(Paru à Rotterdam, dans le quotidien "Nieuwe Rotterdamsche Courant")
Le congrès des catholiques belges (23-28)
(Paru dans le Nieuwe Rotterdam Courant, le 23 septembre 1909)
Bruxelles, 22 septembre 1909
Consolez-vous, chers lecteurs, tout comme je me console moi-même. Est-ce de notre faute si la seconde moitié du mois de septembre est marquée en Belgique par d'innombrables congrès ? Nous avons eu des congrès de gardes-barrières, d'architectes, de voyageurs de commerce et de médecins flamands. Ma plume est encore chaude du compte rendu que je vous ai envoyé sur la réunion de ces derniers. Et maintenant, je dois encore écrire à propos d’un nouveau congrès, qui a un objectif bien plus vaste que des intérêts professionnels, et qui, même sous l’angle de la vie flamande et de la culture flamande, n’est pas moins significatif que le Congrès des sciences naturelles et médicales. Je parle du Congrès des catholiques belges, qui commence demain.
La raison pour laquelle je vais encore en écrire davantage ici est évidente. Le parti catholique, au pouvoir depuis vingt-cinq ans, ressent plus que jamais la nécessité de se renouveler s’il veut rester aux commandes. Certes, ce parti ne peut pas être accusé d’un conservatisme excessif. Opportuniste, il a su évoluer avec son temps - il l’a même devancé. Il a satisfait à de nombreuses exigences démocratiques, et c’est grâce à cela qu’il est resté si longtemps au gouvernement. Certaines lois sociales adoptées sous son règne sont excellentes et ont été imitées à l’étranger. Si certaines de ces lois ont parfois été mal accueillies par une partie de l’aile droite, il faut reconnaître qu’au sein des bancs catholiques, il y avait toujours une majorité progressiste qui a sauvé le parti et, en même temps, a étouffé l’action socialiste en transformant les revendications socialistes en réalités très pratiques.
Cependant, ce n'est pas seulement le désir de rester au pouvoir qui rend ce renouvellement inévitable au sein du parti catholique, obligeant même la faction la plus conservatrice à faire toujours plus de concessions aux exigences du jour. Le fait que les catholiques aient été contraints d'emprunter une voie sociale plus large a donné aux progressistes du parti, les jeunes catholiques qui jouent déjà un rôle direct au gouvernement, un pouvoir et une autorité qui commandent même le respect des partisans de Woeste, et déplacent la discipline du parti sur un autre terrain. Cela est apparu clairement lors des discussions concernant la réduction du temps de travail, l'annexion du Congo, et plus récemment la réforme de l'armée. Même si l'on ne peut pas dire que ces discussions ont abouti au triomphe des jeunes catholiques, il ne fait plus aucun doute que l'influence de l'ancien leader, Charles Woeste, a considérablement diminué.
Alors que le parti catholique traverse cette phase de renouvellement, il organise un grand congrès à Malines. Il n'est pas nécessaire d'insister sur l'importance de cet événement pour la politique actuelle, ainsi que pour les conditions de survie du parti lui-même.
Vous connaissez les grandes questions de principe qui dominent actuellement la politique générale dans notre pays. Aujourd'hui, c'est la conscription ; demain, ce seront le droit de vote et l'enseignement obligatoire.
Vous savez aussi où en est la première question : je vous en ai déjà parlé si souvent qu’il est inutile d’y revenir en détail. Le projet de loi Schollaert, récemment discuté dans les sections, n’a été ni amélioré ni détérioré. De plus en plus, on a l’impression que l’obstination de Schollaert à maintenir ses positions et l’opposition de ses adversaires au sein du parti au pouvoir sont dues à un plan bien défini : repousser la question jusqu’après les élections de mai - comme je vous l’ai prédit dès le début - après quoi le cabinet Schollaert démissionnerait probablement pour laisser place, si les catholiques restent au pouvoir, à un ministère plus démocratique qui mettrait en œuvre les souhaits du ministre Hellebaut, ou à un gouvernement d’opposition si celle-ci prend le pouvoir.
Quant au droit de vote et à l'enseignement obligatoire, j'ai déjà souligné à plusieurs reprises ici que la survie du parti dépend d’un virage en direction du libéralisme.
Ces questions, ainsi que bien d’autres, seront les points saillants du congrès de Malines. Même si elles ne sont pas abordées de manière très explicite ou ouvertement brutale, les débats révéleront sans aucun doute le point de vue, les changements dans l’opinion générale des catholiques, et, par ricochet, celle de leurs représentants à la Chambre. Voilà pourquoi ce congrès est d’une grande importance.
Il y a également une autre question à l’ordre du jour, qui, bien qu’elle ne figure pas directement à l’agenda, ne sera pas ignorée : quelle attitude le parti catholique dans son ensemble adoptera-t-il face au Mouvement flamand, qui ne cesse de gagner en puissance, et quelle attitude les catholiques flamands prendront-ils face à leurs collègues de parti qui ne partagent pas leurs opinions ?
À ce sujet, la Gazet van Antwerpen, journal flamand libéral, se montre très pessimiste. Voici ce qu’elle écrit : « Oui, il existe des catholiques qui sont des hommes d’action lorsque leur “langue maternelle” est en jeu, mais ils ne vivent probablement pas dans la Belgique flamande. Nous les trouvons en Pologne prussienne, où ils ont décidé de ne pas assister à la journée catholique allemande à Breslau. Il y en a aussi en Autriche. À Vienne, une “journée catholique” devait également avoir lieu, mais les Tchèques et les Slovènes ont refusé d’y participer, car leur langue aurait été reléguée au second plan.
« Cette “journée catholique” a donc dû être reportée. On a d’abord envisagé de tenir un congrès catholique proprement allemand-autrichien. Mais il semble maintenant que cela soit abandonné. Les organisateurs du congrès négocient avec les Tchèques et les Slovènes et espèrent parvenir à un accord, à condition que des concessions soient faites aux catholiques non germanophones d'Autriche. Si les Tchèques et les Slovènes s’étaient comportés aussi docilement que les Flamands, ils auraient eux aussi été traités comme des serpillières. Ces leçons de volonté et de détermination viennent, hélas, de l’étranger. Nous ne croyons pas que les catholiques flamands de Belgique oseraient agir comme leurs coreligionnaires polonais, tchèques et slovènes, sinon ils auraient déjà fait entendre leur voix. Leur silence est pour nous synonyme de manque de volonté. Nous ne les croyons pas capables de signifier aux organisateurs du congrès de Malines que la langue de la majorité des catholiques belges doit au moins être placée sur un pied d’égalité avec le français. »
À cela, l'hebdomadaire Hooger Leven, de Louvain, répond : « Si nous comparons, du point de vue flamand, ce congrès avec les précédents congrès catholiques, il est évident que cette comparaison doit nous réjouir. Comme premier principe, l’égalité totale des deux langues a été acceptée. Il est également incontestable que le flamand y aura une place importante, et pas seulement pour la forme. »
Mais le Handelsblad catholique d’Anvers déclare : « S’il y a de nombreux éléments qui semblent prometteurs pour assurer le succès du congrès, d’autres viennent affaiblir l’enthousiasme et l’esprit de ferveur. Il y a quelques jours, nous avions l’occasion d’annoncer la participation de plusieurs de nos anciens étudiants flamands à la section éducation et sciences. Nous apprenons maintenant qu’en raison d’une soumission tardive, rien de tout cela ne pourra être imprimé ou même mis à l’ordre du jour ! Nous n'allons pas entrer dans une polémique, mais nous savons bien que, sous aucun prétexte, le rapport sur le flamand dans l'enseignement ne sera écarté. Il sera et doit être discuté : trop longtemps les travailleurs catholiques flamands ont été accusés d’attiser de mauvaises flammes, etc. Ils veulent maintenant que l’on débatte et résolve de manière contradictoire si, oui ou non, ils agissent bien ou mal en défendant leur programme contre quiconque. »
Que cela se produise donc enfin ! En tout cas, une nouveauté dans ce congrès peut être considérée comme positive : une section dédiée à la littérature flamande, où des écrivains renommés, parmi lesquels votre compatriote Poelhekke, prendront la parole. Cela prépare-t-il la reconnaissance complète des droits des Flamands ?
(Paru dans le Nieuwe Rotterdam Courant, le 25 septembre 1909)
Malines, 24 septembre 1909
Ne vous attendez pas à ce que ce rapport soit très détaillé, et encore moins complet. Il est tout simplement impossible pour une seule personne de faire un compte rendu exhaustif d'une réunion répartie en plusieurs sections, travaillant toutes simultanément dans des lieux différents - il faudrait pour cela posséder le don d'ubiquité ! De plus, de nombreux sujets traités ici sont d'intérêt particulier, réservés aux catholiques belges présents à ce congrès. Comme je suis venu pour observer les discours prononcés et les non-dits (car bien que certains sujets aient été prudemment exclus de l'ordre du jour, cela ne signifie pas qu'ils ne seront pas abordés sous forme de généralités), mon objectif est de vous faire part de la relation de ce congrès avec la politique belge actuelle. Je me limiterai donc aux sujets et discours qui y sont liés.
Si mon rapport est incomplet à cet égard, ne m'en tenez pas rigueur : il est presque impossible de suivre toutes les réunions. Il y a ici des milliers de congressistes, et il faut se frayer un chemin à travers eux pour pouvoir entendre quoi que ce soit. Veuillez donc excuser ce rapport s'il n'est pas aussi complet que je le souhaiterais. Encore une fois, ce n'est pas ce congrès en soi qui est important, mais la politique générale de notre pays. Ce qui compte, c'est de comprendre la direction vers laquelle ce congrès entend guider la politique et les positions qu'il prend sur les questions en cours.
Ne vous attendez donc pas - encore une déception, cher lecteur ! - à ce que je vous raconte à quel point Malines est belle en cette période. C'est une ville splendide, son carillon est magnifique, et le carillonneur est un artiste de grand talent. Il y a ici un hôtel où l'on mange abondamment pour un prix très raisonnable, et la nourriture est très bien préparée. Maurits Sabbe, notre écrivain en prose idyllique, y est professeur. J'adorerais vous en parler, ainsi que du fait que la matinée d'hier était baignée par un splendide soleil automnal pour inaugurer le congrès, avant qu'une grosse averse orageuse dans l'après-midi ne vienne tempérer l'atmosphère festive. Mais… je suis ici pour le congrès catholique, ou plutôt pour observer l'influence que ce congrès pourrait avoir (voir plus haut).
Tout d'abord, une messe pontificale a été célébrée dans la magnifique cathédrale par l'évêque de Gand, Mgr Stillemans, un monument d'évêque, imposant et massif, à côté duquel l'archevêque ascétique et doux, Mgr Mercier, avec son regard tendre et profond, semble fragile et maigre sous sa chape. D'autres évêques étaient également présents, ainsi que le nonce apostolique. Leurs ornements éclatants, là-bas dans le chœur, formaient une splendeur, un véritable festin pour les yeux. Plus loin dans l'église, on pouvait voir les principaux acteurs du futur débat : Helleputte, le baron Descamps, Cooreman et Woeste, parmi d'innombrables prêtres, ainsi que toute la droite de la Chambre et du Sénat. Que vous apporterait de connaître leurs noms ?...
Après la messe, je me rends au petit séminaire, où doit se tenir la séance d'ouverture. La salle est déjà pleine à craquer, mais j'ai une bonne place pour voir entrer les dignitaires un à un : le ministre d'État De Lantsheere, père de notre ministre de la Justice ; le père Rutten, une des figures importantes du monde catholique, dont je vous parlerai plus tard ; le savant Godefroid Kurth, historien bien connu ; tous les députés et sénateurs que j'avais vus plus tôt. Finalement, le cardinal-archevêque, chaleureusement acclamé, arrive avec une suite de prélats et de personnalités officielles : les présidents de la Chambre et du Sénat, ainsi qu'un trio de ministres représentant le gouvernement. Ils prennent place sur une estrade, tout comme M. Woeste, qui montre ainsi qu'il est toujours présent, et Mgr Mercier prononce le premier discours : une adresse qui sera envoyée au Pape. Dans ce discours, il rappelle habilement les paroles significatives que le Pape a récemment prononcées lors de la visite d'un groupe de pèlerins belges, leur enjoignant d'agir en union et de sacrifier toute préférence personnelle au bien commun. C'était une allusion claire à la division qui menace le parti et qui s'est déjà en grande partie concrétisée, inquiétant ceux qui tiennent à conserver le pouvoir pendant encore quelques années. Mgr Mercier insiste longuement sur cette nécessité d'unité : coûte que coûte, dit-il, nous devons la maintenir, la renforcer, faire taire toutes les préférences. Et non sint in vobis schismata, dit-il en reprenant les paroles de saint Paul, - et, de fait, l'assemblée, représentant les trois mille congressistes, jubile et applaudit, comme si les catholiques n'avaient jamais cessé de voir tous les choses de la même manière.
Petite surprise : Mgr Mercier reprend son discours en néerlandais ; et grande surprise : le discours d'ouverture du président Cooreman est entièrement en flamand.
Le président Cooreman, un homme dynamique. Je vous ai souvent parlé de sa force aimable. Petit et plutôt chétif, sa prestance impressionne par la façon qu'il a de tenir la tête droite, son regard vif et intelligent, son geste à la fois énergique, franc et bienveillant. Dans son discours, il fait la leçon aux catholiques : tout comme le riche a le devoir d'aider celui qui est moins chanceux, la prospérité de la Belgique nous impose de concentrer notre attention sur les plus petits, les plus éprouvés, les plus faibles ; nous devons nous tourner vers l'ouvrier, vers le peuple. C'est uniquement par ce chemin que le salut et l'honneur sont possibles : seule la collaboration fraternelle entre toutes les couches de la société peut porter ses fruits. Et c'est à une telle fraternité que mènent des congrès comme celui-ci. Une telle fraternité ne peut exister sans liberté : liberté de pensée, liberté de langue. Que la lumière jaillisse de la discussion !
Un triomphe pour M. Cooreman, ce discours très large que je résume ici de manière trop succincte, fidèle à mon intention initiale.
Le discours en français du vicomte Simonis, président du Sénat, fait pâle figure en comparaison : plein de généralités et de considérations personnelles, il se compare à celui de M. Cooreman comme une petite veilleuse à côté du soleil. Mieux vaut passer à autre chose et écouter Godefroid Kurth, qui doit traiter de « l'Église et l'enseignement ».
Je tends l'oreille : n'est-ce pas un sujet brûlant ? Et je me souviens qu'à peine un an plus tôt, le professeur Kurth avait défendu dans une lettre ouverte l'obligation scolaire et l'avait recommandée pour la Belgique. Depuis cette lettre, j'avais souvent discuté de l'enseignement avec des catholiques éduqués et raisonnables, et je dois dire que presque tous avaient adopté une position de refus. L'intervention de Kurth marquerait-elle un changement dans la pensée catholique ? Indiquerait-il une solution approuvée par l'autorité ecclésiastique ?
Hélas, dès ses premiers mots, le professeur Kurth nous déçoit. « Je ne vous apporte pas la solution à cette question », déclare-t-il fermement. Alors, que vient-il faire ? Il tourne autour du pot avec des termes grandioses et des observations astucieuses. L'historien laisse habilement l'histoire dire une foule de choses étonnantes qui, pour des historiens d'un autre bord, signifieraient probablement le contraire. Mais l'obligation scolaire en Belgique ? Très clairement, le professeur Kurth déclare : nous ne voulons pas d'un enseignement neutre. Quant à l'obligation scolaire, elle existait chez nous dès le 16ème siècle, grâce à la coopération des autorités civiles et ecclésiastiques ; mais les disciples de Voltaire ont changé cela. Et nous, alors, que devons-nous faire ? Que devons-nous espérer de l'autorité catholique ? Quelle est la portée de l'obligation scolaire que nous pouvons attendre d'elle ? Le professeur Kurth retourne autour du pot, rend un hommage inattendu à la ténacité flamande, évoque tout aussi soudainement la liberté à la hollandaise, c'est-à-dire celle dont jouissent les catholiques néerlandais, et conclut par un discours très érudit mais également quelque peu confus, et surtout ambigu, où chacun peut y trouver ce qui lui plaît. Mais son intervention laisse certainement derrière elle une déception, ou du moins un « malaise ».
Non, la question de l'obligation scolaire ne sera pas résolue par ce congrès...
Et la question du flamand dans l'enseignement ?
Dans l'après-midi, cette question a été courageusement soulevée dans la troisième section, sous la présidence de Woeste, par l'avocat Dosfel, que vous connaissez bien, avec des arguments qui vous sont également familiers, et une éloquence dont je vous souhaite vivement de faire la connaissance. Woeste n'est naturellement pas satisfait : il reproche au conférencier de sortir du cadre de l'ordre du jour. Il y a eu des discussions et des tiraillements, posés mais non sans une certaine animosité contenue. Woeste veut renvoyer la question... à un prochain congrès. Le président Cooreman et le député Henderickx interviennent. Et le cas se termine comme la sirène : desinens in piscem... Deuxième désillusion pour ceux qui espéraient ici trouver un fil conducteur de la pensée catholique à travers la politique belge de demain...
Dans la sixième section, où je fais une brève apparition, ils discutent de la « civilisation du Congo ». Dans la quatrième, les journalistes se plaignent que les journaux du parti ne reçoivent pas suffisamment de soutien, tant spirituel que financier.
Et voilà ce que je peux vous rapporter de ce premier jour du congrès, à part le fait que je vous recommande tout particulièrement cet hôtel où l'on mange tant pour son argent...
(Paru dans le Nieuwe Rotterdam Courant, le 26 septembre 1909)
Malines, 24 septembre 1909
Je profite des quelques heures de liberté qui me sont accordées avant le déjeuner pour vous faire part, depuis l'hôtel où l'on mange copieusement pour peu d'argent, de quelques éléments concernant certaines sessions d'hier et vous raconter ce qui s'est passé d'important aujourd'hui.
Je vous ai déjà dit ce matin que je ne possède pas le don d'ubiquité, et je ne doute pas que vous me croyez. J'ai donc dû, tout en écoutant des questions concernant le Congo et les affaires scolaires, renoncer à diverses autres choses intéressantes. Mais avant de m'étendre là-dessus, permettez-moi de revenir brièvement sur l'incident Woeste-Dosfel concernant la flamandisation de l'enseignement. Je vous ai dit que cela avait abouti à la déception d'un règlement à l'amiable. Eh bien, il y a quelques heures, alors que je vous écrivais ce matin, cette déception s'est transformée en défaite pour M. Woeste. Les Flamands, avec le député Henderickx à leur tête, ont été reçus en audience par le président Cooreman, et il a été décidé qu'on ne considérerait plus la question comme réglée, mais qu'elle sera à nouveau à l'ordre du jour, malgré M. Woeste et son agenda, samedi prochain.
Ce congrès pourrait donc, malgré les adversaires politiques et spirituels, se situer sous le signe de la flamanité ? - Puisque je suis sur ce sujet, je dois dire que de nombreux amis flamands, par leur enthousiasme et leur conviction, ont ébranlé mon pessimisme à cet égard. Ils me signalent les deux « surprises » que je vous ai mentionnées ce matin : le discours flamand de Monseigneur Mercier et le large discours flamand du président Cooreman. D'autres choses sont à venir, assurent les bien informés... Alors, il ne reste plus qu'à attendre...
En attendant, ce que je peux vous rapporter sur ce qui s'est passé hier dans les sections où je n'étais pas vient naturellement des journaux. Les journaux catholiques français paraissent presque tous avec un même, je suppose, rapport officieux ; m'appuyer là-dessus est pour moi une excuse si je reste un peu à côté de la vérité... Quoi qu'il en soit, c'est suffisamment important, bien que je puisse en parler brièvement, puisque cela ne concerne pas la politique générale actuelle du pays. Cependant, la discussion sur les lois concernant l'assurance maladie, l'incapacité de travail, la vieillesse et l'assurance-vie ne doit pas être négligée. D'après les rapports, j'ai l'impression que dans la section où ce sujet a été traité, les discussions étaient plutôt confuses. On n'obtient pas une idée très claire de ce qui a été dit, et il est donc dangereux d'en tirer des conclusions. Ce qui est certain, c'est que tout le monde n'est pas satisfait de la loi de 1900 concernant les pensions de vieillesse, émise par l'État, qui impose des contributions et ainsi entrave la liberté. De plus, il est demandé que les municipalités interviennent dans les contributions : une économie pour l'administration des pauvres, étant donné que la pension de l'État rend le soutien municipal superflu. Si l'on considère que cette pension d'État ne s'élève qu'à 65 francs par an, on pourrait penser qu'il y a eu beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Mais il ne fait aucun doute que les gens en ont assez.
D'une importance égale, sinon plus grande, ont été les discussions dans la section des arts et des sciences. Là, des personnes très compétentes, parmi lesquelles le bénédictin Dom Pothier, ont abordé la musique d'église et le chant liturgique. Il a été décidé qu'il fallait à tout prix revenir à la tradition grégorienne originale et au chant communautaire dans les églises, ce qui est assurément une décision très précieuse. De plus, il a été convenu de fonder une société catholique pour la pratique de la pure science. Et enfin, il a été décidé que dans les cercles catholiques, lorsque des pièces de théâtre sont jouées, les rôles féminins ne seront plus confiés à des hommes. Vous devez admettre que cela constitue une belle victoire !...
Et maintenant, j'ai fini avec la journée d'hier et je peux vous faire part de mes impressions de ce matin. La première impression reste celle d'une surabondance, d'une ébullition. Moi qui ai assisté à de nombreux congrès dans le cadre de mon travail, je n'ai jamais vu un rassemblement avec tant de gens et tant d'intérêt, et aucun congrès néerlandais n'a été aussi joyeux et aussi enthousiaste. C'est d'ailleurs un phénomène courant ici de voir les sections se déplacer. À un moment donné, le président se lève et dit : « Il est clair que c'est trop petit et trop plein ici ; cherchons une autre salle. » Et les participants le suivent avec gratitude... « sur un plus grand », comme disent les Bruxellois lorsqu'ils passent d'un café à un autre le dimanche...
Je me promène dans des salles où l'on discute de mutualité ; dans une autre, on parle des intérêts de la petite bourgeoisie : deux chevaux de bataille des économistes catholiques. Je m'arrête un instant dans la section scolaire, où il y a des débats sur les classiques païens et les classiques catholiques, les premiers étant défendus par un jésuite très savant, le père Verest, les seconds étant loués par le professeur Kurth, qui hier nous a laissé dans un douloureux doute sur la question de savoir si nous allons obtenir l'instruction obligatoire ou non. Dans la section littéraire, après des querelles entre Flamands et Wallons, on est en train de fonder une association des écrivains catholiques belges. Et enfin, je me retrouve dans la section des dames, qui se déroule dans un très joli pensionnat pour filles... « Où peut-on être mieux ? » aurait chanté le vieux Grétry. Et je chante après lui, bien que je sois un peu enroué aujourd'hui, sans avoir à l'imputer à une déclaration excessive selon laquelle le Lion flamand n'est pas apprivoisable....
Ces dames tiennent donc séance, divisées en quatre sous-sections, chacune présidée par un prêtre courtois. Et le plus beau, c'est que ces dames tolèrent que l'on parle flamand en leur présence. Voyez-vous, nous avançons !?... Le défunt baron de Maere, pilier des Congrès néerlandais, ne voyait pas d'autre solution au mouvement flamand que par un violent rapt moral des vierges sabines. Ce rapt, par exemple, est pris en charge par le sous-prêtre Andriessens, qui, entre autres et très justement, demande une meilleure formation sociale et une formation plus pratique pour les jeunes filles des congrégations...
Bien sûr, dans cette section, des choses très intéressantes ont été abordées, qui cependant ne font pas partie de mon programme. Laissez-moi donc boire les dernières gouttes de mon café et me rendre aux sessions de l'après-midi.
Après-midi.
La providence des journalistes veut que je tombe au milieu d'une section où un sujet brûlant est à l'ordre du jour : l'extension des universités. L'extension des universités existe chez nous depuis vingt ans, à l'exemple de l'« University Extension » anglaise. Les véritables fondateurs en étaient Lod. de Raet, l'économiste bien connu, et P. Tack, professeur à l'Athénée d'Ixelles. Leur travail, commencé à l'université de Gand, a pris ici une importante ampleur. Surtout à Anvers, les catholiques travaillent vaillamment, et c'est sur ce travail anversois que le rapport a été présenté ici. Ce rapport, présenté par M. De Clercq, conclut que l'université en Flandre doit être entièrement flamandisée. L'avocat De Vos intervient et exige plus particulièrement la flamandisation de l'université de Louvain. Une réelle excitation règne dans la salle. Et lorsque le professeur Van Cauwelaert se lève et demande la même chose, insistant pour que le souhait soit transmis aux évêques, l'assemblée acquiesce avec joie.
Quelqu'un me tape sur l'épaule et me demande : « Eh bien, où restes-tu, pessimiste ? » Et je dois avouer : oui, c'est indéniablement une étape importante. Ne pensez pas, cher lecteur, que j'exagère en disant cela. Quiconque connaît Frans van Cauwelaert sait ce que signifie son intervention. Ancien étudiant de Mgr. Mercier, il est mieux placé que quiconque pour connaître ces insights. Ses mots tout à l'heure ne doivent pas non plus être l'écho de ce que Mgr. Mercier lui aurait murmuré à l'oreille : ils indiquent du moins que l'archevêque n'est certainement pas intransigeant sur la pensée d'une flamandisation partielle de l'Alma Mater de Louvain. De plus, des centaines d'auditeurs ont approuvé les paroles de MM. De Clercq, Lebon et Van Cauwelaert, et ont fait de ce souhait le souhait de tous : un souhait qui va alors acquérir quelque chose de poliment mais fermement requis, avec une pétition et le soutien des autorités, en une opération politique publique !...
Tout en écrivant cela, j'entends que dans une autre section, le député de Wallonie, Mgr. Heylen, a prononcé un discours en flamand. Cette section était dirigée par le père Rutten, le hardi dominicain qui, il y a des années, pour mieux étudier les conditions de vie des travailleurs, a abandonné l'habit pendant six mois et, en tant qu'ouvrier, a travaillé dans une mine de charbon ; aujourd'hui, il est un économiste de renom, très apprécié des travailleurs gantois et même respecté par ses opposants....
Mais je souhaite maintenant passer à l'assemblée générale, en attendant que les journaux me permettent de vous informer sur les autres sections. Imaginez que la manie des déménagements, qui sévit dans ce congrès, nous procure le lieu de réunion le plus merveilleux qu'on puisse rêver : le beau parc du pensionnat pour filles, où ce matin se tenait la réunion des dames. Là, le manteau rouge de Mgr. Mercier, lorsqu'il fait son entrée avec son cortège d'évêques en pourpre et de prêtres en blanc, ressemble à une procession de marquises dans un tableau de Watteau. Bien sûr, à condition de ne pas trop prêter attention à l'apparence de ces messieurs, qui... Mais je vous ai prévenu dès le début que je serais sérieux tout le temps, et que je me limiterais à... (voir plus haut).
Maintenant, une accueil éloquent, le plus éloquent des discours, par Mgr. Touchet, évêque d'Orléans, sur le thème de la « bravoure ». Vous connaissez le thème : cela commence avec Jules César, « Commentaires sur la guerre des Gaules », puis passe à Clovis, pour enfin atterrir en 1830, et en 1831, lorsque Gérard et les régiments français nous tendent « la main » à Anvers : allusion que l'évêque français, qui ne sait pas à quel point elle nous serait agréable, aurait pu s'abstenir de faire.... Il y a aussi une autre forme de bravoure, estime Mgr. Touchet : celle des industriels, et là aussi, les Belges sont de sacrés gaillards. Mais le meilleur de tout : nous sommes des chrétiens courageux... Et ainsi, cela continue. On écoute pendant un moment la belle allocution, la belle diction. Puis, sans même s'en rendre compte, on n'écoute plus. On ressent un malaise, on essaie de faire des efforts pour rester attentif. Mais on est de nouveau distrait : cette demoiselle là-bas a un joli chapeau ; ce parc n'est pas fait pour accueillir deux mille personnes. Mon Dieu, que Mgr. Stillemans est gros.... Pourtant, une ovation est faite à l'audacieux Mgr. Touchet ; on applaudit ; et maintenant, le courageux Karel Woeste prend la parole...
Après le sucre, le vinaigre. Du moins pour la voix. M. Woeste, vous le savez, a un son de voix comme un hache rouillée. Et ce qu'il dit n'est pas toujours sans intentions cinglantes. Il parle de l'« action catholique ». On admire son courage et sa ténacité. On se dit : « Pauvre M. Woeste ! » Et on applaudit aussi, vraiment admirant que cet homme battu et trompé ne renonce pas.
Après quoi, on va accueillir avec un bien plus grand plaisir le concert de carillon de Jef Denijn.... Demain, plus d'infos là-dessus !
(Paru dans le Nieuwe Rotterdam Courant, le 27 septembre 1909)
Malines, 25 septembre 1909
« Si je n'étais pas Alexandre le Grand, je voudrais bien être Diogène », a dit un jour quelqu'un, dont il est superflu de mentionner le nom. Et je dis : si je n'étais pas le correspondant bruxellois du Nieuwe Rotterdamsche Courant, je voudrais bien être le président Cooreman. Pas physiquement, voyez-vous, mais pour la valeur morale de l'homme. Croiriez-vous que tout ce qui a été accompli par ce congrès est dû au président Cooreman ? Et ce qui a été accompli, jusqu'à présent, n'est vraiment pas négligeable.
Oh, je le sais bien : on a soigneusement évité de parler de service militaire. Et en ce qui concerne le droit de vote, il n'y a rien à espérer ici. Appelez cela des désillusions : je suis d'accord avec vous, bien que je n'attendais pas de solutions. Sur l'obligation scolaire, le professeur G. Kurth a parlé de manière si ambiguë que j'en ai douté. Maintenant, il semble que je me sois trompé : je devrais interpréter les oracles du professeur Kurth de manière favorable, m'assure un initié. Je lui en suis très reconnaissant, bien que j'aie compris cela différemment, et que je doive citer La Fontaine en disant : « Ce bloc enfariné ne me dit rien qui vaille... »
Ainsi, je pourrais mettre un point final à un rapport qui n'a pas tenu ce qu'il vous avait promis. Ou mieux : je devrais me taire, puisque je ne peux pas vous raconter ce qui n'a pas été dit.
Et pourtant, ce congrès, qui s'approche de son dernier jour - le jour des drapeaux et des défilés - a été d'une grande importance, et pour beaucoup, d'une importance inattendue. Voyez-vous, cela fait trois jours que je suis dans un état d'esprit pessimiste. Même les repas copieux de l'auberge, où l'on obtient des plats loin d'être modestes pour peu d'argent, ne m'ont pas remis à la chaleur de l'innombrable foule qui traverse les rues de Malines, entre les mâts décorés de drapeaux. Mais nier l'importance de cette réunion, en ce qui concerne la démocratie et le mouvement flamand, serait comme nier le soleil, et jouer le rôle du nuage qui, pour l'instant, me force à demander de la lumière à ma logeuse, tout comme Goethe sur son lit de mort…
Démocratie : hélas Woeste, elle déborde à ce congrès.
Quand je vous ai écrit, quelques jours avant ces réunions, qu'il serait amusant de voir comment les jeunes catholiques se comporteraient par rapport aux anciens, je ne savais pas que la question avait été résolue d'avance : les jeunes catholiques avaient en effet déjà triomphé ; ils seraient libres d'exprimer leur opinion, naturellement dans les limites de la courtoisie parlementaire (elle existe encore, même en Belgique !), en fonction de l'attitude du parti. D'où le beau discours d'ouverture du président Cooreman, qui a certainement contribué à cela, et par conséquent, m'a presque incité à l'envier pour son acte de conquête - ce qu'il a triomphé, cela m'importe peu !
Il y a ensuite le mouvement flamand. Je vous ai parlé de l'extension universitaire de l'ingénieur De Clercq, de l'avocat De Vos et du professeur Van Cauwelaert, et de la manière dont ils ont réussi à persuader une réunion où se trouvaient de nombreuses personnes difficiles à contenter de voter un souhait explicite pour la flamandisation de l'université de Louvain. Je vous ai également dit que le brillant mais difficile Dosfel avait infligé un coup sévère à l'autorité de Woeste, en faisant en sorte que la question de la loi Cooreman sur le flamand dans l'enseignement libre, rejetée jeudi, soit à nouveau à l'ordre du jour aujourd'hui, grâce au président Cooreman - toujours lui !
Et elle est bien à l'ordre du jour, et avec un résultat magnifique. D'abord ce premier acte : Woeste qui renonce à sa présidence. Je ne peux m'en empêcher, mais je trouve cela encore très courageux de la part du père Woeste, qu'il préfère renoncer à tout tsarisme plutôt que de devoir se plier devant une assemblée de quelques centaines de personnes. Son poste est occupé par Cooreman. Et maintenant tout se passe, bien sûr, grâce à une telle politique élevée, sage et choisie, comme sur des roulettes... Et c'est le député Henderickx, tout aussi petit mais tout aussi vaillant que le président, qui, contre le chanoine Muyldermans, le membre le plus pitoyable de l'Académie flamande royale, répète... ce que j'ai dit ici si souvent, que les Pays-Bas sont pour l'instant plus convaincus que la Belgique du bon droit de la question discutée. Muyldermans est d'ailleurs hué : sort des fossiles, lorsqu'ils exigent le droit à la vie. On ne hue pas du tout Frans van Cauwelaert, qui a la bonne idée de dire tout clairement en français, tout... ce que j'ai dit ici si souvent, que... - Et puis il y a encore le père Verest qui prouve être prudent, en déclarant qu'il préfère s'abstenir ; et il y a un autre ecclésiastique qui est assez imprudent pour dire qu'il est d'accord avec le professeur Van Cauwelaert, mais... qu'il préfère tout de même s'abstenir. Mais il y a pourtant Cooreman, qui clarifie tout par la déclaration suivante du bureau, qui satisfait tout le monde et qui en dit beaucoup :
« Le bureau, considérant qu'une connaissance générale et approfondie de la langue flamande est nécessaire en ce qui concerne l'influence catholique dans le pays flamand, est d'avis que les catholiques du pays flamand doivent s'efforcer d'apprendre la langue en profondeur, et déclare être disposé à tous les moyens qui, sans porter atteinte à la liberté constitutionnelle, peuvent généraliser cette connaissance. »
La mise en forme est bien sûr de moi. Mais en dehors de cela, je m'abstiens de tout commentaire, car je sais ce que cela signifie, dans un congrès comme celui-ci, comme engagement de la part de l'autorité. De sorte que je peux maintenant écouter d'autres réunions.
(Paru dans le Nieuwe Rotterdam Courant, le 28 septembre 1909)
Malines, 26 septembre 1909
Pendant cinq jours, tourmenté par l'Esprit de la Complétude, j'ai fait de mon mieux pour vous informer, autant que possible, sur ces journées exubérantes, bourdonnantes et actives. Mon projet initial, vous montrer la relation du congrès avec la politique belge du jour, a dû être abandonné, pour la bonne raison que l'on a soigneusement écarté la politique belge actuelle, ou du moins ses points focaux, pour se concentrer sur ce qu'on appelle ici : « les œuvres catholiques ». (Si je devais vous donner la liste des activités selon le programme flamand du congrès, vous prendriez beaucoup de plaisir, tant il est absurde !). Heureusement, grâce à quelques flamands acharnés, on a pu sauver beaucoup de choses sur le plan flamand, que l'on voulait également rejeter. En ce qui concerne les conditions générales belges, beaucoup a tout de même été obtenu ici. Je vous en ai donc fidèlement et brièvement rendu compte. Mais qu'en est-il de tout le reste, qui avait également de l'importance, bien que cela soit en dehors du cadre que je m'étais fixé ?
Cher lecteur, il y a un grand vide dans mon éducation : on ne m'a pas appris à écrire avec les deux mains en même temps. Ajoutez à cela un défaut physique : je n'entends rien à quoi je ne participe pas. Et encore cette anomalie astronomique : une journée n'a que vingt-quatre heures, dont une partie, si minime soit-elle, est consacrée au sommeil.
J'ai donc été incomplet, à ma grande déception et à ma honte, mais cela ne dépendait pas de moi. Je suis le volontaire incomplet. Cela dit, je vais encore rattraper ce qui peut encore l’être.
D'abord quelques discours lors de l'assemblée générale de samedi. Là, ce vieux bonhomme de ministre d'État Beernaert a parlé de l'alcoolisme. Chaque Belge, semble-t-il, boit par an 120 litres de bière et 5 litres de spiritueux. Cela représente à peu près une petite pinte au déjeuner de chaque jour, et tous les trois ou quatre jours, un petit verre. Et cela, le ministre d'État Beernaert trouve cela exagéré ! Que cependant il ne le prend pas si au sérieux prouve le fait qu'il se réjouit du fait qu'en Danemark, il faut parfois marcher dix kilomètres pour rencontrer une auberge : vraiment plaisant, n'est-ce pas, en été, quand on a soif ! ... Certes, on dépense trop d'argent en alcool. Monsieur Beernaert a calculé qu'un ouvrier belge, s'il voulait économiser son argent à boire, pourrait chaque jour se nourrir de cailles. Mais le bon ministre d'État oublie que la chasse aux cailles est interdite pendant les trois quarts de l'année, et que de plus, les cailles sont préparées avec du cognac... Cela n’empêche pas que la présentation de M. Beernaert était plutôt savoureuse ; beaucoup plus savoureuse que ce que le ministre d'État Van den Heuvel a annoncé avec sa voix aiguë et désagréable concernant le droit d'association, qui ne se faisait pas sans venins et allusions à ce qui se passe dans les pays voisins. Plus que contre les partis d'opposition belge, ce congrès s'est en effet dirigé contre la politique française des dernières années. Je me garde naturellement de tout jugement sur cette politique. Mais était-il vraiment nécessaire, et surtout approprié, d'inviter un Mgr. Touchet à descendre de son pays pour s'exprimer sur le gouvernement de son pays, et un ancien ministre de la Justice devait-il alors encore insister là-dessus ? Cela, je laisse à votre appréciation…
Le cardinal Mercier a été très noble et élevé dans son évaluation de l'efficacité de ce congrès. Le travail réalisé ici est immense. Le rapport officiel en comptera plus de mille pages. Et quel est le résultat de cet effort ? ... Je répète : en termes nobles, notre archevêque a exprimé des généralités qui n’ont que peu de rapport avec ce qui a été accompli. Il ne pouvait et ne devait cependant pas se priver de l'assurance que ce congrès a clairement fait ressortir les tendances démocratiques du catholicisme actuel, comme je l'ai dit hier : les discussions concernant la question flamande sont certainement le plus important qui ait été atteint ici. Et cela a également une grande signification pour l'avenir du parti, car cela assure sa viabilité...
Voilà pour les événements de samedi.
Et dimanche alors...
Mais laissez-moi ici prendre un peu de temps. Pensez un instant à ce que cela a dû être, lorsque je vous aurai dit que l'État a fourni plus de soixante-dix mille billets à prix réduit pour Malines ; qu'en plus des trois ou quatre mille congressistes, encore quelques milliers d'autres Belges sont arrivés ici à plein tarif ; qu'en outre, aucun habitant de Malines n'est resté cloîtré chez lui ; et imaginez-vous au milieu de cette foule, votre correspondant, seul et abandonné, contraint de prendre des notes !
Je vous le déclare franchement, et malgré le démon de la complétude : ces notes sont rares, et je préfère laisser à votre imagination plutôt que de vous décrire précisément comment tout cela était.
Comment faire cela ? Comment même être partout présent et participer ? Pensez un peu : à 11h30, assemblée générale des sociétés Vincent de Paul ; à 11h, assemblée générale de la Jeunesse (j'ai entendu un extrait d'un beau discours de M. Pirmez). À midi, discours de Mgr. Mercier lors de cette même assemblée. Entre-temps : réunions de la Sainte Famille et du Saint Sacrement. Trouvez donc du bon poisson là-dedans ! Rédigez un rapport ordonné à ce sujet !
Et à une heure, le cortège ; plus de cent cinquante mille personnes, dont environ cent orchestres de musique, et au-dessus de cela environ deux mille drapeaux flottant.
Non, décidément, je renonce. J'aurais juste aimé que vous ayez été là avec moi sur la grande place, à regarder pendant quatre heures cette grande, cette écrasante, cette stupéfiante masse humaine. Et le Te Deum ensuite : les quarante saints belges, une parure de joyaux éclatants, derrière une grande croix ; et tous ces évêques majestueux ; et le chant solennel qui s'élève de profondes voix d'hommes ; et le large geste bénissant de l'archevêque : je vous assure : cela vous donnait la chair de poule, tant c’était grandiose et impressionnant... - Et après le Christus imperat, la Brabançonne résonnante qui éclate soudain de toutes les bouches, joyeuse et convaincue, si bien qu'on en venait vraiment à croire en l'amour de la patrie belge. Et que le parti catholique chez nous soit mort, cela n'est certainement pas vrai !...
Et puis, chers lecteurs, je me suis un peu allongé sur mon lit, car une autre épreuve m'attendait : le banquet, et je voulais y être en forme.
Un bon banquet, celui-là. Et une belle table d'honneur, où le ministre Renkin attire particulièrement l’attention, tout juste de retour du Congo (arrivé samedi, il s'est rapidement régalé d'une excellente table bruxelloise, ce qui est compréhensible après tout ce dégoûtant repas en conserve durant ce long voyage). Et avec enthousiasme, les toasts : en français, celui de Mgr. Stillemans, au Pape et au Roi ; mais en flamand, celui du député Verhaegen, aux présidents du congrès, Cooreman et Simonis ; en français, celui de Simonis à Mgr. Mercier, qui répond en français ; mais en flamand, celui de Cooreman - du moins en partie... Ainsi, les Flamands n'ont vraiment pas à se plaindre...
Et à 10 heures, le banquet prend fin, et avec lui le congrès. Et ce que signifie profondément cette dernière session, je pourrais encore vous le raconter, si cette lettre n’était pas déjà si longue, et si je n'étais pas moi-même – pardonnez-moi – si fatigué...
Cela sera donc, avec votre bienveillance, pour demain !