(Moniteur belge n°362, du 28 décembre 1834 et Moniteur n°363, du 29 décembre 1834)
(Moniteur belge n°362, du 28 décembre 1834)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à une heure moins un quart.
M. Dechamps fait l’appel nominal.
M. H. Dellafaille donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; il est adopté.
M. A. Rodenbach. - Je demande que la commission chargée d’examiner le projet de loi relatif à la monnaie de cuivre, soit invitée à déposer son rapport sur le bureau. Si, comme j’ai entendu quelques membres en exprimer le désir, la chambre croyait devoir tenir séance demain, ce projet pourrait être discuté.
Ma proposition n’est pas sans utilité, car j’ai entendu plusieurs membres dire que la monnaie de cuivre manquait chez eux.
M. le président. - La commission me fait savoir qu’elle ne peut présenter son rapport aujourd’hui.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je demande la parole pour la présentation d’un projet de loi.
La difficulté de discuter à temps le projet d’organisation générale de la garde civique et l’insuffisance que j’ai cru voir dans le projet présenté par mon honorable prédécesseur, pour combler les lacunes de la loi actuellement en vigueur, m’ont déterminé à vous présenter le projet de loi dont je vais avoir l’honneur de vous donner lecture,
M. de Brouckere. - De combien d’articles est-il ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - De 22 articles.
- Plusieurs membres. - L’impression ! l’impression !
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux) dépose le projet sur le bureau.
- La chambre donne acte à M. le ministre de l’intérieur de la présentation du projet de loi qui vient d’être déposé sur le bureau. Ce projet et les motifs qui l’accompagnent seront imprimés et distribués.
M. le président. - La chambre entend-elle envoyer ce projet dans les sections ou le soumettre à l’examen d’une commission ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je prierai la chambre d’ordonner le renvoi à une commission. Comme l’objet de ce projet est une matière spéciale, il est à désirer que ce soient les membres de la chambre les plus familiers avec cette matière qui soient chargés de l’examen de ce projet.
D’un autre côté l’envoi à une commission permettrait une discussion plus prompte : si même cette discussion pouvait avoir lieu avant que la chambre s’ajournât, si tant est qu’elle veuille s’ajourner, on aurait l’avantage de pouvoir sous peu opérer une réorganisation dont l’urgence est sentie par tout le monde.
M. Helias d’Huddeghem. - Il est probable que la chambre va s’ajourner pour quelques jours ; il conviendrait alors de composer la commission de membres habitant Bruxelles ; elle pourrait s’occuper de l’examen du projet pendant les vacances.
- La chambre ordonne le renvoi du projet à une commission et décide que cette commission sera nommée par le bureau.
M. Dumortier. - La commission pourrait s’occuper de suite de l’examen de cette loi, et si la chambre l’y autorisait, faire imprimer son rapport sans être obligée de la déposer sur le bureau. De cette manière, il ne serait pas impossible que le rapport fût fait et distribué mardi, et la chambre pourrait s’en occuper de suite.
M. le ministre vous a dit que ce projet était urgent. Je le reconnais avec lui, et je pense que c’est une chose que personne ne peut méconnaître.
Je demande en conséquence que la commission veuille bien répondre à la déclaration d’urgence faite par le ministre, s’occuper de suite du projet ; et qu’elle soit autorisée à faire imprimer son rapport, sans être astreinte à le déposer sur le bureau.
M. Desmanet de Biesme. - Je reconnais que la loi qui nous est présentée est une des lois les plus importantes qu’on puisse faire, et que celle qui existe sur la matière est vicieuse. Mais vous devez ici mettre en harmonie la loi sur la milice et la loi sur la garde civique ; c’est toute une législation à faire. On ne peut pas voter une loi de cette importance sans avoir au moins le temps d’examiner les autres lois qui s’y rattachent. S’il y a urgence de voter cette loi, que la chambre décide qu’elle ne s’ajournera pas, afin de s’en occuper, car il est de toute impossibilité qu’on termine cette loi en deux ou trois jours.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - L’honorable préopinant a signalé la difficulté de faire en peu de temps une bonne loi même provisoire sur la garde civique. Je partage son opinion.
Aussi ai-je pris l’avis de plusieurs personnes expérimentées sur la matière, avant de présenter le projet que je viens de déposer. J’espère qu’il se conciliera avec les dispositions existantes.
Toutefois la chambre sera mieux éclairée sur ce point quand la commission lui aura fait son rapport. Si la commission ne trouvait pas de graves difficultés dans le projet, rien, ce me semble, ne s’opposerait à ce qu’il fût discuté d’urgence. C’est une chose qu’on pourra décider après le rapport.
M. de Puydt. - Je considère aussi le projet sur la garde civique comme urgent. Depuis plusieurs années, divers projets nous ont été présentés ; il ne m’est pas permis de croire que la plupart des membres n’en aient pas pris connaissance ; je suis persuadé, au contraire, qu’ils se sont pénétrés des principes sur lesquels ces projets étaient basés, que la matière leur est maintenant familière, et que chacun de nous est en mesure de discuter en connaissance de cause le projet qui vient de nous être présenté.
J’appuierai la proposition de M. le ministre de l’intérieur, et j’engagerai la chambre à s’occuper de ce projet le plus promptement possible.
M. le président. - Je ne pense pas qu’on puisse déclarer l’urgence et fixer la discussion avant que le rapport soit fait.
M. Dumortier. - J’en demande pardon, la déclaration d’urgence doit être faite dès à présent. Elle engagera la commission à accélérer son travail. Si la chambre ne faisait pas cette déclaration, la commission ne croirait peut-être pas devoir se hâter. La déclaration d’urgence faite, la commission pourra se réunir dès aujourd’hui, préparer son rapport ce soir ou demain, et n’étant pas astreinte à la formalité de le déposer sur le bureau, le faire imprimer et distribuer demain. Nous pourrons ainsi le discuter lundi ou mardi.
M. Gendebien. - C’est un fait que nous reconnaissons tous que la loi actuelle sur la garde civique contient des défectuosités auxquelles il est urgent de remédier. Mais nous ne pouvons pas prononcer l’urgence sur un projet que nous ne connaissons pas. Les membres de la commission sauront que la chambre désire que le projet qu’ils ont à examiner soit discuté le plus promptement possible.
M. Eloy de Burdinne. - La chambre veut se donner un congé, mais je pense qu’auparavant il convient qu’elle s’occupe du projet qui lui est présenté sur la garde civique. On parle de guerre, il est indispensable que nous prenions des mesures afin de pouvoir mettre la garde civique en activité, si les besoins du pays l’exigent.
« Art. 1er. Etat-major général. »
La section centrale propose le chiffre de 577,740 fr.
M. le ministre demande une augmentation de 46,100 fr.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je demande la parole. J’avais demandé, pour cet article du budget, 675,916 fr.
Mais le travail de réduction opéré au mois d’octobre pour niveler les dépenses de l’Etat au montant de ses recettes, m’obligea de proposer une diminution de 66,400 fr.
Ce qui réduisait l’article à 609,516 fr.
La section a proposé de le porter à 519,410 fr.
Ce qui fait une nouvelle réduction de 90,106 fr.
Mais dans cette somme était comprise celle de 46,100 fr. que, dans votre séance précédente, vous avez décide devoir être reportée à cet article ; ainsi la réduction proposée ne serait plus que de 44,006 fr.
Elle se décompose comme il suit :
- Traitement d’un général de division, 16,900 fr.
- Traitement d’un général de brigade, 11,600 fr.
- Supplément demandé pour les capitaines aides-de-camp près les commandants de province, 4,240 fr.
- Traitement d’un capitaine d’état-major, 4,650 fr.
- Supplément de traitement du chef de l’état-major-général, 7,000 fr.
Total, 44,390 fr.
La section centrale alloue néanmoins cette dernière somme de 7,000 fr. ; mais elle propose de la comprendre dans un chapitre à part, ainsi que les frais de représentation et autres dépenses temporaires, qu’il importe de séparer des dépenses fixes.
Je suis parfaitement de son avis à cet égard, et je demande à prélever cette somme sur les fonds du budget supplémentaire que je dois présenter sur le crédit extraordinaire qui doit être accordé au département de la guerre.
Je donne également mon plein et entier assentiment à la proposition faite par la section de comprendre dans cet article les dépenses relatives aux officiers généraux mis en disponibilité, et qui augmentent le montant de cet article de la somme de 58,330 fr., savoir :
- 21,000 pour le traitement de 2 généraux de division (10,500).
- 29,600 pour celui.de 4 généraux de brigade (7,400).
- 7,930 pour celui d’un général de brigade réglé à cette somme par arrêté du régent.
Il est indispensable d’avoir quelques officiers généraux en disponibilité pour en avoir le nombre nécessaire en cas de guerre, et c’est un système suivi par toutes les puissances militaires.
Le budget présentait donc en officiers généraux, tant en activité qu’en disponibilité :
8 généraux de division dont 2 en disponibilité.
20 généraux de brigade dont 5 en disponibilité.
C’est sur ce nombre que la section propose de retrancher le traitement d’un général de division et d’un général de brigade et je crois pouvoir vous démontrer que ces deux traitements doivent être maintenus au budget.
Il faut :
- pour l’organisation de l’armée en cinq divisions, dont une de cavalerie, généraux de division, 5
- pour chef de l’état-major général, 1
- pour les inspections générales d’infanterie et de cavalerie, 2
Total, 8.
Quant aux généraux de brigade, les besoins du service exigent :
- pour le commandement de 11 brigades des divisions de l’armée, 11
- pour l’inspection générale de l’artillerie et du génie, 2
- pour le commandement des quatre provinces frontières, 4
- pour le service près de la personne du Roi, 3
Total, 20.
Ainsi je propose, messieurs, de fixer notre cadre d’officiers-généraux tant en activité qu’en disponibilité, à 8 généraux de division et 20 généraux de brigade, tant nationaux qu’étrangers admis à notre service.
Certes ce cadre est loin de présenter la moindre exubérance : il n’est pas le 1/10 de celui des officiers généraux de la France et n’est pas la moitié de celui des officiers généraux de la Hollande.
L’annuaire militaire pour 1835, qui vient d’être imprimé à La Haye, porte le cadre des officiers généraux à :
1 colonel général de toutes armes,
1 feld-maréchal.
3 généraux d’infanterie.
21 lieutenants-généraux dont 1 seulement en disponibilité.
44 généraux-majors dont 6 en disponibilité.
Total, 70.
Ainsi, messieurs la Hollande a 70 officiers généraux, dont 7 en disponibilité, et la Belgique en a 28 dont 7 en disponibilité, ce qui fait pour la première de ces puissances 67 généraux entretenus en activité et pour la seconde 21 seulement en activité.
Croyez bien, messieurs, que je ne demande que le plus strict nécessaire en bornant ainsi notre cadre d’officiers généraux, et d’après cette assurance positive, j’ai l’honneur de vous proposer de rétablir la somme de 28,500 fr. que j’avais demandée pour le traitement d’un général de division et d’un général de brigade.
Ainsi l’article premier porté par la commission à 527,320 fr. pour les officiers en activité, 58,330 pour les officiers en disponibilité doit être augmenté de :
46,100 fr. pour les officiers employés au département de la guerre, ce qui d’ailleurs n’est qu’un revirement,
et de 28,500 fr. pour les traitements dont je demande le maintien.
Total, 660,250 fr.
1 1/2 p. c. à déduire : fr. 9,903 fr.
Reste à porter au budget, 650,547 fr.
Ce ne sera que dans le courant de cette année que le gouvernement fixera également le cadre des officiers supérieurs et subalternes du corps de l’état-major, et après le résultat du concours qui doit avoir lieu au mois de mai prochain.
Nous aurons ainsi, comme le propose la section, et ainsi que je le désire moi-même, des bases certaines pour l’assiette du prochain budget, qui ne seront plus susceptibles d’être remises en discussion.
M. de Puydt, rapporteur. - Les réductions proposées par la section centrale ont été motivées sur un état nominatif des officiers formant l’état-major général. Aujourd’hui, l’on vient nous proposer des augmentations assez considérables à ce chapitre. Je n’ai pas bien compris les développements dans lesquels M. le ministre est entré. Il paraîtrait que cette augmentation résulte de l’adoption d’un cadre nouveau pour l’état-major général. Il me semble qu’avant de se prononcer sur le mérite de cette augmentation, il faudrait avoir le temps de prendre une connaissance approfondie des motifs.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai eu l’honneur de faire observer que la section centrale, comprenant dans le traitement d’activité celui des sept généraux en non-activité, portait la somme totale de l’article à 577,740 fr. Mais il faut ajouter à ce chiffre les 46,100 fr. provenant du revirement, ce qui fait 623,000 francs. L’augmentation que je demande n’est que de 28,000 fr. Elle a pour objet de donner au gouvernement les moyens compléter le cadre des officiers généraux dans le cas où l’état des choses l’exigerait.
Si nous devions faire passer notre armée de l’état de paix à l’état de guerre, il nous faudrait 8 généraux de division. Je viens d’en démontrer la nécessité. Si les nominations ne sont pas nécessaires, les sommes resteront au trésor, et dans tous les cas, ce n’est qu’une augmentation de 28,000 fr. que je demande.
M. Desmaisières. - Il est très vrai que les cadres actuels seraient incomplets pour le service de guerre. Mais je ferai observer que nous avons voté 7 millions de subvention extraordinaire de guerre. La proposition actuelle du ministre tendrait à remplir la vacance de deux grades, l’une de général de division et l’autre de général de brigade. Ces promotions ne doivent être faites qu’autant qu’il y ait guerre. Nous ne connaissons pas de colonel dans l’armée qui ait assez de service pour mériter cet avancement par droit d’ancienneté. Attendons : si nous avons la guerre, ils auront occasion de mériter leurs étoiles par les services qu’ils rendront, et on les paiera sur la subvention extraordinaire que vous avez votée.
M. Desmanet de Biesme. - Messieurs, les propositions du ministre peuvent être justes, mais je veux faire remarquer la singulière position où l’on place la chambre dans la discussion du budget de la guerre. M. le ministre, en présentant son budget, propose un chiffre moindre de 13,784 fr. qu’au budget précédent ; puis il propose une nouvelle réduction de 66,400 fr, Aujourd’hui que la section centrale a fait son rapport, après avoir examiné tous les points en prenant en considération ces diverses réductions, le ministre vient au milieu de la discussion proposer des augmentations. Il est impossible de discuter un budget d’une manière convenable si on nous propose comme cela des augmentations sur lesquelles nous devons nous prononcer sans qu’un rapport nous ait été fait.
Les demandes peuvent être justes ; mais je ne suis pas éclairé à cet égard. Je m’en réfère aux observations de M. Desmaisières. On augmentera l’état-major si le besoin du service l’exige, et on ouvrira un crédit sur la subvention extraordinaire. En attendant, je maintiens les propositions de la section centrale.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - La marche que j’ai suivie me semble cependant toute naturelle. J’avais proposé un article de dépenses de 13 mille fr. moins élevé que l’année précédente. De nouvelles réductions purent avoir lieu par suite de la rentrée en France de plusieurs officiers généraux ; elles s’élevèrent à 66,400 fr. C’est dans cet état que l’article a été soumis à la section centrale.
La réduction de la section centrale qui était de 90 mille fr. n’est plus que de 44 mille, puisque 40 mille sont rétablis. C’est sur ces 44 mille fr. de réduction qu’on veut me faire subir que je demande qu’on m’alloue 28 mille francs.
Dans toutes les discussions de budget, quand le ministre croit ne pouvoir pas souscrire à toutes les réductions proposées, il combat celles qu’il croit impossibles.
La section centrale a retranché, pour traitements d’un général de division, d’un général de brigade et d’un capitaine d’état-major, pour supplément de solde et indemnité des aides-de-camp des commandants des provinces, 44 mille francs. Sur ces 44 mille francs je réclame 28 mille fr., et je viens d’exposer les motifs sus lesquels je fonde ma réclamation. Cette marche est toute rationnelle.
M. de Brouckere. - Je demande la parole pour déclarer que je ne puis accorder l’augmentation demandée par M. le ministre de la guerre. Elle ne me paraît pas nécessaire. Je ne nie pas qu’en cas de guerre imminente il faudrait augmenter le nombre des officiers généraux en activité de service. L’observation de M. Desmaisières est de toute justesse. En cas de guerre imminente, le ministre demanderait un crédit sur les centimes additionnels dont partie serait employée à payer la solde des officiers généraux qu’il faudrait nommer pour compléter le cadre de guerre.
Remarquez que, dans ce cas, le nombre des officiers généraux pourrait être facilement augmenté, sans avoir recours à de nombreuses promotions. Outre les officiers généraux en disponibilité ou en non-activité qu’on rappellerait au service actif, il y en a qui ont des places qui ne sont autre chose que des places honorifiques. Telle est la place de gouverneur de la résidence.
Sous le gouvernement des Pays-Bas, il y avait un gouverneur à Bruxelles, à La Haye, à Harlem. Mais ces places étaient purement honorifiques. Le ministre de la guerre a jugé à propos de la rétablir à Bruxelles. Si on la maintient en temps de paix, je pense qu’on ne la laisserait pas subsister en temps de guerre. Voila les motifs pour lesquels je refuserai mon vote à l’augmentation demandée par le ministre.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je regrette qu’on ne m’ait pas bien compris. J’ai dit qu’il fallait huit officiers généraux. Il y en a quatre portés au budget, plus un cinquième qui est un officier étranger, deux en disponibilité, et moi qui suis général de division en France depuis 14 ans, ce qui fait huit.
Pour les généraux de brigade, il y en a 20, dont 15 en activité et 5 en disponibilité.
Il n’est pas question de promotions. L’allocation que je demande a pour but de donner au gouvernement la faculté de faire passer de la disponibilité à l’activité, des officiers généraux si les besoins du service l’exigeaient. Il n’est pas nécessaire maintenant que tous ces officiers soient en activité ; c’est pour cela que nous en avons sept en non-activité.
M. de Brouckere. - Je prie M. le ministre de répondre à l’observation qu’on lui a faite, que si les besoins pour lesquels il réclame une augmentation se faisaient sentir, on l’autoriserait à prendre les fonds sur la subvention extraordinaire.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je ne demande des fonds que pour en faire usage si des événements surviennent qui en rendent l’emploi nécessaire. L’état actuel peut se prolonger jusqu’au printemps prochain ; mais si alors quelque événement se présentait, je devrais payer toujours le premier trimestre sur les fonds ordinaires. C’est pour cela que je demande un supplément d’allocation.
M. Desmaisières. - Le ministre dit qu’il ne demande pas à être mis en état de faire de nouvelles promotions, mais de faire passer des officiers généraux de la disponibilité à l’activité. Alors, il ne devrait demander que la différence du traitement de disponibilité à celui d’activité, et non des traitements pleins.
M. Gendebien. - Il me semble que la dernière observation faite par le député de Gand demande une réponse.
M. le ministre dit que son intention n’est pas de créer de nouveaux officiers, mais de mettre en activité ceux qui sont en disponibilité. S’il en est ainsi, je suis tout disposé à lui accorder ce qu’il demande : regardant la mise en non-activité d’un officier général comme une injustice, je donnerai mon appui à une mesure qui a pour but d’y mettre un terme. Mais je n’accorderai aucun fonds dans le but de faire des promotions, alors que nous avons sept officiers généraux en non-activité.
Je prie M. le ministre de s’expliquer clairement, parce qu’on rejettera sa demande s’il persiste à demander l’intégralité des traitements, tandis qu’on pourra la lui accorder s’il la réduit à la différence du traitement de non-activité au traitement d’activité.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Il paraît que l’on confond les officiers généraux en non-activité avec les officiers généraux en disponibilité. Les officiers généraux sont mis en non-activité généralement quand ils ne peuvent plus rendre de services et qu’ils attendent leur pension de retraite, ou que par d’autres motifs le gouvernement croit ne pouvoir plus les employer.
La disponibilité est autre chose. En France, il y a 80 lieutenants-généraux : 38 en activité et 42 en disponibilité. Ici il y a 6 généraux de division en activité et 2 en disponibilité ; il y a 20 généraux de brigade : 15 en activité et 5 en disponibilité. Aussi sommes-nous dans le cadre le plus réduit possible.
J’ai fait observer qu’en Hollande, il y a en activité 20 lieutenants-généraux et 38 généraux-majors dont le grade correspond à celui de général de brigade.
Nous avons plusieurs brigades qui sont commandées provisoirement par un colonel, et une division commandée par un général de brigade. Le gouvernement peut, sans devoir mettre l’armée sur le pied de guerre, avoir à ordonner un revirement qui nécessite qu’on mette des officiers généraux du grade à la tête des divisions et des brigades. Je crois donc qu’il y a lieu de maintenir la somme nécessaire aux traitements de 8 généraux de division, et de 20 généraux de brigade ; et veuillez remarquer qu’il n’y a pas là d’excédant ; Car, il y a effectivement 8 généraux de division et 20 généraux de brigade, tant en activité qu’en disponibilité.
M. de Puydt, rapporteur. - Je ne prends pas la parole comme rapporteur, mais simplement comme député. D’après les explications qui ont été données, il paraît que le gouvernement demande à l’article en discussion une augmentation de 28,500 fr. Il me semble qu’il convient d’accorder cette augmentation. Il peut arriver en effet, dans la situation où nous sommes, que le gouvernement soit obligé de faire passer des officiers généraux de l’état de disponibilité à celui d’activité, sans avoir le temps de présenter un projet de loi pour un crédit supplémentaire. J’appuie donc le crédit demandé.
M. Gendebien. - Si M. le ministre de la guerre donne l’assurance qu’il ne sera pas créé de nouveaux grades d’officiers généraux, et que l’augmentation demandée ne servira qu’à faire passer des officiers généraux de la position de disponibilité à celle d’activité, je l’accorderai volontiers ; mais il me semble que les explications de M. le ministre laissent du doute sur ce point, et je ne veux pas que nous arrivions, comme la Hollande, à avoir 70 officiers généraux.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Si un officier général passe de la disponibilité à l’activité, il faut que l’on trouve dans le budget le nouveau traitement auquel il a droit. Dans ce cas son traitement de disponibilité reste au trésor.
On demande si l’augmentation demandée ne servira qu’à faire passer des officiers généraux de la disponibilité à l’activité ; vous sentirez, messieurs, que l’on ne peut répondre à cette question ; en effet cela dépend du gouvernement, cela dépend des circonstances ; il faudrait savoir si, dans le cas où on aurait besoin pour l’activité d’un officier général de plus, on trouverait dans les officiers généraux disponibles un général propre à être appelé à l’activité.
Permettez-moi de me citer pour exemple ; je puis quitter le ministère de la guerre ; mon intention n’est pas de rester toujours ministre ; je suis le huitième général de division, il faut bien que dans ce cas je trouve un traitement ; car mon intention est alors de prendre le grade de général de division qui remplace celui de lieutenant-général que j’avais en France depuis 10 ans.
Si les fonds ne sont pas remplis, je le répète, ils restent au trésor. La chambre peut donc les voter sans aucun inconvénient.
M. Gendebien. - Mon intention n’est pas de déranger l’ordre des articles du budget de la guerre ; je maintiens les dépenses dans l’ordre ou elles sont indiquées ; mais la chambre ne veut pas, je crois, accorder de somme pour la nomination de nouveaux généraux. Ainsi qu’on laisse le budget comme il est ; mais que M. le ministre de la guerre déclare qu’il ne fera pas de nouvelles promotions d’officiers généraux ; alors s’il y a lieu d’augmenter le cadre d’activité, on prendra des généraux qui sont en disponibilité. Dans ce cas, d’un côté, il y aura emploi de la somme dont nous nous occupons, et de l’autre il y aura économie de la somme qui se trouve au chapitre de la disponibilité. Quant à moi, je ne ferai aucune difficulté pour accorder la somme demandée, si M. le ministre déclare qu’elle est destinée aux officiers généraux qui passeront de la disponibilité à l’activité.
M. Rogier. - Bien que je ne sois pas partisan de nouvelles promotions aux grades de généraux, il me semble que M. le ministre de la guerre ne peut pas prendre l’engagement qu’il n’y aura pas de promotions d’officiers généraux, alors que cela peut être nécessaire.
Quant à moi, je préférerais voir certains colonels nommés au grade de général que de voir certains généraux en non-activité reprendre l’activité ; car il est démontré qu’il y a des généraux en non-activité incapables d’être remis en activité. Or, il peut se présenter des circonstances telles qu’il soit nécessaire d’avoir de nouveaux généraux. D’ailleurs, dans tous les cas, ce serait restreindre la prérogative du gouvernement ; c’est une prétention que la chambre ne peut pas avoir.
M. le ministre de la guerre est informé que la chambre n’approuvera de nouvelles nominations de généraux que dans le cas de stricte nécessité. Nous devons être convaincus qu’il agira suivant ces intentions ; nous ne pouvons rien exiger de plus.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je profiterai de la question qui vient d’être soulevée pour détromper sur le nombre des promotions d'officiers généraux et supérieurs dans l’armée, nombre que l’on croit considérable. Voici le relevé des promotions faites en 1833 et 1834 :
Généraux de brigade, 2
Colonels qui commandaient depuis 2 ans des régiments avec le grade de lieutenant-colonel, 4
Lieutenants-colonels, 0
Majors, 4
Total des promotions en Belgique, 10.
Voici maintenant le relevé des promotions d’officiers généraux et supérieurs faites en Hollande en 1834 :
Lieutenants-généraux, 4
Généraux-majors, 10
Colonels, 10
Lieutenants-colonels, 6
Majors, 6.
Total des promotions en Hollande, 36.
Soyez persuadés, messieurs, que l’on ne fera des promotions que s’il y en a un besoin réel, et si le gouvernement trouve des officiers capables de remplir des fonctions plus élevées que celle qu’ils occupent. Il est indispensable que le gouvernement ait cette faculté pour entretenir l’émulation, et pour reconnaître les nouveaux services.
M. Brabant. - L’année dernière M. le ministre de la guerre avait demandé les fonds nécessaires pour la promotion de 2 officiers généraux ; comme la commission n’avait pas trouvé de motifs suffisants à ces promotions, elle a refusé les fonds demandés. Cependant ces nominations ont eu lieu ; et postérieurement, au mois d’août je crois, on vous a demandé un crédit supplémentaire pour payer ces officiers. Je pense que nous devons maintenir le cadre de l’état-major général dans des limites très restreintes. Nous ne devons pas engager indéfiniment le pays.
Dans tout Etat bien organisé, le cadre des officiers généraux est fixé par une loi. Je pourrais citer des lois de la république qui déterminent le nombre des généraux de division, des généraux de brigade ; en 1833 il a été porté en France une loi de cette nature. Veuillez remarquer qu’en France les officiers sont livrés à l’arbitraire du gouvernement. Il n’en est pas de même ici, où un militaire, aussitôt qu’il a son brevet, est, pour ainsi dire, au-dessus du gouvernement.
L’article 124 de la constitution porte :
« Les militaires ne peuvent être privés de leurs grades, honneurs et pensions, que de la manière déterminée par la loi. »
De sorte que, quand on accorde un brevet quelconque, on vous oblige à faire les fonds du traitement. Le chef du gouvernement, qui ne peut accorder aucune pension sans votre concours, vous oblige envers l’officier qu’il nomme, et cela pour toute sa vie. Je pense donc qu’il y a lieu de restreindre, dans d’étroites limites, l’allocation de l’état-major général et qu’il suffit d’accorder la même somme que l’an dernier, en ajoutant toutefois pour faire honneur aux deux brevets d’officiers généraux accordés cette année, la somme de 23,200 fr. qui représente le montant des traitements de ces officiers généraux.
M. de Brouckere. - Je ne prétends pas plus que l’honorable M. Rogier lier le gouvernement, ni empêcher de faire les promotions qu’il jugera nécessaires. Mais M. le ministre de la guerre a déclaré (ou du moins nous pouvons tirer cette conséquence de ses paroles) que le cadre actuel des officiers généraux suffisait pour notre armée. Dès lors, à quoi bon un crédit tendant à augmenter le nombre de ces officiers généraux ?
C’est pour le cas de guerre, dira-t-on ; mais pour le cas de guerre il y a des fonds spéciaux, et le ministre de la guerre pourra faire usage de ces fonds si les circonstances l’exigent.
Je demande qu’avant de nouvelles nominations on prenne les officiers généraux en non-activité, non pas, comme l’a dit l’honorable M. Rogier, s’ils sont incapables d’être mis en activité (car ceux-là il ne faut pas les appeler), mais ceux d’entre eux qui sont aptes à servir activement. Je demande surtout que l’on donne de l’activité aux officiers généraux qui ont des fonctions honorifiques, comme celles de gouverneur de la résidence, qu’on ne peut contester être purement honorifiques.
M. le ministre de la guerre a fait remarquer qu’il y avait eu peu de promotions en Belgique cette année, relativement au nombre de celles faites en Hollande en 1834, cela est vrai ; mais si on veut faire attention qu’il n’y avait eu aucune promotion en Hollande en 1831 et 1832, et que dans ces mêmes années il y a eu en Belgique un grand nombre de promotions d’officiers généraux, ou trouvera que la proportion est rétablie entre les deux pays. On aura l’explication de la grande différence indiquée par M. le ministre.
M. de Puydt, rapporteur. - Je pense que le cadre de l’état-major général et celui des différentes armes qui composent l’armée, devraient être fixés par une loi ; c’est une opinion que j’ai déjà émise. Mais si le gouvernement présentait un projet de loi pour fixer et arrêter ces cadres, on serait étonné d’apprendre combien ils sont incomplets. Bien loin que nous ayons des officiers généraux en trop nous en manquons ; et nous manquons non seulement d’officiers généraux, mais encore d’officiers d’armes spéciales, d’officiers de tous grades dans les régiments et principalement dans l’infanterie.
Je ne connais pas d’armée où il y ait moins d’officiers généraux et de colonels que dans la nôtre. Il y a des brigades commandées par des colonels, des régiments commandés par des lieutenants-colonels.
Ceci est un fait incontestable, qui dément toutes les objections que l’on adresse sans cesse au gouvernement contre le nombre de nos officiers.
Si nous jetons les yeux sur la France et que nous supposions l’armée a son maximum qui est de 500,000 hommes, c’est-à-dire, le quintuple de la nôtre, nous trouvons qu’il y a en France 400 officiers généraux, tant en activité qu’en disponibilité et à la réserve, sans compter ceux qui sont à la retraite. D’après cette proportion, nous devrions avoir 80 généraux ; or, nous n’avons que 8 généraux de division, et 20 généraux de brigade, en tout 28 officiers généraux
En Hollande, nous voyons qu’il y a 21 lieutenants-généraux et 44 généraux-majors : en tout 65 officiers généraux. Ainsi leur nombre est triple de celui des généraux de l’armée belge. Et ce nombre ne résulte pas de ce qui s’est passé lors de la séparation de la Belgique avec la Hollande, de ce que la Hollande avait été chargée d’un excédant d’officiers généraux, en raison de ce qu’elle accordait tous ces grades aux Hollandais, au préjudice des nationaux. Non, puisqu’en 1834 il y a eu quatre nominations de lieutenants-généraux, et qu’il y a eu en Hollande, depuis la révolution, 28 promotions d’officiers généraux.
Je crois donc qu’on a tort de reprocher au gouvernement un si grand nombre de promotions, et de se plaindre de l’avancement rapide qui aurait été accordé à quelques officiers. Si l’on considère que la Belgique n’est érigée en royaume particulier que depuis quatre ans, qu’en Belgique, Roi, gouvernement, armée, administration, tout a été improvisé ; que pour faire une armée on a pris (et on a bien fait) les éléments qu’on avait sous la main, on ne trouvera pas plus singulier qu’un capitaine du génie soit devenu général de brigade que de voir, comme le disait dernièrement un honorable membre, un honnête rentier devenu ministre, un avocat devenu gouverneur d’une province. Quant à moi, je trouve tout cela très bien si chacun, dans sa spécialité, est digne de la position qu’il occupe, ce que, du reste, je ne mets point en doute.
Beaucoup d’officiers de l’armée belge qui ont servi sous l’empire ont laissé en France des camarades qui ont obtenu un avancement plus rapide que le leur.
La plupart des officiers de mon grade que j’ai laissés dans l’armée française a obtenu également un avancement très remarquable ; plusieurs sont aujourd’hui colonels et généraux : je n’ai pas été étonné de cet avancement. Beaucoup d’entre nous sont restés en arrière relativement à eux.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je pense avec l’honorable M. Brabant que la fixation par la loi d’un cadre d’état-major général est nécessaire ; la proposition que je fais est en quelque sorte un commencement de cet état de choses.
Je déclare positivement que le minimum le plus restreint que l’on puisse adopter pour l’activité et disponibilité est 8 généraux de division et 20 généraux de brigade. C’est aussi pour 28 officiers généraux que je demande des fonds au budget.
M. Brabant. - Je sais bien que notre armée a besoin de généraux et que leur nombre est peut-être trop restreint. Mais ce n’est pas là la question, la question est de savoir si nous avons dans notre armée du bois dont on fait les généraux. (Hilarité.) Si ce bois est prêt à être taillé, je crois qu’il faut attendre que les événements nous fassent connaître les officiers qui méritent de passer officiers généraux. Depuis la révolution, il y a eu assez d’avancement pour satisfaire à toutes les ambitions. Si nous voyons le premier budget de la guerre présenté au congrès nous trouvons au chapitre correspondant à celui que nous discutons qu’il n’y avait au 31 mars 1831 que 5 généraux de division (aujourd’hui nous en avons 8), et 9 généraux de brigade (maintenant nous en avons 20).
- Un membre. - Mais nous n’avions pas de soldats.
M. Brabant. - Nous n’avions pas de soldats ; mais nous avions assez de généraux pour battre les Hollandais.
Maintenant on dit que si les officiers belges comparent leur situation avec celle de leurs camarades de l’armée française, ils se trouvent en arrière relativement à eux. Je crois, moi, qu’il y a un grand nombre de ces camarades de l’armée française qui sont bien loin en arrière des officiers belges.
Les documents me manquent pour faire sous ce rapport toutes les recherches nécessaires ; mais j’ai en main l’annuaire militaire de France, et j’y trouve des capitaines du génie qui ont ce grade depuis 1822, et qui sont sortis de l’école polytechnique en 1812. L’honorable M. Desmaisières m’indique ces camarades, qui a reconnus dans l’annuaire.
M. de Puydt. - Le génie a toujours fait exception. Le grade de capitaine du génie en France est le bâton de maréchal des officiers de cette arme. Cet exemple ne peut donc être cité.
M. A. Rodenbach. - Ceci est une question. Manquons-nous d’officiers généraux, oui ou non ? Si nous en manquons, nous devons voter l’augmentation proposée par M. le ministre. Si nous n’en manquons pas, nous devons la refuser. C’est simplement, je le répète, une question de fait.
- Le chiffre de 650,000 fr. pour l’article premier, état-major-général, est mis aux voix et adopté.
« Art. 2. Etat-major des places : fr. 245,556. »
M. Desmanet de Biesme. - L’honorable rapporteur de la section centrale vous a dit tout à l’heure qu’il y avait des lacunes dans la plupart des corps de notre armée. Mais assurément il n’y a pas de lacunes dans les commandants de place.
Si nous prenons pour exemple la place de Bruxelles qui est, comme vous savez, une ville ouverte, nous y trouvons un général commandant la résidence, un colonel commandant la province, un colonel commandant de place, un major sous les ordres de ce colonel et d’autres officiers encore. Je crois ce personnel beaucoup trop nombreux.
Si par des raisons politiques le gouvernement trouve convenable de mettre un général pour commander à Bruxelles, il y a un colonel de trop ; s’il juge qu’un colonel est suffisant, je ne vois pas pourquoi il y a un général. S’il place un général à Bruxelles. il pourrait en même temps commander toute la province. Il y a l’un de ces officiers qui doit être supprimé. Je ne déciderai pas si c’est le général ou le colonel. ; mais il faut que ce soit l’un ou l’autre.
Non seulement cela me paraît convenable sous le rapport de l’économie, mais encore sous celui de l’administration. C’est un fait reconnu que plus la police est divisée et moins elle a de force. Je demande si le ministre croit convenable qu’il y ait 3 officiers supérieurs pour la place de Bruxelles.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je crois inutile de faire ici le détail de l’organisation militaire relative au commandement militaire des provinces et à l’état-major des places ; cependant je rappellerai qu’il y a un officier général ou supérieur dans chaque province, transmettant les ordres à toutes les troupes qui ne font pas partie de l’armée active, inspectant les corps, passant les revues, et qui est l’intermédiaire du gouvernement vis-à-vis les officiers qui se trouvent dans le rayon qu’il commande : il y en a un pour la province de Brabant, pour celles de Namur et de Liège.
Maintenant, pour revenir au commandant militaire à Bruxelles, je conviens que c’est une place ouverte ; mais nous avons en Belgique plusieurs places de ce genre qui exigent des commandants. Bruxelles fut toujours considérée comme place de deuxième classe, et le commandant fut toujours soit un colonel, soit un lieutenant-colonel.
Vous connaissez tous, messieurs, les circonstances extraordinaires qui ont donné lieu à la nomination d’un gouverneur militaire à Bruxelles. Je conviens encore que cela n’est pas prévu dans le service ordinaire, mais cette place avait existé et le gouvernement a cru devoir la rétablir. C’est je l’avoue, une augmentation de dépense et de personnel. Il a déjà été fait une proposition concernant la place de Bruxelles ; elle a été examinée et je crois pouvoir vous assurer qu’il y aura une diminution dans les trois commandants dont il est question.
M. le président met aux voix l’article 2 de la section première du chapitre II de la section centrale dont le chiffre monte à la somme de 245,556 fr.
- Ce chiffre est adopté.
M. le président. - Nous allons passer à l’article 3 : Intendance.
M. le ministre propose une augmentation faisant monter le chiffré proposé par la section centrale primitivement de 110,398 francs, à celui de 143,789.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai une simple note à présenter à ce sujet :
1° La section centrale propose d’allouer 110,398 fr.
2° A reporter par revirement ordonné par décision d’hier, pour le traitement des membres de l’intendance employés au département de la guerre, 27,600 fr.
1/2 p. c. à déduire, 414 fr.
Reste à porter, 27,186 fr.
3° Je demande le rétablissement du traitement de l’intendant de deuxièème classe qui avait été retranché, et dont le titulaire va être mis en activité, en abandonnant sa demi-solde. Ce traitement est de 6,300 ; 1/2 p. c. 95 fr., soit 6,205 fr.
Total de l’article : 143,789 fr.
- La somme de 143,789 est mise aux voix ; elle est adoptée.
M. le président. - L’article 4, état-major particulier d’artillerie, est mis en discussion. La somme de 261,962 fr. du projet de la section centrale se trouve, par la demande de M. le ministre de la guerre, portée à celle de 287,168 fr. 05 c.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Messieurs, pour prouver que mon plus vif désir est, lorsque la chose est possible, d’alléger les dépenses de l’Etat, je propose, d’après de nouveaux calculs que je viens d’opérer sur la première demande du gouvernement, une réduction de 27 mille fr. environ, et la somme demandée par moi ne s’élève plus qu’à 260,169 fr.
- Le chiffre de l’article 4, montant à 260,169 fr. est mis aux voix ; il est adopté.
M. le président. - L’article 5 du projet de la section centrale, état-major particulier du génie, 219,810 fr., est mis en discussion.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je suis parfaitement d’accord avec la section centrale.
M. Brabant. - A l’article où nous sommes arrivés je combattrai d’abord une augmentation que j’y trouve dissimulée. C’est l’augmentation du nombre des colonels du génie. Nous avons trois colonels de cette arme, et on veut en créer quatre. C’est à cette augmentation que je viens m’opposer. Jusqu’à cette heure, nous n’avons eu que trois colonels du génie et cela est suffisant.
Il n’y a pas assez longtemps que le grade de lieutenant-colonel a été confère à celui qui n’est que titulaire pour que déjà il y ait lieu à une promotion à son égard.
J’ai à vous signaler une irrégularité choquante qui existe entre les officiers inférieurs du génie et ceux d’une autre arme qu’on peut tout naturellement lui assimiler.
Les colonels, lieutenants-colonels, majors et capitaines de première classe, sont assimilés pour le traitement aux officiers de même grade dans l’artillerie. Quant aux capitaines de deuxième classe, aux lieutenants, sous-lieutenants, ils sont beaucoup moins appointés que dans l’artillerie, puisqu’un capitaine de deuxième classe dans cette arme a 3,500 francs et qu’un capitaine de deuxième classe du génie n’a que 2,900 francs. Dans ce dernier corps, un lieutenant n’a que 2,100 fr., précisément le traitement d’un sous-lieutenant d’artillerie ; un sous-lieutenant du génie n’a que 1,690 fr. d’appointements, tandis que vous venez de voir ceux d’un sous-lieutenant d’artillerie.
L’influence des officiers du génie est trop grande pour que l’exiguïté de leur traitement ne les expose pas à l’oubli de leurs devoirs. C’est un corps trop honorable pour que ce danger fût réellement à craindre, et ce qui s’est passé sous le gouvernement hollandais ne se renouvellera pas. Mais pour obvier à tout événement qui pourrait résulter de l’injustice que je viens de signaler, je propose d’affecter une somme de 17,779 fr. pour majorer les traitements des officiers inférieurs de l’arme du génie.
M. de Puydt. - Il n’y a rien de dissimulé dans le budget de la section centrale, et pour mon compte je trouve fort étrange certaine insinuation, pour ne pas dire plus, que l’on a cherché à faire comprendre à la chambre.
Il a été proposé par M. le ministre de la guerre à la section centrale une augmentation dans le nombre des officiers du génie, et c’est pour cela que l’article 2, page 26, a été établi. Je vais donner communication à la chambre de la proposition faite par M. le ministre :
« Je vous adresse le tableau indiquant le nombre et le grade des officiers du génie, qui résulte du projet d’organisation que m’a soumis M. l’inspecteur-général de corps, et que je me propose de soumettre à l’approbation du Roi.
« Il en résultera, en le comparant avec les chiffres portés au projet de budget, une augmentation de :
« 1 colonel.
« 10 capitaines.
« 2 lieutenants.
« Mais ces grades ne seront remplis que successivement et en partie seulement en 1835.
« Ainsi, la commission, pourrait seulement majorer la différence des traitements :
« 1° D’un lieutenant-colonel qui deviendrait colonel.
« 2° D’un major qui deviendrait lieutenant-colonel.
« 3° D’un capitaine qui deviendrait major.
« 4° De 10 lieutenants qui deviendraient capitaines.
« Cela ne produira pas une dépense de plus de 7,000 à 8,000 fr., attendu le nouveau tarif du 6 septembre à appliquer aux nouveaux promus. Je vous prie d’en établir le calcul exact. »
Cette augmentation proposée par M. le ministre et qui résulte de l’organisation définitive du génie, jusqu’à présent incomplète, cette augmentation est d’autant plus nécessaire aujourd’hui, qu’on aura à faire dans le cours de l’année des travaux sur la frontière du nord, au sujet desquels il sera présenté un projet de loi. Il n’est certes personne parmi nous qui désire voir se renouveler les abus de 1817 et 1818 : sans penser que les mêmes causes amèneront les mêmes résultats, on peut cependant croire qu’avec si peu d’officiers, il ne pourra s’exercer une surveillance nécessaire, surtout lorsque seront terminées les fortifications sur la frontière méridionale de la Belgique, et il en résultera de grands mécomptes pour le trésor. D’après le rapport de l’inspecteur-général du génie, le nombre des officiers aujourd’hui de 46 sera porté plus tard à 60.
Dans notre système de défense on ne voit qu’un seul officier de cette arme dans une place de troisième classe et deux dans une place plus importante ; il y en a d’autres où il ne s’en trouve pas du tout, à Dinant, à Bouillon par exemple, et ailleurs encore.
M. le président. - La section centrale propose 219,810 fr., et M. Brabant propose une majoration à cette somme ; je demande qu’il veuille bien donner des explications à cet égard.
M. Brabant. - Voici ces explications : La somme proposée pour l’état-major du génie s’élève à 219,810 fr. Là figurent pour mémoire un lieutenant-colonel, employé au département de la guerre ; ensuite un lieutenant, également employé au même département. Je rétablis, dans l’amendement que je propose, le lieutenant-colonel et le lieutenant ; ensuite le surplus de la somme est pour porter le traitement des officiers inférieurs du génie, à partir des capitaines de deuxième classe, à celui des grades équivalents dans l’arme qui est le plus analogue, l’artillerie. J’ai un mot à ajouter pour répondre à l’honorable rapporteur. Lorsque j’ai dit qu’il existait double emploi, qu’il y avait un lieutenant-colonel, et que cependant on en avait conservé trois...
M. de Puydt. - On en avait fait trois.
M. Brabant. - S’ensuit-il de là que j’aie voulu inculper les intentions de l’honorable rapporteur de la section centrale ? cela n’est certes pas dans ma pensée. Pour en revenir aux explications commencées, je dirai que je déduis la somme proposée pour les trois classes inférieurs dont j’ai parlé, les capitaines de deuxième classe, les lieutenants et les sous-lieutenants. Je déduis ensuite les 1 1/2 p. c. ainsi que les 7,100 fr. du lieutenant-colonel attaché au département de la guerre.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je demande à faire une observation :
La section propose de réduire cet article à 219,810 fr.
Mais il faut y reporter le traitement des officiers et gardes du génie employés au ministère de la guerre, qui est de 19,870 fr. ; 1 1/2 p. c. de déduction, 298. Reste à porter, 19,572 fr.
Total de l’article, 239,382 fr.
M. Brabant. - En jetant les yeux sur la page 26 du rapport de la section centrale, et sur la page 112 du projet du gouvernement, vous voyez que le cadre est absolument le même : 3 colonels des deux côtés ; 6 lieutenants-colonels dans le projet du gouvernement ; 5 lieutenants-colonels, plus un détaché au ministère de la guerre ; 6 majors des deux côtés. La section centrale met 4 capitaines de première classe, plus un en mission diplomatique à Berlin. Le projet du gouvernement porte 3 capitaines de seconde classe ; au lieu de cela la section centrale en met 10. j’ai reporté les 7,100 fr. qui viennent au lieutenant-colonel, et j’ai calculé les moyens d’augmenter les traitements des lieutenants et sous-lieutenants.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, comme cette majoration part de la chambre, puisque l’honorable M. Brabant demande une augmentation montant à 10 ou 11 mille francs, je désirerais avant de la voter que M. le ministre nous fît savoir si elle est absolument nécessaire.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’aurai l’honneur de faire savoir à la chambre que les officiers du génie m’ont adressé plusieurs réclamations afin d’être assimilés pour le traitement au corps d’artillerie. J’ajouterai que cela a eu lieu de tout temps, sous l’ancien gouvernement et sous le régime français. Je n’avais pas pris l’initiative de cette augmentation. Mais les motifs qu’a fait valoir l’honorable M. Brabant, me déterminent à adopter sa proposition. Les officiers du génie sont très méritants, je ne vois pas de raison pour ne pas les payer au même taux que les officiers d’artillerie.
M. le président. - M. Brabant propose un augmentation de 10,000 francs pour élever les traitements des capitaines de deuxième classe, les lieutenants en premier et les sous-lieutenants du corps du génie.
M. de Puydt. - Je viens appuyer la proposition de M. le ministre de la guerre. La mesure qu’il vous propose a déjà reçu, en partie, son exécution. Depuis 1832, des réclamations ont été adressées au gouvernement par les officiers sous mon commandement ; on leur a accordé l’augmentation qu’ils réclamaient ; et elle leur a été payée sur les dépenses imprévues du ministère de la guerre. La proposition, que fait aujourd’hui le ministre, ne fera que régulariser l’allocation.
Il est étrange que les officiers du génie soient moins payés que les officiers d’artillerie et d’état-major, tandis que dans tous les pays du monde, tous ces officiers sont payés sur le même pied. En accordant l’allocation demandée, on ne fait que réparer tardivement une erreur inconcevable.
Il me reste une observation à faire, quant à la formation du tableau. M. Brabant ne m’a pas compris. J’ai dit qu’il y avait un colonel du génie au dépôt de la guerre, et trois à l’état-major particulier de cette arme ; que, par conséquent, il y avait une augmentation d’un colonel.
J’ai de plus lu la pièce par laquelle le ministre de la guerre faisait la demande de cette augmentation. Si l’honorable M. Brabant m’avait prêté une attention convenable, il n’aurait pas dit qu’on voulait dissimuler un colonel.
M. le président. - Le chiffre de la section centrale y compris le transfert est de 239,381 fr.
Celui proposé par M. Brabant est de 237,581 fr.
Je vais mettre aux voix le chiffre le plus élevé qui est celui de la section centrale.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - La section centrale a proposé le chiffre de 239,581 fr., je m’y suis rallié ; mais M. Brabant proposant une augmentation de 10 mille fr., son chiffre devrait être plus élevé que celui de la section centrale, et il résulte du calcul de M. le président qu’il y a réduction de 2 mille fr.
M. Brabant. - C’est qu’il y a une erreur de calcul, car le chiffre de la section centrale devrait être augmenté de 10 mille francs moins le traitement d’un colonel dont je demande la suppression.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - L’erreur vient de ce que l’honorable préopinant a oublié de comprendre dans son calcul les traitements de deux gardes, l’un de deuxième et l’autre de troisième classe. Le traitement du garde de deuxième classe est de 1,480, celui de garde de troisième classe est de 1,100 fr., ce qui fait la différence de 2,580.
M. le président. - La suppression du traitement d’un colonel du génie, et d’un autre côté, l’augmentation de la solde de certains officiers, portent le chiffre proposé par M. Brabant à 240,169 fr.
- Ce chiffre est mis aux voix et adopté.
Il formera l’article 5 du chapitre II de la première section.
M. de Puydt. - Je demande la parole.
Messieurs, il ne s’agit plus ici de chiffres. Plusieurs sections ont fait des observations sur les travaux proposés par le génie militaire, et ont émis le vœu qu’il fût formé un comité de génie. A cette occasion, je crois devoir communiquer à la chambre une note qui prouve l’importance de cette institution, et je prie le ministre d’y avoir égard.
Voici cette note :
« On a fait un avant-projet de canal pour l’évacuation directe dans la mer du Nord des eaux pluviales de la partie septentrionale des deux Flandres. Il est important que ce canal puisse en même temps servir de ligne de défense, et surtout couvrir le territoire situé entre Gand et Maldeghem. Il ne peut avoir cette propriété qu’en partant du canal de Terneuzen vers Zelzate ; la raison n’a pas besoin d’être développée ; il paraît que l’on n’a pas cette intention.
« L’avant-projet, présenté au Roi, fait partir ce canal du havre de Bouchante, c’est-à-dire de la digue neutre qui sépare notre territoire de la Hollande ; or, quand nous serons en guerre avec la Hollande, l’ennemi pourra à peu de frais nous inonder par la voie même qui aurait dû prévenir les inondations ; de plus, le canal sera tourné sans aucun obstacle par les troupes venant du Sas-de-Gand et de Philippine ; par conséquent, au lieu d’être une ligne de défense pour nous, il en sera une pour le pays de Cadzand. Voilà deux défauts capitaux qu’il faut prévenir ; je les ai signalés dans une note sur la défense de la frontière des Flandres et dans plusieurs autres circonstances, et je ne négligerai rien pour attirer sur cet objet l’attention qu’il mérite. »
Cette note m’a été adressée par un officier supérieur du génie sous mes ordres. S’il avait existé un comité du génie à qui on eût soumis et les travaux de défense conçus par le génie militaire et les travaux des ponts et chaussées qui ont quelque rapport avec la ligne de défense du pays, les inconvénients signalés dans la note que je viens de vous lire n’existeraient pas. Voilà pourtant un canal dont on se propose de commencer incessamment l’exécution, qui prend son embouchure sur le territoire ennemi ou à peu près. Ce canal se trouve à la disposition de l’ennemi. Au lieu d’être disposé de manière à fortifier notre ligne de défense, il l’est de manière à servir contre nous.
Je désire que le vœu émis par les sections soit entendu par le gouvernement et que le comité supérieur du génie soit établi le plus tôt possible.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai été plusieurs fois dans mes services précédents à même d’apprécier les fâcheuses collisions auxquelles peuvent donner lieu les travaux des ponts et chaussées, quand ils ne sont pas coordonnés avec le système de défense du pays. En France, beaucoup de difficultés semblables se sont présentées, et on n’y a mis fin qu’en établissant un comité composé d’officiers du corps des ingénieurs et d’inspecteurs des ponts et chaussées, qui formait la commission mixte des travaux publics. Aucun travail de quelque importance n’était commencé par les ponts et chaussées, que le génie militaire ne se fût mis d’accord avec eux sur la direction à donner aux travaux.
Je m’empresserai de me rendre au vœu exprimé par l’honorable colonel de Puydt, de voir former une commission mixte d’ingénieurs civils et militaires pour mettre d’accord avec le système de défense du pays les différents projets de canalisation du royaume.
(Moniteur n°363, du 29 décembre 1834) « Art. 1er. Garde civique : fr. 496,185. »
- Adopté.
« Art. 2. Infanterie (proposition de la section centrale, y compris le transfert de chapitre premier.) : fr. 10,903,745 fr. 25 ce.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai quelques observations à présenter sur les calculs de la section centrale.
J’avais demandé au budget 16,845,820 fr.
J’ai demandé depuis à la section :
- Pour musique oubliée, 79,238 fr.
- Pour dépenses de cantonnement, 416,769 fr.
Total, 17,371,818. fr.
Mais d’autre part j’ai proposé la réduction de 3,720 fr., 1,174,906 fr.
Reste 16,196,912 fr.
Dont pour les masses, 5,052,571 fr.
Reste pour le solde, 11,144,341 fr.
La section proposé de retranche sur le traitement des officiers, 250,000 fr.
Somme allouée, 10,894,341 fr.
La section base cette réduction sur le manque au complet en officiers de quelques grades, dont la solde serait, d’après elle, de 399,690 et que je ne trouve que de 376,430
Mais elle ne veut pas faire la déduction de la solde de quelques officiers au nombre de 30 qui sont en excédant dans quelques autres grades et dont la solde est de 102,800 fr.
Différence, 273,630 fr.
Il est vrai qu’il manquait au complet du budget 2 colonels dont les fonctions sont remplies par deux lieutenants-colonels ;
Quatre lieutenants-colonels dont les fonctions sont remplies par 4 majors.
Le gouvernement n’a pas cru devoir remplir ces emplois vacants.
Quant au nombre de 230 emplois d’officiers vacants, et qui se composent de :
2 emplois de colonels ;
4 emplois de lieutenants-colonels ;
10 emplois d’officiers d’administration du grade de capitaine et de lieutenant ;
18 emplois de lieutenant ;
176 emplois de sous-lieutenant
Total, 230.
Je maintiens ce nombre exact ; je l’ai fait vérifier de nouveau, et il est probable qu’on a fait emploi du nombre des officiers de santé qui sont compris dans les situations numériques, comme officiers.
Mais ce que je dois faire observer et ce qui est plus important, c’est que je n’ai calculé le complet du budget que sur 28 compagnies par régiment d’infanterie de ligne, et qu’il doit en exister 32, à raison de 6 pour chacun des 5 bataillons, et de 2 compagnies de dépôt.
J’ai cru pouvoir apporter cette économie dans les dépenses de 1835, lorsque j’en calculais les prévisions au mois de juin dernier, par la raison que nous n’avons que les cadres des cinquièmes bataillons, mais si on rappelle les hommes qui doivent les composer, il faudrait ajouter au complet fixé au budget :
48 capitaines,
48 lieutenants,
95 sous-lieutenants.
Total, 192 officiers.
Les besoins actuels du service exigent qu’une partie des emplois de lieutenants et sous-lieutenants soient bientôt remplis, et les événements politiques peuvent exiger qu’ils le soient tous, c’est-à-dire non seulement les 230 en question, mais encore les 192 dont je viens de parler et pour lesquels cependant je n’ai pas demandé de fonds.
Il m’est donc impossible de consentir à cette réduction, en vous donnant toutefois l’assurance que les fonds qui ne seront pas employés ne pourront avoir aucune autre destination que celle qui lui est assignée.
M. de Puydt, rapporteur. - En consultant les situations des corps d’infanterie, il a été constaté qu’il manquait au complet du nombre 360 officiers de tout grade. J’ai pris à cet effet, des informations au ministère de la guerre, et on m’a fourni des renseignements desquels il résulte que le nombre des officiers manquants n’est que de 230. Cette différence, d’après les explications qui m’ont été données depuis le rapport, vient de ce que, dans les situations des corps, on considère comme manquant au complet les officiers qui doivent faire partie des 5èmes bataillons, dans la supposition que ces bataillons auraient 6 compagnies, tandis qu’ils n’en ont réellement que deux.
L’erreur de la section centrale vient de ce qu’elle a consulté l’état de situation au lieu de l’état de formation. Mais toujours est-il que si le nombre des officiers manquants n’est pas de 360, il est au moins de 250, ce qui présente un total de dépense de 399,690 fr. en trop. La section centrale a cru devoir proposer une réduction de 250 mille fr., laissant environ 150 mille fr. pour remplir certaines vacances, si le besoin du service l’exige.
D’après ce que vient de dire le ministre, il y aurait, d’un autre côté, trente officiers en trop, dont la solde diminue l’excédant de 399 mille francs. A combien monte cette solde ?
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - A 102 mille francs.
M. de Puydt, rapporteur. - L’excédant serait encore d’un peu moins de 500 mille fr. Il me semble que sur cette somme on peut encore opérer une réduction de 250 mille fr., en laissant une certaine latitude au gouvernement pour remplir les vacances auxquelles il peut être indispensable de pourvoir.
M. le président. - M. le ministre propose le chiffre de 11,153,745 fr. 25 c.
La section centrale propose celui de 10,903,145 fr. 25 c.
- Le chiffre proposé par le ministre est mis aux voix. Il n’est pas adopté.
Celui de la section centrale est adopté et formera l’article 2 de la section II du chapitre II.
« Art.3. Cavalerie : fr. 3,824,964. »
M. Jadot. - Comme je ne vois aucun chapitre pour les remontes, je voudrais savoir avec quel crédit M. le ministre se propose de les payer. S’il fallait mettre l’armée sur le pied de guerre, nous aurions nécessairement besoin de chevaux.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Il n’y a effectivement aucun fonds au budget pour la remonte de la cavalerie et de l’artillerie. Si l’armée doit être mise sur le pied de guerre, j’aurais besoin de 535 chevaux pour l’artillerie. Cela entre dans les prévisions du budget supplémentaire que j’aurai l’honneur de présenter à la chambre dés que le budget ordinaire sera voté, et que la subvention extraordinaire aura été sanctionnée.
M. Jadot. - Je demanderai, en cas de présentation du budget supplémentaire, que toutes les pièces relatives aux adjudications et soumissions soient remises à la section centrale.
- Le chiffre de 3,824,694 fr. formant l’article 3, cavalerie, est mis aux voix et adopté.
« Art. 4 Artillerie : fr. 2,442,497. »
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - La section centrale, après avoir vérifié les différentes bases des prévisions du budget, s’est trouvée d’accord avec moi sur le chiffre de 2,517,000 fr. Mais ensuite elle l’a réduit à 2,442,000 fr., différence 75,000 fr. Dans les développements de son rapport, la section centrale dit que ces 75,000 fr. pourront être économisés sur le traitement des officiers. Je dois dire à la chambre que l’insuffisance des troupes d’artillerie, et surtout d’artillerie de siège, se fait vivement sentir. Sous peu je devrai m’occuper de l’organisation d’un quatrième bataillon d’artillerie de siège.
Il manque à la vérité quelques officiers pour mettre les batteries au grand complet ; mais nous allons avoir au mois de mai prochain une promotion d’élèves d’artillerie qui sortent de l’école militaire, et une promotion de sous-officiers reconnus capables de passer officiers d’artillerie. De cette manière la plus grande partie des vacances seront complétées.
Comme je serai dans la nécessité d’augmenter les troupes d’artillerie de siège pour placer des batteries dans les places fortes qui en ont besoin, je prie la chambre de ne pas admettre la réduction proposée.
M. le président. - M. le ministre demande que le chiffre de l’article 4 soit porté à 2,517,497 fr.
M. de Puydt, rapporteur. - La réduction proposée par la section centrale était de 75,000 fr. ; elle avait été calculée d’après le nombre des troupes de l’artillerie et de son état-major. Je dois dire que la diminution de 27,000 fr. votée à l’article de l’état-major se trouvait comprise dans la réduction de 75,000 fr. proposée par la section centrale. La réduction proposée par la section centrale est donc maintenant seulement de 48,000 fr.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Ainsi que vient de le dire l’honorable rapporteur, la différence entre la proposition de la section centrale et celle du gouvernement se trouve réduite à 48,000 fr. Mais je suis obligé de demander l’allocation de cette somme, parce que je serai obligé incessamment d’augmenter l’artillerie de siège. Cette somme est absolument nécessaire pour cette augmentation.
- Le chiffre de 2,517,497 francs est adopté pour l’article 4, artillerie.
« Art. 5. Génie : fr. 311,541. »
- Adopté.
« Art. 6. Gendarmerie, 1,420,000. »
M. d'Hoffschmidt. - Je vois dans le rapport de la section centrale qu’une section a demandé pourquoi on maintenait le grade de major de gendarmerie dont on peut se passer. C’est une économie que l’on pourrait très bien faire sans nuire à ce service. L’on nommerait alors les majors au commandement d’une compagnie. Il y a à Bruxelles un colonel, deux lieutenants-colonels et deux ou trois majors de gendarmerie. A quoi servent ces officiers puisqu’il y a un capitaine dans chaque province ? On pourrait faire commander plusieurs compagnies par les lieutenants-colonels et majors. L’on réduirait ainsi le nombre de capitaines à 7 au lieu de 9. On obtiendrait ainsi une économie de 20 à 25,000 fr. sans nuire aucunement au service.
On me fera observer que si on supprimait le grade de lieutenant-colonel, cela ôterait la filière nécessaire à l’avancement. Je ne propose point cette suppression. Je propose seulement de réduire le nombre des capitaines, en laissant les lieutenants-colonels et majors.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Le motif qui m’a déterminé à rétablir le grade de lieutenant-colonel est que, dans tout corps militaire organisé, il faut qu’il y ait la filière des grades établie pour l’avancement. Je vous prierai de remarquer que s’il y a un lieutenant-colonel, il n’y a plus que 2 majors au lieu de 3. La différence n’est donc que du traitement de major à celui de lieutenant-colonel.
Les fonctions des majors consistent à commander 3 compagnies et à inspecter la gendarmerie dans 3 provinces. Ils sont obligés à 3 mois de tournée, ils centralisent le service et rendent compte au chef de corps. Vous voyez donc qu’ils ont un but d’utilité.
Je ferai observer que le nombre des officiers de gendarmerie n’est pas très considérable puisqu’il n’est en tout que de 42. Je pense donc que la chambre doit maintenir les traitements pour le cadre de la gendarmerie tel qu’il est proposé.
M. de Puydt, rapporteur. - Je crois que toute proposition qui tendrait à modifier actuellement le cadre de la gendarmerie serait prématuré. Puisque la constitution a prescrit l’organisation de la gendarmerie par une loi spéciale, jusque-là il y a lieu de conserver la gendarmerie telle qu’elle est, d’autant plus qu’on n’a qu’à se louer de la manière dont elle remplit son service.
Je suppose que, pour faire une économie, on mette les majors à la tête d’une compagnie, c’est-à-dire qu’on en fasse en quelque sorte des capitaines ; alors que fera-t-on des capitaines ? On en fera donc des lieutenants, et ainsi de suite. Les grades sont garantis par la constitution. Il me semble donc que vous ne pouvez pas destituer des officiers qui remplissent bien leur service. Je pense que nous devons passer outre au vote sur l’article en discussion sans nous arrêter davantage à cette observation.
M. d'Hoffschmidt. - Je n’ai pas proposé d’amendement ; ce sont simplement des vues que j’ai voulu soumettre à M. le ministre de la guerre, et je lui ferai remarquer que je suis entièrement d’accord sur ce point avec un honorable officier supérieur de gendarmerie, avec lequel j’ai eu par hasard l’occasion de m’entretenir de ces questions de service. Il pense comme moi que les majors qui commandent dans 3 provinces sont une véritable superfluité puisqu’il y a un capitaine dans chaque province.
L’honorable rapporteur nous dit : Que ferez-vous des capitaines ? Vous n’en ferez pas des lieutenants, vous ne pouvez pas les destituer. Mais puisqu’il manque des capitaines dans la cavalerie régulière, pourquoi n’enverrait-on pas dans les régiments de cavalerie les capitaines de gendarmerie ? Ils pourraient être très utiles.
D’ailleurs il peut y avoir des vacances par extinction dans les emplois de capitaines. C’est alors que je demande que le commandement des compagnies soit confié aux majors et que ces derniers emplois soient supprimés. Au reste, je le répète, je ne propose pas d’amendement. Ce sont des vues que j’ai voulu soumettre à l’avance, pour qu’elles soient prises en considération lorsqu’il s’agira d’organiser la gendarmerie.
- L’article 6, gendarmerie, 1,420,000 fr. est mis aux voix et adopté.
« Art. 7. Partisans : fr. 219,717. »
- Adopté.
« Art. 8. Ambulances : fr. 280,762. »
- Adopté.
M. Gendebien. - Je n’ai pas voulu interrompre la chambre dans le vote des chiffres qu’elle vient d’adopter. Mais je recommande à M. le ministre de la guerre un objet important. Ce sont les officiers de partisans qui ont rendu des services au pays et qui sont dans une position précaire jusqu’à la paix, Tous ces officiers, tous ceux au moins que je connais ; et j’en connais plusieurs, méritent à tous égards d’être placés.
Ce sont des jeunes gens qui se sont dévoués au pays depuis le commencement de la révolution, et leur avenir n’est pas assuré. Ils voient des officiers qui ne sont au service que depuis trois ou quatre ans avancer en grade et avoir une position définitive, tandis qu’eux n’ont aucune position. Je recommande donc à M. le ministre de veiller aux intérêts des officiers de partisans. (Appuyé.)
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Il est vrai que 145 et tant d’officiers ont été admis seulement pour la durée de la guerre. Mais j’avais recommandé spécialement, dans les dernières inspections, qu’on me fît un rapport particulier sur chacun d’eux.
J’ai comparé ces rapports aux notes de l’inspection précédente. J’ai remarqué avec plaisir que beaucoup de ces officiers ont une conduite très régulière. Mon intention formelle est d’assurer très prochainement la position de ceux qui s’en sont rendus dignes par leurs bons services, leurs capacités et leur bonne conduite. Très prochainement, un arrêté du Roi conférera des brevets à ces officiers.
M. Gendebien. - Je recommanderai également à M. le ministre de la guerre les officiers des 5èmes bataillons qui sont dans la même position que les officiers de partisans. J’espère que sa justice s’étendra sur eux.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Les officiers des 5èmes bataillons sont compris dans le travail relatif aux officiers de partisans. (Bien ! très bien !)
« Art. 1er. Masse de pain : fr. 2,114,938. »
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’avais d’abord porté le prix de la ration de pain à 11 1/2 c. comme l’année dernière ; mais voyant le prix des grains augmenter, je l’ai porté à 13 c. Il résulte des adjudications qui ont été passées dans toutes les places de garnison que le terme moyen de ces adjudications est juste de 13 centimes. La section centrale a adopté le chiffre proposé et qui est le produit de 13 c. multiplié par le nombre des hommes.
- L’article premier est mis aux voix et adopté.
« Art. 2. Masse de fourrages : fr. 5,979,934. »
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Ici mes prévisions ne se sont pas réalisées. J’avais calculé le prix des rations de fourrages pour la cavalerie légère à 1 fr. 15 c. ; et pour la grosse cavalerie à 1 fr. 25 c. ; c’était le terme moyen du prix des fourrages dans les 18 derniers mois ; mais la hausse du prix des fourrages a porté le résultat des adjudications à un taux très élevé, savoir : à 1 fr. 25 pour la ration de cavalerie légère et à 1 fr. 37 c. et demi pour la ration de grosse cavalerie.
Ce résultat a élevé de 271,000 fr. la somme que j’avais d’abord portée au budget. La différence eût même été considérable si l’on avait suivi le résultat des adjudications ; mais après les adjudications j’ai obtenu une réduction du consentement des adjudicataires. Cette augmentation de 271,000 fr. est comprise dans la somme de 5,979.934 fr. proposée par la section centrale. Je suis d’accord avec la section centrale sur cet article et les 5 suivants.
- L’article 2, masse de fourrages, 5,979,934 fr., est adopté.
« Art. 3. Masse d’habillement et d’entretien : fr. 3,551,228. »
- Adopté.
« Art. 4. Masse de harnachement, traitements et ferrage : fr. 352,078. »
- Adopté.
« Art 5. Masse de renouvellement du harnachement et de buffleterie : fr. 191,549. »
M. Brabant. - Je me suis informé ce matin de l’approvisionnement existant dans les magasins de divers articles compris dans la masse de renouvellement du harnachement et de la buffleterie. J’ai acquis la certitude que la somme demandée pouvait être réduite à la moitié. Je propose donc d’allouer seulement 100.000 fr.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Ainsi que l’a vérifié l’honorable M. Brabant, il existe dans les magasins une grande quantité de harnachement et de buffleterie ; comme de plus ils ont été très bien entretenus, je peux consentir à la réduction proposée parce qu’alors les corps ne seront pas obligés de faire d’achats de ce genre. Ainsi, d’après la situation des magasins, je consens à ce que l’article soit réduit à 100,000 fr.
- L’article 5 est adopté avec le chiffre de 100,000 fr.
« Art. 6. Masse de casernement des hommes : fr. 650,749. »
M. Brabant. - Je ne viens pas proposer de réduction sur cette somme ; je viens seulement éveiller la sollicitude du gouvernement sur son emploi. Depuis la révolution il a été dépensé environ 4 millions pour achat d’objets de literie pour la troupe. Sans doute cette somme aurait dû suffire pour le couchage de 80,000 hommes ; eh bien, il n’en a pas été ainsi.
A défaut d’effets de couchage on est obligé de cantonner les troupes et de les loger chez l’habitant. Vous pouvez calculer quel surcroît de dépense c’est pour le trésor. J’appelle l’attention de M. le ministre de la guerre sur cet objet, tant pour le bien-être du soldat que dans l’intérêt du trésor.
M. de Puydt, rapporteur. - J’abonde dans le sens de l’opinion émise par M. Brabant, avec d’autant plus de raison que, lors de la discussion du crédit supplémentaire demandé par le ministre de la guerre en août dernier, j’ai fait une première observation sur cet objet en annonçant l’intention de la reproduire dans l’occasion actuelle, lors de l’examen du budget de 1835.
Le gouvernement est à mon avis impardonnable d’avoir toléré jusqu’à présent l’état de choses dont on se plaint : tous les 15 jours des rapports sont adressés au ministre de la guerre par les chefs de corps ; ces rapports rendent compte de toutes les parties du service ; discipline, instruction, état sanitaire, tout y est passé en revue ; ils contiennent aussi des observations sur le casernement ; j’ai examiné ces rapports à différentes époques et j’y ai toujours trouvé les mêmes plaintes ; dans la plupart des garnisons, les soldats n’ont pour toute literie que de simples paillasses, et quelquefois moins de couvertures que n’en accorde le règlement, c’est-à-dire qu’au lieu d’avoir ce qu’on appelle des fournitures entières, ils n’ont que de demi-fournitures : cependant on paie, pour ce couchage, 4 centimes par homme et par jour. Je ne donnerai pas lecture des différents rapports auxquels je fais allusion ; il me suffit de dire que la manière dont les soldats sont traités est intolérable, et qu’il importe de mettre promptement fin à ce honteux abus, dans l’intérêt de l’hygiène du soldat.
Il est inconcevable que l’Etat paie plus de 600,000 fr. par an pour faire coucher nos soldats sur la paille, et j’insiste particulièrement pour que le gouvernement s’occupe d’un système plus convenable et plus digne du pays et des sacrifices qu’il fait.
M. A. Rodenbach. - Je crois qu’un bon système de casernement est une chose très importante, et je partage sur ce point l’avis de l’honorable préopinant. Je ne me flatte pas assurément d’avoir des connaissances stratégiques ; je crois cependant pouvoir dire qu’il serait d’une bonne politique d’établir plusieurs casernes sur notre frontière du Nord. Le soldat serait mieux logé que chez l’habitant. La défense du pays serait en quelque sorte mieux garantie ; et vous savez que nous devons être sur nos gardes.
Les cantonnements coûtent plus cher que les casernements. En France on avait, du temps des alliés, construit des casernes pour les y loger, et, à leur départ, on a vendu ces casernes dont on a fait des fabriques. Je crois donc que si nous avions des casernes sur les frontières du Nord, cela serait utile. Je pense qu’il serait avantageux d’en avoir dans la Campine.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai toujours pensé que l’on devait fournir aux soldats le meilleur couchage possible. J’avais vu quelques casernes où les soldats étaient mal couchés et qui nuisaient à leur santé. Je fis rédiger, après cette inspection, un projet pour les objets de casernement.
Nos places fortes et garnisons présentent de quoi mettre 60,000 hommes. Plusieurs villes firent observer qu’elles avaient la propriété de lits militaires dont elles tiraient avantage ; je suis entré en négociation avec les régences de ces villes, telles que Gand, Bruges, Louvain, Audenaerde, Alost ; j’ai obtenu d’elles qu’elles établissent de meilleurs couchages.
Dans les villes où les régences ne fournissent rien, à Bruxelles, à Mons par exemple, c’est sur le fonds de 4 centimes par homme et par jour que je fais acheter les objets nécessaires. Je dois vous dire que dans plusieurs villes il y a en de grandes améliorations, pas encore cependant au point où je les désirerais. Je compte encore m’occuper incessamment de cette partie importante du service.
M. le président. - Je vais mettre aux voix l’article 6.
- Le chiffre de 650,749 fr. est adopté.
M. le président. - Nous allons passer à l’article 7 auquel M. le ministre s’est rallié.
M. Brabant. - Je demande la parole pour obtenir encore quelques explications de M. le ministre de la guerre. Depuis quelque temps il est question de construire des écuries pour les régiments de cavalerie. Cela sera d’autant plus utile que cela fera cesser des abus criants. Mais je ne vois pas figurer au budget la somme nécessaire. Je voterai bien volontiers les sommes demandées à ce sujet, d’autant plus qu’en soulageant l’habitant, il fera cesser le grief le plus grave. Vous savez, messieurs, quels différends ont eu lieu entre l’administration dont j’ai l’honneur de faire partie et le ministère de la guerre. Trois ans de la fausse dépense occasionnée par un surcroît de 55 mille fr., résultat des différends qui existaient entre cette administration et le ministère de la guerre, eussent permis d’avoir des casernes permanentes, de soulager les habitants et de leur laisser le plus sacré de leurs droits, l’inviolabilité de domicile. J’appelle sur cela l’attention de la chambre. On ne dira pas que je prêche pour ma paroisse puisqu’il n’y a plus de cantonnements dans la province de Namur, et qu’ils se trouvent transportés dans le Hainaut.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Des plaintes réitérées m’étant parvenues de différentes communes où les besoins du service m’avaient forcé d’envoyer des cantonnements, j’ai fait un travail à ce sujet, et j’ai calculé que chaque tête de cheval revenait à 132 francs et que nous pourrions avoir des écuries en addition à celles qui existent déjà et dans les villes où il n’en existe pas. J’arriverais au moyen de mettre à l’écurie 4,000 chevaux.
En conséquence, j’ai envoyé des officiers du génie et de cavalerie dans toutes les villes où ces constructions étaient nécessaires, et j’ai appris qu’elles reviendraient à 190 fr. par tête de cheval. Ainsi vous voyez que les 132 fr. dont j’ai parlé plus haut, formeraient plus de moitié. J’ai pensé qu’il fallait que les régences, qui profiteraient de ces constructions, y contribuassent ; j’ai trouvé les régences assez bien disposées, elles m’ont offert des terrains. La ville de Louvain en a offert un où pourraient être mis 600 chevaux. La dépense de cette construction s’élèverait à 112,000 fr., et la ville donne 50,000 fr., de manière qu’avec 62,000 fr. on bâtirait une écurie. Ce qui a eu lieu à Louvain, a eu également lieu à Bruges, à Audenarde, à Alost, à Malines. On va mettre la main à l’œuvre, et j’espère qu’au printemps prochain les constructions seront terminées.
M. Desmanet de Biesme. - J’applaudis aux dispositions de M. le ministre de la guerre ; mais l’exécution de ses intentions demande un certain temps, et peut-être les constructions ne seront-elles pas terminées pour l’époque où on paraît l’espérer.
Ce que je ne comprends pas c’est qu’on laisse des écuries entièrement sans chevaux, quand on pourrait les y placer ; à Namur par exemple le prétexte donné par les officiers de cavalerie était que les chevaux devaient être séparés, par ordre supérieur, et qu’à Namur on ne pouvait les placer que sur un rang. Quelle fut notre surprise de voir plus tard que les chefs faisaient mettre les chevaux sur deux rangs, afin, disaient-ils, qu’ils n’eussent pas froid. J’en ai parlé à M. le ministre qui, sur un rapport qu’il se fit faire, vit que mes réclamations étaient exactes.
Je n’ai pas besoin de m’étendre sur tous les inconvénients que causent les cantonnements. Je m’étonnais seulement que M. le ministre fût plus disposé à céder à quelques exigences des officiers qu’à des réclamations de députés, sachant qu’il est à Namur des écuries qui peuvent contenir un grand nombre de chevaux. Je suis donc charmé de ce que je viens d’entendre dire à M. le ministre.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je demande la parole relativement à ce qui vient d’être dit de Namur par l’honorable préopinant. Il est vrai qu’il y a eu des discussions sur la capacité réelle de l’écurie qui s’y trouve. J’y ai envoyé un de mes aides-de-camp et j’ai vu que ce m’avait dit l’honorable député était vrai, mais qu’on y pouvait placer seulement 250 à 270 chevaux. En conséquence, j’ai donné l’ordre que les escadrons qui doivent changer de garnison au 1er janvier prochain, fussent dirigés sur ce point.
M. le président. - Je vais mettre aux voix l’article 7, dont le chiffre est de 138,130 fr.
- Ce chiffre est adopté.
M. le président. - On passe à l’article 8.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai quelques observations à faire sur cet article 8. La section centrale a réuni dans le même article les frais d’administration des corps et les frais de bureau, qui d’abord étaient l’objet d’un article particulier. Je ne m’oppose pas à cette réunion. Le total des frais de ces deux parties se monte à la somme de 480,330 fr. La section centrale n’alloue que 390,380. J’en appelle à la section centrale aujourd’hui mieux éclairée, et je demande une augmentation de 90 mille francs.
M. de Puydt, rapporteur. - Des observations qui m’ont été faites depuis avant-hier, il résulte que l’allocation proposée par la section centrale serait trop minime. Mais je crois que sur les sommes demandées par M. le ministre, on pourrait opérer des réductions.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je tiens ici tout le détail des frais dont il est question, et d’après cet examen toute la réduction qu’il me serait permis de faire serait une somme de 20,000 fr. Je demande en conséquence qu’au lieu de 480,000 fr la somme de 460,000 fr. soit adoptée.
M. le président. met aux voix le chiffre de l’article 8 montant à 460,000 fr.
- Il est adopté.
M. le président. - On va passer à l’article 9. M. le ministre s’est rallié à la proposition de la section centrale dont le chiffre est de 111,000 fr.
- Ce chiffre est mis aux voix et adopté.
M. le président. - L’article 10 est mis en discussion.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Non seulement je suis d’accord avec la section centrale sur cet article 10, mais encore sur ceux 11, 12, 13, 14 et 15. Il n’y aura que sur l’article 16 que j’aurai à faire d’assez nombreuses observations.
- L’article 10 pour transports généraux et autres, montant à 126,500, et l’article 11 pour frais de découcher de gendarmes montant à 65,000 fr., sont mis aux voix et adoptés.
L’article 12, 10,000 fr. pour engagements et réengagements, est mis en discussion et adopté.
M. Brabant. - Je demande la parole pour un simple changement de rédaction. C’est d’allouer les 10,000 fr. pour réengagements et de supprimer engagements et...
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je me rallie bien volontiers à l’observation de l’honorable M. Brabant que je trouve fort juste.
- L’amendement de M. Brabant est adopté.
L’article 13, chauffage et éclairage des corps de garde, dont le chiffre est de fr. 150,000 ; l’article 14, frais de police, fr. 30,000, et l’article 15, indemnités de logement et nourriture, fr. 103,988, sont successivement mis aux voix et adoptés.
L’article 16, cantonnements, dont le chiffre est de 1,064,340 francs, est mis en discussion.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Messieurs, il se trouve toujours à côté du désir d’innover le danger de détruire ce qui existe, ou du moins d’y porter une perturbation fâcheuse dont on ressent plus tard les effets.
Je doute encore que la nouvelle forme du budget remplisse les conditions que l’on croit qu’il remplira, et un essai d’un an peut être tenté ; on en retirera quelque expérience ; mais cette nouvelle forme entraîne déjà un revirement de fonds dont je vais vous exposer les motifs.
Les frais résultant des cantonnements ont été calculés à raison de 36 centimes par homme et par jour pour une somme de 1,064,340 francs, dans la prévision que le budget resterait dans sa forme primitive : s’il ne doit pas en être ainsi et que cette allocation doive former un article distinct, il est indispensable de porter l’indemnité dont il s’agit, non à 36 c. par homme et par jour, mais à raison de 74 c., qui est le taux à payer à l’habitant ; en réduisant les journées de cantonnement à raison de 21 c. sur la solde, 13 centimes sur le pain, et 4 centimes sur le casernement, ces 38 centimes défalqués des 74 centimes, réduisent bien à 36 centimes le surcroît de la dépense.
Si l’on n’opérait pas ce revirement, il en résulterait que lorsque l’on paierait par exemple l’indemnité de 1,000 journées de cantonnement à une commune s’élevant à 740, la quittance devrait l’imputer sur 4 articles différents, savoir sur les articles :
- cautionnement, fr. 360 ;
- solde, fr. 210 ;
- pain, fr. 130 ;
- casernement, fr. 40.
Total égal à fr. 740.
Il en résulterait encore, outre la perturbation sus-indiquée, que les dispositions du règlement en ce qui concerne la formation des feuilles de revues trimestrielles devraient être changées : maintenant les journées avec logement et nourriture chez l’habitant sont calculées et portés séparément sous une déduction de 21 c. sur la solde : si le revirement susmentionné n’avait pas lieu, il faudrait calculer les journées avec logement et nourriture avec la solde intégrale, plus avec pain et avec indemnité de casernement, ce qui ne permettrait plus de distinguer les diverses positions dans lesquelles les troupes se sont trouvées.
Pour obvier à cet inconvénient, il faudrait donc déduire pour l’infanterie pour 3,400 hommes :
- 1° De la solde, 1,241,000 journées à 21 c. : fr. 260,610
- 2° Du pain, 1,241,000 journées à 13 c. : fr. 161,339 ;
- 3° Du casernement, 1,241,000 journées à 4 c. : fr. 49,640.
Total : fr. 471,580.
Pour la cavalerie. 2,800 hommes pour 6 mois :
- 511,000 journées de solde à 21 c. : fr. 107,310 ;
- 511,000 journées de pain à 13 c., fr. 66,430 ;
- 511,000 journées de casernement à 4 c., fr. 20,440
Total : fr. 194,180.
Pour l’artillerie, 1,400 hommes :
- 511,000 journées de solde à 21 c. : fr. 107,310 ;
- 511,000 journées de pain à 13 c., fr. 66,430 ;
- 511,000 journées de casernement à 4 c., fr. 20,440
Total : fr. 194,180.
Pour les sapeurs-mineurs, 500 hommes :
182,500 journées de solde à 21 c. : fr. 38,325
182,500 journées de pain à 13 c., fr. 23,725 ;
182,500 journées de casernement à 4 c., fr. 7,300.
Total : fr. 69,350
Récapitulation :
A reporter à l’article cautionnement de :
L’infanterie, fr. 471,580.
La cavalerie, fr. 194,180.
L’artillerie, fr. 194,180
Les sapeurs-mineurs, fr. 69,350
Total, fr. 929,290.
Laquelle somme doit être déduite des chapitres et articles dont le détail suit, savoir :
Chap. Il. Sect. 2.
Art. 1er. Solde d’infanterie : fr. 260,610.
Art. 2. Solde de cavalerie : fr. 107,310.
Art. 3. Solde d’artillerie : fr. 107,310.
Art. 4. Solde du génie : fr. 38,325.
Chap. Il. Sect. 3.
Art. 1er. Masse de pain : fr. 317,915.
Art. 2. Casernement : fr. 97,820.
Total égal à l’augmentation faite à l’article cautionnement : fr. 929,290
Ce n’est pas, messieurs, ainsi que vous devez bien le concevoir, une augmentation de dépenses dont il s’agit mais d’un revirement de fonds que je demande pour imputer à un seul et même article du budget la dépense totale résultante du logement et de la nourriture des troupes chez l’habitant.
M. Brabant. - La proposition du ministre de la guerre nous obligerait à revenir sur tous les articles que nous avons votés. On pourrait, ce me semble, obtenir le résultat qu’il désire en donnant une autre rédaction à la proposition qu’il vient de nous soumettre. Ce serait de dire :
« Le ministre est autorisé à transférer des articles tels et tels (qu’il a énumérés) à l’article 16, ce qui est relatif au casernement, jusqu’à concurrence de … sur chaque article. »
M. de Puydt, rapporteur. -Les inconvénients qui se présentent ici n’auraient pas lieu, si les explications dans lesquelles le ministre vient d’entrer avaient été données à la section centrale.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Me réunissant à la proposition de M. Brabant et pour ne pas revenir sur tous les chiffres votés, je propose d’insérer dans la loi un article additionnel portant : « Le ministre est autorisé à faire le transfert des articles (indiqués dans la note) à l’article 16 du chapitre III. »
M. le président. - Je vais alors mettre aux voix le chiffre 1,064,340 fr. proposé pour les cantonnements.
- Ce chiffre est adopté.
« Art. 1er. Administration centrale : fr. 25,250. »
M. A. Rodenbach. - J’aime à croire que cette fois je serai plus compétent. Je vais parler des soldats aveugles. Si on doit croire les journaux, sur les 57 ophtalmiques confiés aux soins du sieur Lubin, la moitié seraient guéris et les autres seraient des cas plus graves, la maladie étant arrivée à l’état chronique. D’un autre côté, si on doit ajouter foi aux journaux de médecine et notamment à l’Observateur médical, sur les 57 ophtalmiques, aucun n’aurait été réellement guéri par le spécifique du docteur Lubin ; ce spécifique aurait au contraire aggravé la maladie. Je crois qu’il y a exagération de part et d’autre, de la part de ceux qui préconisent ce remède, comme de la part de ceux qui le déprécient.
Je prierai M. le ministre de la guerre de nous donner quelques explications sur les moyens employés pour arrêter ce fléau et sur les résultats obtenus.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai porté mon attention sur l’ophtalmie, et je n’ai négligé aucune mesure pour diminuer les ravages que ce fléau exerce dans notre armée. Je me fais rendre compte de la marche de la maladie, et des résultats obtenus par les mesures employées. Sur la demande d’un grand nombre de personnes, j’ai fait établir un petit hôpital dont j’ai donné la direction à M. Lubin. Mais, avant de vous faire connaître le résultat de ses soins, je vais vous donner le mouvement de la maladie depuis six mos. J’en ai fait dresser un tableau.
Il existait au 1er avril, dans les hôpitaux militaires du royaume, 368 militaires atteints de l’ophtalmie à des degrés différents. Il est entré dans les hôpitaux, depuis le 1er avril jusqu’au 31 octobre, 5,867 malades : en tout 6.235. Ce chiffre est effrayant. Mais je me hâte de dire qu’il est moindre que les années précédentes.
Il est sorti pendant cet intervalle de temps 2,902 hommes complètement guéris ; 397 ont été évacués sur d’autres hôpitaux, 2,183 ont été envoyés en permission ou en congé, ne conservant plus de des granulations palpébrales qui n’exigeait que du repos pour leur guérison ; 94 ont été envoyés aux dépôts de leurs corps pour être proposés pour la réforme ou la pension ; 93 ont été renvoyés avec perte d’un oeil, et 85 ont perdu les deux yeux.
Vous voyez que le nombre des aveugles est de 1/60ème des individus attaqués.
Les officiers de santé ont redoublé de soins, et le fléau a progressivement diminué de mois en mois. Le mois d’octobre présentait déjà une différence sensible sur le mois d’avril. J’espère qu’à force de soins on parviendra, sinon à éteindre totalement, du moins à atténuer considérablement les effets de cette terrible maladie.
Quant à M. Lubin, j’ai placé près de lui un officier de santé en qui j’avais confiance, un major qui s’était occupé d’ophtalmie, et une personne qui avait été frappée de cette maladie et avait eu à se louer du traitement du sieur Lubin. Ces trois personnes forment une commission qui suit le service du sieur Lubin. Je leur ai demandé un rapport circonstancié. Depuis le 1er septembre, toutes les trois m’ont fait des rapports particuliers qui diffèrent sur les résultats.
Voici, après avoir lu ces trois rapports, l’opinion impartiale que je me suis formée.
Tout en rendant la justice qui est due, à si juste titre, au dévouement, à la philanthropie de M. Lubin, j’ai pu me convaincre moi-même que les effets de son traitement n’ont pas été aussi satisfaisants que l’on pouvait s’y attendre, et il n’a pas présenté des avantages réels sur ceux qui sont suivis dans les hôpitaux.
Dans les premiers temps du traitement des ophtalmistes confiés ses soins, l’amélioration a été rapide, mais il y a eu une réaction dont la cause peut être attribuée à l’infection du local peu étendu où ces malades sont traités.
J’attendrai le rapport que j’ai demande à la commission qui, je l’espère, se mettra d’accord sur les résultats obtenus, et j’aurai l’honneur de vous en rendre compte.
M. A. Rodenbach. - Je sais les louables efforts que fait le gouvernement pour débarrasser entièrement notre armée du fléau dont il s’agit ; je le conjure d’y continuer ses soins ; car c’est un grand malheur que la cécité ; si l’on ne me croit pas, que l’on questionne les 2,000 Belges aveugles qui avant leur malheur faisaient partie de l’armée belge.
Ces 2,000 malheureux n’ont par jour que 74 centimes de pension. Je rappelle à M. le ministre de la guerre qu’il avait promis de soumettre à la législature un projet tendant à leur donner 1 fr. par jour. Je demande que ce projet soit présenté. Je demande qu’on améliore la position de ces hommes qui auraient affronté le combat sans pâlir, et qui, maintenant privés de voir la lumière, en sont doublement malheureux en ce qu’ils sont à charge à leur famille. Je demande que leur pension soit portée à 1 fr. par jour.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’avais promis, en effet, de porter à 1 fr. par jour la pension militaire des aveugles ; j’espère que ce projet pourra être bientôt présenté et même discuté ; il porte, en effet, à 365 fr. le taux de la pension de retraite des militaires aveugles. Jusqu’à ce que cette loi ait été rendue, nous sommes sous l’empire de l’arrêté-loi de 1814 qui porte à 295 fr. la pension des militaires aveugles. Des pensions à ce taux ont été accordées à 854 militaires dont l’état de cécité complète a été reconnu ; 300 autres atteints de l’ophtalmie reçoivent des subventions provisoires ; ils ont l’intention de venir se faire visiter pour qu’il soit vérifié s’ils ont droit à la pension. Je dois dire que l’ophtalmie a considérablement diminué, puisque, comme je l’ai dit, du 1er avril au 31 octobre de cette année, il n’y a eu que 83 aveugles dans l’armée. Il y a, comme vous voyez, amélioration sensible.
- L’article premier, administration centrale : fr. 25,250, est adopté.
« Art. 2. Pharmacie centrale : fr. 82,800. »
Le gouvernement demande 157,800 fr.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’avais soumis à la section centrale une proposition d’augmentation. Je ferai observer que les allocations considérables faites en 1831 et 1832 avaient permis de s’approvisionner d’un grand nombre de médicaments ; alors, quoique les allocations eussent été réduites en 1833 et 1834, le service de la pharmacie centrale avait pu néanmoins marcher. Mais d’une part l’allocation de 1854 ayant été seulement de 109,000 fr., de l’autre, comme il y a eu beaucoup de malades, il en est résulté que les magasins sont absolument vides.
D’un autre côté, les sangsues dont on emploie un nombre considérable ont triplé de valeur ; les adjudications avaient été passées au taux de 7 c. la pièce ; or, maintenant le prix des sangsues est de 20 c. ; ainsi, au lieu de 23,400 fr. qui ont été dépensés à ce titre cette année, il faudra dépenser 70,000 fr. Par ces motifs je demande 75,000 fr. en sus de la proposition de la section centrale.
- L’article 2 est adopté.
« Art. 3. Hôpitaux : fr. 199,167. »
- Adopté.
« Art. 4. Matériel des hôpitaux : fr. 135,000. »
- Adopté.
« Article unique. 000,000. »
- Adopté.
« Art. 1er. Matériel de l’artillerie : fr. 950,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Matériel du génie : fr. 945,403. »
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Je suis d’accord avec la section centrale sur le chiffre ; mais je dois donner quelques développements relatifs à cet article. J’avais demandé 1,500,000 fr. ; mais comme il fallait faire des économies, j’ai demandé de transférer une somme de 500,000 fr. à joindre aux deux millions qui doivent donner lieu à un projet de loi qui sera plus tard soumis aux chambres.
M. le président. - On va passer au chapitre VI.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’ai besoin de donner des explications relativement à l’article premier de ce chapitre, et il vaut autant en donner qu’en recevoir. Il s’agit du traitement temporaire et de celui de non activité. J’ai dit qu’on accordait le traitement temporaire à tous les hommes atteints de cécité, parce qu’il arrive que beaucoup recouvrent la vue. L’expérience a prouvé que sur 200 hommes il y en a eu 70 qui avaient eu ce bonheur ; il n’a été admis à la pension définitive que ceux qui avaient complètement perdu la vue. Le traitement de non-activité qui avait été très considérable a été réduit, et ne monte aujourd’hui qu’à 225,000 fr., et cela par suite de pensions accordées à 84 officiers qui y figurent. Mais j’ai dû accorder des pensions provisoires à 300 aveugles environ, et ces pensions montent à une somme de 110,000 fr., et je porte à 50 mille francs celles qui peuvent se présenter à accorder. Ainsi je demande le rétablissement de 108 mille francs pour les pensions, traitements provisoires, plus 50,000 fr. : en tout 380,000 fr.
M. de Puydt, rapporteur. - La section centrale voulant presser le moment où le sort des officiers proposés pour la pension devait être fixé, a pensé que le terme de 6 mois suffisait. Il se trouve que, dans la somme accordée, il est une certaine somme appartenant à des pensions de soldats. Il y a toujours une forte somme qui s’élève à 200,000 fr. Je crois que la section centrale doit persister dans sa proposition pour mettre le ministre dans la nécessité d’accorder la pension à ces officiers dans le délai de 6 mois. Car il est cruel de les laisser plus longtemps dans une expectative qui met en doute leurs moyens d’existence. Je propose d’accorder 300,000 fr.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Si effectivement, au fur et à mesure que je fais la proposition de paiement d’une pension, cette pension passait à l’inscription au ministère des finances, l’observation de l’honorable rapporteur de la section centrale serait juste ; mais, d’après les lois existantes, toute pension du ministère de la guerre ne peut être payée qu’au 1er janvier de l’année suivante. Ainsi, que des officiers soient mis à la retraite pendant le cours de l’année, il n’en est pas moins vrai que je dois leur payer leur pension pendant l’année entière.
M. Desmaisières. - Si la demande du ministre a pour but de faire cesser la nouvelle catégorie d’officiers en non-activité, je pense qu’on doit lui accorder les fonds qu’il réclame.
M. le ministre de la guerre (M. Evain). - Ayant réfléchi sur les conséquences de la mesure que j’avais prise, la mise à la solde de congé d’une certaine catégorie d’officiers, j’ai cru voir qu’elle pourrait devenir une source d’abus ; je me suis empressé d’y renoncer. Il y avait sept officiers mis à la solde de congé, j’ai proposé de les mettre au traitement de non-activité. La somme pour tous les officiers actuellement en non-activité, se montait à 212 mille fr. En y ajoutant les sept officiers qui étaient en solde de congé, la somme se trouve portée à 225 mille fr. C’est celle que je demande pour les officiers en non-activité, et il n’y aura plus d’officiers en solde de congé.
M. de Puydt, rapporteur. - S’il y a une disposition législative qui ne permet pas d’inscrire la pension dans le cours de l’année où elle est accordée, il est nécessaire que des fonds soient accordés pour payer un traitement à ceux qui obtiennent la pension jusqu’au maintien de l’inscription.
Mais le ministre ne doit pas perdre de vue que le désir de la section centrale est que le sort de ces officiers en non-activité soit fixé le plus tôt possible.
- Le chiffre de 380 mille francs proposé par le ministre est mis aux voix et adopté.
Il formera l’article premier du chapitre VI.
« Art. 2. Traitement des aumôniers : fr. 12,000 »
- Adopté.
« Art. 3. Traitement temporaire d’employés : fr. 13,050. »
- Adopté.
« Art. 4. Militaires décorés sous l’ancien gouvernement : fr. 34,000. »
- Adopté.
« Art. unique : fr. 155,509. »
- Adopté.
M. le président. - Il y a un article additionnel proposé par M. Brabant, il est ainsi conçu :
« Le ministre de la guerre est autorisé à transférer à l’article 16 de la section 3 du chapitre II les sommes ci-après, savoir :
« Chapitre Il. Section 2.
« Article premier. Solde de cavalerie : fr. 260,610
« Article 2. Solde de cavalerie : fr. 107,310
« Article 4. Solde d’artillerie : fr. 107,310
« Article 5. Solde du génie : fr. 38,325.
« Chapitre II. Section 3
« Article premier. Masse de pain : fr. 317,915
« Article 2. Casernement : fr. 97,820
« Total : fr. 929,290,
« Et de les reporter ainsi que suit à l’article cantonnements de :
« Infanterie : fr. 471,580
« Cavalerie : fr. 194,180
« Artillerie : fr. 194,180
« Sapeurs-mineurs : fr. 69,350.
« Total égal : fr. 929,290. »
- Cet article est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La chambre veut-elle procéder aujourd’hui au second vote ?
- Plusieurs membres. - Oui, oui.
- D’autres membres. - Non, à demain.
M. A. Rodenbach. - Il me semble qu’il y a urgence ; j’ai eu occasion de parler avec d’honorables sénateurs et j’ai appris que le sénat se propose de s’ajourner si le budget de la guerre ne lui est pas envoyé sans retard. Je crois donc qu’il faudrait le voter d’urgence.
M. Gendebien. - Formulez alors pour motif d’urgence que l’autre chambre est impatiente de s’en aller.
M. Dumortier. - Je dois déclarer que j’ai eu l’honneur de voir plusieurs sénateurs, et qu’ils m’ont exprimé que, dans le cas où la chambre aurait terminé aujourd’hui le budget de la guerre, elle puisse et veuille l’envoyer au sénat aujourd’hui afin qu’il puisse l’examiner.
M. Gendebien. - Soit, mais il eût été plus généreux de dire la vérité, de dire que les membres de cette assemblée ont le désir de s’en aller.
M. Dumortier. - Non pas moi ; car je désirerais qu’on s’occupât de suite d’un projet de loi que M. le ministre de l’intérieur a présenté au commencement de la séance et que je considère comme très urgent et d’une grande importance.
M. Eloy de Burdinne. - Je suis persuadé qu’il n’y a pas dans la chambre dix membres qui ne partagent pas cette opinion.
- La chambre confirme par son vote les changements introduits dans le budget de la guerre.
Il est déduit de l’article des dépenses imprévues (sauf vérification) une somme de fr. 860 26 c. pour arrondir la somme totale du budget.
Le chiffre de 39,870,000 fr. montant total du budget de la guerre est mis aux voix et adopté.
Le texte : « La présente loi est obligatoire le lendemain de sa promulgation, » est adopté.
On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi du budget de la guerre.
Il est adopté à l’unanimité des 60 membres votants.
Ont pris part au vote : MM. Verrue-Lefranc, Brabant, Coghen, Cols, de Behr, A. Dellafaille, H. Dellafaille, de Longrée, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, de Nef, de Puydt, de Renesse, Deschamps, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de Biesme, Desmet, de Stembier, de Terbecq, Dewitte, d’Hane, d’Hoffschmidt, d’Huart, Donny, Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Ernst, Fallon, Fleussu, Gendebien, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys, Jadot, Lardinois, Meeus, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Pirson, Polfvliet, Raikem, A. Rodenbach, Rogier, Rouppe, Schaetzen, Simons, Smits, Thienpont, Ullens, Vanderbelen, Vanderheyden, Vergauwen, H. Vilain XIIII, C. Vuylsteke,Zoude.
M. Dumortier. - Je demande que la commission chargée d’examiner le projet de loi sur la garde civique se réunisse demain a 10 heures. Si elle veut faire son travail d’urgence, nous pourrons avoir son rapport pour lundi. C’est ainsi que l’on faisait au congrès, et alors on faisait des lois. Il y a nécessité absolue de s’occuper de cette loi avant de nous séparer, si tant est que la chambre en ait le désir.
M. Fallon. - Je crains que lundi on ne soit pas en nombre, car je connais plusieurs de mes collègues qui se proposent de partir après la séance.
M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, il y a urgence de s’occuper de la loi présentée par M. le ministre de l’intérieur, et il n’y en a pas de prendre des congés. Nous aurons besoin sous peu des ressources que cette loi nous procure, je vous en préviens, et il faut au moins répondre à la force par la force, si on vient nous attaquer.
M. Rogier. - J’ignore les motifs pressants que peut avoir la chambre de s’ajourner lundi. Quand je considère ce qu’elle a fait et ce qui lui reste à faire, je suis loin de reconnaître cette urgence d’ajournement. Il me semble que pour être conséquente avec elle-même, la chambre ne devrait pas se séparer qu’elle n’eût au moins complété les lois d’urgence qu’elle vient de voter. En effet elle a voté d’urgence dix centimes additionnels de subvention de guerre, elle vient dé voter d’urgence le budget de la guerre ; aujourd’hui une troisième loi lui est présentée dans le but de préparer le pays soit pour la défense soit pour l’attaque, si le besoin s’en présente : c’est une loi d’organisation de la garde civique ; elle se compose d’un petit nombre d’articles, la discussion en serait prompte et facile.
Si la commission se réunit demain, son rapport pourra être arrêté dans la journée, imprimé et distribué dans la soirée ; chacun des membres en aura pris connaissance ; à l’ouverture de la séance de lundi, la discussion pourra s’ouvrir, et mardi au plus tard le projet pourra être voté. On pourra alors avec une conscience plus tranquille se donner quelques jours de vacances, si tant est que la chambre en ait besoin.
Il ne m’appartient peut-être pas d’insister sur la nécessité d’assister aux séances de la chambre, étant forcé par la nature de mes fonctions à faire de fréquentes absences. Mais j’appelle l’attention de la chambre sur ce que je viens d’avoir l’honneur de lui dire. Pour être conséquente avec elle-même, elle ne doit pas s’ajourner avant d’avoir voté toutes les lois d’urgence, c’est-à-dire le projet de loi sur la garde civique, qui, ayant été préparé par des hommes spéciaux, ne donnera pas lieu à de longues discussion.
- La chambre, consultée, décide qu’il y aura séance lundi.
M. le président. - Et l’ordre du jour !
M. Dumortier. - Je renouvelle ma proposition d’inviter la commission à faire imprimer et distribuer son rapport demain et de mettre la discussion à l’ordre du jour de lundi. Cela est possible ; du temps du congrès on le faisait bien, alors on se donnait la peine de travailler, et quand une loi d’urgence était présentée, on l’avait bientôt examinée.
Pour le cas cependant où il serait impossible de discuter lundi la loi sur la garde civique, je proposerai subsidiairement de mettre à l’ordre du jour la suite de la loi communale.
M. Liedts. - Je demande la priorité pour le budget des affaires étrangères et de la marine sur la loi communale. Si le budget n’est pas voté pour le 15 janvier, M. le ministre des affaires étrangères sera obligé de vous demander un crédit provisoire pour la marine.
M. Gendebien. - Si on n’a pas le temps de faire imprimer séparément et distribuer aux membres le projet de loi sur la garde civique, je demande qu’il soit imprimé au Moniteur.
M. Dumortier. - A l’heure qu’il est, le projet de loi doit être imprimé ; il sera distribué ce soir aux membres de l’assemblée.
- La séance est levée à 5 heures et demie.