Poullet Prosper (1808-1937)

(Extrait de La Libre Belgique, du 4 décembre 1937)

Mort du vicomte Prosper Poullet, ancien Premier ministre

Le vicomte Prosper Poullet, député, ancien Premier malade depuis plusieurs mois, s'est éteint dans son paisible hôtel de la rue des Joyeuses-Entrées, à Louvain.

Il est mort dans la ville universitaire où s'écoula toute sa vie et où il naquit le 5 mars 1868.

Fils de professeur et d'historien, professeur lui-même et juriste éminent, homme politique et homme d’Etat, le vicomte Poullet était en Belgique une personnalité de tout premier plan, et sa science juridique autant que les missions dont il fut investi par son pays lui avaient acquis hors de nos frontières une enviable renommée.

C'est à l'Université catholique où professait son père qu'il conquit ses grades de docteur en philosophie et lettres et de docteur en droit. A vingt-cinq ans, en 1893, il devenait, à son tour, professeur à l'Alma Mater où il enseigna le droit international privé.

De bonne heure, Prosper Poullet se lança dans la politique. Elu conseiller provincial suppléant en 1898, il devint effectif en 1900. Il resta conseiller provincial du Brabant jusqu'au début de 1908, époque où il entra à la Chambre des Représentants comme suppléant de Jules de Trooz.

Il fut aussi conseiller communal de Louvain de 1904 à 1911, fonctions qu'il abandonna pour prendre celles de ministre dans le gouvernement de Broqueville, le 17 juin 1911. Titulaire du portefeuille des Sciences et des Arts, il le garda jusqu'à fin 1918.

De janvier à fin mai 1918, il cumula cette charge avec celle de ministre des Affaires économiques ; mais il abandonna celle-ci à M. Cooreman lorsque ce dernier prit la succession du comte de Broqueville. Il resta éloigné alors des conseils de la Couronne et n'y rentra que le 2 décembre 1919, comme ministre des Chemins de fer et des P. T. T, dans le second gouvernement Delacroix.

Nouvelle éclipse ministérielle dans le cabinet Carton de Wiart en 1921 et dans le cabinet Theunis en 1922 et 1923.

A l'occasion d'un remaniement du gouvernement Theunis en mars 1924, M. Poullet devient ministre de l'Intérieur et de l'Hygiène, charge qu'il conserve pendant un an, et qu'il continue d'assumer dans l'éphémère gouvernement Van de Vyvere, en mai-jain 1925.

On se rappelle la grave et profonde crise politique de cette époque, où le gouvernement Van de Vyvere, composé de personnalités exclusivement catholiques sauf feu Léon Théodor qui était un « indépendant » et le général Hellebaut qui, bien que d'opinion catholique, n'était cependant pas un homme de parti - où ce Gouvernement tomba par la faute du parti libéral qui lui avait refusé son appui.

Après deux mois de crise rendue presqu'insoluble par l'exclusive libérale - il n'y a rien de nouveau sous le soleil ! – le roi Albert chargea Prosper Poullet de constituer le Cabinet. On a gardé le souvenir de cette coalition catholico-socialiste que ne soutenaient ni les catholiques de la Droite traditionnelle ni les libéraux, et beaucoup ont certes encore présents à la mémoire les polémiques ardentes et les débats parlementaires orageux dont le gouvernement Poullet-Vandervelde fut l’objet. Celui-ci ne put résister aux assauts de plus en plus furieux de l'opinion publique, en présence d'un « glissement à gauche » - alors aussi ! - qui avait compromis le franc. Le Gouvernement, disloqué par la panique boursière des premiers mois de 1926, tomba sur la dévaluation de notre monnaie.

C'est alors qu'apparaît le cabinet du cabinet Jaspar, suivi en 1932 du cabinet Renkin. Prosper Poullet est absent de ces deux gouvernements. Dans l'intervalle, le roi Albert l'a nommé ministre d'Etat, le 20 mai 1926. Il reparaît sur les bancs ministériels avec le gouvernement de Broqueville sorti d'une autre grave crise politique en octobre 1932. Il prend le portefeuille de l'Intérieur et de l'Hygiène, puis, à l’occasion d'un remaniement, le portefeuille des P. T. T. Il abandonne à nouveau la carrière ministérielle en janvier 1934, pour rentrer comme ministre sans portefeuille, avec MM. Vandervelde et Hymans, dans le premier cabinet van Zeeland en mars 1935. On sait qu'il conserva ces fonctions jusqu'à l’avènement du second gouvernement van Zeeland en juin 1936.

Dès ce moment, le vicomte Prosper Poullet, gagné par l'âge et miné par la maladie, ne parut plus guère dans les milieux politiques. Bientôt même, ses forces le trahirent et il ne put plus quitter sa patricienne demeure de la rue des Joyeuses Entrées.

En plus de son professorat à l'Université catholique de Louvain, en plus de ses occupations parlementaires et ministérielles, Prosper consacrait encore une part de son temps et de son activité aux œuvres sociales et de charité. Président du Comité de patronage des habitations ouvrières et des institutions de prévoyance des cantons de Louvain, Aerschot et Haecht, il fut aussi membre de la Commission supérieure de patronage du Congrès International de la protection de l'Enfance.

En outre, le défunt occupait sur le plan international une place de premier plan. Membre associé de l'Institut de droit International privé, membre de la Commission permanente pour l'examen des questions de droit international privé, vice-président de l'Institut de droit international, il représenta à diverses reprises la Belgique aux assemblées et aux réunions de Commission de la Société des Nations.

Très attaché au sort des humbles, au reste d'une bonté et d'une générosité natives, il avait pris position en faveur de deux causes qu'il considéra toujours comme un devoir de défendre : la cause des ouvriers et la cause des Flamands. Cette politique, à laquelle il resta fidèle en dépit des oppositions et des sarcasmes, lui valut une popularité que nul ne pourrait contester et que les hommes politiques ne connaissent que rarement.

Esprit particulièrement distingué et cultivé, il est l'auteur de nombreux ouvrages de science juridique et d'histoire, parmi lesquels il faut citer « Les institutions françaises de 1795 à 1814 » et l' « Essai sur les origines des institutions belges contemporaines. » C'est lui aussi qui, étant ministre des sciences et des arts en 1913, fit voter la loi sur l'enseignement primaire obligatoire.

Au Parlement, il était l'un des orateurs les plus écoutés, non pas qu'il eut l'éloquence de la tribune, mais parce que nul n'ignorait l'étendue de ses connaissances, la droiture de sa pensée et la probité de son caractère. Ses interventions dans les grands débats sur les lois militaires, sociales, juridiques, linguistiques faisaient autorité.

Mais il lui manqua une vertu : la vertu du chef. C'est probablement par défaut d'énergie et de clairvoyance, ces deux qualités maîtresses indispensables à ceux qui doivent commander, que la coalition catholico-socialiste de 1925-26 aboutit au gâchis que l'on sait.

Ce sont des erreurs et des défaillances qui se paient cher. Mais elles ne peuvent nous empêcher de nous incliner bien bas devant le souvenir d'un homme qui fut un grand serviteur de la Patrie.

Chrétien convaincu, catholique pratiquant, le vicomte Prosper Poullet a vécu sa foi d'une manière exemplaire. Serviteur fidèle de l'Idéal que nous servons nous-mêmes, nous saluons en lui un soldat du Christ, un fils de l'Eglise, qui laissera l'indélébile souvenir d'une vie de dévouement constant désintéressé aux plus nobles causes.

M. Poullet était grand officier de l’ordre de Léopold, grand-croix de l'ordre de la Couronne, grand-croix de la Légion d'Honneur, grand cordon de l'ordre d'Orange-Nassau et titulaire de nombreux ordres étrangers.

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(Extrait de La Libre Belgique, du 4 décembre 1937)

Un bel éloge du défunt le comte Carton de Wiart

M. le comte Carton de Wiart, ministre d'Etat, a prononcé, vendredi soir, devant le micro de l’I.N.R., un discours dans lequel il a rendu un hommage ému à la mémoire du vicomte Poullet dont il a, en ces termes, retracé la carrière et évoqué la noble figure :

Pour le monde universitaire comme pour le monde politique la disparition du vicomte Poullet est un deuil cruel.

Je ne puis en ce moment qu'évoquer quelques souvenirs de la vie de cet homme de bien, de ce grand savant et de ce grand citoyen profondément dévoué à son pays, auquel j'étais lié par une amitié qui remontait à nos études communes de philosophie et lettres. Je le vois encore arrivant à la faculté de l'Institut Saint-Louis où il s'était inscrit en 1886 au sortir de ses humanités. D'une taille exceptionnellement grande, il attirait aussitôt l'attention. L'expression de son visage était toute de modestie et de sérieux. Auréolé parmi ses compagnons de la réputation qui s'attache aux forts en thèmes qui passent brillamment leurs examens, on le sentait voué d'avance à la noble et absorbante mission du professorat. Toutes ses traditions familiales l'y préparaient. Son père, Edmond Poullet, fut longtemps un des professeurs les plus favorablement connus de l’Université de Louvain. Ses travaux, d'une rare érudition, consacrés à l'histoire et au droit de nos anciennes provinces, sont encore souvent consultés et cités aujourd'hui.

Il fut un de ceux qui, avec le baron de Gerlache, avec Gachard, avec Kervyn de Lettenhove, s'employèrent patiemment et savamment à défricher tout le champ de notre passé national. Ce champ où, à leur tour, les Godefroid Kurth et les Henri Pirenne ensemencèrent après eux une si riche moisson.

Prosper Poullet avait deux frères qui disparurent longtemps avant lui. L'un, officier de notre armée, fut un des pionniers de notre civilisation africaine et mourut au Congo. L'autre, excellent magistrat, avait été appelé jeune encore aux hautes fonctions de conseiller à la Cour de cassation.

Prosper Poullet avait rendu encore plus étroits ses liens avec le monde universitaire en épousant la fille de Léon de Monge qui a laissé un si grand souvenir comme professeur de littérature française à l'Université de Louvain.

Peu de temps après son doctorat, Prosper Poullet entra lui-même à l'Alma Mater comme professeur à la Faculté de droit. Sauf les périodes de sa vie gouvernementale, il ne cessa d'y enseigner la procédure pénale, l'histoire diplomatique et surtout le droit international privé où il devait bientôt se révéler comme un maître.

Toutefois, l'enseignement ne devait pas l'absorber complètement. La vie publique s'empara de lui. Elle ne devait plus le lâcher. Il en connut tous les devoirs et toutes les responsabilités : au conseil communal de Louvain, au conseil provincial du Brabant, puis à la Chambre et au Gouvernement. C'est au conseil provincial du Brabant que ses qualités politiques faites à la fois de travail, de ténacité et de conciliation le firent apprécier par ses amis comme par ses adversaires. Dans cette assemblée brabançonne. il fut bientôt un des leaders de la droite aux côtés d'un autre universitaire, notre ami commun Léon de Lantsheere, dont une mort prématurée devait dès 1912 priver le parti catholique comme le pays.

Je crois que c'est comme suppléant de Jules de Trooz que Poullet entra la Chambre des Représentants en 1908. Il y était le colistier de Franz Schollaert à qui le liait une grande similitude de convictions et de goûts. Son activité à la Chambre se manifesta surtout dans les questions d'enseignement et dans les problèmes militaires. En 1911, nous entrâmes ensemble dans le cabinet constitué par M. de Broqueville. cabinet homogène où la vieille droite et la jeune droite fusionnèrent pour la réalisation d'un programme national auquel le roi Albert apportait lui-même la plus vive sollicitude et qui comprenait l'établissement de l'instruction obligatoire et l'établissement du service militaire personnel et général. La loi sur l'instruction obligatoire fut la grande œuvre de Prosper Poullet qui dirigeait le ministère des Sciences et des Arts. Il a dû faire face à une opposition brillante et parfois agressive, mais mena à bien cette réforme heureuse qui a tant contribué, dans le respect de la liberté d'enseignement, à répandre dans nos populations l'instruction et l'éducation.

Quant à la réforme militaire, elle fut surtout l'œuvre du premier Ministre, alors ministre de la Guerre. Le comte de Broqueville qui pressentait la tragédie à laquelle tant d 'esprit chez nous ne voulaient pas croire, obtint non sang peine du Parlement les lois et les crédits nécessaires pour une organisation sérieuse de notre établissement militaire où le devoir patriotique de servir le pays s’imposa dorénavant à tous les citoyens.

Vint le coup de foudre du 2 août 1914. Je revois par la pensée Poullet au fameux Conseil qui se tint le soir de l'ultimatum sous la présidence du Roi, puis dans toute notre vie de guerre si pleine d'angoisses, de devoirs imprévus, d'alternatives d'espérance et de déception. Son activité ne s'y démentit pas un moment malgré tous les soucis et toutes les épreuves d'ordre familial que la guerre entraîna pour lui.

A la rentrée au pays, il fut appelé à la présidence de la Chambre. Il s'en acquitta fort bien et reçut en cette qualité à Bruxelles les représentants des Etats qui avaient été à nos côtés pendant la guerre.

En 1924, il fut chargé du portefeuille de l'Intérieur. Ses préoccupations s'attachèrent plus spécialement pendant cette période, à s’efforcer à donner satisfaction aux revendications d'ordre linguistique et culturel du pays flamand. Il s'intéressa aussi, plus qu'il ne l'avait fait avant la guerre, aux réformes d'ordre social destinées à assurer plus de bien-être et plus de joie dans la vie des travailleurs. En décembre 1926, après la crise prolongée et qui menaçait d'être sans issue, il constitua avec le concours d'une grande partie de la droite et avec le parti socialiste, ce ministère que l'on a appelé « le ministère Poullet-Vandervelde dont la vie fut courte et difficile, compliquée encore par des circonstances économiques défavorables qui aboutirent à une cruelle dévaluation monétaire.

Ce ne fut qu'en 1932-33 qu'il rentra au gouvernement, cette fois encore sous la présidence du comte de Broqueville. Il y occupait le ministère de l’Intérieur et je me trouvai de nouveau son collègue comme ministre dé la Prévoyance Sociale et de l'Hygiène.

Il était entouré au Parlement d'une grande considération et l'aménitié de son caractère rendait agréables les relations de ses collègues avec lui. Dans la galerie des portraits qui rappellent au Palais de la Nation tous les présidents de la Chambre des Représentants. son effigie figure entre celles de M. Brunet et du baron Tibbaut. Elle est l'œuvre du peintre Van de Woestyne. L'œuvre est discutée. On reproche à sa tonalité de s'apparenter mal aux portraits d'un coloris puissant qui forment la majorité des documents de cette galerie historique. Toutefois, l'artiste a bien pénétré, à mon avis, la psychologie de son modèle. Il a étudié et traduit dans les traits et dans l'attitude cette expression réfléchie, consciencieuse et persévérante qui a caractérisé la vie et la carrière du vicomte Poullet.

Le parti catholique conservera à la mémoire de ce grand défenseur de son idéal et de son programme un souvenir impérissable et le pays entier saluera, au moment où la mort lui ravit ses services, cet homme d'Etat qui se montra averti de tous ses besoins et de tous ses intérêts et qui fut profondément attaché à la grandeur et à la force morale et matérielle de sa Patrie.

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(Extrait du Soir, du 4 décembre 1937)

Le vicomte Prosper PouIlet, ancien premier ministre, ancien président de la Chambre et ministre d’Etat, vient de mourir à Louvain. Cette nouvelle ne manquera point d'attrister les milieux politiques et les nombreux amis de celui que les démocrates-chrétiens vénéraient comme un de leurs chefs les plus aimés et avait accoutumé de nommer le Sage.

M. Poullet naquit à Louvain le 5 mars 1868. Il fit ses études à l'Université de cette ville où il conquit ses diplômes de docteur en philosophie et lettres et de docteur en droit. En 1893, il était professeur à l'Université de Louvain et, quelques années plus tard, devenait conseiller provincial.

Durant ces années-là, M. Poullet, ardent prosélyte. présida le comité de patronage des habitations ouvrière et des institutions de prévoyance des cantons de Louvain, d'Aerschot et de Haecht. Il travaillait avec enthousiasme, dès ce moment, à l'amélioration des conditions de vies des travailleurs. En même temps.. il poursuivait sa carrière d’homme de sciences qui s'occupe surtout des questions de droit international privé. Il présida la cour des sursis du 26 septembre 1916 à la fin de la guerre et, en 1920, représenta la Belgique la Société des Nations où il devait jouer un rôle considérable et s'imposer par ses connaissances juridiques et historiques.

M. Poullet joua un rôle non moins important dans la politique intérieure de notre pays. Nommé ministre des Science et des Arts en 1911, il démissionnait en 1918, pour devenir ministre des Affaire économiques, puis ministre des Chemins de fer jusqu'en 1920. Pendant cette période particulièrement difficile de l'après-guerre, il collabora activement la restauration nationale.

En mars 1924. M. Poullet redevenait ministre de l'Intérieur, puis ministre des Affaires économiques et ministre de la Justice. En 1925, après une longue crise ministérielle de 72 jours, il parvint à former un gouvernement. Ce fut le cabinet Poullet-Vandervelde qui dut faire face à des difficultés financières et politiques fort graves, et céder finalement la place, en 1926, à un gouvernement d'union nationale présidé par M. Jaspar.

Le 20 mai 1926, M. Poullet était nommé ministre d'Etat.

Lors de la constitution du premier cabinet van Zeeland. M. Poullet fut appelé à jouer un rôle de conseiller aux côtés de MM. Hymans et Vandervelde. II se retira, ainsi que M. Hymans, du second cabinet van Zeeland, tandis que Vandervelde devenait ministre de la Santé publique.

Sa santé ébranlée l'éloigna peu à peu de la Chambre où il se distinguait par son éloquence sobre, ses hautes qualités de juriste, la sérénité de ses jugements.

M. Poullet intervenait dans toutes les discussions relatives aux lois militaires, fiscales, juridiques, sociales et linguistiques. Il avait publié plusieurs ouvrages fort appréciés. notamment « Les institutions françaises de 1795 à 1814 » et un « Essai sur les origines des institutions belge contemporaines. »

M. Poullet laissera le souvenir d'un grand parlementaire.

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(Extrait du Standaard, du 4 décembre 1937)

Staatsminister Poullet overleden

De levensloop van een groot katholiek, van een wiis en helderziend politiek man, van een overtuigd democraat, van een hoogstaand geleerde, van een schrandere verdediger van de Vlaamsche rechtseischen.

Met diepe ontroeping hebben wij Vriidag vernomen dat de hr Poullet is heengegaan naar het Eeuwige Rijk. Vooral in het Katholieke Vlaanderen zal die mare groote smart verwekken.

De hr. Poullet werd op 5 Maart 1868 te Leuren geboren. Hij promoveerde in de rechten en in de wijsbegeerte en letteren aan de universiteit van Leuven en werd in 1893 leeraar aan onze Alma Mater.

Hij trad in de politiek en werd in 1900 lid van den provincieraad van Brabant en in 1904

lid van de gemeenteraad van Laken. In 1908 werd de hr Poullet lid van de Kamer Volksvertegenwoordigers en drie jaar daarna, in 1911 mocht hij reeds de portefeuille van Kunsten en Wetenschappen waarnemen welke functie hij bleef vervullen, ook tijdens den wereldoorlog. Bij de heropening van het Parlement na den oorlog, werd de hr Poullet voorzitter van de Kamer. Doch in 1919 reeds wisselde de hr Poullet het presidentschap van de Kamer met de portefeuille van Spoorwegen, Posterijen en Telegrafen in de regeering Delacroix.

Hij trad at in 1920 doch werd weer minister Binnenlandsche Zaken en Volksgezondheid in 1924, minister van Economische Zaken in 1925, minister van rechtswezen in 1925 en in 1926 minister ad interim van landsverdediging. Beide portefeuilles werden door den hr Poullet waargenomen te samen met het eerste ministerschap, tijdens die beroerde periode van 1925-1926, die de eerste devaluatie van den Belgische frank voorafging.

Herinneringen... Een benarde tjjd, en zegevierende eerlijkheid

De het Poullet was het hoofd van de socialistisch-christelijk democratische regeering, de regeering, die door den hr Janson, thans eerste minister de “regeering van de kleine luiden (“le gouvernement des petites gens”) werd geheeten, en die eveneens in 1926 uit den nood van den hr Janson die “uitnoodiging” moest hooren “Allez-vous en” (Trek er uit). Aan de zijde van den hr. Janson, die de regeering Poullet-Vandervelde met alle macht bestreden heeft, stond ook de hr. Franck, toen nog nieu gouverneur van de Nationale Bank, die in de bewogen dagen van Mei 1926 de financieele politiek van die regeering scherp hekelde en de devaluatie aankondigde als gevolg, zei hij van die politiek.

In dit rouwartikel waarin wij de nagedachtenis eeren van een groot katholiek, van een wijs en helderziend politiek man, van een overtuigd democraat, van en goed en braaf man, van een eerlijk en onomkoopbaar man en ook van een geleerde, ontbreekt ons de plaats om de politieke gebeurtenissen uit dit tijdperk in al hun bijzonderheden te schetsen. Doch, al was na dien harden strijd en na een campagne van verdachtmakingen en laster – ja, wij kunnen niet anders dan dit neerschrijven, - omdat nooit een eerste minister op zulke onverdiende wijze werd aangevallen en belaagd als de hr Poullet – al werd na dien harden strijd - heeft er schromelijk onder geleden en dit weten wij omdat wij te dien tijde met den hr Poullet geknakt – de hr. Poullet bleef maanden lang in zijn woning in de Milcampslaan te Schaarbeek bedlegerig - zijn prestige en zijn eerlijk en onbaatzuchtig karakter bleven onaangetast.

Toen Eerste Minister Poullet bespuwd werd

Een episode uit die periode moeten wij nochtans in herinnering brengen. Enkele vaandels van regimenten werden naar het legermuseum in het Jubelpark overgebracht. De hr Poullet was interimaire minister van landsverdediging. Hij woonde de plechtigheid bij die die aanleiding gaf tot een geweldige betooging tegen hem. De hr Poullet werd in het gelaat gespuwd. Wij zullen hierbij geen namen noemen doch het moet ons van het hart, men heeft geen sankties getroffen tegen katholieke, politieke mannen, leden van de zoogeheeten traditionneele katholieke partij ; die den hr Poullet toen op zijn Calvarieweg vooruitstuwden.

Na de regeering Poullet-Vandevelde - zooals zij geheeten werd - een regeering der Union Sacrée was - kwam een regeering der Union Sacrée tot stand onder de leiding van den hr Jaspar. Trouw aan hun leider - want de hr Poullet was in de Hamer de leider van de democratische (christelijke) groep - weigerden de christelijke democraten in die regeering te treden, waarin wel werden opgenomen de socialisten die - dit moet worden gezegd - steeds achting en eerbied hebben betuigd aan den hr Poullet. Die regeering voerde de devaluatie van den frank door op het peil 107 en de hr Poullet werd minister van state.

Terug in de politiek

Zijn gezondheid herstelde zich niet heel en al en nadat hij een paar keeren een ministerportefeuille en zelfs ook eens het eerste ministerschap geweigerd had, nam de hr Poullet in 1932 weer aan minister van Binnenlandsche Zaken te worden in de regeering de Broqueville. Die regeering kwam tot stand na de verkiezingen van 1932 die de overwinning aan de katholieken en de nederlaag aan de socialisten brachten.

In 1935 toen onder de regeering Theunis een geliikaardige toestand werd geschapen als ten tijde van de regeering Poullet-Vandervelde en een tweede devaluatie voor de deur stond - op het peil 147 fr. - werd de eerste regeering Van Zeeland gevormd de en de hr Poullet liet zich overhalen minister te worden in die regeering zonder portefeuille te woorden in die regeering naast den hr Vandervelde. Die regeering devalueerde den frank voor den tweeden keer. De hr Poullet verdween uit de tweede regeering van Zeeland en sindsdien heeft bij zich omzeggens van het politieke strijdveld teruggetrokken. Al degenen die hem daarna nog hebben ontmoet kregen den indruk dat het sterk gestel van dien man ondermijnd was en dat het einde met snelle schreden naderde.

Thans is de hr Poullet heengegaan en wij buigen met diepe ontroering voor het stoffelijk overschot van dien door en door eerlijken man.

De h. Poullet in de gelederen van den Vlaamschen strijd

De hr Poullet was van Waalsche afkomst. Voor den wereldoorlog streed de hr Poullet niet in de gelederen van de Vlaamsche strijders. Doch de wereldoorlog heeft de oogen van zoovelen doen opengaan en het kon niet anders of het rechtschapen karakter en de democratische gezindheid van den hr Poullet moesten ook hem brengen tot de ove de Vlamingen een rechtvaardigen strijd voeren voor hun cultureele zelfstandigheid. Hij keerde uit den oorlog terug als bewust Vlaamsch leider. Enkele typische incidenten uit dien naoorlogschen strijd voor Vlaamsch rechtsherstel. In een vergadering aarzelde de hr Poullet niet te verklaren dat zoo de Vlaamingen niet de Vlaamsche wetten kregen, die hun cultureele zelfstandigheid moesten bevorderen, zij ook zouden kunnen gedwongen worden het staken van de belastingbetalingen in overweging te nemen.

En in een ophefmakend artikel in een Fransche katholieke revue, waarvan de Nederanlandscge tekst verscheen, waarvan de Nederlandsche tekst in “De Standdard” vescheen, gebruikte de hr Poullet Ile deze woorden : “Ilfaut en découdre avec les Wallons.” “Het is nu de tijd om het met de Walen eens voor goed uit te vechten.” Men heeft aan die worden allerhanden uitleg gegeven doch de hr Poullet bedoelde slechts dat niet langer kon worden getalmd met een oplossing van het Vlaamsch-Waalsche vraagstuk. Dit is meer dan tien jaar gelden. Twee dagen voor den dood van den hr Poullt leest men in de regeeringsverklaring van den hr Janson dat de regeering nu eens het Vlaamsch cultureel vraagstuk zal oplossen.

Als partijleider...

Als voorzitter van de katholieke parlementaire fractie in de Kamer heeft de hr Poullet aan zijn partij - op het terrein van den parlementairen strijd - uitstekende diensten bewezen. Toen de hervormingsplannen van de Katholieke Partij werden doorgevoerd en de Katholieke Unie werd gesticht die sedertdien werd opgelost in de Staatskatholieke partijorganisatie, die wij nu bezitten, werd de hr Poullet voorzitter van het Centraal bestuur der Katholieke Unie.

De h. Poullet en België's internationaal statuut. Een voorlooper

Terwijl de hr Poullet uiterst bedrijvig op het gebied van de binnenlandsche politiek verwaarloosde hij toch niet zijn aandacht te schenken aan het internationaal statuut van België. Ten opzichte van nationale vraagstukken bezat de hr Poullet een groote bevoegdheid, die ook door het buitenland werd erkend. In 1912 was hij reeds lid van de bestendige commissie voor het onderzoeken van vraagstukken van internationaal privaatrecht. De hr. Poullet was ook vice-voorzitter van het Instituut voor Internationaal Recht. Van zijn hand zijn verschenen : “Les Institutions Françaises de 1795 à 1814”, en “Essai sur les origines des institutions contemporaines”

De hr Poullet is ook de eerste in België geweest die durfde voor te stellen dat het internationaal statuut dat België zich na den Oorlog had gegeven - een politiek van grootmogendheid - moest worden herzien en gewijzigd. In plaats van de nieuwe buitenlandsche politiek van België, die het tegenovergestelde was van de opgedrongen neutraliteit van voor den oorlog : pleitte de hr Poullet voor een terugkeer naar een soort vrijwillige neutraliteir. Hi zette zijn standpunt uiteen in een reeks artikelen, die zeker en vast den stoot hebben gegeven tot de nieuwe orienteering van onze buitenlandsche politiek die officieel wordt geheeten “politiek van onafhankelijkheid en zelfstandigheid”, maar zoo niet naar de letter dan toch naar den geest, een politiek van vrijwillige neutraliteit is, en zijn moet. Het is de politiek die bijna door alle kleine landen wordt gehuldigd.

De hr Poullet was dus een voorlooper.

Thans is hij niet meer. De Katholieke Partij, de Katholieke Vlaamsche en democratische partij, verliezen in hem een hunner gezaghebbendste en invloedrijkste vertegenwoordigers, en de Kerk een trouwen zoon, die bij al wat hij deed, zich steeds liet leiden door zijn diep christelijke overtuiging. Er zullen er niet velen zijn die in de geschiedenis der Belgische politiek zullen voortleven zooals de hr Poullet

De laatste oogenblikken van Staatminister Poullet

Sedert Augustus l.l.. was Staatsminister, Poullet lijdend. Zijn toestand was echter den laatsten tijd veel gebeterd, zoodat hij reeds in staat was zijn gewone bezigheden te verrichten en zijn dagelijksche wandeling ni den tuin te maken. Woensdag was Mr Poullet bijzonder opgewekt, had zijn gewone wandeling in den tuin zijner woning gedaan en bracht in familie den avond door in gezelschap van Mevrouw Poullet.

Rond 9 uur echter, wanneer hij zich nauwelijks ter ruste had gelegd, voelde hij zich niet wel, zoodat de hulp der verpleegster werd ingeroepen, Toen liet nog niets vermoeden dat de afloop noodlottig zou geworden zijn. Daar zijn toestand echter verergerde, werden de behandelende geneesheeren ontboden die hem de noodige zorgen toedienden. Rond elf uur had een bloedstorting plaats, zoodat de priester hem de laatste Sakramenten toediende. Intusschen werden zijne kinderen ontboden en het is in bijzijn van zijn geliefde familie dat hij rond twee uur en half zeer gelaten den geest gaf. De Heer zal zijn schoone ziel reeds het loon gegeven hebben dat hem voorbehouden was.

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(Extrait du Standaard, du 4 décembre 1937)

In memoriam. Staatsminister Poullet, een stuk gestolde geesteskracht

Zoo is het dan gebeurd, wat velen sedert lang met een beklemd gemoed hadden verwacht : De Heer heeft tot zich geroepen, den geest van de hoogedele figuur, van den wijzen man : burggraaf staatsminister Poullet.

Met een ongeevenaard gezag en in grenzenlooze toewijding heeft deze oudvoorzitter der katholieke Partij de schoonste voorbeelden gegeven van onbaatzuchtigheid, volkomen zelfvergeten, ongerepte eerlijkheid en trouw in den dienst van het openbaar leven.

Gedurende veertig jaren stelde staatsminister Poullet de schitterendste gaven ten dienste der katholieke partij. Wie hem kende als hoogleeraar, als volksvertegenwoordiger, als partijleider, als minister van zeer verscheiden departementen, als voorzitter van de Kamer, als ministerpresident of als staatsminister, en met hem in betrekking mocht komen, ging steeds van hem weg met een gemoed vol diepe indrukken en m de overtuiging de beste zijnervrienden te zijn. Al wat in deze eeuw het openbaar leven in België heeft beroerd. werd gunstig beïnvloed door den helderen geest van Burggraaf Poullet, voor wien de partjgenooten een eerbiedige bewondering koesterden en naar wien de politieke tegenstrevers opkeken in diep ontzag.

Hij was het, die in 1914, als minister van Openbaar Onderwijs, de wet op den leerplicht deed stemmen, na in meer dan 25 woelige parlementszittingen het hoofd te hebben geboden aan ruim honderd amendementen.

Wat het katholieke Vlaanderen hem aan dank verschuldigd is, zal wel nooit een menschengeest ten volle bevroeden. Midden de sterkste vooroordeelen en het pijn-verwekkende onbegrip omtrent het Vlaamsche volksbelang, heeft staatsminister Poullet, met den durf en de manmoedigheid, die steeds het kenmerk is van superieure geesten het spits helpen afbijten in den heeten strijd voor de vrijwaring van net Vlaamsche kultuurbezit.

Wie hem hooren mocht in het Algemeen Christen Werkersverbond, of als leider der Katholieke Partij, wanneer hij politieke vraagstukken toelichtte, kwam onontkoombaar in bewondering voor de rijke ervaring, die in dezen geordenden geest was samengetrokken. Bij het overschouwen van den ontzaglijken parlemnetairen arbeid dien staatsminister Poullet heeft afgewrocht, voelt men zich neitig en klein worden tegenover dezen reus in de politieke bedrijvigheid.

In 't parlement zag men hem geduldig toeluisteren, niets ontsnapte aan zijn waakzame aandacht, en wanneer de verwarring in de debatten het parlementair raderwerk scheen te doen vastloopen speurde staatsminister Poullet den gouden draad op en bracht hij orde de ontreddering.

Bij de behandeling van gewichtige parlementaire vraagstukken, op de congresdagen van de Katholieke Partij, van den Katholieken Vlaamschen Landsbond. van het Algemeen Christen Werkersverbond en van meer andere kultureele en sociale organismen, smeet hij zijn machtig woord met breeden worp. Dan ontsprongen aan zijn mond die helderlichtende uitdrukkingen en oratorische gulpen die de argumenten van den tegenstander vernietigden en zijn eigen zienswijze schitterend deden triumpheeren.

Deze zedelijk hoogstaande persoonlijkheid heeft de geniaalste gaven ten dienste gesteld van land en volk. In de meest tragische dagen die België doorworstelde gedurende het wreede oorlogsgebeuren., in den ontvoogdingsstrijd van de Vlaamsche Volksgemeenschap, bij de groote sociale hervormingen, onder het impuls van zijn Christen Democratische opvattingen, bij het verdedigen der hoogheilige belangen van het Katholiek Onderwijs, bij de gezonde oriënteering onzer buitenlandsche politiek, heeft deze groote Staatsman, met een helderheid van visie, met een taalheid van wilskracht en een offervaardigheid zonder weerga, de hoogste verdiensten opgezameld en den dank losgetrokken van ieder weldenken landgenoot.

Burggraaf Poullet was de gezaghebbende oud-voorzitter der Katholieke Unie, die,

bij de reorganisatie der partij, nog wilsreserve genoeg had om het reeds ondermijnde lichaam naar Brussel te sleuren en dns den zoo betrachten steun te bieden van zijn wijzen raad. Gedurende zijn rijk gevulde leven heeft Staatsminister Poullet zonder meten noch tellen ons het beste gegeven wat hij putten kon uit zijn groot hart en zijn helderen geest.

Wij allen staan als zware schatplichtigen tegenover hem. Ook wij moeten hem danken met het beste waarover wij beschikken. Verrassen kon de dood hem niet, die leefde in de vreeze des Heeren. Bidden zullen wij, en veel, opdat de Heer hem opneme tusschen Zijn zingende Engelenscharen. Hij, die wellicht nu reeds het loon der rechtvaardigen geniet, hij zal ons beschermen in deze donkere dagen. Moge zijn geest ons voorlichten bij het verwezenlijken der verheven idealen, waarvoor hij bij ons bezieling heeft gewekt.

A. VERBIST, Senator. Voorzitter der Katholieke Vlaamsche Volkspartij

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Voir aussi :

1° François RIGAUX, dans Nouvelle biographie nationale, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 2010, t. 10, pp. 312 à 315

2° Prosper Poullet, dans Encyclopedie van de Vlaamse beweging (consulté le 11 octobre 2025)

3° Sur le présent site : C.H. HOJER, Le régime parlementaire belge de 1918 à 1940 (1946). Chapitre VI. La coalition catholico-socialiste (1925-1926) -