Jamme Emile, Louis, Lambert libéral
né en 1820 à Liège décédé en 1897 à Liège
Représentant entre 1882 et 1892, élu par l'arrondissement de Liège(Extrait de La Meuse , du 29 janvier 1897)
Mort de M. Emile Jamme, ancien représentant
L'un des hommes les plus sympathiques et les plus dévoues da notre province, M. Emile Jamme, ancien représentant, est décédé hier en notre ville après une longue maladie qui le retenait depuis plusieurs années dans ses appartements.
M. Emile Jamme était né à Liége, le 3 novembre 1820.
II était le fils de M. Louis Jamme, le bourgmestre si populaire que notre cité acclamait en 1830 et qui resta pendant dix ans à la tête de notre administration.
Après d'excellentes études au Collège et à l'Université de Liége, M. Emile Jamme fut nommé commissaire d'arrondissement à Verviers, le 12 août 1847, à l'avènement du ministère libéral Rogier-Frère-Orban. En cette qualité, il remplissait les fonctions de commissaire du gouvernement près le territoire neutre de Moresnet ; ce fut lui qui présida à a délimitation de ce territoire, ce qui lui valut la Croix d'officier de l'Ordre royal de l'Aigle Rouge de Prusse.
En 1858, le commissariat d'arrondissement de Liége étant devenu vacant, le gouvernement l'offrit à M. Jamme, qui l'accepta. II résigna ces fonctions en 1882 et fut nommé membre de la Chambre des représentants. Il remplit son mandat de député pendant dix ans ; l'état de sa santé ne lui permit pas d'en demander le renouvellement en 1892, lors des élections de la Constituante. La place de gouverneur lui avait été offerte plusieurs fois ; il l’avait toujours déclinée.
M. Jamme était commandeur de l'Ordre de Léopold, décoré de la Croix civique de première classe, etc. Nul ne mérita mieux que lui les distinctions honorifiques qui lui furent accordées pour l'énergie et le dévouement dont il fit preuve dans plusieurs circonstances calamiteuses. En 1849, l'épidémie cholérique sévissait avec une violente intensité à Verviers et dans toutes les localités environnantes, notamment à Ensival et à Pepinster, où la mortalité était effrayante. Les médecins manquaient, tous les soins faisaient défaut. Jamme n'hésita pas ; il alla s'installer à Pepinster, releva les courages abattus, alla visiter et soigner lui-même les cholériques, laissés à l'abandon, et prit toutes les mesures les plus énergiques pour tâcher d'enrayer les progrès de l'épidémie.
II y parvint ; mais il faillit payer de sa vie son admirable dévouement. La presse fut unanime, à cette époque, à reconnaitre les services Immenses que ce haut fonctionnaire avait rendus aux populations des diverses localités frappées par le choléra.
En 1866, lors de la nouvelle invasion de cette terrible maladie, M. Jamme se signala de nouveau par le même dévouement dans toutes les communes populeuses où le choléra sévissait avec le plus de violence, à Seraing, à Jemeppe, à Herstal, à Saint-Nicolas, etc., etc. C'est alors que lui rut décernée la Croix civique de première classe.
Rappelons encore à l'honneur de M. Jamme son intervention dans un grand nombre de grèves importantes, intervention bienveillante et ferme à la fois, qui parvenait presque toujours à ramener le calme dans l'esprit des ouvriers et l'union avec les patrons.
M. Jamme était un des fonctionnaires administratifs les plus capables et les plus intelligents du pays. Il présenta administrativement un avant-projet pour la constitution du Crédit communal, dont s'inspira le gouvernement libéral lorsqu'il créa cette excellente institution.
Dans ses rapports annuels adressés au Conseil provincial, il traita de nombreuses questions très importantes, telles que la réorganisations des lois sur l'assistance publique, la réforme des impôts, la simplification des écritures administratives (travail qui fut suivi d'excellentes réformes), la législation internationale, spécialement au point de vue du recrutement, etc., etc.
En 1870, il fut chargé par M. Pirmez. alors ministre de l'intérieur, d'aller étudier en Allemagne diverses questions d'un grand intérêt pour notre pays.
M. Jamme publia, à cette époque, un commentaire de nos lois sur la milice, qui est un vrai chef-d'œuvre de concision et de clarté.
Il publia ce livre en collaboration avec son gendre, M. V. Chauvin, professeur à l'Université de Liége.
Grâce cet ouvrage, les administrations purent résoudre sans peine les nombreuses difficultés que présente l'application de lois, empruntées en partie au régime hollandais et généralement obscures et mal faites. La publication de ce livre a été un vrai service rendu aux administrations publiques.
A la Chambre, l'honorable M. Jamme s'est spécialement occupé, non seulement des lois sur la milice, mais de toutes les matières administratives. La simplification des rouages et des écritures inutiles n'eut pas de partisan plus éclairé et plus convaincu. Les discours qu'il a prononcés sur ces matières sont extrêmement remarquables. M. Jamme connaissait admirablement aussi toutes les questions d'intérêt matériel et de travaux publics qui concernaient notre province ; il savait défendre ces intérêts avec autant de science que de vigueur. Sa parole autorisée était toujours écoutée avec attention. On avait alors à la Chambre l'habitude de parler pour dire quelque chose. Nul ne fat plus que lui dévoué au bien public.
Parmi les autres discussions auxquelles il prit part la Chambre, citons celles sur les forts de la Meuse, sur la réserve, sur le régime des eaux de nos rivières, sur le rachat du pont de Seraing, sur les questions universitaires, la réorganisation du contrôle de la comptabilité communale, des commissariats d arrondissement, etc.
Profondément dévoué aux idées libérales, M. Jamme ne transigea jamais avec sa conscience e avec les principes qui furent l'honneur de sa vie.
Comme homme privé, M. Jamme était d’une bienveillance extrême, d’un désintéressement et d'une intégrité sans bornes, toujours prêt rendre service, affable, impartial vis-à-vis de tous ses administrés, à quelque parti qu'ils appartinssent.
Tous ceux qui l'ont connu dans les importantes fonctions qu'il a remplies avec tant de distinction conserveront le souvenir des services qu'il a rendus au pays. Il fut, on peut le dire, un fonctionnaire modèle.
M. Demarteau-Jamme, qui lui a succédé comme commissaire d’arrondissement, est son gendre.
Nous prions cette honorable famille de recevoir tous nos sentiments de condoléance.
Les funérailles, au cimetière de Robermont, auront lieu dimanche à 11 heures.