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Ortmans Jean (1806-1885)

Portrait de Ortmans Jean

Ortmans Jean, François liberal

né en 1806 à Verviers décédé en 1885 à Verviers

Représentant entre 1874 et 1885, élu par l'arrondissement de Verviers

Biographie

(Extrait de L’Echo du Parlement, du 5 février 1885)

Nécrologie

L’Union libérale, de Verviers, consacre à M. Ortmanns-Hauzeur l'article nécrologique M. rtm que voici :

Verviers est en deuil. Il vient, par un coup soudain et inattendu, de perdre le meilleur et le plus digne de ses enfants, le plus populaire et le plus estimé des magistrats. La douleur est générale et l'éloge du sympathique défunt est dans toutes les bouches. Toutes rendent hommage aux qualités éminentes de l'homme qui a été le principal artisan du développement inouï et de la prospérité de l'agglomération verviétoise, et dont le nom était devenu synonyme d'honnêteté. d'intelligence et de dévouement à la chose publique.

M. Ortmans est entré au conseil communal en 1848 ; l’année suivante, il était nommé échevin, et e, 1855, il prenait les rênes de l'administration.

A cette époque, Verviers était un gros bourg de 25.000 âmes ; mais, grâce à l'esprit d'initiative et à l'activité de ses habitants, il aspirait au rang de ville et de grande ville.

M. Ortmans eut la prescience, en quelque sorte, des glorieuses destinées de Verviers, et il travailla sans relâche, et avec une foi persévérante, à faire pousser et fructifier tous les germes de prospérité qu'il possédait.

Sous son impulsion féconde, comme le lui disait plus tard la voix de la reconnaissance publique, sous son impulsion active, de nouveaux quartiers s'élèvent et sont reliés à l'ancienne agglomération par de larges artères ; ce sont les Gérard-Champs, les Prés•-Javais, Renouprez, le quartier du Collège, celui de la rue de Dison, et plus tard les splendides quartiers de l’Immobilière ct de Séroule, avec leurs luxueuses constructions et leurs superbes rues. Dans l'ancienne agglomération elle-même, des voies nouvelles sont percées et élargies, des trottoirs convenables établis, et le pavage amélioré. Des ponts sont jetés sur la rivière et l'abattoir est construit.

Connaissant l'importance vitale de l'instruction dans une ville d'industrie et d'avenir, M. Ortmans ne néglige pas de doter Verviers d'une organisation scolaire aussi parfaite que possible. Et des écoles primaires, des écoles gardiennes de s'élever successivement dans les divers quartiers. L'ancien collège va s'abriter dans l'édifice monumental de la rue du Gymnase, l'école professionnelle est ouverte, l'école des demoiselles et l'école de musique sont créées.

Plus tard encore, il obtient du gouvernement l'établissement d'une école normale.

Il aurait désiré continuer et compléter ce magnifique ensemble d'institutions scolaires par une école manufacturière. II est mort, sans avoir vu exaucer son vœu, que ses successeurs sans doute prendront à tâche d'accomplir.

Mais ce développement inouï de la ville qui, de 25,000, est arrivé à près de 45,000 âmes, ne se comprendrait pas sans l'histoire d'une œuvre grandiose et à laquelle M. Ortmans a tout particulièrement attaché son nom.

Nous voulons parler de la distribution d'eau.

Au fur et à mesure que l’industrie se développait, le régime de la Vesdre devenait de plus en plus irrégulier, et Verviers se trouvait menacé de manquer absolument d'eau et de voir avorter tous les beaux projets d'avenir.

M. Ortmans entreprit courageusement de conjurer un pareil malheur, et le premier il eu l'idée d'emmagasiner les eaux salubres et claires de la Gileppe, et d'assurer l'avenir de la ville pur une ingénieuse et bonne distribution d'eau.

Ce que ce travail lui coûta d'études, de veilles, de soucis, de démarches, d'efforts de tous genres, ce qu'Il lui attira d'attaques, d'avanies, de tribulations, nul ne saurait le dire, nul ne le dira jamais. Plus d'un à sa place aurait reculé devant les obstacles, aurait faibli devant les critiques, le mauvais vouloir et même devant les résistances. Mais M. Ortmans avait la foi de la science, l'amour de sa ville natale. Il marcha de l'avant et eut la joie immense de voir son idée se réaliser, prendre corps et enfin aboutir à cette merveilleuse distribution, bienfait inappréciable pour l'industrie et la santé publique !

M. Ortmans n'aurait rendu à la ville et à l'agglomération que cet immense service que sa mémoire devrait être perpétuellement vénérée dans notre ville.

Avouons-le, la reconnaissance publique a été tardive pour ce modèle des bons citoyens. Sans doute, le parti libéral, qui savait rendre hommage à son civisme, se fit un honneur de le défendre, de le protéger contre ses détracteurs - car il en eut, et beaucoup, - sans doute, ce parti provoqua à son intention de magnifiques manifestations de sympathie en 1875 et surtout en 1881, à l'occasion du vingt anniversaire de sa nomination de bourgmestre. Mais il nous est impossible d'oublier qu'en 1878, aux élections communales, l'administration de M. Ortmans faillit être renversée sur la question même de la distribution d'eau.

Ses adversaires étaient parvenus à jeter l'inquiétude et l'alarme dans l'opinion publique sur le résultat financier de l'opération, et on jetait la pierre au bourgmestre !

Mais aujourd'hui l'expérience a prononcé. et la ville, espérons-le, sera maintenant unanime à proclamer la dette de reconnaissance qu'elle doit au magistrat qu'elle vient de perdre et qui l'a sauvée !

Déjà, du reste, en octobre dernier, le nom de M. Ortmans-Hauzeur sortait le premier de l'urne électorale avec une majorité sans précédents dans notre ville, témoignage éloquent de l’estime et de la considération dont jouissaient le bourgmestre et le libéral défenseur des écoles communales,

Ceci nous amène à dire quelques mots de l'homme politique.

Si M. Ortmans était dévoué aux intérêts de la ville, il l’était aussi aux intérêts du libéralisme. Il était bon libéral, parce qu'il était bon Verviétois, et bon patriote, parce qu'il était convaincu que seul le libéralisme peut assurer la prospérité et le progrès de la ville et du pays.

Remerciant, en 1881, les libéraux de l'avoir envoyé et maintenu à la Chambre depuis 18741, il disait :

« Un concours si puissant, donné par tant de cœurs dévoués à la patries, aux sublimes principes de fraternité et de liberté qui ont régénéré la société moderne, est un puissant encouragement pour persévérer dans la ligne de conduite que j'ai toujours suivie.

« Mes convictions sont le fruit de ma raison, de mon éducation, des idées politiques que ma famille a constamment imprimées à mon esprit, du contact et des conseils d'amis sûrs, intelligents et dévoués ; toujours, elles fortifieront sans cesse ma foi dans les principes d'un libéralisme sage, ferme et éclairé. »

Ce sont ces principes qu'il défendit avec constance à l'Association libérale. dont il fut le président, et auxquels il resta fidèle, lorsqu'en août dernier il alla émettre contre la loi Jacobs un vote carrément hostile.

Cette loi néfaste lui inspirait une indicible aversion, et son espoir était de la voir bientôt tomber sous la réprobation de tous les bons patriotes. II la condamnait comme une œuvre de ténèbres et un instrument d'abrutissement. Lors des manifestations à Bruxelles, il se mettait à la tête des libéraux de Verviers, faisant partie du cortège de protestation, organisé par la Fédération libérale, et le 19 octobre, il considérait la victoire du jour, comme l'annonce de la chute prochaine de la loi maudite. Il a été trompé dans son attente ; la loi infâme survit à sa condamnation électorale.

Héritiers de sa pensée et des espérances de notre glorieux défunt, libéraux de toutes nuances, faisons en sorte de continuer el de perpétuer son œuvre. en maintenant d'une part Verviers dans ses traditions libérales, condition essentielle de sa prospérité. et d'autre part, en y faisant rentrer la politique générale du pays.

Ainsi nous serons fidèles à la mémoire et au culte de notre cher mort, le grand bourgmestre de Verviers.

* * *

Le conseil communal de Verviers s'est réuni d'urgence lundi à midi et a décidé de faire, aux frais de la ville, des funérailles imposantes à s populaire et regretté bourgmestre, M. Ortmans-Hauzeur, membre de la Chambre des représentants.

Un monument public sera élevé sur une des places de la ville à cet éminent administrateur, qui fut réellement le sauveur de la cité, car c'est à son initiative que l'on doit ce grandiose travail du barrage de la Gileppe. qui releva l'industrie verviétoise menacée par la disette d'eau.


Voir aussi :

1° Leon PAUL, dans Biographie nationale de Belgique, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1981, t. 42, col. 598-605)

La fontaine Ostmans-Houzeau, sur le site "verviers-ville-lainiere.blogspot.com" (consulté le 23 octobre 2025)