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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 17 janvier 1834

(Moniteur belge n°18, du 18 janvier 1834 et Moniteur belge n°19, du 19 janvier 1834)

(Moniteur belge n°18, du 18 janvier 1834)

(Présidence de M. Raikem)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse fait l’appel nominal à une heure moins un quart.

M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal. La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Renesse fait connaître l’objet des pièces adressées à la chambre.


M. Van Hoobrouck. - Je demande que parmi les pétitions il y en ait une qui soit déclarée urgente. Elle est celle d’une femme de Maestricht qui a ses terres en Hollande et ses bâtiments en Belgique. Selon nos lois, ses récoltes peuvent entrer sur notre territoire au moment de la moisson, attendu que ses bâtiments d’exploitation ne sont pas assez grands. D’un autre côté, selon les lois hollandaises, les récoles des terres appartenant à des Belges ne peuvent être vendues en Hollande ; de sorte que cette malheureuse belge se trouve dans la misère au milieu de l’abondance.

M. le président. - La commission des pétitions sera invitée à s’occuper promptement du mémoire dont il s’agit.

Rapport sur des pétitions

M. le président. - L’ordre du jour appelle à la tribune les rapporteurs de la commission des pétitions.

M. Liedts, rapporteur. - Je vais présenter le rapport sur la pétition de Liége.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - M. le ministre de l'intérieur n’est pas présent, il faut commencer par les pétitions insérées au feuilleton.

M. Milcamps, premier rapporteur, a la parole. - « Le sieur Deridder, agent comptable du brigantin Le Congrès, demande que le gouvernement se porte garant comme l’avait fait l’ancien gouvernement du paiement des intérêts des obligations créées pour la construction d’un entrepôt général de commerce à Anvers.

En 1831, un sieur Borrekens a adressé à la chambre des représentants une pétition ayant le même objet, sur laquelle est intervenu un ordre du jour, motivé sur ce que l’entrepôt de commerce avait été formé par une compagnie privée, que c’était une entreprise particulier. (Moniteur, 19 décembre 1824.)

Votre commission n’a pas cru que cette décision de la chambre fût un préjugé contre la réclamation du sieur Deridder ; elle a pensé, par suite du renvoi que vous lui aviez fait de cette réclamation, qu’elle pouvait s’en occuper.

Elle s’est attachée à bien préciser la question.

Un loi du 31 mars 1828 (Journal officiel n°10) porte, article 1er : « Par extension de la loi générale sur les droits d’entrée, de sortie et de transit du 26 août 1822, nous accorderons aux principales villes de commerce maritime dans lesquelles les bâtiments et établissements nécessaires à cette fin seront fournis et entretenus soit par ces villes mêmes, soit par le commerce, la faculté de déposer dans un entrepôt général les marchandises pouvant jouir de la faveur de l’entrepôt qui y sont importées par mer et de leur réexporter ensuite également par mer en franchise de droit. »

C’est en présence de cette loi qu’une commission spéciale, composée du gouvernement, des ingénieurs de la province, du bourgmestre, du président et des trois membres de la chambre de commerce d’Anvers, a proposé ou soumis au gouvernement des Pays-Bas un projet de construction d’un entrepôt général de commerce, au moyen d’un emprunt jusqu’à concurrence de 700,000 fl. par voie d’actions, et c’est en suite du rapport des département de l’intérieur, de la guerre et des finances que le roi des Pays-Bas a donné, par arrêté du 21 mai 1829, son consentement, en attendant les stipulations ultérieures.

« 1° A l’ouverture d’un emprunt d’une somme de 700,000 fl., sous la condition mentionnée dans ledit projet, que cet emprunt se ferait au taux annuel de 5 p. c. d’intérêt, et qu’à partir de 1834, il se ferait d’année en année par tirage au sort un remboursement d’un p. c. du capital levé ;

« 2° A l’exécution primitive des travaux ;

« 3° A l’acquisition (de terrain) par expropriation pour utilité publique.

« L’emprunt, porte ledit arrêté, étant spécialement garanti par nous (le Roi) indépendamment de l’hypothèque déjà établie et encore à établir pour sûreté de l’emprunt. »

C’est en vertu de ces dispositions que l’emprunt a eu lieu et que la construction de l’entrepôt général de commerce à Anvers a été opérée, le tout sous la direction et par les soins de la commission spéciale ci-dessus désignées, laquelle administre l’établissement.

D’après la pétition, les bénéfices de l’entrepôt n’ont pas permis de payer les intérêts des obligations dans l’emprunt, échus en 1830, 1831, 1832 et 1833 ; du moins le sieur Deridder, actionnaire, s’adresse à la chambre, comme l’avait fait, en 1831, un sieur Borrekens, afin que l’Etat se charge du paiement de ces intérêts, soit comme propriétaire de l’établissement, soit par suite de la garantie stipulée dans l’arrêté du 21 mai 1829.

Ce n’est en effet qu’à l’un ou à l’autre de ces titres que l’Etat peut-être obligé envers les porteurs d’obligations.

Le roi des Pays-Bas, en accordant à la ville maritime d’Anvers, la faculté de jouir d’un entrepôt général de commerce, disposait probablement sur une demande qui lui avait été faite, soit au nom de la ville d’Anvers, soit au nom du commerce de cette ville ; il exécutait la loi du 31 mars 1828 ; en autorisant l’acquisition de terrains pour la construction de l’entrepôt, il exécutait la loi fondamentale et la loi du 31 mars 1810. Il faisait un acte d’administration générale.

Mais en consentant à l’emprunt avec la stipulation que les bâtiment de l’entrepôt seraient hypothéqués aux obligations de l’emprunt, en garantissant le paiement des intérêts et le remboursement de ces obligations, le roi des Pays-Bas agissait-il en vertu d’une loi ? faisait-il un acte d’administration générale ?

A cet égard votre commission m’a chargé de vous faire observer qu’elle n’avait trouvé aucune loi qui autorisât le pouvoir exécutif à grever l’Etat, et hypothéquer des propriétés nationales. Il ne doit pas en exister. « Le fisc est toujours réputé solvable et n’est jamais obligé à donner caution, à fournir hypothèque, même quand les parties les plus solvables y sont obligées : jurisprudence qui est fondée sur ce que tout particulier peut devenir insolvable et que le fisc ne peut jamais le devenir, attendu qu’il a toujours dans les deniers publics les fonds nécessaires pour toutes ses charges. »

D’après ces simples considérations, votre commission n’a pas cru pouvoir jusqu’ici émettre l’opinion que l’entrepôt d’Anvers appartient à l’Etat ni qu’il soit soumis à l’obligation de garantie invoquée par le pétitionnaire.

Votre commission aurait pu borner ici sa tâche et vous proposer sa conclusion, mais elle a pensé qu’il n’y avait aucun inconvénient à rechercher qui peut être propriétaire de l’entrepôt de commerce dont il s’agit, soit l’Etat, soit la ville d’Anvers, soit le commerce, soit les porteurs d’obligations dans l’emprunt.

Quant à l’Etat nous nous sommes déjà expliqué relativement à la ville d’Anvers ; bien que la loi du 31 mars 1828 porte que le roi accordera la faculté de jouir d’un entrepôt aux villes maritimes, dans lesquelles il existe des locaux fournis et entretenus par les villes ou par le commerce, votre commission n’a pas cru pouvoir jusqu’ici tirer de cette disposition la conséquence que la propriété de l’entrepôt appartient à la ville ; on peut objecter qu’elle n’a pas réclamé la faculté de jouir d’un entrepôt ; que cette faculté n’a pas été demandée pour elle, ni en son nom ; que son administration n’a point fait les diligences pour recueillir les obligations dans l’emprunt ; qu’elle n’y est point intervenue (elle a seulement fourni gratuitement une partie du terrain nécessaire à la construction de l’entrepôt) ; enfin qu’elle n’administre pas l’établissement. Notre commission a donc aussi réservé son opinion à cet égard.

En ce qui concerne le commerce, il ne paraît pas que la commission lui doive son existence ; mais c’est elle, à ce qu’il paraît, qui dans l’intérêt du commerce a proposé le projet d’un entrepôt ; c’est sous sa direction et par ses soins que l’emprunt a eu lieu et que l’entrepôt a été construit. C’est elle qui administre l’établissement au nom de qui ? du commerce ? Mais on peut objecter que le commerce, si vous n’entendez pas par là une réunion d’individus, est un être moral, une abstraction, incapable de posséder. S’il s’agissait de partager les bénéfices de l’entreprise, entre qui le partage aurait-il lieu ? Il paraît impossible. Si le commerce est propriétaire de l’entrepôt, il pourrait disposer de la chose, la vendre ou l’hypothéquer ; mais qui serait le vendeur ? la commission ? mais elle n’a que l’administration, ses porteurs d’obligations pourraient la poursuivre. Contre qui agiraient-ils ? contre la commission ? par action personnelle en tant qu’il existe un encaisse, nous le concevons ; par action réelle nous le concevons encore.

Mais alors on est obligé d’assimiler cet établissement à un hospice, à une fabrique. Il ne peut être assimilé ni aux sociétés ordinaires de commerce, ni à ces compagnies sans nom, telles que les banques, créés et constituées avec l’autorisation et l’approbation du gouvernement, fondées sur la loi de leurs établissements et à l’égard desquelles personne ne peut ignorer que le capital est divisé en actions, même en coupons d’actions appelés dividendes. Votre commission s’est encore réservé son opinion à ce sujet.

Pour ce qui regarde les porteurs d’obligations dans l’emprunt, ils paraissent n’être que simples bailleurs de fonds, n’ayant d’autre droit que celui de se faire payer des intérêts et rembourser de leurs obligations. Ils se considèrent comme tels ; ils ne paraissent avoir aucun intérêt dans l’entreprise, on distingue l’action de l’intérêt, l’intérêt rend associé ou copropriétaire, l’action ne rend que commanditaire ; toutefois votre commission a encore réservé son opinion à cet égard.

Telle est la singularité de cette affaire que ni l’Etat ni la ville d’Anvers, ni le commerce, ni les porteurs d’obligations ne se prétendent propriétaires de l’entrepôt général de commerce dont il s’agit.

Cependant sa propriété doit résider quelque part ; car si c’était un bien sans maître, il appartiendrait à la nation. Il s’agit d’un établissement public général, ou particulier.

Messieurs, si toutes les pièces relatives à cette affaire extraordinaire avaient été mises sous les yeux de votre commission, elle aurait émis une opinion sur la question de savoir à qui appartenait l’établissement, et elle vous aurait proposé une conclusion au fond. Mais plusieurs pièces lui manquent : la demande primitive faite d’un entrepôt ; un arrête du 10 septembre 1828, cité dans celui du 21 mai 1829 ; les conditions de l’emprunt.

Dans ces circonstances, et tout en croyant que vous ne désapprouverez pas les détails dans lesquels elle a chargé son rapporteur d’entrer, votre commission a pensé qu’il y avait lieu à un plus ample informé ; en conséquence, elle a l’honneur de vous proposer, par mon organe, le renvoi de la pétition à MM. les ministres des finances et de l’intérieur, avec demande d’explication.

- Le double renvoi est ordonné par la chambre.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 24 novembre 1833, plusieurs membres de la compagnie dite de sûreté, à Bruxelles, réclament contre le projet de licencier cette compagnie. »

- Renvoi à M. le ministre des finances.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 2 décembre 1833, le sieur C.-J. Van Puyvelde, à Namur, réclame une nouvelle loi sur les poids et mesures. »

- La commission propose le dépôt au bureau des renseignements.

M. A. Rodenbach. - En octobre dernier j’ai signalé divers abus relativement au système des poids et mesures. Il paraît que par la pétition on reproduit les réclamations que je fis alors ; c’est-à-dire qu’on demande que le système usuel des poids et mesures soit révisé et que la division des unités de mesure ait lieu par moitié, quart, huitième, ainsi que par décimales. Cette division ne change pas le système. Elle est admise en France.

On n’exécutera jamais bien dans nos villes, et surtout dans nos campagnes, le système nouveau des mesures, si on n’admet pas la division que propose le pétitionnaire. Le gouvernement a encore un autre soin à prendre, c’est de rendre égale partout l’unité de poids ; par la manière dont elle est établie, il existe des différences entre les poids de même nom à Courtray et à Arlon. Je demande que l’on renvoie la pétition au ministère des finances avec demande d’explications.

M. de Brouckere. - Je crois qu’il y a une commission nommée pour s’occuper de cet objet.

M. A. Rodenbach. - La commission dont on parle a été simplement nommée pour examiner le projet de loi présenté par M. Seron. Cette commission n’aurait pour but que de changer la nomenclature hollandaise et non de changer la division des unités de mesures et d’aviser aux moyens de rendre les mesures de même nom égales dans toute le royaume.

M. Milcamps, rapporteur. - Ce qui avait engagé la commission à proposer le dépôt de la pétition au bureau des renseignements, c’est qu’elle ne contient que la simple proposition de refuser la loi et d’adopter la division par moitié, quart, huitième. Cependant nous ne nous opposons pas au renvoi au ministre des finances.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je comprends bien les conclusions de la commission et de l’honorable membre, mais je ne comprends pas la demande d’explications. Le pétitionnaire ne dénonce pas un abus de l’autorité ; il propose une autre division des poids et mesures. Il peut y avoir des vues très utiles dans cette proposition ; en la déposant au bureau des renseignements, la chambre pourra en profiter. Il me semble que le renvoi au ministre avec demande d’explications ne peut avoir lieu ici, puisqu’on ne signale pas d’abus d’autorité.

M. A. Rodenbach. - On dénonce des abus dans la pétition ; on y dit que les marchands détaillants ne donnent le poids nulle part ; on y dit encore que le détaillant, n’étant pas assez instruit pour comprendre la division décimale, ne sait pas proportionner les prix aux parties des mesures.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Ce sont là des abus des particuliers et non des abus de l’autorité.

M. Pirson. - Le renvoi au ministre des finances ne me paraît pas devoir avoir lieu ; ce ministre est bien chargé de la perception du droit sur les poids et mesures, mais il n’entre pas dans ses attributions de faire des modifications aux poids et mesures : c’est là une chose du ressort du ministre de l’intérieur.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Cela devrait être ainsi, mais cela n’est pas.

M. Pirson. - Je ne vois pas qu’il y ait d’explications à demander.

M. de Brouckere. - Je ne peut partager ni l’opinion de M. Rodenbach, ni l’opinion de M. Pirson ; la pétition renferme seulement une idée : savoir, qu’il conviendrait que l’unité des poids et mesures eût une autre subdivision, c’est-à-dire qu’elle fût substituée par moitié, quart, huitième, au lieu d’être divisée par dixièmes. Sous ce rapport, j’appuie les conclusions de la commission tendant au dépôt, au bureau des renseignements, et le renvoi au ministre des finances.

La pétition ne signale pas d’abus de la part du gouvernement, donc le gouvernement n’a pas à s’expliquer sur des abus. S’il y en a, ils viennent des particuliers. Nous connaissons tous les abus ; nous savons bien que dans aucune partie du royaume, les poids et mesures n’ont été employés exactement. Je n’émettrai pas d’opinion sur la convenance des divisions par moitié, quart, huitième.

M. A. Rodenbach. - Je renonce à la demande d’explications.

- La chambre ordonne le dépôt de la pétition au bureau des renseignements et le renvoi au ministre des finances.


M. Milcamps, rapporteur. - Par pétition en date du 27 octobre 1833, plusieurs habitants de la commune de Nethen demandent le renvoi de leur premier assesseur comme s’étant livré à des abus qu’ils signalent. »

Ils lui reprochent d’avoir exigé des habitants une rétribution pour la poste militaire qui fut établi au milieu d’eux, tandis qu’il aurait reçu des indemnités du gouvernement. La commission propose l’ordre du jour.

- L’ordre du jour est adopté.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 23 novembre 1833, la régence de la ville de Venloo demande que cette commune soit réintégrée dans la possession du passage d’eau sur la Meuse devant la ville, dont elle a été dépossédée par le gouvernement français. »

Il paraît que la régence s’est adressée au gouvernement précédent et au gouvernement actuel, à l’effet d’être réintégrée dans la propriété de ce passage d’eau. La commission propose le renvoi au ministre des finances.

M. de Brouckere. - Messieurs, l’objet de la pétition de la ville de Venloo est pour elle d’une grande importance, et je me permettrai d’appeler un instant votre attention sur sa réclamation.

La ville de Venloo était depuis un temps immémorial propriétaire du passage de la Meuse en face de cette cité ; sous le gouvernement français elle fut dépossédée du passage par le domaine, qui s’en empara et qui l’exploita à son profit.

Cet état de choses dura jusqu’en 1814, époque à laquelle la ville de Venloo fit partie du royaume des Pays-Bas ; alors elle s’empressa d’adresser au gouvernement une réclamation à l’effet d’être remise en possession du passage d’eau. Le 24 juillet 1814 intervient un arrêté du prince souverain des Pays-Bas qui alors réunissait tous les pouvoirs, ainsi cet arrêté doit être assimilé à une loi ; or, cet arrêté fît droit à la réclamation de la ville de Venloo en décidant que le passage d’eau lui serait restitué. J’ai sous les yeux l’arrêté dont je parle ; mais je m’aperçois qu’il est en hollandais ; je le lirai tout à l’heure.

Dans ce même arrêté, si je ne me trompe, il est question d’autres réclamations du même genre, qui avaient été adressées au pouvoir par des villes ou par des particuliers qui demandaient restitution des propriétés qu’on leur avait enlevées ; et il est fait droit, en principe général, à ces réclamations. C’est ainsi, par exemple, qu’un particulier qui possédait le passage de la Meuse à Grave fut remis en possession de ce passage, possession dans laquelle il n’a pas été troublé depuis 1814. C’est encore ainsi que le passage du Whaal à Nimègue fut restitué à la régence de cette ville. Il y a plus, lorsque le 17 février 1815, le passage fut rendu à la ville de Nimègue, cette cité, non contente de cette restitution, adressa au gouvernement une demande pour obtenir remboursement du fermage depuis 1814 ; ce fermage lui fut rendu. Il se montant pour l’année 1814 à 6,700 florins des Pays-Bas.

La ville de Venloo fit réclamations sur réclamations afin d’obtenir que l’arrêté qui lui était favorable fût exécuté ; toutes ces réclamations restèrent sans résultat. On les éluda, et jamais elle ne put obtenir satisfaction. Fatiguée d’avoir fait des instances pendant 13 années, elle se décida à demander aux états provinciaux l’autorisation de plaider ; cette demande fut également éludée ; elle revint à la charge et éprouva un refus formel.

Il n’y avait plus aucun espoir pour la ville, sous le gouvernement des Pays-Bas, gouvernement qui, comme vous le savez, avait deux poids et deux mesures, qu’il se montrait plus favorable aux intérêt de la partie septentrionale du royaume, qu’aux intérêts de la partie méridionale. Ce que je viens de lire en est la preuve la plus évidente.

Immédiatement après la révolution, et lorsque la garnison hollandaise de Venloo avait été faite prisonnière, la régence crut que son premier devoir était de s’occuper d’un objet qui intéressait aussi vivement la population dont elle devait soutenir les droits. Le 12 novembre 1830, elle prit possession du passage, signifia au fermier la défense de payer son fermage en d’autres mains que celles de son receveur, et donna communication de sa résolution au gouverneur de la province. Le gouverneur répondit à la régence, que l’agent du domaine public avait cru de son devoir de faire opposition à la prise de possession, et il engageait la ville à ne pas insister pour le moment et à se soumettre à l’opposition faite au nom du gouvernement, promettant qu’incessamment on s’occuperait de la réclamation et que justice serait rendue.

La régence céda aux instances de l’autorité supérieure, elle respecta l’opposition faite au nom du domaine. Mais en prenant une semblable résolution, elle comptait sur la promesse qui lui était faite au nom du gouvernement, La régence de Venloo a fait plusieurs démarches ; depuis lors elles sont toutes restées sans résultat. Cependant je crois pouvoir dire avec assurance que l’avis des états députés de la province était favorable aux prétentions de la ville et que le gouverneur de la province, qui connaît le bon droit de la ville, a joint ses démarches aux siennes pour que la ville soit remise en possession d’une propriété qui lui appartient à juste titre ; mais tout ce que l’on a fait est resté sans aucune suite. Il est à craindre que si la chambre n’intervient pas, la régence de Venloo n’obtienne pas davantage sous le gouvernement de la Belgique que sous le gouvernement du roi Guillaume.

La ville de Venloo demande la restitution de sa propriété ; la restitution des avantages qui lui sont dus. Je crois, messieurs, que c’est ici le cas ou jamais de demander que le gouvernement veuille bien nous donner des renseignements sur l’objet dont il s’agit. En lui demandant des renseignements ce sera le mettre dans la nécessite de s’occuper de la réclamation de la régence de Venloo, et du moment qu’il s’en occupera il en reconnaîtra la justice.

L’article premier de l’arrêté hollandais que je tiens à la main peut se traduire ainsi :

« Les passages d’eau qui, anciennement, étaient la propriété soit d’une ville, soit d’une corporation, soit d’un particulier, seront rendus à leurs anciens propriétaires. »

Ainsi cet arrêté est conçu en termes généraux mais il est incontestablement applicable à la ville de Venloo. Il est du 24 juillet 1814 et signé Guillaume.

M. Milcamps, rapporteur. - En examinant les pièces annexées à la pétition de la régence de Venloo je n’ai rien vu qui ne fût conforme à l’exposé que vient de faire l’honorable orateur ; de sorte que la chambre peut puiser dans les développements qu’elle vient d’entendre les motifs du renvoi que nous proposons.

M. de Theux. - L’arrêté dont on a traduit le premier article n’est pas une disposition spéciale en faveur de la ville de Venloo ; il reste encore à cette commune à faire connaître ses droits. Je ne m’oppose pas à la proposition qui est faite, je ne veux que détruire une impression erronée qui aurait pu être produite.

M. de Brouckere. - Il va sans dire que le gouvernement, avant de se décider à rendre à Venloo ce qu’elle réclame, vérifiera ses droits. Je demande seulement qu’on s’occupe de cette affaire. (Appuyé ! appuyé !)

- Le renvoi au ministère des finances avec demande d’explications est adopté.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition, en date du 20 novembre 1833, le sieur Michon, à Arlon, demande que la chambre l’autorise à mettre en vente par souscription son établissement de papeterie. »

Votre commission propose l’ordre du jour. Le pétitionnaire s’est adressé au ministre des finances, qui a répondu que ce mode de vente pourrait être assimilé aux loteries, lesquelles étaient défendues par le code pénal. La commission s’est appuyée de la réponse ministérielle pour proposer l’ordre du jour.

M. Gendebien. - Je demanderai que la pétition fût renvoyée au bureau des renseignements ; il faut savoir si un citoyen peut vendre sa propriété de cette manière comme de toute autre.

M. Milcamps, rapporteur. - Comme député, je ne m’oppose pas à la proposition de M. Gendebien. J’ai conçu des doutes sur l’application des lois concernant, le loteries, ces lois pourraient bien ne plus être en vigueur.

- L’ordre du jour est rejeté.

Le dépôt au bureau des renseignements est ordonné.


M. Milcamps, rapporteur. « Par pétition en date du 26 juillet 1833, le sieur Vandael, chevalier de la légion d’honneur, à Mons, demande que la chambre s’occupe de la réclamation des légionnaires, tendant à obtenir la pension attachée à leur croix. »

La commission propose le renvoi à la commission chargée de l’examen de la proposition de M. Corbisier.

M. Gendebien. - Si la commission a tant tardé à présenter son rapport, c’est par suite d’une fatalité inconcevable ; toujours la majorité de ses membres ont été malades ; toutefois elle est décidée à se réunir lundi et à présenter prochainement un rapport.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 5 août 1833, le sieur P.-A. Minard, à Antoing, chevalier de la légion d’honneur, demande le paiement de la pensée attachée à sa croix. »

- Renvoi à la commission chargée de l’examen de la proposition de M. Corbisier.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 5 août 1833, neuf légionnaires de l’arrondissement de Philippeville demandent que la chambre reconnaisse et confirme les droits acquis des légionnaires et leur restitue leur traitement. »

- Même renvoi.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 2 décembre 1833, le sieur Roch Monligneau, chevalier de la légion d’honneur, à Flobecq, demande instamment le paiement de l’arriéré de sa pension. »

- Même renvoi.


M. Milcamps, rapporteur. - « « Par pétition datée du 30 novembre 1833, le sieur Lefebvre, à Liége, demande que la chambre lui fasse restituer l’arriéré du traitement de sa place, depuis 1791, acquise à titre onéreux. »

J’aurai l’honneur de faire observer à la chambre que le pétitionnaire occupait un emploi que son père lui avait acheté ; mais il ne désigne pas la nature de cet emploi. La commission propose l’ordre du jour.

- L’ordre du jour est adopté.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition datée du 13 novembre 1833, un grand nombre d’habitants de la commune de Mont-Saint-Guibert demandent que la chambre s’occupe au plus tôt de la loi relative à la nouvelle organisation commune. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 26 juillet 1833, un grand nombre de propriétaires de Bruxelles et de ses faubourgs sollicitent la révision de la loi sur le déguerpissement. »

- Ordre du jour, la pétition étant sans objet.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 29 juillet 1833, 20 propriétaires du faubourg de Schaerbeek (lez-Bruxelles), demandent que la chambre s’occupe de la discussion de la proposition de M. Liedts, relative au déguerpissement. »

- Ordre du jour, la pétition étant sans objet.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 3 août 1833, le sieur J.-P. Sacré, ex-officier de chasseurs francs et actuellement sous-lieutenant de douanes à Gand, réclame sa part de l’indemnité de fl. 60,000 allouées aux officiers de volontaires. »

- Ordre du jour, parce que le fonds est épuisé et que le pétitionnaire doit s’imputer de n’avoir pas réclamé à temps.


M. Milcamps, rapporteur. - « « Par pétition en date du 3 août 1833, le sieur Jean-Jacques Florkin, lieutenant en non-activité de Montigni (Liége), se plaint de ce qu’on lui a fait perdre dans son ancienneté 3 années de service en France. »

- Ordre du jour.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 7 août 1833. le sieur Louis Artmer, passementier à Bruxelles, réclame de nouveau le paiement d’une somme de fr. 257-83 c. pour indemnité d’une saisie de divers objets opérée chez lui par la police en 1831. »

- Ordre du jour, attendu que les objets étaient des écharpes et des cocardes oranges.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 30 juillet 1833, le sieur F. Moons, receveur des accises à Anvers, réclame le paiement des intérêts du cautionnement de 41,700 fr. en inscriptions sur le grand’livre, échus et à échoir. »

- Renvoi à M. le ministre des finances.


M. Milcamps, rapporteur. - « « Par pétition en date du 29 juillet 1833, le sieur Bahut-Dumaret, receveur des droits d’entrée, de sortie et accises à Bruxelles, demande qu’il soit ouvert un crédit supplémentaire à M. le ministre des finances, pour lui payer à titre et par forme d’avance, les intérêts de son cautionnement échus depuis 1830, et à échoir.

- Renvoi à M. le ministre des finances.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 17 août 1833, les sieurs F.P. Gheude, J.-C. et M.-J. Gheude, meuniers et fabricants à Nederoverhembeek, demandent le redressement d’infractions aux règlements sur la police des eaux de la rivière la Senne. »

- Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 25 juillet 1833, cinq propriétaires de Bouillon, riverains de la rivière de la Semois, réclament contre la mise en adjudication par le gouvernement de la pêche de cette rivière. »

- Renvoi à M. le ministre de l’intérieur.


M. Milcamps, rapporteur. - « « Par pétition du 18 décembre 1833, six sous-officiers de la 2ème compagnie sédentaire à Vilvorde demandent la solde attachée à leur grade au lieu de celle de simple soldat qu’ils reçoivent. »

- Renvoi à M. le ministre de la guerre.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 4 août 1833, le sieur P. Boods, cultivateur à Tamise, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir justice de mauvais traitements exercés sur son fils par un garde-champêtre et des gendarmes. »

- Ordre du jour motivé sur ce que la justice est saisie de la plainte.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 23 août 1833, le sieur Diepenbeek, à Bruxelles, demande que la chambre provoque le retour dans leur patrie des Belges qui sont encore dans l’armée coloniale hollandaise. »

La commission propose le renvoi de cette pétition à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Gendebien. - Je demande qu’on ajoute, avec demande d’explications. Plusieurs de nos compatriotes sont retenus dans les colonies et en Hollande ; le gouvernement a négligé plusieurs occasions de leur rendre la liberté. Lorsqu’en août on a fait l’échange des prisonniers, nous en avions beaucoup plus que la Hollande : on aurait pu exiger la rentrer des Belges retenus à Maestricht, Dans le traite de Zonhoven on a encore commis la même négligence. Si quelque Belges sont revenus, c’est parce qu’ils ont pu s’échapper. Il faut que les ministres nous donnent des explications sur cet objet ; nous ne devons pas ainsi négliger les occasions de rendre nos concitoyens à la liberté.

M. Milcamps, rapporteur. - J’aurai l’honneur de faire remarquer à la chambre que le pétitionnaire n’émet pas seulement un vœu pour le rappel des Belges qui sont dans les colonies, mais qu’il est intéressé à ce rappel, parce qu’il à son fils aux colonies.

- Le renvoi au ministre des affaires étrangères avec demande d’explications est ordonné.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 30 juillet 1833, sept négociants de Grevenmacher demandent que le colportage soit défendu sur le territoire réservé aux frontières. »

- Renvoi à M. le ministre des finances.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 12 août 1833, la dame épouse Denys d’Ostende demande que la chambre intervienne auprès de M. le ministre des finances, pour obtenir de l’avancement pour son mari employé aux douanes. »

- Ordre du jour.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 16 août 1833, plusieurs habitants du canton de Thourout (Flandre occidentale) s’élèvent contre le cumul de juge de paix de deux cantons réunis, exercé par le sieur J.-B. Stock. »

- La commission propose le renvoi à M. le ministre de la justice.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il y a ici erreur de fait. Le titulaire de la justice de paix dont on parle n’est pas M. Stock, c’est M. de Brouckere. Les deux cantons seront probablement réunis en un seul. Cet état de choses est commun à plusieurs communes. La loi sur les circonscriptions judiciaires y mettra fin.

M. de Brouckere. - L’honorable rapporteur se trompe, dans la pétition on ne se plaint pas de ce que M. Stock est juge de paix.

M. Jullien. - Ainsi il n’y a pas rapport sur la pétition, il faut en faire un pour la prochaine séance.

M. Milcamps, rapporteur. - L’analyse n’est pas bien faite. je ne suis pas l’auteur de l’analyse.

- La pétition est renvoyée à la commission, qui fera un nouveau rapport.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 26 août 1833, le sieur J.-B. Van Cutsem, vendeur de bière et locataire, réclame le paiement de l’indemnité qui lui revient du chef de pertes qu’il a essuyées dans les journées de septembre. »

- Renvoi à M. le ministre de l'intérieur.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 28 août 1833, le sieur S. Herpain, à Genappe, demande une loi pour veiller à la conservation de l’existence des citoyens. »

Voici une des propositions du sieur Herpain : Toute personne trouvée se baignant dans une eau profonde d’un mètre, sans avoir pris des sûretés par cordages attachés à des piquets, serait condamnée à 20 francs d’amende, ou à 5 heures de prison pendant le jour (on rit). La commission propose l’ordre du jour.

- L’ordre du jour est adopté.


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 22 août 1833, le sieur S. -F. Anciaux adresse des observations sur le rapport fait par la commission spéciale des finances, sur les pétitions relatives aux los-renten.»

- La commission propose le renvoi de cette dernière pétition à la commission des finances.

M. Angillis. - Je dois faire observer que la commission des finances a examiné les los-renten ; que la chambre a décidé que les réclamations de la nature de celle que fait le pétitionnaire seraient désormais renvoyés à la section centrale chargés de l’examen du budget des finances.

M. de Brouckere. - J’appuie l’avis donné par M. Angillis. Puisque l’occasion s’en présente, je préviens la chambre, et particulièrement les membres de la section centrale, que mon projet est, à l’occasion de la discussion de la dette publique, de faire une proposition à l’effet de payer les intérêts des los-renten.

- La chambre renvoie la pétition à la section centrale, chargée de l’examen de la dette publique. »


M. Milcamps, rapporteur. - « Par pétition en date du 29 août 1833, le sieur Grégoire, notaire à Dalhem (Liége), demande une loi qui dispenserait l’indigent de payer les droits de timbre, d’enregistrement et d’inscriptions hypothécaires. »

- Ordre du jour, attendu que les lois règlent ce point et que la pétition ne présenté aucune vue utile.


M. le président. - M. Liedts, second rapporteur, est appelé à la tribune.

(Aussitôt un profond silence règne dans l’assemblée.)

(Moniteur belge n°19, du 19 janvier 1833). M. Liedts, second rapporteur « Par pétition en date du 11 décembre 1833, le sieur Dejaer-Bourdon, échevin de la ville de Liége, défère à la chambre quatre décisions du conseil de régence de cette ville, et notamment celle du 14 décembre dernier, par laquelle le pétitionnaire est déclaré démissionnaire de ses fonctions d’échevin. »

La commission propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur, avec demande d’explications.

Messieurs, avant de commencer le rapport de votre commission sur la pétition dont je viens de vous présenter l’analyse, vous trouverez sans doute utile que je vous donne lecture de toutes les pièces, afin que vous soyez en état de juger tous en pleine connaissance de cause. (Suit le détail de ces pièces, non reprises dans la présente version numérisée.)

(Moniteur belge n°18, du 18 janvier 1833) Messieurs, voici donc, messieurs, le résume fidèle des faits, tels qu’ils résultent des pièces dont vous venez d’entendre la lecture.

Le conseil de régence de Liège, dans ses séances des 5, 9 et 14 novembre dernier, adopta un règlement d’ordre intérieur dont l’article premier porte que les séances du conseil sont publiques, excepté dans les affaires pour lesquelles, sur la proposition de 3 membres, le conseil demande le huis-clos.

M. Dejaer-Bourdon, l’un des échevins de cette ville, s’abstint de voter sur ce règlement.

La première séance du conseil de régence, qui suivit l’adoption du règlement, fut celle du 3 décembre. M. Lejaer-Bourdon, ayant reçu comme les autres conseillers une carte de convocation, écrivit à M. le bourgmestre que la publicité des séances du conseil étant à ses yeux une illégalité, il ne pouvait assister à la séance du 3 décembre.

Le 3 décembre, le bourgmestre, d’après l’ordre du conseil de régence, écrivit à M. Dejaer pour l’engager à ne point persister dans une détermination que le conseil considérait comme incompatible avec ses fonctions d’échevin et de membre du conseil.

M. Dejaer répondit qu’il persistait dans sa résolution, mais qu’il n’en remplirait pas moins ses fonctions d’échevin d’après la constitution et les lois.

Quelques jours après, M. Dejaer apprit que M. Delfosse, un des conseillers de régence, avait fait une motion tendante à ce que le conseil déclarât M. Dejaer démissionnaire. Il apprit aussi que le conseil devait délibérer le 14 décembre sur l’objet de cette motion.

Le 13 décembre, M. Dejaer écrivit au conseil pour protester contre toute fausse interprétation de ses lettres précédentes et contre toute décision qui porterait atteinte à son mandat, l’informant en même temps qu’il venait de déférer au pouvoir compétent les décisions du conseil des 5, 9 et 14 novembre, comme étant prises inconstitutionnellement.

Malgré cette protestation, le conseil de régence, dans sa séance du 14 décembre, procéda à l’examen de la proposition de M. Delfosse.

Il s’éleva d’abord une question préalable, celle de savoir si le conseil était compétent pour statuer sur cet objet. Cette question fut résolue affirmativement.

La discussion fut ensuite reprise sur le fond et le conseil, à la majorité de 8 voix contre 5, décida que les deux premières lettres de M. Dejaer, des 1 et 9 décembre, doivent être considérées comme une démission de ses fonctions d’échevin.

Cette décision amenant la vacature d’une place d’échevin, le conseil décida qu’à la prochaine réunion des électeurs, il serait procédé au remplacement de M. Dejaer.

Celui-ci, conséquent avec lui-même, continua à se regarder comme échevin et se présenta comme tel à la séance du collège des échevins le 16 décembre 1833, pour prendre part à sa délibération ; mais les bourgmestres et échevins déclarèrent que, chargés de l’exécution de la décision du conseil de régence du 14 décembre, ils ne pouvaient plus admettre M. Dejaer à leurs délibérations.

Sur ce, M. Dejaer se retira et écrivit une dernière lettre au conseil de régence pour protester contre la mise à exécution de la décision du 14 décembre, lettre pleine de calme et de modération.

Ce sont les décisions du conseil de régence des 5, 9 et 14 novembre, et notamment celle du 14 décembre, par laquelle il est déclaré démissionnaire, que M. Dejaer a déférées à la législature comme étant inconstitutionnelles.

La première question qui se présente est celle de savoir si le conseil de régence de Liége a pu, sans blesser la constitution, décréter par son règlement la publicité des séances du conseil.

Comme le but principal de la réclamation du pétitionnaire est de se faire relever de la destitution dont il se croit frappé, votre commission n’a pas cru devoir soumettre la décision que cette première question a reçue dans le conseil de régence de Liége à un examen approfondi.

Permettez- nous, cependant, de vous présenter quelques observations qui seront de nature à vous convaincre que les scrupules élevés par M. Dejaer sur la constitutionnalité de cette décision sont loin de porter l’empreinte de la légèreté ou de la mauvaise foi.

Tout ce qui tient à l’organisation des pouvoirs dans les gouvernements représentatifs et au mode de l’exercice de ces pouvoirs se rattache si intimement à l’ordre public, qu’il eût été absurde d’abandonner à tout autre qu’au législateur le soin de régler tout ce qui se rapporte à ces objets.

La constitution devait, par la nature même des choses, se borner à proclamer les principes ; mais à qui fallait-il en abandonner le développement ? Était-ce au pouvoir exécutif ? Ce serait faire injure au congrès de le supposer, lui qui posait les bases de notre édifice social à une époque où les abus de l’organisation des pouvoirs par de simples arrêtés était encore si vivement sentis. Était-ce à des autorités provinciales ou communales ? cette supposition était plus absurde encore que la première. C’est donc à la loi et à la loi seule que la constitution a pu confier l’organisation et le développement de tous les principes, sans exception aucune, qu’elles a établis ; c’est là une vérité que nous ne craignons pas de poser comme un des axiomes fondamentaux de notre système politique.

Quelquefois la constitution ne s’en est pas expliquée clairement, mais le plus souvent elle s’est explique en termes formels.

C’est ainsi, entre autre exemples, que par son article 108, elle ordonne qu’une loi réglera le pouvoir provincial et communal, en consacrant l’application des principes suivantes :

1° L’élection directe, etc.

2° L’attribution aux conseils provinciaux et communaux de tout ce qui est d’intérêt provincial et communal.

3° La publicité des séances des conseils provinciaux et communaux dans les limites établies par la loi.

4° La publicité des budgets et des comptes.

5° L’intervention du Roi ou du pouvoir législatif pour empêcher que les conseils ne sortent de leurs attributions et ne blessent l’intérêt général.

Prétendre que, parmi les principes écrits dans cet article, il en est que les régences peuvent, en attendant la loi, organiser à leur gré, et d’autres sur lesquels elles doivent attendre les lois à intervenir, n’est-ce pas constituer les régences juges de questions que le congrès a voulu soustraire à leur compétence par cela même qu’il a ordonné que l’application de ces principes se fît par une loi ? Peut-on, sans danger établir une distinction entre les principes que la loi communale devra nécessairement adopter, et ceux dont l’adoption est abandonnée à la sagesse et à la discrétion de la législature ?

Pourquoi donc, jusqu’à la loi communale, les régences seraient-elles fondées à organiser la publicité des séances du conseil ?

Est-ce à cause de la faveur qui s’attache à la publicité ? mais la même faveur s’attache à tous les principes écrit dans la constitution ; tous sont également importants pour les libertés publiques.

Est-ce parce que la publicité est de droit dans les gouvernements représentatifs ? Mais l’on ne veut probablement pas dire par là que cette garantie existe de fait dans tous les gouvernements représentatifs, puisque chacun sait le contraire.

Et si l’on donne a entendre que la publicité est de l’essence de cette forme de gouvernement, nous répondrons que, de l’aveu de tous les publicistes, il existe d’autres principes encore que la publicité, sans lesquels le gouvernement représentatif ne serait qu’une dérision, comme la presse, etc., et cependant l’on n’ira pas jusqu’à soutenir que d’autres pouvoirs que le pouvoir législatif soient compétents pour organiser ces principes

Est-ce parce qu’il ne peut résulter que des avantages de l’organisation du principe de la publicité, tandis que l’organisation de tout autre principe peut être soumise à des limitations sans lesquelles il pourrait aller contre son but ?

Mais le pouvoir constituant a été si bien convaincu des inconvénients que la publicité des séances peut présenter dans certains cas, que cette publicité, d’après l’article 108, n’aura lieu que dans de certaines limites à établir par la loi. Le congrès a donc pensé qu’en dehors des limites qui seront fixées par cette loi, la publicité peut être dangereuse.

Faut-il répondre après cela à l’objection qui consiste à dire que la régence ne se met point à la place du législateur, parce que le législateur statue pour tous les citoyens, tandis que la régence de Liége ne dispose que pour elle-même ? Ne suffit-il point, pour que la violation de l’article 108 soit flagrante, que la régence ait disposé sur un objet qui n’est point dans ses attributions, sur un objet enfin dont la constitution a confié le règlement au législateur ? Et si en ce moment l’élection directe des conseils de régence n’était point organise par un arrêté du gouvernement provisoire, une régence serait-elle fondée à organiser le principe posé au paragraphe premier de l’article 108, sous prétexte que par son règlement elle ne dispose rien pour les autres régences du pays ?

Vous avouerez que la thèse que nous venons de développer peut être très bien soutenue, et qu’en supposant même que M. Dejaer se soit trompé, question que votre commission n’a pas cru devoir résoudre, il ne manque pas d’arguments pour appuyer le scrupule que cet échevin a élevé sur la constitutionnalité des décisions du conseil des 5, 9 et 14 novembre.

Mais abordons la décision prise par le conseil dans la séance du 14 décembre.

M. Dejaer dit-on, a donné sa démission d’échevin et de membre du conseil de régence. Admettons pour un instant que cela soit ; admettons que ce citoyen ait écrit en termes formels qu’il se démet spontanément de ses fonctions. Quelle était l’autorité compétente pour accepter cette démission ?

L’article 53 du règlement des régences du 22 janvier 1824 portait : « Il est réservé au Roi de disposer comme il le juge convenir sur les demandes en démission formées par le bourgmestre ou les échevins étant entrés en fonctions, qui désireraient obtenir leur démission. »

Mais cette disposition, qui était la conséquence d’une nomination directe par le Roi, ne peut plus se concilier avec l’élection des échevins par le peuple ; aussi n’hésitons-nous pas à déclarer que cet article 53 du règlement des régences est aujourd’hui abrogé.

Quelle est donc l’autorité qui depuis la révolution se trouvait substituée à l’autorité royale pour recevoir la démission de M. Dejaer comme échevin ? Aucune loi portée depuis la révolution ne s’est expliqué ; et cependant les autorités constituées, quelles qu’elles soient, n’ont d’autres pouvoirs que ceux qu’elles puisent dans la constitution et les lois.

Cette question ne pourrait pas s’élever si M. Dejaer n’était que simple conseiller de régence ; car l’article 57 du règlement des régences met expressément dans les attributions des conseils de régence le droit de recevoir la démission de ses membres. Cet article porte : « Si un membre du conseil, qui est entré en fonctions, désirait obtenir sa démission, il s’adressera à cet effet au conseil, qui acceptera ou refusera cette démission, et qui dans tous les cas soumettra sa décision à l’approbation des états. »

Nous convenons que la nécessité ait fait admettre, depuis la révolution que les conseils de régence, étendent aux échevins une attribution qui ne leur est donnée, que par rapport aux conseillers.

Mais, dans ce cas, nous ferons observer qu’aux termes de l’article 57 que nous venons de citer, le conseil de régence devait soumettre sa décision à l’approbation de l’état ; et c’est ce qui n’a pas eu lieu.

Cette formalité qui est requise quand il s’agit de la démission d’un conseiller, doit être observée à plus forte raison lorsqu’il est question d’une démission d’échevins, puisqu’un échevin fait partie du conseil.

Soutiendra-t-on que, depuis la révolution, la partie de l’article 37 du règlement qui requiert l’approbation des états est abrogée ? Mais aucune disposition légale n’autorise à le croire. La constitution s’oppose même formellement à cette idée.

En effet, l’article 137 de la constitution dit en termes exprès que les autorités provinciales et locales conservent leurs attributions jusqu’à ce que la loi y ait autrement pourvu. Par conséquent, si d’un côté les conseils de régence ont conservé l’attribution en vertu de laquelle ils peuvent disposer sur la demande de démission faite par un de ces membres, d’un autre côté les autorités provinciales sont maintenant dans l’attribution qui consiste à approuver la décision du conseil de régence sur cet objet.

La régence n’est certainement pas fondée à invoquer les règlements existants pour tout ce qui lui est favorable, et à les répudier dans tout ce qui limite l’exercice de ses attributions. Ce serait là un mode d’interprétation fort commode sans doute mais fort peu conforme à la saine raison.

Qu’on ne dise point que cette formalité de soumettre à l’approbation des états est tombée en désuétude ; car, en supposant que les lois qui règlent les attributions des pouvoirs constitutionnels puissent être modifiées ou changées par le non-usage, ce qui, à nos yeux, serait une hérésie constitutionnelle, il suffira de faire observer que la désuétude, à l’effet d’abroger les lois, ne s’établit que par des actes réitérés longtemps et publiquement dans toute l’étendue du royaume. Or, fût-il vrai que depuis la révolution les conseils de régence ont plusieurs fois admis la démission de leurs membres, sans soumettre leur décision à l’approbation des états, nous ne pensons pas que cet abus, qui n’existerait que depuis trois ans, ait pu acquérir ce caractère de durée, qui fait la principale force de la désuétude et qui la place sur la même ligne que l’abrogation expresse.

D’après toutes ces considérations nous croyons, messieurs, que si les conseils de régence ont le droit de recevoir la démission d’un échevin et membre du conseil, ils ne peuvent, dans l’état actuel de la législation, exercer cette attribution qu’en soumettant leur décision à l’approbation des états ; et qu’ainsi le conseil de régence de Liége, en soustrayant sa décision à cette approbation, en s’attribuant à lui seul, sans l’intervention ni l’approbation d’aucune autre autorité, le droit de statuer sur la démission d’un échevin, a commis, involontairement sans doute, un excès de pouvoir.

Un membre de votre commission s’est abstenu de voter sur cette question, parce qu’il ne croyait pas l’avoir jusqu’ici assez mûrie.

Mais nous irons plus loin encore ; nous irons jusqu’à supposer que la régence de Liége avait le droit absolu et illimité de disposer sur les demandes en démission formées soit par le bourgmestre, soit par un de ses échevins, et nous verrons que même dans cette hypothèse la régence de Liége aurait, quoique de bonne foi, outrepassé ses pouvoirs.

Il suffit, pour en établir la preuve, que la régence de Liége nous accorde qu’elle n’a aucun droit de destituer un de ses membres ; et cette vérité, loin d’être contestée par elle, se trouve au contraire écrite en toutes lettres dans sa délibération du 14 décembre.

Ainsi, droit absolu de recevoir la démission d’un de ses membres, mais prohibition absolue de destituer un de ses membres.

Cela posé, voyons si M. Dejaer a donné sa démission, ou si c’est la régence de Liége qui l’a révoqué, destitué de ses fonctions. Qu’est-ce qu’une démission ? « C’est l’acte, dit Merlin, par lequel celui qui est pourvu d’un office, charge ou commission, déclare purement et simplement qu’il s’en démet, c’est-à-dire qu’il y renonce et qu’il n’entend plus en faire aucune fonction. »

M. Dejaer a-t-il posé un acte semblable ? évidemment non : Loin de déclarer au conseil de régence qu’il renonçait à sa nomination et qu’il n’entendait plus en faire aucune fonction, il lui écrivit le 9 décembre « que sa conduite dans le collège des bourgmestres et échevins serait conforme aux obligations que lui imposent les lois et règlements, la constitution et les intérêts de la ville, » et le 12 du même mois « qu’il protestait contre toute qui serait portée à son mandat. »

M. Dejaer ne s’est donc pas démis purement et simplement de ses fonctions ; il n’a pas renoncé à son mandat.

Mais, dit-on, cet échevin avait déclaré qui n’assisterait plus aux séances publiques ; c’est donc là une démission implicite d’une partie de ses fonctions, et comme une place est indivisible, cette démission partielle entraîne démission pour le tout.

Ce raisonnement, messieurs, est plus subtil que vrai, et s’il pouvait être admis, il conduirait aux conséquences les plus absurdes. L’on conçoit qu’un fonctionnaires qui déclare, comme dit Merlin dans le passage que nous venons de citer, qu’il n’entend plus faire aucune des fonctions attachées à sa charge, déclare implicitement qu’il se démet de sa charge, parce que renoncer à une charge, ou renoncer à toutes les fonctions de cette charge, c’est dire la même chose en d’autres termes.

Mais conclure de là qu’un fonctionnaire qui se refuse à prendre part, à tort ou à raison, à l’un ou l’autre acte, à l’exercice de l’une ou de l’autre partie de ses fonctions, se démet de toute sa charge, c’est manquer aux premières règles de la logique. Qu’un semblable fonctionnaire peut, d’après les circonstances, être fort répréhensible, nous en convenons, qu’il peut par cette conduite se rendre indigne de son mandat et mériter que l’autorité compétente le révoque, le destitue, nous l’accordons encore ; mais jamais on ne fera accroire qu’en lui retirant dans ce cas son mandat, on ne le révoque pas, on ne le destitue pas, mais qu’on ne fait que tirer une conséquence d’un acte qu’il a posé volontairement.

Messieurs, plusieurs d’entre vous se souviendront qu’un membre de la chambre, trouvant notre règlement vicieux, déclara qu’il n’assistait et qu’il n’assisterait à aucune réunion de la chambre en sections. Vous vous rappellerez aussi qu’au congrès national un membre déclara qu’il croyait le huis-clos contraire aux principes de notre révolution et qu’il n’y prendrait aucune part.

Qu’eussiez-vous pensé, qu’eût pensé toute la nation si on avait dit à ces membres que les fonctions sont indivisibles, qu’en renonçant à l’exercice d’une partie de leurs fonctions, ils donnaient leur démission de cette partie, et qu’une démission pour partie entraînant démission pour le tout, ils devaient être considérés comme démissionnaires de leur qualité de membres de la chambre, et qu’en conséquence il serait pourvu à leur remplacement !!

Messieurs, ce n’est point par un abus de mots qu’on change la nature d’un acte ; ce n’est point en décorant la véritable révocation du beau mot de démission volontaire qu’on eût fait croire que la chambre ou le congrès n’aurait pas commis un excès de pouvoir manifeste, en portant une semblable décision.

Le système adopté par le conseil de Liége conduirait, disions-nous, aux conséquences les plus absurdes.

Et en effet si l’on admet que le refus de remplir une partie de ses fonctions entraîne la démission de toutes, que pourra-t-on considérer comme une partie des fonctions ? Le vague le plus indéfini se présente ici à l’esprit, et l’on est conduit à dire qu’on pourra trouver une démission dans l’acte le plus insignifiant.

Et pour continuer à prendre mes exemples dans cette enceinte, on pourrait aller jusqu'à soutenir qu’un membre qui, désigné pour faire partie d’une commission, déclarerait ne pas vouloir s’acquitter de cette tâche, refuse de remplir une partie de ses fonctions et doit par conséquent être déclaré démissionnaire.

Enfin, nous ne savons si, en poursuivant ce système dans ses dernières conséquences, on n’arriverait point jusqu’à faire découler une démission d’une absence volontaire de quelques séances.

Mais, messieurs, nous croirions abuser de vos moments, si nous insistions plus longtemps sur cette question ; l’erreur dans laquelle le conseil de Liége est tombé saute aux yeux de tout le monde, et vous serez tous convaincus que M. Dejaer a été démis de ses fonctions, et qu’il ne s’est pas démis lui-même ; que ce n’est pas lui qui a donné sa démission, mais que c’est le conseil qui l’a démissionné, destitué.

Et, puisque le conseil reconnaît lui-même qu’il n’a aucun droit de révoquer ses membres, il est évident qu’en faisant ce qu’il n’avait pas le droit de faire, il a outrepassé ses pouvoirs, et fait un acte nul et qui ne peut produire aucun effet.

Il est encore une circonstance importante, messieurs que nous ne pouvons passer sous silence : le conseil de régence de Liége, dans sa séance du 14 décembre, était saisi de trois lettres de M. Dejaer. Ces pièces, exprimant la volonté de cet échevin, ne peuvent point être séparées les unes des autres ; elles doivent s’entendre les unes par les autres, si l’on veut saisir la véritable intention de leur auteur.

Or, il résulte de la troisième lettre que M. Dejaer était en appel de la décision du conseil de régence qui déclarait ses séances publiques.

La déclaration de cet échevin, de ne pas assister à ces séances, semblait donc de sa part subordonnée à la décision de l’autorité supérieure, de telle sorte que s’il refusait jusqu’à cette décision de prendre part aux séances publiques, rien ne prouve que sa décision fût absolue et qu’il eût l’intention d’y persister si l’autorité avait approuvé la publicité des séances.

Les trois lettres réunies de M. Dejaer permettaient donc d’interpréter sa détermination en ce sens qu’il refusait d’assister aux séances publiques jusqu’à ce que l’autorité compétente à qui il en avait référé, eût statué sur ce point.

Comment se peut-il donc que l’on ait pu attacher un sens défavorable pour M. Dejaer à une déclaration, qui était susceptible d’une interprétation si naturelle, et si bien en harmonie avec l’entier accomplissement de ses devoirs ?

Messieurs, loin de nous de faire entendre dans cette enceinte des paroles de blâme contre le conseil de Liége ; nous sommes trop persuadés que les hommes honorables dont il se compose, et qui se dévouent avec tant de désintéressement au bien-être de leurs concitoyens, ont droit toute notre estime, même lorsqu’ils se trompent.

Mais d’un autre côté nous avons assez de foi dans le caractère et le patriotisme de ces citoyens pour espérer qu’il suffira de leur avoir fait connaître leur erreur pour qu’ils en reviennent. Ils savent trop bien qu’il n’est pas de corps, si éclairé qu’on le suppose, qui ne se soit trompé quelquefois ; que c’est un tribut que les assemblées comme les individus paient à la faiblesse humaine ; que les annales des cours de justice, des assemblées législatives, sont là pour attester cette vérité, et qu’enfin la véritable grandeur consiste à reconnaître son erreur et point à y persévérer. Ils réfléchiront surtout à la fâcheuse influence qu’une conduite contraire pourrait exercer sur la prochaine organisation des pouvoirs provinciaux et communaux, et l’atteinte que les libertés publiques, qu’ils ont tant à cœur de concourir à vivifier, pourraient en souffrir.

Si, contre tous les vœux que nous formons cet égard, la régence de Liége persistait à poursuivre l’exécution d’un acte que vous regarderez tous, avec votre commission, comme nul et non avenu, nous aimons à croire que le gouvernement trouvera dans les statuts provinciaux et locaux les moyens nécessaires pour l’en empêcher, et que si ces moyens lui manquaient, il s’empressera de nous soumettre une loi qui pourrait l’aider à atteindre ce but, pour qu’à l’avenir de semblables conflits ne puissent plus s’élever.

C’est pour avoir des explications sur ces différents points que votre commission vous propose le renvoi de la pétition au ministre de l’intérieur avec demande d’explications.

(Cette lecture est suivie, dans le Moniteur du jour, du détail des pièces justificatives à l’appui de la pétition, à savoir : les lettres de Dejaer, les convocations aux séances du conseil de régence concernées, l’extrait du registre des délibérations du conseil de régence et du collège des bourgmestre et échevins concernées, la réclamation de Dejaer suite à sa éviction. Ces pièces ne sont pas reprises dans la présence version numérisée.)

M. Doignon. - Messieurs, les développements donnés dans le rapport sont tellement lumineux que, pour éviter toute répétition, il ne me reste qu’à dire mon opinion sur cette affaire qui est très grave. A mon avis, la régence de Liége a commis un excès de pouvoir en prononçant la démission de M. Dejaer, échevin de cette ville. M. Dejaer avait annoncé qu’il était dans l’intention de ne pas assister aux séances publiques ; était-ce à dire qu’il abdiquait ses fonctions ? Evidemment non ; il se réservait d’exercer toutes ses autres fonctions de conseiller, et il n’avait pas renoncé à assister aux séances qui devaient se donner à huis-clos, nonobstant le principe de publicité. Il n’y a donc pas eu démission de sa part.

Sans doute, s’il avait été porté une loi sur la publicité des séances du conseil, on aurait eu à lui reprocher de n’avoir pas voulu exercer ses fonctions conformément à cette loi ; il y aurait eu de sa part refus d’obéir à la loi ; mais aussi longtemps qu’aucune loi ne réglait les limites de la publicité, il était en droit de s’abstenir. C’est donc à tort qu’on lui en a fait un crime.

M. Gendebien. - Je demande la parole pour une motion d’ordre. Messieurs, il me semble que la question qui vient de nous être soumise est d’une nature trop grave et surtout trop délicate dans ses conséquences, pour ne pas l’aborder avec autant de maturité qu’on a mis ailleurs de légèreté.

Pour éviter toute espèce d’interprétation fâcheuse sur la décision qu’on pourrait prendre, je crois qu’il convient que la chambre s’occupe sérieusement de l’affaire ; et pour y parvenir, je pense qu’il est essentiel que le rapport très bien fait et surtout très modéré qui vous a été présenté soit imprime ainsi que toutes les pièces dont il a été donné lecture. Dans une affaire aussi importante, tant sous le rapport des questions qu’elle soulève que des conséquences qui peuvent en résulter, il faut qu’aucun vote et même qu’aucune opinion ne soit émise avant que tous les renseignements aient été réunis, afin que la décision soit rendue en connaissance de cause.

Quand le ministre auquel on propose de renvoyer la pétition aura eu le temps de donner les explications qui sont demandés et que vous les aurez examinées, alors que vous aurez convenablement instruit le procès, vous pourrez prononcer. Par cette mesure de prudence vous éviterez toute espèce de reproche qu’on pourrait adresser à la chambre. Je pense que la chambre n’hésitera pas à ordonner l’impression des pièces et à renvoyer sa décision jusqu’à ce que les explications demandées à M. le ministre de l'intérieur aient été données et qu’on ait eu le temps de tout examiner.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je suis prêt à donner à la chambre les explications que la commission réclame ; mais je suis loin de m’opposer à la motion du préopinant : comme lui, je pense que, dans une question aussi grave, il est bon que toutes les pièces soient mises sous les yeux de tous, que chacun soit à même de pouvoir faire une étude des faits, avant de se décider. Plus la résolution aura été réfléchie, plus elle emportera de force avec elle.

Je ne puis cependant laisser passer sans réponse le reproche qu’on a cru pouvoir diriger contre une décision prise en dehors de cette enceinte. La commission qui dans le sénat a été chargée du rapport sur la réclamation de l’honorable échevin avait étudié la question avec maturité. Le sénat a cru pourvoir se déclarer immédiatement pour le renvoi au ministre de l’intérieur. S’il a agi ainsi, c’est que la manière dont le rapport a été présenté ne lui a laissé aucun doute sur les faits et les conséquences qu’on en pouvait tirer. Au reste, en renvoyant au ministre il n’a rien décidé, il n’a fait qu’émettre une opinion. Je dois donc repousser le reproche de légèreté qui lui a été adressé.

M. le président. - Je vais mettre aux voix la motion d’ordre.

M. Legrelle. - Je demande la parole sur la motion d’ordre. M. de Behr a des faits nouveaux à exposer, qui sont tellement patents, qu’ils ne laissent rien à désirer pour la clarté. Je ne m’oppose pas à l’impression du rapport et des pièces, mais cela n’empêche pas de prononcer de suite le renvoi au ministre avec demande d’explications. Vous ferez voir par là que l’abus de pouvoir commis par la régence de Liége nous a frappés tout tant que nous sommes.

M. Fleussu. - Vous faites le procès à la régence de Liége.

M. Legrelle. - Je ne fais le procès à personne, j’énonce mon opinion. Je crois que je suis dans la question : que M. le président me rappelle à l’ordre.

Je dis donc que ce que nous pouvons faire de mieux, c’est d’adopter les conclusions de la commission qui tendent à faire en faveur de cette pétition tout ce qui est en notre pouvoir, la renvoyer au ministre avec demande d’explications.

Depuis que ce rapport a été rédigé, d’autres faits se sont passés à Liége, et il est dangereux de laisser à cette ville la moindre incertitude sur l’opinion de la chambre à cet égard. C’est pour que cette opinion leur soit connue le plus tôt possible que j’insiste pour que la chambre prononce le renvoi.

M. de Behr. - Je voudrais exposer quelques faits postérieurs à ceux consignés dans le rapport, afin d’éclairer la motion d’ordre.

M. Gendebien. - J’ai fait une motion d’ordre, j’ai demandé l’ajournement, il faut que ma proposition soit mise aux voix.

M. Devaux et M. Dumortier demandent en même temps la parole.

M. Devaux. - La motion d’ordre a eu pour objet de faire cesser toute discussion prématurée, et attendre pour s’y livrer que la chambre ait pu examiner toutes les pièces. Mais cette discussion doit avoir lieu avant et non après les explications demandées au ministre par le renvoi ; car, si vous voulez avoir un vote, ce vote ne peut porter que sur le renvoi proposé par la commission. C’est ce vote qu’on veut motiver, après avoir mûrement pesé les faits, et après une discussion réfléchie. Je demande donc que toute discussion cesse sur le renvoi, que la chambre ordonne l’impression des pièces.

M. Gendebien. - J’ai fait une motion d’ordre, parce que j’ai vu qu’on entamait la discussion du fond, afin que la chambre ne se livrât à cette discussion qu’après avoir pris une connaissance entière des pièces. Je demande qu’il soit statué sur ma proposition avant de passer à la discussion du rapport.

M. le président. - Je vais mettre aux voix la proposition de M. Gendebien.

M. Vilain XIIII. - Je demande que la discussion soit fixée à lundi.

M. Dumortier. - Messieurs, je ne comprends pas la motion d’ordre. Si on entend par là nous interdire de nous expliquer, qu’on le dise. Quant à moi je blâme fortement la conduite de la régence de Liége.

- Plusieurs membres. - A la motion d’ordre ! A la motion d’ordre !

M. de Brouckere. - Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. - J’invite M. Dumortier à se renfermer dans la question relative à la motion d’ordre.

M. Dumortier. - Je dis que je blâme la conduite de la régence de Liége.

M. Fleussu. - Vous sortez de la question.

M. Dumortier. - J’ai la parole et je la conserverai.

M. Fleussu. - M. le président vous a averti de vous renfermer dans la question.

M. Dumortier. - Ce n’est pas vous qui êtes le président.

M. de Brouckere. - J’ai demandé la parole pour un rappel au règlement.

M. Dumortier. - Vous la prendrez quand j’aurai fini.

M. le président. - J’invite de nouveau l’orateur à se renfermer dans la question.

M. Dumortier. - Je répète que je blâme la conduite de la régence de Liége. La chambre va s’occuper d’examiner la loi communale, ces actes de plein pouvoir peuvent avoir les conséquences les plus fâcheuses sur les libertés publiques.

- Plusieurs membres. - Vous sortez de la question. (Agitation.)

M. Dumortier. - Si on veut étouffer ma voix, on n’y parviendra pas. On ne m’empêchera pas d’exprimer ma façon de penser.

Je déclare, pour ce qui me concerne, que la question est tellement grave, qu’il est urgent de prendre une décision au lieu de temporiser comme on le propose. Après les faits qui se sont passés avant-hier, faits qui j’espère, ne trouveraient pas d’écho dans cette enceinte ; après ces faits, dis-je, il importe de savoir comment le gouvernement a l’intention de se conduire, pour faire respecter les droits du peuple belge.

Je demande qu’on fasse cesser toute espèce d’anarchie à Liège. On m’a toujours vu m’élever contre toutes les violations de la constitution : je demande au gouvernement s’il a les moyens de faire cesser les violences qui ont eu lieu à Liége. Il y a ici urgence, on ne peut pas remettre une pareille discussion à huitaine.

- Plusieurs membres demandent la parole.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je crois me renfermer dans les termes du règlement en prenant la parole pour appuyer la motion d’ordre. Je l’appuierai sur des motifs qui ne sont pas tirés du fond de la question soumise à la chambre.

J’approuve ce qu’il peut y avoir d’intime et de chaleureux dans la conviction du préopinant, mais je pense que plus la préoccupation est vive, plus on est sous l’empire des faits qui viennent d’être exposés à la tribune, plus la chambre doit à sa propre dignité à la gravité de la question, de se défendre des sentiments qui paraissent dominer l’honorable préopinant.

La chambre ne doit pas seulement avoir raison par le fond dans une question de cette nature, aux yeux du pays, sa dignité est intéressée à ce qu’elle ait aussi raison par la forme. Les formes de notre délibération doivent donc être graves comme la nature de la question que nous avons à décider. C'est en appuyant ce qu’a dit l’honorable M. Devaux, que je demande le renvoi de la discussion à lundi. C’est un terme moyen qui satisfera toutes les exigences.

Le gouvernement ne se croit pas entièrement désarmé dans ces circonstances ; il a usé des moyens qui croit pouvoir trouver dans les lois ; mais il ne pense pas qu’un ajournement de deux ou trois jours puisse mettre en péril l’ordre public et le maintien des institutions de notre pays.

J’adjure la chambre dans l’intérêt de sa dignité et de l’influence morale qui doit environner sa décision de vouloir bien adopter la motion d’ordre, d’ordonner l’impression du rapport et des pièces, et de mettre la discussion à l’ordre du jour de lundi.

M. de Brouckere. - D’après ce que vient de dire M. le ministre de la justice, il ne me reste que peu de mots à ajouter. La majorité paraît partager l’avis de M. Gendebien, qu’il est tout à fait inopportun de se livrer à une discussion et d’exprimer un blâme quelconque sur la régence de Liége, comme de prendre sa défense, avant d’avoir une connaissance intime des faits. Nous nous exposerions à un jugement prématuré. Laissant les choses intactes, quand nous aurons examiné attentivement le rapport et toutes les pièces, nous nous prononcerons en connaissance de cause.

Si M. Dumortier s’était renfermé dans la discussion quand il a pris la parole, comme il l’a fait en terminant, je ne me serais pas trouvé dans l’obligation de provoquer son rappel à la question.

M. de Behr. - Je demande à faire un simple exposé de faits postérieurs au rapport.

M. le président. - Aux termes du règlement, je dois mettre la motion d’ordre aux voix.

M. de Brouckere. - Messieurs, aucun de nous ne peut se donner la mission de rapporteur. C’est au ministre à nous faire le rapport des faits qui peuvent s’être passés depuis la pétition. Je crois que, d’après la motion d’ordre, il faut borner là la question quant à présent.

Si un membre fait un exposé de faits il peut se glisser des erreurs dans cet exposé ; ces erreurs seront relevées, et la discussion se trouvera entamée. Toute discussion, tout exposé de faits nouveaux doit être renvoyé à lundi. M. de Behr prendra la parole le premier, s’il le désire. Je le prie de ne pas insister aujourd’hui pour faire un exposé qui aurait pour effet inévitable d’ouvrir la discussion.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Messieurs, j’ai appuyé la motion d’ordre qui vous occupe ; mais le rapport de l’honorable M. Liedts s’arrête à une date ; des faits se sont passés postérieurement à cette date ; je ne vois pas pourquoi on refuserait de s’éclairer sur la motion d’ordre par l’audition de ces faits de quelque part qu’ils viennent ; et je ne conçois pas qu’on veuille interdire la parole à un membre sur des circonstances dont il aurait une connaissance personnelle. Je demande donc que la parole soit maintenue à l’honorable M. de Behr.

Je suis, pour ma part, à même de donner à la chambre des renseignements qui me sont parvenus postérieurement à ces réclamations de M. Dejaer.

Vers la fin de décembre la régence arrêta que les électeurs seraient convoqués pour le 13 janvier, à l’effet de nommer trois nouveaux échevins, dont deux auraient formellement donné leur démission, mais dont le troisième au contraire protestait contre toute opération destinée à pourvoir à son remplacement.

Par dépêche du 4 janvier la députation des états invita la régence à surseoir à l’exécution de la décision du conseil en ce qui concernait la démission de M. l’échevin Dejaer et son remplacement.

Le 11 janvier le collège des bourgmestre et échevins adressa à la députation une lettre portant refus d’obtempérer à son invitation.

Le 13 janvier, à la demande de onze conseillers, le conseil fut convoqué pour le 14, veille du jour fixé pour les élections. Dans cette réunion les membres présents, au nombre de onze, décidèrent à l’unanimité qu’il y avait lieu de surseoir au remplacement de M. Dejaer. Les autres membres, au nombre de huit, y compris le bourgmestre, refusèrent de prendre part à cette décision et sortirent de la séance.

Le collège des échevins ne se tint pas pour battu.

Le 15 au matin, on vit paraître deux avis aux électeurs ; l’un annonçant la délibération du conseil portant qu’il y avait lieu de surseoir au remplacement de M. Dejaer, l’autre étant un arrêté du collège des échevins, portant qu’il n’y avait pas lieu de surseoir et invitant les électeurs à passer outre à l’élection des trois échevins.

L’élection eut lieu en effet, et les opérations se passèrent avec plus d’ordre qu’il n’était permis d’en espérer en de telles circonstances.

Voilà, messieurs, en quoi a consisté l’action du pouvoir administratif supérieur : la députation, s’appuyant sur l’article 137 de la constitution., qui l’a maintenue dans ses attributions, et sur l’article 99 du règlement des villes, qui lui confère l’attribution d’inviter les régences qui sortiraient du cercle de leurs pouvoirs, à suspendre toute décision jusqu’à ce que le gouvernement ait statué ; la députation usant, dis-je, et de l’article 137 de la constitution et de l’article 99 du règlement des villes, est venue échouer contre la résistance du collège des échevins ; le conseil lui-même, régulièrement convoqué, après une discussion et une décision régulières, est venu échouer également contre la résistance de ce même collège.

J’avais annoncé, dans une des séances du sénat, la ferme résolution où était le gouvernement de mettre un terme à ce qu’il considérait comme un abus scandaleux. L’expression a été blâmée ici par un membre dont je ne veux pas alarmer de nouveau la virginité, en qualifiant les actes de la régence de Liége. Je me bornerai donc, à l’exposé du fait que je viens de présenter.

En présence de ces résistances, le gouvernement ne se croit pas désarmé. Il pense que les élections qui ont eu lieu pour remplacer un échevin qui n’avait pas donné sa démission, sont radicalement nulles, aussi bien que des élections prescrites contrairement à la décision du conseil, par le collège des échevins ; en conséquence, il n’hésitera pas à prescrire au gouverneur de les annuler.

Si, ce qu’on ne doit pas prévoir et surtout ce qu’on ne doit pas désirer, une nouvelle résistance s’opposait à l’exécution de la décision toute légale prise par le gouverneur, aux termes de l’article 8 de l’arrêté du mois d’octobre 1830, le gouvernement examinerait s’il convient de recourir à la législature pour faire cesser un état de choses aussi préjudiciable aux libertés communales qu’à la tranquillité d’une intéressante cité qui fut le berceau de notre révolution, Après avoir pris une part si large et si glorieuse à notre émancipation politique, Liége ne voudra pas donner à l’étranger un exemple qui pourrait détourner de nous les pays qui ont applaudi avec enthousiasme à notre émancipation. Au reste, le gouvernement croit pouvoir compter, dans cette circonstance, sur le patriotisme et la fermeté de la chambre ; et il attendra avec confiance sa décision sur les conclusions du rapport qui vient de lui être présenté.

M. de Theux et M. Fleussu renonce à la parole.

- La chambre ordonne l’impression du rapport et des pièces dont il a été donné lecture, et renvoie la discussion à lundi.


(Moniteur belge n°19, du 19 janvier 1834) M. Liedts continue le rapport des pétitions. - « Les ouvriers fondeurs en caractères, compositeurs, relieurs, imprimeurs brodeurs, serruriers, à Bruxelles, demandent le rétablissement de l’imprimerie et fonderie normales. »

- Renvoi au ministre de l’intérieur.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur J. Herman, propriétaire de plusieurs maisons situées dans l’ancienne rue du Bled à Bruxelles, réclame le paiement de l’indemnité qui lui a été promise lors de la construction de la rue Royale. »

- Ordre du jour.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Vandermaesen, avocat et maître de forges à Esneux (Liége) demande que les permis de port d’armes de chasse soient supprimés. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur J.-J. Coster, de Dinant, demande que le timbre des permis de port d’armes de chasse et des passeports soit supprimé. »

- Renvoi au ministre des finances, et dépôt au bureau des renseignements.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur P.-F. Renard, à Liége, demande l’érection d’une seule université dont le siège serait à Bruxelles. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Vandael, docteur-médecin et chevalier de la légion d’honneur, à Mons, réclame pour la troisième fois son traitement de légionnaire. »

- Renvoi à la commission chargée d’examiner la proposition de M. Corbisier.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Bosquet de Bruxelles, renouvelle ses observations contre la proposition de M. d’Hoffschmidt, relative aux traitements d’attente. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Leonard Malfait, de Swevezeele (Thielt), blessé dans les journées d’août, demande que sa pension de 91 fl. soit augmentée. »

- Dépôt au bureau des renseignements et renvoi au ministre de la guerre.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Diepenbeek renouvelle sa plainte d’une retenue que veut opérer sur sa pension M. le ministre des finances. »

- Ordre du jour.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Marneffe, employé des finances à Bruxelles, propose à la chambre de décréter qu’il soit créer une caisse générale de pensions pour tous les agents salariés par l’Etat, etc. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Botte, capitaine adjudant-major da la garde civique d’Anvers, renouvelle sa demande de réhabilitation d’un jugement porté contre lui par l’autorité militaire en 1816. »

- Ordre du jour.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur L. Barbieur, sergent au premier régiment d’infanterie, demande une indemnité ou une croix pour la perte de son habillement essuyée en se signalant pour éteindre l’incendie d’un magasin de fourrages. »

- La commission propose du jour.

M. Gendebien. - Je demande la parole ; il s’agit ici d’un vieux brave qui réclame une indemnité pour une perte d’effets. Il s’est adressé au ministre de la guerre qui a pensé que cette réclamation regardait la commission de secours et des récompenses. Un malentendu, qui tient aux graves occupations du ministre de la guerre, a été cause que ce malheureux a toujours été éconduit ; il suffira de renvoyer la pétition au ministre de la guerre pour qu’il y fasse droit.

M. Liedts, rapporteur. - C’est au ministre de l’intérieur que le pétitionnaire s’est adressé, c’est ce ministre seul qui peut accorder une indemnité pour des actes de dévouement. Il n’a pu faire droit à la demande à cause de la manière singulière dont elle était conçue. Je ne m’oppose pas au renvoi au ministre de l’intérieur que cette affaire concerne seul. Le pétitionnaire me paraît digne d’intérêt.

M. Gendebien. - Le pétitionnaire m’a donné ces renseignements lorsqu’il m’a arrêté chemin faisant ; j’ai pu entendre le ministre de la guerre au lieu du ministre de l’intérieur. Comme la réclamation portait principalement sur une perte d’effets dont il demande à être indemnisé, j’ai pensé qu’on devait renvoyer au ministre de la guerre, sauf au ministre de l’intérieur à lui accorder une gratification pour acte de courage.

- L’ordre du jour est rejeté. Le renvoi est ordonné.


M. Liedts, rapporteur. - « La dame veuve J. Desmet, à Bruxelles, ci-devant plafonneur, réclame le paiement d’un mémoire de fl. 134-75, pour blanchissage à la cour supérieure de justice. »

La commission propose le renvoi au ministre de la justice.

M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je dois relever une expression échappée à l’inattention de M. le rapporteur. On a parlé d’enlèvement de fonds. Je crois que cette expression ne peut s’appliquer à aucune des parties de la gestion de l’honorable citoyen qu’une mort prématurée a enlevé à ses amis et à la patrie, à qui il pouvait encore rendre de grands services. Ceci se rattache à la liquidation de M. Claes. On s’occupe de régulariser toutes les réclamations, et il y sera fait droit. Dans la liquidation dont on s’occupe, on n’a rien découvert qui fût en contradiction avec la réputation de désintéressement et d’honneur dont il a toujours joui. Je suis bien aise d’avoir l’occasion de faire cette déclaration.

M. Liedts, rapporteur. - Je n’ai fait que rapporter un fait tel qu’il était énoncé dans la pétition. Je ne savais pas à qui ce fait était imputé, la personne n’étant pas nommée dans la pétition.


M. Liedts, rapporteur. - « Le sieur Davreux (aîné), natif de Bertrix (Luxembourg), demande le maintien du droit actuel de 10 p. c. sur l’importation des tulles étrangers, et l’autorisation de faire entrer en Belgique, en franchise de droit, tous ses métiers à tisser. »

- Renvoi à la commission d’industrie et dépôt au bureau des renseignements.


M. Liedts, rapporteur. - « Les bourgmestre et assesseurs de Thirimont (Hainaut) signalent à la chambre la bonne conduite du sieur Dutrannois, sous-lieutenant dans la douane, et le recommandent. »

- Ordre du jour.

La séance est levée à 4 heures et quart.