(Moniteur belge n°316, du 12 novembre 1834)
Le Roi devant faire en personne l’ouverture de la session des chambres législatives, la salle ordinaire des séances de la chambre des représentants est disposée pour recevoir S. M.
La tribune des orateurs et le fauteuil du président sont enlevés et remplacés par le trône et le dais qui le couvre. Le trône est élevé sur plusieurs degrés où doivent se placer les ministres, les officiers du haut état-major de l’armée et les officiers de la couronne.
A midi, les tribunes publiques sont ouvertes et sont bientôt garnies de nombreux auditeurs, dont les dames forment la plus grande partie.
MM. les sénateurs et MM. les députés, réunis sous la présidence de M. Van Hoobrouck de Mooreghem, père, sénateur, lequel est assisté de MM. Nothomb et Deschamps, représentants, remplissant les fonctions de secrétaires, procèdent par la voie du sort à la nomination des députations qui iront au-devant de LL. MM. la Reine et le Roi, quand elles feront leur entrée dans le palais de la législature.
La députation pour recevoir la Reine est ainsi composée :
MM. le baron de Pélichy, de Rouillé, sénateurs ;
MM. H. Dellafaille, Vanderbelen, Coppieters, Liedts, représentants.
La députation pour recevoir le Roi est ainsi composée :
MM. le marquis de Rodes, comte de Baillet, comte Dandelot, comte Quarré, G. de Jonghe, Engler, sénateurs ;
MM. Meeus, Fleussu, comte F. de Mérode, de Stembier, de Puydt, Milcamps, Morel-Danheel, Olislagers, de Terbecq, Vuylsteke. Rouppe, Devaux, représentants.
On remarque que MM. les représentants ont adopté un signe distinctif : c’est une étoile en argent, portée sur la poitrine, et dont les rayons entourent le lion belge en or. Désormais, dans les cérémonies publiques, on reconnaîtra les députes à ce signe.
Un grand nombre de personnages et d’agents diplomatiques, revêtus de costumes étrangers et décorés de divers insignes sont dans les tribunes réservées au corps diplomatique.
A une heure, la Reine est introduite ; elle est saluée par les applaudissements des membres des chambres.
Le Roi fait bientôt après son entrée, précédé de la députation de la législature, et suivi d’un brillant et nombreux état-major. Il est également salué par les applaudissements des membres des chambres. Il est revêtu du costume de la garde civique.
Il monte sur son trône, salue les sénateurs et les représentants, s’assied, se couvre, et lit le discours suivant, qui a été écouté dans le plus grand silence.
« Messieurs,
« L’ouverture de votre session annuelle est une solennité à laquelle j’aime à m’associer. Je me plais à me retrouver au milieu des représentants du peuple belge, et à donner la première impulsion aux travaux qui doivent achever de consolider notre état social.
« Nos rapports politiques prennent chaque jour une nouvelle extension. Mon gouvernement est reconnu par la plupart des puissances. Il y a un an, des relations officielles et réciproques se sont ouvertes avec les deux grandes puissances de l’Allemagne. Vous apprendrez avec satisfaction, messieurs, que les mêmes relations viennent de s’établir avec l’Espagne, le Portugal et l’empire du Brésil.
« Forts des engagements qui nous sont garantis, il nous est permis d’envisager l’avenir avec confiance, et de reporter tous nos soins sur les améliorations intérieures.
« L’armée continue à mériter nos éloges ; l’instruction qu’elle a acquise et l’esprit qui l’anime nous donnent la conviction qu’elle ne manquerait pas à la patrie si un appel était fait à son courage.
« La garde civique est rentrée dans ses foyers avec de justes titres à la reconnaissance du pays. Nous pouvons compter sur son zèle et sur son dévouement.
« Je vous ferai communiquer des projets sur l’organisation des réserves de l’armée active, ainsi que sur les mesures qui me paraissent nécessaires pour donner au pays une ligne défensive vers le nord. L’Etat trouvera, dans une sage combinaison de ses moyens de défense, une des meilleures garanties de son indépendance.
« J’introduirai dans les dépenses de l’armée toutes les réductions possibles avec une bonne organisation et la sûreté de l’Etat. Il est à désirer que des lois sur les pensions, sur l’avancement et sur la justice militaire, donnent à l’armée la constitution définitive à laquelle elle a droit.
« Nos finances sont dans un état satisfaisant. L’ordre qui préside à leur gestion nous permettra, je l’espère, d’entreprendre successivement de grands travaux d’utilité générale.
« Des propositions vous seront faites à l’effet de modifier quelques-unes de nos lois financières ; le but de ces modifications est de répartir l’impôt d’une manière plus équitable. Une loi vous sera présentée pour régler définitivement les comptes de 1830 et 1831. Ceux de 1832 et 1833 pourront même être réglés provisoirement.
« Une sévère économie dans les dépenses publiques rendra possible une nouvelle diminution des centimes additionnels.
« Vous vous êtes déjà occupés, messieurs, des lois d’organisation provinciale et communale ; le pays en attend le vote définitif de la session qui s’ouvre. La loi sur l’instruction publique et celle sur la garde civique ne sont pas moins urgentes.
« La Belgique a toujours été hospitalière, mais il ne faut pas que cette hospitalité puisse devenir une arme contre elle-même. Une loi spéciale sur les étrangers, qui vous sera incessamment soumise, viendra, concurremment avec la loi sur l’extradition, fixer, d’une manière incontestable, les droits et les devoirs du gouvernement à leur égard.
« Les lois sur la compétence judiciaire, sur les faillites, les sursis, les hypothèques et la procédure civile, réclament des modifications essentielles qui pourront être livrées à vos méditations.
« Les intérêts industriels et commerciaux ont été l’objet de la sollicitude particulière du gouvernement. Des négociations sont ouvertes avec la France, et ne tarderont pas à l’être avec d’autres pays.
« Nous arrêterons, après de mûres délibérations, les réformes dont notre tarif des douanes est susceptible.
« Un arrangement récemment conclu avec l’administration des postes de la Grande-Bretagne a doublé les moyens de communication entre ce pays et la Belgique, et promet des résultats avantageux pour le commerce.
« L’exécution du chemin de fer se poursuit avec une grande activité. Il y a lieu jusqu’à présent d’espérer que les dépenses resteront au-dessous des prévisions premières.
« En même temps que le commerce et 1’industrie prennent tous les jours plus de développements, les sciences et les arts excitent de nobles efforts, et tout nous présage que la Belgique nouvelle ne sera pas infidèle à son antique renommée.
« Je suis heureux de voir régner dans le royaume l’ordre le plus parfait. La Belgique sait apprécier l’esprit de justice et d’impartialité qui préside aux actes de mon gouvernement.
« Dans les provinces que j’ai récemment visitées, j’ai pu remarquer avec satisfaction des signes certains de prospérité ; et l’accueil que j’ai reçu m’est un bien doux témoignage de l’attachement du pays à ses institutions et à la dynastie qu’il s’est donnée. Cet accueil m’est aussi un sûr garant du concours que je dois attendre de la représentation nationale. »
- De longs bravos et des cris de vive le Roi ! accueillent ce discours.
Le Roi et la Reine se retirent avec le même cérémonial employé pour les recevoir.
MM. les sénateurs et MM. les représentants se réunissent dans les salles qui leur sont spéciales.
(Présidence de M. Pirson, doyen d’âge)
La séance est ouverte à une heure un quart.
M. le président. - Conformément au deuxième paragraphe de l’article 2 du règlement, il va être procédé au tirage au sort d’une commission de sept membres chargée de la vérification des pouvoirs des représentants élus dans l’intervalle des deux sessions.
M. Dechamps procède au tirage au sort de cette commission, qui se trouve composée de MM. Eloy de Burdinne, Devaux, Dumortier, Liedts, A. Rodenbach, d’Hoffschmidt et L. Vuylsteke.
- La séance est levée à une heure et demie.