(Paru à Bruxelles en 1932 (tome I) et 1934 (tome II), aux éditions L'Eventail)
L'évolution de la question militaire
(page 142) Dans un Conseil de Cabinet tenu le 17, Frère avait donné lecture de la fin de son mémoire. Tous les membres civils, observait Vandenpeereboom, semblaient d'avis que, liés par les précédents, ils ne pouvaient consentir à l'établissement de nouveaux ouvrages de défense. Goethals, par contre, croyait à « l'indispensabilité de la fortification de la rive gauche. » Faute d'entente transactionnelle, on avait ajourné la décision.
Frère, malgré son prestige et sa raideur, ne laissait pas de subir l'ascendant de son jeune Roi. « Fasciné », selon l'expression de Vandenpeereboom, il sc montrait fort triste de devoir contrarier le Roi « qui est si bon », comme il disait. La position de Léopold II était pénible - remarquait Vandenpeereboom. Engagé vis-à-vis des généraux, il voyait ses ministres lui résister. Changer de Cabinet n'était pas une solution : trouverait-il des conseillers plus accommodants ? Ce n'était pas vraisemblable. Aussi toute cette affaire pouvait-elle « compromettre le vote des crédits de réorganisation de l'armée ».
La semaine du 17 au 24 novembre s'était écoulée sans que le Conseil se fût fort occupé des affaires militaires. Le Roi ne parla guère du mémoire de Frère-Orban. Il fit seulement remarquer à Rogier que ce document était « un peu raide, aigre. » « Cela n'est pas, remarque Vandenpeereboom, - car ce mémoire est le résumé des faits d'après le Moniteur et les « Annales » ; c'est Chazal qui a été raide en déclarant sur son honneur qu'il n'y a plus rien à faire pour compléter les fortifications d'Anvers. »
Goethals imitait le Roi, se tenant sur la réserve. Il ne venait pas au Conseil. « Est-ce un ordre ? de peur qu'il ne cause trop » se demandait Vandenpeereboom.
Une conversation avec Stas, confident du Roi
(page 143) Stas, ami de Vandenpeereboom et confident de Léopold II, vint entretenir le ministre de I'lntérieur des projets militaires du Roi ; de ses fréquents entretiens avec Brialmont. Chazal avait écrit au Souverain que son opinion s'était modifiée, qu'il reconnaissait la nécessité de fortifier la rive gauche. Stas fit entendre à Vandenpeereboom qu'une copie de la lettre pourrait lui être montrée, s'il en exprimait le désir. « J'ai répondu - dit Vandenpeereboom - à mon cher et bien officieux Stas que je n'avais pas l'habitude de lire des lettres qui ne m'étaient pas adressées. » Cette observation parut affecter Stas qui, pensait Vandenpeereboom, était envoyé soit par Brialmont, soit par le Roi, pour sonder le ministre de l'Intérieur, qui ajouta d'ailleurs que son siège était fait, que la lettre de Chazal ne pouvait en rien modifier son attitude. En changeant d'avis, les ministres seraient considérés comme « des compères ou des dupes » de l'ancien ministre de la Guerre.
Les écoles d'adultes
Encore une question qui devenait « très grave », compliquant encore les difficultés du ministère. « On a monté toutes les têtes, la loge et la Ligue s'en mêlent et excitent tous les esprits de(s) libéraux », écrit le 25 Vandenpeereboom. Il en causa avec Frère qui trouvait la solution facile : il suffirait de dire : « On n'est pas d'accord. » Ce n'était pas l'avis de son interlocuteur qui prévoyait de graves difficultés à l'application de l'arrêté du 1er septembre 1866.
Frère expose à divers collègues ses griefs contre Rogier et donne sa démission
Le gâchis ministériel s'accentuait. Frère convoqua Vandenpeereboom, Vanderstichelen et Bara et leur exposa longuement ses griefs contre Rogier dont la jalousie sénile le mettait dans la nécessité de donner sa démission C'était surtout la politique étrangère du (page 144) chef du Cabinet qui était critiquable et compromettante.. « Il paraît, en effet, - note Vandenpeereboom le 28, - que Rogier avait, dans une conversation, promis à Guitaud, ministre de France, que la Belgique prendrait part à la Conférence. Guitaud l'a annoncé à son gouvernement; de là les annonces des journaux que la Belgique avait adhéré. De plus, Beyens a envoyé une dépêche à Rogier pour lui dire que le Gouvernement français considérait notre adhésion comme acquise. Rogier ne nous a rien dit de tout cela. Il n'a communiqué la lettre de Beyens à personne ; une telle manière d'agir ne peut continuer. »
Frère avait exposé ses griefs en une lettre « bien aigre », informant aussi Rogier de sa démission.
Les trois collègues du ministre des Finances convinrent des torts de Rogier, qui aurait dû ne pas engager le Gouvernement dans la question de la Conférence et ne pas cacher aux ministres la dépêche de Beyens. Frère se retirant, la dislocation du Cabinet devait s'ensuivre. « On espère toutefois - écrit Vandenpeereboom - que Rogier cédera et que ce sera encore là une tempête dans un verre d'eau. » Et il nous fait une révélation bien étrange : au dire de Frère, « Beyens n'avait pas remis au Gouvernement français les dernières dépêches de Rogier et... des instructions lui avaient été données pour qu'il s'abstînt de les remettre. » Cet aveu lui suggère une juste réflexion : « Voilà une belle diplomatie en partie double et une charmante position pour un ministre des Affaires étrangères »
Dialogue entre Vandenpeereboom et le Roi
Fort préoccupé de l'imminente crise, Léopold II fit venir Vandenpeereboom et lui parla d'abord du conflit entre les deux principaux ministres. Il estimait que Rogier méritait des égards en sa qualité de « vieux patriote » et au titre des services rendus. Il ne dit pas un mot des engagements pris par Rogier vis-à-vis de Guitaud, et ne manifesta pas non plus son opinion quant à la Conférence.
Léopold II, abordant ensuite la question de la rive gauche, déclara persister dans sa manière de voir. « Ces travaux sont indispensables nous devons , - dit-il, - tenir notre serment de maintenir l'indépendance nationale et l'intégrité du territoire; si, Roi constitutionnel, (page 145) je suis forcé de céder, je protesterai et laisserai la responsabilité à ceux qui sont cause du mal. » Il évoqua, très habilement, le revirement de Chazal, qui devait entraîner celui des ministres civils, se ralliant à l'opinion des gens du métier. »
A l'objection présentée par Vandenpeereboom que ses engagements et ses constantes déclarations l'empêchaient de modifier son attitude, le Roi opposa l'intérêt du pays. Vandenpeereboom riposta que les ministres avaient leur honneur à défendre ; c'était à d'autres à demander des crédits. « Je tiens à vous et ne veux pas que vous me quittiez », repartit Sa Majesté. Vandenpeereboom, Flamand têtu, tint bon et ne voulut rien promettre. Il fit encore remarquer au Souverain les graves difficultés de tous les ministres : la querelle de Frère et de Rogier, l'engagement imprudent de ce dernier vis-à-vis de la France; ses propres embarras quant aux écoles d'adultes, la rive gauche pour Goethals, ; les tarifs de Vanderstichelen ; le rejet, par la section centrale de la Chambre, du principe de l'abolition de la contrainte par corps, projet de Bara.
« Tout cela, répondit le Roi. doit se terminer en conseil ; pas d'esclandre à la Chambre ; je ferai tout ce qui est possible pour ramener la paix dans le ménage... » Ces incidents ne l'émouvaient pas; « sans eux, observait-il, la vie serait trop monotone. »
L'entretien se termina par une plaisanterie assez leste du Souverain, qui se détendait ainsi de ses graves préoccupations.
Interpellation à la Chambre au sujet de la Conférence
Elle eut lieu le 28 novembre. Coomans demanda si la Belgique avait été invitée par le Gouvernement français. Rogier répondit affirmativement, ajoutant que le Cabinet, tout en étant sympathique à la pensée de l'Empereur, n'avait pas encore pris de parti définitif et devait attendre que les grandes puissances manifestassent leurs intentions. Dumortier et de Theux intervinrent pour déclarer que l'adhésion de la Belgique s'imposait, et dans le sens du maintien de l'Etat pontifical. Orts plaida l'abstention, au nom de la neutralité et de la liberté des cultes proclamées par la Constitution : la Belgique n'avait pas plus à se préoccuper du pouvoir temporel du pape que de la reconstitution éventuelle d'un Etat juif en Palestine.
L'opinion de Bara sur le conflit avec Rogier. Echange de mémoires
(page 146). A la suite d'un long entretien avec Frère, Bara, son intime, avait emporté l'impression que le ministre des Finances était « décidé à partir », que sa querelle avec Rogier n'était même qu'un prétexte. « En partant on permettrait au Roi de donner suite à ses projets de fortifications ou tout au moins on lèverait un prétexte. C'est là, croit Bara, le but de Frère... » La conséquence serait la dislocation du Cabinet. « Je n'ose espérer un tel bonheur ! » s'écrie en a parte Vandenpeereboom (29 novembre).
Quelques jours après, il note que la querelle « semble tourner en queue de morue et devoir finir sans faits graves. » Rogier a produit aussi un long mémoire. Le Roi travaille à l'apaisement.
Frère, qui a vu Ic Roi, semble fort calmé, rit de la situation et ses propos paraissent contredire le récit de Bara . « Ah ! dit-il, si je voulais ne voir dans ma querelle avec Rogier qu'un moyen je pourrais quitter et laisser au Roi la liberté pour Anvers. » A Van Praet, il avait dit qu'il n'avait nul désir de s'en aller et qu'il ne partirait que si Rogier persistait à refuser de lui communiquer les dépêches, etc... »
Vandenpeereboom souligne aussi combien Frère était sensible « aux câlineries du Roi qui exerce sur son impérieux ministre une influence bien dominante. »
Rogier affectait aussi un grand calme, « mais, dit-il, il restera toujours des traces de la blessure que Frère m'a faite. »
« Le hic, remarque Vandenpeereboom est de mettre ces deux collègues en contact... »
« Après tout, - conclut-il non sans esprit - des mémoires ont été échangés et l'honneur est satisfait. »
L'évolution de la crise. Que veut Frère ?
Le 4 décembre, Frère eut encore une entrevue avec le Roi. Il n'en parla pas à ses collègues. Son irritation contre Rogier, à la suite du mémoire de ce dernier, a encore augmenté. Il trouve la réponse « blessante. » Rogier, qu' « il traîne comme un boulet depuis quinze ans », ne pouvait lui faire plus grave offense, et cette situation n’était plus supportable.
En se promenant avec Frère autour du Parc, Vanderstichelen, Vandenpeereboom et Bara lui ont demandé ce qu'il voulait en définitive. Tout serait-il fini si les pièces diplomatiques lui étaient renvoyées ? Il semble exiger davantage, sans préciser, tout en regardant comme une offense nouvelle « la résolution annoncée par Rogier d'envoyer désormais les pièces à tous ses collègues. ». En attendant, il refuse de délibérer, malgré les affaires importantes à résoudre : la Conférence, les écoles d'adultes, la rive gauche, le protocole à observer pour les funérailles de l'archevêque de Malines.
Le lendemain matin, Vandenpeereboom reçut la visite de Goethals. Le ministre de la Guerre croyait que le Roi ne reculerait pas « devant l'idée de laisser partir Frère pour faire passer les fortifications de la rive gauche. » Vandenpeereboom répéta que, pour lui, subsistait l'impossibilité de rester au ministère si l'on demandait de nouveaux crédits.
Frère, de plus en plus fâché, préparait une riposte à Rogier qui risquait d'être fort verte et d'envenimer encore le dissentiment.
Vanderstichelen et Bara, réunis chez Vandenpeereboom, examinèrent les possibilités de résoudre la crise. Frère, pour les deux premiers, voulait en finir avec Rogier. Bara proposait de donner à celui-ci la légation de Londres. Vanderstichelen ne repoussait « pas l'idée de mettre son oncle dehors », lui reprochait sa « jalousie sénile », son exaspération quand un journal qualifiait Frère de chef de Cabinet.
Que faire si, Frère maintenant sa démission, le Roi charge Rogier de reconstituer le ministère ? Bara et Vandenpeereboom déclarent qu'ils se retireront ; Vanderstichelen ne se prononce pas. Il semble certain que Rogier ne pourra former un Cabinet viable ; que Frère, par suite, sera l'homme tout désigné. Vandenpeereboom ne croit pas qu'en ce cas le nouveau chef du Cabinet tienne à le conserver, pas plus que lui-même veuille rester.
On le pria, pour conclure, d'aller chez Van Praet pour exposer la situation et les exigences de Frère-Orban. Le conflit n'était pas encore devenu public, mais le secret risquait de ne plus être longtemps gardé. Les circonstances étaient graves et le Cabinet divisé ne pouvait plus accepter la responsabilité de la position. Il appartenait au Roi de ne pas laisser s'empirer le conflit et le gâchis imminent.
(page 148) Van Praet, avisé par Vandenpeereboom, ne lui parut pas trop s'émouvoir. Il promit d'informer tout aussitôt le Roi.
Les suites d'une indiscrétion
Rogier n'avait appris que le 21 novembre, au dîner de la Cour, par une indiscrétion du secrétaire du Roi de Borchgrave, que le Roi renvoyait secrètement à Frère les dépêches diplomatiques. Il en fut extrêmement vexé, et pour cause. « Echauffé par le vin (et cela lui arrive souvent) » - dit assez malignement Vandenpeereboom - il fit séance tenante une scène à Van Praet, déclarant que désormais il n'enverrait plus les dépêches au Palais. C'est de là que naquit la brouille qui tout à coup fit exploser la crise latente.
La crise suit son cours
Rogier, rencontré le 5 par Vandenpeereboom, lui dit ne rien savoir de neuf. C'était peu probable, selon le ministre de l'Intérieur, puisque Jules Devaux s'était rendu chez Rogier, et que, de plus, Rogier avait vu le Roi. « Dans la conversation - poursuit Vandenpeereboom - il lui est échappé d'avouer qu'il avait laissé entendre au Roi qu'un Cabinet nouveau pouvait être très bien formé et dans de bonnes conditions pour Sa Majesté puisque la chute du Cabinet actuel ne pourrait être attribuée à un dissentiment des ministres avec le Roi, mais à un dissentiment entre eux. Rogier m'a paru assez disposé à remettre de nouveau les dépêches à Frère, mais il le serait moins à se laisser évincer, et s'il l'était, il se mettrait dans l'opposition. Frère, dit-il, en ferait autant si je reste. »
Frère ne s'expliquait pas davantage. Il avait fait une réponse à Rogier qui, pour Vandenpeereboom, aigrirait sans doute encore le différend.
Le ministre de l'Intérieur craignait de voir l'affaire s'ébruiter, Henri de Brouckère « qui, comme le disait un jour Ernest Vandenpeereboom, est un chacal poli- tique qui flaire les cadavres ministériels », étant allé demander à Bara s'il était vrai qu'une scission existât dans le Cabinet. »
Vandenpeereboom insiste auprès de Jules Devaux pour que le Roi prenne une décision
(page 149) Le 7 décembre, Vandenpeereboom écrivit à Jules Devaux en son nom, comme pour Vanderstichelen et Bara : .
« … Nous n'avons plus de nouvelles de la crise. Depuis quinze jours, depuis le 23 novembre, le Conseil n'a plus pu se réunir ; tous les jours des questions surgissent et restent sans solution. Ce qui se passe commence à s'ébruiter ; on nous en a parlé hier à la Chambre; la situation actuelle ne peut durer, nous n'en pouvons accepter la responsabilité plus longtemps. J'ai déjà appelé l'attention de M. Van Praet sur cette situation en le priant, au nom de mes deux collègues et au mien, de rendre le Roi attentif à ce qui sc passe ; je vous fais ici la même demande... »
Informations rétrospectives sur le conflit de Frère et de Rogier
Frère remit à Vandenpeereboom une copie de sa réplique à la réponse de Rogier. C'était « un très long factum saupoudré d'adjectifs et qui sera peu de nature à calmer. » Le texte d'une lettre de Frère à Paul Devaux, en octobre 1861, y était joint. Cette épitre, dit Vandenpeereboom, « est curieuse en ce qu'elle constate le dissentiment qui alors déjà existait entre Rogier et Frère (deux coqs) et jette quelque jour sur mon entrée à l'Intérieur. Rogier semble avoir quitté à regret de peur d'être amoindri et c'est, paraît-il, pour ne pas humilier Rogier d'abord que Frère n'est pas venu à sa place, ensuite parce que, en 1861 encore, il y avait dans la gauche une fraction assez indépendante dont j'étais un des membres les plus marqués, que cette fraction aurait pu en certains cas se joindre à la droite contre Frère et sa politique ; en me faisant entrer on espérait rallier cette fraction ct l'on a réussi, car depuis 1861 elle n'a plus donné signe de vie » ; il résulte encore de cette lettre que Frère a fait alors un programme .
1° Loi sur les bourses (elle est faite);
2° Loi sur la milice (présentée) ;
(page 150) 3° Loi (sur le) temporel des cultes (id.) ;
4° Abolition Convention d'Anvers (elle - la Convention - est tombée en désuétude);
5° Loi sur les jurys (jurys professionnels - Tesch n'a pas voulu ce point, de là grands débats - on a ajourné).
Conversation avec Frère
Bara, Vanderstichelen et Vandenpeereboom représentèrent à Frère-Orban l'urgence d'une solution. Ils tenaient à savoir ses projets. « Après de longs pourparlers », il exposa son programme portant sur trois points. Il fallait d'abord se mettre d'accord avec le Roi sur la question de la rive gauche ; puis avec Goethals, sur la même affaire ; enfin sur les écoles d'adultes. En cas de non-entente, il était préférable que la crise se produisît à propos de politique intérieure : ainsi l'on ne compromettait pas le Roi. Frère allait partir pour Liége ; à son retour une nouvelle réunion se tiendrait.
Les deux coqs
Vandenpeereboom trace un amusant portrait de Frère et de Rogier, qu'il représente sous l'aspect de deux coqs dressés l'un contre l'autre « sur le fumier ministériel ». L'un, dit-il, est jeune, chante fort et bien, il est vigoureux et aimé des poules ; l'autre est vieux, il a perdu des plumes, sa queue est dégarnie, il chante à peine et ne peut plus satisfaire ses poules; il jalouse son jeune confrère, habitué qu'il est être le primus. Le jeune coq, au contraire, voit avec dédain et pitié les airs que se donne le vieux ; bien que le vieux fasse peu il fait encore trop ; bref deux coqs sur un fumier c'est trop. D'où et voilà pourquoi il y a crise ministérielle. »
Incertitude quant aux intentions de Frère-Orban
La situation n'était pas très claire. Les impressions de Vandenpeereboom variaient d'un jour à l'autre sur les desseins de Frère. « D'abord on a cru qu'il voulait partir, qu'il prenait le prétexte de la brouille avec Rogier pour ne pas mettre le Roi en cause. Ensuite on a pu croire au langage de Frère qu'il voulait mettre Rogier dehors. (page 151) Aujourd'hui, d'après ce qu'il a dit à Bara, on pourrait s'entendre pour que Rogier reste si on peut se mettre d'accord avec le Roi pour les affaires militaires.
Comment résoudre le problème des écoles d'adultes
Les ministres auraient bien voulu, d'autre part, trouver une solution au différend des écoles d'adultes. On proposait à Vandenpeereboom de dire qu'il avait cru bien faire en publiant l'arrêté du 1er septembre 1866, pour se conformer à la loi de 1842. Mais il avait besoin du concours de tous. Des collaborations importantes lui faisant défaut, il retirait l'arrêté.
Cette solution, il l'avait proposée en juillet, après le vote hostile de plusieurs conseils provinciaux. Frère la repoussa, croyant « alors que l'on pourrait se tirer d'affaire en mettant les torts du côté du clergé et dire : Le clergé pose des conditions impossibles, nous marcherons sans lui, les subsides seront donc accordés à toutes les écoles, car le refus du clergé rend inefficace l'application de la loi de 1842 aux écoles d'adultes, etc... » « Mais, observe Vandenpeereboom, la note verbale de l'archevêque rend ces échappatoires impossibles et d'ailleurs j'ai refusé de me prêter à cette manœuvre déloyale. » Il n'était plus possible, en décembre, de reculer « devant les menaces et les insultes de la petite presse, après tous les actes d'instruction... posés depuis juillet et surtout après l'adhésion de 850 à 900 communes La retraite semblait donc probable à Vandenpeereboom et il s'en réjouissait. Il préférait toutefois ne pas tomber seul sur cette question, mais partir avec ses collègues, car, dans la première hypothèse, son départ « pourrait fractionner la majorité. »
L'optimisme du Roi
Léopold II, que Vandenpeereboom avait vu le 3, « n'avait pas l'air trop préoccupé de la crise ni trop pressé de la voir finir. » Il comptait sur son ministre pour arrondir les angles. Toutefois Vandenpeereboom ne lui cacha point qu'il se considérait comme lié quant à la rive gauche. « Qu'à cela ne tienne, répondit Léopold II, j'adopte la proposition de M. Frère de faire, (page 152) au moyen d'une combinaison civile, les travaux sur l'autre rive de l'Escaut ; je me borne à demander que l'on hâte cette solution.. »
A l'étonnement du Roi, Vandenpeereboom fit des réserves en ce qui concernait cette nouvelle combinaison.
Une brochure militaire attribuée à l'entourage royal
Plusieurs brochures parurent à l'occasion de la réorganisation de l'armée. L'une d'elles, intitulée « Le projet de la Commission mixte et le projet du général Guillaume », par un officier en retraite, fut attribuée, sinon au Roi, du moins à l'entourage royal, car elle contenait, dit Vandenpeereboom, « toutes les idées que le Roi débat avec le département de la Guerre. »
L'auteur qualifiait de remarquable le projet de la Commission mixte, qui, bien que simplement consultative, avait été choisie par le Gouvernement parmi les sommités de l'armée et du Parlement. Le Cabinet aurait donc dû se rallier à ses conclusions, « ou bien ne les modifier qu'en s'appuyant sur les meilleures raisons. »
Le Gouvernement était blâmé d'avoir substitué à ce p10jet un travail du général Guillaume, « repoussé dans presque toutes ses parties par la Commission mixte, et très amèrement critiqué dans l'armée. »
On s'attendait à des propositions sérieuses, notamment à la création d'une réserve nationale, et le contre-projet ne comportait que « la création d'un grand nombre de grades et d'emplois dont l'utilité est fort contestée. »
Ce blâme, selon Vandenpeereboom, visait le général Guillaume et Frère aussi, parce qu'ils résistaient « aux idées du Roi et de son conseil militaire secret.3
Guillaume donna sa démission de chef du personnel, et Goethals, en annonçant cette résolution au Roi, s'exprima en termes très vifs. Aussi Léopold II se montra-t-il fâché du rôle dont on l'accusait. S'en expliquant avec Vandenpeereboom, il lui dit que le soupçon « de faire faire ou laisser faire des brochures » contre ses subalternes était injurieux pour lui. De son côté, Goethals menaçait aussi de se retirer. Et le gâchis se développait.
Tiraillements à l'occasion de la mort de l'archevêque de Malines
Mgr Sterckx, le cardinal-archevèque de Malines, était mort le 4 décembre ; il avait été remplacé par Mgr Dechamps, évêque de Namur, le frère d'Adolphe, l'ex-leader catholique. Des tiraillements entre ministres se produisirent relativement aux funérailles. Goethals, « convié par la Cour » voulait y assister, mais Vandenpeereboom l'en dissuada : c'était au ministre de la Justice et des Cultes à y participer. Or, Bara, qui poussait un peu loin son anticléricalisme, se refusait à cette démarche. Vandenpeereboom, s'étendant sur ces mesquineries, nous parle aussi des divergences de vues quant à la réponse à faire à la lettre des vicaires généraux annonçant le décès.
Une réunion officieuse chez Frère-Orban
A l'exception de Rogier et de Goethals, non convoqués, les ministres se réunirent officieusement, le 11, chez Frère-Orban pour tâcher de se mettre d'accord sur diverses questions, faute de quoi la crise ne pourrait plus être évitée. La séance dura trois heures.
Le premier point abordé fut l'affaire des fortifications. On sembla d'accord pour admettre par forme de transaction que tout le produit de vente de terrains à Anvers, à Gand et ailleurs serait consacré à faire des fortifications nouvelles ; « sans m'opposer formellement - dit Vandenpeereboom, - je constate que cette position est mauvaise. »
Restait d’ailleurs à s'entendre avec Goethals.
Pour les écoles d'adultes, Frère et Bara reprirent la proposition déjà exprimée en juillet (Cf. p. 151, 157 et 159). Vandenpeereboom déclarerait à la Chambre que le non-concours des provinces et surtout du clergé ne lui permettait pas de maintenir son arrêté, que, par suite, toutes les écoles seraient subsidiées, celles-là même qui ne s'étaient pas soumises au susdit arrêté. Vandenpeereboom ne se rallia pas à la proposition, exposa ses raisons (Cf. p. 151), que ses collègues reconnurent justes. Il offrit sa démission en vue d'éviter les difficultés éventuelles ; on l'obligea de rester. Il se résigna, ne voulant pas avoir l'air (page 154) de céder devant les radicaux et de sacrifier son honorabilité à son portefeuille.
Aucune décision ferme ne fut d'ailleurs prise et une réunion nouvelle fut envisagée.
Entretien avec Tesch et Goethals
Vandenpeereboom était resté lié avec son ancien collègue Tesch et l'avait tenu au courant. Le député d' Arlon fut d'avis que la proposition de retirer l'arrêté ne pouvait être acceptée, « que se mettre en lutte avec le clergé sur le terrain de l'enseignement primaire serai une faute grave, que mon arrêté devait, comme il l'est, se baser sur une loi et que cette loi ne pourrait être que celle de 1842. »
Tesch promit de soutenir son ami sur ce point.
Quant aux fortifications nouvelles, il était d'opinion que les déclarations de Chazal ne devaient pas retenir ses anciens collègues qui, incompétents en matière militaire, étaient tenus, avant tout, d'assurer la défense du pays.
A ce moment, Goethals entra. Il se plaignit « de l'ingérence du Roi dans ces affaires de détails. » Il montra une lettre du Roi protestant, comme il avait fait devant Vandenpeereboom, contre la supposition déloyale que Sa Majesté aurait inspiré la brochure militaire. Tesch dit au ministre de la Guerre qu'il n'admettait pas « les ingérences royales » et se retirerait en pareil cas, s'il était ministre.
Vandenpeereboom concluait de cette entrevue que « le ciel ministériel » était « bien noir. »
Conversation avec Stas et Brialmont
Elle eut lieu par hasard, le 11, au soir, sur le trottoir du Pare. Elle fut des plus curieuse et, selon Vandenpeereboom, livra le secret d'une comédie jouée derrière le dos de Goethals. Il en résultait - c'était l'impression nette du ministre de l'Intérieur - que le Palais intriguait « de toutes façons contre le département de la Guerre et un peu contre les autres ministres dans l'affaire des fortifications ». (Note de bas de page : Pour bien se la rappeler, Vandenpeereboom minuta cette conversation le soir même au crayon.)
Vandenpeereboom avertit Goethals
(page 155) Dès le lendemain, Vandenpeereboom vit Goethals et, sans lui dire tout ce qu'il avait appris, il lui fit observer « que la section centrale élaborait un projet tout autre que celui du gouvernement, que des civils ne pouvaient, sans aide, régler tous les détails militaires, que je savais que des membres de la Section centrale étaient en rapport avec un ou deux officiers, que probablement ces officiers étaient en rapport avec le Roi… » Vandenpeereboom mit donc en garde Goethals contre « la comédie dont il était dupe ». Il lui donna le conseil d'écrire au Roi que le projet du gouvernement étant radicalement modifié par la Section centrale, il désirait savoir si le Roi l'aiderait à combattre les propositions de celle-ci, car l'influence de la Cour et du Gouvernement lui serait indispensable « pour faire tomber les propositions contraires au projet élaboré d'accord avec le Roi, admis par le Cabinet et sanctionné dans le projet de loi. »
Goethals promit de suivre cet avis.
Essais infructueux de trouver une solution à l'affaire des écoles d'adultes
Le 12 et le 13 décembre, les ministres se réunirent chez Frère pour tâcher encore de se mettre d'accord sur l'affaire des écoles d'adultes.
Ils n'y parvinrent pas. Vandenpeereboom ne put se décider à se rallier au système de Frère et de Bara : laisser tomber l'arrêté du 1er septembre 1866, en rejetant sur le clergé la responsabilité du retrait. Il persistait à considérer en effet un tel prétexte comme « une lâcheté et une mauvaise action », étant convaincu que feu l'archevêque Sterckx aurait adhéré. Il proposa de maintenir l'arrêté malgré les oppositions et la non-déclaration formelle d'adhésion des évêques; de subsidier par suite les communes acceptant l'arrêté, celles même repoussant le clergé, celui-ci refusant son concours. En cas d'adhésion de l'autorité religieuse, il y aurait lieu, pour être logique, de retirer les subsides aux communes qui n'admettraient pas sa collaboration. Vandenpeereboom, par transaction, consentait cependant à examiner chaque situation.
Ses collègues n'admirent pas son système pour deux raisons : d'abord parce qu'il faisait tomber les écoles d'adultes sous le régime de la loi de 184'2; ensuite parce (page 156) qu'ils estimaient que le clergé, n'ayant pas adhéré, s'était lui-même exclu et ne pouvait plus revenir.
On eut à ce moment l'impression que le dissentiment entre Frère et Rogier serait « facile à terminer ». Il suffisait que Rogier transmît les dépêches et que Frère déclarât n'avoir pas voulu froisser Rogier. Vandenpeereboom, pourtant, croyait que Frère ne tenait pas trop à cette réconciliation : il voulait éventuellement motiver sa retraite par le désaccord, afin d' « éviter au Roi et au parti libéral tout amoindrissement qui serait la conséquence d'une brouille sur la question des écoles d'adultes ou de la rive gauche. »
Inutile intervention de Tesch
Tesch, chargé par Vandenpeereboom d'intervenir auprès de Frère pour arriver à une transaction en matière d'écoles d'adultes, n'y réussit pas, tout en convenant que la dislocation du Cabinet ou la retraite de Vandenpeereboom seraient bien fâcheuses. Le ministre de l'Intérieur, lui, ne voyait d'autre moyen de sortir de ces embarras que de donner sa démission. Mais ses collègues ne voulaient pas de cet expédient.
Le comte de Flandre critique le Roi
Le comte de Flandre, que Vandenpeereboom représente comme « un garçon de tact et de bon jugement », qu'inquiétait sans doute la fiévreuse activité du Roi, s'était ouvert à Goethals de ses appréhensions, qui concordaient avec les reproches habituels du ministre de l’Intérieur à l’adresse du Souverain. « Le Roi - disait-il - va se perdre en se mêlant d'une foule de détails qui ne sont pas de la compétence d'un chef d'Etat. Il a des ministres qui sont bons, en qui il peut avoir toute confiance, il doit les laisser faire et s'il n'a pas confiance en eux, les remplacer. Au commencement d'un règne il pouvait tout faire, la nouveauté rend tout le monde indulgent, mais un roi de deux ans est déjà un vieux roi ; si mon frère consulte et écoute tout le monde, s'il se mêle de détails administratifs avec les meilleures intentions du monde, il va se perdre. »
Cette incompréhension, qui nous paraît bien étrange, s'explique peut-être par la mentalité de ces temps lointains.
Van Praet visite Vandenpeereboom
(page 157) L'espoir, un moment conçu, de replâtrer le Cabinet, s'était vite évanoui. Rogier avait réuni, le 14, Bara, Vanderstichelen et Vandenpeereboom, pour leur lire « un long factum en réponse à la réplique de Frère. »
Le 16, Van Praet vint deux fois chez le ministre de l'Intérieur. Sa mine soucieuse, son » langage très sérieux mais peu abondant » présageaient « de graves événements » et dénotaient de sérieuses préoccupations » - « Tâchez de vous entendre, » me dit Van Praet. « Je le veux bien, dis-je de mon côté, mais comment ? Dois-je sacrifier mes convictions ? Porter le premier coup de hache à la loi de 1842 ? Prendre la responsabilité, contre ma conviction, d'une lutte avec le clergé sur le terrain de l'enseignement primaire? » « Non, dit Van Praet » (et il semble être dans un grand embarras). - « Qu'on me laisse partir », dis-je. - « Non, reprend Van Praet, vous ferez tomber le Cabinet en ruines. »
Van Praet, après sa seconde visite, se rendit chez Frère pour l'engager à se rallier à l'opinion de Vandenpeereboom. Ce dernier sortit avec lui. Ils rencontrèrent Bara. Vandenpeereboom insinua « que lui et Frère pourraient bien et devraient bien venir vers son opinion. » « Impossible ! » telle fut la réponse nette de Bara. « Vous tenez toute la situation en main - ajoute-t-il - vous ferez tort au parti. » Et Vandenpeereboom de riposter : « C'est vous... qui m'avez empêché de retirer l'arrêté ou de me retirer, c'est, sur vous que tombe toute la responsabilité. »
Peu après, on rencontra Frère, et Vandenpeereboom, resté seul avec lui, l'entretint pendant plus d'une heure et demie. « Jamais - écrit-il - je n'ai vu Frère plus doux, plus affectueux. » Frère déploya toute son habileté pour amener son collègue à se rallier à sa thèse. Vandenpeereboom ne démordit pas de son principe : « Les écoles d'adultes tombent sous l'application de la loi de 1842 et par conséquent, en vertu de la loi, le clergé a des droits légaux sur les écoles d'adultes comme sur les écoles primaires proprement dites. » Frère ne s'irrita pas de la résistance du ministre de l'Intérieur. « Vous avez agi - lui dit-il affectueusement - de la meilleure foi du monde, mon cher. Jamais je ne pourrai me décider à vous combattre, mon cher. Toujours vous avez fait preuve de loyauté… » Il semblait très triste, et dit comme conclusion : « Cela ne peut plus durer ; demain je vais écrire au Roi, le prier d'aviser et insister. »
Vandenpeereboom avait encore fait observer « que la retraite du Cabinet ne serait pas un mal, qu'il assumait pour les libéraux une rude charge dans la loi sur la réorganisation militaire, que c'était toujours comme ça, que les libéraux avaient toutes les mauvaises commissions, et que les travaux d'Anvers, rive gauche, nous créeront une position personnelle insoutenable. « C'est vrai! » m'a-t-il dit. très tristement et fort découragé. Il ne s'est un peu animé que lorsque je lui ai dit que d'après Tesch il fallait faire la rive gauche s'il était prouvé que cela est nécessaire pour la défense du pays, que les opinions de Chazal ne pouvaient nous lier puisque nous nous sommes rapportés alors comme aujourd'hui à l'avis des hommes spéciaux seuls compétents. »
Le Roi charge Rogier de reformer le Cabinet. Conversation au Palais avec le Roi et Tesch
Le 17, comme Vandenpeereboom, s'apprêtait à se rendre au Palais pour y dîner, il vit arriver Rogier. Le Roi avait offert à ce dernier de former un Cabinet, y mettant deux conditions : » 1° de s'associer des hommes modérés; 2° des hommes favorables au complétement des fortifications d'Anvers. ». Rogier demanda le temps de réfléchir.
Une conversation s'engagea entre le Roi, Tesch et Vandenpeereboom. Tesch exprima l'avis « que la retraite de tout ou partie du Cabinet serait une calamité pour le pays et le parti. » Léopold Il, après avoir comblé d'éloges Vandenpeereboom, le pria d'aviser encore avant de donner sa démission.
Dans un entretien entre Frère, Bara et Vandenpeereboom se décide la retraite du ministère.
Le lendemain, après la séance de la Chambre, Frère donna lecture, à Vandenpeereboom et à Bara - Vanderstichelen - était malade - de sa réplique à la seconde riposte de Rogier. Un reproche de celui-ci l'avait frappé au vif : Rogier ayant rappelé la démission de Frère en 1852 et l'ayant attribuée à la conviction de son collègue que le parti libéral était sur le point de succomber. (page 159) C'était faire entendre, en d'autres termes, selon Vandenpeereboom, « qu'en 1852 Frère avait imité les rats qui délogent quand les vieux navires craquent. » Après cette injure, déclarait Frère, il était impossible de siéger désormais avec Rogier.
Il paraissait disposé à former un Cabinet avec Bara. Il tâcha encore de retenir Vandenpeereboom, de l'amener à céder sur la question scolaire, mais ce fut en vain : le ministre de l'Intérieur n'abandonna pas son système. Frère lui dit enfin d'une voix émue : « Quoi qu'il arrive, vous n'aurez rien à vous reprocher en cette malheureuse affaire. Vous avez tout fait pour bien faire, vous avez agi loyalement et je ne souffrirai jamais que l'on dise de vous un mot de mal devant moi, je vous défendrai verbalement et par écrit. »
Les suites étaient faciles à prévoir. D'après Vandenpeereboom, Rogier n'avait été chargé de la formation d'un Cabinet que pour la forme : on savait d'avance qu'il n'y réussirait pas. Le second et dernier acte serait joué par Frère. Et l'on allait voir ce résultat bizarre, observait Vandenpeereboom : « Frère qui a toujours combattu les avancés, assurera, par la retraite de Rogier et la mienne, la victoire de la loge, de la Ligue de l'Enseignement, c'est-à-dire des radicaux. »
Les dernières explications de Rogier
Rogier, à son tour, vint trouver Vandenpeereboom, l'entretint longuement de son désaccord avec Frère-Orban. Il avait accepté de reformer un Cabinet sur les instances du Roi, mais se rendait compte de l'impossibilité de sc passer de Frère et de Bara. Vandenpeereboom lui fit comprendre qu'après l'échange des lettres une réconciliation n'était plus à escompter.