(Moniteur belge n°50, du 19 février 1836)
(Présidence de M. Raikem.)
M. Verdussen fait l’appel nominal à une heure.
M. de Renesse donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. Verdussen présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
« Un grand nombre de propriétaires et cultivateurs du district de Maestricht se plaignent de la grande fraude des céréales venant de la Prusse par le rayon stratégique autour de Maestricht. Ils demandent qu’il soit avisé immédiatement à la répression de cette fraude qui anéantit l’agriculture et démoralise le pays. »
« Le conseil communal et des habitants de Florennes demandent que la chambre adopte une disposition dans la loi communale, qui admette aux fonctions municipales les employés salariés par la commune ou par l’Etat. »
« Des industriels de Courtray, employant des machines à vapeur, demandent que la chambre intervienne pour faire cesser l’impôt exorbitant de 20 centimes par hectolitre perçu par la ville sur la houille, dont l’emploi est indispensable à leurs usines. »
M. Dequesne écrit pour informer la chambre qu’il n’est pas encore remis de l’indisposition qui l’empêche de se rendre aux séances.
- Pris pour notification.
M. de Renesse. - Messieurs, par cinq pétitions, plus de mille habitants du district de Maestricht se plaignent de la fraude des céréales, faite au moyen du rayon stratégique de Maestricht ; ces pétitions contiennent les mêmes observations que celles des deux pétitions dont il a été fait l’analyse à la séance de lundi. J’ai l’honneur de demander le renvoi au ministre des finances et le dépôt sur le bureau de la chambre pendant la discussion du projet de loi présenté pour la répression de la fraude des céréales dans le Limbourg.
M. Eloy de Burdinne. - Pour les autres pétitions on a ordonné de plus l’insertion au Moniteur. Je demanderai qu’on en agisse de même à l’égard des pétitions dont vient de parler l’honorable préopinant.
M. de Renesse. - Les pétitions dont j’ai parlé contenant, sur la fraude des céréales, les mêmes faits et les mêmes vues que les pétitions précédentes, je crois qu’il est inutile d’en ordonner l’insertion au Moniteur.
M. Eloy de Burdinne. - Alors je n’insiste pas.
- La proposition de M. de Renesse est adoptée.
M. le président. - La pétition relative à la loi communale restera déposée sur le bureau, d’après les antécédents de la chambre.
Quant aux autres pétitions, elles seront renvoyées à la commission chargée d’en faire le rapport.
M. le président. - Nous en étions restés à l’art. 56, qui est ainsi conçu :
« Art. 56. Les échevins peuvent être suspendus de leurs fonctions pour cause d’inconduite notoire ou de négligence grave, par arrêté de la députation provinciale ; la suspension ne pourra excéder trois mois.
« A l’expiration de ce terme, les échevins peuvent être démis par la députation provinciale ; les échevins seront entendus préalablement à la suspension ou à la révocation. »
La section centrale propose l’amendement suivant :
« Art. 56. Les bourgmestre et échevins peuvent être suspendus de leurs fonctions pour cause d’inconduite notoire ou de négligence grave, le premier par arrêté du gouverneur rendu sur avis conforme de la députation provinciale ; les seconds par arrêté de la députation provinciale ; la suspension ne pourra excéder trois mois.
« A l’expiration de ce terme, les échevins peuvent être démis par la députation provinciale ; les échevins seront entendus préalablement à la suspension ou à la révocation ; les bourgmestre seront pareillement entendus avant la suspension.
M. Pollénus propose à cet article un amendement ainsi conçu :
« Les bourgmestres et échevins peuvent être révoqués par le Roi ; ils peuvent être suspendus de leurs fonctions pour un terme de 15 jours au plus par le gouverneur de la province. »
M. Pollénus. - Le droit de révocation appliqué aux fonctionnaires municipaux chargé du pouvoir exécutif dans la commune n’est pas contesté.
Je pense que la seule question qu’il s’agit de décider est celle de savoir quelle autorité aura mission de prononcer soit la démission, soit la suspension de ces magistrats. La rédaction que je viens proposer est puisée dans la loi française du 21 mars 1831, loi dont on a déjà dans une précédente séance invoqué plusieurs dispositions.
Dans une précédente séance, vous vous rappelez que vous avez adopté une disposition par laquelle vous avez attribué au Roi le droit de nomination des bourgmestres et des échevins ; il me paraît qu’il résulte de l’adoption de cette disposition que le droit de révocation et de suspension doit également être attribué au Roi, car il est de principe que le droit de suspension et de révocation doit être attribué au pouvoir auquel est attribué le droit de nomination.
Pour ma part, j’estime que l’intervention des états ou de toute autre autorité par voix consultative ne peut avoir lieu à l’égard des échevins. En effet, vous avez établi que le bourgmestre avec les échevins constituerait une autorité collective appelée à exercer dans tous les cas les mêmes attributions.
Il faut donc, pour qu’il y ait homogénéité dans le conseil, que les règles que vous établissez pour le bourgmestre existent également pour les échevins qui n’ont pas d’autre mission que celle attribuée au bourgmestre. Si vous adoptiez d’autres règles à l’égard des échevins qu’à l’égard du bourgmestre, vous n’auriez plus d’autorité collective dont tous les membres agissent en vertu du même principe.
Je ne suis pas de l’avis de ceux qui pensent que l’intervention d’un grand nombre de personnes dans l’exécution des mesures administratives soit une garantie pour les fonctionnaires. Je ne pense pas que nous ayons à redouter des suspensions ou des révocations injustes. Le gouvernement ne tarderait pas à encourir la responsabilité d’une mesure injuste quelconque.
Vous savez que le gouvernement est obligé de choisir le bourgmestre et les échevins dans le sein du conseil. S’il arrivait qu’une mesure violente et injuste fût prise vis-à-vis d’un magistrat municipal, il serait impossible au gouvernement de trouver dans le conseil un membre qui voulût succéder à un collègue injustement destitué. Pour ma part, je trouve une garantie dans la responsabilité qui doit peser sur le gouvernement seul. Si vous faites intervenir une autorité comme la députation des états, la responsabilité du gouvernement, par là même qu’elle se trouvera partagée, sera moindre. Je désire un système franc, je désire que la responsabilité du gouvernement soit entière.
Vous ne pouvez pas faire intervenir la députation des états, parce que la députation ne relève pas du pouvoir central. Si vous permettiez à cette autorité d’intervenir efficacement, si vous investissiez un pouvoir du droit de prononcer à l’égard des échevins, vous ne seriez pas conséquents avec la solution donnée à la question de principe.
En partant de cette solution, pour conserver de l’homogénéité à l’autorité collective que vous avez voulu établir, mais que moi je ne puis approuver, parce que je ne comprends pas une autorisé exécutive collective, je pense qu’on doit adopter l’amendement que j’ai proposé.
M. Doignon. - M. le ministre s’est-il rallié à la proposition de section centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - J’attendrai la discussion pour me prononcer.
M. Doignon. - Je demande la parole.
Messieurs, je ne puis admettre, ainsi que le propose l’honorable préopinant, que le gouvernement ait le droit illimité de révoquer les bourgmestre et échevins. Quant à moi, je pense qu’il y a lieu de mettre sur la même ligne et les bourgmestres et les échevins ; je pense que les uns et les autres ne doivent être soumis à la révocation que pour des causes déterminées, pour négligence grave ou inconduite notoire. Sans cela, il n’y a plus de responsabilité. La responsabilité devient illusoire si l’autorité supérieure n’est tenue de donner aucun motif de la révocation.
Depuis que vous avez écarté le principe de l’élection directe et celui de la présentation par le conseil, vous devez admettre aussi un changement en ce qui concerne la révocation. Si vous aviez adopté le système de l’élection directe, le gouvernement aurait pu vous dire : Puisque je n’interviens pas dans la nomination du bourgmestre, ce magistrat n’est pas l’homme de mon choix, je dois avoir de lui une certaine défiance. Il est possible qu’il ne partage pas mes principes et mes vues. Mais aujourd’hui que le gouvernement a la faculté de choisir librement dans le conseil un magistrat qui partage ses principes et ses opinions, qu’il peut trouver un homme de confiance, dévoué à ses intérêts, il y a lieu de restreindre le droit de révocation dans de justes limites et d’exiger qu’il y ait des motifs plausibles pour qu’on puisse user du droit de révocation.
On dit vulgairement que celui qui nomme révoque. Il n’est pas exact de dire que le gouvernement nomme le bourgmestre, il ne fait que le désigner parmi les membres du conseil. Ce sont les électeurs qui donnent au gouvernement les éléments nécessaires pour faire le bourgmestre, de sorte qu’il tient sa mission d’une source toute populaire ; dès lors, d’après le principe qui nomme révoque, la révocation ne devrait avoir lieu qu’avec l’intervention des électeurs et du gouvernement. Mais comme il est physiquement impossible que les électeurs interviennent, il me paraît dans la nature des choses que la députation provinciale intervienne pour eux, donne son avis et déclare s’il existe de justes motifs de révocation.
On peut considérer si l’on veut les fonctions de bourgmestre comme des fonctions mixtes. Le bourgmestre ainsi que les échevins sont chargés de l’exécution des lois et des mesures d’administration générale. Mais il n’en demeure pas moins l’homme de la commune, car, s’il est chargé de l’exécution des lois, c’est en tant qu’il s’agit de les appliquer aux intérêts communaux. Le principal objet de l’exécution des lois de la part du bourgmestre, est donc l’intérêt communal, car la question d’application de la loi à la commune est elle-même aussi une question d’intérêt communal. Le bourgmestre n’est donc pas simplement l’agent du pouvoir central, il est avant tout l’homme de la commune, il est l’âme de l’administration communale. Et à ce titre il ne peut être soumis une révocation pure et simple comme le sont les fonctionnaires de l’administration générale.
On vous dira peut-être que le gouvernement doit avoir toute liberté, de révoquer le bourgmestre, parce que le bourgmestre doit être son homme de confiance, parce qu’il est possible qu’il n’ait pas les opinions politiques du gouvernement. Cet inconvénient, s’il se présente, sera excessivement rare. Mais dans ce cas même, il suffit que l’administration de la commune puisse marcher, que le service public soit bien assuré, pour qu’il n’y ait pas lieu de donner arbitrairement le droit de révocation. Or, si vous examinez l’ensemble du projet, vous voyez qu’il résulte des diverses dispositions, notamment de la loi sur les attributions, que vous donnez à l’autorité supérieure des moyens coercitifs tels qu’il est impossible que l’administration ne marche pas alors même que le bourgmestre y mettrait la plus mauvaise volonté.
Non seulement vous donnez à l’administration supérieure le droit de révoquer le bourgmestre pour cause de négligence grave ou d’inconduite notoire ; mais vous lui donnez encore le droit d’envoyer à ses frais un commissaire dans la commune pour faire exécuter les mesures d’administration générale, les lois et arrêtés dans le cas où il y aurait mauvais vouloir ou résistance de la part de l’autorité locale. Dans tous les cas l’exécution peut donc avoir lieu sans avoir recours au droit de révocation. Indépendamment de ces moyens, vous donnez au pouvoir dans ses attributions le droit de briser, d’annuler tous les actes de l’autorité locale contraires aux lois et à l’ordre public, afin de la maintenir dans de justes bornes.
Enfin, si on craint que l’administration communale gère mal les intérêts de la commune, il y est encore pourvu en ce qu’on soumet à l’approbation de l’administration supérieure presque tous les actes de l’autorité communale. On a donc des moyens plus que suffisants pour contenir dans leurs devoirs les magistrats communaux. Et on ne doit point par conséquent donner au gouvernement un pouvoir aussi exorbitant que celui de révoquer ces fonctionnaires quand bon lui semble et sans être obligé d’alléguer aucun motif.
Le gouvernement, vous dit-on, sera sobre dans l’usage qu’il fera du droit de révoquer. Remarquez que ce n’est pas seulement dans l’usage qu’on fera de ce droit, mais dans la crainte de l’usage qu’on pourra en faire qu’est le mal ; il suffit qu’un magistrat se trouve à tout instant menacé d’être révoqué, pour qu’il perde toute liberté d’action, pour qu’il perde toute indépendance. Que deviennent alors les magistrats communaux ? En perdant cette indépendance, le pouvoir communal perd en même temps toute son existence ; ce pouvoir constitutionnel serait donc très sérieusement compromis si on accordait au gouvernement un droit aussi arbitraire que celui que veut lui attribuer l’honorable préopinant.
Aujourd’hui que les magistrats de la commune sont nommés directement par le peuple, on ne peut les révoquer dans les villes : il en était de même sous le régime hollandais Accorderez-vous au gouvernement un droit de révocation que l’autorité supérieure n’avait pas sous le régime de Guillaume et qui n’existe pas maintenant en Hollande.
On a dit que c’était là une lacune dans nos règlements. C’est une erreur. Guillaume n’aurait pas commis une lacune de cette importance. En Hollande, on a toujours attaché le plus grand prix à l’indépendance des bourgmestre et échevins, tellement que Guillaume n’aurait pas osé toucher à cette franchise. Je ne sais pas si je ne devrais proposer aujourd’hui de borner le droit de révocation aux bourgmestres des campagnes ainsi que cela existait sous le régime précédent.
L’honorable préopinant a argumenté de la loi française. J’argumente aussi quelquefois des lois françaises, mais c’est quand il s’agit de dispositions libérales, tandis que la disposition qu’on veut emprunter aujourd’hui à la législation françaises, tuerait le pouvoir communal. Il y a cette différence entre la France et la Belgique, qu’en France le pouvoir communal n’est pas un pouvoir constitutionnel distinct du pouvoir exécutif.
En France, les maires et les adjoints peuvent être considérés comme les délégués du pouvoir exécutif. Dès lors, on peut accorder au pouvoir exécutif le droit de révoquer, purement et simplement, quand il le veut, les maires et les adjoints.
Je rejetterai donc l’amendement proposé par M. Pollénus, et je proposerai de supprimer le dernier paragraphe de l’article de la section centrale afin de mettre le bourgmestre sur la même ligne que les échevins quant au droit de révocation ou de suspension.
M. Legrelle. - Il est vraiment surprenant que pour établir de l’homogénéité dans le conseil un honorable membre soit venu vous proposer une disposition que vous avez rejetée à une grande majorité, c’est-à-dire la suspension du bourgmestre prononcée par le gouverneur. La première fois que cette proposition a été faite, je l’ai combattue ; la chambre a écouté mes motifs et fait droit à ma demande. Aujourd’hui que nous avons rejeté la suspension sans motifs déterminés du bourgmestre, et qu’elle ne figure pas dans le projet de loi, l’honorable M. Pollénus, sous prétexte d’homogénéité, vient vous proposer de la rétablir alors qu’elle n’existe ni pour le bourgmestre ni pour les échevins.
Je vous le demande, que deviendrait un collège s’il était loisible à un gouverneur de le suspendre sans motifs et sans avoir recours au ministère, parce qu’il aurait eu son amour-propre blessé par la résistance des magistrats municipaux à des prétentions injustes. Evidemment ce serait jeter de la déconsidération sur le pouvoir communal. Lors de la précédente discussion, j’ai démontré les conséquences d’une pareille mesure ; j’ai fait voir que, quelle que soit la mesure prise ensuite par le gouvernement, il restait toujours de cette suspension quelque chose qui tendait à déconsidérer les fonctionnaires qui en avaient été l’objet.
On aura beau demander la parole pour me réfuter, je suis convaincu qu’on ne me réfutera pas.
M. le ministre fait très sagement d’attendre la discussion avant de se prononcer. J’espère qu’il ne se ralliera pas à la proposition de M. Pollénus. Je le dis d’avance, il suffirait que cette disposition fût adoptée pour que je ne puisse pas voter pour la loi. Je veux bien qu’une simple suspension puisse être prononcée pour négligence grave et pour inconduite notoire, enfin pour des motifs tels que le fonctionnaire ne puisse plus, sans porter atteinte à l’honneur du collège, en faire partie. Je pense même que dans ce cas une révocation pure et simple vaudrait mieux. Si vous voulez une révocation conditionnelle, exigez qu’elle ne puisse être prononcée que sur l’avis motivé de la députation.
Mais accorder au gouvernement un droit de suspension illimité et arbitraire, ce serait faire de chaque gouverneur un tyranneau. Je crains davantage le pouvoir illimité d’un gouverneur que l’arbitraire ministériel.
M. Desmet. - Quand la section centrale avait laissé au gouvernement la révocation ad nutum des bourgmestres, c’est qu’elle n’avait vu dans ces fonctionnaires que de simples commissaires du gouvernement ; elle a dit : Ces hommes du pouvoir ne sont que ses délégués, et celui qui les désigne peut en faire ce qu’il veut et les révoquer à volonté.
Mais depuis le vote qui a établi une seule et même administration pour les affaires du gouvernement comme pour celles de la commune, qui a rendu inséparable l’administration municipale proprement dite de celle dont on a besoin dans chaque commune pour l’exécution des lois et des actes gouvernementaux ; depuis que le bourgmestre n’est plus ce seul homme qui représente le gouvernement dans la commune, mais qui, de concert avec les échevins, remplit collectivement le double mandat, on ne peut plus isoler le bourgmestre des échevins, et le gouvernement ne peut plus agir sur ce fonctionnaire, qui n’est plus à lui seul, mais qui appartient aussi à la commune, comme il le trouverait bon.
La nomination du bourgmestre et des échevins n’appartient pas directement au gouvernement, il ne fait qu’y intervenir et même que secondairement. Les éléments de ces nominations sont puisés dans l’élection populaire ; le gouvernement doit prendre ce que les électeurs, les habitants de chaque commune lui présentent ; si le peuple n’élevait point ceux qu’il destiné aux fonctions municipales, le gouvernement ne pourrait faire aucun choix, aucune nomination ; il ne pourrait délivrer aucun mandat.
On ne peut donc pas dire que le gouvernement fait les nominations des bourgmestre et échevins ; que ces fonctionnaires, étant nommés par lui, il a le droit de les révoquer.
Ayant les bourgmestres et échevins un double mandat, qui est tellement inséparable qu’on ne pourrait assurer s’ils tiennent une plus grande part du gouvernement que de la commune, s’ils sont des commissaires ou des magistrats, on peut donc dire que ces fonctionnaires ne remplissent point de simples commissions, que l’office qu’on lui a confié est une charge, et par conséquent qu’ils ne sont point révocables à volonté et purement dépendants des caprices du pouvoir.
C’est dans l’essence de ces charges que ceux qui les remplissent aient une certitude qu’ils ne peuvent être le jouet des autorités supérieures ni d’après un bon plaisir quelconque être mis de côté.
Si on veut avoir aux places municipales des honnêtes gens et des hommes probes, qui tiennent à l’honneur, il faut leur assurer la durée de leurs fonctions pour tout le temps de la nomination. Sauf le cas de forfaiture, la loi doit leur garantir la durée de leurs fonctions.
Il doit en être des officiers municipaux comme des juges. La loi leur garantit également la durée de leurs fonctions, et nous devons tenir en principe, comme on l’a toujours fait avant la révolution de 93, que, semblables aux juges, les officiers municipaux ne peuvent être destitués que pour forfaiture, concussion et malversation, judiciairement constatées.
C’est le principe qui a été reconnu, quand en 1817 nos cités avaient été dotées de cet excellent régime municipal, qui fit pendant un laps de huit ans tout le bonheur du pays comme du souverain, et que nous désirons voir renaître dans toute sa plénitude.
Le gouvernement y trouvait toute la garantie dont il pouvait avoir besoin pour assurer l’administration, et jamais il ne fut plus populaire et plus considéré, comme jamais il n’y eut tant de tranquillité, d’union et d’accord dans le pays.
On avait alors reconnu que quand le gouvernement ne nommait pas directement des fonctionnaires, et que leurs emplois étaient plus que de simples commissions ou délégations qu’il ne pouvait avoir le droit de renvoyer à volonté, et que le mandat au gouvernement était tellement lié à celui de la commune, que ces fonctionnaires avaient acquis les qualités de magistrats et remplissaient une charge ou un office, ils ne pouvaient être destitués pendant la durée de leur nomination que pour forfaiture et à la suite d’un jugement.
Messieurs, je ne pense pas que personne pourra dire qu’il y eût alors des abus, et que l’administration a souffert ; il a été reconnu que la suspension avait suffi pour obvier aux négligences administratives, et pour conserver l’ordre et la bonne administration dans nos cités. Mais il est vrai aussi que Guillaume ou ses faux amis ne trouvant pas dans ce régime paternel assez d’éléments pour faire entrer dans l’administration cet absolutisme auquel ils aspiraient, le détruisit entièrement en 1825 ; mais je vous le demande de même, n’est-ce pas depuis lors que sa déconsidération a commencé ?
J’ose donc croire que nous pouvons suivre, sans aucun risque de compromettre l’administration, le régime municipal de 1817, et ne pas laisser au gouvernement la révocation à volonté des fonctionnaires municipaux. J’ose même avancer que si nous le faisions, nous ferions quelque chose qui serait fort dangereux, et en portant l’inquiétude dans les communes qui ne verraient plus rien de certain et de stable pour leurs administrateurs, nous pourrions être cause de conséquences fâcheuses pour la popularité et la considération du gouvernement.
Je me prononce donc contre l’amendement de l’honorable M. Pollénus et la disposition du paragraphe qui donne au gouvernement le droit de révoquer ad nutum, mais pour ce qui concerne le mode de suspension, et les conditions auxquelles on voudra l’assujettir, j’attendrai la suite de la discussion pour arrêter mon opinion.
M. Pollénus. - On prétend qu’au moyen de la proposition que je viens de faire, j’enlève à la loi le caractère libéral que d’autres ont voulu lui imprimer. Mais il me semble que ma proposition est plus libérale que la leur, et je crois qu’il ne me sera pas difficile de le prouver.
Les honorables préopinants ont voulu placer à la tête de la commune une autorité collective ; c’était contraire à mon opinion, mais la chambre a adopté ce système. Car si dans l’existence de cette autorité collective ils trouvent une plus grande garantie pour la commune, il est impossible de contester cette conséquence que les membres de cette autorité collective doivent être placés sur la même ligne et avoir la même garantie, tandis que mes adversaires refusent au bourgmestre les mêmes garanties que je propose et pour les échevins et pour les bourgmestres.
Je dis que je veux des garanties : pour ma part je trouve, en effet, plus de garanties dans l’intervention libre du gouvernement que dans une intervention subordonnée à l’appréciation de telle ou telle autorité intermédiaire. En laissant au gouvernement la liberté d’action qu’il doit pouvoir exercer sur les fonctionnaires municipaux, en tant qu’ils sont ses agents, rien n’altère les principes de l’unité administrative, et la responsabilité du gouvernement est entière pour toutes mesures injustes qu’il pourrait prendre à l’égard des bourgmestre et des échevins ; mais partagez cette responsabilité par l’intermédiaire obligé d’une autorité quelconque, dès lors la responsabilité du gouvernement disparaît, puisqu’elle est couverte par l’autorité consultative intermédiaire, et avec la responsabilité disparaissent les garanties que la forme du gouvernement me paraît assurer aux fonctionnaires publics.
Je commencerai par faire observer que ces honorables membres se trompent quand ils veulent établir des garanties différentes, une position différente pour les uns et pour les autres.
Lorsque nous en viendrons aux attributions, si on a établi des garanties différentes pour les bourgmestres et les échevins, on ne manquera pas de s’emparer de cette circonstance et de dire : Puisqu’on leur a fait une position différente, il faut que leurs attributions diffèrent.
La disposition que je propose n’a pas d’autre but que d’harmoniser la disposition de principe adoptée contre mon opinion, il est vrai, avec le droit de révocation.
L’honorable M. Doignon trouve de très grandes garanties en ce qu’il détermine dans quels cas la suspension et la révocation pourront être prononcées.
Je le demanderai à tout homme pratique, est-ce dans des causes vagues qui n’ont rien de déterminé qu’un fonctionnaire trouve une garantie, quand la loi ne dit pas qui jugera s’il y a eu négligence grave ou inconduite notoire ? Des mots si généraux ne déterminent rien, ne présentent aucune garantie.
L’honorable membre a aussi prétendu que qui a le droit de nomination doit aussi avoir le droit de révocation, et que ce principe ne recevait pas ici son application, parce que les bourgmestres ne sont pas nommés par le gouvernement, mais seulement désignés. Il ne raisonnait pas ainsi quand il s’agissait de la question de constitutionnalité relative aux échevins. Le Roi nomme, disait-il alors. Il a soutenu ici le contraire de ce qu’il prétendait alors. Pour être conséquent avec lui-même, il devait encore soutenir que le Roi nommait.
L’honorable M. Legrelle s’est élevé contre le pouvoir exorbitant que je donnais au gouverneur, comme devant entraîner la déconsidération des fonctionnaires municipaux qui en subiraient les effets. Je crois qu’en général les mesures de rigueur ne déshonorent que lorsqu’elles sont injustement appliquées. Je pourrais citer des exemples plus d’une fois rappelés dans cette assemblée de fonctionnaires administratifs injustement révoqués qui n’ont pas pour cela été déconsidérés. Il en est plusieurs que je connais qui, sous plusieurs gouvernements, ont été victimes de mesures de rigueur, et qui ont vu la considération dont ils jouissaient augmenter en raison de la brutalité des mesures qui les avaient frappés.
La responsabilité devient-elle illusoire depuis que le gouvernement n’est plus obligé de donner les motifs de ces révocations et suspensions ? Je dis que dans notre organisation, et avec la responsabilité des fonctionnaires, il n’y a pas d’abus à craindre ; l’honorable M. Doignon l’a reconnu lui-même. S’il en est ainsi, ne vaut-il pas mieux abandonner au gouvernement et sous sa responsabilité le droit de prendre les mesures qu’il jugera convenable ? Il faut laisser au gouvernement la liberté d’action qui lui est nécessaire.
Je crois en avoir assez dit pour prouver d’une part que les garanties que l’on croit trouver dans des énonciations vagues sont illusoires, et d’une autre part, que les abus ne sont pas à craindre. Alors placez donc sur la même ligne des fonctionnaires auxquels vous donnez les mêmes pouvoirs. Il me paraît impossible de laisser intervenir la députation des états pour des actes de ce genre, et je pense que l’on jetterait quelque déconsidération sur les états députés, en les faisant intervenir de cette manière.
Pour donner au pouvoir central l’action qu’il doit avoir, il faut adopter ma proposition. Les objections que l’on a faites n’ont pas détruit mes observations.
M. Jullien. - Messieurs, je regrette que le ministre de l’intérieur n’ait pas jugé à propos d’accommoder l’article qui est soumis à vos délibérations au système nouveau qui a été adopté ; car dans l’état de la discussion nous ne savons véritablement pas quelle est l’intention du gouvernement, et nous sommes obligés de former nous-mêmes un nouveau système.
C’est peut-être pour la dixième fois que la question a été agitée dans cette chambre ; après de longues discussions on s’est enfin arrêté à une solution : voilà que maintenant on propose encore de nouveaux amendements, de nouveaux systèmes, pour la suspension et la révocation. Si nous opérons toujours de cette manière, et surtout si les discussions reparaissent à de longs intervalles, quand on aura oublié tout ce qui a été dit auparavant, nous ne pourrons plus en sortir ; et vous devez considérer maintenant l’organisation provinciale et communale comme devant appartenir à des temps éloignés. Lorsqu’il faut revenir dix fois, vingt fois sur le même sujet, je ne prévois pas de fin.
De quoi s’agit-il ? Du droit de suspension et de révocation. Dans la première discussion on a agité longtemps pour quels cas on pourrait révoquer et suspendre les magistrats municipaux. Je me souviens que quand le gouvernement demandait le pouvoir de suspendre et de révoquer pour des causes graves, la plupart des orateurs trouvaient que cette expression était bien vague. Qu’est-ce que c’est, disait-on, que des causes graves ? Qu’est-ce que c’est qu’une inconduite notoire ? Tout le monde voyait que c’était laisser beaucoup d’arbitraire au pouvoir que de lui laisser la faculté de déterminer ce qu’il entendait par ces mots ; mais, après une longue discussion, on s’aperçut qu’il était impossible de mieux déterminer les causes graves, et en quoi consisterait l’inconduite notoire ; alors, de guerre lasse, on a adopté l’article présenté par le gouvernement.
Par cette adoption, il en résultait que le magistrat municipal ne pouvait être suspendu ni destitué sans qu’aux yeux de ses concitoyens il y ait véritablement dérangement notoire, inconduite notoire de la part de ce magistrat.
On exigeait que les choses graves fussent motivées dans l’arrêté de suspension ou de révocation ; maintenant que propose-t-on ? On propose de laisser la révocation et la suspension au bon plaisir du pouvoir ; ainsi vous reviendriez contre ce que la chambre a précédemment adopté.
Messieurs, je ne pourrai jamais donner mon assentiment à un pareil amendement. Je maintiendrai ce qui a été adopté, quoique j’y trouve encore beaucoup d’arbitraire, et je ne consentirai pas à accorder au pouvoir la destitution du bourgmestre et des échevins selon sa volonté, proprio motu.
Il y a un double caractère dans les bourgmestres et dans les échevins. Les uns et les autres sont nommés par le Roi et par les électeurs ; si vous accordez au gouvernement le droit de les suspendre et de les révoquer, ce droit ne peut affecter la qualité de conseillers municipaux qu’ils ont reçue des électeurs.
Encore une fois, je vous engage à repousser toutes ces propositions nouvelles qui ne tendent qu’à nous faire perdre du temps, et qui ont été solennellement rejetées par la chambre.
M. Dubus. - J’avouerai, messieurs, qu’en arrivant dans cette enceinte, je ne m’attendais pas à avoir un pareil amendement à combattre ; je m’attendais au contraire à ce que l’on proposerait des modifications dans le sens libéral, ou dans le sens du système de conciliation, de transaction, qui nous avait été préconisé ; mais je m’aperçois que le pouvoir, après avoir pris d’un côté, veut encore prendre de l’autre ; de sorte qu’il devient évident que le système que l’on veut établir n’est point un moyen de conciliation, mais un système de déception. Et sur ce point, messieurs, il suffit de se rappeler ce qui a déjà été adopté par la chambre.
Par son premier vote voici ce qui avait été décidé ;
« Les bourgmestres et échevins peuvent être suspendus de leurs fonctions par le gouvernement ou par la députation provinciale pendant le terme de trois mois ou plus pour cause d’inconduite ou négligence grave.
« Les échevins peuvent dans le même cas être démis par la députation.
« Les bourgmestres peuvent être révoqués dans le même cas par le Roi. »
Au second vote on a signalé les inconvénients qu’il y aurait à abandonner, sans aucune garantie, le droit de suspendre pour des causes déterminées ; on a démontré que c’était armer les gouverneurs du droit de mal noter, par son acte de suspension, le fonctionnaire qui en serait l’objet. On a voulu sur ce point prendre des précautions : on a voulu que la suspension fût prononcée :
« Par arrêté du gouverneur rendu sur avis conforme de la députation provinciale ; »
Et puis que :
« Les échevins fussent entendus préalablement à leur suspension, et, de même que les bourgmestres fussent préalablement entendus avant leur révocation. »
C’est ainsi que l’art a été formulé au second vote.
Dans le mode de nomination la chambre avait admis une différence entre les bourgmestres et les échevins.
Au sénat, voulant l’homogénéité entre les bourgmestres et les échevins, l’article relatif à la nomination de ces magistrats fut modifié, et on dit que les bourgmestre et échevins seraient nommés par le Roi dans le sein du conseil.
Quant aux articles relatifs au droit de suspension et de révocation, le sénat les a maintenus à l’unanimité, et le projet qui nous est revenu de l’autre chambre était l’année dernière tel que je l’ai cité.
La section centrale qui s’est occupée en second lieu de la loi communale et qui a examiné le projet élaboré par le sénat, avait été d’avis d’accorder aussi au Roi la nomination des échevins sur présentation du conseil. Elle a été unanime encore pour maintenir l’article que nous discutons et les garanties contre la suspension arbitraire des bourgmestres et des échevins. Aujourd’hui, à prétexte d’homogénéité, l’honorable M. Pollénus propose de détruire toutes ces garanties et d’accorder un droit illimité de suspension et de révocation sur les membres du collège municipal.
Il est vrai qu’il soutient que sa proposition est tout ce qu’il y a de plus de libéral ; quant à moi, il m’est impossible de comprendre le libéralisme de cette manière. Si le libéralisme pouvait se trouver là, le pouvoir du Grand-Turc serait excessivement libéral, car il a le pouvoir de suspension et de révocation dans son entier. Par une telle proposition, on arriverait à une loi plus illibérale que le projet du sénat dont la chambre des représentants n’a pas voulu l’année dernière, puisque vous effacez toutes les garanties contre les suspensions et révocations arbitraires ; on arriverait également à une loi plus illibérale que le résultat du premier vote de cette chambre, résultat auquel on disait qu’on allait revenir ; plus illibérale sous le rapport de la nomination, puisque les échevins n’étaient nommés par le Roi que sur la présentation du conseil.
On pose comme principe absolu que, puisque le Roi nomme, il faut qu’il puisse révoquer à son gré : mais il n’est écrit nulle part, ni dans la constitution ni dans les codes de nos lois, que le droit de nomination emporte le droit de révocation ; le contraire est même notoire. Il y a un grand nombre de fonctions qui sont à la nomination du Roi et que le Roi ne peut révoquer. Les notaires, les avoués, les huissiers sont dans ce cas. Il y en a beaucoup d’autres : les juges... Quant à ceux-là, la question ne peut être faite, puisque leur inamovibilité est écrite dans la loi. (Alors, selon M. Pollénus, c’est un principe illibéral écrit dans la constitution.)
Le Roi ne peut révoquer les notaires et les avocats que dans le cas d’abus constatés par les tribunaux.
Il n’est pas vrai de dire que celui qui nomme, par cela même, a le droit de révoquer ; il faut considérer, avant tout, la nature des fonctions qui ont été conférées.
Or, Ici il n’y a pas seulement à considérer la nature des fonctions, il faut encore considérer le mode de nomination à ces fonctions.
Quant à la nature des fonctions, on a dit que le bourgmestre et les échevins, tel qu’on a conçu le système dans lequel nous sommes placés, au moins provisoirement, jusqu’à ce que la chambre ait voté sur les attributions, étaient des magistrats mixtes : dès lors vous ne pouvez pas accorder au gouvernement le droit arbitraire de nomination et de révocation comme s’ils étaient ses simples agents. Les bourgmestre et échevins seront chargés de l’exécution des lois dans la commune ; mais ils seront plus particulièrement chargés de tout ce qui est d’intérêt communal ; ils auront la gestion exclusive des affaires de la commune, la mise à exécution de toutes les délibérations du conseil et l’administration journalière de tous les intérêts locaux. Leur fonction principale est celle d’officiers municipaux ; l’autre fonction, comme agents du pouvoir central, n’est qu’accessoire.
Aussi leur nomination est en quelque sorte le résultat d’un contrat. Un mandat se révoque bien par le mandataire ; mais quand la mission est le résultat d’un contrat, elle devient irrévocable ; une des parties ne peut la révoquer sans l’aveu de l’autre. N’a-t-on pas dit que c’était pour établir ce contrat que l’on avait imaginé le mode de nomination adopté ? Le Roi doit prendre les magistrats municipaux dans le conseil afin que la nomination par le peuple fût une présentation au Roi ; une fois qu’il a désigné le bourgmestre et les échevins, le contrat est parfait, il est consommé, et chaque fonctionnaire devient non pas le mandataire exclusif du gouvernement, mais le mandataire commun au gouvernement et à la localité. Dans ce mode de nomination se trouve la garantie d’une bonne gestion dans l’intérêt du gouvernement et dans l’intérêt de la communauté.
Si vous établissiez le droit arbitraire de révocation et de suspension, vous détruiriez tout à fait la garantie, vous la feriez disparaître.
Je dis que dans le mode de nomination se trouve la garantie d’une gestion où on fera la part à tous les intérêts ; en effet, les fonctions ne sont que temporaires ; le bourgmestre et les échevins arrivés au terme de leurs fonctions ont besoin d’être réélus ; voilà la garantie pour le peuple : ils ont besoin encore d’être désignés bourgmestre et échevins par le pouvoir ; voilà la garantie pour le gouvernement. Toutefois on doit convenir que l’intérêt de la commune est plus pressant que celui du pouvoir.
Remarquez quelle différence vous amenez dans cette situation, alors que vous accordez au gouvernement un droit arbitraire de suspension et de révocation ; d’une part ces fonctionnaires, en ce qui touche les intérêts de la commune ou les intérêts du peuple, ont une perspective de non-réélection, mais dans un temps plus ou moins éloigné ; et contre cette possibilité ils peuvent toujours se flatter de lutter au moyen de l’influence même qu’ils ont par leurs fonctions, tandis qu’au contraire, par suite du droit arbitraire et absolu de révocation et de suspension, ce n’est pas dans une perspective plus ou moins éloignée qu’ils entrevoient la perte de leurs fonctions ; c’est chaque jour, à chaque instant qu’ils sont sous le coup de leur démission.
Supposez maintenant que le bourgmestre, par suite des inspirations de sa conscience, et d’après son devoir écrit dans la loi, ait résisté, dans une hypothèse donnée, à quelque exigence injuste du pouvoir ; cela peut arriver, car cela est déjà arrivé. Eh bien, que fera-t-il si l’on insiste pour obtenir de lui ce qu’il ne croit pas devoir faire ? Il n’y a pas de doute qu’il sera entraîné à céder aux instances du pouvoir s’il écoute son intérêt personnel, et qu’il sacrifiera ainsi l’intérêt de la commune et sa conscience elle-même.
Messieurs, il est d’autant plus étrange que l’on ait présenté un pareil système, qu’il est diamétralement contraire à tout ce qui s’est pratiqué jusqu’à ce jour ; on a invoqué les règlements ; mais il est incontestable que d’après le règlement des villes, le gouvernement n’avait pas le droit de révoquer les bourgmestre et échevins, et il s’appliquait aux 96 communes principales de la Belgique.
On a dit que c’était une lacune.
Ce qu’il y a de certain, c’est que ce n’est pas un oubli. Car si cela avait été un oubli dans les règlements de 1817, on l’aurait réparé dans ceux de 1824. Il est d’autant moins probable que ce soit un oubli, que dans les règlements des campagnes on accordait le droit de suspension et de destitution. Ce que l’on avait fait dans l’un des règlements, on aurait pu le faire dans l’autre si l’on avait cru que le droit de révocation et de suspension fût nécessaire pour les villes. Mais c’est que l’on a senti que c’était un droit exorbitant.
Que ce droit ait été consacré dans les règlements des campagnes, cela étonne moins, parce que ces règlements des campagnes étaient mis en quelque sorte hors de la loi, hors de la liberté. L’on avait réellement donné des libertés communales aux villes. Il n’en existait pas pour les campagnes.
Mais maintenant que l’on reconnaît qu’il y a autant et plus de raison d’accorder des libertés communales aux campagnes qu’aux villes, il me semble que la circonstance que, dans les règlements des villes qui nous ont régis jusqu’en 1830, l’on n’avait pas stipulé le droit de révocation et de suspension, est d’un très grand poids. Si en effet il peut y avoir danger à laisser l’administration entre les mains de fonctionnaires qui en feraient un abus de tous les jours, n’est-ce pas dans les communes importantes plutôt que dans les petites communes ? Eh bien, j’en appelle à l’expérience des 13 ou 14 années qui ont précédé la révolution, et pendant lesquelles les grandes communes du royaume ont été administrées sans que le gouvernement eût le droit de révocation ou de suspension des fonctionnaires municipaux. Je n’ai jamais ouï dire que l’on se soit plaint de l’absence d’une semblable disposition.
Nous ne devrions pas avoir une si grande hâte d’insérer dans la loi une disposition de cette nature lorsque le besoin ne s’en est pas fait sentir pendant une aussi longue période de temps.
Mais au reste, les règlements des campagnes étaient bien loin de contenir une disposition pareille à celle que propose l’honorable M. Pollénus. En la lisant avec attention, je ne vois pas qu’elle contienne toutes les garanties qu’il y avait alors.
La suspension du mayeur, selon les premiers règlements, lorsqu’il ne s’était pas bien acquitté de ses fonctions, pouvait être prononcée au nom du Roi par les états députés, à charge d’en rendre compte immédiatement. Ces fonctionnaires pouvaient être destitués par le Roi. La destitution et la suspension des échevins étaient prononcées également par les états députés, mais c’était comme peine que cela avait lieu ; c’était lorsqu’ils ne s’étaient pas acquittés de leur devoir.
Au lieu de cela, l’on veut établir un droit arbitraire et sans limite de suspension et de destitution qui serait abandonné au pouvoir supérieur, qui pourrait atteindre celui qui se serait honorablement acquitté de ses fonctions. Il y a une énorme différence entre ces deux systèmes.
Je vois encore que les mayeurs pouvaient être non pas révoqués, mais destitués par le Roi. Cette expression, qui est la même dont on se sert pour les échevins relativement au jugement des états députés, implique encore l’idée que ce n’était que l’application d’une peine au fonctionnaire qui n’aurait pas rempli son devoir.
Les seconds règlements sont dans le même sens, et même l’on a écarté jusqu’à un certain point ce que cette expression de destitution pouvait avoir de trop vague. Le droit de suspension ou de démission y est subordonné au cas de mauvaise conduite ou de négligence. Il n’y a qu’un seul et même droit qui n’est appelé démission que quant au bourgmestre par exception. Et cette exception porte non pas sur le cas dans lequel ce droit sera exercé, mais sur les motifs dont il sera donné. L’exception dit qu’au lieu que ce soient les états députés, ce sera le Roi qui leur donnera leur démission.
Si donc nous voulons rester dans les termes des règlements du plat-pays, alors qu’il n’y avait pas de liberté pour les campagnes, nous devons non seulement rejeter l’amendement de M. Pollénus, mais même modifier la proposition de la section centrale. Quant à moi, je désirerais beaucoup qu’elle fût modifiée.
L’on a dit qu’il était nécessaire qu’il y eût de l’homogénéité entre le bourgmestre et les échevins.
Il faut convenir que si ceux qui sont entrés dans le système de concession ou de transaction, et qui ont invoqué le principe d’homogénéité pour changer l’ordre de nomination du bourgmestre et des échevins, accordent sans limites le droit de révocation, ils se sont singulièrement trompés.
Je demande qu’il y ait égalité quant à la révocation et à la suspension entre les bourgmestres et les échevins. Lorsque le bourgmestre se conforme aux lois, lorsqu’il obéit à sa conscience, je demande pourquoi il y aurait lieu à le révoquer ?
Je cherche les motifs plausibles d’une révocation semblable, je ne les trouve réellement pas.
Dans les discussions précédentes, l’on a beaucoup insisté sur une administration en de mauvaises mains. Ce qui vous a été proposé jusqu’aujourd’hui pour les échevins est un remède suffisant. Quand l’administration sera en de mauvaises mains, il y aura inconduite ou négligence de la part des administrateurs, et évidemment il pourra y avoir lieu à la suspension ou à la démission. Vous ne supposerez pas, je pense, que la députation des états maintienne en fonctions des magistrats municipaux qui administreront réellement contre les intérêts de la commune. Dès lors vous ne pouvez pas craindre les abus qui ont été signalés.
On vous a déjà rappelé, messieurs, le système de répression qui résulte d’une foule de dispositions de la loi. Il n’y a pas un acte irrégulier qui puisse échapper à son annulation. Il n’y a rien dans la conduite des administrateurs municipaux qui ne soit immédiatement réprime par la loi.
Indépendamment de cela, pour les abus les plus graves, le code pénal n’est-il pas là ? En cas de malversation, de concussion, de suppression des titres, etc., la loi prononce des peines qui entraînent l’inhabilité du condamné à reprendre ses fonctions.
Pour les cas moins graves et qui seraient de nature à compromettre l’intérêt de la commune, le droit de la suspension ou de la destitution, sur l’avis conforme de la députation, est un remède suffisant, et je ne conçois pas que l’on demande davantage.
C’est sans nécessité aucune que l’on accorderait au gouvernement le droit de révoquer ou de suspendre les magistrats communaux. On les placerait dans une dépendance de tous les jours et de tous les instants.
La garantie qui se trouve dans le besoin qu’ont les fonctionnaires d’obtenir leur réélection au bout d’un certain temps s’effacera tout à fait devant cette considération plus immédiate, qu’ils peuvent être révoqués de leurs fonctions d’un moment à l’autre, encore qu’ils se soient acquittés de leurs devoirs religieusement et selon de leur conscience.
On a fait valoir, contre le système que je défends, que si l’avis motivé de la députation des états était nécessaire, il serait plus défavorable qu’utile au fonctionnaire d’exprimer les motifs de sa suspension ou de sa destitution.
Je ne suis nullement touché de cet argument. Je ne vois pas pourquoi l’on ménagerait la réputation d’un fonctionnaire coupable au détriment de ceux qui ne le sont pas. En définitive ceux qui auront encouru un jugement semblable seront ceux qui l’auront mérité. Ils ne pourront se plaindre de la publicité donnée aux justes motifs de leur révocation.
Ainsi, sous prétexte de porter dommage à des hommes réellement coupables, vous voulez que l’on puisse destituer sans motif des fonctionnaires honorables, et vous placez sur la même ligne ceux qui n’auront pas mérité d’être révoqués ou suspendus et ceux qui auront mérité une pareille peine. Je ne comprends pas une semblable manière de raisonner.
C’est pour ces motifs que j’adopterai l’amendement de mon honorable ami.
M. le président. - MM. Gendebien, Legrelle et Dumortier ont présenté chacun un amendement à l’article en discussion.
M. Dumortier, rapporteur. - De tous les articles que vous ayez à voter dans la loi communale, il n’en est peut-être pas de plus important que celui qui est en discussion. En effet, si la nomination des bourgmestres et des échevins donne un grand pouvoir au gouvernement, il est incontestable que le droit de suspension et de révocation est plus considérable encore puisqu’il pèse sur ces fonctions à chaque instant de la journée.
Je ne pense pas que l’on puisse admettre le droit illimite de révocation. Pour ma part je désirerais que le gouvernement ne pût ni révoquer ni suspendre un fonctionnaire qu’il a nommé. C’est à lui à faire de bons choix. De même que le peuple n’a pas le droit de révoquer les personnes qu’il a investies d’un mandat, ainsi le gouvernement ne devrait pas avoir le droit de destituer une personne à laquelle il a accordé sa confiance.
L’on a souvent dans cette discussion signalé des abus résultant de l’élection populaire ; mais je le demande, si le peuple avait le droit de révocation, est-ce que les abus dont on s’est plaint arriveraient ? Si le peuple retirait son mandat à la personne qu’il en a investie et qui n’a pas accompli les promesses qu’elle avait faites au grand jour de l’élection, de pareils abus ne se renouvelleraient pas.
Je ne vois pas pourquoi l’on accorderait au gouvernement ce que l’on refuse au peuple.
Le principe que je soutiens, messieurs, n’est pas d’hier. Il est très ancien dans notre pays.
Sous le régime de l’ancien droit public du Brabant le gouvernement ne pouvait, dans aucun état de choses, retirer le mandat qu’il avait accordé. Aussi c’était un axiome de droit public dans le Brabant que quand le duc nommait un sergent, il nommait son maître, en ce sens que le sergent exerçait librement son emploi sans craindre d’être sous le coup d’une destitution.
Malheureusement, messieurs, nous nous éloignons de plus en plus des anciennes doctrines de notre nationalité. Nous allons puiser nos lois, comme l’a fort bien dit un honorable préopinant, dans l’arsenal des lois françaises. Les lois françaises ne sont pas faites pour nous. Elles tendent à effacer notre nationalité. Puisons des exemples dans notre pays, et n’allons pas prendre modèle sur les lois françaises, surtout en ce qu’elles ont de despotique.
Je demanderai d’ailleurs si les lois françaises ont toujours présenté ce cachet de despotisme que M. Pollénus voudrait introduire dans nos lois. Le droit de révocation accordé au gouvernement n’est pas si ancien qu’on le pense. Sous l’ancienne monarchie française, le roi ne l’avait pas.
C’est sous la convention que cette doctrine a été introduite, et on le conçoit. Du moment que les lois devenaient iniques, il fallait que les fonctionnaires chargés de les exécuter y fussent contraints, qu’ils fussent brisés comme verre s’ils s’y refusaient. Il fallait des moyens de violence alors que l’on conduisait à la guillotine et la noblesse et le clergé ! C’est de cette nécessite qu’est né le principe de la révocation des fonctionnaires.
Ce système a continué sous l’empire, parce que le despotisme impérial était la continuation du despotisme de la convention. Mais ce n’est pas par un gouvernement sorti d’une révolution, sorti des barricades, qu’un pareil système devrait être préconisé.
Le roi Guillaume, vous le savez, messieurs, n’était pas investi du droit de destitution des magistrats communaux. Il avait reconnu en principe que du moment qu’il avait nomme un magistrat communal, ce magistrat devait continuer jusqu’au bout de son mandat. S’il avait à s’en plaindre, c’est à lui seul qu’il devait s’en prendre. Des restrictions à ce principe avaient été admises pour les communes rurales ; mais, comme l’a dit mon honorable ami, il n’y avait pas de liberté pour les communes rurales. Aujourd’hui nous devons donner aux communes plus qu’elles n’avaient alors.
Le projet du gouvernement tend à diminuer leurs libertés. L’amendement de M. Pollénus tend à étendre sur tous les fonctionnaires communaux un vaste filet qui les rendrait méprisables aux yeux de leurs administrés.
Et cependant, messieurs, la bonne harmonie entre le prince et les sujets doit reposer sur la confiance. Lorsque la confiance abandonne le fonctionnaire nommé par le souverain, alors le gouvernement se corrompt ; il tend à sa perte. Quelle confiance voulez-vous que le gouvernement ait des fonctionnaires sur la tête desquels sera suspendue l’épée de Damoclès, dans des fonctionnaires auxquels il dira à chaque instant ; Si vous écoutez la voix de votre conscience pour résister à ma volonté, je vous briserai comme verre ?
Des fonctionnaires municipaux placés en présence d’une menace incessante ne seront plus les agents de la commune, mais bien les agents du pouvoir.
Si vous voulez à toute force que le gouvernement ait le droit illimité de révocation et de suspension, rétablissez l’équilibre, accordez-le aussi au peuple. Vous ne le ferez pas. Car on accorde toujours au gouvernement des moyens d’influence et on les refuse au peuple.
Cependant, pour qu’une commune puisse être bien administrée il faut que les habitants aient confiance dans leurs magistrats municipaux ; or, quelle confiance voulez-vous que les habitants aient dans des magistrats qui seront toujours sous le coup d’une révocation ou d’une destitution ?
Les conseils communaux n’auront pas plus de confiance dans ces magistrats, quoique ceux-ci aient été choisis dans leur sein. En effet, quand un conseil aura une revendication à faire contre le gouvernement par l’intermédiaire des magistrats municipaux, il sera dans un état de méfiance perpétuelle ; il craindra que ceux-ci ne trahissent leur mandat dans l’intérêt du gouvernement. Si le système de M. Pollénus était admis, au lieu de la bonne organisation que nous voulons tous établir, vous introduiriez la défiance dans toutes les communes du pays.
Que l’on ne s’y trompe pas. Ce que l’on vous demande, c’est encore une de ces mesures que l’on a qualifiées dans des discussions précédentes de moyens de gouvernement, c’est-à-dire que quand le jour des élections viendra, tous les magistrats communaux seront invités à se rendre aux élections et à voter dans le sens du gouvernement sous peine de destitution. Ainsi le droit de révocation et de suspension que vous accorderiez, ne tendrait à rien moins qu’à corrompre la représentation nationale.
Les conseils provinciaux seront ainsi corrompus par ce système. Les élections se faisant par district, il est probable que beaucoup d’échevins et de bourgmestres seront nommés conseillers. C’est ainsi que vous arriverez à avoir des conseils provinciaux corrompus. C’est ainsi que nous marcherons vers le système de corruption, le pire de tous les systèmes.
Dès lors, la constitution, au lieu d’être une vérité, deviendra un mensonge. Le peuple, privé de ses organes constitutionnels, cherchera d’autres moyens pour faire entendre sa voix. C’est fort déplorable à penser. Mais c’est vers ce but que nous nous acheminons.
Je dis, pour moi, que nous ne devons pas accorder au gouvernement un moyen de fausser le gouvernement représentatif, que la force du gouvernement doit résider dans l’appui du peuple, dans l’appui de la représentation nationale, et que le gouvernement, qui cherche sa force dans la corruption des chambres et des institutions provinciales, se perd, et marche nécessairement à sa ruine.
Mais j’entends que l’on dit : Si vous n’admettez pas le droit de suspendre les fonctionnaires publics, quelle garantie avez- vous de la bonne administration de la commune ? Je m’étonne de cette objection, alors que nous avons donné toutes les garanties possibles de l’exécution des lois dans la commune. On perd de vue que la commune ne peut faire aucun acte sans l’autorisation du gouvernement ; que si les magistrats communaux ne font pas exécuter les lois et ordonnances, le gouvernement envoie un commissaire qui les fait exécuter à leurs frais. Avez-vous oublié que vous avez donné au gouvernement tous les moyens d’action possibles sur les actes de la commune ?
Si le gouvernement n’a pas d’arrière-pensée, il doit se désister franchement et s’en rapporter à ce qui existait sous le roi Guillaume.
On a prétendu que le peuple était incapable de faire de bons choix, que le gouvernement seul en était capable. Et maintenant le gouvernement vient demander le droit de révocation ; il n’a donc même pas confiance en lui-même, puisqu’il veut pouvoir défaire son ouvrage à chaque instant.
Je dis que, dans mon opinion, on peut se passer du droit de révocation et de suspension, puisqu’on s’en est passé sous le gouvernement précédent.
Je pense donc que la chambre doit s’en tenir à ce qui a été admis par elle et par le Sénat.
D’après ce que j’ai eu l’honneur de dire précédemment, je proposerai l’amendement suivant :
« Les bourgmestre et échevins peuvent être suspendus de leurs fonctions pour cause d’inconduite notoire ou de négligence grave, par arrêté du gouvernement, sur l’avis conforme de la députation provinciale. La suspension ne pourra excéder 3 mois.
« A l’expiration de ce terme, le fonctionnaire suspendu pourra, après avoir été entendu, être révoqué par l’arrêté royal rendu sur l’avis conforme de la députation provinciale.
« Les arrêtés de suspension et de révocation seront motivés sur les faits qui y ont donné lieu ; les motifs ne seront pas rendus publics. »
Il y a, entre mon amendement et celui de l’honorable député d’Anvers, une différence importante : c’est que cet honorable membre exclut la garantie que j’avais proposée de l’avis de la députation provinciale. C’est la une disposition de la plus haute importance. Le peuple n’a pas le droit de révocation des choix qu’il a faits ; lorsque vous donnez ce droit au gouvernement, vous ne sauriez l’entourer de trop de garanties. Le donner au gouvernement sans aucune intervention de l’autorité provinciale, c’est réunir entre ses mains, en quelque sorte, le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif. C’est une chose inconstitutionnelle contre laquelle je dois m’élever. Je veux un tribunal qui apprécie les faits. Ce tribunal, je le trouve dans la députation provinciale.
On a parlé de la responsabilité ministérielle, on a dit que le gouvernement serait responsable des suspensions et des révocations qu’il prononcerait ; mais lorsque nous avons vu le ministère révoquer d’honorables représentants de leurs fonctions, prix des services rendus au pays pendant la révolution, lorsque nous avons vu la représentation nationale garder le silence en présence de pareils abus, pouvons-nous encore invoquer la responsabilité ministérielle ? Elle signifierait quelque chose dans les cas de dilapidation et de forfaiture ; hors de là elle n’est qu’un vain mot.
Je demande que la chambre refuse au gouvernement le moyen qu’il demande de fausser la représentation nationale et provinciale. Si vous accédez à sa demande, au lieu des différents pouvoirs établis par la constitution, il n’en resterait plus qu’un seul, le pouvoir exécutif.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - L’honorable préopinant, fidèle à ses antécédents, ne voit jamais qu’abus là où les chambres et le gouvernement trouvent des garanties
Il ne vous aura pas échappé que le préopinant, tout en s’appuyant sur des décisions antérieures de la chambre, s’en écarte cependant considérablement dans la proposition qu’il fait. Je lui répondrai, en ce qui concerne la révocation du bourgmestre, que jusqu’ici elle a été accordée, sans limites, au gouvernement.
Pour moi j’ai toujours pensé qu’il y avait une distinction à faire entre la suspension et la révocation, et que l’on pouvait admettre une distinction entre la révocation des échevins et celle des bourgmestres. Je demeure conséquent avec les principes que j’ai émis dans les discussions antérieures sur cette matière. Ainsi j’ai pense que la suspension ne devait être prononcée que pour des causes déterminées ; d’après cela je ne vois aucune difficulté à admettre l’intervention de la députation provinciale pour constater ces causes.
En ce qui concerne la révocation, je crois que celle du bourgmestre doit être illimitée ; et ce principe vous l’avez admis dans trois décisions antérieures, et le sénat l’a également admis ; en effet vous savez que le bourgmestre quoique participant collectivement avec les échevins à l’administration est le premier membre du collège, en est la tête. (Réclamations. Hilarité.)
Je m’attendais à l’hilarité de quelques membres qui ont combattu la nomination des échevins par le Roi ; j’étais persuadé qu’ils s’empresseraient de saisir la moindre allusion dans mes paroles. Je crois cependant pouvoir assurer que c’est à tort que cette hilarité s’est manifestée ; en effet le bourgmestre est le président du collège échevinal, et ce point a été admis sans partage d’opinions et par l’opposition et par la majorité de la chambre. Cette seule observation doit faire tomber les réclamations qui viennent de s’élever à l’instant même.
Au bourgmestre appartient la convocation du collège et du conseil de régence. C’est lui qui doit être particulièrement chargé de la réquisition de la garde civique et de la force militaire, en cas de trouble. C’est une remarque que j’ai déjà faite. Lorsque j’ai appuyé l’institution du collège échevinal, j’ai toujours dit que le bourgmestre seul requerrait la garde civique et l’autorité militaire.
Ainsi il est facile de concevoir que le gouvernement doit avoir des garanties plus spéciales, à l’égard du bourgmestre, et que si, dans des circonstances graves et difficiles, le bourgmestre n’offrait pas au gouvernement des garanties suffisantes, il devrait être révoque à l’instant même. C’est ce que réclament l’ordre public, l’intérêt général et l’intérêt de la commune.
Mais en ce qui concerne la suspension des bourgmestres et des échevins, et la démission même des échevins, je ne vois aucune difficulté à exiger l’avis conforme de la députation provinciale. C’est dans ce sens que j’ai modifié la rédaction du projet, en conséquence du vote qui donne au Roi la nomination des bourgmestres et échevins.
Voici la rédaction que j’ai cru devoir proposer :
« Les bourgmestre et échevins peuvent être suspendus de leurs fonctions pour cause d’inconduite notoire ou de négligence grave par arrête du gouverneur, sur l’avis conforme de la députation provinciale. La suspension ne pourra excéder trois mois. »
« A l’expiration de ce terme, les échevins peuvent être démis de la même manière.
« Les échevins seront entendus préalablement à la suspension ou à la révocation : les bourgmestres seront également entendus avant la suspension.
« Les bourgmestres peuvent être révoqués de leur fonctions par le Roi. »
A la simple lecture vous aurez remarqué que cet amendement est presque entièrement conforme à la disposition adoptée dans la dernière discussion ; en effet, elle ne diffère en ce qui concerne la suspension et la démission des échevins qu’en ce que le gouverneur la prononce après avoir reçu l’avis conforme de la députation provinciale. J’ai pensé que puisque c’est le Roi qui nomme, il appartenait au gouverneur, qui représente dans la province le gouvernement du Roi, de prononcer la suspension ou la démission. Mais j’ai admis l’avis conforme de la députation provinciale, parce que la suspension et la démission des échevins, devant être fondée sur des causes déterminées, « inconduite notoire » ou « négligence grave », je ne voyais aucune difficulté à ce que la députation provinciale fût chargée de constater ces faits.
J’en reviens à faire quelques observations sur la révocation du bourgmestre.
L’honorable préopinant se prévaut de ce que sous l’empire des anciens statuts de la Belgique, le gouvernement qui nommait les bourgmestres ne les révoquait pas. Mais je vous prie de ne pas perdre de vue qu’alors les bourgmestres n’étaient nommés que pour un an, et qu’il y avait dans la brièveté de ce terme une garantie pour le gouvernement, puisqu’il ne tenait qu’à lui, ce terme expiré, de ne pas continuer un bourgmestre dans ses fonctions. Ici au contraire nous avons étendu la durée des fonctions à 6 années ; or convenez que dans l’intervalle de 6 années, il peut survenir un changement considérable qui nécessite la révocation d’un fonctionnaire municipal. La nomination d’un bourgmestre n’intéresse pas seulement l’administration supérieure, mais encore la commune même, et je dis que si l’on n’accordait pas au gouvernement la faculté illimitée de révoquer le bourgmestre, on porterait un préjudice notable tant à la commune qu’à l’administration supérieure.
L’honorable préopinant s’étonne de ce que le gouvernement réclame un droit de révocation, alors que ce droit de révocation n’appartient pas au collège électoral. Mais je demanderai au préopinant de quelle manière il entend qu’un collège électoral opérerait une révocation. Jusqu’à ce que le préopinant ait trouve ce moyen, nous n’avons pas à nous occuper de ce nouveau genre de révocation. Pour le gouvernement au contraire rien de plus simple. Il appréciera facilement les motifs qui peuvent donner lieu à la révocation, et la révocation sera faite sans aucune espèce d’embarras.
Le droit de révocation, a dit un préopinant, est plus grand que le droit de nomination. C’est, dit-on, une épée suspendue sur la tête des fonctionnaires ; à tout moment, le gouvernement pourra abuser de ce droit ; les bourgmestres n’auront plus aucune liberté dans leur administration. Ce sont là toutes grandes phrases qui ne reposent nullement sur les faits pratiques. En effet je demande combien de fois on a usé du droit de révocation dans les fonctions de l’administration publique ; je demande spécialement combien de fois on a usé de ce droit dans les communes rurales quoique là il fût illimité, combien de fois on en a usé pendant 15 ans qu’il a été en vigueur. La réponse à cette question prouve suffisamment que c’est bien à regret que le gouvernement recourt à la mesure extrême d’une révocation.
Je dirai que s’il y a un reproche à adresser au gouvernement, en matière de révocation, c’est qu’il n’use pas assez de ce droit. L’intérêt de l’administration requerrait un usage plus fréquent de ce droit. Ainsi ce n’est pas à le restreindre, mais à encourager le gouvernement à en faire usage dans l’intérêt public, que l’on devrait penser.
Je crois que ces courtes observations suffiront pour vous faire persister dans les votes que vous avez émis précédemment, et vous faire écarter les amendements qui s’éloignent du système que vous avez reconnu être le plus utile.
M. le président. - Voici l’amendement qui a été présenté par M. Legrelle :
« Les bourgmestres et les échevins pourront être suspendus et révoqués de leurs fonctions par arrêté du gouvernement, pour cause d’inconduite notoire ou de négligence grave. La suspension ne pourra excéder 3 mois.
« Les bourgmestres et les échevins seront entendus préalablement à la suspension ou à la révocation. »
M. Pollénus. - Je me rallie à l’amendement de M. Legrelle.
M. Legrelle. - L’adhésion de l’honorable M. Pollénus à mon amendement cadre mal avec ses paroles primitives, C’était sa proposition primitive qui avait motivé tout mon amendement. En effet, que voulons-nous ? Poser des garanties à la suspension des fonctionnaires municipaux ; car un fonctionnaire de l’administration supérieure peut faillir aussi bien qu’un autre, et il pourrait dans un moment d’irritation décréter un arrêté de suspension. Mon amendement présente une garantie contre cet inconvénient. Une seconde garantie est dans des motifs de la suspension ou de la révocation. Enfin une troisième garantie résulte de ce que les fonctionnaires inculpés seront préalablement entendus.
Quoi qu’il en soit, ayant déterminé le retrait de l’amendement de M. Pollénus, que j’aurais vu avec peine adopter par la chambre ; en présence de l’amendement de M. le ministre de l’intérieur, qui demande maintenant plus que je ne voulais (on rit) ; en présence des autres amendements, je déclare retirer le mien.
M. le président. - L’amendement suivant a été présenté par M. Gendebien :
« Le gouvernement peut, sur l’avis conforme et motivé de la députation provinciale, suspendre ou révoquer, pour inconduite notoire ou négligence grave, les bourgmestres et les échevins ; ils seront préalablement entendus.
« La suspension ne pourra excéder trois mois. »
La parole est à M. Gendebien pour développer son amendement.
M. Gendebien. - Le motif du premier amendement, dont son auteur a fait lui-même justice, c’était, avait-il dit, d’établir l’homogénéité. Grand mot dont on s’est beaucoup servi et dont on a beaucoup abusé dans cette discussion. Il me semble que si, pour établir l’homogénéité dans une disposition, on devait méconnaître les élus du peuple, décimer sans façon et sans motifs l’administration communale, le gouvernement ferait mieux de déroger à ce grand principe.
Je place sur la même ligne le bourgmestre et les échevins, non pas précisément comme l’auteur du premier amendement, pour les exposer tous ensemble à l’arbitraire du gouvernement, mais pour leur donner les mêmes garanties, puisqu’ils participent aux mêmes fonctions et qu’il y a homogénéité entre eux ; c’est à cause de leur origine commune, l’élection populaire.
Voici l’amendement que je propose :
« Le gouvernement peut, sur l’avis conforme et motivé de la députation provinciale, suspendre ou révoquer, pour inconduite notoire ou négligence grave, les bourgmestres et les échevins ; ils seront préalablement entendus.
« La suspension ne pourra excéder trois mois. »
Mon amendement a l’avantage de satisfaire au vœu manifesté par l’honorable M. Legrelle au commencement de cette discussion et à celui qu’il a exprimé il y a un an à pareille époque. Il y a un an, M. Legrelle ne voulait pas de l’avis motivé de la députation, mais de l’avis conforme de la députation ; cette disposition se trouve dans mon amendement. Aujourd’hui, l’honorable membre demande l’avis motivé de la députation, c’est encore dans mon amendement, car ce n’est que sur l’avis conforme et motivé de la députation que le bourgmestre pourrait être révoqué on suspendu.
Maintenant, reste à discuter la question de savoir s’il y a lieu de faire une différence entre le bourgmestre et les échevins. Sous ce rapport je ne peux que m’en référer à ce qu’a dit M. Pollénus pour soutenir son premier amendement, l’homogénéité, car elle est complète dans mon amendement. Je ne sais pas quelle objection il pourrait faire à mon amendement, puisqu’il atteint le but qu’il désirait, fait justice des raisons qu’il a mises avant, et donne en même temps toutes les garanties possibles à l’indépendance de l’administration communale. Je ne pense pas que son intention ait été de les mettre sous le coup du gouvernement, puisqu’il s’est successivement rallié à l’amendement de M. Legrelle qui avait pour but d’obtenir ces garanties, et ensuite à l’amendement de M. le ministre de l’intérieur qui a, à ce qu’il dit, le même but.
M. Pollénus. - Je ne me suis pas rallié à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gendebien. - Ah ! pas encore ? cela viendra. (On rit.)
On a voulu établir une différence entre le bourgmestre et les échevins ; on a reconnu aujourd’hui, pour la première fois, que le bourgmestre était le chef, la tête de l’administration, chose qu’on nous avait niée pendant 8 jours, lorsqu’on voulait fait dire à la constitution ce qu’elle ne disait pas. Alors, au dire des ministres, le bourgmestre et les échevins étaient tous chefs. Pour donner au gouvernement la nomination des échevins comme des bourgmestres, on disait : ils ont les mêmes attributions, ils participent au pouvoir exécutif ; il faut que le pouvoir central les nomme. Maintenant qu’il s’agit de conquérir le droit de les révoquer, on dit que les bourgmestres sont des chefs distincts des autres chefs dans l’administration : il faut prendre, à leur égard, des dispositions spéciales.
Si vous voulez éviter une anomalie, prenez pour le bourgmestre la même disposition que pour les échevins. Il y aurait en effet anomalie à donner au gouvernement le droit indéfini de révoquer, selon son bon plaisir et sans contrôle, les bourgmestres, par la raison qu’il ne les nomme pas seul. Il y a intervention du collège électoral communal dans la nomination du bourgmestre comme dans celle des échevins. Pourquoi voulez-vous que l’élection communale ne trouve pas sa garantie comme la nomination royale ? Pour établir le niveau, pour donner à chacun sa part, le bourgmestre et les échevins ne devraient pouvoir être révoqués par le pouvoir exécutif que de l’avis des électeurs ou du conseil municipal, car les électeurs interviennent dans les nominations, et à moins d’avoir deux poids deux mesures, il faudrait qu’ils intervinssent dans la révocation, et qu’ils eussent un droit égal de révocation.
Je crois qu’il y aurait un inconvénient à faire intervenir les électeurs et même le conseil municipal ; mais je veux bien faire une concession, et j’arrive à une institution tout à fait indépendante : j’arrive à la députation provinciale, qui interviendra et remplacera les électeurs communaux on le conseil communal, c’est-à-dire, une des deux personnes qui ont nommé.
Vous répondrez sans doute à toutes ces observations par cette raison banale, qui a été répétée et réfutée cent fois, ou plutôt mille fois depuis quatre ans : la garantie qu’offre la responsabilité ministérielle, l’inconséquence qu’il y aurait de la part d’un ministre à destituer légèrement un bourgmestre sans motif plausible, sans motif légitime, sans nécessité bien reconnue. Mais, messieurs, l’année dernière, lorsque l’on discutait la même question, M. Lebeau disait la même chose ; il disait aussi : Il faudrait qu’un ministre eût perdu la tête pour destituer sans motif grave, sans nécessité bien reconnue, un bourgmestre ou un échevin. Je me permis alors de lui faire cette petite observation : vous avez bien pu, vous, en qualité de ministre, révoquer deux commissaires de district, sans motif ; j’ajoute aujourd’hui : Pourquoi vos successeurs, vous-même, si vous revenez au pouvoir, ne révoqueriez-vous pas de même les bourgmestres et les échevins ?
M. Lebeau répondit : « Il y avait des motifs graves (pour destituer les deux commissaires de district), et si c’était à recommencer, je ferais encore ce que j’ai fait alors. » (Mouvement dans l’assemblée.)
Voilà un exemple du grand respect du gouvernement envers les fonctionnaires qu’il peut destituer suivant son bon plaisir. Voilà la mesure de ce que le gouvernement regarde comme des motifs graves. Vous vous rappelez les graves motifs pour lesquels l’honorable M. Doignon a été destitué c’est pour s’être mis sur les rangs pour la députation avec un ambassadeur ; remarquez que ce n’est pas pour l’en avoir fait sortir, car il ne l’a remplacé qu’après destitution, c’est pour le seul fait de s’être mis sur les rangs. Voilà les motifs graves qui détermineraient M. Lebeau à faire demain ce qu’il faisait hier, s’il redevenait ministre.
D’après ce qui a été fait à l’égard de M. Doignon, est-ce qu’un ministre ne regardera pas comme un motif grave de destitution le refus d’un bourgmestre d’intrigailler pour tel ou tel candidat ministériel, d’avoir, suivant sa conscience et son opinion, voté pour un candidat qui déplaisait à un ministre, et d’avoir engagé ses amis à voter dans le même sens ?
Vous parlerai-je de M. Desmet, également destitué par M. Lebeau ? Quels étaient les motifs graves de cette destitution ? Non seulement il y avait injustice, mais inconstitutionnalité, puisqu’un article de la constitution dit positivement qu’un député ne pourra être poursuivi ni recherché du chef des opinions qu’il aura émise dans cette enceinte. Et quand on a demandé au ministère Lebeau des explications sur cette destitution, il a déclaré positivement qu’il avait destitué M. Desmet pour les votes et les opinions qu’il avait émis dans la chambre.
M. F. de Mérode. - C’est inexact.
M. Gendebien. - Je vous somme de prouver le contraire de ce qui je dis. Demain, s’il le faut, j’apporterai le texte et je vous confondrai ici comme dans toutes les autres circonstances.
M. F. de Mérode. - Une fois par hasard.
M. Gendebien. - C’est-à-dire que quand vous avez raison, c’est toujours par hasard.
Je dis qu’ici, dans le sein de la représentation nationale, les ministres ont déclaré qu’ils avaient destitué un député pour les votes émis par lui dans cette chambre. Non seulement il n’y avait pas motif grave, il y avait injustice, mais il y avait encore inconstitutionnalité ; car la constitution défend formellement de poursuivre et de rechercher un député pour ses votes. Voilà la mesure de nos consciences ministérielles, voilà les motifs justes et graves qui les déterminent dans l’exercice du droit de destituer. Pourquoi, je vous le demande, rechercher sans cesse ce qui se passe dans des pays voisins ; alors que nous avons dans notre pays, dans cette chambre même, des exemples de la violation de la constitution pour satisfaire l’amour-propre froissé d’un ministre. Il en sera des ministres actuels comme des autres, parce qu’une fois qu’un gouvernement est engagé dans un faux système il le poursuit jusqu’à la fin. Quand ils sont remplacés, malheureusement ceux qui les remplacent trouvent des faits consommés, ils les adoptent. Cela est si commode ! Nous en avons eu un exemple de la part du ministère actuel. Ils avaient blâmé certains actes de leurs prédécesseurs, et quand ils sont arrivés au pouvoir, ils ont dit : « Il n’y a rien à faire, c’est un fait consommé, nous le maintenons. » Il y avait 27 ou 30 personnes expulsées injustement, inconstitutionnellement ; on s’était fortement élevé contre ces expulsions ; arrivé au pouvoir, on a dit : C’est un fait consommé, mais on n’expulsera plus ; cependant on a continué à expulser et on expulsera encore. On a adopté un mauvais système et on le poursuit. Il en sera de même pour les destitutions. Au surplus, s’il pouvait en être autrement, nous ne pouvons pas exposer nos administrations communales à toutes ces chances de caprices et de changement ministériel. Tantôt ce sera une opinion qui dominera dans le conseil, tantôt une autre, et tour à tour on destituera les magistrats municipaux qui ne partageront pas les opinions du jour. Indépendamment de ces dangers que je ne fais qu’énoncer brièvement, il est palpable que si vous mettez à la disposition du gouvernement, les bourgmestres et les échevins, et que vous permettez de le destituer arbitrairement il n’y a plus de liberté d’élection. Je l’ai déjà dit, et je le répète, à la dernière élection, des bourgmestres n’ont pas osé aller aux élections, parce qu’il y avait dans le projet de loi la destitution des bourgmestres.
La raison en est simple, un honnête homme qui n’a rien à se reprocher ne veut pas même se trouver dans la nécessite de se justifier. Un homme destitué par le pouvoir n’en est pas moins estimé par ses amis, et quelquefois il l’est plus. Mais tout le monde n’a pas la même conviction, et on comprend que le gouvernement, avec les moyens qu’il a en son pouvoir, dénature les faits et fait calomnier par ses journaux le fonctionnaire destitué. Un bourgmestre ne veut pas s’exposer à de si graves inconvénients.
Messieurs, je crois que mon amendement offre au gouvernement le moyen d’agir bien et vite, car le gouvernement (et quand je dis le gouvernement, c’est le gouverneur, car le ministre a le droit de faire faire par le gouverneur, qui est son délégué dans sa province, ce à quoi l’autorise le pouvoir législatif) ; le gouvernement, dis-je, peut, sur l’avis conforme et motivé de la députation, suspendre et révoquer un bourgmestre. Quelle circonstance si grave peut donc amener la nécessité de révoquer un bourgmestre, une heure après qu’un commissaire de district l’aura dénoncé ?
Le gouverneur aura toujours le temps de demander l’avis du conseil provincial. D’un autre côté, sans avoir une foi pleine et entière dans les députations des conseils, je crois cependant que les électeurs des communes et les magistrats qu’ils auront élus y trouveront une garantie. (La clôture ! la clôture !)
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Messieurs, il me semble que plusieurs membres tiennent singulièrement à ce qu’il y ait homogénéité dans le mode de révocation applicable aux bourgmestres et aux échevins ; mais s’ils veulent à toute force cette homogénéité, il y a un moyen bien simple de l’obtenir ; il suffira pour cela d’ajouter à mon amendement un seul mot et dire :
« Le Roi révoque les bourgmestres et les échevins. » (On rit.)
Si l’on ne veut pas de cette homogénéité, qui est là seule que l’on puisse admettre, je dois maintenir la distinction que j’ai établie dans mon amendement.
Je vous rappellerai, messieurs, que lorsqu’en 1834 et 1835 on a accordé au Roi la faculté de révoquer le bourgmestre, on la lui a accordée sans limites.
J’ajouterai que l’année dernière vous avez accordé ce droit au Roi, alors que vous donniez au gouvernement la faculté de prendre le bourgmestre en dehors du conseil ; ainsi la révocation avait beaucoup plus de portée qu’elle n’en a maintenant ; car le gouvernement devra user d’autant plus rarement du droit de révoquer qu’il sera obligé de prendre le bourgmestre dans le conseil même. Il faudra prononcer des révocations avec la plus grande circonspection puisqu’on aura plus de peine à remplacer les magistrats démis.
Messieurs, je ne répéterai pas ce que j’ai dit relativement à la différence que je propose d’établir entre le bourgmestre et les échevins ; mais je vous rappellerai que le bourgmestre est président du collège échevinal et du conseil municipal et je ferai observer en outre que le bourgmestre doit avoir droit de requérir la force armée pour le maintien de l’ordre public ; or il serait impossible que le gouvernement répondît du maintien de l’ordre public s’il n’avait pas le droit de révoquer le bourgmestre, officier spécialement chargé de sévir contre l’émeute et s’opposer à ce que la tranquillité publique soit troublée. Ce n’est pas dans de telles circonstances que l’on peut recourir à toutes les lenteurs dont on veut environner la révocation : vous concevez, en effet, qu’il est impossible alors d’admettre l’avis motivé de la députation des états ; car pendant qu’on l’attendrait, de grands malheurs pourraient arriver.
La proposition de motiver les révocations a été faite l’année dernière et elle a été écartée ; l’on a compris que l’on ne pouvait motiver les révocations, parce que les motifs seraient souvent très désagréables aux personnes révoquées.
Je l’ai dit et je le répète, il ne résulte d’une révocation pure et simple aucun blâme ; la seule chose qui en résulte, c’est que le gouvernement ne croit pas pouvoir placer sa confiance dans le magistrat démis, ou bien qu’il existe une telle dissidence de principes entre le gouvernement et le fonctionnaire que l’administration ne puisse marcher avec cet agent.
Le préopinant a allégué que des bourgmestres n’auraient pas osé se présenter aux élections dans la crainte que la loi communale en discussion leur inspirait. J’ai peine à croire qu’il y ait dans le Hainaut des bourgmestres assez pusillanimes pour concevoir de telles craintes du chef d’un vote secret, et pour s’abstenir d’aller aux élections sous de pareils motifs ; s’il en est qui aient tenu un semblable langage, c’était pour s’excuser de n’avoir pas été aux élections, car au fond de leur âme ils ne regardaient pas cela comme un motif réel.
Le député de Mons, par sa proposition, fait intervenir le gouvernement dans toutes les suspensions d’officiers municipaux ; dans celles des bourgmestres comme dans celles des échevins des communes rurales. Messieurs, il faut laisser ces mesures aux gouverneurs des provinces et ne pas faire intervenir le gouvernement dans ces actes de détail ; c’est assez qu’il ait à s’occuper de la révocation des bourgmestres.
Je pense qu’il est véritablement inutile d’insister davantage sur l’amendement que j’ai proposé, car il est conforme à toutes vos décisions antérieures et on n’a pas encore allégué de motifs suffisants pour vous faire revenir sur vos premières décisions.
M. Pollénus. - (Erratum au Moniteur belge n°50, du 19 février 1836 :) D’après les interpellations qui m’ont été adressées par quelques honorables préopinants et principalement par M. Legrelle, je trouve qu’il est nécessaire que j’explique les motifs qui m’ont déterminé à abandonner mon amendement, et à me rallier à celui de l’honorable député d’Anvers.
Dans mon opinion, l’amendement de M. Legrelle ne diffère pas essentiellement du mien : le droit de révocation et de suspension est accordé au gouvernement ; les bourgmestres et les échevins sont placés sur la même ligne ; en cela mon amendement est conforme à celui de M. Legrelle. Mon collègue d’Anvers trouve une garantie en exprimant dans la loi que ces mesures ne pourront avoir lieu que pour inconduite ou négligence, et après avoir entendu le fonctionnaire inculpé.
Messieurs, en me ralliant à cette rédaction, je ne suis aucunement en opposition avec les principes qui ont dicté mon amendement ; en le faisant, je ne fais que consentir à exprimer dans des termes vagues et indéterminés des garanties que la forme du gouvernement représentatif me présente, indépendamment des stipulations qui cependant me paraissent trouver de l’approbation dans la chambre.
En effet, peut-on admettre que le gouvernement prononce une mesure telle qu’une destitution ou une suspension sans motifs plausibles, sans qu’il y ait faute grave de la part du fonctionnaire municipal ? La responsabilité qu’entraîne un acte de ce genre est une garantie contre l’abus ; les conditions mal définies que l’on veut opposer au droit de révocation et suspension me paraissent inhérentes à la forme d’un gouvernement qui, avant d’agir, doit savoir qu’à tous moments il peut être dans le cas de devoir justifier ses actes.
Je croyais aussi que le gouvernement, avant de prendre une mesure rigoureuse, avait soin de donner au fonctionnaire inculpé l’occasion de se défendre.
Ainsi vous voyez, messieurs, que la seule différence qui existe entre M. Legrelle et moi, c’est que le député d’Anvers veut des garanties explicites que, moi, je crois trouver dans les formes du gouvernement même.
Je le répète, je suis d’accord avec M. Legrelle en ce qu’il a soutenu que les échevins et les bourgmestres, comme formant une autorité collective, devaient en tous points être mis sur la même ligne.
M. le ministre de l’intérieur persiste dans son opinion, qui établit une différence essentielle entre les échevins et les bourgmestres ; quant aux premiers, il maintient la nécessité d’un avis préalable de la députation des états ; cet avis, il le rejette pour ce qui concerne les bourgmestres.
S’il est nécessaire de protéger les échevins au moyen d’un avis des états députés (et j’aurais tort de contester cette nécessité, puisque le ministre la reconnaît), je soutiens que dans ce cas il y a nécessité de protéger tout aussi efficacement les bourgmestres.
Je soutiens même qu’il y a des motifs plus puissants à faire valoir en faveur de garanties à stipuler pour les bourgmestres contre les abus dont la possibilité ne peut plus maintenant être contestée ; depuis, le gouvernement lui-même a semblé la reconnaître pour ce qui concerne les échevins.
En effet, la création d’un collège, d’une autorité collective, n’empêchera jamais que le bourgmestre ne soit le principal fonctionnaire de la commune ; conséquemment ce sera sur lui que tombera presque exclusivement toute la responsabilité morale qui s’attache aux actes d’exécution ; c’est toujours au bourgmestre que s’adresseront les intéressés, c’est donc lui qui sera le plus en contact avec les passions et avec les intérêts particuliers, c’est donc le bourgmestre qui sera le plus exposé ; pour être conséquent, c’est donc le bourgmestre qu’il faudrait le plus efficacement protéger, et le protéger moins que les échevins, cela ne me paraît ni logique ni conforme aux idées de l’autorité collective que la chambre a votée.
Si vous n’établissez pas dans cette disposition une parfaite homogénéité dans le collège exécutif, dès lors vous pouvez vous attendre que l’on argumentera de ces distinctions, lorsque plus tard on voudra donner des attributions exclusives au bourgmestre, et ainsi l’on s’expose à se mettre en opposition avec la disposition principe, proposée par le ministre, et adoptée par la chambre.
Je le déclare, je voterai contre toute proposition qui établirait des distinctions entre les bourgmestres et les échevins, quant au droit de révocation et de suspension.
Vous voyez, messieurs, que je n’ai d’autre but que d’organiser le principe de l’autorité collective, que vous avez votée contrairement à mon opinion.
Je crois avoir établi la nécessité de mettre les bourgmestres et les échevins sur la même ligne, je crois aussi avoir justifié pourquoi je me suis rallié à l’amendement de notre collègue d’Anvers ; en abandonnant ma proposition et en adoptant celle d’un collègue, je crois avoir prouvé que je ne méritais pas le reproche de n’être pas ami d’un système de conciliation.
M. le président. - La parole est à M. F. de Mérode.
M. F. de Mérode. - Je ne voulais parler qu’incidemment sur une attaque contre mes collègues les anciens ministres. On a dit qu’ils avaient destitué pour ses votes un fonctionnaire membre de cette chambre. Je crois cela inexact ; je pense que ce fonctionnaire a été destitué non pas uniquement pour ses votes, mais aussi pour d’autres faits accessoires.
M. Jullien. - Il est de ces vérités desquelles on ne peut s’écarter sans que la force des choses vous y ramène ; telle est la question de la supériorité du bourgmestre sur les échevins. Ainsi, quoique vous ayez investi collectivement les bourgmestre et échevins de l’autorité municipale, vous voyez ceux qui nous ont combattu, et notamment M. le ministre de l'intérieur, obligés de convenir que le bourgmestre est la tête de l’administration municipale : il ne veut pas seulement qu’il soit la tête, le président de l’administration municipale ; il insiste sur la nécessité de le charger de requérir seul la force publique, de se présenter seul devant l’émeute pour l’apaiser. C’est encore une prérogative que vous serez peut-être obligés d’accorder au bourgmestre, malgré l’administration collective.
Sous ce rapport, je suis entièrement de l’avis de M. le ministre de l’intérieur.
Je ne puis pas comprendre le bourgmestre sans qu’il soit le premier magistrat de la cité. Je ne veux pas répartir le respect entre le bourgmestre et les échevins parce que le respect réparti entre 5 personnes se réduit à très peu de chose. Il faut que le bourgmestre soit le premier homme, le premier magistrat de la cité. S’il ne l’est pas, il n’est pas bourgmestre.
L’honorable M. Pollénus a reconnu l’impossibilité de l’homogénéité parfaite que, par voie de conséquence, il voulait établir entre tous les membres du collège, cet être collectif que M. Devaux a comparé à une administration provinciale dont, par parenthèse, je faisais partie, et où il n’y avait ni chef ni président, ni par conséquent aucun point de ressemblance avec le collège échevinal.
Il est impossible que vous accordiez à l’administration collective le droit de se présenter devant le peuple pour apaiser une émeute. Si, des cinq échevins, un seul craint de se présenter, comme cela est possible dans un pareil danger, on ne pourra arriver au but. S’il y a besoin de requérir la force publique, Il faudra que les quatre ou six échevins se réunissent pour prendre une décision. Vous voyez donc qu’il faut reconnaître dans le bourgmestre un chef, et lui en accorder les prérogatives. Sous ce rapport, je partage l’opinion de M. le ministre de l'intérieur, parce que je préfère que le gouvernement commette une inconséquence plutôt qu’il n’en commette deux (on rit) au préjudice de la commune.
Malgré ces différences que l’on est obligé de reconnaître, s’ensuit-il qu’il faille établir une différence entre le droit de révoquer et de suspendre le bourgmestre et les échevins ? Non sans doute. L’honorable M. Dubus a dit une multitude de raisons qui me paraissent péremptoires pour qu’on ne puisse faire une distinction entre les bourgmestres et les échevins, au sujet du droit de révocation et de suspension.
Le principal motif qui m’empêcherait d’admettre cette différence, c’est que vous ne pouvez méconnaître, dans le bourgmestre comme dans les échevins, avant tout l’élu de la commune, et que vous ne pouvez laisser à l’arbitraire du pouvoir de le dépouiller de ce caractère, de ce mandat qu’il tient en premier lieu de la confiance des électeurs.
A la vérité, M. le ministre de l'intérieur a suggéré une idée, dans le but d’arranger l’affaire. Si vous voulez, dit-il, l’homogénéité entre le bourgmestre et les échevins, donnez au gouvernement le droit de révoquer et de suspendre les bourgmestres aussi bien que les échevins. Je conviens qu’ici il y aurait homogénéité. Mais ce serait un abus double de celui que la chambre veut, je pense, éviter.
J’ai cependant fait attention à une observation de M. le ministre de l’intérieur et j’engage l’honorable M. Gendebien à la prendre en considération dans son amendement que je me propose d’adopter : c’est qu’il est inutile d’attirer l’attention sérieuse du gouvernement sur la suspension d’un échevin de village, et qu’il suffit que le gouvernement et la députation provinciale interviennent dans cette mesure.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je suis surpris que l’honorable préopinant prétende que je demande la révocation de l’élection populaire. Il est à remarquer que lorsqu’on révoque un bourgmestre on ne le révoque que de ses fonctions de bourgmestre ; le bourgmestre révoqué reste membre du conseil communal ; il est donc inexact de dire que le gouvernement veut révoquer l’élection populaire.
Je regrette que l’honorable préopinant, qui tient tant à ce que l’on soit conséquent avec ses antécédents, ne soit pas conséquent avec le discours qu’il a prononcé à l’ouverture de la séance. Il m’a engagé à reproduire le dernier vote de la chambre, et, lorsque je reproduis ce vote, l’honorable orateur vient à une demi-heure d’intervalle changer dans sa base principale ce vote de la chambre. Il veut que le gouvernement ne puisse révoquer ni le bourgmestre ni les échevins. Pour moi, je crois que cette faculté est essentielle au gouvernement. Il est impossible que vous ne l’accordiez pas. Je suis persuadé que vous avez apprécié les motifs que j’ai eu l’honneur de faire valoir. D’ailleurs, vous avez déjà émis trois votes dans ce sens, et le vote du sénat y a été conforme.
M. Gendebien. - Au sujet de l’objection présentée par M. le ministre de l'intérieur et reproduite par M. Jullien contre mon amendement, je dois déclarer qu’en disant : « le gouvernement », j’ai prétendu dire : « le gouvernement ou ses délégués. » Quand je dis : « le gouvernement fera poursuivre un délit, » je ne veux désigner ni le Roi, ni le ministre, mais le procureur du Roi ou le juge d’instruction. De même, en fait d’administration provinciale, quand on dit le gouvernement, on désigne implicitement le fonctionnaire qui le représente dans la province, c’est-à-dire le gouverneur. Au reste, qu’on mette dans mon amendement : « le gouverneur, » au lieu de : « le gouvernement, » toute objection disparaîtra.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je suis d’accord sur ce point avec l’amendement de M. Gendebien. Mais il existe entre son amendement et le mien deux différences radicales que la chambre saisira.
Un grand nombre de membres. - La clôture !
M. Jullien renonce à la parole.
M. Gendebien. - Je demande que M. le président veuille bien donner lecture des différents amendements.
M. Dumortier, rapporteur, demande la division du dernier paragraphe de son amendement.
M. Eloy de Burdinne. - Les amendements présentés sont si compliqués qu’il me sera impossible de voter. Je demanderai qu’on les imprime et qu’on les distribue, comme cela a eu lieu à l’occasion des amendements sur le cens électoral.
- L’impression et la distribution des amendements sont mises aux voix et ne sont pas adoptées.
La clôture est mise aux voix et adoptée.
La chambre décide que l’amendement de M. Gendebien sera mis aux voix le premier.
M. Demonceau. - Je demanderai à M. Gendebien si d’après son amendement, le gouverneur aura le droit de suspension et même de révocation.
M. Gendebien. - Il est bien clair que qui dit le gouverneur dit le gouvernement. Tout ce que j’ai voulu, c’est que l’avis conforme de la députation provinciale fût nécessaire dans tous les cas. De cette manière ce ne sera pas un commissaire de district qui destituera ou suspendra en définitive les fonctionnaires municipaux.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Ce ne seraient pas les commissaires de district qui suspendraient ou révoqueraient d’après ma proposition, ce serait par arrêté royal que le bourgmestre serait révoqué, comme il serait nommé par arrêté royal.
M. Gendebien. - Tout le monde sait bien que les commissaires de district ne signeraient pas les arrêtés de destitution mais c’est sur leur dénomination qu’ils seraient pris.
- L’amendement de M. Gendebien est mis aux voix par appel nominal.
M. le président proclame le résultat du scrutin en ces termes :
70 membres ont répondu à l’appel.
1 membre s’est abstenu.
37 ont adopté.
33 ont rejeté.
M. Trentesaux. - 39 membres ont adopté et non pas 37 (Note insérée au Moniteur : Il résulte, en effet, du relevé consigné dans notre compte-rendu que 39 membres et non 37 ont adopté l’amendement.)
M. le président. - J’ai proclamé le relevé fait par l’un de MM. les secrétaires. S’il était inexact, il serait rectifié demain. Dans tous les cas, l’amendement est adopté.
Ont répondu oui : MM. Andries, Beerenbroeck, Bekaert, Berger, de Meer de Moorsel, Demonceau, de Renesse, de Roo, Desmaisières, Desmet, d’Hoffschmidt, Doignon, Dubus aîné, Bern. Dubus, Dumortier, Fallon, Frison, Gendebien, Hye-Hoys, Jadot, Jullien, Kervyn, Manilius, Pirson, Pollénus, Raymaeckers, A. Rodenbach, Rouppe, Scheyven, Seron, Mast de Volder, Thienpont, Trentesaux, Troye, Vandenbossche, Vanden Wiele, Vergauwen, Watlet, Zoude.
Ont répondu non : MM. Bosquet, Cols, Cornet de Grez, de Behr, de Longrée, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Sécus, Desmanet de Biesme, de Terbecq, de Theux, Devaux, d’Huart, Dubois, Duvivier, Ernst, Keppenne, Legrelle, Lejeune, Milcamps. Morel-Danheel, Pirmez, Raikem, Simons, Smits, Ullens, Vandenhove, Vanderbelen, Verdussen, Verrue-Lafrancq, C. Vuylsteke.
M. Eloy de Burdinne s’est abstenu pour les motifs qu’il a énoncés plus haut.
La séance est levée à 5 heures.