(Deuxième édition (« soigneusement revue, continuée jusqu’à l’avènement du ministère de 1855 et précédée d’un essai historique sur le royaume des Pays-Bas et la révolution de septembre »), paru à Louvain en 1861, chez Vanlinhout et Peeters. Trois tomes)
(page 310) Pendant que les premiers symptômes d'une lutte intérieure, exagérés par la presse étrangère, alarmaient les amis et encourageaient les ennemis de la révolution de septembre, notre jeune royauté reçut du gouvernement français un gage éclatant d'affection et de confiance.
Dès le début de l'insurrection, les regards des Belges s'étaient tournés vers la France. Avec cet instinct toujours si sûr quand il n'est pas égaré par des suggestions perfides, les masses avaient compris que le drapeau de septembre devait se déployer à côté du drapeau de juillet. A peine arrivé à Londres, le président de la députation chargée d'offrir la couronne au prince Léopold écrivit au Régent que le futur souverain des Belges obtiendrait probablement la main d'une fille du roi Louis-Philippe. C'était aller au-devant du vœu populaire. Aussitôt (page 311) que Léopold eut pris possession du trône, on vit de toutes parts se manifester le désir d'y placer à côté de lui une princesse de la famille royale de France.
Cet espoir ne tarda pas à se réaliser. Le 9 août 1832, le roi des Belges épousa la princesse Louise-Marie-Thérèse-Caroline-Isabelle d'Orléans, fille aînée du roi des Français.
Le caractère de la Jeune reine était merveilleusement propre à lui concilier l'affection des Belges. Née à Palerme, le 3 avril 1812 ; élevée par cette noble et courageuse princesse que l'Europe chérissait naguère sur le trône et qu'elle admire aujourd'hui dans l'exil, Louise était douée de cette piété à la fois tendre et ferme qui imprime à tous les actes de la vie le caractère d'un devoir affectueusement rempli. Chrétienne fervente et le cœur plein de compassion pour toutes les misères, elle saisissait avec bonheur les occasions d'essuyer une larme ou de faire renaître une espérance. Ses traits réguliers et purs, reproduisant le type adouci de la maison de Bourbon, réflétaient la candeur de son âme. Son regard, empreint d'une remarquable douceur, annonçait la bonté gracieuse et intelligente d'une organisation d'élite.
Avant de monter sur le trône des Belges, Léopold avait été deux fois l'hôte de la famille d'Orléans. Au mois de juin 1826, quittant sa résidence de Claremont pour se rendre en Allemagne auprès de sa mère, il traversa la France et alla visiter à Neuilly le duc d'Orléans, que la révolution de juillet devait, quatre ans plus tard, transformer en roi des Français. En 1829, de graves intérêts ramenèrent le prince à Paris. L'Angleterre, la France et la Russie lui ayant offert la souveraineté de la Grèce, il était venu s'enquérir par lui-même des dispositions du cabinet des Tuileries.
Cette fois encore, il reçut au sein de la noble et belle famille de Louis-Philippe l'accueil que lui méritaient son rang et son caractère. Les deux princes avaient appris à se connaître en 1816, pendant le séjour de la famille d'Orléans à Twickenham. L'un et l'autre avaient vaillamment combattu sur les champs de bataille ; l'un et l'autre voyaient dans le gouvernement représentatif, loyalement appliqué, la garantie la plus efficace du repos, de la prospérité et du progrès des nations modernes. Cette communauté de sentiments et de vues avait établi entre Louis-Philippe et Léopold une amitié sincère et durable.
On dit que, dès cette seconde entrevue, l'illustre visiteur avait jeté (page 312) les yeux sur la princesse Louise, alors âgée de dix-huit ans ; on ajoute que ces sentiments n'étaient pas un mystère pour Louis-PhiIippe, et que dès lors l'union de son auguste fille avec le prince Léopold fut résolue (Note de bas de page : Cette allégation se trouve dans tous les écrits qui furent publiés en 1850, à l'occasion de la mort de la reine).
Quoi qu'il en soit, après que Léopold fut monté sur le trône des Belges, son mariage avec une fille du roi des Français entrait à tous égards dans les vœux de la nation à laquelle il venait d'unir ses destinées. Nous l'avons déjà dit : l'instinct populaire avait compris que l'alliance des deux royautés issues des commotions révolutionnaires de 1830 devait être cimentée par les liens de la famille. L'opinion publique était tellement préparée à ce résultat, les vœux du roi et du peuple étaient si bien d'accord, que la nouvelle de l'heureuse issue des négociations fut accueillie sans surprise : tous les amis de l'indépendance nationale attendaient l'assentiment du roi des Français comme une consécration définitive de la révolution de septembre.
Les cérémonies requises s'accomplirent au château de Compiègne.
A huit heures du soir, le mariage civil fut célébré dans le cabinet du roi, par le baron Pasquier, président de la Chambre des Pairs et remplissant à ce titre les fonctions d'officier de l'état civil pour les membres de la famille royale. Le roi des Belges avait pour témoins le comte d’Aerschot, membre du Sénat, et le comte Félix de Mérode, membre de la Chambre des Représentants. Le roi des Français avait désigné le lieutenant-général duc de Choiseul, le marquis de Barbé-Marbois, premier président de la Cour des Comptes, le comte Portalis, premier président de la Cour de Cassation, le duc de Bassano, le maréchal Gérard, M. Bérenger, M. Dupin, procureur-général à la Cour de Cassation, et M. Benjamin Delessert ; les quatre premiers appartenaient à la Chambre des Pairs et les autres à la Chambre des Députés. Louis-Philippe, la reine des Français, les princes et les princesses de la famille royale étaient présents et signèrent au contrat (Voy. l'acte de mariage et le récit officiel de la cérémonie à l'Appendice (L. Q)).
Une vaste salle du château avait été convertie en chapelle. Ce fut là, à neuf heures du soir, que l'évêque de Meaux donna aux augustes (page 313) époux la bénédiction nuptiale. L'émotion de la reine et des princesses, déjà vivement provoquée par la pensée d'une séparation prochaine, se manifesta par des larmes abondantes, lorsque le prélat fit entendre quelques-unes de ces paroles à la fois touchantes et graves dont le sacerdoce catholique a seul conservé le secret. S'adressant directement au roi Léopold, l'évêque lui dit :
« En présidant, au nom de l'Église, à la cérémonie religieuse qui doit consacrer cette auguste alliance, qu'il nous soit permis de rester étranger à toutes les louanges comme à toutes les considérations humaines dont elle est naturellement le digne et important objet. D'autres pensées occupent notre esprit ; et ces pensées, recueillies dans nos livres sacrés, conviennent davantage à la sainteté de nos fonctions et répondent mieux aussi sans doute à l'attente de cette royale assemblée. - Avec quelle complaisance, en effet, dans ce moment solennel et imposant, nous aimons à rappeler en nous-même et à retracer ici l'image céleste de cette femme forte dont l'Esprit-Saint s'est plu lui-même à consacrer la mémoire et à publier l'éloge ! Nul mérite n'est comparable au sien, dit l'Écriture, et tous les trésors de l'univers et tous les sceptres du monde n'en sauraient égaler le prix et la valeur. L'heureux époux qui en est favorisé jouit dans sa douce société d'une paix profonde et d'une joie sans mélange. Sûr de son affection et de sa fidélité, il se repose sur elle avec une sécurité entière des soins de sa famille. Toujours à la hauteur de sa situation, on la voit porter dans toutes ses démarches une noblesse et une dignité qui se soutiennent également dans la dépendance du devoir et dans la supériorité du rang : obéir avec majesté, commander avec réserve, suivre la loi et la donner, servir à la fois de spectacle et d'exemple. - Bonne et généreuse, elle écoute avec un tendre intérêt le récit de toutes les misères, et ses abondantes largesses deviennent l'inépuisable ressource de tous les malheureux. Revêtue de force et de beauté, la loi de la clémence est sans cesse sur ses lèvres, et l'éclat de ses vertus, qu'elle s'efforce en vain de cacher, trahit son humilité aux yeux de tout le monde et rejaillit jusque sur son époux. Magnanime enfin, et d'une humeur toujours égale, on la verra tranquille et calme dans la mauvaise comme dans la bonne fortune ; elle sera, au déclin de la vie, et à l'approche même de son dernier moment, comme elle était dans ces jours brillants où, parée (page 314) de ses ornements de fête, elle recueillait avec une joie modeste les louanges de son époux, les caresses de ses enfants et les applaudissements de tout son peuple. - Voilà, Sire, quelques-uns des traits de cette femme incomparable, que la Sagesse elle-même nous représente comme l'héroïne de son sexe et le modèle accompli des épouses et des mères. Votre Majesté en a sous les yeux, dans l'auguste mère qui nous écoute, l'une des images les plus parfaites qui aient jamais paru sur la terre. Voilà aussi, nous osons le dire avec une juste confiance, les fruits heureux de notre sainte religion ! En prince judicieux vous êtes venu les chercher dans notre France, où ils sont cultivés avec tant de succès par les soins d'un père, qui sait allier ce que la tendresse a de plus vif et de plus profond aux devoirs multipliés et aux occupations infinies qui remplissent sa vie, et par ceux de toute une famille dont les nobles et douces vertus vous étaient connues depuis longtemps. Cet illustre rejeton de grâce et de piété, transporté par vous sur une terre amie, y croîtra comme sur son sol natal pour y faire la consolation de votre vie, ainsi que la gloire et le bonheur de votre peuple. Princesse accomplie dans un âge où l'on ne donne ordinairement que des espérances, elle fera briller sur votre trône cet accord, si touchant et si rare, des grâces naturelles et d'une sincère modestie ; d'un caractère ferme et prononcé pour le bien, mais tempéré par la douceur d'une véritable piété ; d'un esprit agréable à la fois et solide, accoutumé à garder les bornes que la vraie sagesse sait placer entre l'honnête liberté qui fait chérir la vertu et cette retenue sévère qui confond le vice jusque dans la pensée : elle y fera briller enfin toutes les aimables qualités d'une âme innocente et pure, qui, comme dans son auguste mère, font le charme de la vie et le plus bel ornement de son sexe. - Recevez-la donc en ce moment, Sire, recevez-la des mains de la religion, qui, en confiant à votre tendresse un dépôt si cher, pense avec joie qu'elle place sa piété et sa vertu sous la sauvegarde de l'honneur et de la loyauté mêmes. Recevez-la des mains d'une auguste famille, dont elle a toujours fait l'ornement et la joie, et qui se repose maintenant sur vous avec une bien douce assurance du soin de son bonheur. Recevez-la enfin des mains de la patrie, qui voit dans cette illustre alliance des gages de paix et de sécurité pour l'avenir, et qui, en applaudissant à votre bonheur, ne peut s'empêcher en même temps de s'associer à tous les (page 315) regrets que son éloignement inspire à de nobles cœurs. - Puisse la nation que vous gouvernez, Sire, partageant avec vous le trésor que vous lui apportez, dire comme nous de notre princesse et répéter longtemps dans les transports de sa joie ces paroles dans lesquelles l'Esprit-Saint a renfermé tant d'éloges : Beaucoup d'autres ont fait la gloire et l'admiration de leur peuple ; mais cet ange de bonté et de douceur les surpasse toutes par sa sagesse et la réunion touchante des qualités les plus aimables et des plus excellentes vertus. Multae filiae congregaverunt divitias, tu supergressa es universas (PROV. 51. 20.). »
Immédiatement après l'accomplissement de la cérémonie catholique, la famille royale et les assistants se rendirent dans une salle du château, où un pasteur protestant de Paris donna aux augustes époux la bénédiction nuptiale selon le rite luthérien.
Quatre jours après, le roi et la reine des Belges prirent le chemin de leur royaume. Depuis la frontière jusqu'au château de Laeken, leur voyage fut une longue marche triomphale. Cette fois encore, le public officiel ne fut pas seul à prodiguer ses félicitations et ses hommages. Le peuple des villes avait chaleureusement secondé les efforts de ses magistrats, et le peuple des campagnes, ayant à sa tête les autorités civiles et ecclésiastiques, se pressait aux bords de la route et faisait retentir les airs de ses joyeuses et énergiques acclamations.
Bientôt la jeune reine fut appelée à figurer dans l'une des fêtes les plus imposantes qui aient marqué les premiers jours de la monarchie nationale.
Le 28 mai 1831, le Congrès avait décidé que des drapeaux d'honneur seraient remis à toutes les communes qui, pendant les journées de septembre, avaient envoyé des secours aux combattants de la capitale. Au milieu des embarras causés par l'organisation administrative du pays, l'intervention diplomatique de l'Europe, le choix du chef de l'État et l'invasion de l'armée hollandaise, ce vœu de l'Assemblée constituante avait été momentanément perdu de vue. Il ne se réalisa que le 27 septembre 1832.
Le gouvernement avait voulu que la remise des drapeaux eût lieu sur la place Royale. C'était là que le premier sang avait coulé pour la cause de l'indépendance nationale ; c'était là encore que le premier roi de la Belgique indépendante était monté sur le trône, après avoir juré le maintien des libertés constitutionnelles conquises en septembre.
(page 316) Une vaste estrade se trouvait adossée à l'église de Saint-Jacques. Au centre, un pavillon somptueux, dont le dôme était couvert de trophées et de bannières tricolores, abritait le trône royal. De chaque côté du trône, une large galerie, surmontée d'une tribune, était réservée aux sommités de la magistrature, de l'administration et de l'armée. Deux statues représentant la Constitution et la Force étaient placées sur des massifs, à côté de deux lions aux formes majestueuses. Aux extrémités des galeries, on avait dressé deux autels antiques.
Placée au-dessus du dôme du pavillon royal, appuyée sur un lion, entourée des écussons des provinces et de drapeaux aux couleurs nationales, la statue colossale de la Belgique, dominant l'édifice el la place, étendait ses mains pleines de couronnes civiques sur les représentants de la révolution victorieuse.
A midi, les délégués des communes, précédés des blessés de septembre, gravirent les degrés de l'estrade, aux applaudissements d'une foule immense pressée sur la place, aux balcons, aux fenêtres et jusque sur les toits des hôtels environnants. Un instant après, l'enthousiasme fut au comble, lorsqu'on vit arriver la jeune reine, accompagnée du duc d'Orléans et précédée d'un groupe de cent sous-officiers de la garde civique et de l'armée portant les drapeaux décernés par la munificence nationale. Au moment où la reine parut à la tribune de droite avec son auguste frère et sa suite, les acclamations des spectateurs rappelèrent l'élan patriotique des plus beaux jours de la Révolution.
Les cris de Vive la Reine ! retentissaient encore, lorsqu'une salve d'artillerie annonça l'arrivée du roi. Aussitôt les acclamations reprirent avec une force nouvelle. Le peuple voulait prouver, une fois de plus, que la défaite de l'armée n'avait pas atteint la popularité de son chef.
Reçu au pied de l'estrade par la Commission des récompenses nationales, le roi traversa les députations des communes pour se rendre au trône. Là M. Gendebien, président de la Commission, lui dit : « Sire, ce jour, si glorieux pour la nation, est aussi bien doux pour le cœur de Votre Majesté, puisque, après quinze mois d'un règne laborieux et de pénibles contrariétés, elle trouve dans les acclamations du peuple de consolantes compensations. Sire, entouré de l'élite de la nation et de tant de braves, Votre Majesté doit être rassurée sur le sort de la Belgique. La nation a mis sa confiance (page 317) en vous, Sire ; elle est digne de la vôtre. Fort de cette confiance réciproque, n'hésitez pas à donner le signal du combat, et j'ose garantir à Votre Majesté un anniversaire plus glorieux encore que celui qui nous cause aujourd’hui tant d'émotions. »
Après avoir écouté ce discours, le roi s'avança sur le devant de l'estrade, et dit d'une voix haute et ferme : « J'éprouve une vive satisfaction de pouvoir prendre part en personne à une solennité dont la législature a décrété la célébration. Les événements dont ce jour est l'anniversaire ont consacré l'indépendance de la Belgique. A ce titre, ils ont droit à la commémoration la plus éclatante. C'était pour repousser l'envahissement du sol de la Belgique, pour défendre vos foyers et tout ce qu'un citoyen peut avoir de plus cher, que vous aviez pris les armes. Votre bravoure a obtenu le succès le plus complet. Une armée ennemie, supérieure en nombre, composée de forces régulières et bien organisées, a dû vous céder le terrain. Vous avez su la refouler jusque dans son propre pays ; vous n'avez été arrêtés que par votre modération. Vous avez mérité le signe glorieux que la reconnaissance publique offre à chacune des communes venues au secours de la capitale. » Répondant ensuite indirectement à la partie du discours de M. Gendebien où celui-ci avait conseillé un appel immédiat aux armes, le roi ajouta : « La patrie, dans des jours d'épreuve, ne réclamera pas en vain le secours de vos bras. Vous saurez combattre encore avec le même courage pour cette nationalité qui vous est précieuse, et prouver à l'Europe qu'un peuple qui chérit son indépendance et qui est résolu à la défendre au prix de tous les sacrifices, ne saurait être aisément subjugué. »
Se plaçant alors en avant du trône et ayant à sa droite le ministre de l'Intérieur, le roi remit successivement les drapeaux d'honneur aux communes désignées par le Congrès national (Note de bas de page : Voici la liste de ces communes, telle qu'elle se trouve au Moniteur : Aerschot, Alost, Andennes, Anderlecht, Ans-et-Glain, Anvers, Arlon, Ath, Bastogne, Binche, Boitsfort, Boom, Bouillon, Braine-l'Alleux, Braine-le-Comte, Bruges, Bruxelles, Charleroy, Châtelet, Courtray, Couvin, Diest, Dinant, Dison, Dour, Enghien, Ensival, Fayt, Fleurus, Fontaine-l'Évêque, Gand, Gembloux, Genappe, Gheel, St-Ghislain,. Gosselies, Grâce-Montegnêe, Grammont, Grez-Doiceau, Hal, Hasselt, Herenthout, Hermée, Herselt, Herstal, Herve, Héverlé, Hodimont, Huy, Ixelles, Jemmappe, Jemeppes, Jodoigne, La Hestre, La Hulpe, Leeuw-saint-Pierre, Leuze, Liège, Lierre, Louvain, Luxembourg, Maeseyck, Moilles, Meerhout, Menin, Meslin-l'Évêque, Molenbeck-saint.Jean, Moll, Mons, Morlanwelz, Namur, Neufchâteau, Nivelles, Ostende, Overyssche, Paris, Péruwelz, Perwez, Philippeville, Quaregnon, Quiévrain, Rebecq-Rognon, Renaix, Roulers, Ruremonde, Saintes, Sclayn, Seneffe, Soignies, Termonde, Tervueren, Thielt, Thuin, Tirlemont, Tournay, Venloo, Verviers, Waterloo, Wavre, Westerloo (Moniteur du 28 septembre 1832)).
Nous n'avons rapporté que les paroles guerrières de M. Gendebien. Après la distribution des drapeaux, une autre harangue belliqueuse fut adressée au roi par le major Kessels, parlant au nom des blessés de septembre. - Quelques heures plus tard, un banquet fut offert aux blessés sous les arcades du palais de justice).
M. Gendebien avait dit au roi : « Sire, n'hésitez pas à donner le (page 318) signal du combat. » Ces paroles étaient l'expression fidèle des désirs de la nation. A l'arrivée et au départ du cortége royal, les cris Guerre ! Guerre ! s'étaient constamment mêlés aux acclamations des citoyens et des troupes.
Depuis quatre mois, la Russie avait elle-même ratifié le traité des vingt-quatre articles ; et cependant les Hollandais occupaient toujours la citadelle d'Anvers et les forts de l'Escaut, et la diplomatie européenne, loin d'aviser aux moyens d'obtenir l'assentiment de Guillaume 1er par l'emploi de la force, semblait vouloir arracher de nouvelles concessions à la Belgique. Ces retards successifs avaient profondément mécontenté la nation. Fatiguée d'attendre le terme de nos différends de l'intervention diplomatique de la Conférence de Londres, elle voulait que le pays tentât une seconde fois le sort des armes. La cérémonie officielle fut à peine terminée que les délégués des communes se réunirent pour signer une adresse au roi, indiquant la guerre à la Hollande comme l'unique moyen de mettre un terme à l'état d'inquiétude et de crise qui paralysait toutes les forces nationales. Après avoir rappelé avec amertume les déceptions successives que la diplomatie nous avait fait éprouver, ce document se terminait par les mots suivants : « Sire, donnez au plus tôt le signal ; l'armée est prête, elle frémit d'impatience. L'opinion est bien disposée. Chacun fera son devoir sous le commandement du roi. »
Cette fois, nous sommes heureux de le dire, les cris de guerre étaient autre chose que de vaines bravades. L'armée belge, complétement réorganisée, avait atteint un effectif de plus de 100,000 hommes. Sa discipline, son organisation et sa force numérique permettaient d'espérer la victoire. Nous allons en fournir la preuve.