouvernements, notre gouvernement a quelque chose à dire dans la question.
Mais si tel est le sens de la convention, je suis étonné que ce point n'ait pas été arrangé depuis longtemps. J'étais d'une opinion contraire ; je croyais que les termes de la convention étaient tels que chaque gouvernement avait le droit de désigner les points d'amarrage sur son propre territoire, et j'ai pensé que cette stipulation avait été introduite, parce que les négociateurs belges avaient cru peut-être que nos frontières s'étendaient à 200 pas plus loin.
Du reste, je remercie M. le ministre des affaires étrangères de l'attention qu'il promet de donner à cet objet.
- L'article 5 est adopté.
Art. 6. Italie : fr. 40,000. »
- Adopté.
« Art. 7. Prusse : fr. 50,000 »
M. Osy. - Messieurs, les renseignements que j'aurai à demander à M. le ministre, je suis obligé de les réclamer ici, parce que nous n'avons pas de rapports diplomatiques directs avec la Russie, et que les difficultés que nous avons avec ce pays se négocient à Berlin.
Le gouvernement russe, depuis quelques années, a fait avec quelques nations des traités de commerce qui leur sont très favorables, tandis que nous sommes obligés de payer des droits de port très considérables, et même une augmentation de 50 p. c. sur les droits d'entrée. Je demanderai à M. le ministre si nous pouvons espérer d'avoir bientôt un traité de commerce avec la Russie : en cas de négative, je ne vois pas pourquoi l'on continuerait à traiter la Russie sur le pied des nations les plus favorisées. Je ne suis pas partisan des représailles ; mais je ne crois pas non plus qu'il faille être dupe.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, il est vrai que, depuis le 1er janvier 1846, la Russie a établi un nouveau régime commercial, par suite de l'ukase du 19 juin 1845. Les effets de cet ukase sont réellement préjudiciables à nos relations avec l'empire russe. L'ukase impose d'abord un droit additionnel de 50 p. c, en sus des droits ordinaires, sur les marchandises importées par pavillon étranger, et secondement une surtaxe de navigation d'un rouble par last à l'entrée et à la sortie de ces navires. Ne sont exceptés que les pavillons des nations chez lesquelles le pavillon russe jouit du traitement de la nation la plus favorisée. En Belgique, quant au droit de navigation, le pavillon russe est assimilé au pavillon national, et il jouit également du remboursement du péage de l'Escaut ; mais quant au droit sur les marchandises, il y a un droit différentiel, en vertu de la loi du 21 juillet 1844.
Il avait semblé d'abord que, par suite de l'avantage qui était fait à la marine russe, en ce qui concerne les droits de navigation, on pouvait obtenir du moins la disjonction des mesures prises par l'ukase du 19 juin 1845, c'est-à-dire que la majoration sur la cargaison seule devrait être appliquée aux navires belges ; mais le gouvernement russe n'entend pas disjoindre ces dispositions, de sorte que le gouvernement belge a été dans cette situation, ou de prendre des mesures de représailles auxquelles l'honorable préopinant faisait tout à l'heure allusion ; c'est-à-dire, de retirer à la marine russe les avantages dont elle jouit actuellement ; ou de chercher à obtenir des réductions sur les tarifs actuellement en vigueur dans l'empire russe.
Je puis donner à l'honorable préopinant l'assurance que le gouvernement s'occupe activement de cette affaire ; mais il comprendra qu'il n'est pas possible que j'entre dans de plus grands développements.
- L'article 7 est adopté.
« Art. 8. Etats-Unis : fr. 25,500 »
- Adopté.
« Art. 9. Turquie : fr. 47,000 »
- Adopté.
Art. 10. Brésil : fr. 21,000. »
M. Osy. - Messieurs, ici je dois rendre justice à l'ancien ministère. Le gouvernement, au mois de mai ou de juin, avait pris une mesure très libérale envers le Brésil, en vertu de la loi du 21 juillet 1844, qui a autorisé le gouvernement à admettre les navires des pays de production sur le pied des nations les plus favorisées, si l'industrie belge n'y est pas frappée par des droits différentiels. Au Brésil, jusqu'à présent, la Belgique n'était soumise à aucun droit différentiel ; le gouvernement belge a bien fait d'admettre les navires brésiliens, avec les produits de leur sol, sur le même pied que les navires belges ; mais nous avons appris que le gouvernement brésilien allait établir, à partir du 1er janvier prochain, des droits différentiels. Je demande si nous avons l'espoir que, dans l'établissement de ces droits, on tiendra compte de ce que nous avons fait, si nous continuerons à n'être soumis à aucun droit différentiel.
Je prie M. le ministre de nous dire si, d'après les renseignements qui doivent lui être parvenus, nous pouvons être tranquilles sous ce rapport.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Je n'ai pas encore reçu notification officielle des dispositions nouvelles que le gouvernement brésilien vient de prendre relativement à la marine étrangère. Mais les nouvelles que j'ai reçues sont favorables à cette opinion que le traitement de nos navires n'éprouvera aucun changement par suite de ces dispositions nouvelles. Vous savez que dans les ports brésiliens les navires belges sont complètement assimilés aux navires brésiliens.
Le 26 septembre, notre chargé d'affaires a demandé au ministre des affaires étrangères du Brésil de vouloir bien s'expliquer sur ce point. Voici la réponse qu'il a reçue.
(M. le ministre donne lecture de cette réponse du ministre des affaires étrangères du Brésil.)
Cette réponse est du 27 septembre 1847, quelques jours avant la résolution prise par le gouvernement brésilien qui apporte ces modifications dans son régime commercial.
Il n'y a donc aucun motif de croire que le traitement de nos navires au Brésil éprouverait un changement défavorable par suite du changement survenu dans sa législation commerciale.
- L'article 10 est mis aux voix et adopté.
« Art 11. Danemark: fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 12. Espagne : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 13. Grèce : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 14. Villes libres et hanséatiques de Hambourg, Brème et Lubeck : fr. 15,000/ »
- Adopté.
(page 144) « Art. 15. Portugal : fr. 15,000 »
- Adopté.
« Art. 16. Sardaigne : fr. 15,000. »
- Adopté.
« Art. 17. Suède : fr. 15,000 »
- Adopté.
« Article unique. Traitements des agents consulaires et indemnités à quelques agents non rétribués : fr. 103,000. »
M. le ministre des finances (M. Veydt). - Messieurs, je demandé la parole comme membre de la chambre. A l'avant-dernière session, les sections ont examiné un projet de loi tendant à autoriser le gouvernement à régler les droits à percevoir par nos consuls. Le tarif qui est en vigueur date des premières années du gouvernement des Pays-Bas ; des réclamations se sont fréquemment élevées contre l'élévation de plusieurs de ces articles. Notre marine en souffre : c'est ainsi que deux navires, l'un belge, l'autre prussien, ayant le même chargement et le même tonnage, forcés d'entrer en relâche dans le même port,, ont dû payer, le premier, plus de douze cents francs et le second à peine trois cents, pour droits consulaires. C'est un véritable droit différentiel à charge de notre pavillon.
Je me permets d'exprimer le désir que les sections soient prochainement réunies en section centrale et qu'un rapport nous soit présenté le plus promptement possible. Il ne me paraît pas que le projet, qui est conçu en un seul article, puisse rencontrer des difficultés.
M. Osy. - Depuis longtemps, nous réclamons un tarif des droits de chancellerie à payer aux consulats ; aujourd'hui ces droits sont arbitrairement perçus ; on fait payer tout ce qu'on veut, nos navires sont maltraités Par le projet présenté par l'honorable général Goblet, le gouvernement avait demandé l'autorisation d'établir un tarif. Je crois que dans les sections on n'a pas voulu examiner ce projet, parce qu'on aurait voulu que le gouvernement prît l'engagement de faire sanctionner par la législature, après une année ou deux d'expérience, le tarif qu'il aurait provisoirement établi. Je crois que le gouvernement devrait retirer le projet primitif pour en présenter un nouveau avec la modification que je viens d'indiquer.
Je prie le gouvernement de vouloir bien examiner cette question.
M. le ministre des finances (M. Veydt). - La section centrale pourrait introduire elle-même la modification que vient d'indiquer l'honorable M. Osy. Dans mon opinion, le tarif doit nécessairement être fait par le gouvernement. Il est impossible que la chambre s'en occupe, car il s'agit de déterminer les chiffres de soixante à quatre-vingts articles différents. La loi peut décider qu'après un certain nombre d'années le tarif sera soumis à une révision ou qu'il aura besoin d'une sanction pour continuer à servir de règle ; mais rien n'empêche que cette garantie, si elle est jugée utile, ne fasse l'objet d'un amendement de la part de la section centrale. Il me semble que le gouvernement ne trouverait aucun inconvénient à s'y rallier, et que pour arriver à ce but il n'est pas nécessaire qu'il retire le projet qui a été présenté. Ce serait une perte de temps, qui serait regrettable.
M. le président. - La section centrale chargée d'examiner le projet de loi dont il vient d'être parlé sera complétée à la fin de la séance et réunie aussitôt que l'examen des budgets permettra de le faire.
M. Delehaye. - J'ai toujours pensé que des consuls intelligents, probes, pouvaient être d'une grande utilité pour notre commerce et notre industrie, et qu'il fallait s'attacher surtout à les nommer dans des contrées où nous pourrions trouver de grands débouchés pour plusieurs de nos produits.
L'un de ces marchés qu'il conviendrait d'exploiter, serait celui de l'Algérie ; le cabinet précédent l'a pensé comme moi, et voulant doter la Belgique d'un débouché qui nous paraît favorable, il a nommé à Alger un consul général et un vice-consul.
Mais malheureusement dans ces choix, comme toujours, il s'est laissé guider par des considérations tout autres que celles qui auraient dû l’émouvoir.
Le consul général est un homme d'honneur, estimable, mais qui ne saurait être pour nous d'aucune utilité, attendu qu'il ne se trouve en Algérie que durant deux ou trois mois par an ; et quant au vice-consul, c'est un personnage dont la conduite a été telle que le ministère français n'a pas voulu lui donner l'exequatur.
J'appelle l'attention de M. le ministre sur ce point, je l'engage à conférer ces postes à des Belges, surtout lorsque, comme dans l'espèce, l'occasion de placer convenablement un Belge instruit se présente au cabinet.
- L'article unique du chapitre III est mis aux voix et adopté.
« Article unique. Frais de voyage des agents du service extérieur et de l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses : fr. 70,500. »
- Adopté.
« Article unique. Frais à rembourser aux agents du service extérieur : fr. 80,000. »
- Adopté.
« Art. 1er. Missions extraordinaires, traitements d'agents politiques et consulaires en inactivité : fr. 30,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 10,000 »
- Adopté.
« Art. 1er. Ecoles de navigation : fr. 19,000. »
M. Osy, rapporteur. - M. le ministre des affaires étrangères avait demandé à la section centrale l'augmentation de 3,000 fr. comprise dans les 19,000 fr. proposés, et qui a pour objet l'adjonction d'un cours de commerce. La section centrale a été unanimement d'avis que ce cours serait très utile à nos jeunes marins, qui ainsi arriveraient dans les pays étrangers connaissant les usages du commerce et de la navigation, et qui par la suite pourraient diriger utilement comme subrécargues des opérations commerciales pour la Belgique.
Je demande que cette augmentation de crédit ne fasse pas obstacle à la création, à Anvers, d'une université commerciale. Ce crédit est pour les écoles de navigation et non pour l'université commerciale.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - L'adoption de la proposition du gouvernement, en ce qui concerne les écoles de navigation, ne peut exercer aucune influence sur la détermination à prendre au sujet de l'institut commercial dont la création est projetée. Que cet institut soit créé ou qu'il ne le soit pas, l'adjonction d'un cours de commerce aux écoles de navigation présentera toujours un caractère d'utilité et ne pourra empêcher l'exécution d'autres projets.
- L'article premier est adopté.
« Art. 2. Chambres de commerce : fr. 12,000. »
- Adopté.
« Art. 3. Frais divers et encouragements au commerce : fr. 19,900. »
- Adopté.
« Art. 4. Encouragements pour la navigation, etc. : fr. 115,000 »
Cet article est adopté avec l'addition des mots : « Sauf pour les services au-delà du cap Horn » proposée par M. le ministre des affaires étrangères.
« Art. 5. Primes pour construction de navires, chiffre primitif : fr. 35,000 fr., chiffre proposé par la section centrale, fr. 20,000. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - C'est le gouvernement qui a proposé de réduire cet article au chiffre de 20,000 fr.
M. Osy, rapporteur. - Ce n'est pas la section centrale qui a demandé cette réduction. M. le ministre des affaires étrangères a envoyé un amendement en ce sens à la section centrale. D'après le tableau qu'on nous a remis, il est à craindre que les 20,000 fr. même ne soient pas dépensés. La section centrale a consenti à cette réduction. Mais nous avons l'espoir que bientôt les armements augmenteront et que, dans quelques années, nous aurons l'occasion d'allouer des primes plus fortes.
- L'article 5 est adopté.
« Art. 6. Pêche maritime : fr. 100,000. »
- Adopté.
« Art. 6 bis. Etablissement de comptoirs de commerce dans les contrées transatlantiques et dans le Levant, sous les conditions à déterminer par le gouvernement, et sans que l'allocation puisse se prolonger au-delà de cinq ans : fr. 103,000. »
M. le président. - La section centrale, à l'unanimité, est d'avis que le gouvernement devrait présenter un projet de loi spécial pour l'établissement de ces comptoirs.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, la section centrale propose l'ajournement du crédit dont M. le président vient d'entretenir la chambre. Je dois donner quelques explications sur les motifs qui ont déterminé le gouvernement à proposer actuellement ce crédit. L'honorable rapporteur de la section centrale n'a pas inséré dans le rapport la note explicative que j'avais eu l'honneur de lui adresser, et il n'a pas développe non plus les motifs de la résolution prise par la section centrale. Il est donc nécessaire que j'entre dans quelques développements.
Messieurs, on réclame constamment des moyens pour donner de l'extension à notre commerce maritime. Or, un des moyens qui ont été le plus souvent signalés et dans cette enceinte par les orateurs qui s'occupent de ces questions, et par presque toutes les chambres de commerce et par toutes les commissions d'enquêtes, instituées soit pour examiner le projet relatif à la formation d'une société commerciale d'exportation, soit pour examiner spécialement les moyens de venir en aide à notre commerce, qui a été toujours signalé comme le plus utile, le plus efficace, est l'établissement de comptoirs à l'étranger. Il y a, messieurs, jusqu'à la commission qui a été instituée près du ministère de la justice pour rechercher les moyens de venir en aide aux classes nécessiteuses, qui a indiqué également cette mesure comme une de celles qui doivent être adoptées par le gouvernement..
Ainsi, messieurs, c'est une question sur laquelle il y a eu presque toujours unanimité.
Aussi mon honorable prédécesseur, dans le courant du mois d'avril de cette année, avait fait de cette proposition l'objet d'un amendement à introduire dans la loi relative à une société d'exportation, et cet amendement avait eu l'approbation de la section centrale.
(page 145) Mais, messieurs, il est à remarquer que cette proposition était cependant indépendante de la formation d'une société d'exportation. Par le projet qui est soumis à la chambre, la société commerciale d'exportation pourra bien, dans certaines limites, établir des comptoirs dans les pays d'outre-mer ; mais quelles que soient les dispositions qui seront adoptées à l'égard de cette société, il n'en résultera pas moins qu'elle ne pourra pas établir un très grand nombre de comptoirs. En effet, si la société de commerce établissait des comptoirs partout où cela est nécessaire, son capital presque entier serait absorbé.
Ainsi, la proposition qui vous avait été faite l'année dernière et qui avait reçu un accueil favorable de la part de la section centrale chargée de l'examiner, était indépendante de la formation d'une société d'exportation. Soit que cette société s'établisse, soit qu'elle ne soit pas instituée, toujours il y aura utilité, utilité grande pour la Belgique, dans l'établissement de maisons de commerce à l'étranger, dans l'établissement de comptoirs.
Messieurs, c'est l'absence de maisons commerciales belges dans les pays transatlantiques et dans le Levant qui a presque toujours été signalée comme une des causes principales de notre infériorité dans nos exportations. Tous nos consuls les plus éclairés sont de cet avis. Tandis que les pays exportateurs par excellence ont de nombreuses maisons établies sur tous les marchés du globe, la Belgique est dans un état complet d'infériorité à cet égard. C'est tout au plus si nous avons quelques maisons belges, d'une certaine importance, établies sur quelques-uns des marchés des pays transatlantiques ; et c'est précisément où ces maisons se trouvent, que nos exportations grandissent le plus rapidement, comme, par exemple, à Valparaiso. Il y a accroissement considérable de nos exportations vers le Chili, parce que deux maisons belges sont établies à Valparaiso, et elles commencent à y traiter des affaires considérables.
Les villes hanséatiques, messieurs, ont un très grand nombre de maisons établies partout. La Suisse, ce pays si grandement exportateur, bien qu'il n'ait pas de marine à son service et qu'il n'ait pas de droits protecteurs pour son industrie, la Suisse a aussi établi des maisons sur presque tous les marchés du globe ; ces maisons lui donnent tous les renseignements nécessaires pour effectuer les exportations utiles, et on signale comme une des grandes causes des nombreuses exportations de la Suisse, de ce qu'elle peut rivaliser souvent avantageusement avec l'Angleterre, la présence de ces maisons à l'étranger.
Ces considérations avaient donc déterminé le gouvernement à proposer dès maintenant le crédit de 100,000 fr. parce qu'il était convaincu que cette proposition devrait recevoir un accueil favorable et qu'elle ne se liait pas intimement, inévitablement à la formation d'une société d'exportation.
Il n'y avait, dans la proposition du gouvernement, rien qui pût faire supposer que son intention était d'ajourner indéfiniment la discussion du projet sur la société d'exportation.
Cependant, messieurs, comme il n'y a pas dans cette proposition un véritable caractère d'urgence, qu'il n'y a pas nécessité absolue de l'adopter dès maintenant, je consens à son ajournement, mais j'entends bien me réserver le droit de la représenter le plus tôt possible et au plus tard lorsque nous discuterons le projet de loi relatif à la société commerciale d'exportation.
M. Osy. - Messieurs je suis charmé que M. le ministre des affaires étrangères se réunisse à la demande de la section centrale. Toutefois ce que la section centrale demande, ce n'est pas un ajournement, c'est la conversion de la demande du gouvernement en un projet de loi spécial, dans lequel seraient indiquées les conditions auxquelles les comptoirs seront établis. Je ne citerai qu'une seule circonstance qui pourrait entraîner le pays dans de grandes dépenses.
Le gouvernement établit des comptoirs. Le public y envoie des marchandises. Mais il croira nécessairement, si le contraire n'est spécifié dans une loi, que les comptoirs sont responsables envers les exportateurs.
Or, c'est ce à quoi je ne pourrais jamais consentir. Car on ne sait pas où les sacrifices à faire par le gouvernement pourraient aller.
Si nous avions voté le crédit sans rien spécifier, nous aurions pu induire le public en erreur. C'est surtout ce motif qui nous a engagés à vous demander que la proposition du gouvernement fît l'objet d'une loi spéciale.
M. de Haerne. - Messieurs, j'ai promis d'appuyer le gouvernement dans toutes les mesures utiles qu'il nous proposerait, et notamment dans toutes celles qui sont réclamées en faveur des Flandres. Je tiens ma promesse, et je viens en donner une preuve en soutenant la pensée primitive du ministère dans la question de l'établissement des comptoirs.
Je regrette que le gouvernement croie devoir se rallier à la proposition de la section centrale. Celle-ci demande un ajournement, et, si j'ai bien compris les explications qui ont été données, cet ajournement, dans la pensée de la section centrale, tend à subordonner la question des comptoirs à l'adoption du projet de loi sur la formation d'une société d’exportation.
L'honorable rapporteur de la section centrale vient de demander que l’établissement de comptoirs ne soit voté que par une loi spéciale. Sans doute cette marche serait plus régulière ; mais il faut bien reconnaître que le motif allégué par l’honorable rapporteur n'est pas fort concluant. Il a dit que les exportateurs pourraient être induits en erreur s'il n'y avait pas une loi spéciale. Mais, messieurs, si les exportateurs sont tellement légers qu'ils se laissassent induire en erreur par cela seul qu’il n’y aurait pas une loi spéciale, je crois que le même inconvénient pourrait se présenter, alors même que vous auriez discuté et voté une loi spéciale. Je crois, messieurs, que les exportateurs ne sont pas si aveugles sur leurs intérêts et qu’avant d’expédier des marchandises dans un des pays lointains où l’on aura établi des comptoirs, il y réfléchiront à deux fois, prendront tous les renseignements nécessaires et sur l’état des pays où ils voudront expédier et sur les conditions auxquelles ils pourront faire leurs exportations Je pense donc, messieurs, qu'il n'y a aucun danger sous ce rapport, et j'aurais désiré, moi, que le crédit eût été voté dès à présent. Je n'admets en aucune manière que l'établissement de comptoirs doive être subordonné à la création d'une société d'exportation. Je crois, comme l'a fort bien démontré M. le ministre des affaires étrangères, que l'institution des comptoirs est et doit être tout à fait indépendante de la société de commerce d'exportation que vous pourriez établir plus tard.
Mais, messieurs, savez-vous dans quel sens le gouvernement formulera le nouveau projet sur l'établissement d'une société d'exportation ? Savez-vous si la majorité de la chambre acceptera la société d'exportation telle qu'elle sera proposée ? Je crois, messieurs, que le projet présenté dans la dernière session, par le ministère précédent, aurait réuni très difficilement une majorité. Eh bien, on ne sait pas quelles seront les modifications que le gouvernement actuel croira devoir introduire dans ce projet. Toutes sortes de systèmes ont été mis en avant. Nous avons vu bien des idées divergentes se produire dans les enquêtes qui ont eu lieu et dans les pétitions. On demandait d'un côté que la société étendît ses opérations à tous les produits du pays ; cela aurait exigé un capital considérable et cette circonstance était de nature à faire reculer un grand nombre de membres de la chambre, surtout dans le moment actuel.
D'un autre côté, l'on demandait que la société d'exportation ne pût point faire tort aux relations déjà établies avec les marchés d'Europe par certaines maisons belges. Cette dernière opinion a été émise dans une foule de pétitions envoyées à la chambre de tous les points des Flandres, de Gand, de Courtray, de Bruges, d'Ath, d'Audenarde, etc. Tous ces systèmes vont se reproduire, et je ne sais pas si la majorité ne sera pas tout aussi douteuse qu'elle paraissait l'être dans la dernière session.
Ainsi, messieurs, il est impossible de compter avec certitude sur l'établissement d'une société d'exportation, et cependant la création de comptoirs est utile dans tous les cas ; elle doit avoir lieu quoi qu'il arrive, quel que soit le sort du projet relatif à la société d'exportation.
J'ajouterai encore un mot, messieurs. Sans doute une société d'exportation et des comptoirs établis dans les pays lointains, ces deux institutions se prêteraient un mutuel appui ; mais il ne faut cependant pas perdre de vue que le but des comptoirs n'est pas entièrement le même que celui d'une société d'exportation, en ce sens que les premiers doivent venir au secours du commerce privé, tel qu'il existe aujourd'hui, et lui donner une très grande extension. C'est ce qu'a très bien démontré M. le ministre des affaires étrangères.
Mais il y a encore un autre point de vue : il a été question d'établir à Anvers une société de navigation maritime. Je ne sais si l'on se propose de donner suite à ce projet, mais le commerce et l'industrie ont accueilli cette nouvelle avec faveur, et l'on peut dire que ce serait là une institution extrêmement utile au pays.
Si je suis bien informé, le projet de société de navigation maritime se rattachait à celui de l'établissement de comptoirs, et on ne peut en effet le nier, une semblable société trouverait dans les comptoirs des auxiliaires extrêmement utiles.
Ainsi, messieurs, si, d'un côté, les comptoirs doivent venir en aide au commerce privé, d'un autre côté. ils pourraient aussi provoquer la formation d'une société maritime qui serait à son tour très utile au commerce et à l'industrie.
Quoi qu'il en soit, puisque l'honorable ministre des affaires étrangères nous promet de présenter un projet de loi spécial sur la matière ou du moins de revenir d'une manière quelconque sur la question des comptoirs, je n'insisterai pas à m'opposer à l'ajournement proposé par la section centrale et auquel le gouvernement paraît se rallier ; mais je prie M. le ministre de bien vouloir présenter ce projet le plus tôt possible et sans le subordonner au projet de loi sur la formation d'une société d'exportation.
Le pays, en général, et les Flandres en particulier, attendent depuis longtemps qu'on fasse revivre le travail. La société d'exportation, sur quelque base qu'elle soit établie, entraînera des retards. Les comptoirs pourraient s'établir sans délai et contribueraient puissamment à développer nos exportations, à féconder le travail national.
Messieurs, nous l'avons dit bien des fois, le commerce et l'industrie réclament des mesures larges, des mesurés d'utilité générale. La création de comptoirs dans les pays lointains est une de ces mesures qui me paraissent d'une utilité générale incontestable ; je pensé que, dans l'intérêt du pays tout entier et de l'industrie des Flandres en particulier, nous ne pouvons trop nous hâter d'adopter une semblable mesure.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Je crois devoir faire observer à l'honorable préopinant que si je me suis rallié à la proposition de la section centrale, ce n'est pas du tout pour abandonner l'idée qui avait été déposée dans le budget ; c'est parce que je considère (page 146) l'ajournement comme ne pouvant pas être de longue durée, comme ne pouvant pas nuire essentiellement au projet dont il s'agit. D'après le vote unanime de la section centrale, il m'a semblé que cette section composée d'hommes compétents, du reste, dans ces matières, n'avait pas reçu tous ses apaisements, et j'ai craint qu'en maintenant le crédit au budget je n'eusse soulevé une longue discussion, tandis que maintenant l'attention de tous les membres de la chambre est attirée sur la proposition et que nous pouvons dès lors espérer de la voir accueillir très favorablement lorsqu'elle sera représentée dans cette enceinte. Quant à moi, messieurs, d'accord avec tous les hommes consultés, avec tous nos consuls à l'extérieur, je considère la mesure tendante favoriser l'établissement de comptoirs dans les pays lointains, comme une des plus efficaces qui puissent être prises, sans qu'elle soit de nature à entraîner une dépense considérable.
Je ne me suis point exprimé sur la forme sous laquelle je reproduirai la proposition. Je ne sais pas encore si elle fera l'objet d'un projet de loi spécial, ou d'un article du prochain budget, ou enfin d'un amendement au projet relatif à la formation d'une société d'exportation. Je saisirai la première occasion qui me semblera convenir dans l'ordre des travaux de la chambre pour reproduire cette proposition.
Messieurs, je ne partage pas l'opinion exprimée par l'honorable rapporteur de la section centrale, qu'il faille en cette matière lier l'action du gouvernement. Il faut que le gouvernement soit libre d'imposer les conditions qui lui paraîtront les plus utiles et il me semble qu'il y aurait des inconvénients à stipuler de nombreuses conditions qui devraient être uniformes, qui s'appliqueraient à tous les comptoirs à créer dans l'avenir.
Si, du reste, une condition essentielle devait être imposée au gouvernement, si on ne voulait pas s'en rapporter entièrement à son intervention, cette condition pourrait être facilement introduite, soit au budget, soit dans la proposition particulière qui pourra être soumise à la chambre.
M. Gilson. - Messieurs, je désirerais que l'ajournement proposé eût un terme quelconque. Mon intention n'est pas d'entrer, dès à présent, dans le fond de la question. En présence du vote unanime de la section centrale, nous aurions peu de chances de succès. Le gouvernement n'a pas cru devoir soutenir sa proposition ; je ne la reprendrai pas. Je dirai cependant que si la chambre ne fixe pas l'époque à laquelle elle s'occupera des comptoirs à établir à l'étranger ; en d'autres termes, si vous ajournez cette discussion jusqu'à celle du projet de loi concernant la société d'exportation, il en résultera un délai éminemment préjudiciable à notre commerce et à notre industrie. Dans mon opinion, les exportations sont indispensables, notamment dans l'intérêt des Flandres.
C'est une vérité palpable, que les exportations doivent nous venir en aide. Or, tout ce qui nous est proposé pour favoriser ces exportations, doit mériter une discussion franche et immédiate.
Messieurs, deux systèmes sont en présence dans notre pays ; l'un de ces deux systèmes est celui-ci : il faut laisser à l'industrie privée le soin de rechercher elle-même ses débouchés sans l'intermédiaire d'aucun agent. L'autre système se formule ainsi : il faut un agent général qui vienne en aide aux industries privées.
Cette question est fort grave. Nous pourrions citer dans le pays des industries qui, par leurs propres capitaux, par leur propre intelligence, ont réussi à établir des relations suivies sur tous les marchés étrangers ; une société d'exportation fera peut-être beaucoup moins.
Mais, messieurs, ce ne sont pas toujours les grandes industries auxquelles nous devons seulement porter intérêt ; il faut surtout avoir en vue les industries les plus nombreuses qui possèdent des capitaux bornés, et qui ne peuvent pas à la fois fabriquer et exporter par elles-mêmes. Sous ce rapport, la position de la Belgique est unique : notre industrie n'a jamais trouvé une assistance sérieuse dans le commerce exportateur : l'exportation n'a réussi que par les efforts combinés de l'industrie elle-même. Dans une autre circonstance, je dirai où nous avons été forcés d'aller chercher cet appui ; aujourd'hui je ne veux pas pousser la discussion plus loin ; je voulais seulement faire sentir à la chambre où gît la grande difficulté.
Le haut commerce chez nous prétend que son rôle ne va pas jusqu'à être l'intermédiaire indispensable pour l'industrie ; nous prétendons, au contraire, nous, qu'il faut que quelqu'un lui vienne en aide. C'était même dans ces comptoirs que nous espérions trouver l'intermédiaire que nous cherchons. En effet, lorsque nous arrivons avec nos produits sur les marchés transatlantiques, nous voudrions trouver quelqu'un favorablement disposé pour bien apprécier et faire apprécier par les acheteurs, les articles qui leur sont offerts. La société d'exportation elle-même sera heureuse de rencontrer ces comptoirs, car à elle aussi des agents seront indispensables.
A mon avis donc, les comptoirs sont d'impérieuse nécessité. Si maintenant à cette question, déjà grosse d'elle-même, vous rattachez celle d'une société belge d'exportation, vous ajournez pour longtemps peut-être la solution d'une question toute d'avenir. Il est vrai que dans trois discours du Trône déjà, il a été fait la promesse formelle d'une société d'exportation ; des commissions ont été nommées par les différents ministères qui se sont succédé depuis 1841 ; toutes les questions ont été mûrement examinées ; on a pesé, exagéré peut-être, toutes les difficultés, on s'en est effrayé et on est resté dans l'inaction. Je saurais très mauvais gré au cabinet actuel d'imiter ses prédécesseurs. Quand une idée est jugée généralement comme bonne et grande, il est beau d'avoir le courage d'en poursuivre l'exécution jusqu'au bout. Le ministère né faillira pas à la tâche ; il en a pris, tout récemment dans cette enceinte, l'engagement solennel. Mais quelle que soit sa volonté bien formelle, il pourrait se faire qu'il trouvât sur son chemin des entraves sérieuses.
Pour donner suite à l'établissement d'une société de commerce, des sommes considérables sont indispensables. Je reconnais le premier que le moment actuel serait assez mal choisi pour faire un appel à nos capitalistes. Force sera donc d'ajourner de quelques mois peut-être l'époque à laquelle nous pourrons songer sérieusement à aborder la mise en discussion de la grande mesure que nous projetons.
Mais si, ce qu'à Dieu ne plaise, cette situation se prolongeait, faudrait- il donc au moins nous arrêter devant la nécessité de créer des comptoirs qui nous viendront en aide ? Si la société d'exportation ne peut s'occuper immédiatement de l'écoulement de nos produits, au moins les producteurs belges trouveront sur les marchés étrangers des agents qui se chargeront de ce soin. Quand le moment sera venu, je ferai devant la chambre même la nomenclature des produits industriels que nous avons à exporter ; j'aurai là l'occasion de vous faire apprécier l'avenir qui est réservé à nos manufactures, alors que les exportateurs nous viendront sérieusement en aide.
Pour ma part, j'eusse donc désiré que le projet de loi, relatif à rétablissement de comptoirs, ne fût pas remis à une époque indéterminée. Si je ne me trompe, l'honorable M. de Haerne a fait une proposition qui s'éloigne un peu de la proposition d'ajournement qui a été faite par la section centrale. L'honorable député de Courtray voudrait un projet de loi spécial. S'il en était ainsi, je me joindrais volontiers à lui ; car je verrais quelque chose de plus déterminé.
M. de Haerne. - Je n'ai pas fait de proposition.
M. Gilson. - Quoiqu'il en soit, je préférerais une proposition de ce genre à celle à laquelle a dû se rallier M. le ministre des affaires étrangères et qui consiste à joindre la discussion du projet d'établissement de comptoirs à celle de la société d'exportation ; je crains qu'on n'ajourne pour un terme indéfini une mesure utile, et qui n'eût été que le prélude des grandes résolutions que nous sommes appelés à prendre pour venir sérieusement en aide à plusieurs branches d'industrie.
M. le président. - Je ferai remarquer à M. Gilson que la chambre n'a pas à se prononcer sur l'ajournement, M. le ministre n'ayant pas reproduit dans la chambre la proposition qu'il avait faite dans le sein de la section centrale.
« Art. 1er. Personnel : fr. 297,471 »
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Dans la séance précédente, quelques orateurs ont contesté l'utilité d'une marine militaire. Je ne sais si je dois entrer dans de longs développements pour répondre à ces honorables membres. Lorsque le pouvoir législatif s'est déjà tant de fois prononcé en faveur de cette institution, je crois qu'il n'est pas nécessaire de venir longuement démontrer les services qu'elle peut rendre au pays. Du reste, c'est seulement pour constater que je ne partage pas l'opinion émise par ces honorables membres à cet égard, que je présente quelques observations.
Messieurs, l'utilité d'une marine militaire en Belgique se présente tous les jours en quelque sorte ; mais cette utilité, quand toute notre marine se borne à un brick, une goélette et trois canonnières, ne peut être immense ; elle ne peut être qu'en rapport avec le chiffre alloué au budget. Une preuve évidente de l'utilité de ces bâtiments, c'est qu'ils sont constamment occupés ; l'un sert à protéger la pêche dans la mer du Nord, cette protection est reconnue indispensable ; chaque année nous avons mille à onze cents pêcheurs qui se rendent dans la mer du Nord ; il est indispensable que nous ayons dans ces parages un bâtiment de guerre pour leur assurer la protection qui leur est nécessaire.
C'est tellement reconnu que le gouvernement des Pays-Bas, indépendamment d'un bâtiment de guerre à voiles, y envoie un bâtiment à vapeur pour protéger la pêche. Nos bâtiments font en outre chaque année des voyages lointains qui ont une grande utilité pour nos nationaux qui sont dans ces parages. Notre brick a visité récemment la côte occidentale de l'Amérique ; la vue du pavillon belge a produit un excellent effet dans ces régions lointaines et nos nationaux nous en ont su beaucoup de gré. Messieurs, un bâtiment de guerre est une force assez imposante dans ces contrées, car les peuples qui les habitent ne possèdent pas de marine militaire.
Ces voyages sont faits aussi dans un intérêt d'exploration qui présente, également une grande utilité.
Quant aux canonnières, elles sont principalement destinées à surveiller la quarantaine ; pour ce service elles sont également indispensables. Au point de vue même de la défense du pays, messieurs, je pense que la marine militaire a aussi son utilité ; je ne suis pas très compétent en cette matière, et je regrette que mon collègue, le ministre de la guerre, ne soit pas présent, car je suis persuadé qu'il vous démontrerait que les arguments qu'on fait valoir pour justifier l'entretien d'une armée de terre s'appliquent fort bien à la marine militaire. Ce sont de véritables batteries flottantes.
Ainsi que l'a fait observer un honorable préopinant dans une séance précédente, la marine militaire n'emporte pas tout le crédit allouée par (page 147) le chapitre qui la concerne ; il y a le service du pilotage et celui du commissariat maritime qui rapportent plus qu'ils ne coûtent ; et je dois ajouter que depuis quelques années les recettes provenant du département de la marine augmentent progressivement, tandis que les dépenses pour le personnel sont diminuées. Ces dépenses étaient autrefois plus fortes qu'elles ne sont aujourd'hui. Je regrette de n'avoir pas apporté avec moi les notes que j'avais réunies ; j'aurais pu le prouver à l'évidence. Il y a donc plutôt diminution qu'augmentation, dans l'ensemble des dépenses du budget.
L'établissement de la marine militaire n'a amené aucun accroissement de dépense, et les recettes du pilotage et des commissariats s'élèvent chaque année, tandis qu'il y a eu réduction du chiffre affecté au personnel. Le personnel de cette marine sert aussi pour les services de navigation à voiles. Vous savez, en effet, que les navires de fort tonnage se rendant principalement dans les Indes orientales, au lieu de subsides du budget, obtiennent l'emploi d'un équipage de la marine. Voilà encore un des services que rend le personnel attaché à cette marine. Il y a d'autres services également fort utiles, comme celui de la navigation à vapeur entre Ostende et Douvres, qui utilisent le personnel de la marine. Beaucoup d'autres considérations encore militent en faveur de cette institution, mais l'utilité en a été reconnue trop souvent par les votes successifs qui ont adopté les chiffres portés au budget, pour qu'il soit nécessaire de m'étendre davantage sur ce point.
M. Loos. - M. le ministre vient d'exposer les services que la marine de l'Etal peut rendre au pays. Je pense que personne ne conteste les services que le pilotage rend à la navigation ; et de plus, le pilotage rapporte bien au-delà des dépenses pour lesquelles il figure au budget. Mais j'ai entendu critiquer la marine militaire ; jusqu'à présent elle ne nous a pas rendu d'autre service que celui de surveiller la pêche dans la mer du Nord ; hors de là, c'est un luxe inutile. La marine militaire proprement dite coûte à l'Etat 513,000 fr., d'après le budget, le coût de l'entretien d'un brick, d'une goélette, de trois canonnières et du personnel, qui est de 432 hommes d'équipage, officiers et marins.
Je le répète, en dehors de la protection que la marine militaire prête à la pêche, je ne puis constater nulle part son utilité. Nous ne sommes pas une puissance maritime, je crois donc fort inutile d'en affecter les allures aux dépens du trésor public. S'il est vrai que la marine soit appelée à concourir à la défense du pays, il serait plus utile de créer une marine à vapeur que d'avoir un brick, une goélette et trois canonnières qui stationnent dans l'Escaut.
Si le gouvernement veut imiter les puissances maritimes, je l'engagerai plutôt à imiter l'Angleterre. (Interruption.) Non pas, messieurs, pour créer une marine militaire aux frais de l'Etat, mais pour encourager des compagnies qui construisent des bateaux à vapeur dont le gouvernement se réserve la propriété en cas de guerre.
C'est ce que se fait en Angleterre et aux Etats-Unis. Pourquoi le gouvernement belge, qui sent le besoin d'une marine militaire ne procéderait-il pas ainsi ? Ce serait le moyen d'arriver immédiatement à un résultat désirable en ce moment. Je veux parler de l'établissement d'une ligne de navigation à vapeur entre la Belgique et les Etats-Unis. Le besoin de cette ligne se fait sentir davantage depuis que la France, l'Angleterre et l'Allemagne sont en possession de bateaux à vapeur qui font une navigation régulière vers les Etats-Unis.
(Erratum, page 168) La Belgique doit sortir de son isolement, elle doit profiter de sa situation avantageuse. Sa position lui permet de servir d'intermédiaire pour le transport des marchandises vers une grande partie de l'Allemagne et de transporter ses propres marchandises aux Etats-Unis sans recourir à la marine étrangère. Au lieu d'entretenir une marine extrêmement coûteuse, relativement aux services qu'elle rend, on devrait, je le répète, favoriser la création d'une marine à vapeur au moyen de subsides accordés à des compagnies.
J'engage M. le ministre des affaires étrangères et de la marine à méditer sur cet objet, à voir s'il n'y aurait pas moyen de rendre un service éminent au pays, en créant une navigation à vapeur entre la Belgique et les Etats-Unis plutôt que de continuer une dépense qui constitue un luxe inutile.
- L'article premier est mis aux voix et adopté.
« Art. 2. Vivres : fr. 148,000. »
- Adopté.
« Art. 3. Entretien, chauffage et éclairage : fr. 62,320. »
- Adopté.
« Art. 4. Magasin de la marine : fr. 4,800. »
.- Adopté.
« Art. 5. Pilotage : fr. 462,320. »
- Adopté.
« Art. 6. Service des bateaux à vapeur de l'Escaut : fr. 60,758 »
M. Osy, rapporteur. - A la dernière session nous avons voté la construction d'un bateau à vapeur pour le passage d'Anvers à la Tête-de-Flandre. Ce service continue d'être désorganisé, car les deux navires qui le font sont tout à fait hors de service. Je demanderai si nous pouvons espérer que le bateau à vapeur fera bientôt le service.
M. de T'Serclaes. - Je viens appuyer très sérieusement les observations de l'honorable M. Osy. L'administration des bateaux à vapeur de l'Escaut comprend trois services principaux :
1° Le service du passage d'eau d'Anvers à la Tête-de-Flandre ;
2° Le service de navigation régulière entre Anvers et Tamise ;
3° Le service de remorque dans l'Escaut.
Le budget mentionne l'emploi de trois navires pour ce service multiple, ce qui est déjà peu ; mais de ces trois navires, deux, le Prince Philippe et la Ville d'Anvers, sont dans le plus mauvais état et condamnés à chômer.
Or, je vous le demande, messieurs, est-il possible qu'avec le seul bateau à vapeur qui reste aujourd'hui en bon état, on puisse pourvoir aux nécessités du service ?
Aussi, des plaintes très graves s'élèvent chaque jour, à Tamise et sur les bords de l'Escaut, sur la manière dont marche le service régulier, qui est garanti aux riverains, et sur lequel ils comptent ; des plaintes non moins graves s'élèvent à Anvers, relativement au passage de la Tête-de-Flandres.
Il est urgent que des mesures soient prises pour satisfaire à ces justes réclamations, et je me joins à l'honorable préopinant pour les recommander à la sollicitude de M. le ministre des affaires étrangères.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Le bateau à vapeur qui doit être construit par suite de la loi qui a été votée dans le courant de l'année, a été mis en adjudication il y a environ un mois. Il a été adjugé au prix de 157 mille francs. Je presserai autant qu'il me sera possible la construction de ce bâtiment, car je dois reconnaître, avec les honorables préopinants l'insuffisance du service actuel. Deux des navires indiqués au budget, le Prince Philippe et la Ville d'Anvers sont sur le point d'être vendus par les soins du domaine. Ainsi, nous n'aurons plus pour ce service qu'un seul bateau à vapeur de l'Etat, mais le gouvernement en a loué un second. Je reconnais donc, je le répète, la nécessité de presser autant que possible la construction du nouveau navire, j'y donnerai tous mes soins.
M. Vilain XIIII. - Quand, l'année dernière, la chambre a voté le projet de loi qui a décrété la construction d'un bateau à vapeur pour le passage d'Anvers à la Tête-de-Flandre, il y en avait un autre, la Ville d'Anvers, qui allait très bien. M. le ministre des affaires étrangères nous dit que le domaine va vendre le bateau à vapeur la Ville d'Anvers, et que le bateau à vapeur, le Prince Philippe, ne pouvant plus aller, sera également vendu. Il ne nous restera plus que la Princesse Charlotte, qui va très bien ; mais il est impossible, avec ce seul bateau à vapeur, de pourvoir aux trois services que vient d'indiquer l'honorable préopinant ; il en faut nécessairement trois. Or, M. le ministre des affaires étrangères déclare qu'il n'y en a qu'un seul qui soit bon. La loi ne lui donne le pouvoir que d'en construire un second, il faudrait donc ouvrir un crédit pour un troisième bateau. Sans quoi l'année prochaine le service sera dans l'état déplorable où il est en ce moment.
M. Loos. - Je viens appuyer ces observations. L'année dernière j'avais appelé l'attention du gouvernement sur ce point. J'avais prévu, ce qui est arrivé d'après la déclaration de M. le ministre des affaires étrangères. J'avais signalé le mauvais état des navires qui font le service de Tamise et le passage de la Tête-de-Flandre.
J'avais dit alors à la chambre que le gouvernement s'était mis aux lieu et place d'une compagnie qui avait voulu se former à Anvers et qui prenait l'engagement vis-à-vis du gouvernement d'établir trois bateaux à vapeur, dont l'un pour faire le service sur Tamise, l'autre pour faire le service sur la Tête-de-Flandre, l'autre destiné à rester en réserve et à remorquer les navires sortant du port d'Anvers.
J'avais espéré que les considérations que j'avais fait valoir alors auraient engagé le gouvernement à nous faire une proposition pour la construction d'un troisième bateau à vapeur.
Messieurs, ce troisième bateau, ainsi que vous l'a fort bien dit l'honorable M. Vilain XIIII, est indispensable même pour assurer le service de Tamise et celui de la Tête-de-Flandre, indépendamment du service de remorque sur l'Escaut.
J'engage donc M. le ministre des affaires étrangères à saisir le plus tôt possible la chambre d'une proposition tendant à l'autoriser de faire construire un troisième bateau à vapeur, ou bien à confier le service à une compagnie qui se mettrait en son lieu et place.
M. Delfosse. - M. le ministre des affaires étrangères ferait bien d'examiner sérieusement s'il ne serait pas plus avantageux pour l'Etat d'accorder des subsides à une compagnie qui se chargerait de ce service à des conditions raisonnables.
La construction de nouveaux navires nous entraînerait dans des dépenses extrêmement considérables ; il ne faut pas non plus perdre de vue que les navires que l'on fournit au gouvernement ne sont pas en général très solides, puisqu'il faut les mettre au rebut après un petit nombre d'années.
C'est là une considération qui doit peut-être faire désirer que ce service ne s'exécute plus aux frais et pour compte de l'Etat ; il est très possible que l'intervention d'une compagnie serait moins onéreuse pour le trésor, tout en présentant la même utilité au public.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - J'examinerai cette question.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art. 7. Police maritime : fr. 35,800. »
- Adopté.
« Art. 8. Service des bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres : fr. 242,100. »
M. Osy, rapporteur. - Messieurs, je crois que les trois bateaux à vapeur dont nous avions autorisé la construction il y a deux ans, sont maintenant en service. Mais nous n'en profitons guère, parce que la malle anglaise nous arrive encore plus tard qu'anciennement.
(page 148) Le gouvernement français vient de faire avec l'Angleterre un arrangement en vertu duquel les lettres et dépêches de ce dernier pays arriveront deux fois par jour à Paris. Il me paraît que si le gouvernement voulait faire partir nos bateaux à vapeur de Douvres à l'arrivée de la malle de Londres, nous pourrions avoir à Bruxelles et à Anvers les lettres d'Angleterre à midi au lieu de les avoir le lendemain matin. Ce serait un grand avantage pour le commerce et les voyageurs et en même temps un grand revenu pour le gouvernement.
Le grand défaut est qu'il n'y a pas d'harmonie, je pense, entre le ministère des affaires étrangères et celui des travaux publics. Le ministère des travaux publics partage entièrement mon opinion, c'est d'accélérer autant que possible le transport des dépêches. Mais le département de la marine veut avoir quelques petites recettes de plus et ne veut faire partir les navires de Douvres qu'à marée haute, tandis que les malles françaises partent à toute heure, sans attendre la marée haute.
Si, messieurs, les bateaux belges agissaient de même, je le répète, nous recevrions nos lettres à midi, et celles destinées é l'Allemagne arriveraient encore le soir à Cologne. De cette manière, nous attirerions le transit de toutes les lettres de l'Allemagne par notre pays. Je pense, messieurs, que, pour obtenir ce résultat,-le département des affaires étrangères ferait bien de renoncer au besoin à quelques voyageurs qui ne voudraient pas prendre une barque pour aller en rade.
J'espère donc que les deux départements voudront bien se mettre d'accord sur ce point.
M. le ministre des affaires étrangères (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, les deux départements sont complètement d'accord sur cette question comme sur toutes les autres, et la preuve, c'est que des ordres sont donnés pour qu'à dater du mois de décembre les départs de nos malles-postes de Douvres aient lieu conformément aux désirs que vient d'exprimer l'honorable M. Osy, c'est-à-dire aussitôt l'arrivée de la malle à Douvres, de manière que les dépêches et les lettres d'Angleterre pourront arriver avant midi à Ostende et être distribuées vers cinq ou six heures à Bruxelles et à Anvers.
Cependant, messieurs, ce n'est là qu'une mesure insuffisante pour atteindre le but que vient de signaler l'honorable M. Osy. En effet, des malles anglaises ne doivent naturellement pas se conformer aux ordres qui viendraient de la Belgique. Il n'y a que pour le transport des dépêches par les malles belges que-cet avantage sera obtenu. Il faudrait une disposition beaucoup plus importante, beaucoup plus large, beaucoup plus avantageuse. Il faudrait, en un mot, une mesure analogue à celle qui vient d'être adoptée entre le gouvernement anglais et le gouvernement français. Cette mesure occupe toute l'attention du gouvernement, et spécialement celle de mon honorable collègue, M. le ministre des travaux publics.
C'est par l'adoption d'une semblable mesure, messieurs, que nous jouirons des avantages qui sont à désirer pour la Belgique, c'est-à-dire d'une prompte et régulière distribution des correspondances venant de l’Angleterre.
- L'article 8 est adopté.
« Art. 9. Secours maritimes : fr. 16,500. »
- Adopté.
« Art. 10. Dotation de la caisse de secours et de prévoyance en faveur des marins naviguant sous pavillon belge : fr. 10,000. »
- Adopté.
« Art. 11. Pensions civiles et secours : fr. 27,200. »
- Adopté.
La chambre décide qu'elle passera immédiatement au vote définitif du budget.
L'amendement apporté au libellé de l’article 4 du chap. VII, consistant dans l'addition des mots : « Sauf pour les services au-delà du cap Horn », est définitivement adopté.
L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Article unique. Le budget du ministère des affaires étrangères est fixé, pour l'exercice 1848, à la somme de deux millions six cent quatre-vingt-dix mille sept cent soixante et quatorze francs (2,690,774 fr.), conformément au tableau ci-annexé. »
- Ce projet est adopté.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget.
72 membres sont présents.
69 adoptent.
2 rejettent.
1 s'abstient (M. Faignart).
En conséquence, le budget est adopté.
Ont voté l'adoption : MM. Anspach, Brabant, Bricourt, Broquet-Goblet, Cans, Clep, Cogels, d'Anethan, de Breyne, de Corswarem, de Garcia de la Vega, de Haerne, Delfosse, d'Elhoungne, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, Desaive, Destriveaux, de Terbecq, de Theux, de Tornaco, de T'Serclaes, d'Hane, d'Hoffschmidt, Dolez, Dubus (aîné), Duroy de Blicquy, Frère-Orban, Gilson, Henot, Herry-Vispoel, Huveners, Lange, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Lys, Maertens, Malou, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Moreau, Orban, Orts, Osy, Pirmez, Pirson, Raikem, Rodenbach. Rogier, Rousselle, Scheyven, Sigart, Simons, Thienpont, Tielemans, T’Kint de Nayer, Van Clemputte, Van Cutsem, Vanden Eynde, Van Huffel, Verhaegen, Veydt, Vilain XIIII, Zoude.
Ont voté le rejet : MM. Castiau et de Foere.
M. Faignart. - Messieurs, je me suis abstenu parce que je n'ai pas assisté à la discussion.
- La séance est levée à 4 heures et demie.