(Moniteur belge n°72, du 13 mars 1833)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse fait l’appel nominal à une heure.
M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.
M. Jullien écrit pour demander un congé de huit jours ; le congé est accordé.
Un congé est également accordé à M. d’Hoffschmidt.
M. Fallon, rapporteur de la commission qui a été chargée d’examiner les deux projets de loi sur les barrières, est appelé à la tribune ; il s’exprime en ces termes. - Messieurs la commission que vous avez nommée dans votre séance du 9 de ce mois, pour tâcher d’aplanir les difficultés que le projet de loi sur les barrières a soulevées, ou pour simplifier au moins une discussion qui menaçait de devenir interminable, a pensé que, pour connaître, autant que faire se pouvait, les diverses opinions qui se sont croisées sans pouvoir se rencontrer, il était indispensable de rédiger un nouveau projet de loi, et c’est ce qu’elle a fait, d’accord avec M. le ministre de l'intérieur.
Dans cette nouvelle rédaction, elle a fait disparaître une disposition dont la portée avait été différemment appréciée et elle a conservé la disposition qui renvoie à une discussion ultérieure sur la classification des routes et le placement des barrières, des principes dont la discussion pouvait être ajournée, puisque l’application n’était pas praticable actuellement.
Du reste, elle a pris pour règle de son travail qu’il fallait combiner les besoins du service des routes, de cette branche l’une des plus importantes de l’administration générale, avec les besoins et les ressources du trésor ;
Que dans cette combinaison, il fallait se détacher entièrement de tout intérêt provincial ou de localité, sans froisser toutefois des droits acquis, mais aussi en rendant au trésor l’exercice de tous les siens ;
Que, dès lors que l’emploi des produits appartenait à la discussion des budgets, il n’y avait aucun inconvénient de conserver à la taxe des barrières sa destination naturelle, qui ne doit pas se borner seulement à entretenir ce qui existe, mais encore à venir au secours du trésor, pour améliorer, perfectionner et développer le système des communications ;
Qu’enfin, dans l’état actuel de nos finances et de nos besoins, toute réduction de taxe devait être ajournée.
Telles sont, messieurs, les considérations qui ont dirigé votre commission dans la nouvelle rédaction du premier projet de loi que je suis chargé de vous soumettre.
C’est sur ce projet que la discussion devra maintenant se reporter, puisque M. le ministre de l’intérieur s’y est rallié, et que vous n’aurez plus ainsi à vous occuper ni du projet du gouvernement ni de celui de la section centrale.
Quant au deuxième projet de loi, celui relatif au mode et à la portée de la perception, votre commission, d’accord encore avec M. le ministre de l’intérieur, a adopté la rédaction de votre section centrale, sauf les deux amendements que vous avez sous les yeux.
Votre commission espère, messieurs, qu’elle aura aidé à rapprocher le terme d’une discussion, dont chaque jour de retard augmente l’urgence, et qu’il importe de clore au plus tôt, si nous voulons éviter au trésor de nouveaux embarras et un préjudice plus ou moins considérable, suivant que la mise à exécution de la loi sera plus ou moins prochaine.
Voici les articles que la commission propose :
« Art. 1er. La taxe des barrières établies sur les routes est maintenue. »
« Art. 2. Elle sera perçue à compter du 1er avril 1833, à minuit, conformément à la loi spéciale et au cahier des charges joints à la présente loi. »
« Art. 3. La taxe des barrières établies sur des routes en vertu d’actes de concession sera perçue conformément à ces actes.
« Les dispositions de la loi spéciale réglant le mode de perception, et celles de la loi sur le cahier des charges, sont applicables à cette taxe, sauf les modifications résultant desdits actes de concession. »
« Art. 4. Une loi déterminera la classification des routes et le placement des barrières. »
« Art. 5. Les fonds provenant de la taxe des barrières sur les routes de première et de deuxième classes seront versés dans le trésor de l’Etat et sont affectés à l’entretien et à l’amélioration des routes ainsi qu’à l’ouverture de nouvelles communications ; toutefois, les produits des barrières établies sur les routes de deuxième classe, qui ont été concédés à des provinces, à des sociétés ou à des particuliers, continueront à leur être attribués. »
« Art. 6. Les fonds provenant de la perception du droit des barrières établies ou à établir sur les routes provinciales seront, comme par le passé, perçus au profit des provinces. »
« Art. 7. La présente loi cessera ses effets le 31 mars 1834 à minuit, et elle sera exécutoire du jour de sa promulgation. »
Personne ne prend la parole sur l’ensemble de la loi présentée par M. le rapporteur.
- L’ordre du jour est la discussion des projets de loi concernant les barrières.
Les articles 1, 2, 3 et 4 sont mis aux voix et adoptés sans discussion.
Un amendement est proposé à l’article 5 par M. Gendebien.
M. Gendebien. - Messieurs, je ne sais pourquoi on a retranché de cet article le mot « exclusivement » qui se trouvait dans l’article 3 du projet précédent.
La manière dont cet article 5 est rédigé ne peut présenter aucun inconvénient en introduisant le mot « exclusivement. » On avait trouvé des inconvénients dans les dernières séances, parce qu’on s’est obstiné à entendre l’article 3 dans un sens différent de celui qu’il présente indubitablement en le combinant avec d’autres articles de la loi. Aujourd’hui qu’il ne peut y avoir le moindre doute sur le sens de cet article, aujourd’hui qu’il est clair comme le jour que par améliorations il faut entendre, et l’entretien des routes qui existent, et la confection de routes nouvelles, je ne vois pas pourquoi on retrancherait le mot « exclusivement. »
On dit bien dans l’article que les fonds seront appliqués à l’entretien des routes ; mais il n’est pas possible que vous n’ayez pas voulu parler sérieusement ; c’est ce qui convient à la législature de parler de manière à avoir un effet certain ; je demande si par la rédaction proposée vous aurez la certitude qu’on ne détournera pas les fonds de leur affectation, le mot «exclusivement » n’étant pas employé.
Ce serait une niaiserie législative de vouloir une chose et de ne rien mettre dans la loi qui oblige le gouvernement à suivre votre volonté. Si vous ne faites pas une affectation spéciale des fonds, dites-le dans la loi, ou plutôt ne dites rien, parce qu’il ne faut pas faire de non-sens législatif ; mais si vous faites une affectation spéciale, il faut rétablir le mot « exclusivement. »
M. Fallon. - Messieurs, ainsi que je l’ai déjà annoncé à l’assemblée dans le rapport que je viens de lui soumettre, votre commission a cherché dans la rédaction du projet d’éviter toute nouvelle contestation.
Le mot « exclusivement » qui se trouve dans l’article 3 a donné lieu à de nombreuses discussions ; les uns, pour en obtenir le retranchement, se sont appuyés sur le motif qu’il était inutile de lier la législature, parce que, les produits des barrières figurant dans le budget, la législature pourrait toujours en disposer.
Les autres, qui veulent avoir la garantie que le produit des barrières servira à l’amélioration des routes, demandent la conservation du mot « exclusivement. »
Vous savez que les débats sur ce mot ont été très longs : la commission a cru, pour éviter des débats semblables, devoir le supprimer.
M. de Brouckere. - L’article 5 est diamétralement opposé à l’opinion que j’ai émise dans la séance précédente. Je ne chercherai pas à renouveler la discussion ; je voterai l’article 5 parce que la loi ne sera portée que pour une année. Je n’attache pas d’importance à l’insertion du mot « exclusivement, » parce que cela ne liera pas la législature. Le gouvernement est assez enchaîné par la rédaction de l’article en délibération, puisqu’il ne pourra faire usage des fonds sans l’autorisation des chambres. Il faut que la loi soit votée promptement ici et au sénat, sans quoi il y aurait perte considérable au trésor.
Cependant je ferai une observation importante : le mot « communication, » que l’on emploie dans la rédaction de l’article 3, est trop général ; on ne peut pas employer les produits des routes pour améliorer les canaux.
Les canaux et les routes sont dans des catégories particulières. Si on veut en confondre les produits, il faudrait mettre dans la loi : « ainsi qu’à l’ouverture de routes nouvelles. »
M. Gendebien. - On fait observer que si mon amendement est adopté, il causerait un retard de deux jours. J’aime mieux laisser la loi imparfaite que d’être cause d’un pareil retard.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - D’ici à un mois la chambre connaîtra les intentions du gouvernement relativement aux communications nouvelles qu’il s’agirait d’établir ; mais, dès aujourd’hui, nous pouvons vous dire qu’il n’est pas question de canaux nouveaux à construire ; du moins, les produits des routes de première et de seconde classe ne seront pas appliqués aux canaux. L’année prochaine la chambre pourra employer des expressions plus restrictives.
M. Gendebien. - Je n’insisterai pas, puisqu’il est convenu qu’on ne changera rien au projet de la commission ; mais, je maintiens que si vous ne rétablissez pas le mot « exclusivement, » vous n’atteindrez pas le but que la loi s’est proposée et que le congrès s’était proposé.
L’article 6 du décret du congrès avait employé ce mot, et cependant le gouvernement applique les fonds à d’autres objets : en supprimant le mot, vous aurez encore moins de garantie.
Je ne veux pas lier la législature ; nous ne faisons une loi que pour une année ; nous ne pouvons dans aucun cas lier la législature pour l’avenir, il n y a que la constitution qui puisse lier l’avenir.
J’ai fait l’amendement afin qu’il soit inséré au procès-verbal et qu’on puisse savoir à qui s’en prendre si le gouvernement disposait des fonds à son gré.
- L’amendement mis aux voix est rejeté.
L’article 5 est adopté.
L’article 6 est adopté sans discussion.
M. Deleeuw demande que dans l’article 7 on mette « obligatoire » au lieu d’« exécutoire. »
M. Fallon. - On a suivi le langage du droit ; le code civil dit : « Les lois seront exécutoires. »
M. F. de Mérode. - Je désirerais que l’on mît dans l’article 7 : « cessera d’avoir ses effets. »
M. Fallon. - L’expression « cessera d’avoir ses effets » est encore un langage qui appartient au droit.
- L’article 7 est adopté.
La loi est soumise dans son ensemble à l’appel nominal.
63 membres répondent à l’appel : 59 votent l’adoption, 3 votent le rejet.
M. de Robiano de Borsbeek s’abstient de voter.
- La loi est adoptée et sera renvoyée au sénat.
Ont voté pour : MM. Angillis, Berger, Boucqueau de Villeraie, Coghen, Cols, Coppens, Dams, de Brouckere, de Foere, de Haerne, Deleeuw, de Laminne, Dellafaille, de Meer de Moorsel, le comte F. de Mérode, le comte W. de Mérode, de Nef, de Sécus, de Terbecq, le chevalier de Theux, de Tiecken de Terhove, d’Huart, Donny, Dubois, Dubus, Dumortier, Fallon, Fleussu, Fortamps, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys, Jonet, Lardinois, Liedts, Milcamps Olislagers, Osy, Pirmez, Poschet, Raikem, Raymaeckers, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Rogier, Rouppe, Ullens, Vanderbelen, Verdussen, Vergauwen, Verhagen, Watlet, Zoude.
Ont voté contre : MM. Desmet, Gendebien, Seron.
M. de Robiano de Borsbeek. - Messieurs, les deux premiers jours de cette longue discussion, j’ai pris part plusieurs fois aux débats ; j’ai vu qu’il surgissait des questions difficiles ; je me suis convaincu qu’on ne pouvait faire une bonne loi dans le moment actuel qu’on n’aurait pas le temps de faire ce travail ; dès lors j’ai renoncé à proposer les amendements que j’avais préparés, et croyant qu’il était beaucoup plus avantageux au pays d’employer nos travaux aux lois si importantes, qu’il attend avec impatience, qu’à des lois secondaires et de la durée de quelques mois, je me suis rallié à l’opinion de M. Dumortier qui demandait la prorogation pour une année de la législation existante, avec deux modifications nécessaires. Comme M. le ministre de l'intérieur a insisté pour que son projet de loi fût discuté, je me suis abstenu de prendre part à cette discussion ; je l’aurais prolongée par mes observations, et elle sera toute à recommencer d’ici à quelques mois. Je ne me suis même rendu à la séance d’avant-hier que dans la crainte qu’il n’y eut pas assez de membres présents pour délibérer.
On passe à la discussion du deuxième projet de loi réglant le mode de perception de la taxe des barrières.
Les 4 premier articles sont successivement mis aux voix et adoptés sans observations, en ces termes :
« Art. 1er. Le droit de barrière ne sera perçu qu’aux endroits déterminés par le tableau joint à la présente loi. »
« Art 2. Le lieu de perception est indiqué par un poteau éclairé depuis le coucher jusqu’au lever du soleil. »
« Art. 3. Toute perception exercée à plus de 20 mètres de distance du poteau est illégale. »
« Art. 4. Le paiement du droit ne peut être requis que par des préposés assermentés et munis d’une autorisation de percevoir la taxe, délivrée par l’administration provinciale. »
M. le président. - A l’article 5, la commission propose un amendement tendant à rétablir le tarif en fractions du florin des Pays-Bas, tel que ce tarif se trouve fixé par le décret du congrès, du 6 mars 1831 ; de sorte que l’article serait ainsi rédigé :
« Art. 5. Le droit de barrière sera perçu d’après le tarif suivant, savoir :
« 2 cents 1/2, pour chaque paire de roues de voiture quelconque (trois roues comptent pour deux paires).
« 5 cents, pour chaque cheval ou mulet, attelé ou non, jusqu’à concurrence de 4 têtes d’attelage.
« 7 cents 1/2, pour une cinquième tête d’attelage.
« 10 cents, pour une sixième.
« 20 cents, pour une septième.
« 30 cents, pour une huitième.
« 30 cents, pour chaque tête au-dessus de huit.
« 2 cents 1/2, pour chaque bœuf ou âne attelé.
« 5 cents, pour chaque bœuf ou âne attelé avec plus de 4 chevaux.
« La circulation avec plus de huit chevaux ou mulets attelés est interdite, sauf pour le transport d’objets indivisibles, et dans ce cas, le voiturier devra être muni d’une autorisation du gouverneur ou du commissaire du district. »
« Les chevaux ou mulets d’allège, employés à gravir les pentes des routes qui dépassent 5 centimètres par mètre, ne sont point compris dans la présente disposition.
« Les chevaux de poste paieront pour l’aller et le retour : les maîtres de poste, sous leur responsabilité, tiendront compte au fermiers du droit dû par les voyageurs. »
M. le président. - M. A. Rodenbach a déposé sur le bureau un amendement qui consiste à réduire ce tarif d’un cinquième. Il a la parole pour le développer.
M. A. Rodenbach. - Le but de mon amendement est de diminuer le tarif de 20 p. c., c’est-à-dire d’un cinquième. Vous savez, messieurs, que l’excédant du produit des barrières est immense, et que ce produit s’élève à plus de 2 millions. Par le changement que propose la section centrale, tendant à rétablir le tarif en florins et en cents, on le hausse encore de 5/8 p. c., c’est-à-dire qu’on augmente le produit du droit de 100,000 francs au-delà du vœu ministériel. C’est pour cela que je désire qu’on réduise le droit dans l’intérêt des voituriers qui sont dans une situation déplorable et qui se trouvent obligés d’aller vendre en France leurs voitures et leurs chevaux. Ensuite, il résulterait de l’adoption de mon amendement un accroissement de prospérité pour l’industrie et le commerce, c’est-à-dire pour le pays entier.
Il existe encore beaucoup d’arbitraire dans la taxe des routes, et M. le commissaire du Roi doit le reconnaître.
En vertu d’un décret impérial du 23 juin 1806, on ne peut charger sur les voitures, dont les routes sont de 22 centimètres, que 11,700 kilogrammes, y compris le poids de la voiture. Tout le monde sait cependant qu’ont les charge quelquefois de 20,000 kilogrammes. Cette fraude est réelle ; on la fait par le moyen de certaines charrettes, et en payant des maltôtiers qu’on appelle, je crois, des basculeurs, lesquels font ainsi des bénéfices scandaleux, et dont plusieurs, avec un traitement de 300 florins, ont acheté jusqu’à 2 et 300 arpents de terre. Je prierai M. l’inspecteur-général des ponts et chaussées d’engager le gouvernement à rapporter ce décret, et à fixer pour les charges des voitures un taux raisonnable et assez élevé pour qu’on ne soit pas obligé d’éluder la loi.
M. Teichmann, commissaire du Roi. - Un décret de 1806 a effectivement établi le poids des chargements qu’il est permis de faire circuler sur les routes par les voitures, eu égard à la longueur des essieux et à la largeur des jantes. Ainsi que l’a dit M. A. Rodenbach, le maximum du chargement a été fixé à 11,700 kilogrammes pour les voitures qui peuvent porter les poids les plus considérables.
Si toutes les routes de la Belgique étaient dans la même situation que celle de Charleroy à Bruxelles, si elles étaient assises sur un sol aussi avantageux, construites avec d’aussi bons matériaux, je n’hésiterais pas à me prononcer pour une augmentation dans le taux du chargement sur toutes les routes ; mais il en est très peu qui se trouvent dans ce cas, et si l’on accordait une exemption générale, il serait impossible d’avoir un système de communications comme je l’entends, système pour l’établissement duquel je pense qu’il faut de nouvelles allocations de fonds. Il n’y aurait pas d’inconvénient à ce qu’une partie des routes jouît de cette faveur, mais il est d’autres parties qui seraient non seulement dégradées, mais entièrement détruites par cette mesure, que vous croiriez leur être favorable.
Quant à ce qu’a dit M. A. Rodenbach, je déclare qu’il est à ma connaissance que sur la route de Charleroy, on charge les voitures jusqu’à concurrence de 16,000 kilogrammes, et que, malgré cela, cette route peut être facilement entretenue avec le produit des barrières. Elle sert principalement à conduire les charbons de terre à Bruxelles ; mais la route de Charleroy vers Binche est d’une confection tout à fait différente. Elle est vicieuse quant à sa construction et aux matériaux qu’on y a employés. Quand j’étais ingénieur en chef du Brabant, j’ai eu de la peine à maintenir la circulation sur cette dernière route, et si on la surchargeait, elle serait bientôt détruite. Il y en a d’autres qui sont dans le même cas. Je suis donc obligé de m’opposer à ce que le décret du congrès reçoive pour le moment la moindre modification.
M. le président. - Voici l’amendement de M. Gendebien tel qu’il a été imprimé :
« Le droit de barrière sera perçu d’après le tarif suivant, savoir :
« 10 centimes, pour chaque paire de roues de voiture quelconque (trois roues comptent pour deux paires).
« 5 centimes, pour chaque cheval ou mulet, attelé ou non, jusqu’à concurrence de 5 têtes d’attelage.
« 15 centimes, pour une sixième.
« 30 centimes, pour une septième.
« 50 centimes, pour une huitième.
« 80 centimes, pour chaque tête au-dessus de huit.
« 5 centimes, pour chaque bœuf ou âne attelé.
« 10 centimes, pour chaque bœuf ou âne attelé avec plus de 5 chevaux. »
(Le surplus de l’article comme au texte primitif.)
M. Gendebien. - Par suite du changement proposé par la commission, il faut convertir les centimes en cents.
Messieurs, d’après ce que j’ai eu l’honneur de dire dans les précédentes séances, il est inutile d’insister sur une question qui ne peut pas en faire une. Il est évident pour tout le monde qu’il faut favoriser le transport des produits et des matières onéreuses, et qu’il résulte de la facilité des communications une source de prospérité pour le pays. Pour y parvenir, il me semble qu’il est nécessaire de diminuer les frais de transport, et c’est dans ce sens que j’ai l’honneur de vous soumettre un nouveau tarif.
Vous verrez, messieurs, que j’ai fait une diminution sur les attelages qui ne sont que de huit têtes. Pour les neuvième et dixième, comme on ne peut les employer que par exception, et que c’est un privilège, je les ai augmentées.
Je crois du reste que mon amendement a été suffisamment justifié par toutes les discussions qui ont eu lieu et je n’en dirai pas davantage pour ménager les moments de la chambre.
M. Milcamps. - Messieurs, dans un moment qui exige plus d’actions que de discours, je regrette de devoir prendre la parole pour vous entretenir de deux pétitions adressées à la chambre, tendant à ce que la législature établisse les droits de barrière dans la proportion de ce qui est indispensable à l’entretien et à la réparation des routes, ou tout au moins à une réduction de tarif actuel de ces droits.
Si cette demande, ainsi que les pétitionnaires le prétendent, est fondée sur les principes de notre législation et sur les véritables principes de l’économie politique, elle est digne de toute votre attention, de toute votre sollicitude.
L’une de ces pétitions contient l’historique de la législation sur la taxe des barrières. Mais je ne m’attacherai pas à ce point, que l’honorable M. Jonet a traité suffisamment. J’arriverai de suite à la question d’économie politique.
Vous savez, messieurs, et j’ai quelque pudeur à le rappeler, que le but de l’économie politique est de rendre l’aisance aussi générale que possible, et qu’un des meilleurs moyens de rendre l’aisance générale et de répandre l’industrie. Eh bien ! c’est l’application de ces principes que le pétitionnaire réclament.
La réduction du tarif, disent-ils, aura l’heureux résultat de conserver l’existence à 200,000 familles, qui ne vivent que de l’intéressante industrie du roulage ; d’accroître, par la consommation, la valeur des produits nombreux de notre agriculture, le foin, la paille, l’avoine, et ceux de notre commerce de détail, tels que le fer, le bois, etc.
Mais si, pour obtenir de pareils résultats, il suffit d’opérer une réduction sur les droits de barrière, ne devons-nous pas, messieurs, prendre en sérieuse considération les pétitions dont il s’agit.
M. Pirmez, et après lui M. Gendebien et M. Rodenbach, appréciant le fondement de la réclamation, ont proposé des amendements tendant à cette réduction, et je viens les appuyer.
Mais une prévention s’est d’abord manifestée contre la proposition de M. Pirmez, et comme elle pourrait agit sur la proposition de MM. Gendebien et Rodenbach, il importe de détruire ce qui l’a fait naître.
Ce sont, ont dit dans le cours de la discussion MM. Dumortier et d’Elhoungne, des intérêts de localité qui provoquent ces réductions. Je demande pardon à ces honorables membres, c’est l’intérêt général. Nous ne disons pas : Ne créez pas de canaux, de nouvelles routes ; nous disons : Répandez l’industrie, ne la restreignez point, ne l’anéantissez pas surtout.
Mais les pétitionnaires ont parlé du roulage sur la route de Charleroy ! Eh ! oui, sans doute ils en ont parlé, mais parce qu’ils sont pénétrés de l’idée que, pour juger l’intérêt général, il faut connaître les intérêts particuliers de chaque localité.
Ainsi, si je viens à mon tour vous exposer que le gros roulage avait lieu particulièrement sur les routes de Charleroy à Bruxelles, et de Binche à Mont-Saint-Jean, pour le transport des houilles de Charleroy et de Marimont, et pour le transport des pierres de Feluy et d’Arquennes.
Si je viens vous rappeler que le canal de Charleroy à Bruxelles fut conçu dans l’intérêt de la Hollande et que, s’il était utile aux exploitations des endroits que je viens de citer, il était repoussé par la province du Brabant, je ne prétends pas par là diriger mes attaques contre ce canal ; ce canal est un fait accompli. Ce que nous avons à faire, c’est de rechercher s’il est conforme à l’intérêt général qu’à côté de cette communication l’industrie du gros roulage périsse. Ici est toute la question ; c’est une question d’intérêt général.
Messieurs, le système des routes par eau doit être combiné avec le système des routes par terre, de manière que ces deux systèmes combinés embrassent toutes les contrées, tous les produits, tous les objets de consommation. Mais il faut prévenir que la vie des communications par eau ne donne la mort aux communications par terre ou vice-versa ; du moins, par l’effet d’un impôt excédant les besoins des communications, parce qu’alors vous tuez l’une ou l’autre des deux industries.
Une réduction du tarif des droits de barrière ne saurait nuire aux exploitations des houillères de Charleroy et de Marimont, aux exploitations des carrières de Feluy et d’Arquennes. Il importe peu aux propriétaires de ces riches exploitations que le transport de leurs marchandises se fasse par terre ou par eau, par des voituriers ou pas des bateliers ; cela n’importe pas davantage aux lieux où les marchandises arrivent. Ce qui leur importe, ce qui importe à l’intérét général, c’est que le transport des produits ait lieu au prix le moins élevé.
Vous, voyez, messieurs, qu’ici je me dépouille de tout esprit de localité, que je ne suis pas dirigé par des idées étroites de province, que je me renferme dans le mandat de député de la nation.
En effet, je ne viens pas vous demander de favoriser les communications par terre, au préjudice de celles par eau, et vice-versa ; d’établir entre elles une concurrence : l’intérêt général s’y oppose. Mais je viens vous demander de ne pas renverser l’ancienne et précieuse industrie du roulage par des taxes qui excèdent les besoins des routes. Je ne vais pas comme vous voyez, jusqu’à demander que vous imitiez l’exemple de la France.
Mais ont-ils bien réfléchi ceux qui pensent qu’on peut par l’élévation des taxes, anéantir une industrie ? A-t-il jamais existé un économiste qui ait professé une pareille doctrine ? Que l’on puisse conserver une industrie au préjudice d’une autre, par une diminution de taxe, je le conçois ; et pour vous donner une preuve, messieurs, combien je suis peu animé de l’esprit de localité, je vais faire une bien large concession.
On dit que le gouvernement, moyennant une diminution du droit de péage sur le canal de Charleroy, a consenti, en faveur des concessionnaires, à une prolongation du terme de la concession. J’ignore si le fait est vrai ; mais je suppose qu’il soit exact : eh bien ! je ne viendrais pas prétendre que le gouvernement l’a fait pour favoriser les transports par eau au préjudice de ceux par terre. Je reconnaîtrais que le gouvernement n’aurait eu en vue que l’intérêt général, parce qu’il importe à l’intérêt général, c’est-à-dire aux consommateurs, que les transports se fassent au moindre prix possible.
Ainsi, s’il arrive un jour que, par la réduction du droit de péage sur le canal de Charleroy, l’industrie du roulage soit anéantie, je ne viendrai pas élever la voix en faveur de cette industrie, soit que la réduction soit le fait des concessionnaires, soit qu’elle soit le résultat d’une convention entre le gouvernement, et les concessionnaires.
Mais je ne pourrai jamais admettre qu’on anéantisse l’industrie du roulage par l’élévation d’une taxe qui excède les besoins de la route, dans l’unique vue d’assurer au trésor un revenu, quelle que soit la destination de ce revenu, et je me prononcerai constamment contre une pareille disposition.
D’ailleurs, le gouvernement, si la taxe proposée est adoptée, peut-il espérer d’obtenir sur les routes de Charleroy à Bruxelles et de Bruxelles à Mont-Saint-Jean les mêmes produits que dans les années précédentes. Pour moi, j’ai une opinion tout à fait différente. Evidemment les enchérisseurs seront arrêtés par la crainte fondée de voir disparaître le gros roulage devant le canal ; et, si mes prévisions sont fondées, qu’aurez-vous fait ? Vous aurez fait l’avantage des concessionnaires, vous les aurez enrichis au préjudice du roulage et du trésor.
Ces funestes résultats, l’honorable M. Pirmez les avait bien prévus lorsqu’au nom d’une partie considérable de la population de deux des plus belles provinces du royaume, au nom de l’intérêt général, avec lequel celui de cette population se confond, au nom des véritables principes de l’économie politique, et même des principes de notre législation, il est venu vous demander une disposition exceptionnelle pour la route de Charleroy à Bruxelles, disposition exceptionnelle dont les effets auraient dû s’étende à la route de Bruxelles à Mont-Saint-Jean, parce qu’il y avait parité de motifs et de raison.
En vérité, messieurs, je suis à me demander pourquoi sa proposition a été reçue avec défaveur : ce n’est pas la crainte d’établir un privilège ; car je ne vois pas plus de privilège dans la réduction d’un droit de barrière sur certaine route que je n’en vois dans la réduction d’un péage sur certain canal. Je ne conçois de privilège que lorsqu’une faculté est accordée à une communauté ou à un particulier de jouir de quelque avantage à l’exception des autres. Or, dans ce cas, chacun ne peut-il pas jouir de la route ou du canal ?
Maintenant que tout a été dit en faveur d’une disposition exceptionnelle, je reviens à la proposition de M. Gendebien, où il s’agit d’une réduction du droit de barrière en général.
Conséquent dans mes principes, qu’on ne peut ni détruire ni restreindre l’industrie d’une contrée par l’élévation d’un droit au profit du trésor, j’appuierai la proposition de l’honorable membre. C’est dans l’intérêt de l’Etat qu’on vous propose une diminution de droits et de permettre d’augmenter la charge des voitures. Ce ne sont pas des droits élevés qui font rentrer le plus d’argent au trésor, mais des droits modérés : l’expérience prouve mieux cette vérité que tous les raisonnements, et si cette vérité s’applique moins à des droits de barrière, toujours demeure-t-il vrai que, relativement au gros roulage, elle recevrait son application.
Je vous le prédis, messieurs, si vous adoptez le tarif en discussion, les routes seront désertes : les voituriers, ne pouvant supporter des droits de barrière aussi élevés que ceux que l’on propose, vendront chevaux et chariots et ne circuleront plus sur les routes. Où en serez-vous alors avec vos droits élevés ? Trouverez-vous alors des fermiers qui verseront au trésor les sommes nécessaires à la confection de vos nouvelles communications ? Trouverez-vous des individus qui voudront se ruiner pour exécuter des projets de nouvelles routes ? En adoptant le projet en discussion, vous aurez consommé la ruine de 800,000 Belges, et vous aurez réduit considérablement le produit des routes. Que dis-je ? Vous aurez fait l’avantage des concessionnaires du canal de Charleroy. Voilà où conduit un système de législation qui n’embrasse pas la fois tous les intérêts du pays et où l’on n’aperçoit, comme dans celui relatif aux barrières, qu’une question d’argent. Pourquoi ? Pour pouvoir construire de nouvelles routes, sans examiner quelle sera l’influence de ces communications sur la prospérité du pays.
Je terminerai par une observation. A ceux qui me reprocheraient d’être dirigé par des idées étroites de province, je dirai : Gardez-vous, si dans vos localités les mêmes motifs ne militent pas avec la même force pour une réduction du droit de barrière, gardez-vous de vous diriger par un esprit de localité. Embrassez le pays tout entier. N’oubliez pas le principe des économistes : il faut répandre l’industrie, non la restreindre ou l’anéantir par une taxe ou une trop grande élévation de la taxe ; car, enfin, messieurs, si le roulage est détruit sur les routes de Charleroy à Bruxelles et de Binche à Mont-St-Jean, à qui en sera l’avantage ? aux concessionnaires du canal ; mais, je le déclare, ce ne sera pas avec mon assentiment.
M. Desmet. - Messieurs, j’appuie l’amendement de mon honorable collègue et ami M. Alexandre Rodenbach, qui propose une diminution de 20 p. c. sur la taxe actuelle. Je l’appuie d’autant plus volontiers parce je suis convaincu que la diminution de la taxe, tout en favorisant l’industrie du roulage, donnera un plus grand produit et augmentera l’excédant à employer pour la construction de nouvelles routes, et que d’un autre côté je crois qu’on peut trouver un moyen propice pour augmenter cet excédant : ce serait celui d’entretenir les routes pavées avec plus d’économie, et que cependant elles seraient conservées dans un meilleur état d’entretien qu’aujourd’hui.
Le moyen dont je veux parler pour entretenir les routes avec moins de dépenses serait de mettre cet entretien à charge des fermiers de barrières, c’est-à-dire que, par une clause du cahier des charges, chaque teneur serait tenu d’entretenir en bon état la distance de la route sur laquelle se trouve placée la barrière. On soumettrait le fermier aux mêmes obligations que sont tenus les cantonniers, qui, d’après le décret de 1811, sont obligés d’exécuter leurs travaux sous la surveillance des ingénieurs et conducteurs des ponts et chaussées, et sont chargés de relever et de remplacer de suite, et jour par jour, chaque pavé enfoncé ou cassé, de maintenir et reposer les pierres ou pavés de bordures, de déblayer les boues amoncelées dans les flaques et bas-fonds, de combler les ornières qui peuvent se faire entre les chaussées et les accotements, d’entretenir les accotements unis et praticables en toutes saisons, etc., etc. Ce mode d’entretenir les routes est connu depuis longtemps ; on en a fait usage en Belgique sous le gouvernement autrichien, et il a procuré de bons résultats ; on l’emploie encore aujourd’hui dans quelques parties de l’Allemagne, et on s’en trouve très bien.
On sent que les teneurs de barrières, se trouvant sur le lieu et étant intéressés à ne pas avoir de grandes réparations, auront soin de réparer de suite les parties endommagées, et d’entretenir ainsi les routes continuellement en bon état ; de même pendant le temps du dégel où comme on sait se fait le plus de dégâts aux pavés, ils trouveront leur avantage à ne pas laisser passer librement de voitures surchargées et feront observer dans toute leur rigueur les règlements de police émanés à ce sujet, tandis qu’actuellement on est peu scrupuleux et que même très souvent, pour avoir la pièce, on laisse passer les voitures et l’on est cause qu’une détérioration considérable est portée à la route.
Anciennement chaque teneur de barrière avait chez lui pour domestique un ouvrier paveur, et dès qu’un voiturier ou toute autre personne venait l’avertir qu’une place de la route se trouvait endommagée, de suite cet ouvrier s’y rendait pour la réparer ; de cette manière la route ne restait jamais longtemps sans être restaurée et ne se portait à un état impraticable.
Un autre avantage pas moins important que procurera ce mode d’entretien, c’est qu’il mettra un terme aux tours de bâtons et aux moyens de voler l’Etat, comme il arrive assez fréquemment aujourd’hui, que les entreprises pour la réparation du pavage des routes se font au mètre carré et qu’on paie d’après le nombre de mètres qu’on indique être restaurés : car vous savez, messieurs, que le sable joue un grand rôle dans ces réparations ; on lève par-ci par là quelques pavés et on couvre de sable toutes les lacunes intermédiaires, qui n’ont pas été levées, de sorte que quand on fait un ouvrage de quatre à cinq mètres, on vous en mesure par ce moyen dix à douze. Il est connu que beaucoup d’agents du waterstaat ne sont pas bien scrupuleux, pour accepter ce ouvrage et toiser les parties du pavé d’après qu’elles ont été indiquées et sablonnées par les entrepreneurs et cela avec une telle facilité qu’on devrait croire que les deux parties partagent le gâteau.
J’appuie donc l’amendement de M. Rodenbach, et je crois comme lui qu’on peut augmenter le poids des transports sans réellement faire tort aux pavés, et qu’on rendra un éminent service à l’intéressante industrie du roulage qui entretient quantité de familles, qui touche à un grand nombre d’intérêts et surtout d’intérêts ruraux, et qui déjà à tant souffert depuis qu’on a baissé les péages sur les canaux d’Antoing et de Charleroy ; et à cette occasion, je dois, messieurs, vous faire connaître que depuis la diminution du péage sur le canal de Charleroy, la navigation sur la Dendre a beaucoup diminué, et même à un tel point qu’elle y est presque nulle. Cependant je ne vois pas de motif pourquoi le ruisseau de Charleroy doive avoir un privilège et que, pour faire des avantages injustes à quelques spéculateurs, on ôte le pain aux bateliers de la Dendre, et qu’on tue cette industrie dans ces contrées. Une réclamation a été faite à ce sujet au gouvernement par plusieurs bateliers d Alost ; j’espère bien qu’il y aura égard, et prendra des mesures pour remédier à cette espèce d’inconstitutionnalité.
M. Teichmann, commissaire du Roi. - Messieurs, les uns ont demandé une réduction générale sur le tarif, les autres sur quelques points de ce tarif ; et enfin d’autres ont demandé une diminution sur le droit de percevoir dans quelques localités. Quant à moi, je considère le système entier des communications comme une vaste machine qui est livrée aux producteurs pour qu’ils puissent transporter leurs produits aux consommateurs. Et certes, il est dans l’intérêt et des propriétaires de cette machine et de ceux qui s’en servent que la dépense soit la plus faible possible ; mais avant de réduire le droit à percevoir, proportionnellement aux frais d’entretien, il faut qu’elle soit complète, qu’elle soit parfaite. S’il existe des éléments incomplets dans cette machine, la force en sera nécessairement moindre.
Il est constant que, dans nos communications par terre, il y a des lacunes qu’il est indispensable de combler, et si le droit équivaut seulement aux frais d’entretien, il sera impossible de les remplir.
Je n’ai pas besoin d’entrer dans de grands détails pour démontrer que les excédants du produit des barrières ne sont pas trop, ne sont pas même assez élevés pour arriver à ce résultat que le système de nos communications soit complet, soit régulier, et que les différentes parties qui le composent puissent se prêter mutuellement secours. Dans la province du Hainaut, celle qui est la plus riche en routes et en minéraux, il reste encore à faire les routes de Tournay à Renaix, de Lessines à Renaix, et de Tournay vers la France.
Il suit de là que les produits du droit des barrières, tel qu’il se perçoit aujourd’hui d’après le tarif existant, ne sont pas assez forts pour subvenir aux besoins de communications nouvelles qui se font sentir. Il y a beaucoup de travaux neufs à exécuter. Lorsque le système des routes sera complet, c’est alors qu’on pourra proposer des réductions au tarif. Quant à l’amendement de M. Gendebien, il me serait impossible de vous en signaler à l’avance le résultat, s’il était adopté et je crois que l’honorable membre serait bien embarrassé de le faire lui-même.
Il paraît que plusieurs membres ont été induits en erreur sur le montant des sommes disponibles sur le produit des routes. De ce que leur revenu figure au budget général pour 2 millions 66 mille fr., et qu’il n’est porté que 900,000 fr. au budget de l’intérieur pour les frais d’entretien, on en a conclu qu’il y avait un excédant de 1,300,000 fr. et plus. Mais je ferai remarquer qu’au budget de l’intérieur ne sont pas compris les frais d’entretien des route de deuxième classe. Tout compte fait, l’excédant s’élèvera cette année de 600 à 650 mille fr.
On a parlé aussi de la nécessite qu’il y avait de mettre les routes à même de soutenir la concurrence avec les canaux, Messieurs, je ne crois pas que lorsqu’un nouvel instrument est créé, il faille faire des sacrifices en faveur de l’ancien, pour qu’il soit en état de soutenir la concurrence. On a prétendu que le canal de Charleroy avait été ouvert dans l’intérêt de la Hollande. Je réponds qu’il a été ouvert dans l’intérêt des consommateurs ; et qui fait la richesse du producteur, si ce n’est le consommateur ? Vous vous plaignez que le commerce n’ait pas atteint tout le degré de prospérité qu’il devrait avoir. Mais d’où cela vient-il ? De ce que vous n’avez pas de débouchés à l’extérieur. Eh bien ! n’allez pas encore diminuer vos communications intérieures.
On aussi entretenu la chambre du mode d’entretien des routes. Cet entretien est différent selon que ces routes sont pavées ou faites en galets. En Allemagne il y a très peu de routes pavées ; elles sont presque toutes en galets du Rhin. Pour ces dernières les frais d’entretien sont assez modiques, mais il n’en est pas de même pour les routes pavées. Il faut que vous sachiez bien qu’un pavé transporté de la carrière à sa destination revient à 20 et 2 centimes ; il faut que vous sachiez que le sable dont on peut faire abus, coûte très cher dans certaine localité, et se paie jusqu’à 6 et 7 fr. le mètre cube.
Par tous ces motifs je dois m’opposer à toute réduction générale ou partielle du tarif.
M. Marcellis. - Messieurs, je me prononce aussi pour le maintien du taux du tarif de la section centrale. Si dans ce moment nous introduisons un système de réduction, je demanderai dans quel but nous avons spécialisé les fonds des barrières : nous les avons spécialisés purement et simplement en considération de l’extrême importance, de l’extrême urgence à établir des communications nouvelles. Si nous regardons le produit des barrières comme excessif pour l’entretien des routes, si nous jugeons qu’il ne faut pas spécialiser leur emploi, je serais encore d’avis de maintenir le taux du tarif, parce que l’impôt des barrières est plus convenable que bien d’autres. Ainsi, je veux que l’on mette cet impôt, premièrement parce que c’est une conséquence de la spécialité, et en second lieu parce que c’est un impôt qui convient au pays.
J’ai entendu parler des intérêts des voituriers ; mais l’intérêt des voituriers est aussi bien dans l’établissement de routes nouvelles que dans la diminution des droits.
On dit qu’il n’y a pas de fonds pour créer des communications nouvelles : j’en suis tellement convaincu que si le gouvernement n’emploie pas ses fonds pour entrer dans des associations, il ne pourra jamais suffire aux besoins. Le gouvernement, je n’en doute pas, suivra, l’exemple des Anglais et des Américains. L’Ecosse, en quelques années (je parte de la haute Ecosse), s’est couverte de routes extrêmement étendues. Dans l’intervalle de 10 à 12 années, on a construit, je crois, 1,300 kilomètres de routes. Cependant ces routes n’ont coûté au gouvernement anglais que 6 millions de francs. Pourquoi ? Parce que le gouvernement est entré dans la construction des routes par association. En 1819, il s’est agi de créer des fonds pour établir de meilleures communications entre l’Irlande et l’Angleterre et l’on a représenté qu’il n’y aurait pas économie à ne pas donner les fonds demandés ; et c’est au nom de l’économie que les fonds ont été alloués.
Je conclus. Je pense que le taux de la section centrale doit être adopté.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, dans la précédente séance je n’ai pas exagéré l’excédant du produit des barrières sur les dépenses de recette, en l’évaluant à 7 ou 8 cent mille francs,. Je ferai observer de plus qu’aussi longtemps qu’une machine semblable à celle des communications n’est pas achevée, il faut des sommes immenses pour l’achever. Si le produit des barrières était de 10 millions au lieu de 2 millions, M. le commissaire du Roi aurait encore pu tenir le même langage. Quand une industrie souffre, il faut trouver moyen de l’empêcher de souffrir : les rouliers du Brabant sont ruinés ; nous demandons seulement une diminution d’un cinquième ; ce n’est pas là diminuer le produit d’une manière exorbitante. Déjà on a augmenté l’impôt de plus de cent mille francs ; la diminution de 20 p. c. n’empêchera donc pas d’achever la machine dont a parlé M. le commissaire, ou d’y mettre quelques ressorts de plus. (On rit.) On assure que dans l’administration du waterstaat, il y a autant de capitaines que de soldats ; il serait donc possible de trouver là et ailleurs des économies qui permettraient d’achever la grande machine. (Aux voix ! aux voix !)
M. Pirmez prouve, par des exemples, que l’on peut permettre l’augmentation de la charge des voitures ; il cite la route de Marimont, celle de Bruxelles à Malines, et montre que les produits de ces routes suffisent à leur entretien, quoique les voitures qui y passent soient chargées au-delà des règles prescrites. Relativement à cet objet, l’honorable membre entre dans des détails sur les dimensions des voitures et sur leurs chargements ; mais les chiffres qu’il pose ne parviennent pas jusqu’à nous.
M. Teichmann, commissaire du Roi. - Ce qu’a dit l’honorable préopinant est vrai ; mais il n’a cité que trois ou quatre communications ; ce sont là des exceptions qui n’infirment pas le cas général. Sur les 625 lieues de routes que nous avons, il y a 100 lieues qui pourraient supporter le chargement qu’on voudrait leur imposer.
Le décret de 1806, relatif au chargement des voitures, n’a pas, pour nos localités, toute l’utilité qu’il a pour la France : je pense qu’on pourrait y apporter quelques modifications ; alors on pourrait majorer d’une certaine quantité les chargements mentionnés dans ce décret. Les chargements sont différents selon la largeur des jantes, la longueur des essieux. Le décret devrait être revu sur tous ces points.
Je pourrai proposer à M. le ministre de l'intérieur de vous soumettre un projet de loi sur cette matière ; mais je ne pourrai faire cette proposition qu’à titre d’essai. L’effet de la loi serait limité à la durée d’une année ; nous aurions au bout de ce terme l’expérience pour nous, et nous pourrions prendre une mesure définitive.
Il est inutile de faire observer que, dans la loi concernant le tarif des barrières, des dispositions de cette nature ne sauraient trouver place.
M. Deleeuw. - Messieurs, je serai très court quoiqu’il s’agisse d’une question importante d’économie politique.
L’honorable M. Milcamps a soutenu qu’il fallait diminuer certains droits de barrière ; je viens combattre cette opinion et appuyer le tarif proposé. Il est possible qu’il y ait des excédants de produits, même après qu’on a pourvu à l’entretien des routes ; mais n’est-il pas important que cet excédant soit appliqué à l’amélioration des communications et la création de routes nouvelles ? La prospérité ne consiste pas seulement à circuler à bon marché sur les routes existantes ; il faut, pour augmenter cette prospérité, établir des routes nouvelles. Si l’on se borne à diminuer les droits de péage sur les routes existantes, qu’arrivera-t-il ? La circulation pourra bien augmenter sur ces routes, qui par là même coûteront davantage d’entretien ; mais d’un autre côté vous empêcherez la création de nouvelles routes ; il est pourtant de la plus haute importance de multiplier les communications.
M. de Terbecq. - Messieurs, lors de la discussion en section centrale du projet de loi à l’ordre du jour, j’ai, à l’occasion de la proposition de M. Pirmez, qui avait demandé une réduction sur le droit de barrière pour la route de Charleroy à Bruxelles, communiqué une pétition adressée au Roi par les bateliers navigant sur la Dendre, de Lessines à Termonde, qui réclament l’exemption du droit de barrière au roulage qui transporte le charbon des houillières de Marimont, Sars-Longchamps, Houding et autres, aux rivages de Lessines sur les routes à parcourir jusqu’à la Dendre, et l’exemption du droit de navigation sur la Dendre jusqu’à Termonde pour les bateaux qui seraient chargés de charbons provenant des rivages de Lessines, afin de pouvoir soutenir la concurrence avec les bateliers qui naviguent sur le nouveau canal de Charleroy à Bruxelles.
La navigation de la Dendre se fait au moyen de 120 à 130 bateaux, qui appartiennent à autant de pères de famille et qui sont leur seule ressource et leur procurent des moyens d’existence ; les bateliers réclamants se fondent sur leurs justes doléances que, par suite de l’ouverture du canal de Charleroy et des diminutions considérables qui ont été accordées sur les droits de navigation de ce canal, ils ne peuvent plus tenir aucune concurrence avec les bateliers de ce même canal.
Les approvisionnements des villes d’Alost, Termonde, Gand et Anvers, ne se faisant plus à Lessines, mais bien à Seneffe et les environs, chez de nouveaux marchands, qui sont établis et qui peuvent fournir dans toutes les villes, et principalement à Anvers, à un prix infiniment inférieur à celui que doivent maintenir les marchands de Lessines ; désirant en conséquence, voir rétablir autant que possible l’équilibre entre la navigation de Charleroy et celle de la Dendre, j’appuierai aussi toute proposition tendante à une réduction des droits de barrière sur les routes. (La clôture ! la clôture !)
M. Gendebien. - Je ne prétends pas prolonger la discussion, mais je vous prie de remarquer que la question est d’un intérêt plus général que l’on ne se l’imagine. Je ne pense pas qu’on prétende, par une clôture prématurée, consoler les malheureux voituriers mourant de faim sur les routes de Charleroy…
M. de Brouckere. - On demande la clôture, mais je vous fais observer que plusieurs des membres qui la demandent voteront la diminution.
M. Dumortier. - Si l’on propose des amendements, j’ai aussi à proposer une diminution pour la route de Mons à Tournay, et je demanderai la parole pour développer ma proposition.
M. Gendebien. - Si l’honorable préopinant avait voulu se donner la peine de me comprendre, il se serait aperçu que j’ai fait une proposition générale applicable au Tournaisis comme au Brabant.
Quoi qu’il en soit de ma proposition, j’espère que l’on fera une exception en faveur des voituriers de Charleroy à Bruxelles.
M. Pirmez. - Je me réunis à l’amendement de M. Gendebien.
M. le président. - La parole est à M. A. Rodenbach.
M. A. Rodenbach. - Mon amendement est aussi une mesure générale ; je n’ai plus rien à dire.
- La chambre ferme la discussion.
La réduction du cinquième des droits de barrière, proposée par M. A. Rodenbach, mise aux voix, est rejetée.
L’amendement de M. Gendebien est également rejeté.
L’article 5 de la section centrale, mis aux voix, est adopté.
« Art. 6. Le droit sera perçu en entier, d'après le tarif, à chaque passage au poteau de la barrière : cependant les personnes dont les chevaux, équipages, voitures quelconques quittent la route ou s'arrêtent habituellement, après avoir dépassé le poteau, à une distance de celui-ci moindre que 500, 1,000, 1,500 ou 2,000 mètres, seront admises, soit par le fermier, de gré à gré, soit d'office par la députation des états, à ne payer qu'une portion du droit de :
« Un cinquième pour la distance de moins de 500 mètres.
« Deux cinquièmes pour une distance de 500 à 1,000 mètres.
« Trois cinquièmes pour une distance de 1,000 a 1,500 mètres.
« Quatre cinquièmes pour une distance de 1,500 à 2,000 mètres. »
Cet article est adopté sans discussion.
M. Dumortier. - Depuis très longtemps on s’est plaint et avec raison de ce que le gouvernement avait mis à la charge des villes l’entretien des routes qui les traversent. Il faut que la loi fasse cesser cet abus.
Le roi Guillaume, qui l’a introduit, cherchait à grever les villes au profit du trésor public. Depuis quelque temps il est vrai, nous sommes tombés dans un abus inverse. Mais, si nous avons tort d’en agir ainsi quand les demandes des villes et des provinces ne sont pas fondées, il est de notre devoir de redresser les injustices quand elles se font.
Le gouvernement percevant le droit de barrière en-deçà et au-delà des villes, c’est au gouvernement à entretenir les routes, les pavés des routes qui traversent ces villes. Dans une conversation que j’ai eue avec M. le commissaire du Roi, on m’a promis que dorénavant le gouvernement se chargerait de cette dépense. Je crois donc que la proposition suivante n’éprouvera pas d’opposition :
« L’entretien et la réparation des routes de première et de seconde classe, qui traversent les villes, sont mis à la charge du gouvernement. »
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Messieurs, j’ignore si l’honorable M. Dumortier a pris connaissance du chapitre du budget de l’intérieur où l’on vous demande une allocation particulière pour l’entretien des routes qui traversent les villes. L’amendement proposé serait mieux placé dans ce budget que dans une loi concernant le tarif des barrières.
M. Dumortier. - Je consentirais très volontiers à retirer mon amendement, si j’avais l’assurance que la mesure aura lieu pour toutes les villes. On demande seulement dans le budget une allocation pour participer à l’entretien des routes qui les traversent ; mais qui assure que dans l’application il n’y aura pas d’exceptions ? Nous faisons une loi de principes ; il faut donc y déposer tous les principes nécessaires. Le budget est une loi d’application, et le ministre pourrait dans l’application décharger une ville pour en surcharger une autre.
Les villes de Leuze et de Soignies, depuis 15 ans, ont leurs revenus absorbés par l’entretien des routes. Leur crédit en est ruiné. Cet abus est trop criant, a occasionné trop de mal, pour qu’on le laisse subsister.
Le seul moyen d’empêcher sa continuation, c’est d’adopter l’amendement que j’ai présenté.
M. de Brouckere. - La loi que nous votons ici n’est que pour une année, et le principe que nous y introduirions ne remplirait pas l’intention de son honorable auteur. Si, au budget de l’intérieur, nous accordons l’allocation pour l’entretien des routes qui traversent les villes, le ministre n’osera pas faire un autre emploi de ces fonds qui auront une spécialité.
M. Coghen. - Puisque le gouvernement, dans le budget du ministère de l’intérieur, demande une allocation spéciale pour la partie des routes qui traversent les villes, il est fort inutile de mettre un principe sur cet objet dans une loi de péage. M. de Brouckere en a très bien exposé les motifs.
M. F. de Mérode. - Il n’est pas prouvé que les villes souffrent parce que des routes les traversent, et je ne suis pas d’avis qu’on décharge les villes de l’entretien de ces routes. Si on disait aux habitants de Soignies : La route que vous entretenez ne passera plus maintenant au travers de votre ville elle passera par le village voisin, croyez-vous que les habitants consentiraient à ce qu’il en fût ainsi ?
M. Fallon. - J’appuierais volontiers la proposition de M. Dumortier ; mais, dans les circonstances actuelles, je dois repousser l’amendement, parce que, s’il était adopté, il faudrait retarder de deux jours l’adoption du projet.
M. Dumortier. - Je retire mon amendement.
Le premier paragraphe de l’article 7 est adopté.
« Art. 7. Sont exempts du droit :
« § 1. Les chevaux et voitures employés pour le service du Roi et de la Reine, et de la famille Leurs Majestés, ainsi que pour celui des personnes qui, en voyage, forment leur suite. »
M. le président. - La commission propose un amendement.
M. Fallon. - L’amendement de la commission ne retardera pas l’adoption de la loi, car vous ne votez maintenant que sur la proposition de la commission.
M. de Brouckere. - Cela est évident : nous discutons sur le projet qui nous est soumis par la commission, et auquel le ministre s’est rallié.
M. le président. - La commission demande que les chevaux et les voitures des ambassadeurs étrangers soient exempts de la taxe des barrières.
M. A. Rodenbach. - Je demanderai à M. le rapporteur de la commission pourquoi il veut exempter les voitures des ambassadeurs. Est-ce parce qu’ils sont trop riches qu’ils ne paieraient pas ?
M. Fallon. - Le motif est un motif de convenance.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Cette exemption a lieu dans tous les pays où il y a des barrières.
M. Gendebien. - Je ne sais pas comment, par courtoisie, nous irions exempter des ambassadeurs grassement payés, tandis que nous refuserions de diminuer le tarif en faveur de nos malheureux compatriotes à qui nous ôtons le pain.
Quand je vois notre ambassadeur recevoir 8 florins par poste, je crois qu’il aura de quoi payer la barrière.
Les ambassadeurs ont le moyen de payer ; pourquoi les exempter ? C’est par courtoisie : nous n’avons pas été assez bien traités, depuis deux ans, par la diplomatie, pour la laisser passer sans payer les droits et lui donner un coup de chapeau. (On rit.)
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - La faveur accordée aux ambassadeurs ne fera pas grand tort au trésor. Si la diplomatie ne nous a pas bien traités, ce n’est pas la faute des ambassadeurs qui traversent notre pays. Cette exemption est réclamée à titre de réciprocité. Les ambassadeurs ne paient pas de droit dans les pays où il y a des barrières, et la Belgique veut faire comme les autres pays. C’est une mesure de convenance : les nations, comme les particuliers, sont soumises, dans certains cas, aux convenances.
M. de Brouckere. - Lorsque l’on m’a remis le projet élaboré par la commission nommée avant-hier, j’ai été étonné d’y voir l’amendement en discussion. J’ai témoigné cet étonnement à plusieurs de mes collègues. M. le ministre de l'intérieur a bien voulu nous dire que c’était à titre de réciprocité qu’on exemptait les ambassadeurs, puisqu’en Prusse et en Angleterre, où il y a des barrières, ces diplomates sont exemptés.
En réfléchissant bien à cette réponse, je partage l’avis de M. Gendebien. Je ne vois aucune raison d’établir cette exemption. Si c’est à titre de réciprocité, je répondrai : Eh bien ! qu’on assujettisse nos ambassadeurs au droit de barrière en Prusse et en Angleterre, nous ne nous en plaindrons pas. Quelques droits prélevés sur leurs traitements feront qu’ils auront des économies moins grandes.
Il est facile de vous démontrer que l’amendement est sans objet, parce que nous n’avons pas ici d’ambassadeurs étrangers, et que nous n’en aurons jamais : nous n’avons que des ministres étrangers qui ne sont pas dans la même catégorie que les ambassadeurs. Si j’étais préposé à une barrière, d’après votre loi je ne laisserais pas passer, sans payer, le ministre qui n’est pas ambassadeur.
L’amendement est inutile.
M. A. Rodenbach. - Je ne sais si c’était aussi pour des motifs de convenance que Wellington demandait à ne pas payer l’impôt pour sa principauté de Waterloo. La convenance c’est que les riches paient les droits auxquels les pauvres sont assujettis.
M. Angillis. - Je m’opposerai toujours à toute réclamation tendant à obtenir la clôture d’une discussion qui n’est pas parfaitement éclairée. Le motif que le prolongement de la discussion retarderait de deux jours l’adoption d’une loi me touche ; notre devoir n’est pas de nous hâter, mais de bien faire, mais de méditer les lois que nous portons.
Relativement à ce que viennent de dire MM. Gendebien et de Brouckere, je suis de leur opinion. Je ne vois pas pourquoi on exempterait les ambassadeurs, tandis qu’on ferait un droit onéreux à des pauvres rouliers. Je ne connais pas de convenances applicables dans ce cas ; je ne connais que la justice, et la justice repousse l’amendement. Je voterai contre.
- L’amendement mis aux voix est rejeté.
Le paragraphe 2 de l’article 7 est mis aux voix et adopté en ces termes :
« § 2. Les chevaux de la gendarmerie nationale ;
« les chevaux montés par des militaires en uniforme et en service. »
« § 3. Les chevaux et voitures servant au transport des courriers de cabinet ou de la poste aux lettres, lorsqu'ils ne sont accompagnés que d'un seul voyageur. »
M. Gendebien. - Je demande de quels courriers de cabinet on entend parler ; est-ce de ceux de la Belgique seulement ? Ensuite, pourquoi excepter un voyageur ? Il vaut mieux les soumettre tous au droit. Je demande qu’on maintienne la disposition pour la poste seulement.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Je ne sais pas si l’amendement est fait dans le but de faire une économie ; mais s’il en était ainsi, je ferais remarquer à M. Gendebien que son but serait tout à fait manquer ; car, comme les courriers de cabinet se font payer leurs frais de voyage sur le gouvernement, si on les soumet au droit de barrière, ils se le feront rembourser. Ensuite, il en résulterait un très grand inconvénient, c’est que ces courriers éprouveraient du retard.
M. Osy. - J’appuie l’amendement parce que je pense tout le contraire de ce qu’a dit M. le ministre. C’est en laissant l’article tel qu’il est que les courriers éprouveront du retard, car les percepteurs des barrières pourront leur demander leurs passeports pour voir s’ils sont bien réellement des courriers de cabinet.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) et M. F. de Mérode font remarquer que les courriers de cabinet ne se sont jamais plaints de la disposition, et puisqu’elle n’a donné lieu à aucune réclamation, ils insistent pour qu’elle soit conservée.
- L’amendement de M. Gendebien est mis aux voix et rejeté.
Le paragraphe 3 est adopté sans modification.
Tous les autres paragraphes sont aussi successivement adoptés sans changement, ainsi que le reste des articles en ces termes :
« § 4. Les chevaux, voitures et équipages militaires appartenant à l’Etat ou à des corps d'armées nationaux ou étrangers, lorsqu'ils seront pourvus du signe distinctif déterminé par le département de la guerre, ainsi que les chevaux requis pour le transport de l'artillerie ou des voitures et équipages militaires ci-dessus désignés, et les voitures mises en réquisition pour service militaire.
« § 5. Les chevaux ou voitures servant au transport des ingénieurs ou conducteurs des ponts et chaussées, munis d'une feuille d'exemption délivrée par le département de l'intérieur. »
« § 6. Les chevaux servant au transport des contrôleurs des contributions et commis à cheval, dans l'exercice de leurs fonctions.
« § 7. Les chariots, voitures et animaux servant au transport des récoltes et du bois d'affouage, des champs et de la forêt, vers la ferme ou la grange, et vers la demeure de l’affouager, ou allant à vide vers les champs et la forêt pour les mêmes fins.
« § 8. Les chariots, voitures et animaux exclusivement chargés d'engrais, fumier ou cendres pour l'agriculture, lorsque le chargement sera au moins au deux tiers complet.
« § 9. Les chariots, voitures et animaux passant à vide, en allant chercher, ou après avoir conduit des engrais pour l'agriculture.
« § 10. Sont considérés comme engrais : »
« Les cendres ordinaires de bois et de houille, les cendres dites de Hollande, la suie, le gypse ou le plâtre indigène, la marne, le tan sortant des fosses de la tannerie, et la chaux.
« § 11. Le droit devra être consigné en allant à vide, sauf restitution au retour.
« § 12. Pour jouir de ces exemptions, en ce qui concerne la chaux et le gypse, on devra être muni d'une déclaration exempte de timbre, délivrée par l'administration locale, constatant que ces matières, dont on désignera approximativement les quantités, sont exclusivement destinées à l'agriculture.
« § 13. Les chevaux d‘allège, lorsqu'ils ne sont employés qu'à gravir les pentes des routes qui dépassent cinq centimètres par mètre.
« § 14. Les chariots, voitures et animaux appartenant à des fermes, ou à des usines activées par le vent, l'eau ou la vapeur, situées à moins de 2,500 mètres de la barrière, lorsqu'ils servent au transport d'objets nécessaires au service de ces usines ou de ces fermes.
« § 15. Les chariots, voitures ou animaux qui transportent dans les villes, directement aux marchés, des légumes ou fourrages verts, du beurre et du laitage ; mais seulement à la barrière la plus rapprochée de ces villes.
« § 16. Les chevaux, chariots ou voitures exclusivement employés pour le service des travaux de la route, mais seulement aux barrières établies sur la partie de la route située dans la province pour laquelle le transport aura lieu. »
« Art. 8. Un registre de service, fourni par le fermier, et paraphé par le conducteur de l'arrondissement, sera déposé à chaque bureau de barrière ; il sera destiné à la transcription de chaque procès-verbal, aux ordres de service, et a l’annotation des plaintes ou observations que les voyageurs auraient à faire parvenir à l’administration. Les fermiers seront tenus de le représenter à toute réquisition. »
« Art. 9. Nul ne pourra refuser d'acquitter le droit entier requis dans la forme voulue par les articles 2, 3 et 4 de la présente loi, sauf les exceptions ou modifications indiquées aux articles 6 et 7. »
« Art. 10. En cas de doute ou de contestation, le montant du droit exigé sera consigné sur quittance entre les mains du percepteur ; le domicile du consignataire sera indiqué par lui au registre de service.
« Le fermier ou percepteur sera tenu de représenter à toute réquisition la loi et le cahier des charges relatifs à la perception des droits de barrières. »
« Art. 11. Défenses sont faites de diminuer le nombre des chevaux des attelages, à une distance moindre de 500 mètres de la barrière, pour les atteler de nouveau, après l'avoir dépassée ; de quitter la route à une distance du poteau au-dessous de 500 mètres, pour la reprendre après, et d'éluder les clauses d'un arrangement établi suivant l‘article 6. »
« Art. 12. Toute contravention aux articles 5, 7, 9, 10 et 11, sera punie d'une amende équivalente à 30 fois le droit exigible, sans préjudice au paiement du droit. »
« Art. 13. Toute violation qui aurait pour objet d'empêcher la perception du droit sera punie d'une amende de deux à vingt francs, sans préjudice à l'application du code pénal, s'il y a lieu. »
« Art. 14. Toute contravention devra être constatée par un procès-verbal signé et affirmé par le préposé à la perception, dans les deux jours qui suivront celui de la contravention. Le procès-verbal sera transmis au procureur du Roi près le tribunal de première instance, afin que l'affaire soit portée devant le juge compétent. L’action à laquelle la contestation donnera lieu, sera prescrite si la signification de la citation n'a pas été faite dans le mois de la date du procès-verbal. »
« Art. 15. Toute contestation sur l'exécution des dispositions de la présente loi sera du ressort des tribunaux. »
- La chambre consultée décide que l’on votera à l’instant sur l’ensemble de la loi.
On procède à l’appel nominal dont voici le résultat :
Sur 62 membres, 55 votent pour la loi et 7 contre.
En conséquence, elle est adoptée et sera transmise au sénat.
Ont voté pour : MM. Angillis, Berger, Boucqueau de Villeraie, Coghen, Cols, Coppens, Dams, de Bousies, de Brouckere, de Foere, de Haerne, de Laminne, Deleeuw, Dellafaille, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Renesse, de Roo, de Sécus, de Theux, de Tiecken de Terhove, d’Huart, Domis, Donny, Dubois, Dumortier, Duvivier, Ernst, Fallon, Fleussu, Fortamps, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys, Liedts, Marcellis, Mary, Morel-Danheel, Nothomb, Olislagers, Osy, Raikem, Raymaeckers, C. Rodenbach, Rogier, Rouppe, Teichmann, Ullens Vandenhove, Vanderbelen, Verdussen, Veraghen, Watlet et Zoude.
Ont voté contre : MM. E. Desmet, de Terbecq, Gendebien, Milcamps, Pirmez, A. Rodenbach et Seron.
M. le président. - Nous allons maintenant passer au vote définitif du projet du cahier des charges, dont les articles ont été adoptés dans la séance de samedi dernier.
- Les amendements introduits dans ce projet sont remis aux voix et adoptés définitivement.
On procède à l’appel nominal sur l’ensemble.
Sur 64 votants, 60 votent pour et 4 contre.
En conséquence, ce projet est adopté.
La séance est levée à 4 heures.