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La tragédie mexicaine. Les impératrices Charlotte et Eugénie
BUFFIN Camille - 1925

BUFFIN Camille, La tragédie mexicaine. Les impératrices Charlotte et Eugénie

(Paru en 1925 à Bruxelles, chez A. De Wit)

Chapitre VII. Le conflit avec Rome

(page 131) En 1856, le président Comonford avait ordonné la « desarmotization », c'est-à-dire la mise en vente. au profit des propriétaires, des immeubles appartenant aux associations civiles ou religieuses. Cette opération avait l'avantage, sans nuire aux droits acquis, de détruire la mainmorte, qui comprenait un tiers du territoire et qui s'agrandissait sans cesse.

A la chute de Comoniord, lorsque Zuloaga et Juarez se disputent le pouvoir, le premier annule les aliénations et rend les immeubles à leurs propriétaires, tandis que l'autre établi à Vera Cruz, déclare tous les biens du clergé propriété nationale et les met aux enchères au profit du Trésor. C'est transformer en spoliation une mesure d'intérêt public et, alors, on vend à des prix ridiculement bas, non seulement les immeubles ecclésiastiques. mais encore les objets du culte : chandeliers, vases d'or, ostensoirs ornés de pierreries etc.

Dès sa rentrée à Mexico, Juarez confirme sa confiscation du patrimoine de l'Eglise que défend Miramon. De ces décrets contradictoires, émanés de pouvoirs rivaux, résultent de nombreuses complications. S'il y a des ventes régulières et des droits légitimement acquis, il (page 132) existe aussi des contrats frauduleux, qu'il est urgent d 'annuler. (Niox, ouvr. cité, p. 398.)

Dans sa proclamation du 12 juin 1863, le général Forey avait garanti à leurs détenteurs les propriétés régulièrement achetées. Cette décision. confirmée par le général Bazaine, devait être respectée par Maximilien, en vertu du traité passé avec Napoléon le 10 juin 1864. Or, le parti clérical, qui considère l'empire comme son œuvre, exige la réparation des dommages subis par le clergé. De quelle façon peut-on lui donner satisfaction ? Par l'attribution d'une indemnité en argent ? Ce n'est pas possible, le trésor étant vide. Par la saisie des immeubles vendus et leur restitution aux propriétaires primitifs ? En admettant que la France permît cette dérogation à ses promesses, ce moyen aurait causé un bouleversement général. Les biens du clergé, d'une valeur de plus de 4 milliards de francs belges actuels, avaient été morcelés et répartis en un nombre considérable de personnes. Certains même avaient déjà changé plusieurs fois de mains.

Comme le Pape l'avait à plusieurs reprises engagé à accepter la couronne et que son avènement avait ramené les évêques expulsés, rétabli les ordres religieux, réouvert les églises au culte, redonné du prestige à la religion catholique en lui accordant les honneurs militaires, Maximilien comptait sur la reconnaissance du Saint Père, A Rome. Il n'a pas mis en doute que Pie IX, en lui annonçant l'envoi d'un nonce muni de pouvoirs suffisants pour aplanir les difficultés. lui avait implicitement promis la conclusion dune transaction équitable.

Une solution, proposée par l'impératrice Eugénie. semble rationnelle. C'est l'établissement d'un concordat, analogue à l'accord intervenu en entre Pie VII et Napoléon pour liquider une situation identique. L'Eglise (page 133) ratifiera la vente des biens nationaux et, en compensation, l'Etat pourvoira aux frais du culte, et à l'entretien des ministres.

Aidée par l'aumônier en chef du corps expéditionnaire, l'impératrice du Mexique prépare cet important document et le communique à Paris.

« J'envoie à Votre Majesté ou plutôt à vos Majestés, de la part de l'Empereur, le projet de Concordat, écrit Charlotte à Eugénie le 8 décembre 1864, afin qu'El les en soient instruites d'avance. Je le trouve parfaitement rédigé, car il semble à première vue inoffensif et il n'en est pas moins libéral. Il n'y a qu'un point que j'aime moins. c'est la reconnaissance d'une religion d'Etat, point si controversé depuis cinquante ans. Cependant, à l'égard de ce pays-ci, la position du gouvernement diffère de ce qu'était en France celle du gouvernement du premier Consul. Ce dernier s'était proposé de relever le catholicisme, et il savait bien que la France était assez catholique par son essence et ses traditions pour se passer d’ne religion d'Etat, question de forme, plutôt que de fond. Ici. au contraire, je regrette de constater que fort différent de ce que représentent l'excellent M. Gutierrez et consorts, ce pays est très médiocrement catholique. Le pseudo-catholicisme formé par la conquête du mélange avec la religion indienne, est mort avec les biens du clergé, sa principale base. Or, comme il faut une religion à un peuple, beaucoup de personnes penchaient vers le protestantisme comme plus commode et surtout comme moins dispendieux, car les sacrements coûtaient énormément, peut-être aussi en prévision d'un avenir qui semblait prochain, l'absorption par la race anglo-américaine.

« Dans cet état de choses, la reconnaissance de la religion catholique comme religion d'Etat serait en effet faire succéder le catholicisme du 19ème siècle avec ses lumières, sa charité et ses dévouements aux restes décomposés de celui du 16ème, et introduire un culte nouveau, épuré, indispensable au point de vue politique à la conservation de la race espagnole en Amérique et seul capable d'arrêter l'envahissement des sectes américaines. Ces pensées m'ont réconciliée. je l'avoue, avec le mot « religion d'Etat » auquel la tolérance des cultes mise en première ligne donne (page 134) son véritable sens, en assurant la liberté de conscience telle qu'elle existe en France.

« J'adresse à V. M. un exemplaire de l’ « Orquesta », journal satirique libéral, afin qu'elle voie que le Concordat rédigé la veille, remplit et dépasse le programme du parti libéral. Le dessin est caractéristique, les libéraux sous forme d'abeilles entrent dans la ruche de l'Empereur, parce qu'ils y trouvent plus de miel que dans les fleurs sauvages de Juarez, qui s'efforce en vain de les prendre dans son filet. J'attire l'attention de V. M. sur le décret, qui institue le Conseil d'Etat et qui en nomme les membres. Il va se réunir aujourd'hui et sera ouvert par l'Empereur. J'espère que cette grande institution, par laquelle Napoléon Ier a régénéré la France, portera aussi ses fruits pour le Mexique. A la suite des deux décrets, se trouve une circulaire aux préfets, remarquable par la signature qu'elle porte, celle de M. Cortès y Esparza, président de la Cour Suprême sous Juarez, aujourd'hui ardent admirateur de l'Empereur et le plus avancé des libéraux du cabinet. »

Avant de prendre une décision, Maximilien attend l'arrivée du Nonce, quoique l'incertitude concernant la propriété du tiers des biens fonciers du pays, entrave l'activité commerciale et politique. Bientôt les journaux de Juarez tournent la patience de l'Empereur en ridicule. C'est caché sous la crinoline de la gentille Charlotte, insinue-t-on, qu'il veut sauver l'empire, tandis que d'autres le lui conquièrent. (Periodico official del gobierno constitucional de la republica mexicana, n°41, Monterey, 14 août 1864).

Poursuivant une politique d'attente aux demandes les plus pressantes, le Saint-Siège envoie des réponses évasives.

Las de ces atermoiements, Ramirès, ministre des Affaires Etrangères, prescrit à M. Aguilar, plénipotentiaire du Mexique à Rome de faire connaître au cardinal secrétaire d'Etat que si, l'envoyé de S.S. (page 135) n'arrive pas en temps opportun, S.M. agira par elle-même et dictera les mesures que réclame la situation. (Archives de Vienne : Note du ministre des Affaires Etrangères Ramirès.) Devant cette menace, le Saint Père désigne comme nonce Mgr. Meglia, archevêque de Damas, ancien secrétaire de la Nonciature à Paris. Ce choix est malheureux :

« Son caractère peu conciliant, écrit l'Impératrice Eugénie, ne lui a pas fait beaucoup d'amis dans le clergé français et je crois que son long séjour à Paris n'a guère modifié ses idées dans un sens plus libéral...

« Mgr. Labastida me semble loin d'accepter ma transaction concordataire. Il est vraiment fâcheux que les biens de la terre prennent une si large part dans les sentiments de ceux qui en devraient être le plus détachés. Je vous avoue que je crains beaucoup pour Mgr. Meglia, l'atmosphère qui va l'entourer et qui lui donnera peut-être une fausse idée des choses. Gutierrez va partir pour Rome. Ses illusions vont sans doute aussi se communiquer au Sacré Collège et, d'illusions en illusions, le pratique et le vrai disparaîtront.

« Je crois devoir dire tout ceci à V. M. pour qu'elle soit avertie. Il est inutile d'ajouter que nous ferons notre possible pour faire voir la vérité, mais le voudra-t-on à Rome ? » (Archives de Vienne : Lettres de l'Impératrice Eugénie l'Impératrice Charlotte, sans date.)

Par malheur, à ce moment, le pape est fort mal disposé à l'égard de Napoléon et le Ccardinal Antonelli avoue à M. Aguilar que la pire des recommandations auprès du gouvernement pontifical est celle de l'empereur des Français.

Le nonce, débarqué à Vera Cruz le 29 novembre. est accompagné par un conseiller de l'empereur et une escorte de cavalerie jusqu'à la capitale, oh il entre le 7 décembre, sans manifestation d'aucune sorte.

(page 136) A la cour de Mexico, on est plein de confiance. Eugénie, mieux renseignée sur les désiderata du pape, ne partage pas les illusions des souverains mexicains et elle communique de nouveau ses inquiétudes à Charlotte :

« Le projet de concordat est parfait, mais sera-t-il accepté à Rome ? L'autre jour j ai vu le Nonce. Naturellement, nous avons causé du Mexique, et de la mission de Mgr. Meglia. Je lui ai dis que le langage du Nonce avait paru peu conciliant à ceux à qui il avait parlé sur la route de Vera Cruz à Mexico. Mgr Chigi, après m'avoir dit qu'il ne savait rien d'officiel, m'a assuré « que Mgr. Méglia voulait paraître bien noir pour blanchir petit à petit. » C'est textuel et « qu'avec le temps, de la patience, on viendrait à bout de tout.

« J'ai répondu un peu vivement, je l'avoue, qu'il y avait des questions pour lesquelles le temps était fatal, que l'indécision n'était ni ne pouvait être de la conciliation, et qu'au bout de cette affaire des biens du clergé, qui d'ailleurs était attendue avec impatience, il y avait une grave question de crédit qu'on devait trancher à tout prix, que d'ailleurs, il fallait choisir aujourd'hui entre l'empire catholique, ou une annexion aux Etats-Unis, par conséquent protestantiser le Mexique, car, Vos Majestés étant les seules armes de salut pour le pays, il était du devoir de tous de leur faciliter leur tâche et ne pas la rendre impossible par des exigences qui ne seraient comprises de personne, car on sacrifierait, aux biens temporels d'un clergé malheureusement dissolu, le côté moral de la régénération d'un pays entier. Cet argument a paru lui faire de l'effet, tout en protestant contre le principe.

« J'ai voulu rendre compte à V. M. de ma conversation pour si elle peut lui être utile ; j'étais d'autant plus à mon aise pour parler ainsi, que je ne me basais que sur des lettres particulières de quelques-uns de nos officiers, qui avaient parlé avec le nonce avant son arrivée.

« Je trouve aussi que V. M. ont bien fait de reconnaître la religion catholique « religion d'Etat » car c'est celle du grand nombre, et par conséquent elle mérite d'être protégée. J'avoue que pour ma part, je suis trop catholique sans être pour cela intolérante, pour ne pas m'en réjouir. (Archives de Vienne).

(page 137) Voulant donner au nonce une preuve d'amabilité, Maximilien l'invite à officier à la fête nationale de Notre Dame de la Guadelupe, patronne du Mexique, qui se célèbre quelques jours plus tard. Après la cérémonie. on sert une collation, où Mgr. Meglia a la place d'honneur. L'empereur ne porte qu'un seul toast : « A la santé, à la conservation et à la prospérité du Saint-Père, père commun de tous les fidèles. »

Par ces marques de respect, on veut montrer au prélat que l'Eglise a recouvré au Mexique sa position d'antan et ainsi le rendre plus conciliant.

Peu après, afin d'abréger les formalités, Maximilien convoque au palais Mgr. Meglia. Il lui expose les exigences de la situation, résumées en 9 points différents. LenNonce fait quelques observations sur deux d'entre eux, ajoutant toutefois que pour les autres, il sera facile d'arriver un arrangement, bien qu'ils soient du ressort d'un concordat et comme tels doivent être traités à Rome. (Archives de Vienne : Conversations et Notes de S. A. I. Maximilien avec la cour de Rome.)

La conférence terminée. l'empereur met le ministre de la Justice M. Pedro Escudero, au courant de ses heureux résultats.

Le lendemain, à la demande de l'archevêque de Damas, le ministre Pedro Escudero vient le voir. A son grand étonnement, Mgr. Meglia lui assure qu'il ne peut négocier sur aucun des points indiqués ; ses instructions se bornent admettre en principe l'abolition des lois dites de réforme, entrainant l'invalidité des ventes des biens ecclésiastiques, et leur restitution à l'Eglise, avec indemnité en cas de perte. Ces prétentions détruisent toutes les espérances d'entente.

« Nous sommes au milieu des plus grandes tribulations avec le nonce, mande Charlotte à Eugénie, et (page 138) à ce propos, je dois dire que mon sens politique a été tout fait en défaut, tandis que V. M. avait raison.

« Je n'avais jamais cru possible que, vu les intérêts de la religion si clairement liés au Concordat, que nous voulons conclure, le Nonce fit la moindre difficulté. Cependant, il est comme fou, et j'ai bien fait rire le Marechal dimanche, en lui disant qu'il n'y avait qu'à jeter Mgr. Méglia par la fenêtre.

« En effet, c'est comme un cerveau bouché, un aveuglement, une obstination, dont rien n'approche à tendre et à soutenir que le pays, qui est tout imbibé de haine contre la théocratie, désire que l'on rende les biens au clergé. C'est comme si, en plein soleil, on venait vous dire qu'il fait nuit.

« L'Empereur, gardant une attitude franche avec le Nonce, lui avait communiqué le Concordat, et d'après ses réponses, croyait que pour trois ou quatre points il n'y aurait pas de difficulté, que pour les autres, on en référerait Rome. Point du tout, et ici je ne veux pas qualifier l'attitude du Nonce, deux jours après, on envoie chez lui une personne de confiance à laquelle il déclare qu'il n'a aucune instruction, ergo, qu'il ne fera rien. Coup de foudre pour tout le ministère, pout l'Empereur. pour moi. On réunit un conseil des ministres, et l'Empereur communique au Maréchal, qui en est ravi, que l'on publiera une lettre ratifiant les lois de Juarez. si le Nonce ne se rend pas.

« Le lendemain, veille de je fais venir le Nonce, d'après le désir de l'Empereur, qui ne veut plus le voir, à la suite de son changement d’opinion, et je lui parle pendant deux heures. Je puis dire à V. M. que rien ne m'a donné une plus juste idée de l’enfer que cette conversation, car l’enfer n'est pas autre chose impasse sans issue. Vouloir convaincre quelqu’un et savoir que c'est en pure perte, que c'est que comme si on lui parlait grec, parce qu'il voit noir et vous blanc, c'est une œuvre digne d'un réprouvé.

« Tout glissait sur le Nonce comme sur un marbre poli.

« Enfin, il finit par me dire que c'était le clergé qui avait fait l'Empire : « Un moment, lui dis-je, ce n'est pas le clergé, c'est l'Empereur. le jour où il est venu. »

« Je lui fis toutes les représentations, qu'il est possible de faire et sur tous les tons, sérieux, enjoué, (page 139) grave et presque prophétique, car la conjoncture me semblait devoir entraîner des complications, peut-être même une rupture avec le Saint Siège, au grand détriment de la religion. Rien ne prit, il secoua mes arguments comme on secoue de la poussière, ne mit rien la place, mais parut se complaire dans le néant qu'il laissait autour de lui et dans la négation universelle de la lumière. Je lui posai alors l'ultimatum de la lettre de l'Empereur et je lui dis en me levant : Monseigneur, quoi qu'il arrive, je prendrai la liberté de vous rappeler cette conversation, nous ne sommes pas responsables des suites, nous avons tout fait pour éviter ce qui va se passer, mais si l'Eglise ne veut pas nous aider, nous la servirons malgré elle.

« Le jour suivant l'Empereur tint une conférence avec les ministres d'Etat, des Affaires Etrangères et de la Justice, laquelle il appela l'Archevêque et Mr. Lares (Note de bas de page : ancien ministre de Justice sous la présidence de Miramon, était le chef du parti catholique) et où il me pria d'assister, par un compte rendu improvisé, admirablement clair, sûr et vigoureux, il nous mit au fait de la question depuis son origine et raconta ce qu'il avait dit au Pape. ce qu'il avait fait écrire par son ministre, les huit mois qu'il avait attendu par déférence pour le Saint Siège, et enfin opina pour la nécessité d'une solution.

« Comme dernier répit, l'ultimatum posé au Nonce fut reculé jusqu'au 1er janvier. M. Lares et l'Archevêque, tremblant de voir revivre les lois de Juarez, promirent de tout faire pour fléchir le Nonce, bien que les réponses donnés par lui à M. Lares fussent identiques aux miennes. Le ministre de la Justice se dévoua à y retourner une dernière fois. Les chefs du parti conservateur sont pour le Concordat, comme unique planche de salut, qui leur épargne les lois de réforme. Je n’ai pas de nouvelle de la dernière tentative faite près du Nonce, mais il est clair qu'elle n'aboutira pas, je suppose qu'il s'en ira. L'Empereur rappela avec force à Lares et l'archevêque que, par le Concordat, il faisait des concessions à la religion contre la volonté même de la nation. parce qu'il comprenait que le pays devait être catholique et qu'il le rendait tel, mais que Rome lui ayant manqué de parole, en lui envoyant un Nonce sans instructions, la (page 140)) dignité et les intérêts du peuple mexicain exigeaient que le gouvernement déclarât irrévocablement sa volonté, pour rendre la paix au pays, dont toutes les dissensions n'avaient d'autre source que la question des biens du clergé.

« L'Empereur fut extrêmement éloquent, et je trouvai que les personnes présentes s'exprimaient moins bien, quoique avocats, car elles préféraient les faux fuyants à une solution radicale, Mr. Lares notamment. Son attitude, relativement parlant, a cependant satisfait et surpris l'Empereur : elle prouve que l'idée de ces MM. s'achemine jusqu'à un certain point vers le progrès, car il y a six mois. ils auraient cru être damnés pour ce qu'ils acceptent aujourd'hui d'assez bonne grâce. » (Archives de Vienne.)

Maximilien juge avoir employé tous les moyens de conciliation et, le 27 décembre 1864, il charge le ministre de la Justice, par une lettre publiée au Moniteur, de lui proposer des mesures, afin que la justice soit rendue sans égard à la qualité des personnes, que les intérêts légitimes créés par les lois dites de réforme soient garantis, qu'il soit pourvu à l'entretien du culte et à la protection des objets sacrés. placés sous la sauvegarde de la religion, et enfin, que les sacrements s'administrent et que les autres fonctions du ministère ecclésiastique s'exercent dans tout l'Empire, gratuitement et sans charges pour les populations. (Archives de Vienne : lettre de l'Empereur à Escudero.)

Le nonce proteste en termes violents ; Ramirez lui répond de la même façon. Cette dispute soulève tout le pays, ainsi que Charlotte le mentionne Eugénie :

« La situation est assez tendue. elle l'est, grâce au Nonce et au clergé, autant qu'elle pourra, je crois, l'être dans ce pays-ci.

« Il n'y a rien d'inquiétant pour l'avenir, même peut-être vaut-il mieux que l'orage éclate une bonne fois, (page 141) mais c'est un quart d'heure désagréable à passer. Voilà huit jours de cet état de choses et, pour mon goût, j'aimerais mieux qu'il fût fini. Les évêques écrivent des pétitions respectueuses, dans la forme, le Nonce des notes inconvenantes, les dames des remontrances filiales, bref toutes les passions sont déchaînées, les journaux extrêmes se prennent aux cheveux, les libéraux avancés crient que c'est l'idée de Juarez qui a vaincu, et triomphent méchamment de la déconfiture de leurs adversaires, les conservateurs s'imaginent être sujets temporels du Pape et sont assez bêtes, je demande pardon du mot, pour croire que la religion consiste dans la dime et dans la faculté de posséder.

« Derrière toutes les démarches du Nonce, qui n'est qu'un mannequin, paré d'une manière transparente, se montre la figure de Mgr. Labastida, dont le mauvais italien m'est assez connu pour le reconnaitre à chaque ligne. Enfin, on dit que l'ère des pronunciamentos n'est pas finie et qu'elle est peut-être même commencée.

« Au milieu de tout cela, l'Empereur est calme et ferme et suit tout droit le chemin du devoir, mais on dirait à voir l'acharnement des vieux partis, que l'empire n'est jamais venu se placer entre eux. »

Pendant les mois suivants, la discorde s'accentue. Maximilien promulgue deux décrets : l'un déclarant religion catholique « religion d'Etat », et assurant la plus ample tolérance tous les cultes conformes à la civilisation et aux bonnes mœurs ; l'autre chargeant le conseil d'Etat de réviser les actes du « desarmortization » et de nationalisation des biens ecclésiastiques et de valider ceux qui sont réguliers.

Le nonce résiste. A son instigation, quatre évêques mexicains adressent un mémoire au souverain, se plaignant de ce qu'une solution, si contraire aux intérêts de l'Eglise, est adoptée avant l'arrivée de la réponse de Rome. L'Empereur leur donne une leçon assez piquante :

(page 142) « La grande majorité de la Nation, dit-il, exige et a droit d'exiger cette solution. Sur ce point, je suis en position de juger avec plus de certitude que vous, Messeigneurs, parce que je viens de parcourir une grande partie de vos diocèses, tandis que vous êtes restés dans la capitale depuis votre retour d'exil,

« Je veux, avant de terminer, appeler votre attention sur une erreur, où vous êtes tombés. Vous dites que jamais l'Eglise mexicaine n'a pris part aux révolutions politiques. Plût à Dieu qu'Il en fut ainsi ! mais il existe de tristes témoignages, qui prouvent que les dignitaires mêmes de l'Eglise se sont jetés dans les révolutions. et qu'une partie du clergé a déployé une résistance très active contre l'Etat. Convenez, mes estimables prélats, que l'Eglise mexicaine, par une lamentable fatalité, s’est trop mêlée de la politique et des affaires des biens temporels, négligeant pour cela l'instruction catholique de ses ouailles.

« Oui, le peuple mexicain est pieux et bon ; mais il n'est pas encore en grande partie catholique dans le vrai sens du saint Evangile, et ce n'est pas sa faute. Il a besoin qu'on l'instruise, qu'on lui administre les Sacrements, comme le veut l'Evangile, gratuitement... »

Les ministres et le chef du cabinet de Maximilien, qui appartiennent au parti libéral, agissent en haine des réactionnaires. leurrent l'Empereur. ils lui persuadent que les intentions du Pape sont méconnues, quand ils savent parfaitement le contraire.

« J'ai interrogé Carolus, écrit à Eloin, le 30 mars 1865, J. Devaux, chef du cabinet du Roi des Belges, sur les dispositions qu'il rencontrait à votre endroit autour de lui à Rome. Il est fort lié avec Mgr. Bérardi, qui est chargé d'étudier la question mexicaine. Ce Mgr lui a dit que le Pape est fort irrité et qu'il travaille à le calmer. Carolus est tombé sur Mgr. Meglia, dont on prend très faiblement la défense. Il est évident que les nouvelles, venues du Mexique aujourd'hui, vont accroître la colère et que vos rapports avec Rome vont subir une crise.

(page 143) « Il est difficile de juger d'ici si vous avez eu raison de brusquer les choses, quant au fond, mais quant à la forme, je continue à croire que vous avez été trop peu diplomatique.

« La lettre de l'Empereur aux Evêques, inutile selon moi, parce qu'une communication verbale suffisait, était légèrement gouailleuse et avait quelque chose de cavalier... » (Papier Eloin.)

« En réalité, cette appréciation émane du roi Léopold Ier, qui ne voulant pas adresser un blâme direct à son gendre, le transmet par son cabinet. L'influence du vieux souverain est paralysée par une lettre de Napoléon à Maximilien :

« Je dois d'abord féliciter V. M. de l'énergie qu'Elle a montrée dans l'affaire des biens du clergé, tout en regrettant qu'elle n'ait pas, en arrivant sur le sol mexicain, considéré la chose comme déjà faite par le gouvernement provisoire. Elle n'aurait pas ainsi pris sur Elle, l'animosité d'une partie du clergé. Mais, maintenant que la chose est faite, il faut redoubler d'énergie et de fermeté et employer tous ses efforts pour mettre à exécution le nouveau décret. » (Archives de Vienne : Lettre du 1er mars 1865.)

A la fin de mai pendant un séjour de l'Empereur et de l'Impératrice à Orizaba, Mgr. Meglia annonce son départ par ordre exprès du Saint-Siège. Le gouvernement n'en veut rien croire, assurant que le Nonce a été blâmé par la Cour de Rome pour sa raideur dans les négociations. et qu'il a au contraire reçu l'ordre de rester à son poste. Appuyés sur des renseignements inexacts ou agissant de mauvaise foi, les ministres prétendent qu'il y a une divergence complète de vues entre la Nonciature et le Pape. Aussi, quand le départ du prélat se réalise, (page 144) au palais comme au ministère, c'est l'étonnement d'un fait « qui ne pouvait être prévu. »

« Mon nouveau collègue de France, M. Dano, rapporte le ministre de Belgique à Mexico, m'a raconté que dans la nuit qui a précédé son départ d'Orizaba, où il a eu l'honneur d'être reçu par l'Empereur, un billet de M. Ramirez est venu le réveiller.

« Le Ministre d'Etat lui disait qu'un télégramme lui annonçait le départ immédiat du Nonce et il demandait si c'était une coquetterie diplomatique ? M. Dano est convaincu que le gouvernement impérial est mal informé et, reçu hier par l'Impératrice, il a demandé la permission de parler de cette question, mais l'attitude de S. M. a été telle, me dit-il, que je me suis arrêté court. » (Archives du Ministère des affaires étrangères. Rapport de M. Blondeel de Culenbrouck, du 28 mai 1868.)

Le nonce part le 25 mai et ce départ fait grande impression dans le public. En vain, le gouvernement s'efforce-t-il d'arrêter les articles des journaux : le fait est connu et fâcheusement commenté.

Dans un espoir d'entente. Maximilien envoie en mission à Rome, le Ministre d'Etat Velasquez de Léon, afin d'offrir le restant des domaines ecclésiastiques non encore vendus, avec le droit pour les congrégations d'acquérir des terres sous certaines conditions. Cette démarche n'aboutit pas. A Rome, comme on craint de paraître trop intéressé, on justifie la résistance par une autre cause :

« Carolus, écrit J. Devaux à Eloin le 28 Juillet 1865, en causant avec Antonelli, lui a demandé ce qui avait si fort blessé la Cour de Rome. Il lui a été répondu que c'était la liberté des cultes proclamée. On pouvait la tolérer, mais la proclamer, c'était par trop fort dans un pays comme le Mexique. (Papiers d'Eloin.)

(page 145) Ainsi, ce que le pape admet pour la France, la Belgique, etc., il le refuse au Mexique. Théorie singulière !

Si l'on examine le débat avec impartialité, on trouve des torts de part et d'autre. L'Empereur devait savoir que les négociations, auxquelles donnèrent lieu les Concordats conclus avec la France, l'Autriche, le Portugal, l'Espagne, durèrent plusieurs années. (Archives de Vienne: Lettres de Mgr. Deschamps, archevêque de Malines à l'Impératrice Charlotte.). Il n'était donc pas vraisemblable que Mgr. Meglia aurait des pouvoirs suffisants pour conclure immédiatement un acte de même importance. Après avoir commis la faute de ne pas traiter lui-même cette affaire à Rome, il aurait dû, en constatant le retard apporté à l'envoi du Nonce, transmettre une copie du projet de Concordat au Saint-Siège, qui aurait pu l'étudier. De plus, cet acte avait été élaboré par le gouvernement en collaboration avec l'abbé Testory, aumônier en chef de l'armée française, sans en référer à l'épiscopat mexicain. Ce procédé froissa naturellement la susceptibilité des évêques indigènes et contribua à augmenter leur opposition.

Maximilien aggrave encore la discorde, en remettant en vigueur les lois promulguées précédemment, soumettant les bulles et brefs de la cour pontificale à l'exequatur - ou permis d'exécution - du ministre de la Justice, mesure qui souleva toujours les protestations des papes. C'était jeter de l'huile sur le feu.

Quant au pape, après avoir écrit en 1862 diverses lettres à Maximilien et à Charlotte pour les encourager à tenter l'entreprise mexicaine, tout à coup il change de politique, il n'appuie plus son candidat. Il suit aveuglément les suggestions du clergé mexicain, dont les mœurs relâchées et la négligence ne méritent pas cette confiance, A son exemple, il se montre intransigeant, irréductible. Bismarck a défini la politique, « l'art de s'accommoder aux circonstances et de tirer parti de tout, (page 146) même de ce qui vous déplaît. Or, le pape savait que Napoléon avait reconnu officiellement les ventes de biens ecclésiastiques régulièrement effectuées au Mexique et qu'il avait imposé à Maximilien par un traité, le respect des actes posés par ses généraux.

Malgré cela, il exige que, dès son arrivée, le nouvel empereur, combattu militairement par une partie de la nation, politiquement par une partie de ses adhérents et qui n'est maintenu que par les armées françaises, viole ses engagements et donne ainsi motif à Napoléon de retirer ses troupes, ce qui est son secret désir. Si Mgr. Meglia avait été un politique, il aurait négocié et obtenu outre l'entretien du culte et de ses ministres par l'Etat, la restitution des biens non encore vendus qui s'élevaient à plus d'un milliard, et peut-être même certains avantages en compensation du surplus du dommage subi.

Le clergé mexicain n'avait pas cru restaurer une monarchie quelconque, mais bien créer un empire catholique, qui lui rendrait l'enseignement, l'état civil et l'intégrité de son patrimoine. Frustré dans ses espérances. il commence contre Maximilien une campagne violente. Tous les moyens sont employés pour combattre le gouvernement impérial et soulever les populations contre l'armée française. Charlotte expose la situation à Eugénie :

« Je ne sais si V. M. sait que le Saint Père, qui a le caractère enjoué, dit de lui-même, qu'il est un jettatore.

« Eh bien c'est un fait que depuis que son envoyé a mis le pied sur notre sol, nous n'avons eu que des déboires et nous n'en attendons pas un nombre moindre dans un avenir prochain.

« L'énergie et la persévérance ne nous manquent pas, je crois, mais je suis à me demander si les difficultés continuent à augmenter de cette façon, s'il aura possibilité humaine d'en sortir. En effet, voici l'état des choses tel qu'il est : le clergé, blessé mort par la (page 147) lettre du 27 décembre, n'est pas facile abattre, tous les vieux abus se coalisent pour éluder l'effet des dispositions de l'Empereur vis-à-vis de lui. Il y a dans ces éléments, non peut-être du fanatisme, mais une telle ténacité inconnue ailleurs, sourde et manœuvrière, que je crois impossible que les membres actuels du clergé puissent jamais en former un nouveau. Ce qu'on fera d'eux, voilà ce que je me demande. Lorsque Napoléon I obtint du pape la démission des évêques émigrés, ils vivaient à l'étranger et en saints personnages. Ils se résignèrent. Ceux que nous avons ici, quitteraient volontiers leur siège et leur crosse, mais pas leurs revenus. Un traitement de l'Etat ne leur rapporterait jamais autant, et leur idéal est de vivre en Europe avec leur argent, pendant que nous bataillons ici pour fixer la position de l'Eglise.

« Les biens vendus vont être révisés, seconde pomme de discorde, car par la reconnaissance des lois de réforme, nous nous sommes mis les conservateurs sur les bras. Aujourd'hui, nous allons avoir les libéraux à dos, car ils sont adjudicataires. ainsi que, je le crois, quelques résidents français. Comme il ne peut y avoir qu'un poids et une mesure pour tous, ceux qui se sont livrés à diverses opérations illicites vont devoir restituer leurs gains, et je crains que cette œuvre de réparation et de justice excitera autant les passions que la perte des biens pour le clergé.

« Cela jette une triste lumière sur les hommes de ce pays, car il est bien clair que ce n'est pas de la religion qu’il s'agit chez ceux qui s'en prétendent les champions. Je n'ai jamais cru que tout ce feu flamberait si vite, il est vrai qu'il couvait depuis longtemps sous la cendre.

« La tâche de réduire un clergé corrompu est fort ingrate et j'aurais préféré, pour ma part, que le gouvernement précédent s'en fut chargé. Il n'y a pas de fourberie que n'invente l'esprit du mal pour conseiller la résistance et l'obstination. »

Bazaine, dans un rapport à Maximilien du 3 novembre, confirme la mentalité déplorable du clergé, dont beaucoup de membres n'ont aucune vocation et ne sont entrés dans les ordres que pour acquérir la jouissance des revenus de l'Eglise.

(page 148) « L'influence du clergé m'est signalée comme s'exerçant d'une manière fâcheuse et peu propre inspirer aux populations des idées d'ordre et de moralité. Certains prêtres vivent publiquement avec femmes et enfants ; d'autres refusent la sépulture aux malheureux, dont les familles ne peuvent acquitter les frais d'enterrement, dont les prix sont loin d'être modiques.

« On parle tout haut de donations arrachées à des esprits faibles pour doter telle église ou tel couvent. » (Lettre de Bazaine à Napoléon.)

Ajoutons encore que l'état de démoralisation du clergé est également attestée par le général du Barrail, catholique fervent :

« Mon billet de logement, raconte-il, me conduisit chez le curé. Ses habitudes ne ressemblent guère à la manière de vivre de notre bon clergé français. Il y avait dans la maison, je ne sais combien de femmes, des jeunes, des vieilles, des créoles, des Indiennes et je n'ai jamais pu démêler la nature de leurs fonctions. Le soir, j'entendais tout ce monde jacasser dans une chambre et, de temps en temps, la voix de basse-taille du padre dominait dans la volière... Et je m'endormais, en me remémorant une vieille histoire d'aumônier. Cet homme avait à son service deux gouvernantes, l'une de 22 ans, l'autre de 24 ans. Et comme son évêque l’engageait se contenter d'une seule servante, ayant l’âge canonique : « - Eh Monseigneur, répondit-il, je suis en règle, seulement ma gouvernante est en deux volumes. » Ce n'était pas deux volumes, c'était une bibliothèque complète que possédait le bon padre de Choluta. (Général du Barrail, ouvr. cité, t. II, p. 423.)

« Dans l'Etat de Oaxaca. pour ne scandaliser personne, les prêtres se marient. Quelques évêques gémissent de ces excès, sans chercher à y remédier.

(page 149) « Certains les encouragent par leur bonhomie. Un de ces prélats, passant par un village, fut accueilli par le curé qui lui dit : « - Monseigneur, ayez la bonté de bénir mes enfants et leur mère ».

« Le bon évêque les bénit : il y en avait plein la chambre. » (Domenech, ouvr. cité, p. 130.)

Par suite du manque d'instruction, les dogmes de la religion ont subi des atteintes sérieuses. Le catholicisme mexicain présente un caractère idolâtre : Le culte des saints et des madones absorbe la dévotion du peuple, qui ne songe plus à Dieu. Dans les églises, il y a un laisser aller déplorable. Les Indiens entendent la messe avec les animaux qu'il portent au marché ! Le glou-glou des dindons. le kikiriki des coqs, les aboiements des chiens. se mêlent au ramage des oiseaux, qui ont élu domicile sous les voûtes.

Aux grandes fêtes des saints, les indigènes se livrent dans les églises à des danses et des contorsions peu orthodoxes. Un aumônier du corps expéditionnaire vit ainsi à San Luis de la Paz 24 jeunes filles et 24 jeunes gens danser dans le chœur sous les yeux du curé. Un personnage masqué, déguisé en diable, dirigeait les figures du ballet. Et comme le français s'étonnait que de tels ébats s'exécutent dans l'église : « - Les anciennes coutumes. répliqua le curé, sont respectables. Il est bon de les conserver ; il faut seulement les empêcher de dégénérer en orgie. »

On voit que l'unique souci du nonce n'aurait pas dû se borner à la revendication des biens ecclésiastiques et que beaucoup d'autres réformes religieuses s'imposaient.

Il est difficile de dire si l'appui du pape eut sauvé l'Empire, mais la campagne. menée par le clergé, le perdit sûrement. Une grande coalition se conclut entre (page 150) tous les partis d'opposition contre celui qu'on appelle « l'Etranger » , et auquel on impute tous les maux. Marchant en aveugle, les catholiques poursuivent un seul but : la révocation des funestes lois de réforme. Ils ne s'aperçoivent pas qu'ils contribuent à la victoire de Juarez, l'ennemi acharné de l'Eglise. Et pour avoir voulu trop, ils n'obtiennent que le retour au pouvoir du parti radical, qui complète son triomphe par la séparation de l'Eglise et de l'Etat, l'expulsion des Jésuites et des ordres religieux étrangers, la multiplication des écoles laÎques, etc. etc.

Après avoir tant exigé de l'Empire, Mgr. Labastida, craignant une nouvelle expulsion, devint très humble devant Juarez. li déclara que tous les possesseurs des anciens biens du clergé étaient pardonnés par le ciel et par lui, s'ils payaient à l'Eglise une petite aumône, qu'il appela la « Contenta » (l'accommodement). (E. Ollivier, ouvr. cité. p. 32. Note.)

Plus tard. frappé à son tour par le malheur et prisonnier volontaire au Vatican, Pie IX dut songer avec tristesse aux deux infortunés qui, sur ses encouragements, abandonnant famille et patrie, entreprirent la croisade sacrée qui se termina dans le sang et la folie, Il dut regretter d'avoir par son intransigeance et ses atermoiements contribué à détruire le rêve des Impératrices, et rejeter le Mexique au milieu de troubles qui perdurent encore de nos jours.